Tribunal canadien des droits de la personne

Informations sur la décision

Contenu de la décision

TRIBUNAL CANADIEN DES DROITS DE LA PERSONNE CANADIAN HUMAN RIGHTS TRIBUNAL

SYNDICAT CANADIEN DES COMMUNICATIONS,

DE L'ÉNERGIE ET DU PAPIER, FEMMES-ACTION

les plaignants

- et -

COMMISSION CANADIENNE DES DROITS DE LA PERSONNE

la Commission

- et -

BELL CANADA

l'intimée

DÉCISION À L'ÉGARD DE L'ADMISSIBILITÉ
D'UN TÉMOIGNAGE D'EXPERT

2005 TCDP 15
2005/01/28

MEMBRE INSTRUCTEUR : J. Grant Sinclair

Pierre Deschamps

[TRADUCTION]

[1] Bell a présenté une requête par laquelle elle demande que le témoignage d'expert de M. Lawrence Gould que l'on entend présenter ne soit pas admis en preuve par le Tribunal parce que l'objet de son témoignage fait partie de la connaissance et de l'expérience du Tribunal. Au soutien de sa requête, Bell s'appuie sur l'arrêt Mohan et prétend que le témoignage ou la preuve de M. Gould n'est pas nécessaire pour aider le Tribunal à rendre une décision définitive à l'égard de la question des intérêts.

[2] Suivant le paragraphe 53(4) de la LCDP, comme nous en avons traité à de nombreuses reprises au cours des derniers jours, le Tribunal peut accorder des intérêts au taux et pour la période qu'il estime justifiés sous réserve de l'article 9.12 des Règles de procédure du Tribunal qui prévoit une période et un taux précis à moins d'une ordonnance contraire du Tribunal. CEP se présente au Tribunal pour lui demander qu'il rende une ordonnance contraire et s'appuie sur la preuve d'expert de M. Gould pour établir le taux et la méthode de calcul des intérêts qui devraient s'appliquer dans ce cas particulier.

[3] Le Tribunal a qualifié M. Gould d'expert en matière de finances. Ainsi, le Tribunal a entendu le témoignage de M. Gould selon lequel les questions des intérêts et de la méthode de calcul des intérêts font partie intégrante des finances et de l'expertise financière, comme il les décrit. Compte tenu de ce témoignage et de la preuve quant à sa formation universitaire et à son expérience, M. Gould a été accepté en tant qu'expert pour rendre un témoignage à l'égard des intérêts et de la méthode de calcul appropriés.

[4] L'alinéa 50(3)c) de la LCDP prévoit que le Tribunal peut recevoir des éléments de preuve ou des renseignements qu'il estime indiqués indépendamment de leur admissibilité devant un tribunal judiciaire, sous réserve du droit à la confidentialité. À notre avis, comme nous l'avons mentionné hier au moment où les observations ont été présentées à l'égard de la requête, il s'agit du point de départ pour établir l'admissibilité de la preuve d'expert.

[5] L'arrêt Mohan expose quatre critères à examiner à l'égard de l'admissibilité de la preuve d'expert. Ces critères sont les suivants : (a) la pertinence, (b) la nécessité d'aider le juge des faits, (c) l'absence de toute règle d'exclusion et (d) la qualification suffisante de l'expert. À cette étape, les critères (a), (c) et (d) ne sont pas en cause et seul le critère (b) est la question qui doit être tranchée. À notre avis, compte tenu de l'alinéa 50(3)c) de la LCDP, l'arrêt Mohan n'est pas strictement applicable lorsque la question de l'admissibilité d'un témoignage d'expert est soulevée devant le Tribunal.

[6] Cependant, compte tenu des faits de la présente affaire, de la nature de la preuve que M. Gould entend présenter et sans expliquer en détail de quelle façon l'alinéa 50(3)c) interagit avec l'arrêt Mohan, nous sommes convaincus que les critères établis dans l'arrêt Mohan peuvent être utilisés en l'espèce et nous répondons de façon affirmative à la question se rapportant au critère (b), estimant qu'il est nécessaire d'admettre la preuve d'expert de M. Gould.

[7] À l'égard de la nécessité d'aider le juge des faits, la Cour a statué dans l'arrêt Mohan que l'exigence est que l'opinion soit nécessaire au sens qu'elle fournit des renseignements qui selon toute vraisemblance dépassent l'expérience et la connaissance d'un juge, d'un jury ou du juge des faits. En faisant cette déclaration, la Cour a en outre renvoyé à l'arrêt R. c. Abbey. Dans cet arrêt, la Cour a déclaré que la preuve doit être nécessaire pour permettre au juge des faits d'apprécier la nature technique des questions en litige.

[8] À notre avis, en raison de la complexité des questions que M. Gould entend traiter et des questions en litige à trancher, le Tribunal a conclu que son témoignage d'expert sera utile pour l'aider à trancher les questions en litige qui sont soulevées à l'égard des intérêts qu'il est justifié d'accorder. Nous avons en outre conclu que la question traitée dans son rapport dépasse notre expertise et notre connaissance. Par conséquent, la requête de Bell est rejetée et la preuve présentée par M. Gould sera admise par le Tribunal.

J. Grant Sinclair, Président

Pierre Deschamps, Membre

Ottawa, Ontario
Le 28 janvier 2005

PARTIES AU DOSSIER

DOSSIER DU TRIBUNAL :

T503/2098

INTITULÉ DE LA CAUSE :

Syndicat canadien des communications, de l'énergie et du papier, femmes-action

DATE ET LIEU DE L'AUDIENCE :

Le 27 janvier 2005 Ottawa (Ontario)

DATE DE LA DÉCISION DU TRIBUNAL :

Le 28 janvier 2005 (Décisions écrites envoyées aux parties le 11 mars 2005)

ONT COMPARU :

Peter Engelmann
Fiona Campbell

Pour le Syndicat canadien des communications, de l'énergie et du papier

Odette Gagnon

Pour Femmes-Action

Andrew Raven
Patrick O'Rourke
K.E. Ceilidh Snider

Pour la Commission canadienne des droits de la personne

Peter Mantas
Guy Dufort
George Karayannides

Pour Bell Canada

 Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.