Tribunal canadien des droits de la personne

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LOI CANADIENNE SUR LES DROITS DE LA PERSONNE L.R.C. 1985, chap. H-6 (version modifiée)

TRIBUNAL DES DROITS DE LA PERSONNE

ENTRE :

ROBERT ST. THOMAS

le plaignant

- et -

COMMISSION CANADIENNE DES DROITS DE LA PERSONNE

la Commission

- et -

FORCES ARMÉES CANADIENNES

les intimées

TRIBUNAL : Michael G. Baker, président Peter A. Ross, membre Paula Tippett, membre DÉCISION DU TRIBUNAL ONT COMPARU :

René Duval Avocat de la Commission canadienne des droits de la personne

Lieutenant-colonel Avocats des Forces armées Arthur McDonald, canadiennes Donald J. Rennie et Susan Clarke

Robert St. Thomas en son nom

DATES ET LIEU DE L'AUDIENCE :

Halifax (Nouvelle-Écosse), 5 et 6 juin 1989 Halifax (Nouvelle-Écosse), 1er et 2 novembre 1989

TRADUCTION

Il s'agit en l'espèce d'une plainte déposée en date du 10 décembre 1986 dans laquelle M. Robert St. Thomas allègue que les Forces armées canadiennes ont, en se fondant sur un motif de distinction illicite c'est- à-dire la déficience, commis un acte discriminatoire suivant la définition donnée à cette expression aux articles 7 et 10 de la Loi canadienne sur les droits de la personne. Le 19 décembre 1988, M. Sidney Lederman, président du Comité du tribunal des droits de la personne, a constitué le présent tribunal pour entendre la plainte.

M. St. Thomas s'est engagé dans les Forces armées canadiennes en qualité d'aide-contrôleur aérien le 15 mars 1973. A cette époque, il satisfaisait aux normes d'aptitude physique et mentale du personnel navigant. Il a suivi son entraînement de base à Saint-Jean (Québec), et il a reçu une formation supplémentaire à Cold Lake (Alberta) et à Borden (Ontario). M. St. Thomas a déclaré dans son témoignage qu'il a tout d'abord été affecté à Gagetown (Nouveau-Brunswick) en 1974. Il a été affecté par la suite à Trenton (Ontario) où il a travaillé comme aide- contrôleur aérien tout en suivant des cours. C'est lorsqu'il se trouvait à Trenton qu'il a pour la première fois souffert d'une allergie. Il semble que cela se soit produit en 1976 ou 1977. C'est à peu près à cette époque que son médecin lui a appris qu'il souffrait d'asthme bronchique et qu'il lui a prescrit l'utilisation d'un inhalateur Ventolin. A compter de ce moment jusqu'en 1980, le plaignant ne semble pas avoir éprouvé de problèmes graves, et il n'a eu aucune difficulté à effectuer son travail. En fait, M. St. Thomas a conservé sa licence de pilote privé et sa licence de pilote de planeur et il a gardé le statut médical requis pour le personnel navigant.

En 1980, M. St. Thomas a changé d'emploi et est devenu technicien des procédures du génie construction (TEC PGC). Il a alors été muté de Bagotville (Québec) à Halifax (Nouvelle-Écosse) pour y suivre une formation en cours d'emploi avant d'entreprendre son cours de TEC PGC. Après avoir terminé sa formation, M. St. Thomas est retourné à Halifax (Nouvelle- Écosse) où il a travaillé comme commis aux contrats et programmeur des travaux, fonctions qui faisaient partie de son métier.

Le 25 octobre 1984, M. St. Thomas a subi un examen physique de routine avant d'être affecté à la base Alert située dans les Territoires du Nord- Ouest. A la suite de cet examen, sa classification médicale est passée temporairement de G-1, 0-1 à G-4, 0-3. Cette classification signifie qu'il était jugé temporairement inapte à être affecté sur le terrain, en mer, aux Forces des Nations Unies, aux forces stationnées en Europe ou à tout autre poste isolé. Cette classification G-4, 0-3 est devenue permanente en juin 1985. La classification médicale d'un TEC PGC étant au minimum G-3, 0-3, le cas de M. St. Thomas a été soumis au Conseil médical de révision des carrières. Le Conseil a recommandé que M. St. Thomas soit réformé [TRADUCTION] pour des motifs d'ordre médical, étant donné qu'il souffre d'une déficience et qu'il est inapte à exécuter les fonctions de l'emploi ou du métier qu'il exerce actuellement, et qu'il n'y a aucune autre manière de tirer profit de ses services.

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M. St. Thomas a choisi de quitter les Forces armées canadiennes avant la date de libération recommandée, car il espérait suivre un cours de perfectionnement; c'est pourquoi il a quitté les Forces le 15 décembre 1985. Comme l'indiquent sa faillite subséquente et les autres difficultés financières personnelles auxquelles il a dû faire face, la perte de la carrière qu'il avait choisie lui a causé un tort considérable.

Il ne fait aucun doute pour le tribunal que la Commission a établi qu'il s'agissait d'un cas prima facie de discrimination. La preuve indique clairement que M. St. Thomas avait les compétences requises pour occuper l'emploi auquel il avait été affecté et que les Forces armées canadiennes ont refusé de continuer à l'employer, ce qui constitue un acte discriminatoire en violation de l'alinéa 7a) de la Loi canadienne sur les droits de la personne. De plus, en déterminant que M. St. Thomas ne pourrait, en raison de sa déficience (asthme bronchique), être muté à des postes situés loin des services médicaux, un prérequis pour obtenir une promotion, ni continuer de faire partie des Forces armées canadiennes, ces dernières ont commis de prime abord un acte discriminatoire en violation de l'alinéa 7b) de la Loi canadienne sur les droits de la personne. Enfin, il est clair que la ligne de conduite des Forces armées canadiennes à l'égard des personnes souffrant d'asthme bronchique constitue de prime abord un acte discriminatoire en violation de l'alinéa 10a) de la Loi canadienne sur les droits de la personne.

Par ailleurs, le tribunal convient avec la Commission qu'il incombe aux intimées d'établir l'existence d'une exigence professionnelle justifiée comme le prévoit l'alinéa 15a) de la Loi canadienne sur les droits de la personne :

15. Ne constituent pas des actes discriminatoires : a) les refus, exclusions, expulsions, suspensions, restrictions, conditions ou préférences de l'employeur qui démontre qu'ils découlent d'exigences professionnelles justifiées;

Suivant la décision de la Cour suprême du Canada dans l'arrêt La Commission ontarienne des droits de la personne c. La municipalité d'Etobicoke, [1982] 1 R.C.S. 202, à la page 208, il incombe aux intimées de démontrer l'existence d'une exigence professionnelle justifiée en utilisant la règle normale de la preuve en matière civile, c'est-à-dire suivant la prépondérance des probabilités.

Afin de convaincre le tribunal que leur norme médicale ne constitue pas un acte discriminatoire, les Forces armées canadiennes doivent lui démontrer que les personnes qui établissent leurs normes croyaient subjectivement qu'une telle exigence est nécessaire afin d'assurer la bonne exécution du travail en cause.

Comme l'a statué la Cour suprême du Canada dans l'arrêt La Commission ontarienne des droits de la personne c. La municipalité d'Etobicoke à la page 208 :

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Pour constituer une exigence professionnelle réelle, une restriction comme la retraite obligatoire à un âge déterminé doit être imposée honnêtement, de bonne foi et avec la conviction sincère que cette restriction est imposée en vue d'assurer la bonne exécution du travail en question d'une manière raisonnablement diligente, sûre et économique, et non pour des motifs inavoués ou étrangers qui visent des objectifs susceptibles d'aller à l'encontre de ceux du Code.

L'exigence doit non seulement satisfaire au critère subjectif mais également au critère objectif énoncé par la Cour suprême du Canada dans l'arrêt La Commission ontarienne des droits de la personne c. La municipalité d'Etobicoke, à la page 208 :

Elle doit en outre se rapporter objectivement à l'exercice de l'emploi en question, en étant raisonnablement nécessaire pour assurer l'exécution efficace et économique du travail sans mettre en danger l'employé, ses compagnons de travail et le public en général.

Il a en outre été établi qu'un employeur doit démontrer que l'exigence, même si elle ne se justifie pas nécessairement dans le cas de chaque individu, est raisonnablement justifiée dans son application générale. (Voir l'arrêt La ville de Saskatoon c. La Saskatchewan Human Rights Commission, [1989] 2 R.C.S. 1297, p. 1309, 21 décembre 1989.)

En fait, dans l'arrêt La ville de Saskatoon c. La Saskatchewan Human Rights Commission, la Cour fait ressortir ce qui suit :

Quoiqu'il ne soit pas absolument nécessaire de faire subir des tests à chaque employé, il se peut que l'employeur ne parvienne pas à s'acquitter de l'obligation qui lui incombe de prouver le caractère raisonnable de l'exigence s'il ne fournit pas une réponse satisfaisante à la question de savoir pourquoi il ne lui a pas été possible de traiter les employés individuellement, notamment en administrant des tests à chacun d'eux.

De même, l'affaire Carson c. Air Canada indique que les normes de preuve exigent que l'employeur prouve quant à l'exigence que les faits lui permettent logiquement de croire que l'exigence diminue les risques de dommages. (Voir l'affaire Carson c. Air Canada, [1985] 1 C.F. 209, à la p. 234). Cette preuve ne doit pas être que purement spéculative, afin de permettre au tribunal de déterminer s'il existe un risque réel de dommages.

Cependant, une fois établie l'existence d'un risque réel de blessures ou d'un danger, il n'y a aucune obligation d'accommodement à l'égard de ce risque ou de ce danger. Comme l'a déclaré le juge Pratte dans l'arrêt Canadien Pacifique Limitée c. Commission canadienne des droits de la personne et Mahon, [1988] 1 C.F. 209, à la p. 221 :

La décision contestée se fonde, me semble-t-il, sur l'idée généreuse que les employeurs et le public ont le devoir

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d'accepter et de courir certains risques de subir des blessures afin de permettre aux personnes handicapées de trouver du travail. A mon avis, la loi n'impose un tel devoir à personne.

Dès lors que le tribunal avait conclu que la politique de la requérante de ne pas employer des diabétiques insulino-dépendants en qualité d'agents de la voie était raisonnablement nécessaire pour éliminer un risque réel de blessures graves pour la requérante, ses employés et le public, une seule décision s'imposait au regard de la loi, à savoir que le refus de la requérante d'employer Wayne Mahon était fondé sur une exigence professionnelle normale, et qu'en conséquence il ne constituait pas un acte discriminatoire.

Les affaires Gaetz c. Forces armées canadiennes, DT 14/88, Galbraith c. Forces armées canadiennes, DT 13/89, et Seguin et Tuskovich c. Gendarmerie royale du Canada, DT 11/89, confirment que d'autres tribunaux ont jugé que les normes médicales relatives à l'état de santé constituent des exigences professionnelles justifiées lorsqu'il est démontré qu'elles ont été conçues pour écarter un risque réel de blessures ou un danger.

Bien sûr, l'arrêt Bhinder c. Compagnie des chemins de fer nationaux du Canada, [1985] 2 R.C.S. 561, a établi qu'il n'existe aucune obligation de composer avec un employé donné une fois que l'employeur a démontré l'existence d'une exigence professionnelle justifiée. Toutefois, l'arrêt Alberta Human Rights Commission c. Central Alberta Dairy Pool et autres ([1990] 2 R.C.S. 489, 13 septembre 1990) a modifié la décision rendue dans l'arrêt Bhinder c. Compagnie des chemins de fer nationaux du Canada de sorte qu'il n'y a plus d'obligation d'accommodement dans les cas de discrimination directe. Néanmoins, l'arrêt Alberta Human Rights Commission c. Central Alberta Dairy Pool et autres établit qu'il y a une obligation d'accommodement en cas de discrimination indirecte. Le tribunal est d'avis que la règle des Forces armées canadiennes selon laquelle les asthmatiques sont inaptes au service militaire constitue une discrimination directe. Il ne s'agit pas d'une règle ou d'une norme qui est neutre à première vue. Cette règle s'applique à tous les asthmatiques et elle ne peut être validée que s'il s'agit d'une exigence professionnelle justifiée.

Les intimées ont laissé entendre que la Commission n'avait pas allégué que les normes médicales établies pour le métier de TEC PGC n'étaient pas justifiées. Au contraire, il semble que l'une des principales explications données par la Commission est que la norme médicale en cause a été établie pour des motifs principalement économiques.

Le Tribunal estime que la preuve montre, en fait, que la manière dont sont administrées les normes médicales est considérablement influencée par la réalité économique. Il ressort du témoignage du docteur Fisher que plus un membre est rentable pour les Forces, plus il est vraisemblable que l'on retiendra ses services conformément à une recommandation du Conseil médical de révision des carrières. De même, le témoignage du docteur Jacques Roy dans l'affaire Galbraith c. Forces armées canadiennes

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démontre que l'on laisse parfois de côté la norme habituelle d'enrôlement lorsque le commandent les besoins économiques ou opérationnels des Forces.

Néanmoins, il existe également d'autres éléments de preuve qui indiquent que les normes médicales établies pour le métier de TEC PGC se justifient pour d'autres motifs. En effet, ces éléments de preuve démontrent que les TEC PGC comme M. St. Thomas sont d'abord et avant tout des soldats, des marins ou des membres du personnel navigant et qu'ils doivent donc être capables d'accomplir leurs fonctions militaires. Un TEC PGC doit également être capable d'effectuer des tâches ardues dans des climats extrêmes comme l'exige son métier. Par conséquent, le tribunal est convaincu que les intimées ont satisfait au critère subjectif énoncé dans l'arrêt La Commission ontarienne des droits de la personne c. La municipalité d'Etobicoke.

Le docteur Fisher a déclaré dans son témoignage qu'elle estimait que, pour un asthmatique, l'éloignement des hôpitaux de soins-tertiaires comme il en existe dans le sud du Canada présentait des risques. Elle a en outre dit qu'en raison du risque toujours présent de crise nécessitant des soins hospitaliers, si un asthmatique devait travailler dans un endroit où il n'y a pas d'hôpitaux de soins-tertiaires, les risques pourraient être plus élevés pour l'équipage d'un appareil qui pourrait devoir transporter par avion l'asthmatique pour qu'il reçoive les soins médicaux appropriés. Elle a ajouté que la poussière et la sécheresse existant sur le Plateau du Golan et en Namibie, la présence de fumées ou des exercices sévères pourraient constituer des risques pour une personne asthmatique, car ces conditions tendent à déclencher des crises d'asthme bronchique.

Le docteur Warren a indiqué dans son rapport écrit ainsi que lors de son témoignage que M. St. Thomas souffrait d'asthme actif et qu'il y avait des risques qu'il subisse une crise qui lui soit fatale, bien qu'il soit impossible en cas d'asthme de prévoir avec certitude le déclenchement d'une telle crise. Il a également déclaré dans son témoignage qu'on pouvait raisonnablement s'attendre à ce qu'un asthmatique ait de la difficulté à s'acquitter de ses fonctions militaires.

S'appuyant sur les témoignages des docteurs Fisher et Warren, le tribunal a conclu que la preuve permettait d'établir que la présence d'asthmatiques au sein du personnel actif des Forces armées canadiennes pourrait mettre en danger les asthmatiques eux-mêmes ou les autres membres des Forces. Il semble également au tribunal que, bien que les Forces armées canadiennes composent pour des motifs économiques ou opérationnels avec certaines personnes qui ne satisfont pas aux normes médicales minimales, il n'existe à son avis aucune obligation légale de composer avec M. St. Thomas comme l'a établi l'arrêt Bhinder c. Compagnie des chemins de fer nationaux du Canada et l'a confirmé l'arrêt Alberta Human Rights Commission c. Central Alberta Dairy Pool.

Le tribunal a également conclu que le témoignage du docteur Michaels au sujet de la condition médicale particulière de M. St. Thomas tend à confirmer les témoignages des docteurs Fisher et Warren en ce sens qu'il reconnaît qu'il y a un risque pour M. St. Thomas. Il décrit toutefois ce

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risque comme potentiel et non comme réel. Il s'agit en fait de la difficulté majeure à laquelle doivent faire face les intimées parce qu'elle fait ressortir que celles-ci n'ont fait subir aucun test individuel à M. St. Thomas pour déterminer s'il pouvait exercer son emploi sans danger.

Il ne fait aucun doute que les rigueurs des tâches qui incombent à un membre des Forces armées canadiennes présentent un risque potentiel pour certaines personnes souffrant d'asthme. Le tribunal n'estime toutefois pas que la preuve permet de démontrer que le simple fait de souffrir d'asthme crée un risque réel pour la sécurité de chaque membre des Forces armées canadiennes souffrant d'asthme ou pour ses autres membres. Le tribunal est d'avis qu'il est nécessaire d'administrer des tests individuels pour déterminer s'il existe un risque réel pour un individu donné ou pour la sécurité des autres personnes.

Dans l'arrêt Alberta Human Rights Commission c. Central Alberta Dairy Pool, madame le juge Wilson de la Cour suprême du Canada déclare à la page 518 :

Le second volet du critère établi dans l'arrêt Brossard concerne la possibilité de solutions autres que la règle de l'employeur. A mon avis, il ne s'agit pas là d'un critère distinct pour vérifier l'existence d'une EPN mais plutôt d'un facteur à prendre en compte pour savoir si la règle est raisonnablement nécessaire en vertu du premier volet. Si ce volet est mis en évidence dans l'arrêt Brossard, c'est peut-être que notre Cour n'avait pas explicitement attiré l'attention sur lui auparavant. A mon avis, le principe qui y est formulé est incontestable. S'il est possible de trouver une solution raisonnable qui évite d'imposer une règle donnée aux membres d'un groupe, cette règle ne sera pas considérée comme justifiée.

Le tribunal est d'avis qu'il existe une solution raisonnable qui permet d'éviter de déclarer que chaque personne souffrant d'asthme est inapte à servir dans les Forces armées canadiennes. Cette solution raisonnable consiste pour les Forces armées canadiennes à faire subir un test individuel à la personne en cause pour déterminer si l'asthme dont elle souffre l'empêche de s'acquitter sans danger de ses fonctions. Malheureusement, aucun test de ce genre n'a été administré en l'espèce. Néanmoins, M. St. Thomas relevant des Forces armées canadiennes, il était possible de lui faire subir un tel test.

J'estime que le tribunal peut trouver un appui dans la décision de la Cour suprême du Canada dans l'arrêt La ville de Saskatoon c. La Saskatchewan Human Rights Commission où le juge Sopinka a déclaré aux pages 1313 et 1314 :

S'il existe une solution pratique autre que l'adoption d'une règle discriminatoire, on peut conclure que l'employeur a agi d'une manière déraisonnable en n'adoptant pas cette autre solution.

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Compte tenu de ce qui précède, le tribunal décide que la plainte relative à un acte discriminatoire est fondée. Il en est ainsi non pas parce que les Forces armées canadiennes ont fait preuve de mauvaise volonté à l'égard de M. St. Thomas, mais simplement parce que cet acte est la conséquence d'une ligne de conduite en vertu de laquelle M. St. Thomas a été jugé d'avance inapte à servir dans les Forces armées canadiennes sans qu'on ne lui ait administré un test individuel.

Le tribunal ordonne que les Forces armées canadiennes indemnisent M. St. Thomas des pertes de revenu (salaires) qu'il a subies depuis qu'il a quitté les Forces et que M. St. Thomas soit réintégré dans le rang qu'il occupait, avec tous les avantages dont il aurait pu bénéficier s'il avait continué à servir dans les Forces armées canadiennes, s'il le désire. Toutefois, il est évidemment loisible aux Forces armées canadiennes d'administrer un test à M. St. Thomas, une fois qu'il aura réintégré son poste, pour déterminer si son asthme l'empêche de s'acquitter sans danger de ses fonctions dans les Forces armées canadiennes.

En outre, le tribunal ordonne aux Forces armées canadiennes de payer à M. St. Thomas une indemnité de 5 000 $ pour le préjudice moral subi. Si les parties n'arrivent pas à s'entendre sur le montant de l'indemnité à laquelle M. St. Thomas a droit pour ses pertes de revenu (salaires), elles pourront s'adresser au tribunal afin qu'il détermine ce montant.

FAIT à Mahone Bay (Nouvelle-Écosse), le 25e jour de mars 1991.

MICHAEL G. BAKER

PETER A. ROSS

PAULA TIPPETT

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