Tribunal canadien des droits de la personne

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Entre :

Tim Day

le plaignant

- et -

Commission canadienne des droits de la personne

la Commission

- et -

Société canadienne des postes

l'intimée

Décision

Membre : Karen A. Jensen
Date : Le 19 octobre 2007
Référence : 2007 TCDP 43

Table des matières

I Introduction.

II Quels sont les faits à l’origine de la plainte ?.

III Quels sont les questions en litige en l’espèce ?.

A. Quels sont les critères juridiques applicables en l’espèce?.

B. Analyse des questions en litige.

(i) Postes Canada a-t-elle réglé la question du port obligatoire de bottes à embout d’acier de façon discriminatoire?.

(ii) Postes Canada a‑t‑elle commis un acte discriminatoire contre M. Day quand elle l’a mis en congé de maladie et l’a expulsé du lieu de travail en novembre 2001?.

(iii) L’obligation pour les EL5 de remettre un formulaire sur l’entretien préventif chaque vendredi était‑elle discriminatoire?.

(iv) Était‑il discriminatoire de refuser à M. Day l’autorisation d’échanger ses quarts avec M. Iroume?.

(v). Était-il discriminatoire d’exiger que M. Day travaille de nuit en avril 2002?.

(vi) Était-il discriminatoire de mettre fin à l’emploi de M. Day chez Postes Canada en mai 2002?.

(vii) Postes Canada a-t-elle commis un acte discriminatoire en supprimant le poste d’EL5 de M. Day?.

(viii). Était‑il discriminatoire de supprimer le poste de MAM11?.

(ix) Était-il discriminatoire d’affecter M. Day à un poste de facteur de relève?.

(x). M. Day a‑t‑il été victime de harcèlement fondé sur sa déficience?.

IV. Quelle est le redressement approprié?.

A. Indemnité pour préjudice moral

B. Indemnité pour conduite délibérée ou inconsidérée.

C. Intérêts.

D. Frais juridiques.

I. Introduction

[1] Tim Day est ingénieur électronicien agréé. Il travaille chez la Société canadienne des postes depuis 19 ans. En 1994, il est tombé malade et on a diagnostiqué chez lui une dépression, des troubles d’anxiété et une personnalité obsessionnelle-compulsive. Il est retourné au travail en 1995. Depuis ce temps, la relation d’emploi entre Postes Canada et M. Day est tendue. Il croit que Postes Canada n’a jamais accepté sa déficience psychique et le traite différemment des autres employés en raison de sa déficience.

[2] M. Day soulève dix allégations de discrimination, laquelle se serait produite entre avril 2001 et août 2006. Les allégations portent sur l’aptitude psychologique de M. Day à travailler, sur l’obligation que lui impose Postes Canada de travailler de nuit, sur la cessation de son emploi ainsi que sur diverses instances de traitement discriminatoire et de harcèlement fondés sur sa déficience.

[3] M. Day invoque les articles 7 et 14 de la Loi canadienne sur les droits de la personne. L’article 7 énonce que constitue un acte discriminatoire, s’il est fondé sur un motif de distinction illicite, le fait, de refuser de continuer d’employer un individu ou de le défavoriser. L’article 14 dispose que constitue un acte discriminatoire, s’il est fondé sur un motif de distinction illicite, le fait de harceler un individu.

[4] Des dix allégations de discrimination soulevées par M. Day, une seule est étayée. Postes Canada a traité M. Day différemment des employés non handicapés quand elle l’a mis en congé de maladie et l’a expulsé du lieu de travail en novembre 2001. Bien que la preuve soutient la décision de Postes Canada de lui faire quitter le lieu de travail, la Société n’a pas traité M. Day avec dignité et respect au cours du processus d’accommodement. Les autres allégations de M. Day ne sont pas fondées.

[5] Après un bref exposé des faits ayant donné lieu à la plainte, je présenterai les allégations de M. Day et je me pencherai sur elles tour à tour. Finalement, j’exposerai les motifs du redressement que j’ai ordonné.

II. Quels sont les faits à l’origine de la plainte ?

[6] En avril 1986, Postes Canada a embauché M. Day à titre de mécanicien aux Services techniques du Centre de traitement du courrier de Glanford (CTCG) à Victoria. En 1992, il a été promu au niveau EL5, un poste de technicien spécialiste au sein des Services techniques. Les EL5 accomplissent les tâches les plus difficiles de réparation et d’entretien des machines chez Postes Canada. Ils doivent aussi superviser jusqu’à vingt employés.

[7] À l’automne 1995, M. Day a souffert d’une grave dépression. Il a dû prendre congé pendant dix mois. Il est retourné au travail graduellement, mais sa réintégration ne s’est pas déroulée sans heurts. Il a éprouvé des problèmes avec la direction de Postes Canada sur un certain nombres de question relatives au milieu travail.

[8] Une de ces questions est l’obligation de porter des bottes à embout d’acier. La réparation et l’entretien de machinerie peuvent être dangereux. Pour cette raison, Postes Canada exige que les employés des Services techniques portent toujours des bottes à embout d’acier. M. Day ne peut pas le faire en raison d’un trouble au pied. Bien que Postes Canada ait pris une mesure d’accommodement relativement à son trouble au pied, M. Day a estimé que Postes Canada a géré le processus de façon discriminatoire.

[9] Un autre différend entre M. Day et Postes Canada concernait l’obligation de travailler selon des quarts chez Postes Canada. Quand il a été promu au niveau EL5 en 1992, M. Day ne travaillait que l’après‑midi, de 15 h à 23 h.

[10] En 1997, Postes Canada a instauré un système de quarts de travail par roulement. À partir de cette date, tous les EL5, sauf ceux détenant un poste d’[traduction]électronicien spécialiste, ont été obligés de respecter l’horaire des quarts de travail suivants en cycles de 12 semaines :

  1. le quart de jour, appelé le premier quart, de 7 h à 15 h;
  2. le quart d’après-midi, appelé le deuxième quart, de 15 h à 23 h;
  3. le quart de nuit, appelé le troisième quart, de 23 h à 7 h. 

[11] M. Day éprouvait des difficultés à travailler pendant les quarts de nuit chez Postes Canada. De 1996 à l’automne 2001, M. Day et ses médecins ont été d’avis que le travail de nuit aggravait ses symptômes de dépression. Au cours de cette période, Postes Canada a dispensé M. Day de l’obligation de travailler de nuit lorsqu’il produisait une note de son médecin attestant qu’il ne pouvait travailler de nuit. Il l’a fait chaque fois qu’il devait travailler de nuit au cours de cette période, bien qu’il ait tenté à deux reprises de travailler quelques fois la nuit.

[12] À l’automne 2001, il était prévu que M. Day amorce un nouveau cycle de quarts de nuit. Comme il l’avait fait auparavant, il a produit une note de son médecin faisant état de son incapacité à travailler de nuit. Cette fois, cependant, Postes Canada a mis en doute le fait que M. Day ait en permanence besoin d’être dispensé du quart de nuit. Postes Canada a, de manière temporaire, permis à M. Day de travailler l’après‑midi, mais elle a envoyé la note à Medisys, la société d’experts‑conseils en soins de santé qui s’occupe de toutes les questions de santé et sécurité au travail chez Postes Canada, pour un examen plus approfondi.

[13] Medisys a demandé des renseignements médicaux supplémentaires. M. Day a été envoyé chez le Dr Miller, un psychiatre de Victoria, pour subir un examen médical indépendant (EMI). Dans son rapport daté du 11 octobre 2001, le Dr Miller a fait savoir que M. Day souffrait d’une dépression récidivante majeure dont il n’était pas entièrement guéri. Il a recommandé un changement dans sa médication ainsi qu’une thérapie cognitivo‑comportementale. Le Dr Miller a déclaré que le fait pour M. Day de travailler selon des quarts rotatifs aggraverait son état mental. Il a également fait part de ses inquiétudes relativement à la sécurité au travail si les différends de M. Day avec la direction n’étaient pas résolus rapidement.

[14] Le 16 novembre 2001, Postes Canada a cru que la santé psychologique de M. Day s’était détériorée au point où M. Day représentait une menace pour la sécurité du milieu de travail. M. Day a été envoyé chez lui à la fin de son quart avec une lettre déclarant qu’il n’était pas apte au travail et serait mis en congé de maladie.

[15] M. Day est retourné au travail le 21 novembre 2001, avec une note du médecin attestant qu’il était apte au travail. Postes Canada n’a pas accepté la note et M. Day a été expulsé du lieu de travail. Son superviseur, M. Bob Ormerod, l’a informé qu’il devait obtenir de son médecin une note confirmant qu’il respectait les recommandations de traitement du Dr Miller et qu’il était apte à retourner au travail.

[16] Le 3 décembre 2001, le médecin de M. Day a confirmé que ce dernier suivait le traitement recommandé par le Dr Miller et que son état s’améliorait grâce au traitement. Cependant, il a affirmé que M. Day ne devrait travailler que de jour.

[17] Le Dr Hamm, le médecin de Medisys, ne convenait pas avec le médecin de M. Day qu’il était nécessaire de rendre permanente l’exemption des quarts de nuit. Le Dr Hamm croyait que l’état de M. Day allait selon toute probabilité s’améliorer grâce à la nouvelle médication. Sa dépression serait en rémission et il serait en mesure d’effectuer les trois quarts de travail, y compris le quart de nuit. Il a présenté son opinion à Postes Canada dans un rapport d’examen daté du 4 décembre 2001.

[18] M. Day est retourné au travail le 11 décembre 2001. Son horaire ne prévoyait pas de quarts de nuit avant avril 2002. Toutefois, avant cette date, plusieurs incidents se sont produits, lesquels ont préoccupé M. Day.

[19] Le 16 janvier 2002, Postes Canada a donné à M. Day un préavis d’entrevue de 24 heures où il allait être discuté du fait qu’il n’avait pas appliqué de manière satisfaisante le système d’entretien préventif. La machinerie de Postes Canada fait l’objet d’entretien préventif afin qu’elle demeure en état de marche. M. Day devait fournir des renseignements relatifs à l’accomplissement de cette tâche. Il a refusé de le faire et a été sanctionné en conséquence.

[20] Également en janvier 2002, M. Day a demandé à Postes Canada la permission d’échanger son bloc de douze semaines de quarts d’après‑midi avec le bloc d’un collègue EL5 qui devait passer aux quarts de jour. Postes Canada a refusé d’accéder à sa demande.

[21] Vers le 10 avril 2001, M. Day a fourni à Postes Canada une note de son médecin attestant que, pour des raisons de santé, il ne devait pas travailler la nuit. M. Ormerod, le chef des Services techniques et de l’Ingénierie à Victoria, l’a informé que la note du médecin ne suffirait pas à l’exempter des quarts de nuit. Il a également affirmé que les plus récents renseignements médicaux faisaient état de sa capacité à travailler la nuit et qu’on s’attendait à ce qu’il le fasse.

[22] M. Day a travaillé pendant une partie des quarts de nuits à plusieurs reprises. Puis, le 25 avril 2002, il est parti avant la fin de son quart et s’est absenté pour cause de maladie le lendemain. Il a été suspendu sans salaire pendant trois jours pour avoir refusé de travailler de nuit.

[23] Le 27 mai 2002, Postes Canada a mis fin à l’emploi de M. Day. Pour justifier son congédiement, Postes Canada a invoqué l’omission de M. Day de se présenter au travail ou d’expliquer de façon acceptable son absence.

[24] M. Day a déposé un grief relativement à son congédiement. Les parties en sont venues à un règlement selon lequel M. Day retournerait progressivement au travail à partir du 16 mai 2003. Il ne travaillait que de jour.

[25] En 2004, Postes Canada a jugé que les Services techniques avaient deux employés en trop. Le 23 septembre 2004, Postes Canada a informé le syndicat que deux postes EL5 seraient déclarés excédentaires. Cette situation entraînerait l’élimination du poste de M. Day. 

[26] M. Day était obsédé par l’idée de prouver que son poste avait été supprimé parce qu’il avait une déficience. Ses symptômes de dépression et d’anxiété se sont accentués. Il est parti en congé de maladie à nouveau le 27 octobre 2004.

[27] Le 1er novembre 2004, le poste de M. Day ainsi que celui d’un autre EL5 ont été déclarés surnuméraires. M. Day a été informé qu’il serait transféré à un poste de PO4, soit un poste de trieur de courrier au Centre de traitement du courrier de Glanford à Victoria. M. Day n’a jamais occupé cette fonction depuis le début de son congé de maladie le 27 octobre 2004.

[28] En mars 2005, alors qu’il était en congé de maladie, M. Day a postulé un poste vacant de MAM11 aux Services techniques de Victoria. Il s’agissait d’un poste de mécanicien. M. Sarbjit Sangha, le directeur des Services techniques de Vancouver, a par la suite informé M. Day et son syndicat que le poste de MAM11 avait été supprimé. Par conséquent, M. Day n’était pas admissible au poste de MAM11.

[29] En mai 2006, M. Day a postulé un poste de facteur à Victoria. Bien qu’il ait réussi à obtenir l’itinéraire qu’il avait demandé, il l’a plus tard perdu en raison d’une réorganisation des itinéraires. En fin de compte, il a été affecté à un poste de facteur de relève, un poste qui ne lui plaisait pas.

[30] M. Day consulte un psychiatre, le Dr David Swan, à Victoria depuis septembre 2002. Le Dr Swan a affirmé dans son témoignage que, après avoir essayé un certain nombre de médicaments, il a conclu que le trouble dépressif de M. Day ne pourrait se régler entièrement par médication. M. Day continue d’éprouver des symptômes qui ne disparaîtront pas complètement. Cependant, le Dr Swan a témoigné que M. Day était apte à retourner au travail, de jour, depuis novembre 2004.

[31] La personnalité obsessive-compulsive de M. Day se traduit par des attentes très élevées envers lui-même et envers les autres. Quand son rendement ou celui d’une autre personne ne répond pas à ces attentes, cela peut engendrer de la frustration, de l’anxiété et de la dépression. M. Day a tendance à ressasser les questions qui le préoccupent. Toutefois, cette maladie n’affecte pas la capacité de M. Day à agir de manière responsable au travail. Elle n’affecte pas non plus sa capacité à accomplir ses fonctions.

III. Quels sont les questions en litige en l’espèce ?

[32] En l’espèce, il faut répondre aux questions suivantes :

  1. Postes Canada a-t-elle commis un acte discriminatoire contre M. Day en exigeant le port de bottes à embout d’acier en avril 2001?
  2. Postes Canada a-t-elle commis un acte discriminatoire contre M. Day quand elle l’a mis en congé de maladie et l’a expulsé du lieu de travail en novembre 2001?
  3. Postes Canada a-t-elle commis un acte discriminatoire contre M. Day dans ses rapports sur l’entretien préventif en janvier 2002?
  4. Était-il discriminatoire de refuser à M. Day l’autorisation d’échanger ses quarts avec un collègue en janvier 2002?
  5. Était-il discriminatoire d’exiger que M. Day travaille de nuit en avril 2002?
  6. Était‑il discriminatoire de mettre fin à l’emploi de M. Day chez Postes Canada en mai 2002?
  7. Postes Canada a‑t‑elle commis un acte discriminatoire contre M. Day en novembre 2004 quand elle a supprimé son poste d’EL5?
  8. Était‑il discriminatoire de supprimer le poste de MAM11 en mars 2005?
  9. Était‑il discriminatoire d’affecter M. Day à un poste de facteur de relève en 2006?
  10. M. Day a‑t‑il été victime de harcèlement fondé sur sa déficience?

A. Quels sont les critères juridiques applicables en l’espèce?

[33] Lorsqu’il y a allégation de discrimination, le plaignant doit d’abord établir prima facie qu’il y a discrimination (Commission ontarienne des droits de la personne et al. c. La municipalité d’Etobicoke, [1982] 1 R.C.S. 202). Il y a preuve prima facie quand le plaignant présente une preuve qui porte sur les allégations qui ont été faites et qui, si on leur ajoute foi, est complète et suffisante pour justifier un verdict en faveur du plaignant, en l’absence de réplique de l’employeur intimé (Commission ontarienne des droits de la personne et O’Malley c. Simpson-Sears Ltd. [1985] 2 R.C.S. 536).

[34] Quand la discrimination a été établie prima facie, il incombe à l’intimé de présenter une explication raisonnable qui démontre que l’acte ne s’est pas produit tel qu’allégué ou qu’il n’était pas discriminatoire (Morris c. Canada (Forces armées canadiennes), 2005 CAF 154, au paragraphe 26). Si l’intimé fournit une explication raisonnable, il incombe au plaignant de démontrer que cette explication n’est qu’un prétexte à la discrimination (Basi c. Compagnie des chemins de fer nationaux du Canada (no 1) (1988), 9 C.H.R.R. D/5029, au paragraphe 38474 (T.C.D.P.)).

[35] L’acte peut être considéré non discriminatoire si l’employeur montre qu’il découle d’une exigence professionnelle justifiée. L’exigence professionnelle justifiée est une règle ou une ligne de conduite établie de bonne foi parce qu’elle est jugée nécessaire pour l’atteinte d’un objectif de travail valable. Une exigence professionnelle ne sera considérée comme étant justifiée que si l’employeur prouve que les mesures destinées à répondre aux besoins d’une personne constituent une contrainte excessive en matière de santé, de sécurité et de coûts (alinéa 15(1)a) et paragraphe 15(2) de la Loi).

[36] Pour établir si l’exigence professionnelle justifiée a été établie conformément à la LCDP, le Tribunal doit prendre en considération les principes énoncés par la Cour suprême du Canada dans les arrêts Colombie‑Britannique (Public Service Employee Relations Commission) c. B.C.G.S.E.U., [1999] 3 R.C.S. 3 (Meiorin), et Colombie‑Britannique (Superintendent of Motor Vehicles) c. Colombie‑Britannique (Council of Human Rights), [1999] 3 R.C.S. 868 (Grismer).

B. Analyse des questions en litige

(i) Postes Canada a-t-elle réglé la question du port obligatoire de bottes à embout d’acier de façon discriminatoire?

La preuve prima facie

[37] En 1993, M. Day a fourni une note d’un médecin, laquelle faisait état d’un trouble au pied l’empêchant de porter des bottes à embout d’acier de manière continue. Il avait pris l’habitude de porter des chaussures de sport qu’il changeait pour des bottes à embout d’acier uniquement dans les aires où il y avait risque de blessure.

[38] En janvier 2001, M. Steve Clark, le coordonnateur des Services techniques, a diffusé une note de service à tous les employés des Services techniques, dans laquelle il était précisé qu’ils étaient tenus de porter des bottes à embout d’acier en tout temps dans le secteur des Services techniques.

[39] Après la diffusion de la note de service, il a été demandé à M. Day de fournir une nouvelle note de médecin. Postes Canada lui a donné un préavis de 24 heures le convoquant à une entrevue où il serait question de son incapacité à porter des bottes à embout d’acier. Après qu’il eut été établi que M. Day ne pouvait porter de manière continue rien qui remplaçait adéquatement les bottes à embout d’acier, il lui a été permis de continuer à porter des chaussures de sport dans le centre.

[40] M. Day n’a pas contesté la solution au problème. Par contre, il s’est plaint du processus qui l’a obligé à obtenir une nouvelle note du médecin, à se présenter à une entrevue avec Postes Canada et à avoir à chercher d’autres bottes, ce qui constituait une différence de traitement négative fondée sur sa déficience. Il a eu l’impression que Postes Canada s’est servie du port obligatoire de bottes à embout d’acier comme prétexte pour le traiter de façon négative parce qu’il est handicapé.

[41] M. Iroume, un collègue de M. Day, a affirmé dans son témoignage que d’autres employés portaient parfois des chaussures de sport dans le Centre. Ils n’ont pas eu à se présenter à une entrevue à ce sujet.

[42] M. Day a établi prima facie que le préavis de 24 heures le convoquant à une entrevue sur son incapacité à porter des bottes à embout d’acier constituait une différence de traitement négative fondée sur sa déficience. M. Day a été amené à croire qu’il pourrait faire l’objet de mesures disciplinaires s’il était incapable de porter des bottes à embout d’acier. Il a également été obligé de chercher des bottes à embout d’acier qu’il aurait pu porter de façon continue alors qu’il semble que d’autres employés ne portaient pas toujours de bottes à embout d’acier.

L’explication de l’intimée

[43] Je suis persuadé que les actes de Postes Canada relativement au port obligatoire de bottes à embout d’acier n’étaient fondés que sur des préoccupations légitimes en matière de sécurité. La réparation et l’entretien de grosses machines chez Postes Canada exposent les travailleurs à un risque de blessures. Les bottes à embout d’acier protègent contre les blessures. M. Clark avait reçu l’ordre du comité national de santé et de sécurité d’appliquer vigoureusement l’exigence. Il devait établir si, huit ans après les derniers renseignements médicaux, M. Day avait encore un trouble au pied. M. Clark devait également établir s’il existait d’autre chaussures de protection que M. Day aurait pu porter de manière continue.

[44] À mon sens, le fait que les besoins de M. Day aient été clarifiés en lui donnant un préavis de 24 heures ne fait pas du processus un traitement différent défavorable. M. Clark a expliqué que, chez Postes Canada, les préavis de 24 heures convoquant à une entrevue ne constituent pas une mesure disciplinaire. Au contraire, ils fournissent à Postes Canada une occasion de faire part de ses préoccupations à un employé et à l’employé, ainsi qu’à son représentant syndical, l’occasion de répondre à ces préoccupations. Si, à la suite de l’entrevue, on parvient à une résolution satisfaisante du problème, il ne s’ensuit aucune sanction disciplinaire et le préavis n’est pas consigné au dossier de l’employé. Dans le cas de M. Day, il a été répondu de manière satisfaisante aux préoccupations de Postes Canada. Des mesures d’accommodement ont été prises pour M. Day.

[45] Bien qu’il puisse être vrai, comme l’a affirmé M. Iroume, que les employés des Services techniques ne portent pas toujours leurs bottes à embout d’acier, M. Day et M. Clark ont fourni une preuve selon laquelle M. Day était le seul employé des Services techniques qui avait l’habitude de toujours porter des chaussures de sport qu’il changeait pour des bottes à embout d’acier dans certains secteurs du Centre.

[46] J’accepte l’explication de M. Clark voulant que ce soit l’habitude de M. Day de porter des chaussures de sport qui l’ait emmené à se demander s’il pouvait être fait quelque chose pour que M. Day porte des chaussures protectrices plus souvent. Il n’a pas visé M. Day et ne l’a pas traité différemment en raison de sa déficience. Il avait des préoccupations légitimes an matière de santé et de sécurité et il devait aborder la question avec M. Day.

[47] Par conséquent, Postes Canada a fourni une explication satisfaisante à la première allégation de M. Day.

(ii) Postes Canada a‑t‑elle commis un acte discriminatoire contre M. Day quand elle l’a mis en congé de maladie et l’a expulsé du lieu de travail en novembre 2001?

La preuve prima facie

[48] Le 16 novembre 2001, M. Day devait se rendre à une entrevue sur des questions de rendement au travail qu’avait soulevées Postes Canada dans un préavis de 24 heures. L’entrevue a plutôt été annulée avant même son début. M. Day a été envoyé chez lui à la fin de son quart avec une lettre annonçant qu’il avait été mis en congé de maladie.

[49] M. Day a témoigné avoir été stupéfié d’apprendre qu’il était mis en congé de maladie. Il ne se sentait pas malade. Il croyait que cet acte faisait partie du plan de Postes Canada visant à le chasser parce qu’il est handicapé.

[50] Le 21 novembre 2001, M. Day est revenu au travail avec une note de son médecin attestant qu’il était [traduction] bien et apte à travailler. Il a fait sa journée de travail, puis, à la fin, M. Ormerod a crié son nom depuis l’autre bout du plancher. Quand M. Ormerod s’est approché de M. Day, il lui a dit qu’il ne devait pas travailler, que la note de son médecin ne suffisait pas et qu’il devait quitter les lieux immédiatement. M. Ormerod l’a ensuite escorté jusqu’à la sortie du bâtiment. M. Day a témoigné que cet incident l’avait beaucoup embarrassé.

[51] M. Day a affirmé qu’une des parties les plus vexantes de cette série d’incidents était le fait qu’il ne comprenait pas pourquoi il était envoyé chez lui. La lettre qu’il avait reçue le 16 novembre 2001 mentionnait que Postes Canada éprouvait des inquiétudes de bonne foi concernant son aptitude au travail à la suite d’observations et de l’avis professionnel du Dr Hamm.

[52] La lettre que Postes Canada a remise à M. Day le 21 novembre 2001, le jour où il a été escorté jusqu’à la sortie du bâtiment, faisait savoir qu’il ne lui serait pas permis de revenir au travail jusqu’à ce qu’il ait une preuve médicale montrant qu’il suivait le traitement recommandé par le Dr Miller dans son rapport d’EMI.

[53] Cependant, ni M. Day ni son médecin n’ont reçu le rapport d’EMI du Dr Miller avant le 23 novembre 2001 et ce n’est pas avant que ses représentants syndicaux aient rencontré Postes Canada le 28 novembre 2001 que M. Day a appris que Postes Canada estimait qu’il représentait un risque à la sécurité au travail.

[54] M. Day a soutenu qu’il n’avait jamais été violent envers lui‑même ou envers d’autres personnes au travail. Il a déclaré que, s’il avait vraiment représenté un risque, cela aurait été à sa propre sécurité. Il a affirmé que, bien que l’entrevue du 16 novembre 2001 l’ait contrarié, son comportement était lent plutôt qu’agité, car il avait pris des médicaments contre l’anxiété pour se calmer. Il a jugé que Postes Canada n’avait aucun motif de le mettre en congé de maladie ou de l’expulser du lieu de travail en novembre 2001.

[55] J’estime que M. Day a établi prima facie qu’il y a eu acte discriminatoire au sens de l’alinéa 7b) de la Loi, soit qu’il a été défavorisé en cours d’emploi en raison de sa déficience. Postes Canada a jugé que M. Day représentait un risque à la sécurité et était inapte à travailler alors que le propre médecin de M. Day était d’avis que celui‑ci était en fait apte à travailler. On lui a refusé le droit de retourner au travail, bien qu’il ait présenté une preuve de son aptitude à travailler. Il a fait l’objet d’une humiliante expulsion de son lieu de travail, en présence de ses collègues. Ni lui ni son médecin n’avaient reçu les renseignements nécessaires pour répondre aux préoccupations qui ont mené à l’expulsion de M. Day par Postes Canada.

L’explication de l’intimée

[56] Postes Canada a soutenu que, à l’époque en cause, la preuve montrait que M. Day représentait un risque sérieux à sa propre sécurité et à celle des autres travailleurs. Il aurait constitué une contrainte excessive de lui permettre de demeurer sur les lieux ou de l’avoir informé en détail des motifs de son expulsion. Par conséquent, mettre M. Day en congé de maladie et lui interdire de revenir au travail en novembre 2001 constituait une exigence professionnelle justifiée, selon Postes Canada.

[57] Selon l’alinéa 15(1)a) et le paragraphe 15(2) de la Loi, l’expulsion du plaignant de son lieu de travail ne peut pas être considérée comme étant fondée sur une exigence professionnelle justifiée sauf si l’intimée établit que les mesures destinées à répondre aux besoins de M. Day auraient constitué une contrainte excessive en matière de coûts, de santé et de sécurité.

[58] Le risque est un facteur à prendre en considération pour déterminer si une mesure d’accommodement constitue une contrainte excessive (Colombie‑Britannique (Superintendent of Motor Vehicles) c. Colombie‑Britannique (Council of Human Rights) (Grismer), [1999] 3 R.C.S. 868, au paragraphe 30). Quand il est question de sécurité, tant l’importance du risque que l’identité de ceux qui y sont exposés constituent des facteurs pertinents (Central Alberta Dairy Pool c. Alberta (Human Rights Comm.) (1990), 12 C.H.R.R. D/417, au paragraphe 62).

[59] J’estime que la preuve en l’espèce établit que, le 16 novembre 2001, tant la gravité et l’importance du risque à la sécurité de M. Day ou à la sécurité des autres travailleurs étaient telles que Postes Canada n’avait d’autre choix que d’envoyer M. Day chez lui.

[60] Le rapport du Dr Miller indique que l’état psychologique de M. Day était très instable à ce moment. Il craignait que M. Day puisse devenir violent si ses griefs au travail n’étaient pas résolus.

[61] Un jour avant d’envoyer M. Day chez lui en congé de maladie, Postes Canada lui avait donné un préavis de 24 heures le convoquant à une entrevue, préavis dans lequel étaient énumérés les aspects de son rendement au travail qui étaient source de préoccupation. Mme Jenica Epp, une infirmière de Medisys, a témoigné que M. Day était venu la voir avant son entrevue du 16 novembre 2001. Il lui a semblé tendu, anxieux et troublé. Elle a déclaré qu’il avait des tics nerveux évidents à l’œil et au visage. Elle ne se sentait pas à l’aise en sa présence et elle avait peur.

[62] M. Clark a également prétendu que, au cours des semaines précédant le 16 novembre 2001, il a remarqué que M. Day était plus agité et tendu qu’à l’habitude. Il a déclaré qu’il s’était inquiété de la stabilité psychologique de M. Day à l’époque.

[63] J’accepte que Postes Canada a l’obligation d’assurer la sécurité et le bien-être de tous ses employés au lieu de travail. Par conséquent, les employés qui représentent un risque à leur propre sécurité ou à celle des autres doivent quitter le lieu de travail et ne peuvent y revenir avant d’avoir établi, au moyen d’une preuve médicale acceptable, qu’ils ne représentent plus une telle menace. Les mesures destinées à répondre aux besoins de M. Day au travail auraient constitué une contrainte excessive, car elles auraient exposé M. Day ou les autres employés à un risque sérieux d’être blessés.

[64] Avant d’autoriser le retour au travail de M. Day, Postes Canada devait avoir du médecin de M. Day l’assurance que ce dernier suivait le traitement recommandé par le Dr Miller et qu’il ne représentait plus un risque à la sécurité. Aucune des notes produites par M. Day ne fournissait cette assurance. Encore une fois, étant donné l’importance et la gravité du risque à la sécurité des travailleurs en l’espèce, je conclus qu’il aurait constitué une contrainte excessive de permettre à M. Day de revenir au travail le 21 novembre 2001.

[65] Cependant, l’examen visant à établir s’il a été satisfait à l’obligation de prendre des mesures d’accommodement ne s’arrête pas ici. Cette obligation comprend un aspect qui a trait à la procédure et un aspect qui a trait à la teneur (Meiorin, au paragraphe 66). La Cour suprême a statué que la procédure adoptée pour étudier la question de l’accommodement doit être prise en considération indépendamment de la teneur lorsqu’il faut établir s’il a été satisfait ou non à l’obligation.

[66] L’omission de satisfaire à l’un des deux aspects n’entraîne pas nécessairement une violation de la Loi. Tant la procédure appliquée dans l’examen et les résultats tangibles de cet examen doivent être pris en considération pour établir si l’employeur a satisfait à ses obligations prévues à la Loi (Meiorin, au paragraphe 66; Datt c. McDonald’s Restaurants of Canada Ltd., 2007 BCHRT 324; Gordy c. Painter's Lodge (no 2), 2004 BCHRT 225).

[67] Dans Irvine c. Canada (Forces armées canadiennes), 2005 CAF 432, la Cour d’appel fédérale a fait savoir que l’aspect procédural compris dans l’obligation de prendre des mesures d’accommodement nécessitait une évaluation juste de la preuve médicale disponible relativement à la capacité du plaignant d’accomplir ses tâches.

[68] À mon avis, l’équité dans le processus d’accommodement ne se limite pas à un examen juste de la capacité du plaignant à accomplir ses tâches. La notion d’équité comprend plutôt toutes les facettes du processus d’accommodement. Elle nécessite le respect de la valeur et de la dignité inhérentes de l’individu tout au long du processus, dans la mesure où cela ne cause aucune contrainte excessive (Meiorin, au paragraphe 62).

[69] La question en l’espèce est de savoir si M. Day a été traité équitablement dans l’application de la norme en question ci‑dessus, soit le renvoi du lieu de travail lorsqu’il y a risque de violence ou de comportement dangereux. Pour les motifs qui suivent, je conclus qu’il n’a pas été traité équitablement.

1. Ni M. Day ni son médecin n’ont reçu en temps opportun une copie du rapport d’EMI à l’origine de la décision d’envoyer M. Day chez lui.

[70] Le psychiatre ayant effectué l’EMI, le Dr Miller, a examiné M. Day le 11 octobre 2001. À plusieurs reprises au début novembre, M. Day a demandé le rapport d’EMI tant à Postes Canada qu’à Medisys. Ses demandes sont demeurées sans réponse, le rapport n’a été envoyé au médecin de M. Day que le 20 novembre 2001.

[71] M. Ormerod affirme que le rapport d’EMI a été envoyé au médecin de M. Day le 20 novembre 2001. En raison d’un problème avec le télécopieur du médecin de M. Day, celui‑ci n’a pas reçu le rapport avant le 23 novembre 2001. Cependant, rien n’explique pourquoi le rapport n’a pas été envoyé au médecin de M. Day avant le 20 novembre 2001.

[72] En raison de l’omission de remettre le rapport d’EMI à temps, M. Day n’a pas su avant le 23 novembre 2001, quand son médecin a reçu le rapport, que le Dr Miller croyait qu’il ne recevait pas le bon traitement pour sa dépression et qu’il existait des inquiétudes relativement à sa sécurité au travail. Il a été pris complètement par surprise par l’avis lui annonçant qu’il n’était pas apte à travailler.

[73] Également en raison de l’omission de Postes Canada de fournir à temps à M. Day les renseignements dont il avait besoin, M. Day a dû subir l’humiliation d’être escorté jusqu’à la sortie du bâtiment le 21 novembre 2001, parce que la note de son médecin ne répondait pas aux inquiétudes de Postes Canada. Encore une fois, M. Day n’avait aucune idée de ce que voulait Postes Canada, car son médecin n’avait pas encore reçu le rapport d’EMI.

[74] Il ne peut être affirmé en toute certitude que, si le rapport d’EMI avait été fourni à temps au médecin de M. Day, les résultats auraient été différents en l’espèce. Cependant, compte tenu de l’affirmation de M. Day selon laquelle il a commencé à suivre le traitement recommandé par le Dr Miller immédiatement après avoir reçu le rapport et compte tenu du témoignage du médecin selon lequel M. Day répondait bien à la médication, il est tout à fait possible que les incidents de novembre aient pu être évités si le rapport avait été communiqué dès sa remise par Medisys.

2. Le médecin de M. Day n’a pas été informé que M. Day avait été mis en congé de maladie le 16 novembre 2001.

[75] M. Ormerod et M. Clark, les superviseurs de M. Day, ont soutenu que M. Day n’avait pas été informé des craintes de l’entreprise relativement à sa sécurité et qu’ils ne l’avaient pas laissé prendre part à la décision de l’envoyer chez lui le 16 novembre 2001 parce qu’ils craignaient que cela ne le perturbe davantage. M. Clark a affirmé n’avoir rien dit à M. Day parce que [Traduction] personne n’aime se faire dire qu’il constitue un risque à la sécurité. Je conviens que, le 16 novembre 2001, Postes Canada était dans une situation critique et devait prendre une décision difficile à propos des renseignements à communiquer à M. Day. Par conséquent, la décision de ne pas informer M. Day de tous les motifs à l’origine de son expulsion peut être justifiée.

[76] Cependant, Postes Canada n’a pas expliqué de manière satisfaisante pourquoi le médecin de M. Day n’avait pas été informé qu’il existait des inquiétudes sérieuses à propos de la santé mentale de M. Day et que celui‑ci était considéré comme représentant un danger pour lui‑même et les autres le 16 novembre 2001. M. Ormerod a déclaré que les renseignements concernant la santé mentale et la sécurité des employés ne devaient pas être communiqués directement à l’employé par son employeur, mais par une personne du domaine de la santé.

[77] Pourquoi alors les graves inquiétudes de Postes Canada relativement à la santé mentale de M. Day n’ont‑elles pas été communiquées immédiatement au médecin de M. Day?

[78] Le Dr Hamm a déclaré n’avoir pas informé le médecin de M. Day de ce qui s’était produit le 16 novembre 2001 parce qu’il n’avait pas estimé qu’il s’agissait d’une urgence. Il croyait simplement que M. Day devait rentrer chez lui où il pouvait retrouver son calme. Toutefois, à mon sens, si la situation était suffisamment urgente pour envoyer M. Day chez lui sans l’en informer de tous les motifs, la situation était suffisamment urgente pour alerter le médecin de M. Day. Après tout, la propre santé de M. Day était à risque. Le rapport du Dr Miller est assez vague pour ce qui est du potentiel de violence de M. Day. Il est très possible de l’interpréter de manière à ce qu’il signifie que M. Day puisse être violent envers lui‑même. L’omission d’informer le médecin de M. Day que ce dernier était envoyé chez lui parce qu’il représentait un risque à la sécurité révèle, selon moi, un manque de considération assez insensible envers le bien‑être de M. Day.

[79] En conséquence, j’estime que Postes Canada n’a pas traité M. Day équitablement en novembre 2001. Il a été traité comme un risque à la sécurité plutôt que comme un être humain ayant besoin d’être informé et soutenu. Bien qu’il ne fût pas possible de prendre des mesures pour répondre aux besoins de M. Day au travail étant donné le risque à la sécurité qu’il représentait, Postes Canada n’a pas expliqué de façon satisfaisante pourquoi il n’a pas communiqué à temps le rapport d’EMI et le rapport d’examen à M. Day et à son médecin. De même, il n’a pas été prouvé que de communiquer au médecin de M. Day les inquiétudes de Postes Canada au sujet de la sécurité de M. Day aurait constitué une contrainte excessive.

[80] Par conséquent, Postes Canada n’a pas satisfait à l’aspect procédural de l’obligation de prendre des mesures d’accommodement. Bien que le manquement à cet aspect de l’obligation ne constitue pas nécessairement une violation de la Loi, je suis d’avis que, en l’espèce, les répercussions du manquement, tant pour ce qui est du résultat des incidents de novembre 2001 que de ses conséquences sur la dignité et l’estime de soi de M. Day, justifient une telle conséquence. Postes Canada n’a pas prouvé qu’elle a  pris, conformément à l’alinéa 15(1)a) et au paragraphe 15(2) de la Loi, les mesures pour répondre aux besoins de M. Day, sans qu’il en constitue une contrainte excessive. L’allégation de M. Day au sujet des incidents de novembre est donc étayée.

(iii) L’obligation pour les EL5 de remettre un formulaire sur l’entretien préventif chaque vendredi était‑elle discriminatoire?

La preuve prima facie

[81] En tant qu’EL5, M. Day devait attribuer et superviser les tâches relatives à l’entretien préventif (EP) effectué pendant le quart de jour. Le travail était assigné le lundi. Il devait être terminé à la fin de la semaine, sauf s’il y avait beaucoup de travail ou si le Centre était occupé. Les rapports sur l’état du travail (les formulaires d’EP) étaient entrés dans un système informatisé, lequel surveillait le travail d’entretien préventif effectué sur toutes les machines au Canada. L’EL5 recueillait les formulaires d’EP des employés sous sa supervision pendant le quart de jour et les remettait en même temps que le sien.

[82] De 1999 à 2001, l’EL5 pouvait remettre les formulaires d’EP à la direction pour leur entrée dans le système informatique le lundi suivant, après l’attribution du travail. Cette politique a changé en 2001. En janvier 2002, date à laquelle M. Day a recommencé à travailler pendant les quarts de jour, la direction s’attendait à ce que l’EL5 soumette les formulaires d’EP le vendredi de la semaine où le travail avait été attribué.

[83] M. Day n’a pas accepté le changement de politique. Il n’a pas accepté non plus la façon dont le changement avait été mis en œuvre. Il croyait que cela faisait partie de la campagne de Postes Canada visant à le traiter différemment parce qu’il est handicapé.

[84] M. Day n’a pas remis les formulaires d’EP de ses subalternes le vendredi 11 janvier 2002, comme il le devait. Il a remis uniquement le sien. En conséquence, Postes Canada a donné à M. Day un préavis de 24 heures le convoquant à une entrevue pour discuter de son omission d’appliquer correctement le système d’EP.

[85] À l’entrevue, on a souligné à M. Day qu’il n’était pas visé personnellement : tous les EL5 sont tenus de remettre leur propre formulaire d’EP ainsi que ceux de leurs subalternes le vendredi. M. Day a continué de ne remettre que le sien. En conséquence, il a été suspendu sans salaire pendant trois jours.

[86] M. Iroume a témoigné en faveur de M. Day. Il a affirmé que, lorsqu’il a commencé à travailler de jour en avril 2002, il n’a pas non plus remis ses formulaires d’EP le vendredi. Il a également reçu un préavis de 24 heures le convoquant à une entrevue et il lui a été ordonné de remettre les formulaires d’EP à temps. M. Iroume a affirmé s’être conformé aux exigences de Postes Canada après l’entrevue. Cependant, il a soutenu que Postes Canada lui avait donné un préavis de 24 heures et l’avait questionné seulement pour faire paraître légitimes les actes de Postes Canada envers M. Day.

[87] Le témoignage de M. Iroume à cet égard n’est pas crédible. Il reconnaît ne pas s’être conformé à l’exigence avant l’entrevue : il ne remettait qu’environ 15 % des formulaires d’EP pour son quart de travail. Après l’entrevue, quand Postes Canada lui a clairement ordonné de remettre les formulaires d’EP, ce chiffre a grimpé à 60 ou 70 %. M. Day, quant à lui, ne s’est pas conformé à la directive de Postes Canada. En conséquence, il a été sanctionné.

[88] Aucune preuve crédible n’étaye l’allégation selon laquelle M. Day a été traité différemment des autres employés en raison de sa déficience relativement au système d’entretien préventif. Par conséquent, M. Day n’a pas établi prima facie qu’il y avait discrimination.

(iv) Était‑il discriminatoire de refuser à M. Day l’autorisation d’échanger ses quarts avec M. Iroume?

La preuve prima facie

[89] En janvier 2002, M. Day a tenté d’échanger son bloc de douze semaines de quarts d’après‑midi contre le bloc de M. Guido Iroume, un collègue EL5 qui devait travailler de jour. M. Iroume préférait le quart d’après‑midi et M. Day préférait le quart de jour pour des raisons de famille et de santé. La demande a été refusée.

[90] Dans son témoignage, M. Day a affirmé qu’échanger un bloc entier de douze semaines était une pratique courante chez Postes Canada. M. Iroume a affirmé que, bien que les échanges de quarts fussent courants, la fréquence de cette pratique a diminué après la décision rendue par l’arbitre Blasina en avril 2002. Dans cette décision, l’arbitre Blasina a conclu que l’entreprise était tenue de faire travailler les EL5 selon les trois quarts de travail par roulement.

[91] M. Day a soutenu que le refus de Postes Canada d’accéder à sa demande visant à échanger des quarts de travail constituait une différence de traitement défavorable fondée sur sa déficience. Cependant, ni M. Day ni M. Iroume n’ont pu citer en exemple des personnes qui ont échangé un bloc entier. En outre, le témoignage de M. Iroume laisse fortement entendre que, si cette pratique a déjà existé, elle a changé après avril 2002. À ce moment, ni M. Day ni ses collègues n’ont eu l’autorisation d’échanger un bloc entier de quarts de travail. Rien ne laisse croire que la demande de changement de quarts a été refusée en raison de la déficience de M. Day.

[92] L’avocat de M. Day a soutenu que le refus d’accéder à la demande de changement de quarts constitue de la discrimination ayant un effet défavorable, car M. Day est incapable, en raison de sa déficience, de travailler pendant le quart d’après‑midi.

[93] Cependant, M. Day a affirmé n’avoir aucune difficulté à travailler pendant le quart d’après‑midi. Il a prétendu que, à ce moment là, il tentait d’éviter d’avoir à travailler pendant le quart de nuit, et non le quart d’après‑midi. Par conséquent, je conclus que M. Day n’a pas établi prima facie que le refus d’accéder à sa demande de changement de quart, ou le fait qu’il ait été obligé de travailler pendant le quart d’après‑midi en janvier 2002, constituait une différence de traitement défavorable fondée sur sa déficience.

(v) Était-il discriminatoire d’exiger que M. Day travaille de nuit en avril 2002?

La preuve prima facie

[94] De 1997 à avril 2002, M. Day a été exempté de l’obligation de travailler de nuit chez Postes Canada dès qu’il produisait une note d’un médecin attestant que sa déficience l’empêchait de le faire. Cependant, en avril 2002, Postes Canada a insisté pour qu’il travaille de nuit, car, selon l’entreprise, la preuve médicale la plus récente n’attestait pas que sa déficience l’empêchait de travailler de nuit.

[95] M. Day n’estimait pas être capable de travailler la nuit. Il croyait que la preuve médicale établissait clairement que le travail de nuit le rendait malade. Par conséquent, il n’a pas travaillé de nuit comme on l’exigeait en avril et mai 2002. En conséquence, Postes Canada lui a imposé une suspension de trois jours.

[96] M. Day a soutenu que l’obligation que lui imposait Postes Canada de travailler de nuit et la mesure disciplinaire appliquée en raison de son incapacité à travailler de nuit constituaient une différence de traitement défavorable fondée sur sa déficience, ce qui contrevient à l’alinéa 7b) de la Loi.

[97] Étant donné la preuve qui suit, j’estime que M. Day a établi prima facie qu’il y a eu différence de traitement défavorable pour ce qui est de la présente allégation.

[98] Des éléments de preuve médicale appuient l’affirmation de M. Day selon laquelle les quarts de nuit aggravent ses symptômes de dépression et d’anxiété. Dans le rapport d’EMI du 11 octobre 2001, le Dr Miller a écrit que le travail par quart risquait de faire empirer l’état psychologique de M. Day plutôt que de l’améliorer. Il a mentionné que la dépression de M. Day n’était pas en rémission et qu’elle n’avait pas été traitée adéquatement.

[99] Dans un rapport d’examen daté du 30 octobre 2001, le Dr Hamm de Medisys a affirmé que M. Day devait éviter le travail de nuit. Il y déclarait également que M. Day devait suivre les recommandations de traitement du Dr Miller.

[100] Le 3 décembre 2001, le médecin de M. Day faisait savoir que, bien que M. Day répondît bien à la nouvelle médication et fût en mesure de retourner au travail, il ne devait travailler que de jour. Contrairement, semble‑t‑il, à ce qu’il écrivait dans son rapport d’examen du 30 octobre 2001, le Dr Hamm n’était pas d’accord. Il a déclaré qu’il n’appuyait pas la mesure d’accommodement permanente permettant à M. Day de ne travailler que de jour. 

[101] En janvier 2002, M. Day a commencé à consulter un nouveau médecin de famille, le Dr Cook, parce que son médecin précédent avait quitté le pays. Le 10 avril 2002, le Dr Cook a fourni à son patient une note où il était écrit : [traduction] Il est recommandé que ce patient ne travaille pas la nuit pour des raisons de santé. M. Day et Mme Andrew, l’agente des griefs du STTP, ont témoigné que la note avait été envoyée par télécopie à Postes Canada le 15 avril 2002 à partir du bureau du syndicat.

[102] M. Ormerod a nié avoir reçu cette note. Cependant, le témoignage de M. Clark à cet égard est plus convaincant. Il a soutenu que ni M. Ormerod ni lui n’ont reçu cette note et que, s’il l’avait reçue, il l’aurait transmise à M. Ormerod.

[103] De plus, le 15 avril 2002, M. Ormerod a écrit à M. Day pour lui dire que la note de son médecin datée du 15 avril 2002 ne suffirait pas à l’exempter du quart de nuit. Il est peu probable que M. Ormerod ait fait une telle déclaration sans avoir reçu la note. Par conséquent, j’estime que M. Ormerod a reçu une note du médecin de M. Day, laquelle faisait savoir que, pour des raisons de santé, il était recommandé que M. Day ne travaille pas de nuit. 

[104] M. Day a présenté à Postes Canada une preuve médicale attestant son incapacité à travailler de nuit en avril 2002 en raison de sa déficience. Postes Canada a refusé d’accepter la note de son médecin et a plutôt insisté pour qu’il continue à travailler la nuit. La preuve produite par M. Day laisse entendre qu’il a été puni parce qu’il ne pouvait pas travailler de nuit. Pour ces motifs, j’estime que M. Day a établi prima facie qu’il a été traité différemment d’une manière qu’il l’a défavorisé en raison de sa déficience.

L’explication de l’intimée

[105] Après avoir examiné soigneusement la preuve en l’espèce, je conclus que Postes Canada n’a pas commis d’acte discriminatoire envers M. Day en lui imposant une suspension de trois jours pour avoir refusé de travailler de nuit. Postes Canada disposait d’une preuve médicale solide attestant que M. Day pouvait en fait travailler de nuit. Cependant, tout en accordant à M. Day le bénéfice de tout doute qui pourrait subsister à ce sujet, j’estime que Postes Canada lui a offert un certain nombre de mesures raisonnables d’accommodement. M. Day a choisi de refuser ces offres. Si Postes Canada avait l’obligation de prendre des mesures d’accommodement envers M. Day (et je ne suis pas convaincu que c’était le cas), elle s’est acquittée de cette obligation.

i) M. Day n’avait pas besoin de mesures d’accommodement

[106] Bien que, jusqu’en décembre 2001, la preuve médicale suggérât que M. Day ne fût pas en mesure de travailler de nuit, les éléments de preuve médicale provenant du Dr Hamm et du nouveau médecin de M. Day, le Dr Cook, indiquent toutes que l’incapacité de M. Day à travailler de nuit découlait probablement du fait que, jusqu’à ce moment, sa dépression n’avait pas été traitée adéquatement. Toutefois, en avril 2002, la preuve attestait que M. Day répondait bien à la nouvelle médication recommandée par le Dr Miller et qu’il était capable de travailler de nuit. Je me pencherai maintenant sur cette preuve.

[107] Dans son rapport d’EMI d’octobre 2001, le Dr Miller a affirmé que les remèdes à base de plantes médicinales que prenait M. Day selon la recommandation de son médecin précédent, le Dr Rozwadowski, étaient inefficaces. Il a non seulement prescrit un nouveau traitement pharmacologique, mais également une thérapie cognitivo‑comportementale visant à régler ses problèmes persistants au travail.

[108] Le Dr Hamm a reçu la qualité d’expert en médecine du travail à l’audience. Il a témoigné qu’il avait beaucoup d’expérience avec des patients souffrant de dépression. D’après son expérience, ces patients n’ont aucune difficulté à travailler par quarts, y compris de nuit, s’ils sont traités correctement et si leurs symptômes sont en rémission.

[109] En raison d’une clause du contrat entre Medisys et Postes Canada, le Dr Hamm n’a pas eu la permission de rencontrer M. Day. Cependant, il a effectué un examen minutieux du dossier de M. Day et il a communiqué avec les médecins de M. Day.

[110] En décembre 2001, le Dr Hamm a consulté le médecin de M. Day à l’époque et a été informé que M. Day répondait bien à la médication recommandée par le Dr Miller, que son état s’était amélioré et qu’il était retourné au travail.

[111] À partir de ces renseignements, le Dr Hamm a conclu en décembre 2001 que, compte tenu de l’amélioration de l’état psychologique de M. Day, celui-ci devrait être capable de travailler de nuit en avril 2002. C’est pour cette raison que le Dr Hamm a affirmé à Postes Canada dans son rapport d’examen du 4 décembre 2001 qu’il n’était pas en faveur d’une mesure d’accommodement permanente permettant à M. Day de ne travailler que le jour.

[112] Dans une lettre envoyée au syndicat le 18 avril 2002, le Dr Hamm a expliqué la disparité apparente entre sa recommandation à M. Day d’éviter les quarts de nuit dans son rapport d’examen d’octobre 2001 et sa recommandation à M. Day de maintenir ses tâches habituelles, y compris les quarts de nuit, formulée dans son rapport d’examen de décembre 2001. Dans la lettre, le Dr Hamm affirme que, en octobre 2001, il était en faveur de permettre temp orairement à M. Day de ne travailler que le jour afin de permettre à ce dernier de s’adapter à sa nouvelle médication et de permettre aux symptômes de se résorber. Cependant, il n’avait pas à ce moment l’intention de recommander à Postes Canada de rendre permanente cette mesure d’accommodement. Après avoir parlé au médecin de M. Day en décembre 2001, le Dr Hamm a été d’avis que M. Day faisait de beaux progrès et devrait être en mesure de travailler de nuit, comme beaucoup d’autres de ses patients dépressifs avaient réussi à le faire.

[113] Le Dr Cook, que M. Day a commencé à consulter en janvier 2002, a fourni un témoignage important à l’audience quant à la capacité de M. Day à travailler de nuit entre janvier 2002 et le 29 mai 2002. Le Dr Cook a témoigné qu’il était et avait toujours été d’avis que M. Day était médicalement capable de travailler de nuit à condition que sa santé soit surveillée à ce moment. Il croyait que les problèmes de M. Day n’étaient pas de nature médicale, qu’ils relevaient plutôt des différends constants avec Postes Canada. Le Dr Cook était d’avis que M. Day avait besoin d’un médiateur ou d’un conseiller spécialisé dans les conflits au travail, plutôt que d’un médecin ou d’un psychiatre.

[114] Le Dr Cook a affirmé dans son témoignage que, dès sa première rencontre avec M. Day en janvier 2002, il était clair que M. Day ne voulait de lui rien de plus qu’un avis médical attestant qu’il ne pouvait travailler de nuit. Cette situation mettait le Dr Cook mal à l’aise. Comme le Dr Hamm, il a déclaré qu’il suivait de nombreux patients dépressifs qui pouvaient travailler de nuit dans la mesure où ils étaient traités adéquatement et suivis par un médecin.

[115] Dans une lettre datée du 18 mars 2002, M. Day a affirmé à Postes Canada que le Dr Cook lui avait conseillé de ne pas travailler de nuit en raison de sa santé. Cependant, le Dr Cook a affirmé dans son témoignage qu’il n’aurait pas donné ce conseil parce qu’il ne croyait pas que c’était le cas. Quand M. Day lui a demandé pour la première fois en mars 2002 de lui donner une note attestant qu’il ne pouvait pas travailler de nuit, il a refusé de le faire, car il s’agissait  selon lui d’un conflit au travail plutôt que d’une question médicale.

[116] Néanmoins, le 10 avril 2002, le Dr Cook a fourni à M. Day une note attestant qu’il lui conseillait de ne pas travailler de nuit pour des raisons de santé. Le Dr Cook a affirmé dans son témoignage qu’il ne savait pas pourquoi il avait fourni une note à M. Day. Il a convenu avec l’avocat de l’intimée en contre‑interrogatoire qu’il l’avait fait pour [traduction] se débarrasser de M. Day. Le témoignage du Dr Cook laisse fortement entendre que la note ne constituait pas une expression authentique de son avis médical, mais plutôt une réponse à la pression intense exercée par M. Day qui demandait à être exempté du travail de nuit.

[117] Le témoignage de M. Day est venu étayer l’affirmation du Dr Cook selon laquelle M. Day ne souhaitait que voir appuyée son opinion selon laquelle il ne pouvait pas travailler de nuit. Il a affirmé qu’il avait toujours eu des difficultés avec le Dr Cook parce que ce médecin ne semblait pas comprendre sa situation. M. Day a déclaré qu’il avait toujours été soutenu par ses médecins et que le Dr Cook n’agissait pas de la même façon. Il ressortait clairement du témoignage de M. Day qu’il acceptait difficilement le fait que le Dr Cook n’appuyait pas inconditionnellement sa volonté de ne pas travailler de nuit.

[118] En conséquence, en mai 2002, M. Day a changé de médecin, passant du Dr Cook au Dr Cooper. Ce dernier a affirmé dans son témoignage qu’il n’aurait pas fallu obliger M. Day à travailler de nuit en avril 2002. Selon le Dr Cooper, le travail de nuit exacerbait les symptômes de dépression de M. Day. Cependant, le Dr Cooper n’était pas le médecin de M. Day pendant la période pertinente pour la présente allégation. Il a convenu que le Dr Cook était en meilleure position pour juger de la santé psychologique de M. Day à l’époque.

[119] Comment Postes Canada a‑t‑elle expliqué le fait que la note datée du 10 avril 2002 présentée par M. Day n’ait pas été acceptée comme preuve établissant qu’il ne pouvait travailler la nuit? M. Ormerod a témoigné que Postes Canada avait décidé que les notes médicales provenant de carnets d’ordonnances ne suffiraient plus à exempter M. Day des quarts de nuit. Il fallait plus de renseignements pour établir pourquoi le traitement recommandé par le Dr Miller ne fonctionnait pas. Cette situation a été expliquée à M. Day et au syndicat lors d’une réunion le 22 avril 2002.

[120] M. Ormerod a déclaré que M. Day avait également été informé dès le 28 février 2002 que Postes Canada s’attendait à ce que les médicaments qu’il prenait le rendent apte à travailler de nuit. Par conséquent, M. Day a eu amplement le temps d’obtenir un avis médical contraire, si les circonstances le justifiaient. Il n’a pas fourni de tel renseignement médical. Une note provenant d’un carnet d’ordonnance ne constituerait pas une preuve suffisante de son incapacité à travailler de nuit, car elle ne contient pas assez de renseignements.

[121] À mon avis, la position adoptée par Postes Canada était raisonnable. Elle ne rendait pas injuste l’évaluation de l’aptitude de M. Day. Ce dernier connaissait la position de l’entreprise relativement à son aptitude à travailler de nuit. Il savait également que, depuis l’automne 2001, Postes Canada avait cessé d’accepter les notes médicales provenant d’un carnet d’ordonnances pour l’exempter des quarts de nuit. Le fait qu’il a été incapable de fournir plus de renseignements de la part de son médecin quant à son incapacité à travailler de nuit témoigne, à mon avis, du fait que son médecin à ce moment croyait qu’il pouvait travailler de nuit, indépendamment de la note à l’effet contraire qu’il a produite.

[122] Je conviens avec l’avocat de l’intimée que, si la note datée du 10 avril du Dr Cook avait été fournie à Medisys, le Dr Hamm aurait probablement communiqué avec le Dr Cook et aurait appris que ce dernier s’était senti pressé par M. Day de fournir la note. En fait, le Dr Hamm a bel et bien communiqué avec le Dr Cook, le 25 avril 2002, pour discuter de la capacité de M. Day à travailler de nuit. Selon le Dr Hamm, le Dr Cook lui a dit que M. Day était médicalement apte à travailler de nuit. Le Dr Hamm a fait part de ce renseignement à Postes Canada.

[123] Par conséquent, le 25 avril 2002, M. Day a été suspendu trois jours sans salaire pour absence non justifiée. Étant donné la preuve médicale dont disposait Postes Canada au sujet de la capacité de M. Day à travailler de nuit à l’époque, j’estime que la mesure disciplinaire n’était pas discriminatoire. L’intimée a fourni une explication raisonnable à la preuve prima facie soumise par M. Day. Une preuve médicale solide établissait que M. Day était capable de travailler de nuit en avril 2002. Les trois jours de suspension n’étaient attribuables qu’au refus de M. Day de travailler de nuit, et non à sa déficience.

ii) Si M. Day avait besoin d’une mesure d’accommodement, Postes Canada a présenté des offres raisonnables d’accommodement 

[124] Cependant, s’il subsiste un doute quant à la capacité de M. Day de travailler de nuit, je suis convaincu que Postes Canada a présenté à M. Day des offres raisonnables d’accommodement.

[125] La Cour suprême a déclaré que les accommodements sont une responsabilité relevant de plusieurs parties. Le plaignant doit faire sa part pour faciliter le processus d’accommodement. Quand un employeur est à l’origine d’une proposition qui est raisonnable et qui, si elle était mise en œuvre, satisferait à l’obligation de prendre des mesures d’accommodement, le plaignant a l’obligation d’accepter cette proposition (Central Okanagan School District No. 23 c. Renaud, [1992] 2 R.C.S. 970, aux paragraphes 43 et 44).

[126] Le 22 avril 2002, M. Ormerod a offert trois options à M. Day. La première était de lui permettre de prendre un congé sans solde ou un congé annuel pour la durée de son bloc de quarts de nuit, mais sans la possibilité de travailler pendant une partie d’un cycle et de prendre congé pour le reste. Les deux autres options auraient été de permettre à M. Day de travailler de nuit selon le quart régulier ou de travailler selon des heures modifiées, de 18 h à 2 h, à la condition qu’il ait obtenu un rendez‑vous avec un psychiatre avant 15 h le 26 avril 2002.

[127] M. Day a refusé toutes les options présentées par Postes Canada. Il a déclaré que le quart de 18 h à 2 h ne constituait pas une proposition raisonnable, car l’offre était conditionnelle à ce qu’il obtienne un rendez‑vous avec un spécialiste avant le 26 avril 2002. Selon M. Day, c’était impossible étant donné la pénurie de médecins spécialistes en santé mentale à Victoria. Dans un esprit de collaboration, M. Day aurait très bien pu faire l’effort d’obtenir un rendez‑vous et ensuite informer Postes Canada s’il ne pouvait respecter l’échéance. M. Ormerod a affirmé dans son témoignage qu’un effort semblable pour obtenir un rendez‑vous en avril aurait été acceptable. À la place, M. Day n’a pas tenté d’obtenir de rendez‑vous avec un psychiatre avant la mi‑mai, ce qui était bien après l’échéance.

[128] M. Day a soutenu que la suggestion formulée par son médecin le 25 avril 2002 de se rendre à un centre du sommeil à Vancouver constituait un effort pour coopérer avec les tentatives d’accommodement de Postes Canada. Selon M. Day, le refus qu’a opposé Postes Canada à cette suggestion montre un manquement à l’obligation de prendre des mesures d’accommodement, sans qu’elles ne constituent des contraintes excessives.

[129] Le Dr Hamm a témoigné qu’il s’était penché sur la suggestion de consulter un centre du sommeil et l’avait finalement rejetée, car aucun des nombreux médecins de M. Day n’avait jamais diagnostiqué chez lui un trouble du sommeil primaire. Ses difficultés à dormir constituaient plutôt un symptôme de sa dépression chronique. Par conséquent, le Dr Hamm a décidé que rien ne justifiait de dépenser du temps et de l’argent sur la question de savoir si M. Day souffrait ou non d’un trouble du sommeil. Compte tenu de la preuve, je conviens qu’il ne s’agissait pas d’une option raisonnable.

[130] M. Day a déclaré que le Dr Cook lui avait conseillé de ne pas travailler selon un quart de 18 h à 2 h, car cela mettrait sa santé en danger. Cependant, le Dr Cook n’a pas corroboré cette affirmation. Le Dr Cook a soutenu qu’il n’était pas au courant que Postes Canada avait offert à M. Day un quart de travail modifié. Si M. Day le lui avait demandé, il lui aurait conseiller de l’essayer. M. Day a essayé une fois le quart modifié et l’a rejeté.

[131] Ces faits ressemblent à ceux dans Jeffrey c. Dofasco Inc. (No. 4) 2004 HRTO 5; conf. par 2007 CanLII 41275 (ON S.C.D.C). Dans cette affaire, le Tribunal des droits de la personne de l’Ontario a conclu que la plaignante, qui souffrait de douleurs myo‑fasciales et avait certains symptômes de fibromyalgie, aurait pu tenter d’obtenir un poste de standardiste. Le Tribunal a estimé que, bien qu’elle eût pu ressentir certaines douleurs pendant qu’elle testait le poste de standardiste, elle n’aurait pas été en danger en effectuant ce travail. Ses douleurs chroniques ne la handicapaient pas au point de l’empêcher d’essayer l’emploi. Elle n’a pas essayé l’emploi non pas parce qu’elle en était incapable, mais parce qu’elle avait choisi de ne pas le faire. Le Tribunal a conclu qu’il n’y avait aucune raison médicale de ne pas avoir essayé le poste de standardiste.

[132] Je crois que les faits dans Jeffrey sont analogues à ceux en l’espèce. Aucune raison de santé n’explique pourquoi M. Day n’aurait pas pu essayer le quart de 18 h à 2 h plus que l’unique fois où il l’a fait. En effet, M. Day a témoigné que, lorsqu’il travaillait en après‑midi de 15 h à 23 h, il lui arrivait souvent de travailler en heures supplémentaires jusqu’à 1 h ou 2 h. Il a affirmé qu’il pouvait toutefois s’adapter au quart d’après‑midi. En conséquence, j’estime que le quart de travail de 18 h à 2 h constituait une offre raisonnable d’accommodement. Je reconnais que l’offre était conditionnelle à l’obtention d’un rendez‑vous avec un psychiatre, mais aucune raison ne justifie que M. Day ait attendu la mi‑mai avant de faire des efforts en ce sens.

[133] Finalement, le quart de 18 h à 2 h n’était pas la seule option présentée par Postes Canada à M. Day. S’il ne croyait pas être en mesure de travailler de 18 h à 2 h, il aurait pu choisir le congé sans solde ou le congé annuel pour les douze semaines du quart de nuit. Ainsi, il aurait eu amplement le temps d’obtenir des renseignements médicaux d’un spécialiste avant d’avoir à travailler de nuit à nouveau. J’estime qu’il s’agissait également d’une proposition raisonnable d’accommodement. M. Day n’a accepté ni l’une ni l’autre de ces options. Il ressortait clairement de son témoignage qu’il n’accepterait aucune autre proposition que l’exemption permanente du travail de nuit.

[134] L’avocat de M. Day a avancé que la personnalité obsessionnelle‑compulsive de M. Day a pu être un facteur dans son incapacité à répondre favorablement aux efforts de Postes Canada pour offrir des mesures d’accommodement. Il a été soutenu que, pour cette raison, Postes Canada aurait dû prendre la mesure d’accommodement consistant à accorder à M. Day ce qu’il voulait : le quart de jour. Cependant, Postes Canada ne savait rien de la personnalité obsessionnelle‑compulsive de M. Day. Le Dr Hamm a affirmé dans son témoignage n’avoir fourni aucun renseignement à ce sujet à Postes Canada, car il était d’avis que, d’après son expérience, le trouble de M. Day ne limitait pas sa capacité de travailler. Le propre psychiatre de M. Day a témoigné que le jugement et la capacité de M. Day d’agir de manière responsable au travail n’étaient pas affectés par cette maladie.

[135] Par conséquent, je conclus qu’il n’y a aucun fondement à l’argument selon lequel la personnalité obsessionnelle‑compulsive de M. Day l’a empêché de considérer comme étant raisonnables les offres d’accommodement présentées par Postes Canada. Au contraire, le témoignage de M. Day démontre qu’il a refusé les offres parce qu’il croyait avoir juridiquement le droit d’être exempté en permanence de l’obligation de travailler de nuit. Toutefois, le droit établit clairement qu’un employé n’a pas le droit d’attendre la solution parfaite (arrêt Renaud, à la p. 995). M. Day avait l’obligation d’accepter une des propositions raisonnables avancées par Postes Canada, même si elles ne correspondaient pas exactement à ce qu’il recherchait. Il ne l’a pas fait. Par conséquent, je conclus que, même s’il subsistait un doute quant à la capacité de M. Day de travailler de nuit, Postes Canada s’est acquittée de son obligation de prendre des mesures d’accommodement envers M. Day.

(vi) Était-il discriminatoire de mettre fin à l’emploi de M. Day chez Postes Canada en mai 2002?

La preuve prima facie

[136] M. Day ne s’est pas présenté au travail pour le quart de nuit après la fin de sa suspension de trois jours, il a plutôt pris un congé de maladie le 1er mai 2002. Il a consulté le Dr Cook le 2 mai 2002, lequel lui a dit qu’il téléphonerait au Dr Hamm plutôt que d’écrire une note.

[137] M. Day a reçu un préavis de 24 heures le convoquant à une entrevue pour expliquer son absence du 1er mai 2002. L’entrevue devait avoir lieu le 2 mai 2002. M. Day a témoigné qu’il ne s’est pas présenté au travail ni à l’entrevue parce qu’il était malade. Il en a informé Postes Canada le 2 mai 2002.

[138] Le 14 mai 2002, M. Day a écrit à Rob Taylor, le directeur des opérations postales, qu’il était allé voir son médecin, que des ajustements avaient été apportés à sa médication et qu’il attendait d’être dirigé vers un psychiatre. M. Day a également déclaré que son médecin remplissait les formulaires d’assurance‑invalidité et que celui‑ci était en train d’envoyer les documents à M. Taylor.

[139] Le 22 mai 2002, M. Day a reçu une lettre de M. Ormerod faisant savoir que, parce qu’il ne s’était pas présenté au travail et n’avait pas expliqué son absence de façon acceptable, il recommandait que Postes Canada renvoie M. Day.

[140] Le 27 mai 2002, M. Taylor a mis fin à l’emploi de M. Day chez Postes Canada parce que celui‑ci ne s’était pas présenté au travail et qu’il n’avait pas expliqué son absence de façon acceptable.

[141] Aux termes de l’alinéa 7a) de la Loi, constitue un acte discriminatoire, s’il est fondé sur un motif de distinction illicite, le fait de refuser de continuer d’employer un individu. M. Day a fait savoir à Postes Canada qu’il était incapable de travailler en raison de sa déficience. Tout en sachant cela, Postes Canada a mis fin à l’emploi de M. Day. Pour cette raison, j’estime que M. Day a établi prima facie que Postes Canada a refusé de continuer à l’employer en raison de sa déficience.

L’explication de l’intimée

[142] Postes Canada a soutenu que la déficience de M. Day n’avait rien à voir avec le congédiement. Postes Canada a plutôt mis fin à l’emploi de M. Day parce qu’il ne s’était pas présenté à son quart de travail et parce qu’il n’a pas fourni de preuve médicale attestant sa maladie.

[143] La preuve en l’espèce étaye l’explication de Postes Canada. M. Day ne s’est pas présenté au travail comme il était prévu le 1er mai 2002. Il a vu le Dr Cook le 2 mai 2002 et a demandé une note justifiant son absence au travail. Le Dr Cook a refusé de fournir cette note.

[144] Le Dr Cook a plutôt parlé directement au Dr Hamm par téléphone le 7 mai 2002. Dans la note consignée au dossier au sujet de cette conversation, le Dr Hamm a écrit que le Dr Cook l’avait informé qu’il avait augmenté la dose de médicament de M. Day. Il affirme que le Dr Cook se demandait si ce dernier devait être mis en congé d’invalidité à long terme. Le Dr Hamm a conclu sa note en disant : [traduction] Je crois qu’il sera en faveur de mettre M. Day en congé en raison de son diagnostic psychiatrique. 

[145] Le Dr Cook a témoigné que, en fait, il n’était pas en faveur d’une absence pour M. Day. Pour cette raison, il n’a pas donné de note ou de renseignement à cet effet. Il a déclaré sans équivoque, tant en interrogatoire principal qu’en contre‑interrogatoire, qu’il ne croyait pas que M. Day souffrait d’un trouble psychiatrique nécessitant qu’il s’absente du travail; il croyait que M. Day avait besoin de l’aide d’un conseiller ou d’un médiateur pour régler ses conflits au travail. Il n’a jamais recommandé que M. Day s’absente et il n’a pas appuyé sa demande de congé d’invalidité prolongé.

[146] Le Dr Cook a témoigné que, au cours de sa conversation téléphonique avec le Dr Hamm le 7 mai 2002, le Dr Hamm et lui ont discuté d’idées pouvant aider M. Day à résoudre ses problèmes non résolus au travail. Le Dr Cook a déclaré qu’une des idées dont il a été question avec le Dr Hamm était de mettre M. Day en congé d’invalidité prolongé. Il a affirmé dans son témoignage qu’il ne croyait pas que ce serait une bonne idée. Il l’a tout de même prise en considération parce qu’il ressentait une certaine sympathie pour M. Day et parce que c’est ce que M. Day semblait vouloir. Le Dr Cook a également affirmé qu’il avait augmenté la dose de médicament de M. Day pour lui venir en aide. Par contre, il ne croyait pas que l’état de santé de M. Day avait changé entre le moment où il l’avait vu pour la première fois, en janvier 2002, et le 29 mai 2002, date de sa dernière visite. Pour cette raison, il a refusé de fournir à M. Day la preuve médicale qu’il voulait pour justifier son absence.

[147] Par conséquent, je conclus que Postes Canada a réfuté la preuve prima facie de M. Day. Aucune preuve médicale ne soutient la déclaration de M. Day selon laquelle il était incapable de travailler le 1er mai 2002 en raison de son état de santé. Le congédiement n’était donc pas fondé sur la déficience de M. Day, mais sur son refus de se présenter au travail ou de fournir une explication acceptable justifiant son absence.

[148] M. Day a déposé un grief relativement à son congédiement en mai 2002. Conformément à l’entente de règlement survenue à la suite du grief, il est retourné au travail en mai 2003.

(vii) Postes Canada a-t-elle commis un acte discriminatoire en supprimant le poste d’EL5 de M. Day?

La preuve prima facie

[149] À l’automne 2004, Postes Canada a informé M. Day que deux des quatre postes d’EL5 des Services techniques au Centre de Glanford seraient éliminés en vertu de l’article 53 de la convention collective. Un examen de l’effectif avait révélé qu’il n’y avait pas suffisamment de travail au Centre de Glanford pour justifier le nombre d’employés au sein des Services techniques. L’article 53 de la convention collective entre le STTP et Postes Canada prévoit que les postes pour lesquels il n’y a pas assez de travail peuvent être déclarés excédentaires et éliminés. M. Day et Eric Walry avaient le moins d’ancienneté parmi les quatre EL5. En conséquence, en vertu de l’article 53, leur poste a été supprimé.

[150] Eric Walry a été réaffecté à un poste d’EL5 en Ontario. M. Day, quant à lui, ne voulait pas déménager de Victoria. Par conséquent, conformément à la convention collective, sa seule possibilité était d’accepter un poste de PO4 au Centre de Glanford. Bien qu’il ait conservé son salaire d’EL5, il s’est senti diminué et frustré par cette nouvelle affectation puisque, en tant que trieur de courrier, il n’aurait pas l’occasion d’utiliser ses compétences de technicien. Il a prétendu que l’élimination de son poste en 2004 avait été orchestrée par Postes Canada dans le but de le chasser parce qu’il était handicapé.

[151] M. Day fonde son allégation sur une lettre datée du 3 février 2003 écrite par Steve Clark à Joanne Purser, la directrice des opérations postales de l’époque. Dans cette lettre, M. Clark faisait savoir qu’il craignait que le fait de déclarer les postes excédentaires était considéré comme étant une manière de chasser du service Tim Day, [traduction] un employé à problèmes qui était handicapé. M. Clark a plaidé pour que ne soient pas éliminés les postes d’EL5 (y compris celui de M. Day) parce que cela pourrait être considéré comme de la mauvais foi de la part de Postes Canada envers M. Day. 

[152] Je conclus que M. Day a prouvé prima facie qu’il y a eu différence de traitement fondée sur la déficience. La lettre de M. Clark laisse entendre que le poste de M. Day a été éliminé dans le but de le chasser des services techniques parce que sa déficience était source de [Traduction] problèmes pour Postes Canada. Par conséquent, une preuve montre qu’il a été traité de manière différente en raison de sa déficience.

L’explication de l’intimée

[153] L’intimée m’a convaincu que les craintes de M. Clark ne découlaient pas du processus à la suite duquel des postes ont été déclarés excédentaires. L’élimination du poste de M. Day n’avait rien à voir avec sa déficience. Je tire cette conclusion à partir des conclusions de fait suivantes.

[154] En 2002 et au début 2003, la direction de Postes Canada dans la région de Vancouver et de Victoria a reçu un avis d’Ottawa faisant savoir qu’il y avait trop d’employés au Centre de Victoria. Une étude avait été menée et concluait que les Services techniques de Victoria avaient de quatre à six postes en trop. La direction à Victoria a eu la tâche d’élaborer une stratégie pour résoudre le problème de l’excédent de personnel.

[155] Mme Purser, la directrice des opérations postales à Victoria, a consulté un certain nombre de personnes au Centre de Glanford afin d’établir la meilleure façon de procéder. Parmi les personnes consultées par Mme Purser se trouvaient M. Ormerod et M. Clark.

[156] M. Ormerod a avoué franchement qu’il était en faveur de l’élimination de postes d’EL5, car il estimait qu’il s’agissait d’un moyen de se débarrasser d’un employé difficile, Tim Day. Cependant, quand on le lui a demandé, il a essayé d’en faire abstraction et de prendre en considération uniquement ce qu’il y avait de mieux pour le Centre, plutôt que de laisser ses sentiments envers M. Day influencer sa réflexion. Il a affirmé qu’aucun autre Centre n’avait quatre EL5, que Victoria avait un surplus d’EL5. Il y avait du nouvel équipement plus facile à entretenir, de sorte que c’était logique de recommander que deux postes d’EL5 soient déclarés excédentaires.

[157] Steve Clark n’était pas d’accord avec M. Ormerod. Il recommandait que deux postes de MAM11 soient éliminés. Mme Purser était d’accord avec M. Clark. Elle a recommandé à Tom Dixon, le directeur pour la région de Vancouver et du nord de la Colombie‑Britannique (qui comprend Victoria), que deux postes de MAM11 soient déclarés excédentaires.

[158] M. Dixon a reçu une lettre des travailleurs des services techniques de Victoria qui s’objectaient à ce que les postes soient déclarés excédentaires. Par conséquent, il a décidé de suspendre le processus jusqu’à ce qu’un examen plus approfondi de l’effectif puisse être mené, car il voulait être sûr que la bonne décision soit prise.

[159] Tom Dixon a demandé que l’administration centrale entreprenne un examen ou une vérification de l’effectif au Centre de traitement du courrier de Victoria. En juillet 2004, deux personnes de l’administration centrale de Postes Canada sont venues pour effectuer cette vérification. Les vérificateurs ont inscrit dans leur rapport que, selon eux, le Centre de Victoria comptait deux postes en trop aux Services techniques du Centre de traitement du courrier de Glanford.

[160] Quand il a reçu les résultats de la vérification, M. Dixon a consulté M. Sarbjit Sangha, le directeur des Services techniques pour Vancouver et Victoria. M. Sangha a affirmé que le Centre de Vancouver, beaucoup plus gros, traitant un plus gros volume de courrier et ayant plus de machinerie, ne comptait que deux EL5 alors que le Centre de Victoria en comptait quatre. Il a estimé que cela n’avait aucun sens. Il a donné son opinion aux vérificateurs après avoir examiné la dernière ébauche du rapport de vérification.

[161] M. Sangha a déclaré sans équivoque que Tim Day n’avait pas été un facteur dans sa recommandation de supprimer deux postes d’EL5 à Victoria. Il a déclaré qu’il ne savait pas qui était M. Day quand il a donné son avis. Rien ne prouve qu’il a vu la lettre de M. Clark à Mme Purser. Son témoignage n’a pas été ébranlé en contre‑interrogatoire.

[162] Après avoir reçu le rapport de vérification et les recommandations de M. Sangha, M. Dixon a décidé d’éliminer deux postes d’EL5. Il a déclaré que sa décision n’avait rien à voir avec M. Day, qu’elle faisait suite aux résultats de la vérification et à l’avis de M. Sangha selon lequel il y avait deux postes d’EL5 en trop à Victoria. Il ne se rappelle pas avoir jamais vu la lettre envoyée par M. Clark à Mme Purser au sujet de M. Day.

[163] M. Dixon n’a pas discuté avec M. Ormerod de sa décision d’éliminer les postes d’EL5. M. Ormerod a quitté les Services techniques en 2003. Son avis concernant la question de l’effectif n’a pas été sollicité après qu’il eut fait part de son opinion à Mme Purser en 2002.

[164] Les personnes qui ont témoigné pour Postes Canada à propos de cette question étaient crédibles et ne se contredisaient pas. J’accepte l’explication selon laquelle la décision d’éliminer les postes d’EL5 n’a pas été prise dans le but de chasser M. Day des Services techniques en raison de sa déficience. Postes Canada a réfuté la preuve prima facie de discrimination relativement à la présente allégation en montrant que la décision n’avait rien à voir avec la déficience de M. Day.

(viii) Était‑il discriminatoire de supprimer le poste de MAM11?

La preuve prima facie

[165] M. Day a témoigné que, après avoir été affecté au poste de PO4, il a déposé sa candidature pour un poste de mécanicien, le poste de MAM11 B‑2. Il savait que ce poste serait disponible puisque son titulaire prenait sa retraite.

[166] Le 4 avril 2005, Mme Andrew, la représentante syndicale, a demandé que le poste vacant de MAM11 B‑2 soit attribué à M. Day. Elle a déclaré que M. Day était en congé de maladie. Le médecin de celui‑ci souhaitait que, à son retour au travail, il ait un poste [traduction] moins stressant que celui d’EL5. Le poste de MAM11 répondait à ce critère.

[167] Mme Andrew a témoigné que, normalement, Postes Canada discutait avec le syndicat avant de supprimer un poste. Cela n’a pas été fait. Plutôt, le même jour où la candidature pour le poste a été déposée, le syndicat a reçu une note faisant savoir que le poste de MAM11 avait été éliminé.

[168] M. Day a soutenu que le poste de MAM11 avait été éliminé après que sa candidature ait été déposée, dans le but de couper court à sa tentative de réintégrer les Services techniques. Le motif aurait été sa déficience et le refus des Services techniques de reconnaître qu’il avait besoin que des mesures d’accommodement soient prises en raison de sa déficience.

[169] La preuve présentée par M. Day étaye son allégation selon laquelle M. Sangha a supprimé le poste de MAM11 après que M. Day eut déposé sa candidature. M. Sangha savait, par la lettre de Mme Andrew, que M. Day était en congé de maladie et déposait sa candidature pour le poste afin de diminuer le stress lié à sa réintégration au travail. La façon dont le processus s’est déroulé laisse croire que la déficience de M. Day a joué un rôle dans la décision de supprimer le poste de MAM11. M. Day a donc réussi à établir prima facie qu’il y a eu acte discriminatoire fondé sur sa déficience.

L’explication de l’intimée

[170] M. Sangha a déclaré qu’il avait décidé au cours de l’automne 2004 ou au début de l’hiver 2005 de supprimer le poste de MAM11 quand son titulaire prendrait sa retraite en mars 2005. C’était bien avant que M. Day dépose sa candidature pour le poste. Cependant, il a oublié d’informer le syndicat de sa décision par écrit à l’époque. Il a déclaré qu’il s’est senti mal quand il a reçu la lettre de Mme Andrew en avril 2005, car il s’est alors rendu compte qu’il avait omis d’informer le syndicat de sa décision prise plus tôt.

[171] Il a expliqué que l’administration centrale à Ottawa avait décidé de remplacer une vieille machine à Victoria par une machine nécessitant moins d’entretien. En conséquence, le travail à faire ne suffisait plus à occuper les quatorze employés des Services techniques de Victoria. Le syndicat a été informé que le nombre de mécaniciens au sein du personnel du Centre de traitement du courrier à Victoria serait réduit parce qu’il n’y avait plus suffisamment de travail pour quatorze employés. Pour cette raison, il a décidé de supprimer le poste de MAM11.

[172] M. Sangha était un témoin crédible. Il a reconnu franchement l’erreur qu’il a commise en oubliant d’informer le syndicat de sa décision de supprimer le poste de MAM11. Son témoignage n’a pas été ébranlé en contre‑interrogatoire. Bien qu’il n’ait pas produit de confirmation écrite de sa décision de supprimer le poste avant que M. Day ne dépose sa candidature, son témoignage me convainc néanmoins qu’il n’y avait aucun lien entre la déficience de M. Day et la décision de supprimer le poste de MAM11.

[173] Je conclus donc que Postes Canada a prouvé que la déficience de M. Day n’a pas été un facteur dans l’élimination du poste de MAM11.

[174] M. Day a soutenu, à titre subsidiaire, que même si sa déficience n’a pas été un facteur dans l’élimination du poste, le refus par Postes Canada de maintenir le poste pour lui constituait une différence de traitement défavorable. Cela le privait d’une occasion de reprendre un poste qui aurait répondu à ses besoins liés à sa déficience.  

[175] À supposer que M. Day ait établi prima facie que l’élimination du poste a eu un effet discriminatoire sur lui, je suis d’avis que l’obligation prévue au paragraphe 15(2) de la Loi ne va pas jusqu’à exiger que soit maintenu ou créé un poste pour lequel il n’y a pas de travail à faire. Au contraire, l’obligation consiste à mettre en place des mesures d’accommodement pour permettre aux employés d’effectuer un travail productif. La preuve révèle qu’il n’y avait pas suffisamment de travail pour justifier le maintien du poste de MAM11. Postes Canada n’était pas tenue de maintenir le poste pour répondre aux besoins de M. Day.

(ix) Était-il discriminatoire d’affecter M. Day à un poste de facteur de relève?

La preuve prima facie

[176] En mai 2006, M. Day a déposé sa soumission pour un poste de facteur à Victoria. Il a réussi à obtenir et le poste et l’itinéraire qu’il voulait. Après que sa soumission eut été retenue, il y a eu une réorganisation des itinéraires des facteurs. Les nouveaux itinéraires devaient être attribués par un processus de soumissions. M. Day a prétendu que la personne responsable du processus de soumissions ne l’a pas appelé et n’a pas appelé le syndicat pendant qu’il était en congé d’invalidité pour qu’il puisse déposer sa soumission pour un nouvel itinéraire. En conséquence, il a été affecté au poste de facteur de relève. Ce poste est le moins aimé, car il nécessite des changements fréquents d’itinéraire.

[177] À partir du témoignage de M. Day, je suis prêt à présumer que la prétendue omission d’informer M. Day du processus de soumissions pour les nouveaux itinéraires pendant qu’il était en congé de maladie constituait une différence de traitement défavorable fondée sur sa déficience.

L’explication de l’intimée

[178] Selon M. Clark, M. Day a été informé ou aurait dû être informé par son syndicat du processus de soumissions applicable à la réorganisation des itinéraires. L’arrangement à ce moment était que toutes les communications destinées à M. Day devaient passer par le syndicat. M. Clark a affirmé que Barry Barter, qui était responsable de la réorganisation des itinéraires à l’époque, lui a dit qu’il avait informé le syndicat du processus. M. Clark ne savait pas si le syndicat avait transmis les renseignements à M. Day.

[179] M. Patterson, le secrétaire‑trésorier de la section de Victoria du STTP à l’époque, est le seul délégué syndical qui a témoigné à ce sujet. Il n’a pu confirmer si le syndicat avait été informé ou non du processus de soumissions pour la réorganisation des itinéraires.

[180] J’accepte le témoignage de M. Clark selon lequel le syndicat a été informé du processus de soumissions pour la réorganisation. Il n’est pas clair si le syndicat a informé ou non M. Day du processus. Cependant, je conviens que Postes Canada a fait ce qu’elle devait faire en fournissant les renseignements pour que M. Day puisse poser sa soumission.

[181] Par conséquent, j’estime que Postes Canada a fourni une explication raisonnable qui réfute l’allégation de M. Day selon laquelle son affectation au poste de relève était discriminatoire.

(x) M. Day a‑t‑il été victime de harcèlement fondé sur sa déficience?

[182] M. Day a soutenu que l’ensemble des actes de Postes Canada en l’espèce constitue du harcèlement fondé sur sa déficience. L’alinéa 14(1)c) dispose que constitue un acte discriminatoire, s’il est fondé sur un motif de distinction illicite, le fait de harceler un individu.

[183] Le harcèlement dans le cadre de plaintes fondées sur la déficience a été défini comme une conduite se manifestant par des paroles, des actes ou des gestes répétés, à caractère vexatoires, méprisants ou insultants à l’égard d’une personne en raison de sa déficience (Bergeron c. Télébec Ltée., 2004 TCDP 16, au paragraphe 260; conf. par 2005 CF 879). La gravité d’un comportement prétendu harcelant doit être appréciée selon la perspective de la victime raisonnable (Dhanjal c. Air Canada (1996), 28 C.H.R.R. 367, aux paragraphes 216 et 217, conf. par [1997] A.C.F. n 1599).

[184] La jurisprudence sur le harcèlement est fondée sur l’idée que la conduite à l’examen est, par sa nature, étrangère aux activités légitimes et aux objectifs économiques de l’employeur. Les remarques désobligeantes ou les remises en question constantes et inutiles de la déficience qui sont humiliantes et vexatoires sont des exemples de conduites jugées étrangères aux activités légitimes dans un milieu de travail.

[185] La jurisprudence fait également savoir que le harcèlement nécessite habituellement un élément de persistance ou de répétition, bien que dans certaines circonstances, un seul incident puisse suffire à créer un environnement de travail hostile. Plus la conduite et ses conséquences sont graves, moins la répétition est nécessaire. Inversement, moins la conduite est grave, plus il faudra démontrer son caractère persistent (Canada (Commission canadienne des droits de la personne) c. Canada (Forces armées canadiennes) (re Franke), [1999] 3 C.F. 653 (1re inst.), aux paragraphes 43 et 45).

[186] En l’espèce, la conduite reprochée n’a pas un aspect vexatoire ou humiliant étranger aux activités légitimes de Postes Canada. Au contraire, les actes de Postes Canada ont été commis dans le cadre de la gestion des opérations postales au Centre de Glanford. En outre, à l’exception de l’expulsion de M. Day de son lieu de travail en novembre 2001, j’ai conclu que la déficience de M. Day n’avait pas joué de rôle dans les actes commis par Postes Canada. 

[187] Je ne crois pas qu’un employé handicapé raisonnable considérerait que l’expulsion de M. Day de son lieu de travail en novembre 2001, à elle seule, constituait du harcèlement. Cet acte manquait de respect et de sensibilité envers M. Day en tant que personne handicapée. Cependant, il ne s’agissait pas d’une conduite répétée et humiliante étrangère aux activités légitimes de Postes Canada.

[188] Pour ces motifs, je conclus que l’allégation de M. Day selon laquelle Postes Canada l’a harcelé en raison de sa déficience est sans fondement.

IV. Quelle est le redressement approprié?

[189] Le paragraphe 53(2) de la Loi autorise le Tribunal à rendre une ordonnance contre une personne coupable d’avoir commis un acte discriminatoire. J’estime que Postes Canada a commis un acte discriminatoire quand elle a mis M. Day en congé de maladie et quand elle l’a expulsé du lieu de travail en novembre 2001.

A. Indemnité pour préjudice moral

[190] M. Day a demandé une indemnité pour le préjudice moral qu’il a subi par suite de l’acte discriminatoire de Postes Canada. Le Tribunal peut ordonner à l’intimé d’indemniser jusqu’à concurrence de 20 000 $ la victime qui a souffert d’un préjudice moral (alinéa 53(2)e). 

[191] M. Day a affirmé dans son témoignage que le fait de ne pas savoir pourquoi il était mis en congé de maladie lui a causé beaucoup d’anxiété et de stress. Il a été humilié quand il a été escorté jusqu’à la sortie du Centre le 21 novembre 2001. Ces vexations résultent de l’acte discriminatoire commis par Postes Canada, qui n’a pas traité M. Day avec équité dans le processus de prise de mesures d’accommodement en novembre 2001.

[192] Par conséquent, j’estime qu’une indemnisation de 6 000 $ pour le préjudice moral est appropriée dans les circonstances en l’espèce. En vertu de l’alinéa 53(2)e), j’ordonne à Postes Canada de payer ce montant à M. Day.

B. Indemnité pour conduite délibérée ou inconsidérée

[193] M. Day a réclamé une indemnité en vertu du paragraphe 53(3) de la Loi. Cette disposition permet au Tribunal d’ordonner à l’auteur d’un acte discriminatoire de payer à la victime une indemnité maximale de 20 000 $, s’il en vient à la conclusion que l’acte a été délibéré ou inconsidéré.

[194] J’estime que, lorsqu’elle a mis M. Day en congé de maladie et l’a expulsé du Centre en novembre 2001, Postes Canada a commis un acte discriminatoire délibéré ou inconsidéré. Postes Canada et Medisys savaient ou auraient dû savoir que les renseignements contenus dans le rapport du Dr Miller étaient extrêmement importants et qu’ils auraient dû être communiqués immédiatement au médecin de M. Day. Elles savaient ou auraient dû savoir que M. Day tentait d’obtenir ces renseignements. Finalement, si Postes Canada ou Medisys étaient d’avis que M. Day était malade au point de constituer un risque pour la sécurité, ces renseignements auraient dû être communiqués au médecin de M. Day. L’omission de ce faire démontre un manque de respect injustifié envers les besoins de M. Day en tant que personne handicapée. Dans les circonstances, j’estime qu’il convient d’accorder une indemnité de 5 000 $ en vertu du paragraphe 53(3) de la Loi.

C. Intérêts

[195] Les intérêts s’appliquent sur toutes les indemnités accordées dans la présente décision, en vertu du paragraphe 53(4) de la Loi. Les intérêts sont calculés à taux simple sur une base annuelle en se fondant sur le taux officiel d’escompte fixé par la Banque du Canada (données de fréquence mensuelle), conformément au paragraphe 9(12) des Règles du procédure du Tribunal. Les intérêts commencent à courir à partir de la date du dépôt de la plainte. Cependant, en aucun cas la somme totale payable en vertu de l’alinéa 53(2)e), y compris les intérêts, ne doit excéder 20 000 $. De même, la somme totale payable en vertu du paragraphe 53(3), y compris les intérêts, ne peut excéder 20 000 $.

D. Frais juridiques

[196] Dans une décision récente, le président du Tribunal a conclu que le poids de son autorité judiciaire étaye le pouvoir que confère le paragraphe 53(2) de la Loi au Tribunal d’adjuger des frais juridiques raisonnables (Mowat c. Forces armées canadiennes, 2006 TCDP 49, au paragraphe 27). Je conviens que le Tribunal a le pouvoir en vertu de la Loi d’adjuger des frais juridiques raisonnables.

[197] Par conséquent, j’ordonne à Postes Canada d’indemniser M. Day pour les frais raisonnablement engagés pour avoir retenu les services d’un avocat avant et pendant l’audience.

[198] J’encourage les parties à conclure une entente quant au montant des dépens raisonnables en l’espèce. Je me réserve compétence sur cet aspect de l’adjudication au cas où les partie seraient incapables d’en venir à une entente. Les parties doivent informer le Tribunal dans les 60 jours suivant la réception de la présente décision si aucune entente n’a été conclue.

Signée par

Karen A. Jensen
Membre du tribunal

Ottawa (Ontario)
Le 19 octobre 2007

Tribunal canadien des droits de la personne

Parties au dossier

Dossier du tribunal : T1121/0306

Intitulé de la cause : Tim Day c. Société canadienne des postes

Date de la décision du tribunal : Le 19 octobre 2007

Date et lieu de l’audience : Les 6 au 9 novembre 2006
Les 15 au 17 novembre 2006
Les 5 au 9 février 2007
Les 19 au 23 mars 2007
Les 27 au 29 mars 2007

Victoria (Colombie-Britanique)

Comparutions :

Jo-Anne Kahan, pour le plaignant

Aucune comparution, pour la Commission canadienne des droits de la personne

Norm Trerise et Matthew Prescott, pour l'intimée

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