Tribunal canadien des droits de la personne

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Contenu de la décision

CANADIAN HUMAN RIGHTS TRIBUNAL TRIBUNAL CANADIEN DES DROITS DE LA PERSONNE

MARY MELLON

la plaignante

- et -

COMMISSION CANADIENNE DES DROITS DE LA PERSONNE

la Commission

- et -

DÉVELOPPEMENT DES RESOURCES HUMAINES CANADA

l'intimé

DÉCISION RELATIVE À LA QUALIFICATION
DU TÉMOIN EN TANT QU'EXPERT

2005 TCDP 12
2005/02/23

MEMBRE INSTRUCTEUR : Michel Doucet

TRADUCTION

[1] La présente décision traite d'une demande par laquelle la plaignante requiert que l'un de ses témoins, M. William Wilkerson, président de Global Business and Economic Roundtable on Addiction and Mental Health, soit qualifié d'expert dans le domaine de la gestion des questions de santé mentale en milieu de travail.

[2] L'intimé s'est opposé à cette demande. Il a renvoyé à trois décisions faisant autorité, à savoir : R. c. Mohan, (1994) 80 C.C.C. (3d) 401, une affaire en matière criminelle, Mayfield c. Mayfield, [2001] O.J. no 2212, une affaire en matière civile, et la décision du tribunal Alliance de la fonction publique du Canada c. Ministre du Personnel du Gouvernement des Territoires du Nord-Ouest, rendue le 27 août 2001.

[3] La décision Mohan traite en particulier des facteurs devant être appliqués lorsque l'on tranche la question de savoir si une preuve d'expert est admissible. Selon cette décision, l'admission de la preuve d'expert repose sur l'application des critères suivants :

  1. la pertinence;
  2. la nécessité d'aider le juge des faits;
  3. l'absence de toute règle d'exclusion;
  4. la qualification suffisante de l'expert.

[4] Il faut toujours se rappeler, lors de l'application des critères de la décision Mohan dans le contexte d'un Tribunal, que nous ne traitons pas de l'admission de la preuve d'expert dans un contexte de procès devant jury et que la question de la qualification de l'expert ne peut pas être examinée dans le cadre d'un voir-dire où le juge en cause a la possibilité d'évaluer la preuve devant être présentée et d'y appliquer les critères de la décision Mohan.

[5] Comme l'a déclaré mon collègue, Paul Groarke, dans la décision AFPC :

La preuve d'expert a pour objet d'aider un organisme ayant le pouvoir de rendre la justice à se prononcer sur les faits entourant une affaire. Elle aide en fournissant au juge des faits les renseignements et conclusions toutes faites qui débordent le cadre de leur expérience. Il s'ensuit que les experts ont un rôle spécial dans les litiges faisant appel à une preuve statistique ou scientifique. Il s'agit dans chaque cas de se demander si le témoignage est nécessaire pour trancher les points en litige.

[...]

Il est important de distinguer les questions découlant d'une demande de permission pour appeler des témoins de celles qui découlent de l'admissibilité de leur témoignage. La ligne de démarcation est forcément floue, mais il convient particulièrement d'attendre que le témoin soit cité avant de se prononcer sur les questions ayant trait à la pertinence et à la recevabilité de son témoignage.

[6] L'avocat de l'intimé semblait adopter la position selon laquelle la question pertinente était celle de savoir si la preuve qu'on entendait présenter était nécessaire pour aider le Tribunal à trancher la question. Il est important de se rappeler qu'un Tribunal n'est pas en mesure, à l'étape de la qualification, d'apprécier totalement la fiabilité de la preuve que le témoin entend présenter. Le mieux qu'on puisse s'attendre à cette étape est que le Tribunal traite de la question de savoir si le témoignage contribuerait logiquement à la cause de la partie qui appelle le témoin. Je dis en reprenant les mots de mon collègue Paul Groarke : Il suffit donc de pouvoir dire raisonnablement que le témoignage de l'expert est nécessaire pour trancher une des questions de fait.

[7] À cette fin, et en toute équité pour la partie adverse, il est important que le Tribunal et la partie adverse aient accès à l'essentiel du témoignage que l'expert entend présenter. C'est pourquoi les Règles provisoires de procédure du Tribunal prévoient ce qui suit au paragraphe 6(4) :

6(4) Si une partie donne avis de son intention d'appeler un témoin expert conformément à l'alinéa 6(1)f), elle doit, en plus du résumé requis en vertu de 6(1)f), signifier et déposer un rapport au moins 10 jours avant le début de l'audience. Ledit rapport doit :

  1. être signé par l'expert;
  2. préciser le nom de l'expert, son adresse et ses titres de compétence;
  3. indiquer l'essentiel du témoignage que l'expert en question entend présenter.

[8] Dans la présente affaire, l'avocat de la plaignante n'a pas donné un avis de son intention d'appeler un témoin expert pas plus qu'il a déposé un rapport indiquant l'essentiel du témoignage que l'expert entendait présenter. Compte tenu de ces omissions, le Tribunal ne qualifiera pas ce témoin de témoin expert.

Michel Doucet

OTTAWA (Ontario)
Le 23

février 2005

PARTIES AU DOSSIER

DOSSIER DU TRIBUNAL :

T928/4804

INTITULÉ DE LA CAUSE :

Mary Mellon c. Développement des resources humaines Canada

DATE DE LA DÉCISION DU TRIBUNAL :

Le 23 février 2005

ONT COMPARU :

Craig Spencer Pour la plaignante
Chris Leafloor Pour Développement des resources humaines Canada
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