Tribunal canadien des droits de la personne

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TD 14/ 88 Le 8 novembre 1988 VERSION RÉVISÉE

DANS L’AFFAIRE DE: la Loi canadienne sur les droits de la personne (S. C. 1976- 77, ch. 33, dans sa version modifiée)

ET DANS L’AFFAIRE: d’une audience tenue devant un tribunal des droits de la personne constitué en vertu de l’article 39 de la Loi canadienne sur les droits de la personne

ENTRE:

DONALD DOUGLAS GAETZ Plaignant

- ET

LES FORCES ARMÉES CANADIENNES Mis en cause

DÉCISION DU TRIBUNAL

DEVANT: S. Charles Facey, conseiller de la Reine

ONT COMPARU: Pour la Commission des droits de la personne, René Duval

Pour le mis en cause, Brian J. Saunders

A Halifax, Nouvelle- Écosse, les 26, 27 et 28 juillet et à Ottawa, Ontario, le 28 septembre 1988.

MOTIFS ÉCRITS DE LA DÉCISION ORALE RENDUE LE 28 SEPTEMBRE 1988

TRADUCTION

L’audience devant ce tribunal procède d’une plainte déposée par Donald Douglas Gaetz, en date du 4 février 1985, contre le ministère de la Défense nationale, soutenant que le mis en cause a commis un acte discriminatoire fondé sur des motifs d’incapacité physique dans une affaire d’emploi, c’est- à- dire que M. Gaetz a été libéré des Forces armées canadiennes pour des motifs médicaux (diabète) et que la plainte allègue que le mis en cause a agi de façon discriminatoire en violation des articles 7 et 10 de la Loi canadienne sur les droits de la personne. A l’ouverture de l’audience, les parties ont consenti à ce que le nom du mis en cause soit changé et devienne les Forces armées canadiennes plutôt que le ministère de la Défense nationale.

Le tribunal a d’abord entendu le témoignage du plaignant qui a déclaré sous serment qu’il occupait un poste de commis magasinier au service de Revenu Canada, Impôt, depuis le 7 juillet 1986. Auparavant, M. Gaetz s’était enrôlé dans les Forces armées canadiennes (Marine) en ao t 1979 et avait été congédié en ao t 1985 pour des motifs médicaux s’appuyant sur le fait qu’il est diabétique insulino- dépendant.

Le plaignant, suite à un état de fatigue accompagné de polyurie et de sensation de soif, s’est adressé à son médecin qui a diagnostiqué le diabète pour la première fois en mai 1984. Les examens du sang, pratiqués par la suite, ont confirmé qu’il était diabétique et il a été hospitalisé pendant 30 jours à la Base des Forces canadiennes de Stadacona. Pendant son séjour à l’hôpital, il a été placé sous perfusion et on lui a appris à se soigner de la manière adéquate et à contrôler sa maladie par des injections, un régime alimentaire et l’emploi d’insuline.

A sa sortie de l’hôpital, M. Gaetz a repris son poste de technicien en approvisionnement dans les Forces canadiennes, son mode de vie normal ainsi que ses activités sportives comme l’haltérophilie, le squash et le volley- ball. Le plaignant a témoigné qu’il n’avait eu aucune difficulté à reprendre son emploi dans les Forces avant son congédiement et qu’il avait poursuivi sans problème ses exercices athlétiques.

Avant d’être congédié, M. Gaetz a été avisé par l’agent du personnel de sa base que sa catégorie médicale avait été abaissée et que, pour cette raison, il serait congédié. Le plaignant a ensuite déposé la plainte qui fait l’objet de la présente audience.

Au cours de son témoignage, M. Gaetz a décrit ses fonctions de commis magasinier à Revenu Canada, en les comparant à celles qu’il remplissait dans les Forces armées, et a conclu qu’à son avis, les tâches courantes étaient à peu près les mêmes dans les deux postes. Au cours de l’interrogatoire principal, il n’a cependant pas fait de commentaires sur la différence entre son poste actuel et l’ancien, c’est- à- dire qu’il n’a pas fait allusion à l’aspect militaire de son ancien poste.

Une bonne partie du témoignage direct de M. Gaetz a porté sur son état de diabétique et sur les recommendations qu’on lui avait faites pour traiter sa maladie. Il semblait, au début, connaître son état et a indiqué qu’il contrôlait bien sa maladie. Il a cependant admis qu’il avait quelques réactions se manifestant par des étourdissements, des sueurs et des tremblements. Lors de l’apparition de ces symptômes, il prenait les mesures qu’il jugeait opportunes pour les équilibrer, en ingérant une nourriture sucrée, habituellement un liquide. Il n’a jamais été hospitalisé suite à une réaction.

M. Gaetz a indiqué que dans son emploi actuel, il n’avait pas de sucre ou de bonbons à portée de la main car il lui était facile de s’en procurer en ville. Il a également déclaré qu’il avait soin d’emporter une provision de sucre ou de bonbons lorsqu’il partait en camping. Son travail actuel l’oblige souvent à faire des heures supplémentaires, auquel cas il est averti vingt- quatre heures à l’avance afin qu’il puisse se munir d’insuline.

Le plaignant a indiqué que sa libération lui a causé une grande déception et, au dire de ses amis, son humeur était plus dépressive.

On a également présenté des preuves relatives au revenu actuel du plaignant, ainsi que des faits démontrant qu’il comprenait le diagnostic de diabète sucré, que la maladie n’avait pas changé son mode de vie et qu’il aimerait travailler à nouveau pour les Forces armées, si sa plainte était reçue.

Lors du contre- interrogatoire par M. Saunders, le plaignant a décrit la nature de son régime quotidien ainsi que la dose d’insuline injectée et a admis qu’il avait besoin de connaître à l’avance l’horaire de ses repas afin de déterminer le genre d’activités qu’il pourrait entreprendre. Il a également indiqué qu’il se rendait compte de la nécessité de s’injecter de l’insuline régulièrement, a reconnu qu’il était imprudent de dormir trop longtemps et souligné l’importance de varier la dose injectée selon le genre d’exercices et d’activités prévus dans la journée.

M. Gaetz a également reconnu qu’il lui arrivait de ne pas pouvoir contrôler sa maladie à son gré, au cours de la période précédant et suivant son congédiement des Forces. · la page 31 de la transcription d’audience, il indique que, dans l’exercice de ses fonctions actuelles, il devait transporter des aiguilles ou une seringue d’insuline sur lui au cas où il aurait à faire des heures supplémentaires mais qu’autrement, il pouvait prévoir son emploi du temps et les activités physiques qu’il effectuerait dans la journée.

M. Saunders a passé en revue avec M. Gaetz ses fonctions de technicien en approvisionnement dans l’armée par contraste avec celles d’un emploi analogue dans le civil, par exemple au service du ministère de la Défense nationale. M. Gaetz a reconnu que son poste dans l’armée comportait des tâches militaires comme le maniement d’armes à feu, les mesures de lutte contre les incendies et l’utilisation d’équipement lourd. Il a également été question de la vie en mer et à bord d’un navire, notamment des fonctions d’un marin par opposition à celles d’un technicien en approvisionnement et du fait que les fonctions militaires étaient susceptibles, de temps à autre, de remplacer les fonctions courantes d’un technicien en approvisionnement, du caractère imprévisible de ces fonctions militaires et de l’absence d’un mode de vie régulier.

M. Gaetz a en outre témoigné qu’après l’avoir informé de l’abaissement de sa catégorie médicale, les Forces lui ont apporté de l’aide, s’efforçant de lui faciliter la transition à la vie civile. M. Gaetz a témoigné qu’on l’avait averti qu’il serait libéré vers le 25 ao t 1985, qu’il pouvait demeurer ou partir avant cette date et qu’il avait bénéficié d’une libération honorable. Il a déposé une plainte devant le tribunal le 4 février 1985.

Après son congédiement, M. Gaetz a commencé à chercher un emploi et a trouvé le poste qu’il occupe actuellement et dont il admet qu’il est moins exigeant que l’ancien et qu’il permet de mener une vie plus régulière.

M. Gaetz a également témoigné qu’il avait des réactions hypoglycémiques à intervalles d’environ six mois.

Après avoir à nouveau interrogé brièvement le plaignant, M. Duval n’a pas appelé d’autres témoins aux fins de sa charge primaire.

Au cours de l’exposé des faits, M. Saunders, en guise d’entrée en matière, a indiqué que la défense du mis en cause reposait sur l’article 14 de la Loi sur les droits de la personne et a fait connaître les noms des témoins qu’il appellerait tout en donnant une brève description de la teneur de leur témoignage. Le premier témoin que M. Saunders avait l’intention d’appeler était le Lcol Tattersall, de la Direction de la structure des forces, qui décrirait, en termes généraux, le rôle que les Forces armées canadiennes sont appelées à remplir, ainsi que la structure nécessaire pour ce faire et l’appréciation du rôle du technicien en approvisionnement au sein de cette structure. Le major McMenemy travaille à la Direction - Structures professionnelles militaires et M. Saunders a indiqué qu’il décrirait les particularités du groupe professionnel militaire auquel appartient le poste de technicien en approvisionnement.

Le capitaine Martin, de la Direction - Carrières militaires (Personnel non officier) est responsable des directeurs de carrière des techniciens en approvisionnement. Il parlerait de la conception qu’ont les directeurs de carrière du rôle des techniciens en approvisionnement ainsi que des conditions de travail qui sont propres à ces derniers au sein des Forces armées. L’adjudant- chef Muise, directeur de carrière des techniciens en approvisionnement et lui- même membre de cette profession, décrirait également leurs conditions de travail. Le dernier témoin appelé par M. Saunders serait le Dr Fisher, docteur en médecine, chef du personnel médical du Centre médical de la Défense et médecin- chef de la clinique pour diabétiques qui y est rattachée. Le Dr Fisher décrirait le diabète ainsi que les conséquences de cette maladie et dirait si elle croit que l’emploi d’un diabétique insulino- dépendant par les Forces armées comporte des risques.

Le témoignage du Lcol Tattersall a porté sur la structure des Forces armées et a, dans l’ensemble, aidé le tribunal à comprendre les rôles et les objectifs des Forces armées, non seulement au Canada mais encore partout dans le monde. Cependant, son témoignage ne touchait pas vraiment au problème des diabétiques insulino- dépendants du point de vue de M. Gaetz ou concernant leur emploi dans les Forces armées. Il traitait surtout de la structure et du regroupement des Forces armées canadiennes, à la fois au Canada et à l’étranger, ainsi que des différents éléments des Forces armées, en soulignant la participation du Canada à NORAD et à d’autres engagements globaux.

La partie la plus pertinente du témoignage du Lcol Tattersall figure aux pages 95 et 96 de la présente transcription, lorsqu’au cours du nouvel interrogatoire par M. Saunders, le Lcol Tattersall a indiqué que le poste de technicien en approvisionnement était une profession au sein des Forces armées canadiennes et qu’une profession équivalente existait au ministère de la Défense nationale. Le Lcol Tattersall les a cependant distinguées l’une de l’autre en soulignant que les techniciens en approvisionnement du ministère de la Défense nationale ne seraient pas appelés à servir dans des unités de combat, contrairement à leurs homologues des Forces armées canadiennes.

Le témoin suivant, appelé par M. Saunders, était le major James McMenemy, qui possède une formation en psychologie industrielle et qui travaille depuis 1984 à la Direction - Structures professionnelles militaires, dont le rôle est de mettre au point et de réglementer les structures professionnelles militaires, c’est- à- dire d’étudier les exigences professionnelles des personnes affectées au sein des différentes unités des Forces armées et de mettre en oeuvre la structure et le cadre de travail à l’intérieur desquels ces personnes travailleront. Le major McMenemy a témoigné que la structure professionnelle militaire détermine un cadre à l’intérieur des Forces armées canadiennes, permet de recruter, d’instruire, de promouvoir, d’affecter et d’employer tout le personnel militaire et définit en outre les aptitudes personnelles et les connaissances nécessaires pour exécuter différentes tâches et pour remplir différents postes au sein des Forces. La déclaration qui figure à la page 99 de la transcription d’audience ainsi qu’aux pages suivantes présente un intérêt particulier: le major McMenemy y énumère trois facteurs primordiaux qui caractérisent les exigences militaires, à savoir que tous les militaires doivent être capables de travailler dans les conditions les plus diverses, sans discussion, en vue de remplir le rôle opérationnel des Forces armées canadiennes. Aux pages 109 à 117 de la transcription sont décrites les fonctions générales du technicien en approvisionnement et comment on parvient à leur définition, selon le témoignage du major McMenemy. Une des déclarations du major McMenemy, qui figure à la page 118 de la transcription, à partir de la ligne 15, retient l’intérêt. Elle se lit comme suit:

(TRADUCTION)

«le rôle fondamental de l’armée implique l’exposition au danger et à la fatigue physique et soumet le militaire à un stress physique et émotionnel inhabituel.»

En réponse à la question sur les conditions du milieu de travail, le major McMenemy témoigne, à la page 128, ligne 23 et suiv., que:

(TRADUCTION)

«L’artilleur doit travailler en plein air dans toutes sortes de milieux et de climats pendant des périodes prolongées, sans repos et sans abri. L’artilleur travaille habituellement dans un milieu où il est couramment exposé aux rigueurs du terrain et de la température. L’artilleur peut également être sujet à des changements soudains et sévères au cours d’un déploiement intercontinental. Il doit travailler pendant de longues heures irrégulières au cours de l’entraînement et du combat.»

A la page 129, ligne 15, le major McMenemy a répondu de la manière suivante à une question de M. Saunders:

(TRADUCTION)

«Une détérioration ou un affaiblissement physique d à un stress psychologique prolongé ou à des horaires irréguliers de sommeil et de repas pendant de très longues périodes.»

Cette dernière réponse faisait suite à la question posée par M. Saunders concernant les dangers auxquels peut être exposé un artilleur ou un militaire affecté à l’unité de campagne. Au cours du contre- interrogatoire mené par M. Duval, à la page 156, ligne 15, de la transcription, le major McMenemy a répondu ainsi à la question que M. Duval lui avait posée:

(TRADUCTION)

«Lorsqu’une brigade part en campagne, tous les militaires de la brigade, tous sans distinction, participent au combat. Certaines positions sont plus éloignées du front de bataille mais lors d’un déploiement militaire, tous les militaires partent en campagne et vivent et travaillent dans des conditions de combat.» Question: Je comprends cela, mais un technicien en approvisionnement accomplirait- il alors les tâches qui lui sont propres dans les conditions que vous venez de décrire? Réponse: Il accomplirait des tâches techniques et des tâches militaires. Question: Comme quoi? Réponse: Etre en sentinelle, creuser des tranchées, conduire des véhicules pour transporter le matériel nécessaire, ce genre de tâches et d’autres également. Lorsque l’armée part en campagne, si vous êtes dans l’armée, vous êtes un soldat.

Ce qui suit, dans le contre- interrogatoire du major McMenemy par M. Duval, s’est avéré utile, mais le thème sous- jacent au témoignage du major McMenemy était, dans l’esprit du tribunal, que les techniciens en approvisionnement des Forces armées ont une double fonction, c’est- à- dire que leur qualité de techniciens en approvisionnement les oblige quotidiennement à remplir des fonctions opérationnelles courantes et que, élément tout aussi important, tous les militaires des Forces armées assument ou peuvent à un moment donné assumer une obligation qui l’emporte sur toutes les autres, inhérente à la nature même de la structure des Forces armées et qui est celle de se préparer au combat et, en cas de guerre, de participer au combat ou aux opérations militaires.

Le témoin suivant appelé par M. Saunders était le capitaine Martin qui a déclaré avoir commencé à travailler comme technicien en approvisionnement dans les Forces en 1962, emploi qu’il a occupé jusqu’en 1981 inclusivement, année au cours de laquelle il a été promu d’adjudant à lieutenant. Après avoir été nommé officier en 1981, il a exercé ses fonctions en approvisionnement de matériel spécialisé de logistique et, plus tard, de transport. La première partie du témoignage du capitaine Martin a porté sur le service et l’affectation des techniciens en approvisionnement au sein des Forces armées canadiennes. En 1986, le capitaine Martin a été muté à la Direction - Carrières militaires (Personnel non officier), au Quartier général de la Défense nationale à Ottawa, organisme responsable de la promotion de carrière et de la gestion de tous les militaires non officiers des Forces canadiennes, ce qui englobe les affectations, les promotions, les libérations et d’autres activités. Au poste qu’il occupe actuellement, le capitaine Martin est responsable de trois groupes professionnels: les techniciens en approvisionnement, les commis comptables et les techniciens de munitions. Il a indiqué que la direction où il travaille était responsable de la promotion de carrière des militaires affectés dans les différents métiers. A la page 176 de la transcription, M. Saunders a demandé au capitaine Martin s’il existait des places, dans les Forces, où les techniciens en approvisionnement ne seraient pas appelés à servir et voici la réponse:

(TRADUCTION)

«Monsieur, je ne connais aucun endroit où le technicien en approvisionnement ne serait pas appelé à servir dans les Forces canadiennes. A première vue, je ne pense pas qu’il y ait d’affectation dont il serait exempté.»

A la page 179, M. Duval a demandé au capitaine Martin s’il existait un cheminement de carrière souhaitable dans le cas des techniciens en approvisionnement et sa réponse a indiqué qu’on juge généralement souhaitable que les techniciens en approvisionnement s’acquittent de toutes les tâches possibles de la profession, au premier et au deuxième échelon. Au premier échelon se trouvent essentiellement les militaires affectés à la zone de combat, c’est- à- dire sur les navires, dans le secteur des armes de combat et dans les bataillons. Le deuxième échelon désigne les stations fixes comme la BFC Toronto. Lorsqu’on lui a demandé pourquoi il était souhaitable de travailler aux deux échelons, le capitaine Martin a répondu:

(TRADUCTION)

«D’abord pour acquérir de l’expérience, car tous les militaires qui travaillent au deuxième échelon appuient certaines unités du premier échelon; ensuite, pour la flexibilité et la mobilité, afin qu’en situation d’urgence ou en cas de guerre, les techniciens en approvisionnement puissent exécuter n’importe quelle tâche, quel que soit l’endroit ou la guerre ... quel que soit le milieu.»

Le capitaine Martin a également indiqué que le fait qu’un individu passe sa carrière uniquement dans une affectation de deuxième échelon réduirait ses chances de promotion car il ne pourrait pas démontrer la flexibilité nécessaire pour obtenir une promotion et que, si un groupe d’individus recevait une instruction limitée, par exemple uniquement au deuxième échelon, la flexibilité nécessaire au déploiement en combat ferait défaut, le cas échéant.

A la page 185 de la transcription, le capitaine Martin a indiqué qu’il avait travaillé dans une unité de campagne, la 3e Brigade mécanisée, un bataillon d’infanterie mécanisé d’armes de combat qui faisait partie d’un groupe- brigade mécanisé de combat de l’OTAN. Cette unité avait pour but premier d’attaquer et de vaincre, si possible, l’ennemi. Décrivant plus en détail son service dans cette unité de campagne, le capitaine Martin a indiqué qu’il passait environ le tiers de son temps loin de sa base d’attache, en campagne, à effectuer des exercices visant à instruire et à appuyer les compagnies du front, au cours de la période annuelle d’exercices de tir. Le capitaine Martin a également témoigné que ces exercices ont pour but d’entraîner les militaires à la guerre. En ce qui concerne plus particulièrement les techniciens en approvisionnement, ces exercices visent à instruire et à appuyer les militaires qui combattent au front. Le capitaine Martin a ajouté que ces exercices et manoeuvres duraient entre trois jours et une semaine et pouvaient se prolonger jusqu’à six semaines, selon le genre d’exercice, et que, dans ce dernier cas, les militaires passaient tout leur temps loin de la base d’attache et en campagne. Le capitaine Martin a également parlé des conditions de vie des militaires lors du déploiement en campagne. Il a souligné le caractère incertain et imprévisible des manoeuvres, du logement et des heures de repas et a indiqué qu’habituellement, toutes les commodités fournies aux militaires qui ne participent pas à des exercices de formation tactique, sont, selon ses propres termes (TRADUCTION) difficiles à obtenir sur une base régulière. Le capitaine Martin a également décrit quelques- unes des responsabilités d’un technicien en approvisionnement lors du service en campagne et les conditions rigoureuses qui pourraient prévaloir dans certaines situations. Il a souligné qu’il arrivait que les militaires soient obligés de travailler intensivement pendant des périodes prolongées, suivies d’un arrêt des opérations, pour paraphraser le capitaine Martin.

Pour le reste, le témoignage du capitaine Martin traitait > 12 surtout des fonctions et des responsabilités du technicien en approvisionnement en campagne ainsi que des conditions de travail des membres des Forces. Il a également mentionné les différentes tâches que doivent accomplir les militaires des Forces armées, y compris les techniciens en approvisionnement, en plus de leurs fonctions habituelles, comme la faction, la lutte contre les incendies, la défense de la base et la maîtrise des foules.

Le capitaine Martin a également parlé des exercices de la force de défense de la base et a répondu de la manière suivante à la question de M. Saunders, à la page 201 de la transcription, ligne 5.

(TRADUCTION)

Question: D’accord, et si on vous affecte à la force de défense de la base, devez- vous également remplir vos fonctions habituelles?

Réponse: Non. Non, vous en êtes exempté; lorsque la force de défense de la base est mobilisée, vous devez vous consacrer totalement à la force de défense de la base, et quant à vos fonctions habituelles - vous ne vous présentez même pas à votre lieu de service habituel."

A la page 204 de la transcription, en réponse à la question figurant à la ligne 2 posée par M. Saunders:

(TRADUCTION)

Question: En qualité de directeur de carrière, pourriez- vous assurer à un individu qui exerce le métier, excusez- moi, la profession de technicien en approvisionnement un poste prévoyant un emploi du temps régulier, des heures de repas régulières et qui lui permettrait d’évaluer à l’avance l’ampleur des activités physiques exigées par son emploi?

Réponse: Non, monsieur, je ne pourrais pas donner cette garantie à un technicien en approvisionnement."

Le capitaine Martin a également témoigné qu’il avait fait partie du Conseil médical de révision des carrières (CMRB), dont la mission est d’étudier et de faire des recommandations sur les mesures à prendre au sujet d’un individu dont la catégorie médicale est de façon permanente audessous des exigences professionnelles minimum, les démarches qui amènent un individu devant le Conseil et le règlement d’une affaire en général.

Le capitaine Martin a également indiqué que le Conseil médical de révision des carrières étudiait chaque cas sur une base individuelle et qu’il avait une grande latitude. Le Conseil peut recommander un grand nombre de solutions; il peut suggérer de continuer à employer le militaire tout en imposant des restrictions l’obligeant à demeurer à son grade actuel et à ne pas suivre de cours de perfectionnement jusqu’à la fin de son service ou de maintenir le militaire à son poste sans restriction aucune. Le Conseil peut également recommander un reclassement.

Commençant à la page 212 de la transcription, le capitaine Martin parle des circonstances dans lesquelles le Conseil médical de révision des carrières peut recommander un reclassement et cite l’exemple d’un militaire qui a le mal de mer de manière chronique. Les Forces ne l’affecteront pas à un poste en mer. Par contre, si le militaire est un excellent mécanicien par exemple, il pourrait être reclassé du génie naval au génie aérien; le problème du mal de mer serait ainsi résolu. A la page 213, ligne 10, M. Saunders pose la question suivante:

(TRADUCTION)

Question: Non, je parle en général; en procédant à un reclassement, tenez- vous compte des restrictions médicales de l’individu?

Réponse: Oui, évidemment, et il doit satisfaire aux normes minimum; cependant, le Conseil montre beaucoup d’humanité dans certains cas. Vous savez, c’est un conseil humain composé de gens bienveillants, je pense, qui tiennent compte de la personne et qui examinent de près les restrictions. Or, l’officier de sélection du personnel fait subir un examen au militaire, au cours de l’entrevue, afin de déterminer s’il répond aux exigences; à ce moment, si le militaire ne satisfait à aucune norme médicale, il ne peut être reclassé.

Question: Une fois qu’on a pris la décision de libérer un militaire à cause d’une incapacité physique ou pour des raisons médicales, le militaire est- il libéré des Forces la journée même?

Réponse: Non. Une fois que la décision est rendue, on transmet un avis au militaire, à son commandant ainsi qu’au personnel administratif du QGDN afin de les informer de la décision. La libération ne prend habituellement effet qu’au moins six mois plus tard et même au- delà et pas avant la période d’affectations, qui survient parfois seulement huit mois plus tard, et ...

Question: Puis- je vous demander pourquoi?

Réponse: Essentiellement, pour des raisons humanitaires. Vous savez, nous ne cherchons à faire de mal à personne. Nous ne voulons faire de mal à personne et nous donnons le temps au militaire d’effectuer la transition à la vie civile... à une carrière dans le civil."

A la même page, le capitaine Martin a également indiqué que le Conseil médical de révision des carrières avait déjà étudié des cas de militaires diabétiques et, dans son témoignage, fait état de 34 cas depuis 1985, en précisant que 14 des 35 militaires avaient été libérés et qu’il s’agissait, dans tous ces cas, de diabétiques insulino- dépendants qui avaient besoin d’injections quotidiennes d’insuline. Cinq des militaires non libérés avaient été gardés jusqu’à l’âge de la retraite obligatoire, c’est- à- dire pour une période allant de 18 à 24 mois, afin de pouvoir recevoir leur pension de retraite. Quatre autres militaires sont demeurés au service des Forces tout en faisant l’objet de restrictions et dans ces cas, le pronostic médical indiquait que si ces individus suivaient un régime alimentaire approprié et effectuaient les exercices nécessaires, ils pourraient contrôler leur maladie à l’aide de la médication par voie orale. Le capitaine Martin a également souligné qu’il ne savait pas si certains des militaires qui avaient continué à travailler étaient des diabétiques insulino- dépendants, en ce sens qu’ils avaient besoin d’injections d’insuline. Au cours du contre- interrogatoire mené par M. Duval, au sujet de la nature des restrictions professionnelles imposées aux quatre militaires qui ont continué à travailler pour les Forces suite à la rétrogradation de leur catégorie médicale par le Conseil médical de révision des carrières, le capitaine Martin a déclaré ce qui suit, à la page 230, ligne 5.

(TRADUCTION)

Réponse: Les militaires feraient l’objet de restrictions professionnelles, ce qui signifie qu’ils resteraient du même grade. Ils ne seront jamais promus à un grade supérieur. Prenons le cas d’un caporal.

Question: Oui?

Réponse: Afin d’être promu - eh bien, vous ne pouvez être promu caporalmaître si vous êtes un caporal soumis à des restrictions. Vous ne pourrez pas suivre de cours de qualification professionnelle car l’avancement vous est de toute façon interdit.

Question: Oui? Réponse: Nous parlons donc d’une restriction professionnelle.

Question: Et cela signifie que l’individu demeurera au même poste pendant toute la durée de sa carrière, je veux dire de sa carrière dans les Forces, au même poste et sans possibilité d’avancement?"

Plus loin, à la page 231, le capitaine Martin a témoigné qu’il connaissait des techniciens en approvisionnement qui travaillaient dans les Forces et qui étaient soumis à des restrictions et a indiqué que les restrictions en question étaient surtout d’ordre géographique, c’est- à- dire que ces militaires ne pouvaient travailler en mer, en campagne, dans les forces de l’ONU et dans d’autres conditions.

Au cours du nouvel interrogatoire, M. Saunders a demandé au capitaine Martin si ces techniciens en approvisionnement demeurés en fonction tout en étant soumis à des restrictions, notamment d’ordre géographique, faisaient également l’objet de restrictions professionnelles. Le capitaine Martin a répondu qu’ils pouvaient demeurer à leur poste dans les Forces selon le genre de restrictions dont ils faisaient l’objet. A la page 232 de la transcription, le capitaine Martin a indiqué que la conservation d’un emploi avec restrictions signifie que l’individu peut remplir des fonctions militaires élémentaires et un bon nombre de fonctions professionnelles et a ajouté que (TRADUCTION) pour l’essentiel, je crois, la décision tient compte du fait que l’individu est en mesure de faire partie de la FD (B), qui représente une fonction militaire courante des Forces canadiennes et, si tel est le cas, nous continuons de l’employer et...

Le témoin suivant, appelé au nom du mis en cause, était l’adjudant- chef Muise, qui a passé la plus grande partie de sa carrière au service des Forces armées à titre de technicien en approvisionnement et qui est actuellement affecté au Quartier général de la Défense nationale à Ottawa, en qualité de directeur de carrière des techniciens en approvisionnement. Il occupait ce poste au cours des deux mois précédant l’audience. L’adjudant- chef Muise a parlé de l’expérience et des responsabilités exigées des techniciens en approvisionnement. M. Saunders a ensuite demandé à l’adjudant- chef Muise de décrire en détail les différentes fonctions du technicien en approvisionnement au sein des Forces armées. Il a mentionné en particulier les fonctions que doit accomplir le technicien en approvisionnement en plus de ses fonctions habituelles, dans la structure des Forces armées, et la façon dont ces fonctions devaient s’insérer dans le cadre militaire.

Le témoin suivant appelé par le mis en cause était le commandant Cora Fisher, reconnue par les deux parties comme étant spécialiste en médecine interne et en diabétologie. Le commandant Fisher a indiqué qu’elle dirige actuellement la clinique pour diabétiques du Centre médical de la Défense nationale. Elle occupe ce poste depuis 1984 et a mentionné qu’elle connaissait bien les normes médicales établies par les Forces armées canadiennes. Il est intéressant de noter, en passant, que, pendant un certain temps, le commandant Fisher a exercé la médecine à Cornwallis et qu’elle a participé, pendant un court laps de temps, au diagnostic et au traitement de M. Gaetz.

A la page 272 de la transcription, le commandant Fisher a identifié les deux facteurs qui figurent sur la formule de déclaration médicale concernant M. Gaetz, c’est- à- dire le facteur G et le facteur O et a précisé que le facteur G représentait le facteur géographique, dont le sens dépasse l’aspect purement géographique car il comprend le climat et le degré d’isolement. Le commandant Fisher a précisé que le code G4 désigne essentiellement un centre urbain et un climat tempéré. Elle a également mentionné que le facteur O est vraisemblablement le facteur le plus important car il détermine les limites professionnelles d’un individu. Par exemple, un militaire dont la déclaration médicale contient la mention O1 est, par bonheur, jugé apte à exécuter n’importe quelle tâche. A la page 273, ligne 11, le commandant Fisher a indiqué, et je cite, que:

(TRADUCTION)

«On attribue la catégorie O3 ou O4 aux diabétiques. M. Gaetz a été classé O3, ce qui signifie qu’il est affligé d’une incapacité physique moyenne. S’il la contrôle, il peut exécuter presque toutes sortes de tâches.»

Elle a ajouté plus loin, à la page 17:

(TRADUCTION)

«Une incapacité physique ou psychologique moyenne qui l’empêche d’effectuer des travaux de force ou de travailler sous stress pendant des périodes prolongées» et a indiqué que le terme périodes prolongées représentait le facteur professionnel le plus favorable attribué à un diabétique et qu’il signifie que l’individu peut exécuter la plupart des tâches, sans cependant faire d’efforts importants.

A la page 278 de la transcription, faisant référence au tableau 9 de la pièce R1, le commandant Fisher a mentionné que:

(TRADUCTION)

«Le tableau 9 représente ce que nous considérons comme étant un des barèmes les plus utiles pour évaluer cette maladie car nous reconnaissons que le diabète est une maladie qui présente des différences et qui comprend plusieurs sous- catégories, et le fait que l’urine de M. Gaetz contenait non seulement une quantité élevée de glucose mais également un grand nombre de corps cétoniques, en fait un diabétique de type 1 sujet à la cétose».

A la page 279, le commandant Fisher donne la description suivante du diabète sucré:

(TRADUCTION)

«Le diabète sucré est causé par l’absence relative ou totale d’insuline, ce qui provoque un grand nombre d’anomalies métaboliques, dont le taux de glucose élevé représente le symptôme le plus important.» Elle a ensuite mentionné que la présence de corps cétoniques n’est pas seulement un signe du diabète mais encore le signe qu’il s’agit d’une des formes les plus graves de diabète. Le commandant Fisher a également indiqué qu’un trop grand nombre de corps cétoniques, qui entraînent un excès d’acidité, peut mener jusqu’au coma. Elle a en outre précisé que la plupart des diabétiques sujets à la cétose, allant même jusqu’à 50 % d’entre eux, découvrent leur état suite à un coma diabétique. Heureusement, ce ne fut pas le cas de M. Gaetz.

Le commandant Fisher a ensuite décrit le traitement et le contrôle des diabétiques au moyen de l’insuline et du régime alimentaire. Elle a précisé qu’il existe des périodes de pointe reliées à l’injection d’insuline et aux repas. En ce qui a trait aux doses d’insuline, le commandant Fisher a répondu à la question de M. Saunders (page 294, ligne 8) de la manière suivante:

(TRADUCTION)

Question: D’accord. Une fois que la dose est déterminée, demeure- t- elle toujours la même?

Réponse: Non. La dose dépend d’une multitude de facteurs. Les trois facteurs les plus simples sont les habitudes en matière d’alimentation, d’activité et de sommeil, mais ce ne sont pas les seuls. En fait, de nombreux autres facteurs entrent également en ligne de compte."

A la ligne 18, en réponse à la question de M. Saunders, (TRADUCTION) Peuvent- ils être influencés par l’activité physique?, le commandant Fisher déclare, à la ligne 19:

(TRADUCTION)

Réponse: Oui. Un des problèmes mineurs auxquels le diabétique fait face est le choix du point d’injection. S’il prévoit demeurer assis à son bureau pendant toute la matinée et qu’il injecte de l’insuline dans ses jambes, l’absorption sera plus lente que s’il devait sortir et courir, auquel cas la circulation sanguine au point d’injection serait plus vite activée.

Question: Et l’activité physique peut- elle influencer le moment où l’insuline sera à son maximum?

Réponse: Oui, au moyen de cette méthode. Ce qui est sans doute plus important que les variations de la période de pointe, cependant, c’est que l’exercice influence le métabolisme et augmente la sensibilité des globules sanguins à l’insuline.

Question: Quelles sont les répercussions de ce phénomène?

Réponse: Eh bien, en fait, si vous devez faire des exercices imprévus, vous pouvez compenser en partie en mangeant plus, mais une des raisons pour lesquelles on recommande aux diabétiques de faire régulièrement de l’exercice ou des activités physiques est que l’exercice influence le métabolisme et rend les globules plus sensibles à l’insuline."

Au sujet du deuxième élément du traitement, c’est- à- dire le régime alimentaire ou l’importance des repas, le commandant Fisher répond, à la page 295, ligne 17:

(TRADUCTION)

Réponse: Je ne cesse de répéter à mes patients que le régime alimentaire constitue l’élément le plus important du traitement et que quoi qu’ils fassent, le régime demeure extrêmement important."

Ensuite, à la page 296, ligne 15:

(TRADUCTION)

Question: Et je déduis de ce que vous avez dit plus tôt au sujet de l’insuline que l’horaire des repas est important?

Réponse: L’horaire des repas est important car une fois que l’insuline est injectée, vous ne pouvez volontairement changer le moment culminant.

Question: D’accord. Parlons à nouveau du troisième élément, l’activité physique. Vous avez abordé ce sujet en partie. Constitue- t- il un facteur important?

Réponse: L’activité physique et l’horaire des activités physiques sont tous deux très importants. On recommande habituellement d’éviter les exercices les plus pénibles au moment où l’insuline arrive au point culminant. Si vous effectuez des exercices exténuants à ce moment, vous risquez de faire chuter trop vite votre taux de glycémie».

la page 297, ligne 13, figure la question posée par M. Saunders:

(TRADUCTION)

«Or, un diabétique peut- il avoir des problèmes s’il n’effectue pas les activités physiques qu’il avait prévues au cours de la matinée?»

Réponse: «S’il n’effectue pas les activités physiques prévues, il pourrait avoir un taux de glycémie trop élevé.»

Question: «D’accord, ... qu’arrivera- t- il si un diabétique effectue plus d’activités physiques que prévu au cours de la matinée où il a eu ses injections?»

Réponse: «Il risque d’avoir une réaction hypoglycémique. Il peut compenser; s’il exerce un contrôle sur sa condition, il peut compenser en absorbant plus de nourriture, et il aura besoin de cette nourriture car après l’injection, il ne peut changer la quantité d’insuline. Il ne peut modifier que la quantité de glucose.»

Lorsque M. Saunders lui a demandé si le traitement prescrit aux diabétiques devait obligatoirement comprendre ces trois éléments régissant un mode de vie, le commandant Fisher a répondu, à la page 298, ligne 5:

(TRADUCTION)

«Oui. Mais malheureusement, pour les diabétiques, un tel mode de vie n’est pas facile à adopter. Vous devez équilibrer vos activités. Vous devez équilibrer votre insuline, votre nourriture et vos activités et vous devez avoir constamment conscience d’un tel équilibre.»

Lorsque M. Saunders lui a rappelé que M. Gaetz s’injectait de l’insuline deux fois par jour et qu’il mesurait son taux de glycémie tous les deux jours et qu’il lui a demandé si elle croyait qu’il s’agissait d’habitudes normales pour un diabétique, le commandant Fisher a répondu que d’après son expérience, ce n’était pas idéal. La plupart du temps, elle s’attendait à ce que les patients aient une injection deux fois par jour et mesurent leur taux de glycémie deux fois par jour afin d’ajuster la dose. A la page 303 de la transcription, ligne 24, figure la question

(TRADUCTION)

«M. Gaetz a également indiqué qu’il ne se contrôlait pas toujours bien. Que signifie cette affirmation pour un diabétique?»

Réponse: «Cela signifie - cela peut signifier trois choses et nous ne lui avons pas demandé ce qu’il voulait dire, mais je m’en doute cependant. Lorsqu’un diabétique dit qu’il ne se contrôle pas bien, il peut vouloir dire trois choses, à savoir qu’il éprouve des hauts et des bas imprévisibles, que son taux de glycémie a tendance à être trop élevé la plupart du temps ou que son taux de glycémie est trop bas. Il veut habituellement dire la deuxième chose. Il veut dire que son taux est trop élevé et je crois que c’est ce que M. Gaetz voulait dire.»

Question: «M. Gaetz a également dit qu’il n’avait pas de sucre sur lui car il pouvait s’en procurer dans les magasins. Qu’en pensez- vous?»

Réponse: «Cette attitude m’amènerait à me préoccuper de sa sécurité personnelle. Lorsque les diabétiques n’ont pas beaucoup de réactions sévères, ils ont tendance à devenir blasés ou, si vous voulez, un peu trop confiants. Le délai entre le signal d’alarme et la réaction peut varier mais s’il est court, vous pouvez facilement et rapidement ingérer le sucre ou le bonbon que vous avez à portée de la main, mais si vous êtes obligé d’aller acheter une nourriture sucrée, votre délai de réaction est plus long...»

A la page 305 de la transcription, ligne 8, figure la question de M. Saunders:

«Parlons maintenant des complications graves auxquelles sont exposés les diabétiques insulino- dépendants. Quelles sont les complications graves du diabète?»

Réponse: «Les complications graves sont liées à un taux de glycémie trop élevé ou trop bas. Un taux trop bas est la complication la plus grave et la plus dangereuse.»

Au sujet du taux de glycémie trop élevé, le commandant Fisher a indiqué qu’un diabétique est hyperglycémique lorsque son taux de glycémie dépasse la limite acceptable et qu’à ce stade, des symptômes peuvent apparaître ou non. Au départ, il ne montre pas de symptômes. Le premier symptôme serait probablement une augmentation de l’élimination d’urine car l’une des premières fonctions métaboliques touchée par un taux trop élevé est le filtrage, c’est- à- dire que les reins ne peuvent assimiler tout le glucose, qui se déverse alors dans l’urine, la molécule de glucose entraînant avec elle une quantité donnée d’eau qui contient certains électrolytes. A la ligne 15 de la page 306: Question: Tous les diabétiques insulino- dépendants sont- ils sujets à l’hyperglycémie? Réponse: Oui. Question: Cela comprend même les diabétiques qui contrôlent habituellement leur maladie? Réponse: Oui.

A la ligne 19 de la page 307:

(TRADUCTION)

Question: D’accord. Parlons maintenant du taux de glucose trop bas. Quel terme désigne cette condition?

Réponse: On appelle cette condition hypoglycémie. Le fonctionnement du cerveau dépend du glucose et l’hypoglycémie est donc extrêmement grave."

A la page 308 de la transcription, ligne 22, figure d’abord la question posée par M. Saunders:

(TRADUCTION)

Question: D’accord. Vous avez dit, par exemple, qu’une augmentation de l’activité physique pourrait provoquer une réaction. Quelles sont les autres situations qui pourraient provoquer l’hypoglycémie chez l’individu?

Réponse: Eh bien, ne pas pouvoir se procurer de la nourriture au moment prévu ou un repas différé, l’impossibilité de prendre un repas, ou bien commettre une erreur lors de l’injection d’insuline."

Le commandant Fisher a poursuivi son témoignage en décrivant les symptômes qui apparaissent en premier lieu chez un diabétique qui a un taux de glucose trop bas et qui a une réaction hypoglycémique. Le commandant Fisher a d’abord décrit les premiers symptômes en les qualifiant d’adrénergiques, puis la deuxième série de symptômes dits neuro- glycopéniques. Elle a indiqué que ces derniers symptômes étaient reliés au système nerveux central et au cerveau. A la ligne 15 de la page 311, en réponse à la question de M. Saunders:

(TRADUCTION)

Question: Que se passe- t- il si le diabétique ne reçoit pas de traitement lors de l’apparition de la deuxième série de symptômes?

Réponse: A ce deuxième stade, si le patient n’est pas traité et que son taux de glycémie continue à chuter, il finira par perdre connaissance.

Question: Quel est le délai entre la première et la deuxième série de signaux d’alarme?

Réponse: Il varie énormément. Le délai peut durer quelques secondes ou quelques minutes. Dans certains cas, en fait, le diabétique n’éprouve, ou du moins peut ne reconnaître aucun des symptômes adrénergiques de la première série. Il arrive même qu’aucun des symptômes mentionnés n’apparaisse..."

A la ligne 21 de la page 314, M. Saunders a demandé au commandant Fisher si M. Gaetz était susceptible d’avoir une réaction sans signal d’alarme. (TRADUCTION) Réponse: Oui, car tous les diabétiques insulino- dépendants ou sujets à la cétose peuvent connaître ce genre de problème. Lorsque M. Saunders lui a posé une question au sujet du traitement de l’hypoglycémie, le commandant Fisher a mentionné que le traitement consistait à ingérer du glucose et que la façon de procéder dépendait du degré de réaction. Dans les cas les plus simples, un patient qui reconnaît un signal d’alarme peut prendre n’importe quelle sorte de sucre ou d’hydrate de carbone. Le commandant Fisher a indiqué que la méthode traditionnelle par voie orale consistait à boire du jus d’orange additionné de sucre, mais qu’il existait d’autres moyens.

A la page 319, M. Saunders a demandé au commandant Fisher si elle était d’accord avec la déclaration d’une des autorités mentionnées dans les pièces du mis en cause, déclaration qui figure à la ligne 23 et qui se lit comme suit: (TRADUCTION) On doit souligner que les crises hypoglycémiques sont dangereuses et que si elles se produisent souvent, elles peuvent entraîner des conséquences graves ou même mortelles. Le commandant Fisher a répondu de la manière suivante: (TRADUCTION) Cette opinion est couramment acceptée et très réaliste. Une crise hypoglycémique, qui entraîne une altération des fonctions cérébrales, est toujours dangereuse, et même de nos jours, il arrive malheureusement que des diabétiques meurent par suite d’un coma diabétique lorsqu’ils ne peuvent obtenir les soins médicaux nécessaires. M. Saunders a ensuite interrogé le commandant Fisher sur le traitement. Il lui a demandé si un individu pouvait reprendre ses activités immédiatement après avoir ingéré le glucose nécessaire pour augmenter son taux de sucre. A la page 320, ligne 12, le commandant Fisher a répondu: (TRADUCTION) ... Il ne reviendra certainement pas à un état parfaitement normal immédiatement après avoir ingéré le glucose et s’il est hypoglycémique, l’ingestion de quatre onces de jus d’orange et d’un peu de sucre l’aidera à remédier à la gravité de son état. S’il veut ensuite reprendre ses activités, il devra probablement manger autre chose ... A la page 320 de la transcription, ligne 20, M. Saunders a posé la question suivante: (TRADUCTION) Question: Mais que se passe- t- il si l’individu est en train d’effectuer des travaux de force? Devrait- il reprendre ses activités immédiatement après avoir ingéré le glucose? Réponse: S’il le fait, il aura simplement une nouvelle réaction hypoglycémique car, même si la quantité de glucose ingérée est suffisante pour ramener le taux de glycémie au niveau normal, elle n’est pas suffisante pour lui permettre d’effectuer des travaux de force.

M. Saunders a ensuite demandé au commandant Fisher si des effets secondaires apparaissaient suite à l’ingestion du sucre ou du glucose destinée à contrecarrer la réaction. Elle a répondu, à la page 321, ligne 14:

(TRADUCTION)

«Certains patients vous diront en fait qu’après avoir eu une grave réaction hypoglycémique, ils ne sont pas vraiment en mesure de fonctionner normalement pour le reste de la journée et peut- être même pour une partie du lendemain, si la réaction a été très grave».

M. Saunders a ensuite poursuivi l’interrogatoire principal en posant des questions sur les installations médicales disponibles dans les unités des Forces armées canadiennes. Il pose alors la question suivante, à la page 321, ligne 23:

(TRADUCTION)

Question: Bon, eu égard à l’argument voulant qu’un adjoint médical se trouve à bord d’un destroyer. Croyez- vous, docteur, que les installations médicales offertes à bord d’un destroyer suffisent à régler les problèmes que pourrait connaître un diabétique insulino- dépendant?

Réponse: Malheureusement non ...».

Le commandant Fisher a ensuite expliqué pourquoi, à la page 322, ligne 20, qui se lit comme suit:

(TRADUCTION)

«Selon l’endroit où se trouve le destroyer, il pourra consulter un médecin immédiatement ou devoir attendre des heures ou des jours; cependant, la présence du médecin n’est pas le seul facteur important car même si, par hasard, je me trouvais à bord de ce destroyer, moi qui ai soigné nombre de diabétiques et qui connais bien le sujet, je n’aurais pas l’équipement nécessaire pour régler la situation.»

M. Saunders a ensuite porté son attention sur les unités qui sont déployées en campagne et a demandé au commandant Fisher si ces unités militaires possèdent les installations nécessaires au traitement d’un diabétique insulino- dépendant qui serait atteint des complications graves mentionnées par le docteur Fisher plus tôt dans son témoignage. Le commandant Fisher a indiqué qu’aucun hôpital d’unité avancé ou de campagne ne possédait en fait tout l’équipement nécessaire et a cité l’exemple récent de la guerre des Malouines. A la page 329 de la transcription, ligne 3, M. Saunders a abordé le sujet des soins des pieds et a demandé au commandant Fisher d’en décrire l’importance:

(TRADUCTION)

«Les soins des pieds sont très importants pour le diabétique. L’anatomie humaine est telle qu’une des circulations les plus vulnérables est celle qui se rend aux pieds et étant donné que les globules blancs du diabétique ne fonctionnent pas toujours normalement et qu’il a parfois des problèmes de peau, tout problème touchant les pieds, si minime soit- il, peut dégénérer.»

Plus loin dans son témoignage, le commandant Fisher a déclaré, à la ligne 15:

(TRADUCTION)

«On dit aux diabétiques qu’ils doivent laver leurs pieds et les garder au sec. On leur montre, ce qui peut sembler sans importance si on n’en a jamais constaté les résultats, comment couper leurs ongles d’orteils afin de ne pas blesser leurs pieds ce faisant.»

Lorsqu’on lui a demandé si elle croyait que les soins des pieds constituaient un problème dans le cadre du service dans les unités de campagne des Forces armées canadiennes, le commandant Fisher a déclaré, à la ligne 25:

(TRADUCTION)

«Il y a toujours, en campagne, des problèmes reliés aux soins des pieds ... On dit à tous les soldats d’armes de combat d’emmener des chaussettes de rechange dans leur sac et d’en changer souvent. C’est important pour tout le monde, mais pour un diabétique, c’est encore plus important.»

Interrogée à propos des conditions de travail des diabétiques, notamment par temps froid, le commandant Fisher a déclaré, à la page 330, ligne 20:

(TRADUCTION)

«Oui. Par rapport à un non- diabétique, le diabétique doit être capable de mieux adapter son régime alimentaire et sa dose d’insuline afin de pouvoir travailler par temps froid.»

Répondant à une question sur le travail par postes et sur le problème qu’un tel horaire présentait pour un diabétique, le commandant Fisher a déclaré, à la page 331, ligne 7:

(TRADUCTION)

«Oui. C’est un problème surmontable.

S’il contrôle et comprend bien sa maladie, un diabétique peut faire ce genre de travail. La difficulté ne surgit pas seulement du fait qu’il travaillera par postes, mais également du fait de changer de poste de travail et si, à l’intérieur d’un cycle, il travaille le jour pendant un mois, la nuit pendant un mois et le soir pendant un mois, le diabétique peut adapter son régime alimentaire et ses injections d’insuline sans grandes difficultés. Au bout d’une fois ou deux, il peut le faire par luimême... Toutefois, si on passe à l’autre extrême où le diabétique peut devoir effectuer le genre de travail qui, malheureusement, est courant dans l’armée, c’est- à- dire qu’il travaille deux soirs, puis deux nuits et deux jours suivis d’un congé de deux jours, ces changements constants sont extrêmement difficiles pour n’importe qui et un diabétique aura probablement des difficultés à s’y adapter.»

Lorsqu’on lui a demandé quel genre de problèmes le diabétique pourrait avoir à résoudre, le commandant Fisher a répondu, à la ligne 25:

(TRADUCTION)

«Des épisodes hypoglycémiques ou hyperglycémiques imprévisibles, le temps nécessaire pour qu’il réajuste ses heures de repas et d’injections.»

M. Saunders a ensuite traité de la question à savoir si les diabétiques insulino- dépendants sont capables d’effectuer des travaux de force et le commandant Fisher y a répondu en partie, à la page 332, ligne 5:

«Oui, ils en sont capables, s’ils connaissent le moment où ils devront accomplir ce genre de travail, s’ils peuvent se procurer la nourriture appropriée et s’ils peuvent au besoin s’arrêter pour manger.»

Plus loin, le commandant Fisher a déclaré, à la ligne 12:

(TRADUCTION)

«Un diabétique peut faire à peu près tout ce qu’il veut, à la condition qu’il puisse prévoir et contrôler ses activités, mais il doit être capable à la fois de prévoir et de contrôler.»

Lorsqu’on lui a demandé d’expliquer ce qu’elle entendait par contrôle dans le contexte, le commandant Fisher a répondu:

(TRADUCTION)

«Le simple fait d’avoir accès à de la nourriture. ... Le simple fait de pouvoir s’arrêter assez longtemps pour manger... La capacité de travailler à son propre rythme plutôt qu’à celui qui est dicté par un autre.»

A la page 334 de la transcription, ligne 15, le commandant Fisher déclare:

(TRADUCTION)

«Je crois assurément qu’un diabétique n’a pas la capacité de travailler en mer, en campagne ou dans une situation d’isolement.»

On a ensuite demandé au commandant Fisher de considérer le tableau 12 de la pièce R8 où figurent des passages tirés du Guide pour l’examen du conducteur. Au sujet de la partie de l’ouvrage qui traite des désordres métaboliques, le commandant Fisher a indiqué que le Guide établit des sous- catégories de diabète et déclare d’abord qu’un diabétique qui contrôle sa maladie au moyen d’un régime alimentaire et d’une médication par voie orale peut conduire n’importe quel véhicule motorisé. L’ouvrage traite ensuite des aspects plus pertinents dans la présente affaire, c’està- dire des candidats qui sont insulino- dépendants. S’ils contrôlent bien leur maladie et qu’ils ne sont pas sujets aux réactions hyperglycémiques, ils peuvent conduire des véhicules légers commerciaux et privés. Cependant, ils n’ont pas le droit de conduire des véhicules de passagers ou des véhicules commerciaux lourds. A la page 340, ligne 8, M. Saunders a posé la question suivante au commandant Fisher:

(TRADUCTION)

Question: Le tableau 9 qui figure à la pièce R- 3 donne la description des tâches d’un technicien en approvisionnement. Il est précisé qu’un technicien en approvisionnement doit conduire et manoeuvrer les véhicules suivants: un véhicule commercial régulier allant jusqu’à trois tonnes et un véhicule militaire régulier allant jusqu’à cinq tonnes."

M. Saunders a posé une question plus loin, à la page 340, ligne 21:

(TRADUCTION)

Question: A votre avis, docteur, peut- on délivrer à un diabétique insulino- dépendant un permis lui permettant de conduire ce genre de véhicule militaire?

Réponse: Non. Il ne peut pas obtenir le permis civil l’autorisant à conduire ce genre de véhicule."

A la page 343 de la transcription, le docteur Fisher fait référence à un ouvrage intitulé Physicians Guidelines for Employment and Placement of the Diabetic in Industry et, à la ligne 16 de la page de la transcription précitée, elle a mentionné que ces lignes directrices établissent quatre catégories de diabétiques et définissent les emplois qui correspondent à chacune d’entre elles. Le commandant Fisher a déclaré que les diabétiques dont le régime alimentaire constitue le seul traitement peuvent occuper tout emploi pour lequel ils sont qualifiés. Les diabétiques qui font partie de la deuxième catégorie, c’est- à- dire ceux qui sont traités au moyen de la médication orale, peuvent également occuper l’emploi pour lequel ils sont qualifiés. Le commandant Fisher a ensuite déclaré à la ligne 24 et je cite:

(TRADUCTION)

«Lorsque le diabétique suit un traitement à l’insuline cependant, l’ouvrage établit certaines restrictions.

Restriction (a) (TRADUCTION)

«Ils ne doivent pas être affectés à des tâches où il leur est difficile ou dangereux, ou les deux, d’arrêter une activité afin de remédier même à une réaction modérée. Les diabétiques qui ont besoin d’insuline ne devraient pas exercer un emploi où une réaction imprévue à l’insuline pourrait leur causer ou causer des blessures à d’autres personnes.

A la page 344, ligne 17, le commandant Fisher a également déclaré, et je cite:

(TRADUCTION)

«L’ouvrage traite ensuite du travail par postes, à l’article C, où il est dit:

(TRADUCTION)

«De fréquents changements de poste ou des postes fractionnés peuvent être peu souhaitables s’ils interfèrent avec le contrôle de la maladie.»

A la page 345 de la transcription, M. Saunders a demandé au commandant Fisher si elle avait assisté à l’audience et si elle avait eu l’occasion d’entendre le témoignage de M. Gaetz et des témoins du mis en cause et ayant reçu une réponse affirmative, il a demandé au commandant Fisher si elle s’était fait une bonne idée du genre de travail exigé d’un technicien en approvisionnement au service des Forces armées canadiennes. Suite à la réponse affirmative du commandant Fisher, M. Saunders lui a demandé si elle pouvait déterminer si un diabétique devrait être autorisé à occuper le poste de technicien en approvisionnement dans les Forces armées canadiennes. La réponse du commandant Fisher figure à la page 345, ligne 23:

(TRADUCTION)

Réponse: La difficulté réside non pas dans les fonctions professionnelles du technicien en approvisionnement mais plutôt dans ses fonctions militaires et son milieu de travail. Si on peut lui garantir qu’il occupera un emploi soumis à de nombreuses restrictions, il sera capable de remplir ses fonctions, mais il ne pourrait remplir toutes les fonctions exigées en zone d’approvisionnement.

Question: Pourrait- il travailler dans la Force de défense de la base, par exemple?

Réponse: A mon avis, un diabétique insulino- dépendant n’est pas apte à travailler dans la Force de défense de la base parce qu’on ne connaît et qu’on ne peut prévoir ni le moment de déploiement de la Force de défense de la base, ni la durée de la période de déploiement ni le genre d’activité physique exigée.

Question: En temps de guerre, Madame, un diabétique - un diabétique insulino- dépendant - serait- il, à votre avis, capable de remplir les fonctions de technicien en approvisionnement?

Réponse: Il pourrait le faire, s’il travaille au troisième ou quatrième échelon mais non pas aux échelons plus près du combat, ce qui signifie qu’il ne pourrait pas remplir ces fonctions en campagne ou en mer ou bien dans certains conditions de déploiement de la Force aérienne."

M. Saunders ayant terminé son interrogatoire à ce moment, M. Duval a commencé le contre- interrogatoire du commandant Fisher. M. Duval a longuement contre- interrogé le commandant Fisher et a soulevé d’intéressantes questions à différents moments qui, jusqu’à un certain point, ont contraint le commandant Fisher à nuancer certaines de ses réponses. Je voudrais cependant souligner que ces précisions sont d’ordre mineur et que malgré son contre- interrogatoire vigoureux, qui a montré qu’il connaissait assez bien les conditions et les conséquences des difficultés rencontrées par les diabétiques insulino- dépendants, M. Duval n’a pas changé de façon essentielle le fond du témoignage du commandant Fisher.

Après que M. Saunders eut brièvement procédé à un nouvel interrogatoire du commandant Fisher, M. Duval a eu la possibilité de présenter une contre- preuve et, après un arrêt de quelques minutes, a indiqué au tribunal qu’il ne se prévalait pas de cette faculté avant de demander l’ajournement de l’audience à une date ultérieure, afin de prendre connaissance de la transcription avant la présentation des plaidoiries. En dépit de l’objection soulevée par M. Saunders, le tribunal a été d’avis que les principes de justice naturelle et d’équité dictaient un ajournement afin que l’avocat ait le temps de préparer ses plaidoiries finales. Cet ajournement a été, en partie, accordé car, pour citer M. Duval, à la page 405, ligne 13:

(TRADUCTION)

«Tout d’abord, nous sommes en présence d’une affaire assez longue et rendue complexe de par son côté scientifique. D’un autre côté, la décision prise déterminera la question de l’employabilité des diabétiques dans les Forces armées canadiennes. La présente affaire aura donc des conséquences considérables sur l’employabilité d’un bon nombre d’individus.»

Lorsque l’audience a repris à Ottawa, le 28 septembre 1988, les avocats ont présenté les plaidoiries finales, pour la Commission et le mis en cause.

M. Duval a présenté son plaidoyer en trois temps. Il a d’abord étudié la preuve de M. Gaetz, puis la loi applicable au système de défense présenté par le mis en cause et enfin la preuve présentée par le mis en cause à l’appui de l’exigence professionnelle justifiée. M. Duval a déclaré, avec raison, que la vraie question dans cette affaire était de déterminer si le MDN avait ou non établi une défense fondée sur l’exigence professionnelle justifiée, en vertu de l’article 14 de la Loi.

M. Duval a ensuite étudié la preuve de M. Gaetz et a demandé si la décision de congédier M. Gaetz était ou non fondée, essentiellement: quel était l’état de santé de M. Gaetz au moment où il fut décidé de le congédier pour raisons médicales.

M. Duval a soutenu que la défense fondée sur l’exigence professionnelle justifiée est conforme aux dispositions de l’alinéa 14 a) de la Loi canadienne sur les droits de la personne et qu’il incombe au mis en cause d’établir ce genre de défense. M. Duval a mentionné des passages de la décision classique de la Cour suprême dans l’affaire Commission ontarienne des droits de la personne c. Municipalité d’Etobicoke (1982), 1 R. C. S. 202 ainsi que le fardeau et le degré de la preuve de l’affaire, à la page 208, qui se lit comme suit:

«La seule justification que peut invoquer l’employeur en l’espèce est la preuve, dont le fardeau lui incombe, que la retraite obligatoire est une exigence professionnelle réelle de l’emploi en question. La preuve, à mon avis, doit être faite conformément à la règle normale de la preuve en matière civile, c’est- à- dire suivant la prépondérance des probabilités.»

M. Duval a continué d’étudier l’affaire en relation avec la preuve subjective et impressionniste et a de nouveau cité le juge MacIntyre, à la page 212:

«Il me semble cependant que, dans des cas comme celui en l’espèce, une preuve de nature statistique et médicale qui s’appuie sur l’observation et l’étude de la question du vieillissement, même si elle n’est pas absolument nécessaire dans tous les cas, sera certainement plus convaincante que le témoignage de personnes même très expérimentées dans la lutte contre les incendies, portant que le travail de pompier est une affaire de jeune homme

M. Duval a plaidé qu’une grande partie de la preuve dans la présente affaire se fondait sur ce genre de preuve et a avancé que la Cour suprême n’avait pas fondé sa décision sur ce genre de preuve dans l’affaire Etobicoke. Afin de donner un exemple du genre de preuve nécessaire, M. Duval a mentionné le passage le plus souvent cité de l’arrêt Etobicoke, qui figure à la page 208 et qui se lit comme suit:

«Pour constituer une exigence professionnelle réelle, une restriction comme la retraite obligatoire à un âge déterminé doit être imposée honnêtement, de bonne foi et avec la conviction sincère que cette restriction est imposée en vue d’assurer la bonne exécution du travail en question d’une manière raisonnablement diligente, s re et économique, et non pour des motifs inavoués ou étrangers qui visent des objectifs susceptibles d’aller à l’encontre de ceux du Code. Elle doit en outre se rapporter objectivement à l’exercice de l’emploi en question, en étant raisonnablement nécessaire pour assurer l’exécution efficace et économique du travail sans mettre en danger l’employé, ses compagnons de travail et le public en général.»

La première partie du passage susmentionné décrit le critère dit subjectif et la partie soulignée détermine le critère objectif.

M. Duval a admis que le mis en cause avait satisfait au critère subjectif et a plutôt examiné le critère objectif. Mentionnant un passage tiré du témoignage du docteur Fisher, à la page 345, M. Duval a plaidé qu’il n’y avait pas de doute que M. Gaetz pouvait exécuter ce travail de façon aussi efficace et économique que ses compagnons et a fait valoir que les Forces armées canadiennes croyaient surtout que le plaignant risquait de mettre en danger sa vie et la vie d’autres soldats lors du travail en groupe.

A ce stade, le tribunal a jugé que M. Duval avait résumé l’ensemble de la question en ce qui concerne le tribunal. M. Duval a indiqué que le mis en cause ne se préoccupait pas de l’exécution efficace et économique du travail mais plutôt du risque que prenait le plaignant pour sa sécurité personnelle et celle de ses compagnons, ainsi que de son emploi à titre de militaire. L’avocat de la Commission a déclaré qu’on avait satisfait aux critères objectif et subjectif énoncés dans l’arrêt Etobicoke et que l’exécution efficace et économique n’étaient pas les points en litige, ce qui laissait ouverte seulement la question du facteur de risque.

Après avoir cité le juge MacIntyre, à la page 209 de l’arrêt Etobicoke, M. Duval a admis que (TRADUCTION) Les Forces armées sont beaucoup plus préoccupées par la sécurité que par l’exécution économique, et a avancé que dans les cas touchant à la sécurité publique il est permis d’établir des exclusions à caractère général, faisant valoir que l’affaire devant le tribunal était un cas d’exclusion à caractère général en ce que le diagnostic du diabète entraîne la rétrogradation des critères médicaux ce qui, dans la plupart des cas, a pour conséquence la libération des militaires des Forces armées ou l’impossibilité de s’y engager.

En ce qui a trait à l’exclusion à caractère général, M. Duval a cité l’affaire Air Canada c. Carson (1985) 6 C. H. R. R. D/ 2848 (C. A. Féd.) à la page D/ 2855:

«Suivant le critère dégagé aux États- Unis, le premier volet du fardeau de la preuve incombant à l’employeur consiste à montrer que l’exigence professionnelle normale qu’il invoque est raisonnablement nécessaire à la nature même de son entreprise; il s’agit de l’opposition entre l’élément de risque et la sécurité, et il est possible d’y satisfaire en prouvant que l’exigence relative à l’âge maximum d’embauchage est raisonnablement nécessaire pour assurer la sécurité du public, ce qui de l’avis général constitue la nature même d’une entreprise de transport aérien.»

M. Duval n’a pas contesté le fait que la sécurité constitue la nature même de l’entreprise des Forces canadiennes. Il a de nouveau cité Carson:

«Le second volet exige que l’employeur prouve qu’il a des motifs raisonnables de croire que toutes ou pratiquement toutes les personnes faisant partie de la catégorie en cause seraient incapables de remplir efficacement et sans danger les fonctions de leur poste [...]»

M. Duval a soutenu que le mis en cause devait produire sa preuve afin que le tribunal prenne une décision en sa faveur et que, selon lui, les Forces ne s’étaient pas acquittées de cette charge et n’avaient pas établi qu’aucun diabétique, ou pratiquement aucun, ne pouvait occuper le poste de technicien en approvisionnement dans les Forces armées. M. Duval a ensuite passé en revue la preuve afin de démontrer que les Forces ne s’étaient pas acquittées de cette charge.

Après avoir examiné en détail la preuve avancée par le docteur Fisher, M. Duval a demandé si le mis en cause s’était acquitté de sa charge, en convaincant le tribunal que le fait de ne pas employer de militaires atteints de diabète sucré constitue une exigence professionnelle justifiée dans les Forces armées. M. Duval a affirmé que la preuve présentée ne possédait pas le degré de conviction auquel la Cour Suprême se référait lorsqu’elle a affirmé qu’il incombait au mis en cause d’établir une défense suivant la prépondérance des probabilités de la preuve médicale présentée, à cause des nombreuses réserves exprimées et des données appuyant la preuve, données qui n’étaient pas scientifiques au sens employé dans l’arrêt Etobicoke. Il a également affirmé que l’arrêt Etobicoke démontrait clairement la nécessité d’entendre une autre voix que l’opinion subjective, même si elle provient d’un expert, et que le simple fait de juger qu’une preuve est une preuve d’expert n’amène pas nécessairement un jugement en sa faveur, s’il est démontré que la preuve scientifique ne l’est pas au sens employé dans l’arrêt Etobicoke.

Au sujet des dommages, M. Duval a plaidé qu’advenant une décision favorable au plaignant, le tribunal devrait accorder des dommages et intérêts pour le tort subi ainsi pour la perte de salaire et ordonner que M. Gaetz soit réintégré dans l’armée, sous réserve de satisfaire aux exigences non discriminatoires des Forces armées canadiennes.

Au début de son dernier plaidoyer, M. Saunders a d’abord reconnu que le mis en cause n’avait pas contesté le fait que le diabète, en particulier le fait d’être un diabétique insulino- dépendant, est une incapacité au sens de la Loi canadienne sur les droits de la personne. En ce qui a trait aux deux aspects de la plainte déposée par M. Gaetz, le mis en cause affirme que sa libération ainsi que la démarche visant à libérer des diabétiques insulino- dépendants exerçant la profession de technicien en approvisionnement se fondaient sur l’exigence professionnelle justifiée prévue à l’alinéa 14 a) de la Loi canadienne sur les droits de la personne.

M. Saunders a abordé la question sous cet angle:

(TRADUCTION)

«Était- ce une exigence professionnelle justifiée que d’exiger que les personnes employées en qualité de techniciens en approvisionnement ne soient pas des diabétiques insulino- dépendants?»

M. Saunders a souligné qu’au cours de son plaidoyer, M. Duval avait mentionné d’une manière générale l’exclusion touchant les diabétiques et a fait valoir que la présente affaire ne touchait que les diabétiques insulino- dépendants qui désirent occuper le poste de technicien en approvisionnement au service des Forces armées canadiennes. M. Saunders a brièvement mentionné le témoignage du capitaine Martin qui décrivait le cas des diabétiques insulino- dépendants libérés et souligné que quatre d’entre eux suivaient un traitement par voie orale et que les autres avaient continué à être employés par les Forces pour des raisons humanitaires.

M. Saunders a indiqué qu’il étudierait trois points au cours de son plaidoyer, nommément 1) les principes de droit et la jurisprudence, 2) la loi et les faits à la lumière de ces principes et 3) la question du dédommagement advenant une décision contraire à sa position.

M. Saunders a reconnu qu’il incombait à l’employeur d’établir une exigence professionnelle suivant la prépondérance des probabilités et a mentionné la déclaration de M. Lederman dans l’affaire Rodger portant que lorsque la sécurité est en jeu, le fardeau est moindre qu’en des circonstances plus ordinaires. M. Saunders a ensuite avancé que le mis en cause s’était acquitté du fardeau ordinaire dans la présente affaire et que le critère subjectif de l’exigence professionnelle justifiée n’était pas en cause.

M. Saunders a soutenu que M. Duval s’était concentré, avec raison, sur le dernier aspect du critère objectif, c’est- à- dire sur l’élément de risque. Il était d’avis qu’on ne pouvait séparer le risque de l’exécution efficace et économique et a affirmé qu’une restriction médicale stipulant que le détenteur d’un poste ne peut être un diabétique insulino- dépendant peut constituer une exigence professionnelle justifiée.

M. Saunders a fait valoir qu’une restriction médicale peut représenter une exigence professionnelle justifiée si elle diminue ou élimine un risque réel pour l’employé, pour ses compagnons de travail ou pour le public et a soulevé la question à savoir ce qu’on entend par risque réel. Il a avancé qu’au vu des affaires étudiées, un risque réel désigne tout risque possible, aussi longtemps qu’une telle possibilité existe et que cette possibilité ne doit pas être uniquement hypothétique.

M. Saunders a déclaré qu’à l’évidence, l’exigence professionnelle est reliée à un emploi et n’est pas limitée à un individu. Selon ses propres mots, (TRADUCTION) Si l’exercice d’une profession exige que le titulaire ne soit pas un diabétique insulino- dépendant, cette exigence s’applique- t- elle à tous les individus?

Au sujet de l’affaire Etobicoke, M. Saunders a mentionné le commentaire du juge McIntyre à la page 209 portant que lorsque la sécurité publique est en jeu, les tribunaux peuvent tenir compte des risques imprévisibles et a souligné que dans la présente affaire, la preuve démontrait que les diabétiques insulino- dépendants risquaient de commettre une erreur imprévisible.

Un passage de la page 210 de l’arrêt Etobicoke mentionne que la cour [doit] [...] se demander si la preuve fournie justifie la conclusion que les personnes qui ont atteint l’âge de la retraite obligatoire présentent un risque d’erreur humaine suffisant [...]. Dans la présente affaire, M. Saunders a déclaré qu’il convenait d’examiner en détail la notion de risque suffisant. M. Saunders a réfuté les commentaires de M. Duval portant sur la preuve impressionniste présentée par le capitaine Martin et l’adjudant- chef Muise et a déclaré que leur preuve portait sur les exigences professionnelles et que le Dr Fisher avait qualité d’expert scientifique.

L’avocat du mis en cause a continué à traiter du concept de risque suffisant au sens employé dans l’affaire Etobicoke, et s’est ensuite tourné vers l’affaire Bhinder et l’affaire Mahon qui étudient de plus près cette notion. M. Saunders a avancé qu’en fait, dans l’affaire Bhinder, la Cour avait conclu qu’une restriction qui réduit le risque, même légèrement, peut constituer une exigence professionnelle justifiée et, une fois qu’on a justifié cette exigence, qu’il convient de déterminer si elle peut constituer un acte discriminatoire touchant l’accès à la profession dans son ensemble.

L’affaire Bhinder c. Compagnie des chemins de fer nationaux du Canada, (1985) 25 R. C. S. 561, traitait du cas d’un Sikh pratiquant qui refusait de porter un casque de sécurité parce que sa religion le lui interdisait et la Cour a jugé que le port du casque de sécurité constituait une exigence professionnelle justifiée, sauf en ce qui concerne M. Bhinder, car le risque que courait ce dernier en portant un turban plutôt qu’un casque de sécurité serait légèrement accru, pour lui- même seulement, sans grand danger pour les autres. Citant l’arrêt Bhinder à la page 588, M. Saunders a déclaré que la Cour avait jugé qu’une fois qu’on a déterminé qu’il s’agit d’une exigence professionnelle justifiée, il est nécessaire de déterminer si cette exigence constitue un acte discriminatoire qui touche la profession dans son ensemble. M. Saunders cite de nouveau l’arrêt Bhinder, qui mentionne que Cela doit s’entendre d’une exigence de la profession, non d’une exigence limitée à un individu. Elle doit s’appliquer à tous les membres du groupe d’employés concerné, car c’est une exigence d’application générale concernant la sécurité des employés.

M. Saunders a continué à parler de la notion de risque suffisant, très brièvement, et a cité l’affaire Mahon c. Canadien Pacifique Limitée, (1988) 1 C. F. 209 (C. A.) révisée (1986) (C. H. R. R. D/ 3278) (Trib. C. D. P.) en mentionnant qu’elle représentait une des décisions qui faisaient autorité en ce qui a trait aux diabétiques insulino- dépendants. Le tribunal connaît bien cette affaire et, comme l’a souligné M. Saunders, M. Duval a agi à titre d’avocat dans cette affaire.

L’affaire Mahon touchait le refus du Canadien Pacifique d’engager M. Mahon comme agent de la voie parce qu’il était un diabétique insulinodépendant et la preuve dans cette affaire ressemblait beaucoup à celle qui est présentée devant le tribunal dans la présente affaire. Voici une déclaration du juge Pratte, à la page 214 de l’arrêt Mahon:

«La réaction neuro- glycopénique grave est normalement précédée d’une légère réaction, mais ce n’est pas toujours le cas. Elle peut parfois se produire sans avertissement.»

A l’alinéa suivant:

«Il existe toujours la possibilité, cependant, qu’un diabétique stable éprouve parfois de légères réactions hypoglycémiques; il existe aussi la possibilité qu’un diabétique stable subisse soudainement une grave réaction neuro- glycopénique.»

M. Saunders déclare que la même preuve s’applique à la présente affaire et fait valoir que dans l’affaire Mahon la Cour avait considéré l’existence d’un risque possible. Dans l’arrêt Mahon, le tribunal avait d’abord conclu que là où le risque était réel, bien que marginal, la notion de risque suffisant mentionnée dans l’arrêt Etobicoke s’appliquait et jugé que les risques n’étaient pas suffisants; et que lorsque la société s’en trouve affectée, elle doit accepter certains risques.

Lors de l’audience devant la Cour d’appel fédérale, la Cour a résumé la question de la manière suivante, à la page 212:

«[...] est- ce une exigence professionnelle normale que d’exiger que les personnes employées par le Canadien Pacifique Limitée en qualité d’agents de la voie ne soient pas des diabétiques insulino- dépendants? Le juge Pratte a conclu que le tribunal était dans l’erreur et a déclaré à la page 218 que: [...] le tribunal a commis une erreur en ne prenant pas en considération la possibilité que M. Mahon puisse ne pas toujours avoir du sucre sur lui.»

M. Saunders a mentionné la preuve de M. Gaetz dans la présente affaire et fait valoir, à l’instar du raisonnement du juge Pratte, que tous les risques doivent être pris en considération, avec une référence au témoignage de M. Gaetz voulant qu’il ne portait pas toujours de nourriture sucrée sur lui.

A la page 221 de l’arrêt Mahon, la Cour a envisagé si la possibilité d’une réaction suffisait à déterminer l’existence du risque suffisant mentionné dans l’affaire Etobicoke et approfondi dans l’arrêt Bhinder et a déclaré:

«Il ressort donc de ces décisions, à mon sens, qu’à plus forte raison, l’exigence reliée au travail qui, selon la preuve, est raisonnablement nécessaire pour éliminer le danger réel de préjudice grave au grand public doit être considérée comme une exigence professionnelle normale.»

M. Saunders a avancé qu’à la lumière de la citation susmentionnée, une fois qu’il est établi que la politique de non- emploi des diabétiques insulino- dépendants est raisonnablement nécessaire pour éliminer le danger réel de préjudice ou de blessure grave, la défense est constituée.

Citant de nouveau l’arrêt Mahon ainsi que la décision du juge Marceau qui va dans le même sens, M. Saunders a affirmé que la démarche visant à prendre en considération le sens de l’expression risque suffisant consiste à (p. 226) [...] examiner les fonctions qui doivent être exercées et les conditions nécessaires à leur bon exercice. M. Saunders a plaidé que la preuve fournie par le lieutenant- colonel Tattersall, le major McMenemy, le capitaine Martin et l’adjudant- chef Muise faisait ressortir les exigences par rapport aux capacités et aux limites de la catégorie d’individus touchés, c’est- à- dire de tous les diabétiques insulino- dépendants occupant un poste de technicien en approvisionnement, a établi la possibilité d’un risque réel et, par le fait même, une exigence professionnelle justifiée.

M. Saunders a également cité l’affaire Manitoba Human Rights Commission et al v. Baker Manufacturing Ltd. (1984), 7 C. H. R. R. (Man. Q. B.) et a mentionné un commentaire à l’alinéa 25208 qu’il jugeait digne de mention.

(TRADUCTION)

«Aucun employé n’a le droit de courir le risque de se blesser gravement et aucun employeur ne devrait être contraint d’employer un individu que sa condition physique expose à un risque plus sérieux qu’une blessure sans gravité.»

M. Saunders a ensuite appliqué les faits en l’espèce à la loi, selon son interprétation, en étudiant la preuve des témoins du mis en cause et en établissant un lien avec les témoignages qui portaient sur les fonctions d’un technicien en approvisionnement au service des Forces armées canadiennes et plus particulièrement sur la manière dont un diabétique insulino- dépendant pourrait les remplir.

Revenant à la première question (TRADUCTION) Était- ce une exigence professionnelle justifiée que d’exiger que les personnes employées en qualité de techniciens en approvisionnement ne soient pas des diabétiques insulino- dépendants?, M. Saunders a fait valoir que la réponse ne pouvait être qu’affirmative. M. Saunders a traité ensuite de la question du dédommagement et le tribunal a pris note de ses arguments. A la fin du plaidoyer de M. Saunders, M. Duval a exercé son droit de réponse.

Suite au plaidoyer final, j’ai prononcé une décision orale dans laquelle j’ai conclu que le plaignant avait établi une affaire fondée à prime abord et que le mis en cause avait réfuté cette affaire. J’ai fondé ma décision sur le droit jurisprudentiel tel que je l’interprète, sur les dispositions de la Loi et sur la preuve présentée par les deux parties.

A l’appui de ma première décision, j’ai l’intention d’étudier les points suivants:

  1. les dispositions de la Loi canadienne sur les droits de la personne,
  2. le droit jurisprudentiel tel que je l’interprète et
  3. les faits de la présente affaire à la lumière de la Loi et du droit.

I. L’article 7 de la Loi canadienne sur les droits de la personne prévoit, comme suit:

«Constitue un acte discriminatoire le fait a) de refuser d’employer ou de continuer d’employer un individu, ou b) de défavoriser un employé dans le cadre de son emploi, directement ou indirectement, pour un motif de distinction illicite.»

Les motifs de distinction illicites sont décrits au paragraphe 3 (1) de la Loi et comprennent la race, l’origine nationale ou ethnique, la couleur, la religion, l’âge, le sexe, l’état matrimonial, la situation de famille, la déficience et l’état de personne graciée.

Le plaignant de la présente affaire soutient que l’acte discriminatoire se fondait sur la déficience, le diabète en l’espèce. Voir la pièce C- 1 du plaignant.

L’article 10 de la Loi canadienne sur les droits de la personne est également pertinent. Il prévoit:

«Constitue un acte discriminatoire le fait pour l’employeur, l’association d’employeurs ou l’association d’employés a) de fixer ou d’appliquer des lignes de conduite, ou [...] pour un motif de distinction illicite, d’une manière susceptible d’annihiler les chances d’emploi ou d’avancement d’un individu ou d’une catégorie d’individus.»

La Loi canadienne sur les droits de la personne, tout en interdisant la discrimination aux termes des articles 7 et 10, conçoit également que la discrimination est permise dans certaines circonstances, comme le prévoient les dispositions de l’alinéa 14 a) de la Loi qui se lit comme suit:

«Ne constituent pas des actes discriminatoires a) les refus, exclusions, expulsions, suspensions, restrictions, conditions ou préférences de l’employeur qui démontre qu’ils découlent d’exigences professionnelles justifiées;»

Ces dispositions sont donc les dispositions de la loi qui doivent être appliquées à la présente affaire. II. Le droit jurisprudentiel dans la présente affaire devant le tribunal est fondé sur un certain nombre d’affaires qui font autorité en la matière; j’en nommerai quelques- unes, en commençant par celles qui semblent s’appliquer en l’espèce:

  1. Commission ontarienne des droits de la personne c. Municipalité d’Etobicoke (1982), 1 R. C. S. 202.
  2. Bhinder c. Compagnie des chemins de fer nationaux du Canada (1985), 25 R. C. S. 561.
  3. Mahon c. Canadien Pacifique Ltée (1988) 1 C. F. 209 (C. A.) révisée en 1986 (C. H. R. R. D/ 3278) (Trib. C. D. P.).
  4. Air Canada c. Carson (1985) (C. H. R. R.) (C. A. Féd.).
  5. Rodgers c. Chemins de fer nationaux du Canada (1985), 6 C. H. R. R. D/ 2899 (Trib. C. D. P.).
  6. Manitoba Human Rights Commission et al v. Baker Manufacturing Ltd. (1984), 7 C. H. R. R. (Man. Q. B.).
  7. Nowell c. Chemins de fer nationaux du Canada Ltée (1986), 8 C. H. R. R. D/ 3727 (Trib. C. D. P.).

L’affaire Commission ontarienne des droits de la personne c. Municipalité d’Etobicoke (supra) établit le critère permettant de déterminer si les refus ou les exclusions de l’employeur constituent une exigence professionnelle justifiée. En parlant au nom de la cour, le juge McIntyre a déclaré ce qui suit:

«Pour constituer une exigence professionnelle réelle, une restriction comme la retraite obligatoire à un âge déterminé doit être imposée honnêtement, de bonne foi et avec la conviction sincère que cette restriction est imposée en vue d’assurer la bonne exécution du travail en question d’une manière raisonnablement diligente, s re et économique, et non pour des motifs inavoués ou étrangers qui visent des objectifs susceptibles d’aller à l’encontre de ceux du Code. Elle doit en outre se rapporter objectivement à l’exercice de l’emploi en question, en étant raisonnablement nécessaire pour assurer l’exécution efficace et économique du travail sans mettre en danger l’employé, ses compagnons de travail et le public en général.»

A la page 208 de l’affaire Etobicoke, le juge McIntyre a déclaré que le fardeau de la preuve incombe à l’employeur et que:

«La preuve, à mon avis, doit être faite conformément à la règle normale de la preuve en matière civile, c’est- à- dire suivant la prépondérance des probabilités.»

A la page 210 de Etobicoke, il est mentionné que [...] la cour [...] [doit] se demander si la preuve fournie justifie la conclusion que les personnes qui ont atteint l’âge de la retraite obligatoire présentent un risque d’erreur humaine suffisant pour justifier la mise à la retraite prématurée dans l’intérêt de l’employé, de ses compagnons de travail et du public en général. la même page de cette affaire, on compare également la preuve impressionniste et la preuve scientifique. Dans l’affaire Bhinder c. Compagnie des chemins de fer nationaux du Canada (1985) 25 R. C. S. 561, la cour confortait l’opinion du tribunal qui était d’avis que la règle du port du casque de sécurité était raisonnable en ce qu’elle permettait d’accroître la sécurité en réduisant le risque de blessures causées aux autres employés et, plus particulièrement, que le risque que courait Bhinder en portant un turban plutôt qu’un casque de sécurité était accru, quoique très légèrement, et a en fait conclu que la restriction visant à réduire le risque, même très légèrement, peut constituer une exigence professionnelle normale.

Le juge McIntyre poursuit: Cela doit s’entendre d’une exigence de la profession, non d’une exigence limitée à un individu. Elle doit s’appliquer à tous les membres du groupe d’employés concerné, car c’est une exigence d’application générale concernant la sécurité des employés. Les employés doient se conformer à cette exigence pour occuper leur poste.

L’affaire Mahon c. Canadien Pacifique Limitée (1988), 1 C. F. 209 (C. A.), revisée 1986 C. H. R. R. D/ 3278 (Trib. C. D. P.) constitue l’affaire classique ou tout au moins l’affaire qui fait autorité en ce qui a trait aux diabétiques insulino- dépendants. Dans cette affaire, le juge Pratte déclare, à la page 221:

«La décision rendue par la Cour suprême du Canada dans Etobicoke appuie la proposition selon laquelle une exigence imposée par l’employeur dans l’intérêt de la sécurité doit, pour être reconnue comme une exigence professionnelle normale, être raisonnablement nécessaire afin d’éliminer un risque suffisant de blessures. Dans l’arrêt Bhinder, d’autre part, la Cour suprême a reconnu comme étant une exigence professionnelle normale celle qui, si elle n’était pas respectée, exposerait l’employé à un risque plus grand de subir des blessures - quoique seulement légèrement plus grand (à la page 584). Il ressort donc de ces décisions, à mon sens, qu’à plus forte raison, l’exigence reliée au travail qui, selon la preuve, est raisonnablement nécessaire pour éliminer le danger réel de préjudice grave au grand public doit être considérée comme une exigence professionnelle normale.»

Lorsqu’il considère la signification du risque suffisant mentionné par le juge McIntyre dans l’affaire Etobicoke, le juge Marceau déclare, à la page 224: Toutefois, lorsque j’interprète cette phrase compte tenu du contexte, elle me semble viser la preuve qui doit démontrer suffisamment que le risque est réel et ne repose pas sur de simples conjectures. En d’autres termes, l’adjectif suffisant en question se rapporte au caractère réel du risque et non à son degré. Le juge Marceau en a conclu, à la page 226, que la méthode appropriée consistait à [...] examiner les fonctions qui doivent être exercées et les conditions nécessaires à leur bon exercice.

L’affaire Air Canada c. Carson (1985), 6 C. H. R. R. D/ 2848, (C. A. Féd.) traitait de la question des exclusions à caractère général. A la page 235, le juge MacGuigan mentionnait le critère dégagé aux États- Unis selon lequel le premier volet du fardeau de la preuve de l’employeur consistait à montrer que l’exigence professionnelle justifiée qu’il invoque est raisonnablement nécessaire à la nature même de son entreprise et le second volet exige que l’employeur prouve qu’il a des motifs raisonnables de croire que toutes ou pratiquement toutes les personnes faisant partie de la catégorie en cause seraient incapables de remplir efficacement et sans danger les fonctions de leur poste.

Dans l’affaire Rodger c. Compagnie canadienne de chemins de fer nationaux Ltée (1985), 6 C. H. R. R. D/ 2899 (Trib. C. D. P.), M. Lederman déclare, à l’alinéa 23660:

«Il est certain que lorsque la sécurité du public est en jeu, le fardeau imposé à l’employeur est moindre qu’en des circonstances plus ordinaires.»

A l’alinéa 23674, M. Lederman déclare:

«Si elle ne peut laisser aucune menace le moindrement sérieuse peser sur la sécurité publique, la société ne saurait accepter les généralisations hâtives en ce qui a trait à la capacité des personnes atteintes d’une déficience. Les employeurs doivent donc appuyer l’imposition d’exigences professionnelles sur des données médicales et statistiques à jour, faisant autorité, et adaptées à chaque cas.»

Dans l’affaire Manitoba Human Rights Commission and Loveday vs Banker Manufacturing Ltd., la cour a rejeté l’appel de la décision d’un conseil d’arbitrage portant que l’absence de problèmes de dos constituait une exigence professionnelle justifiée dans le cas d’un emploi en entrepôt. Même si l’exigence devait être réelle et substantielle, le degré de danger couru par le plaignant lui- même constituait un risque suffisant, comme on l’indique à l’alinéa 25208:

(TRADUCTION)

«Aucun employé n’a le droit de courir le risque de se blesser gravement et aucun employeur ne devrait être contraint d’embaucher une personne que sa condition physique expose à un risque plus sérieux qu’une blessure sans gravité.»

L’affaire Nowell c. Compagnie des chemins de fer nationaux du Canada Ltée (1986) 8 C. H. R. R. D/ 3727 (Trib. C. D. P.) traitait du cas d’un diabétique insulino- dépendant et se distinguait de l’affaire Bhinder en ce que les faits démontraient dans Nowell que le Canadien National n’avait pas évalué la condition du plaignant sur une base individuelle.

Si j’applique la loi aux faits tels que je les interprète, j’ai la ferme conviction que bien le plaignant ait établi une affaire de discrimination fondée à prime abord en vertu de la Loi canadienne sur les droits de la personne, je crois tout aussi fermement que le mis en cause s’est acquitté du fardeau de la preuve imposé en vertu de l’alinéa 14 a) de la Loi.

J’en conclus également que le fardeau de la preuve obligatoire est le même que celui qui est mentionné dans l’affaire Rodger. Ce même fardeau de la preuve est étudié de manière plus approfondie dans l’affaire Etobicoke.

Je crois en outre que le mis en cause a satisfait aux critères subjectif et objectif établis dans l’affaire Etobicoke. M. Duval a admis, avec raison:

(TRADUCTION)

«Les Forces armées se préoccupent beaucoup plus de la sécurité que de l’exécution économique.»

L’affaire Air Canada c. Carson a traité de l’exclusion à caractère général de façon pertinente et la preuve dans la présente affaire, en particulier celle qui a été présentée par le capitaine Martin et l’adjudant- chef Muise, a indiqué que bien que les aspects militaires soient l’élément fondamental qui dans les Forces armées prédomine, il leur incombe également, ainsi qu’à leurs membres, de remplir leurs différents rôles de manière s re et efficace. La sécurité ne concerne pas seulement les relations entre les militaires des Forces mais touche également le grand public.

Je conviens tout à fait que la présente affaire ne touche pas les diabétiques en général et j’admets que la présente affaire ne s’applique qu’aux diabétiques insulino- dépendants qui désirent assumer les fonctions de technicien en approvisionnement au sein des Forces armées canadiennes.

Au vu des circonstances de la présente affaire, je suis d’avis que la restriction médicale imposée à M. Gaetz constitue une exigence professionnelle justifiée et que le facteur de risque réel représente plus qu’une possibilité et constitue s rement plus qu’une assomption. Je suis convaincu que l’affaire présente satisfait aux critères des affaires Etobicoke et Bhinder.

En toute déférence à l’égard de M. Duval, je ne puis admettre sa suggestion qui laissait entendre que la preuve des témoins du mis en cause était impressionniste. La preuve du capitaine Martin et de l’adjudant chef Muise était directement reliée aux exigences de la profession de technicien en approvisionnement au sein des Forces armées ainsi qu’au contexte dans lequel ces exigences étaient nécessaires à l’exercice convenable et s r de cette activité non seulement pour l’individu, mais également pour ses compagnons de travail et, jusqu’à un certain point, pour le grand public.

Nous devons garder à l’esprit la déclaration de M. Lederman qui figure à l’alinéa 23674, au bas de la page, dans l’affaire Rodger. Elle est d’autant plus importante lorsqu’on songe que la seule preuve scientifique présentée dans l’affaire qui nous occupe est celle du commandant Fisher, dont les avocats des deux parties ont reconnu l’expertise médicale. Je suis convaincu que la preuve n’a pas été réfutée de manière significative et j’accepte entièrement la preuve présentée par le commandant Fisher.

Ma conclusion est appuyée par les commentaires des juges Pratte et Marceau, dans l’affaire Mahon c. Canadien Pacifique Ltée (citée supra), portant que la société et l’employeur ne sont pas contraints de courir certains risques. On doit examiner les fonctions d’un technicien en approvisionnement dans les Forces armées dans le contexte des tâches à exécuter et des conditions nécessaires à leur exercice convenable.

La preuve présentée au cours de l’audience a démontré que le plaignant pouvait courir ou représenter un risque pour les autres et il est important de retenir le passage de l’affaire Loveday (citée supra) au regard de cette question.

La question qui nous intéresse dans la présente affaire, celle que nous ne devons pas négliger, est que M. Gaetz exerçait un emploi de technicien en approvisionnement dans les Forces armées canadiennes, soit dans un milieu militaire, par opposition à un poste analogue au ministère de la Défense nationale, c’est- à- dire en qualité de civil.

Le commandant Fisher a témoigné qu’un diabétique insulino- dépendant devait être capable de s’organiser d’avance et de contrôler sa maladie, de travailler à son propre rythme plutôt que de se le voir dicter par un autre individu. La preuve nous force à conclure que ces conditions ne peuvent s’appliquer dans un contexte militaire.

Le commentaire le plus significatif de tous les témoignages entendus, en dehors de la preuve médicale, est peut- être celui qui figure à la page 157 de la transcription du témoignage du major McMenemy qui se lit, et je cite:

(TRADUCTION)

«Lorsque l’armée part en campagne, si vous êtes dans l’armée, vous êtes un soldat.»

Compte tenu de tous les faits susmentionnés et après examen détaillé et réfléchi de la loi, des faits et des dispositions de la Loi canadienne sur les droits de la personne, je dois conclure que le plaignant est débouté de sa demande.

FAIT à Westville, ce 3e jour de novembre 1988.

(signé) S. Charles Facey

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