Tribunal canadien des droits de la personne

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Tribunal canadien des droits de la personne

Entre :

Société de soutien à l’enfance et à la famille des Premières Nations du Canada

- et -

Assemblée des Premières Nations

les plaignantes

- et -

Commission canadienne des droits de la personne

la Commission

- et -

Procureur général du Canada (Représentant le ministre des Affaires indienne et du Nord canadien)

l'intimé

- et –

Chefs de l’Ontario

- et –

Amnistie Internationale

les parties intéressées

Décision sur requête

Membres : Sophie Marchildon, Réjean Bélanger et Edward P. Lustig

Date : Le 16 octobre 2012

Référence : 2012 TCDP 24


I.                   LE CONTEXTE

[1]               Les plaignantes ont déposé une plainte relative aux droits de la personne, alléguant que le financement inéquitable des services de bien-être à l’enfance fournis dans les réserves des Premières Nations était assimilable à de la discrimination fondée sur la race et l’origine nationale ou ethnique, ce qui est contraire à l’article 5 de la Loi canadienne sur les droits de la personne, LRC 1985, c H‑6 (la Loi). Le 22 décembre 2009, la Société de soutien à l’enfance et à la famille des Premières Nations du Canada (la SSEFPN) a signifié un avis de requête en modification de la plainte de façon à ce que celle-ci inclue des allégations de représailles, ce qui est contraire à l’article 14.1 de la Loi (la requête en modification de la plainte). Le 7 février 2011, Mme Cindy Blackstock, directrice administrative de la Caring Society et de la SSEFPN, a déposé une seconde plainte relative aux droits de la personne, alléguant que l’intimé avait exercé des représailles. Cette plainte se situe actuellement au stade de la Commission canadienne des droits de la personne (la Commission) et n’a pas encore été renvoyée au Tribunal.

[2]               Compte tenu de la requête datée du 21 décembre 2009 que l’intimé a déposée en vue de faire rejeter la plainte au motif que les questions soulevées excèdent la compétence du Tribunal (la requête relative à la compétence) ainsi que de la décision datée du 14 mars 2011, publiée sous la référence 2011 TCDP 4, par laquelle le Tribunal a fait droit à cette requête, le Tribunal ne s’est jamais prononcé sur la requête en modification de la plainte. La décision 2011 TCDP 4 du Tribunal a par la suite été l’objet d’une demande de contrôle judiciaire auprès de la Cour fédérale et, le 18 avril 2012, cette dernière a annulé la décision et renvoyé l’affaire à un membre instructeur différent du Tribunal pour nouvelle décision, conformément à ses motifs (2012 CF 445).

[3]               Le 10 juillet 2012, une formation constituée de trois membres du Tribunal, soit Mme Marchildon et MM. Lustig et Bélanger, a été désignée pour entendre la présente affaire (2012 TCDP 16). Dans une lettre datée du 16 juillet 2012, l’avocat de la SSEFPN a porté à l’attention du Tribunal la requête, datée du 22 décembre 2009, qui visait à faire modifier la plainte , laquelle requête est l’objet de la présente décision.

II.                Les allégations de représailles

[4]               Les plaignantes soutiennent que, depuis qu’elles ont déposé la plainte initiale, l’intimé a exercé des représailles contre Mme Blackstock. Le 9 décembre 2009, allèguent-elles, Mme Blackstock a été invitée par les Chiefs of Ontario à assister à une réunion avec M. David McArthur, dans les bureaux du MAINC, au sujet du financement des services de bien-être à l’enfance en Ontario. Elle était l’une des cinq personnes qui avaient été invitées par les Chiefs of Ontario à assister à cette réunion à titre d’aide technique. À l’arrivée de Mme Blackstock, M. David McArthur lui a dit qu’il savait qu’elle avait un certain nombre de [traduction] « doléances » au sujet des services de bien-être à l’enfance, dont une plainte relative aux droits de la personne, et qu’il préférerait la rencontrer à un autre moment. M. McArthur a clairement dit qu’il refuserait de rencontrer les Chiefs of Ontario si Mme Blackstock était présente. Il a été demandé à cette dernière d’attendre à l’extérieur de la salle de réunion, dans l’aire d’accueil, pendant que se déroulait la réunion. Aucune autre personne invitée à fournir un soutien technique aux Chiefs of Ontario n’a été exclue de la réunion. Mme Blackstock a écrit le 15 décembre 2009 au ministre Chuck Strahl pour lui faire part de l’incident en détail et demander qu’on lui explique pourquoi elle avait été exclue.

[5]               Selon les plaignantes, ce n’était pas la première fois que l’on empêchait Mme Blackstock de fournir un soutien à des organismes qui avaient besoin de son expertise. Un incident semblable était survenu en 2008, quand la British Columbia Children and Family Services Association (la BCCFSA) avait invité Mme Blackstock à lui fournir un soutien lors des négociations entourant l’établissement d’un modèle de financement amélioré avec des hauts fonctionnaires du MAINC. Ces derniers avaient refusé de se réunir avec la BCCFSA si Mme Blackstock était présente parce que celle-ci avait déposé une plainte contre le MAINC.

[6]               De plus, Mme Blackstock soutient qu’en décembre 2009 elle a appris que des hauts fonctionnaires du MAINC et du ministère de la Justice surveillaient sa page Facebook personnelle et privée. Des courriels internes du MAINC obtenus à la suite de diverses demandes présentées en vertu de la Loi sur l’accès à l’information et de la Loi sur la protection des renseignements personnels établissent un lien entre la surveillance de sa page Facebook et de son compte Twitter personnels et une tentative visant à découvrir [traduction] « d’autres mobiles » pour le dépôt de la plainte relative aux droits de la personne des plaignantes. Mme Blackstock explique que ces transgressions de sa vie personnelle constituent une forme d’intimidation qui pourrait avoir une incidence sur l’équité du processus suivi devant le Tribunal. Les plaignantes soutiennent qu’avant le dépôt de la plainte relative aux droits de la personne, Mme Blackstock était régulièrement consultée par des hauts fonctionnaires du MAINC et travaillait en collaboration avec le Ministère à divers projets et études destinés à améliorer le sort des enfants des Premières Nations qui étaient pris en charge.

III.             Les positions des parties

La position des plaignantes

[7]               Les plaignantes font valoir que le paragraphe 3(2) des Règles de procédure du Tribunal canadien des droits de la personne (les Règles de procèdure) confère au Tribunal un vaste pouvoir discrétionnaire quant à la manière de trancher les requêtes et précise qu’il est possible de modifier en tout temps une plainte avant le début d’une audience par souci de célérité ainsi qu’en vue de promouvoir les droits procéduraux des parties : Canada (Commission des droits de la personne) c. Association canadienne des employés de téléphone, 2002 CFPI 776, aux paragraphes 30 à 32. Le critère à appliquer pour décider s’il y a lieu de permettre que l’on modifie la plainte a été énoncé par le Tribunal dans la décision Virk c. Bell Canada, 2004 TCDP 10, au paragraphe 7 : « […] [L]e critère à appliquer consiste à déterminer si les allégations de représailles sont, de par leur nature, liées, du moins par le plaignant, aux allégations qui ont donné lieu à la plainte initiale et peuvent être considérées comme soutenables. » Pour arriver à cette conclusion, le Tribunal « ne devrait pas s’engager dans un examen approfondi du bien-fondé de la modification »; il devrait plutôt autoriser la modification, sauf s’il est manifeste et évident que les allégations n’ont aucune chance de succès : Bressette c. Conseil de bande de la Première nation de Kettle et Stony Point, 2004 TCDP 02, au paragraphe 6. La décision Gaucher c. Forces armées canadiennes, 2005 TCDP 1, aux paragraphes 10 et 12, reconnaît qu’étant donné que la compétence qu’exerce le Tribunal sur une plainte découle d’un renvoi fait par la Commission, il doit y avoir certaines limites à l’étendue des modifications; cette contrainte « n’est toutefois qu’un aspect de l’affaire » car « les tribunaux qui traitent des droits de la personne ont adopté une démarche libérale à l’égard des modifications », une démarche qui cadre avec la nature réparatrice de la LCDP.

[8]               Les plaignantes font valoir que les allégations de représailles sont manifestement liées à la plainte de la Caring Society. En fait, M. McArthur a expressément déclaré que Mme Blackstock n’était pas autorisée à être présente dans la salle de réunion à cause de la plainte relative aux droits de la personne de la Caring Society. Indépendamment des raisons pour lesquelles M. McArthur s’est exprimé ainsi, un plaignant raisonnable aurait considéré ce traitement préjudiciable comme des représailles : Witwicky c. Compagnie des chemins de fer nationaux du Canada, 2007 TCDP 25. Par ailleurs, les plaignantes soutiennent que l’intimé ne subira aucun préjudice si l’on apporte la modification en vue d’ajouter les allégations de représailles car il sait depuis un certain temps que les prétentions des plaignantes ont été l’objet de représailles et il a eu l’occasion de répondre à ces allégations peu après l’incident. Par ailleurs, obliger le Tribunal à trancher séparément les allégations de représailles provoquerait un dédoublement des procédures, qui mettrait en cause les mêmes parties, des éléments de preuve qui se recoupent ainsi que des questions interreliées. Les plaignantes ajoutent que le préjudice que l’intimé pourrait subir par suite de la modification de la plainte en vue d’y inclure les allégations de représailles serait contrebalancé par le préjudice qu’elles-mêmes subiraient par suite de la séparation artificielle de ces allégations connexes en de multiples instances. Si la requête en modification de la plainte est accueillie, les plaignantes conviennent de demander conjointement à la Commission de mettre en suspens la plainte de représailles dont elle est actuellement saisie, en attendant qu’une décision soit rendue sur le fond de la plainte modifiée.

 

La position de l’intimé

[9]               L’intimé est d’avis que le fait de modifier à ce stade-ci la plainte pour y inclure des allégations de représailles serait faire abstraction du mécanisme de plainte établi en vertu de la Loi et priver les parties de cette procédure. La plainte de représailles fait actuellement l’objet d’une enquête par la Commission et, au cours de cette enquête, l’intimé aura sa première occasion de répondre au fond de la plainte et d’exposer sa version des faits. Ce n’est qu’une fois que la Commission aura conclu son enquête, après avoir tenu compte des éléments de preuve soumis, qu’elle décidera soit de rejeter la plainte, soit de la renvoyer au Tribunal. Selon l’intimé, si l’on fait droit à la requête en modification de la plainte, toutes ces étapes seront court‑circuitées, et cela aura pour résultat de le priver d’une occasion de répondre à la plainte et de compromettre ainsi son droit à l’équité procédurale au stade de l’enquête.

[10]           L’intimé soutient également que le fait de modifier la plainte aurait pour résultat d’élargir la portée de cette dernière et de supplanter la Commission dans son rôle, ce qui lui serait donc préjudiciable. Selon lui, la nature sous-jacente des deux plaintes déposées en l’espèce est différente : la plainte initiale a trait à des allégations de financement concernant les services de bien-être à l’enfance fournis aux enfants des Premières Nations vivant dans les réserves, et la plainte de représailles a trait à des allégations découlant d’échanges personnels entre la directrice administrative de la Caring Society et des hauts fonctionnaires du gouvernement fédéral. L’intimé est d’avis que le lien entre les plaintes est insuffisant pour justifier que l’on modifie la plainte initiale à ce stade de l’instance et que le Tribunal devrait autoriser la Commission à décider de manière complète et éclairée si, dans les circonstances, il est justifié que le Tribunal instruise la plainte de représailles.

IV.             La position de la Commission

[11]           La Commission prétend que le rejet de la requête concernant la modification de la plainte permettrait à un intimé d’exercer des représailles contre les représentants d’organismes de bienfaisance qui ont déposé des plaintes au nom de victimes. À son avis, la Loi doit être interprétée de manière libérale et téléologique de façon à protéger le dirigeant ou le représentant d’un organisme de bienfaisance que l’on identifie à une plainte : Hydro-Québec c. Syndicat des employé-e-s de techniques professionnelles et de bureau d’Hydro-Québec, section locale 2000, 2008 CSC 43.

[12]           Comme l’indique l’article 14.1 de la Loi, « [c]onstitue un acte discriminatoire le fait […] d’exercer ou de menacer d’exercer des représailles contre le plaignant ». En l’espèce, en signant la plainte initiale, Mme Blackstock est le « plaignant » et il faudrait donc qu’elle bénéficie de la même protection contre des représailles que les enfants des Premières Nations pour le compte desquels elle a signé. Toute autre interprétation aurait pour résultat que tous seraient protégés contre de présumées représailles, à l’exception des parties qui déposeraient des plaintes représentatives pour le compte des victimes. Par ailleurs, la Commission est d’avis que la preuve dénote que Mme Blackstock a été identifiée comme plaignante par l’intimé.

V.                L’analyse et la décision

[13]           Il est bien établi en droit que le Tribunal a la capacité de modifier une plainte. Dans la décision Canada (Procureur général) c. Parent, 2006 CF 1313, la Cour fédérale a confirmé ce principe, au paragraphe 30 :

Le Tribunal jouit d’une discrétion considérable relativement à l’instruction des plaintes en vertu des paragraphes 48.9(1) et (2) et des articles 49 et 50 de la Loi. En ce qui a trait à l’exercice de cette discrétion pour traiter d’une demande d’amendement, dans l’arrêt Canderel Ltée c. Canada (C.A.), [1994] 1 C.F. 3, 1993 IIJCan 2990 (C.A.F.), le juge Robert Décary a rappelé que : « […] la règle générale est qu’une modification devrait être autorisée à tout stade de l’action aux fins de déterminer les véritables questions litigieuses entre les parties, pourvu, notamment, que cette autorisation ne cause pas d’injustice à l’autre partie que des dépens ne pourraient réparer, et qu’elle serve les intérêts de la justice ».

[14]           Quant à la question de modifier une plainte de façon à pouvoir examiner des allégations de représailles dans le cadre de la même instance que celle qui a trait aux allégations de discrimination qui sont à l’origine de la plainte initiale, le Tribunal en a déjà traité dans la décision Kavanagh c. S.C.C. (31 mai 1999), T505/2298 (T.C.D.P.). Au paragraphe 9 de cette décision, la présidente du Tribunal a repris le raisonnement appliqué par la Commission d’enquête de l’Ontario dans Entrop c. Imperial Oil Limited (1994) 23 C.H.R.R. D/186 en disant qu’il [traduction] « serait difficile au plan pratique, inefficace et injuste d’exiger que les personnes présentent des allégations de représailles seulement dans le cadre d’une procédure distincte ». Pour décider s’il y a lieu de faire droit à la modification, le Tribunal se doit de décider si « les allégations de représailles sont, de par leur nature, liées, du moins par le plaignant, aux allégations qui ont donné lieu à la plainte initiale et peuvent être considérées comme soutenables » : Virk c. Bell Canada, 2004 TCDP 10, au paragraphe 7; voir aussi Fowler c. Flicka Gymnastics Club, 31 C.H.R.R. D/397 (B.C.H.R.C.), Cook c. Première nation d’Onion Lake, [2002] C.H.R.R. no 12, au paragraphe 17, ainsi que Tran, Cam-Linh (Holly) c. Agence du revenu du Canada, 2010 TCDP 31, au paragraphe 18.

[15]           En plus d’établir un lien entre la plainte et la modification, il faut aussi que le Tribunal examine le préjudice que pourrait subir l’intimé si l’on autorisait la plaignante à modifier sa plainte. Comme il a été indiqué dans la décision Parent, précitée, au paragraphe 40 :

La question du préjudice est le facteur prédominant a être considéré dans de telles circonstances. L’amendement ne doit pas être accordé s’il cause un préjudice à l’intimé. Ici, bien que la plainte ait pu être amendée à un stade moins avancé des procédures, rien dans la preuve n’indique que les Forces canadiennes n’étaient en mesure de se préparer et de faire valoir sa position sur les questions soulevées. L’amendement n’a causé aucun préjudice à l’intimée et dans les circonstances, la prépondérance des inconvénients penche en faveur du défendeur Alain Parent.

[16]           En l’espèce, les membres instructeurs sont d’avis que le fait de procéder à une audition de la plainte initiale et de tenir par la suite une audience distincte en vue de traiter des allégations de représailles ferait obstacle à la bonne administration de la justice et les empêcherait d’instruire les plaintes sans formalisme et de façon expéditive dans le respect des principes de justice naturelle et des règles de pratique, ainsi que le prescrit le paragraphe 48.9(1) de la Loi. Par ailleurs, les allégations de représailles des plaignantes découlent de la même matrice factuelle que celle de la plainte initiale car les deux plaintes ont en commun les mêmes plaignantes et les représailles alléguées sont liées au dépôt de la plainte initiale contre l’intimé.

[17]           Par ailleurs, les membres instructeurs sont d’avis que la modification ne portera pas préjudice à l’intimé car celui-ci a eu amplement le temps et aura amplement l’occasion de répondre aux allégations de représailles que les plaignantes ont formulées. Instruire la plainte initiale et les allégations de représailles dans le cadre de la même instance, plutôt que de séparer artificiellement les allégations en de multiples instances, est une option qui est favorable à toutes les parties et qui sert l’intérêt de la justice.

[18]           Pour les motifs qui précèdent, la requête en modification de la plainte est accueillie. L’intimé aura la possibilité de modifier son exposé des précisions par la voie d’une demande présentée au Tribunal et les autres parties pourront déposer une réponse. À la réception de la demande de l’intimé, la présidente de la formation fixera des délais pour le dépôt des précisions modifiées.

 

Signée par

Sophie Marchildon

Présidente de la formation collégiale

 

Réjean Bélanger

Membre instructeur

 

Edward P. Lustig

Membre instructeur

Ottawa (Ontario)

Le 16 octobre 2012


Tribunal canadien des droits de la personne

Parties au dossier

Dossier du tribunal : T1340/7008

Intitulé de la cause : Société de soutien à l’enfance et à la famille des Premières Nations du Canada et al. c. Procureur général du Canada (pour le ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien)

Date de la décision sur requête du tribunal : Le 16 octobre 2012

Comparutions :

Paul Champ, pour la Société de soutien à l’enfance et à la famille des Premières Nations du Canada, la plaignante

David Nahwegahbow et Stuart Wuttke, pour l’Assemblée des Premières Nations, la plaignante

Daniel Poulin et Samar Musallam, pour la Commission canadienne des droits de la personne

Jonathan Tarlton, Melissa Chan et Edward Bumburs, pour l'intimé

Michael Sherry, pour les Chefs de l’Ontario, partie intéressée

Justin Safayeni, pour Amnistie Internationale, partie intéressée

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