Tribunal canadien des droits de la personne

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CANADIAN HUMAN RIGHTS TRIBUNAL TRIBUNAL CANADIAN DES DROITS DE LA PERSONNE

MARK ANDERSON

le plaignant

- et -

COMMISSION CANADIENNE DES DROITS DE LA PERSONNE

la Commission

- et -

GENDARMERIE ROYALE DU CANADA

l'intimée

DÉCISION SUR REQUÊTE
SUR LES EXPOSÉS PRÉLIMINAIRES

2003 TCDP 42
2003/12/08

MEMBRES INSTRUCTEURS: J. Grant Sinclair
Paul Groarke

[TRADUCTION]

[1] La présente requête porte sur l'objection à la participation de la Commission à l'audience qui a été présentée par l'intimée. Cette objection découle de la correspondance échangée entre la Commission et l'intimée, dans laquelle la Commission a informé cette dernière que sa participation à l'audience se limiterait à un exposé préliminaire amélioré et un mandat d'observateur.

[2] Dans une lettre en date du 10 octobre 2003 adressée aux parties, la Commission précise ce qui suit :

[TRADUCTION]
En ce qui concerne la participation de la Commission, il est prévu à ce moment-ci que notre rôle se limitera à un exposé préliminaire amélioré puis à un mandat d'observateur pendant l'audience. Bien entendu, la Commission participera à la mise en uvre et à l'exécution de toute ordonnance rendue par le Tribunal. Cela dit, la Commission se réserve le droit de participer pleinement à l'audience si elle le juge à propos ou nécessaire au vu du déroulement de celle-ci.

L'intimée s'est dit insatisfaite de cette façon de procéder.

[3] Par la suite, l'intimée a demandé de plus amples explications quant à la teneur de l'exposé préliminaire amélioré. Dans une lettre en date du 30 octobre 2003, la Commission lui a fourni la réponse suivante :

[TRADUCTION]
Dans notre exposé préliminaire, nous examinerons les précédents et les principes qui y sont énoncés. Nous ne ferons pas référence à des éléments de preuve et nous ne prendrons pas position sur la façon dont le Tribunal devrait aborder les questions qui pourraient être soulevées à la lueur des allégations et des faits non prouvés énoncés dans le formulaire de plainte. Cet exposé préliminaire qui, il faut le reconnaître, est non traditionnel vise à mettre en relief les principes qui s'appliquent à une affaire de cette nature. Nous ne chercherons pas dans notre exposé à expliquer ou à prévoir ce que la preuve démontrera au bout du compte.

L'intimée ne croit pas qu'il soit possible de restreindre ainsi la portée de l'exposé préliminaire et s'oppose à toute forme de participation autre qu'une participation pleine et entière de la Commission à l'audience.

[4] L'intimée a demandé au Tribunal de statuer que la Commission ne peut restreindre ainsi sa participation à l'audience. Elle a également soutenu que la Commission doit soit participer pleinement à l'audience, soit se retirer de l'ensemble du processus. La Commission s'est opposée à la requête de l'intimée, principalement pour le motif que le Tribunal n'a pas compétence pour déterminer l'ampleur de la participation de la Commission à l'audience. À l'appui de cette prétention, l'avocat a invoqué surtout le principe que le Tribunal ne jouit d'aucun pouvoir de révision à l'égard des décisions de la Commission.

[5] Nous avons déjà traité de la question de l'exposé préliminaire dans Mowat c. Forces armées canadiennes, 2003 TCDP 39. Au cours de l'argumentation, l'avocat de la Commission nous a informés que l'exposé préliminaire amélioré que la Commission envisageait de présenter en l'espèce était, de par sa nature et son contenu, similaire à celui qu'elle prévoyait présenter dans les affaires Howell c. Forces armées canadiennes et McKay c. Gendarmerie royale du Canada.

[6] À notre avis, la Commission est tenue de respecter la jurisprudence relative aux exposés préliminaires, la Loi canadienne sur les droits de la personne et les Règles de procédure du Tribunal dans la préparation et la présentation d'un tel exposé. L'exposé préliminaire a pour objet de donner un aperçu de ce qui va suivre. Si la Commission n'a pas l'intention de présenter de preuve ou de participer plus amplement à l'affaire, l'exposé préliminaire n'est guère utile. Selon la jurisprudence, il serait préférable de présenter à la clôture de l'audience toute observation sur l'état du droit.

[7] Il incombe aux parties qui participent pleinement à l'instance de cerner les questions à débattre à l'audience. Si la Commission veut jouer un rôle dans un tel processus, elle a donc l'obligation de contribuer à la production de la preuve et à la présentation d'arguments en temps utile. Il serait injuste que la Commission soulève des questions auxquelles devraient répondre, en son absence, les autres parties au processus.

[8] Notre décision dans l'affaire Mowat indique clairement que nous n'admettons pas que la Commission qualifie la question de préjudicielle. Le Tribunal reconnaît qu'il n'a pas compétence pour réviser les décisions de la Commission, pouvoir qui est dévolu à la Cour fédérale. Néanmoins, le Tribunal est maître de sa procédure et a la responsabilité de veiller à ce que le déroulement de la procédure respecte les principes de l'équité et les règles de justice naturelle.

[9] Passons maintenant à la question du mandat d'observateur. Le terme mandat d'observateur prête à interprétation. À ce moment-ci, nous ne savons pas clairement ce que la Commission entend par là. Il ne fait aucun doute que la Commission a le droit de participer comme bon lui semble à toute audience du Tribunal, sous réserve de la responsabilité du TCDP de veiller à ce que les principes de l'équité et les règles de justice naturelle soient respectés.

[10] Voilà qui est suffisant à notre avis pour trancher la requête dont nous sommes saisis. La Commission ne sera pas autorisée à présenter au début de l'audience l'exposé préliminaire prévu. L'étendue de l'obligation de la Commission de participer pleinement, ou de ne pas participer du tout, à une audience est une question qui relève de la Cour fédérale. Toute autre question soulevée par l'intimée en ce qui touche la participation de la Commission peut être tranchée par les membres instructeurs.

J. Grant Sinclair

Paul Groarke

OTTAWA (Ontario)

Le 8 décembre 2003

PARTIES AU DOSSIER

DOSSIER DU TRIBUNAL :

T844/9403

INTITULÉ DE LA CAUSE :

Mark Anderson c. Gendarmerie royale du Canada

DATE ET LIEU
DE L'AUDIENCE :

le 13 novembre 2003
Winnipeg (Manitoba)

DATE DE LA DÉCISION
DU TRIBUNAL :

le 8 décembre 2003

ONT COMPARU :

Sharon Cartmill

Au nom du plaignant

Daniel Pagowski

Pour la Commission canadienne des droits de la personne

Sid Restall
Kevin Staska

Au nom de l'intimée

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