Tribunal canadien des droits de la personne

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Contenu de la décision

TERRY BUFFETT

le plaignant

- et -

COMMISSION CANADIENNE DES DROITS DE LA PERSONNE

la Commission

- et -

FORCES ARMÉES CANADIENNES

l'intime

REQUTE PRLIMINAIRE PRSENTE EN VUE D'OBTENIR
LE REJET DE LA PLAINTE

2005 TCDP 16
2005/03/21

MEMBRE INSTRUCTEUR : Michel Doucet

[TRADUCTION]

I. INTRODUCTION

II. LES FAITS

A. Le systme de soins de sant du Canada

B. Les services de sant des Forces armes canadiennes

C. La politique l'gard de la Gamme de soins garantis par les Forces canadiennes

D. Les soins aux personnes charge

E. Le plaignant

III. LES PRTENTIONS DE L'INTIME

IV. LES PRTENTIONS DE LA COMMISSION

V. LES QUESTIONS EN LITIGE DANS LA REQUTE PRLIMINAIRE

VI. LA DCISION

I. INTRODUCTION

[1] Le 10 fvrier 2005, l'intime, les Forces armes canadiennes, a prsent une requte prliminaire en vue d'obtenir le rejet de la plainte dpose par Terry Buffett (le plaignant). L'intime soutient que la discrimination allgue ne constitue pas un refus de fournir un avantage en matire d'emploi fond sur l'un des motifs numrs l'article 7 de la Loi canadienne sur les droits de la personne, L.R.C. 1985, ch. H-6. L'intime prtend qu'tant donn qu'il n'y a pas de relations de travail entre elle et l'pouse du plaignant, le comportement n'entre pas dans le cadre de l'emploi. En outre, l'intime ajoute que la prestation de soins de sant qui se limite ses membres seulement suivant le Rgime de soins de sant des Forces canadiennes est une diffrence qui n'est fonde que sur le statut d'emploi qui n'est pas un motif numr dans la Loi canadienne sur les droits de la personne.

[2] L'intime a en outre mentionn que la prestation de soins de sant assurs par les Forces armes canadiennes n'est pas une pratique ou une politique en matire d'emploi qui se rapporte des chances d'emploi et n'est pas, par consquent, vise par l'article 10 de la Loi canadienne sur les droits de la personne.

[3] Lors de l'audience prliminaire, l'intime a en outre soulev la question de savoir si le plaignant avait satisfait au critre lgal pour tablir une preuve prima facie de discrimination.

II. LES FAITS

[4] Aux fins de la requte prliminaire, les parties se sont entendues sur les faits ci-aprs mentionns.

A. Le systme de soins de sant du Canada

[5] Aux termes de la Loi constitutionnelle, et comme la Loi canadienne sur la sant l'nonce, le Canada a un systme de soins de sant universel suivant lequel les provinces, avec une contribution pcuniaire du gouvernement fdral, sont charges de fournir les soins de sant essentiels leurs rsidents.

[6] La seule exception ce systme touche les groupes de personnes relevant directement du gouvernement fdral, y compris les Forces armes canadiennes, qui ne bnficient pas de la protection offerte par le rgime de soins de sant provincial.

[7] La Loi constitutionnelle attribue au gouvernement fdral la responsabilit de fournir des soins de sant aux membres des Forces armes canadiennes aux frais de l'tat. L'intime offre ses membres des soins de sant complets comparables ceux garantis par la Loi canadienne sur la sant. Les services de soins de sant fournis par l'intime sont sur un pied d'galit avec le rgime de soins de sant provincial et remplissent le mme rle.

B. Les services de sant des Forces armes canadiennes

[8] Le Rgime de soins de sant des Forces canadiennes est rgi par le Groupe des services de sant des Forces canadiennes qui est charg de fournir des services de sant aux membres des Forces armes canadiennes.

[9] L'intime a labor d'importantes infrastructures pour la prestation de soins de sant l'intrieur et l'extrieur du Canada et gre les soins de sant avec un budget annuel de plus de 728 millions de dollars.

[10] L'intime s'efforce de fournir ses membres l'accs aux mmes soins de sant auxquels s'attend le Canadien moyen. Toutefois, l'intime a en outre ajout des critres de prestation de soins de sant associs la nature des activits des Forces armes canadiennes. L'intime a un noyau de professionnels de la sant en uniforme et elle embauche forfait de nombreux spcialistes de la sant civils pour fournir des soins ses membres. L'intime offre des services de sant de base amliors, notamment des services d'un mdecin de famille, des analyses de laboratoire, des soins de sant mentale, des mdicaments, de la physiothrapie, des services sociaux et des soins dentaires.

[11] L'intime s'appuie en outre sur diverses ententes avec des organismes de soins de sant civils pour l'aider fournir des soins complets ses membres. Lorsqu'il est ncessaire qu'un membre utilise les services d'un professionnel de la sant civil, l'organisme civil prsente l'intime une facture cet gard.

C. La politique l'gard de la Gamme de soins garantis par les Forces canadiennes

[12] La politique l'gard de la Gamme de soins garantis par les Forces canadiennes dcrit les services et les soins de sant qui sont offerts et pays par l'tat aux membres des Forces armes canadiennes. Les cinq principes qui sont pris en compte pour tablir l'tendue des services offerts sont les suivants :

  1. la prestation du service est ncessaire pour prvenir les maladies en vue de maintenir la sant et le bien-tre mental et de diagnostiquer ou traiter les blessures, les maladies ou les incapacits;
  2. la prestation du service assure la gurison ou aide le militaire se rtablir afin qu'il retrouve son statut oprationnel et qu'il puisse tre envoy en mission pour l'intime;
  3. la prestation du service est conforme au principe scientifique d'une mdecine fonde sur des rsultats cliniques et scientifiques;
  4. la prestation du service ne doit pas constituer de la recherche purement exprimentale ou tre effectue des fins esthtiques;
  5. la prestation du service doit tre finance par un seul rgime d'assurance-maladie provincial ou par un organisme fdral.

[13] Il y a en outre un processus prvu par le Groupe des services de sant des Forces canadiennes par lequel des demandes de paiement d'actes mdicaux non assurs par le rgime de soins de sant de l'intime peuvent tre prsentes par des membres des Forces armes canadiennes et considres par l'intime.

D. Les soins aux personnes charge

[14] L'intime n'a pas un programme de soins de sant pays par l'tat pour les familles de ses membres et elle n'a pas de mandat confr par la loi de fournir des soins mdicaux des personnes qui ne sont pas membres des Forces armes canadiennes. Les conjoints et les enfants de ses membres reoivent leurs soins de sant du rgime de soins de sant de la province dans laquelle ils rsident ou du rgime de soins de sant de la fonction publique.

[15] Il existe un nombre de circonstances limites et exceptionnelles dans lesquelles le personnel mdical de l'intime peut fournir des soins mdicaux aux membres des familles de son personnel. Ces circonstances se limitent aux situations d'urgence dans des endroits loigns ou dans le cas o les membres de la famille accompagnent un membre lorsqu'il est en poste l'extrieur du Canada.

E. Le plaignant

[16] Le plaignant dtient le grade de sergent dans la Force rgulire des Forces armes canadiennes. Il est actuellement en poste la BFC de Gagetown, dans la province du Nouveau-Brunswick, et il reoit des soins de sant du rgime de soins de sant de l'intime. Rhonda Buffett, son pouse, n'est pas membre des Forces armes canadiennes. Elle rside dans la province du Nouveau-Brunswick et au cours de la priode en cause elle recevait des soins de sant du rgime d'assurance-maladie du Nouveau-Brunswick.

[17] Le plaignant et son pouse ont eu de la difficult avoir des enfants. L'pouse du plaignant a subi quatre fausses couches au dbut de leur mariage. la suite de ces difficults, le couple a subi des examens mdicaux afin d'tablir la cause de leur problme. Les examens mdicaux subis par le plaignant taient assurs par le rgime de soins de sant de l'intime. Les examens ont rvl que la cause de l'infertilit tait imputable au plaignant.

[18] Le plaignant a subi d'autres traitements mdicaux pour son tat. Il a subi une varicocle, une intervention chirurgicale qui tait paye par le rgime de soins de sant de l'intime. Un traitement l'aide de mdicaments, le seul autre traitement possible pour son tat, n'tait pas recommand dans son cas.

[19] Le mdecin du plaignant a recommand une fcondation in vitro (FIV) et une injection intracytoplasmique d'un spermatozode (ICSI) jugeant que ces actes mdicaux constituaient les meilleures possibilits pour que l'pouse du plaignant devienne enceinte. Pour la FIV, les mdecins prescrivent des mdicaments la femme afin de stimuler la production de plusieurs ovules qui sont retirs des ovaires et mis en incubation. L'chantillon de sperme est alors mlang avec les ovules de la femme dans une bote de Petri. Si la fcondation a lieu, un petit nombre d'embryons en rsultant sont placs dans l'utrus de la femme.

[20] L'ICSI peut tre utilise avec des spermatozodes immobiles durant la fcondation in vitro. Pour l'ICSI, un chantillon de sperme est valu au microscope. Un seul spermatozode est choisi dans l'chantillon et est inject, avec une aiguille, directement dans un ovule. L'ovule fcond est plac dans un incubateur. L'embryon en rsultant est implant dans l'utrus de la femme.

[21] Le plaignant a demand que des traitements de FIV et d'ICSI pour son pouse soient pays par l'intime.

[22] La politique de l'intim l'gard de la Gamme de soins garantis prvoit les services qui sont assurs relativement l'infertilit, savoir :

  1. l'investigation;
  2. le traitement par des mdicaments;
  3. le traitement chirurgical;
  4. l'insmination artificielle;
  5. la fcondation in vitro. Cependant, ce traitement n'est assur que dans les cas suivants :
    1. l'infertilit est attribuable une obstruction des trompes de Fallope ;
    2. le traitement est autoris pendant trois cycles au maximum;
    3. le traitement est offert uniquement au militaire en service actif et non aux personnes charge, au conjoint ou au partenaire.

[23] La demande prsente par le plaignant a t rejete parce que la personne qui aurait reu le traitement assur n'tait pas un membre des Forces armes canadiennes. En d'autres mots, l'intime a refus de payer pour une FIV et une ICSI parce que la FIV et l'ICSI ne peuvent tre pratiques que sur une femme et que l'pouse du plaignant n'tait pas membre des Forces armes canadiennes. L'expos des faits sur lequel les parties se sont entendues mentionne que mme si l'pouse avait t membre des Forces armes canadiennes, sa demande aurait galement t rejete parce que le traitement demand n'est pas vis par la disposition particulire prvoyant le paiement du traitement tant donn que l'pouse ne souffrait pas d'une obstruction des trompes de Fallope.

[24] Les soins assurs par le rgime de l'intime l'gard de l'infertilit sont les mmes que ceux assurs par l'Assurance-sant de l'Ontario et le Rgime de soins de sant de la fonction publique. Aucun autre rgime de soins de sant provincial ne paie les frais d'une FIV. Il n'y a actuellement aucun rgime d'assurance-maladie au Canada qui paie les frais d'une ICSI.

[25] Mme Buffett a effectivement demand que les traitements de FIV et d'ICSI soient pays par le Rgime d'assurance-maladie du Nouveau-Brunswick, mais sa demande a t refuse. Elle a en outre demand que les traitements soient pays par le Rgime des soins de sant de la fonction publique et sa demande a galement t refuse.

[26] Le 23 mai 2002, le plaignant a dpos sa plainte relative aux droits de la personne dans laquelle il prtend que le fait de payer les traitements contre l'infertilit subis par les femmes seulement, par les femmes qui sont membres des Forces armes canadiennes et qui souffrent d'obstruction des trompes de Fallope, constitue de la discrimination fonde sur le sexe, la dficience et la situation de famille contraire l'article 7 de la Loi canadienne sur les droits de la personne. Le 3 fvrier 2004, il a modifi sa plainte pour ajouter que l'intime avait appliqu une politique discriminatoire contraire l'article 10 de la Loi.

III. LES PRTENTIONS DE L'INTIME

[27] L'intime a mentionn l'ensemble complexe de lois fdrales et provinciales qui rgissent la prestation de services de sant assurs universels au Canada. Elle a en outre mentionn la Loi sur la dfense nationale, L.R.C. 1985, ch. N-5, qui tablit l'organisation, l'administration et les responsabilits cet gard. En vertu du paragraphe 12(2) de cette loi, le ministre responsable a le pouvoir de prendre des rglements pour la bonne administration des Forces armes canadiennes. Suivant ce paragraphe, les Ordonnances et rglements royaux applicables aux Forces canadiennes, ch. 34, (le rglement), ont t adopts. Ce Rglement nonce les exigences se rapportant la prestation de services de sant aux membres des Forces armes canadiennes.

[28] Le paragraphe 34.07(4) du Rglement mentionne que les soins de sant doivent tre fournis tous les membres des Forces armes canadiennes aux frais de l'tat. De plus, l'article 34.23 nonce que les services de sant ne peuvent tre fournis aux personnes charge que dans des circonstances trs limites. On demande normalement aux membres de la famille d'utiliser les services de sant assurs qui sont offerts par le gouvernement de la province o ils rsident. Dans le cas de l'pouse du plaignant, il s'agit de la province du Nouveau-Brunswick. Les personnes charge sont galement admissibles des services fournis des tiers par le Rgime de soins de sant de la fonction publique.

[29] L'intime, aprs avoir expos le cadre lgislatif, a trait du principe bien connu selon lequel, dans un cas de discrimination, il appartient au plaignant d'tablir une preuve prima facie de discrimination. Dans le cas de la prsente plainte, cela signifie que le plaignant doit dmontrer, selon la prpondrance des probabilits, que les actions de l'intime constituent un [TRADUCTION] acte discriminatoire en matire d'emploi qui cre une diffrence fonde sur un motif de distinction illicite . Lorsque la preuve prima facie de discrimination a t tablie, le fardeau de la preuve est alors transfr l'intime qui doit tablir, selon la prpondrance des probabilits, un motif justifiant les actes poss l'endroit du plaignant.

[30] Selon l'intime, la demande suivant l'article 7 de la Loi canadienne sur les droits de la personne devrait tre rejete parce que le refus de payer un acte mdical n'a pas t prononc en cours d'emploi. Dans la prsente affaire, le plaignant, en tant qu'employ des Forces armes canadiennes, a demand qu'un acte mdical pour son pouse soit pay. Par consquent, selon l'intime, le plaignant ne s'est pas vu refuser la prestation de soins par son employeur dans le cadre de sa relation d'emploi, mais plutt il y a eu un refus d'tendre le paiement des actes mdicaux pour l'pouse du plaignant.

[31] Puis, l'intime prtend que suivant le rgime lgislatif prcdemment dcrit, une personne qui n'est pas membre n'est pas admissible aux soins de sant assurs par son rgime et que, tant donn que les soins taient demands pour une personne qui n'est pas membre, la prsente plainte n'a pas de lien avec une distinction fonde sur l'emploi.

[32] L'intime soutient en outre que la demande suivant l'article 10 de la Loi canadienne sur les droits de la personne devrait tre rejete parce que le rgime des services de sant et la politique l'gard de la Gamme de soins garantis s'y attachant ne privent pas le plaignant ou tout autre employ d'une chance d'emploi. Selon l'intime, la prestation de services et de soins de sant n'est pas une chance d'emploi selon la dfinition de la Loi. Elle ajoute que les chances d'emploi sont des faons selon lesquelles un employ est engag, promu et form dans l'organisation. L'intime prtend que le but de l'article 10 est d'empcher des employeurs d'avoir des pratiques ou des politiques discriminatoires qui ont un effet sur la faon selon laquelle ils engagent et forment des employs ou leur accordent des promotions.

IV. LES PRTENTIONS DE LA COMMISSION

[33] Selon la Commission, les prtentions de l'intime ne tiennent pas compte de la gravit et de la complexit de la plainte. L'intime omet de tenir compte du fait que la plainte provient du sergent Buffett, un membre des Forces armes canadiennes, et non de son pouse. Le plaignant prtend qu'il a fait l'objet de discrimination compte tenu de l'application faite par l'intime des dispositions de son Rgime de soins de sant. Selon la Commission, la plainte soulve une foule d'autres questions qui vont au-del de la seule question du paiement d'un acte mdical.

[34] La Commission prtend que le Tribunal ne devrait pas rejeter la prsente plainte sans avoir tenu une audience et que la demande de rejet de la plainte prsente par l'intime ne satisfait pas au critre nonc dans des dcisions antrieures dans lesquelles le Tribunal a dclar qu'il devrait exercer sa comptence de rejeter une plainte seulement dans les [TRADUCTION] cas les plus clairs .

[35] Bien que les parties se soient entendues sur certains faits aux fins de la prsente audience prliminaire, la Commission soutient qu'elles ont de plus convenu qu'elles pourraient exposer de faon dtaille ces faits lors de l'audition complte de l'affaire.

[36] Les questions souleves par le plaignant sont, selon la Commission, actuelles et complexes. Elles ne peuvent tre troitement rsumes la question de savoir si l'pouse du plaignant doit bnficier de la protection offerte par le rgime de soins de sant. La Commission sollicite par consquent le rejet de la demande prsente par l'intime.

V. LES QUESTIONS EN LITIGE DANS LA REQUTE PRLIMINAIRE

[37] Dans sa requte prliminaire, l'intime demande que la plainte soit rejete pour les motifs suivants :

[TRADUCTION]

  1. son refus de payer l'acte mdical ne constituait pas un refus de fournir un avantage en matire d'emploi fond sur l'un des motifs numrs l'article 7 de la Loi;
  2. le plaignant ne peut pas tablir une preuve prima facie de discrimination;
  3. la prestation de soins de sant assurs n'est pas une pratique ou une politique d'emploi se rapportant des chances d'emploi et n'est pas, par consquent, vise par l'article 10 de la Loi.

VI. LA DCISION

[38] Les paragraphes 49(1) et 50(1) de la Loi canadienne sur les droits de la personne prvoient ce qui suit :

49(1) La Commission peut, toute tape postrieure au dpt de la plainte, demander au prsident du Tribunal de dsigner un membre pour instruire la plainte, si elle est convaincue, compte tenu des circonstances relatives celle-ci, que l'instruction est justifie.

50(1) Le membre instructeur, aprs avis conforme la Commission, aux parties et, son apprciation, tout intress, instruit la plainte pour laquelle il a t dsign; il donne ceux-ci la possibilit pleine et entire de comparatre et de prsenter, en personne ou par l'intermdiaire d'un avocat, des lments de preuve ainsi que leurs observations.

[39] Prenant en compte l'obligation nonce dans la Loi selon laquelle il faut donner aux parties la possibilit pleine et entire de comparatre lors de l'instruction et de prsenter des lments de preuve ainsi que leurs observations, le Tribunal est d'avis qu'il devrait exercer de faon prudente sa comptence de rejeter une plainte une tape prliminaire. Comme l'a dclar mon collgue Paul Groarke dans la dcision Cremasco c. Socit canadienne des postes, (2002-09-30 - Dcision sur requte no 1), au paragraphe 83 : Le fait de brimer le droit des plaignants une audience porterait atteinte la nature rparatrice de la Loi canadienne sur les droits de la personne, qui permet une interprtation large et librale .

[40] Par consquent, je partage l'opinion de mon collgue selon laquelle le pouvoir du Tribunal de rejeter une affaire une tape prliminaire ne devrait tre exerc que dans les [TRADUCTION] cas les plus clairs . La situation est-elle diffrente si les parties se sont entendues sur certains faits aux fins de la requte? Je ne le crois pas tant donn que les parties ont admis elles-mmes qu'elles pourraient exposer de faon dtaille ces faits lors de l'audition de la plainte.

[41] Lors de l'audition de la requte, les parties et le Tribunal ont chang les propos qui suivent :

[TRADUCTION]

M. PAGOWSKI : Je ferais seulement une autre observation. Cela rsulte seulement de quelque chose que mon amie a dit. Cela ne se rapporte pas au fond.

LE PRSIDENT : Non.

M. PAGOWSKI : Mon amie et moi avons chang de la correspondance. Je suis certain qu'elle serait d'accord avec moi cet gard - nous avons chang de la correspondance sur la question des faits qui auraient donn lieu la prsente requte particulire et nous avons convenu que - que ces faits - les faits pourraient trs bien tre exposs de faon dtaille au moment o nous serons l'tape de l'audience devant le Tribunal. Alors seulement aux fins de cette -

MME RICHARDS : Oui.

LE PRSIDENT : Parce que j'ai effectivement compris cela lors de la dernire confrence tlphonique, lorsque j'ai dit que je pensais que les parties s'taient entendues sur tous les faits et que vous avez mentionn tous deux que vous exposeriez de faon dtaille les faits s'il y avait une audience.

MME RICHARDS : C'est tout fait cela et je n'avais pas l'intention de vous induire en erreur cet gard.

LE PRSIDENT : Non, je comprends cela.

[42] Les points soulevs par l'intime dans sa requte sont de faon certaine trs importants. Ils soulvent d'importantes questions d'intrt public qui pourraient avoir des consquences bien au-del de la prsente plainte. Pour tre juste envers les parties, le Tribunal est d'avis que ces points devraient tre traits lors d'une audition complte de l'affaire au cours de laquelle les parties auront la possibilit de prsenter leurs lments de preuve et leurs observations sur les points de droit. Il ne serait pas dans l'intrt fondamental des parties en cause que ces questions soient traites de faon expditive titre de requte prliminaire et certainement pas alors que tous les faits n'ont pas t prsents.

[43] La requte prliminaire prsente par l'intime est rejete et l'affaire sera entendue lors d'une audience complte sur le bien-fond. Les parties fourniront sur le champ au Tribunal les dates auxquelles elles sont disponibles pour une audience d'une dure d'une semaine au mois de mai ou juin 2005. De plus, elles changeront et dposeront auprs du Tribunal une liste dfinitive de leurs tmoins avec un rsum de la preuve que ces tmoins prsenteront lors de l'audience. Les parties se conformeront en outre aux Rgles de procdure du Tribunal se rapportant la preuve d'expert, le cas chant. Le Tribunal est en outre disponible pour traiter de toute question rsultant de la prsente dcision ou de toute autre question que les parties voudraient soulever avant l'audience.

Michel Doucet

Ottawa (Ontario)

Le 21 mars 2005

PARTIES AU DOSSIER

DOSSIER DU TRIBUNAL : T976/9604
INTITUL DE LA CAUSE : Terry Buffett c. Forces armes canadiennes
DATE ET LIEU DE L'AUDIENCE PRLIMINAIRE: Le 10 fvrier 2005 Fredericton (Nouveau-Brunswick)
DATE DE LA DCISION DU TRIBUNAL : Le 21 mars 2005

ONT COMPARU :
Terry Buffett En son propre nom
Dan Pagowski Pour la Commission canadienne des droits de la personne
Elizabeth Richards Jessica Harris Pour l'intime
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