Tribunal canadien des droits de la personne

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D.T. 4/91

LOI CANADIENNE SUR LES DROITS DE LA PERSONNE L.R.C. 1985, chap. H-6 (version modifiée)

TRIBUNAL DES DROITS DE LA PERSONNE

ENTRE:

L'ALLIANCE DE LA FONCTION PUBLIQUE DU CANADA

la Plaignante

- et -

COMMISSION CANADIENNE DES DROITS DE LA PERSONNE

la Commission

et

CONSEIL DU TRÉSOR

l'Intimé DÉCISION DU TRIBUNAL TRIBUNAL: Robert W. Kerr, président John I. Laskin, membre Jane Banfield, membre

ONT COMPARU:

René Duval Avocat de la Commission canadienne des droits de la personne

Andrew Raven Avocat de l'Alliance de la Fonction publique du Canada

Denis Bouffard Avocat du Conseil du Trésor

DATES ET LIEU DE L'AUDIENCE: le 12 juin 1985, 14 et 15 juillet 1987, 8, 9 et 10 novembre 1989, 14, 15 et 16 novembre 1989, 22, 23, 24, 25 et 26 janvier 1990, 18, 19, 20, 21 et 22 juin 1990, 21 et 22 août 1990 à Ottawa (Ontario)

TRADUCTION

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HISTORIQUE DU CAS

La plainte en l'espèce a été déposée à l'origine le 9 septembre 1981. Cependant, l'intervalle de près de dix ans qui s'est écoulé dans le présent dossier n'est pas imputable entièrement à l'enquête et au processus de décision. Pendant cette même période, les parties négociaient activement au sujet des mêmes questions et la Commission des droits de la personne et le gouvernement fédéral examinaient des modifications relatives à la législation subordonnée se rapportant aux questions en litige en l'espèce. En conséquence, plutôt que de chercher à résoudre le problème en se fondant sur l'état du droit et les circonstances qui prévalaient en 1981, les parties ont sagement convenu de reporter à l'occasion le processus de traitement de la plainte jusqu'à ce que les autres solutions possibles aient été épuisées.

Le présent Tribunal a été nommé le 14 août 1984. Lors de la conférence préparatoire qui a eu lieu le 12 juin 1985, le Tribunal a convenu d'ajourner la cause sine die, jusqu'à l'adoption de la nouvelle Ordonnance sur la parité salariale que la Commission des droits de la personne examinait alors. Apparemment, cette ordonnance pouvait aider les parties à en arriver à un règlement du conflit. La nouvelle ordonnance a finalement été publiée dans la Gazette du Canada le 10 décembre 1986.

Par la suite, le Tribunal a déterminé des dates d'audition et le début de l'audience a finalement été fixé au 13 juillet 1987. L'audience a ensuite été reportée d'un autre jour et a débuté le 14 juillet. A cette date, les parties ont fait savoir au Tribunal qu'elles avaient conclu une entente de principe dans laquelle elles demandaient au Tribunal de délivrer une ordonnance sur consentement. Elles ont demandé un autre ajournement d'une journée pour terminer la rédaction des conditions de ce règlement.

Les conditions du règlement ont été intégrées dans une ordonnance sur consentement que le Tribunal a approuvée. Selon cette entente, un barème de rajustements des salaires et un processus d'examen de la classification étaient adoptés. D'une façon générale, l'intimé devait rajuster les salaires de façon à assurer la parité salariale entre les employés des services hospitaliers et ceux des services généraux à des niveaux de classification comparables. L'intimé devait aussi réviser sa norme de classification des services hospitaliers alors en vigueur de façon à produire une nouvelle norme correspondant à celle de la classification des services généraux qui existait alors. Une copie de l'ordonnance sur consentement en date du 15 juillet 1987 est jointe à la présente décision en annexe A.

Selon les paragraphes 10 et 11 du règlement et de l'ordonnance sur consentement, le Tribunal devait demeurer saisi du cas pour certaines fins. D'après le paragraphe 10, le Tribunal devait conserver sa compétence au sujet de certains aspects du conflit que l'application des dispositions du règlement ne permettrait pas de résoudre. Selon le paragraphe 11, le Tribunal demeurerait saisi de la question des effets qu'un autre processus en cours, soit une initiative mixte syndicale/patronale concernant les

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pratiques de rémunération, pourrait avoir sur les paiements convenus d'après le règlement.

A la fin de 1988, la plaignante a demandé au Tribunal d'exercer le pouvoir qu'il avait conservé d'après le paragraphe 10 de l'ordonnance sur consentement. Après d'autres délais inévitables, le Tribunal a tenu une autre audience le 8 novembre 1989 et l'intimé a alors soutenu que le Tribunal n'avait pas la compétence voulue pour continuer à entendre la plainte, parce qu'il était functus officio et que les questions soulevées par la plaignante à ce stade-ci dépassaient la portée de la plainte. Le Tribunal a décidé verbalement qu'il n'était pas functus officio et l'audience s'est poursuivie.

Il semblait préférable de trancher les questions liées à la portée de la plainte lors de l'examen de la pertinence de certains éléments de preuve ou à la fin de la cause, au moment de déterminer le bien-fondé général de la plainte. Le Tribunal a donc décidé que cet aspect de l'objection préliminaire de l'intimé était prématuré.

Étant donné que la décision selon laquelle le Tribunal était functus officio était importante pour les parties, le Tribunal s'est engagé à fournir aux parties des motifs écrits de sa décision. Ces motifs ont été rendus publics à titre de décision préliminaire le 1er mars 1990 et une copie est jointe en annexe B.

L'audience s'est poursuivie le 8 novembre 1989 et, après plusieurs ajournements, elle a pris fin le 22 août 1990.

QUESTIONS EN LITIGE

Avant de statuer sur le bien-fondé de la plainte, il semble approprié d'examiner la question fondamentale qui consiste à savoir si les points en litige soulevés devant nous sont visés par la plainte. Dans la négative, les observations que nous formulerions au sujet de ces points n'auraient aucun effet juridique et on peut se demander si leur examen serait approprié. Pour répondre à cette question, il faut définir les points en litige qui ont été soulevés devant nous et qui, d'après la plaignante et la Commission, sont visés par la plainte.

Dans la plainte qui a donné lieu au présent litige, on pouvait lire l'allégation suivante :

[TRADUCTION]

«Le Conseil du trésor a fait montre de discrimination fondée sur le sexe dans la classification et la rémunération des employés du groupe des services hospitaliers, à prédominance féminine, par rapport au groupe des services généraux, à prédominance masculine, contrairement aux articles 7, 10 et 11 de la Loi canadienne sur les droits de la personne.»

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Il sera fréquemment question des groupes des services hospitaliers et des services généraux tout au long des présents motifs. Pour des raisons pratiques, nous utiliserons désormais dans les présents motifs les abréviations SH pour les services hospitaliers et SG pour les services généraux.

Après avoir allégué violation de la Loi canadienne sur les droits de la personne de la façon précitée, la plaignante a ensuite demandé un redressement sous forme d'augmentation du taux de salaire pour chaque employé SH au taux SG applicable selon la norme et les niveaux de classification SG et l'utilisation d'un seul taux en remplacement des fourchettes de salaires applicables aux employés SH.

Comme nous l'avons dit dans notre décision préliminaire, le rôle du Tribunal lors de l'acceptation de l'ordonnance sur consentement portait sur des questions de procédure. Nous avons consenti à un ajournement pour une période indéfinie afin d'aider les parties à résoudre le conflit. Nous n'avons jamais examiné la question de savoir s'il y avait effectivement eu violation de la Loi canadienne sur les droits de la personne en 1981, lorsque la plainte a été déposée. Selon le paragraphe 53(2) de la Loi, avant de délivrer une ordonnance réparatrice, nous devons en arriver à la conclusion que la plainte est fondée. Ainsi, une des questions qui n'ont pas été résolues est celle de savoir s'il y a eu violation de la Loi au moment et selon les termes de la plainte. Bien qu'il eût été possible de clarifier cette question, il ne semble pas nécessaire de le faire.

Suivant le règlement intégré dans l'ordonnance sur consentement et sa mise à exécution subséquente, bon nombre des questions qui opposaient initialement les parties ont été résolues. En conséquence, la preuve à l'audience a porté sur des questions beaucoup plus restreintes. Cependant, en raison de cette même démarche, il n'y avait aucun document introductif officiel permettant de définir les questions non encore réglées.

Même si l'intimé a soutenu à l'occasion au cours de l'audience qu'il ne connaissait pas les points que la plaignante soulevait et que celle-ci tentait de soulever d'autres points, nous sommes d'avis que la plaignante a clarifié les questions précises qu'elle désirait soulever au cours de la première journée d'audience, soit le 8 novembre 1989. Les questions en litige précises sont celles de savoir s'il y a discrimination fondée sur le sexe, contrairement à la Loi, dans les aspects suivants :

  1. le niveau de classification des représentants en santé communautaire employés par le ministère de la Santé et du Bien- être social sur les réserves autochtones;
  2. le niveau de classification des aides-diététistes de l'Hôpital Ste-Anne-de-Bellevue; et
  3. la norme de classification du groupe SH.

En ce qui a trait au deuxième de ces trois points, nous soulignons que, selon la preuve présentée, certains aides-diététistes autres que ceux de

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l'Hôpital Ste-Anne-de-Bellevue ont été classifiés au même niveau. Cependant, il semble que le niveau de classification de ces autres aides- diététistes ne soit pas contesté. Lorsqu'elle a clarifié les questions en litige au cours de ses remarques préliminaires et, plus tard, lorsque la question de la portée de la plainte a été soulevée, la plaignante a constamment répété qu'elle contestait uniquement le niveau des employés de Ste-Anne-de-Bellevue.

PORTÉE DE LA PLAINTE

L'historique du présent litige qui est résumé ci-dessus soulève une question évidente concernant la portée de la plainte. Il s'agit de la question de savoir si la plainte officielle initiale de 1981 peut donner au présent Tribunal la compétence voulue pour examiner la situation qui prévalait en 1987. Les circonstances ont considérablement changé dans l'intervalle à la suite des efforts déployés par les parties pour résoudre le conflit au moyen d'une entente.

A notre avis, il n'est pas difficile de répondre à cette question concernant la portée de la plainte. La plainte initiale concerne la discrimination dans la classification et la rémunération entre les groupes SH et SG. Même si la situation semble manifestment s'être améliorée à la suite des efforts déployés pour résoudre le litige, la plaignante soutient que certains aspects de la discrimination qui existaient en 1981 continuent d'exister.

Le succès des efforts déployés pour régler la plainte de 1981 est pertinent quant à la question de savoir quelle réparation, le cas échéant, devra maintenant être accordée si la plainte est jugée fondée. Si ces efforts ou d'autres événements survenus entre-temps ont apporté de nouveaux éléments de discrimination, ceux-ci devraient probablement faire l'objet d'une nouvelle plainte et ne seraient pas assujettis à la compétence du présent Tribunal. Cependant, dans la mesure où la discrimination est un prolongement de la discrimination alléguée en 1981, elle est visée par la plainte et assujettie à la compétence du présent Tribunal, compte tenu du fait que nous n'avons jamais rendu de décision au sujet de cette plainte.

La principale objection (et l'objection la plus sérieuse) que l'intimé a formulée à l'égard du présent litige en se fondant sur la portée de la plainte porte sur la mention, dans celle-ci, du lien entre le groupe SH et le groupe SG comme étant respectivement des segments à prédominance féminine et à prédominance masculine de la fonction publique. Selon l'intimé, s'il y a encore discrimination fondée sur le sexe, elle découle de l'application interne de la nouvelle norme SH, qui est une conversion fidèle de l'ancienne norme SG dans le contexte de l'emploi des employés SH. Il n'y a donc plus de discrimination découlant d'une comparaison entre les normes SH et les normes SG et la discrimination alléguée en l'espèce n'est pas visée par la plainte initiale.

Le Tribunal est convaincu que nous avons eu raison, dans notre décision préliminaire, de conclure que cet argument devrait être tranché à la lumière de toute la preuve et non pas au stade préliminaire de la cause.

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Il est possible que la preuve présentée ait établi uniquement de la discrimination interne dans l'application de la norme SH, auquel cas l'argument selon lequel cette question déborde le cadre de la plainte aurait pu être persuasif. Cependant, la preuve présentée devant nous concerne le prolongement d'une discrimination fondée sur le sexe entre les effets de la nouvelle norme SH et ceux de la norme SG. Si ces effets existent et constituent un prolongement de la discrimination qui existait en 1981, ils sont visés par la plainte.

Généralement, les arguments invoqués au sujet de la portée d'une plainte sont fondés sur un point d'équité lié à la question de savoir si une partie intimée a été dûment avisée de la preuve qui sera présentée. Il n'y a en l'espèce aucune allégation générale selon laquelle l'intimé a été surpris par les objections constantes de la plaignante au sujet de la classification du groupe d'employés SH. Étant donné qu'il y avait des négociations collectives en cours entre la plaignante et l'intimé, celui-ci aurait eu beaucoup de mal à établir cette allégation.

Cependant, l'intimé a tenté d'invoquer cet argument de surprise en alléguant que les répercussions de la nouvelle norme de classification SH sont discriminatoires. Selon l'intimé, lorsque la plaignante a demandé à l'origine au Tribunal de tenir une nouvelle audience, la plaignante a soulevé uniquement la question des niveaux de classification précis des aides-diététistes à Ste-Anne de Bellevue et des représentants en santé communautaire. La nouvelle norme SH n'avait pas encore été rendue publique à l'époque.

Tel qu'il est mentionné ci-dessus, la question de la discrimination prolongée sur le plan du lien entre la nouvelle norme SH et la norme SG est visée par la plainte initiale; l'intimé n'a donc pas été surpris au sens où il s'agirait d'une plainte nouvelle et différente. Les questions que la plaignante avait l'intention de soulever ont toutes été mentionnées lors des remarques préliminaires adressées au Tribunal au début de l'audience, en novembre 1989. Il s'agissait véritablement de la première occasion officielle pour la plaignante de définir les questions en litige au sujet desquelles elle nous demandait d'exercer notre compétence. Le type de surprise que l'intimé a alléguée était une question qui devait être tranchée, non pas par le rejet de la plainte, mais bien par l'octroi d'un ajournement approprié afin de donner à l'intimé plus de temps pour se préparer, au besoin.

L'intimé a eu le loisir de présenter une demande appropriée fondée sur le caractère inéquitable des procédures et il ne l'a pas fait. Même si l'intimé a été pris au dépourvu par la contestation générale de la nouvelle norme de classification SH au début de l'audience, les longs ajournements qui ont suivi lui ont donné suffisamment de temps de toute façon pour se préparer à réfuter ces allégations de la plaignante.

En résumé, les questions que la plaignante a soulevées à ce stade-ci de la procédure sont visées par la plainte, dans la mesure où elles concernent le prolongement de la discrimination alléguée dans la plainte initiale et, plus précisément, dans la mesure où cette discrimination porte sur le lien

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entre les groupes SH et SG. De même, dans la mesure où la preuve présentée devant nous soulève des éléments de discrimination nouvelle ou de discrimination qui concerne purement la nouvelle norme SH, ces questions dépasseraient la portée de la plainte et nous examinerons la preuve en tenant compte de ces limites.

PREUVE DU BIEN-FONDÉ DE LA PLAINTE INITIALE

Comme nous l'avons indiqué dans notre décision préliminaire, le présent Tribunal n'a rendu aucune décision lors de l'ordonnance sur consentement. Il nous faut donc statuer sur la question fondamentale, soit celle de savoir si la plainte initiale en l'espèce est bien fondée. A notre avis, cette question est facile à trancher.

La plainte initiale comportait deux allégations principales :

  1. il y a eu discrimination salariale entre les groupes d'employés SH et SG; et
  2. il y a eu discrimination dans la classification entre les groupes d'employés SH et SG.

Avant d'approuver l'ordonnance sur consentement, le Tribunal a bel et bien commencé à entendre et à recevoir la preuve que les parties ont présentée d'un commun accord. Cette preuve fait partie du dossier déposé devant nous et nous avons le droit de nous en servir pour étayer nos conclusions.

A cette époque, les parties ont soumis au Tribunal un exposé conjoint des faits ainsi qu'une annexe modificatrice. Les conditions convenues de l'ordonnance sur consentement comportaient un préambule fondé sur l'exposé conjoint des faits et l'annexe. Dans le préambule, on reconnaissait que le groupe SH, à prédominance féminine, recevait un salaire inférieur au groupe SG, à prédominance masculine, pour l'exécution d'un travail d'une valeur au moins égale. Les faits exposés dans l'annexe ont donné lieu à la plainte conformément aux dispositions des articles 12 et 13 de l'Ordonnance de 1986 sur la parité salariale, qui prévoient qu'un groupe de plus de 500 employés est un groupe à prédominance masculine ou féminine si 55 p. 100 des membres du groupe appartiennent à ce même sexe. Ensemble, ces admissions établissaient qu'il y avait eu violation de l'article 11 de la Loi canadienne sur les droits de la personne en ce qui a trait aux salaires entre les groupes SH et SG.

Même si l'on n'a pas reconnu, dans l'exposé des faits convenu lors de l'ordonnance sur consentement, qu'il y avait discrimination dans la classification, les parties ne contestaient pas vraiment le fait que cette discrimination existait jusqu'à un certain point. Les normes SH et SG étaient toutes deux des systèmes d'évaluation numérique qui étaient presque identiques quant à la structure fondamentale. Cependant, la division de l'échelle numérique en niveaux était différente, de sorte que les employés évalués de façon identique selon les deux normes étaient habituellement classés à des niveaux différents.

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Comme les échelles salariales dépendaient des niveaux, cette différence a, à son tour, engendré la discrimination salariale qui existait. Étant donné que les groupes SH et SG étaient respectivement des groupes à prédominance féminine et masculine, nous sommes convaincus que cette différence sur le plan des normes de classification était une pratique qui constituait de la discrimination fondée sur le sexe contrairement à l'article 7 de la Loi. En conséquence, la plainte initiale était également bien fondée en ce qui a trait à la discrimination dans la classification.

LA COMPÉTENCE ACTUELLE DU TRIBUNAL

Cela nous amène aux véritables questions qui opposent les parties. Selon l'entente qui a mené à l'ordonnance sur consentement, les parties ont limité les questions en litige aux fins de la cause dont nous sommes actuellement saisis aux questions mentionnées au paragraphe 10 de ladite ordonnance. En outre, certaines des questions au sujet desquelles les parties ont demandé au Tribunal de conserver sa compétence conformément au paragraphe 10 ne sont plus contestées. Ainsi, il n'y a pas de conflit en ce qui a trait à la classification des anciens employés SH-1 autres que les aides-diététistes de l'Hôpital de Ste-Anne-de-Bellevue ou en ce qui a trait à la classification des postes de couturières.

Les questions qui restent sont celles qui sont énumérées ci-dessus, soit la question de savoir s'il y a eu discrimination fondée sur le sexe, contrairement à la Loi, dans les aspects suivants :

  1. le niveau de classification des représentants en santé communautaire employés par le ministère de la Santé et du Bien- être social sur les réserves autochtones;
  2. le niveau de classification des aides-diététistes de l'Hôpital Ste-Anne-de-Bellevue; et
  3. la norme de classification du groupe SH.

Bien entendu, au sens strict, ces questions n'existaient pas au moment de la plainte initiale. Elles découlent toutes des efforts déployés par les parties pour résoudre le litige selon l'ordonnance sur consentement. Cependant, la plaignante soutient que toute discrimination existant dans ces trois domaines est un prolongement de la discrimination qui fait l'objet de la plainte initiale et constitue donc une partie de celle-ci qui doit être tranchée. Si les parties n'avaient pas résolu l'une ou l'autre des questions en litige au moyen d'une entente, mais qu'elles avaient simplement obtenu des ajournements périodiques de la cause, nous aurions encore aujourd'hui la compétence voulue pour déclarer que la plainte initiale est bien fondée et pour ordonner une réparation appropriée. Si, dans l'intervalle, la partie qui avait violé la Loi d'une façon importante avait déjà corrigé la situation, nous aurions encore la compétence voulue pour reconnaître cette action au moment d'ordonner la réparation appropriée.

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Nous ne voyons pas pourquoi notre compétence serait différente en l'espèce parce qu'il y a eu règlement partiel au moyen d'une entente entre les parties et réparation partielle par la suite. Dans la mesure où la plainte initiale est encore là, nous conservons notre compétence, mais nous devrions ordonner toute réparation à la lumière des circonstances qui prévalent aujourd'hui.

LA NATURE DE LA DISCRIMINATION ININTERROMPUE QUI EST ALLÉGUÉE

Les trois aspects du système de classification qui font l'objet d'une allégation de discrimination prolongée comportent tous une caractéristique commune. Ils portent tous sur une question de discrimination systémique plutôt que de discrimination volontaire.

Il est peut-être tout aussi difficile de définir le concept de la discrimination systémique que d'identifier cette discrimination. Il ne s'agit pas d'un concept identique à celui de la discrimination indirecte. La discrimination indirecte se rapporte à des exigences qui ne comportent pas, à première vue, de discrimination pour un motif prohibé, mais qui touchent un groupe identifiable à l'égard d'un motif prohibé de façon à avoir un effet discriminatoire sur ce groupe.

Même si la discrimination indirecte peut être assez subtile dans son application, l'effet est souvent assez évident. Ainsi, la plupart des gens reconnaissent aujourd'hui que les exigences liées à la grandeur minimum et au poids minimum sont discriminatoires à l'endroit des femmes. De la même façon, il n'est pas nécessaire de connaître en profondeur les diversités religieuses pour comprendre qu'une exigence liée au port du casque lésera un groupe religieux donné.

Par ailleurs, le concept de la discrimination systémique est axé sur les formes de discrimination les plus subtiles, comme l'a dit le juge en chef Dickson dans CN c. Canada (Commission des droits de la personne), [1987] 1 R.C.S. 1114, aux pages 1138 et 1139. Il est fondé sur la reconnaissance du fait que les moeurs sociales et culturelles de longue date transmettent des présomptions de valeur qui contribuent à créer de la discrimination sous des formes totalement ou presque entièrement voilées et inconscientes. Ainsi, la tendance traditionnelle à sous-évaluer le travail des femmes peut être perpétuée par des présomptions selon lesquelles certains types de tâches habituellement confiées dans le passé aux femmes ont naturellement moins de valeur que certains types de tâches traditionnellement accomplies par les hommes.

Les types de travaux liés aux soins de santé que la plupart des personnes du groupe SH exécutent ont longtemps été accomplis surtout par des femmes, tandis que les travaux d'entretien qui sont confiés à bon nombre d'employés du groupe SG ont traditionnellement été des travaux confiés surtout à la main-d'oeuvre masculine. En conséquence, la différence qui existait entre les salaires dans ces deux secteurs de la fonction publique au moment de la plainte initiale en l'espèce traduisait vraisemblablement une discrimination systémique.

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En outre, cet écart salarial découlait du rôle de la comparabilité du secteur privé dans la structure initiale de la négociation collective au sein de la fonction publique fédérale. Ainsi, les attitudes au sujet de la valeur de ces types d'emploi dans l'ensemble de la société ont été délibérément reproduites dans le système de rémunération du gouvernement fédéral. Si ces attitudes traduisaient bien des présomptions au sujet de la valeur relative du travail habituellement fait par des femmes et du travail normalement confié aux hommes, il s'agissait là de discrimination systémique dans le plein sens du mot.

La principale preuve concernant le rôle de la discrimination systémique dans le système de classification qui fait l'objet de la présente plainte a été présentée par la Commission canadienne des droits de la personne par l'entremise d'un témoin expert spécialisé dans les questions d'équité en matière d'emploi, le Dr Lois Hagniere. Son témoignage selon lequel la nouvelle norme SH est fortement imprégnée de présomptions au sujet de la valeur du travail, lesquelles présomptions traduisent un parti-pris systémique contre l'autre sexe, est plutôt convaincant. Cependant, cette preuve fait problème en ce qui a trait à la portée de la plainte.

Lorsqu'on lui a demandé si, à son avis, il y avait discrimination systémique fondée sur le sexe dans les normes de classification SH et SG que le présent Tribunal doit examiner, le Dr Hagniere a parlé surtout de la nouvelle norme SH. Il ne s'agit évidemment pas de la norme de classification SH qui existait lors de la plainte initiale. Cela nous amène donc à nous demander si le témoignage du Dr Hagniere justifie une conclusion de discrimination dans le cadre de la plainte.

D'abord, étant donné que cette personne n'a pas dit directement s'il y avait ou non de la discrimination systémique fondée sur le sexe en raison des différences d'application qui caractérisaient les normes SH et SG en 1981, son témoignage n'indique pas si ces différences faisaient partie de la discrimination qui existait à cette époque. En second lieu, son témoignage pourrait aussi être interprété comme signifiant que la discrimination systémique fondée sur le sexe qui caractérisait la norme SG a été reproduite dans la norme SH. Comme l'intimé l'a soutenu, cette forme de discrimination ne serait pas visée par la plainte, puisqu'il ne s'agit pas d'une question de différence entre les normes SH et SG.

Cependant, à notre avis, l'utilité du témoignage du Dr Hagniere réside, non pas dans l'identification précise de la discrimination systémique fondée sur le sexe dans les normes de classification SH ou SG, mais dans la présentation du cadre théorique permettant de reconnaître cette discrimination, notamment aux fins d'examiner la question que la plaignante a soulevée au sujet de la nouvelle norme de classification SH.

Nous examinerons d'abord les questions de discrimination concernant les représentants en santé communautaire employés par le ministère de la Santé et du Bien-être social et les aides-diététistes de l'Hôpital Ste-Anne-de- Bellevue.

REPRÉSENTANTS EN SANTÉ COMMUNAUTAIRE

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D'après le paragraphe 4(2) de l'ordonnance sur consentement, l'intimé a convenu de revoir l'évaluation de tous les représentants en santé communautaire, bien qu'il ait donné son assentiment sous réserve de la position qu'il pourrait adopter dans des procédures ultérieures. L'allégation pertinente de la plaignante porte essentiellement sur le fait que les points attribués à ces employés selon l'ancienne norme SH étaient moins élevés qu'ils ne l'auraient été si ces employés avaient été évalués d'après la norme SG. Selon la plaignante, il s'agit ici d'un cas précis de l'effet de la discrimination fondée sur le sexe entre les deux normes.

Même si les tâches des représentants en santé communautaire travaillant un peu partout au Canada sont semblables à bien des égards, la preuve indique clairement qu'il y a aussi des différences importantes dans le contenu de ce travail d'un endroit à l'autre. Généralement, les représentants en santé communautaire assurent la liaison entre les collectivités autochtones et les professionnels de la santé et aident ceux-ci d'autres façons en fournissant des services à la population autochtone.

Les populations desservies peuvent se trouver près d'un centre urbain assez important ou près de collectivités rurales qui ont néanmoins un bon accès à la gamme complète de services de santé ou encore être situées dans des régions plus ou moins isolées qui disposent de services de santé restreints et doivent avoir recours à l'évacuation médicale pour bénéficier de tous les services et installations en matière de santé. Dans certains cas, le représentant en santé communautaire est peut-être la seule personne résidant sur une réserve autochtone qui a une formation dans le domaine des soins de la santé, puisque les professionnels de la santé ne visitent la réserve qu'à temps partiel.

Même à l'intérieur de ces larges catégories, il semble y avoir un écart considérable entre les différentes façons dont chacune des collectivités est desservie. En conséquence, les fonctions des représentants en santé communautaire peuvent être très variées : certains peuvent exécuter principalement des tâches de bureau assez routinières, tandis que d'autres sont appelés à fournir des soins de santé sur le tas.

Un des facteurs qui a peut-être compliqué la situation est le fait que le gouvernement fédéral a délégué le pouvoir d'employer les représentants en santé communautaire aux collectivités autochtones. En conséquence, le nombre de représentants qui ont travaillé au sein de la fonction publique fédérale a considérablement baissé au cours des dernières années. Il semble cependant que le processus de délégation n'ait pas eu pour effet d'homogénéiser le rôle des représentants de la santé communautaire employés dans la fonction publique fédérale.

Dans le cadre des efforts déployés pour résoudre la présente plainte au moyen d'une entente, l'intimé a proposé la rédaction d'une description de poste commune pour tous les représentants en santé communautaire. Les fonctionnaires responsables des opérations proprement dites n'ont pas donné suite à cette proposition. C'est pourquoi une grande variété de rôles précis continue d'exister.

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Néanmoins, conformément à l'ordonnance sur consentement, on a procédé à l'évaluation des représentants en santé communautaire selon la norme SG , en évaluant une seule description de poste, habituellement appelée la description d'emploi-clé. Il s'agissait de la même description d'emploi dont l'intimé avait proposé l'utilisation pour ces postes. La plaignante semble avoir accepté l'utilisation de la description d'emploi-clé pour cette évaluation. En conséquence, il nous apparaît approprié d'utiliser cette description d'emploi-clé comme fondement de notre propre décision au sujet de la question de savoir si la classification des représentants en santé communautaire selon l'ancienne norme SH comparativement à la norme SG est discriminatoire.

Lors de la conversion faite conformément à l'ordonnance sur consentement, on a classifié les représentants en santé communautaire au niveau 4 pour calculer le salaire auquel ils avaient droit, de façon à rendre leurs taux de salaire conformes à ceux des SG. A des fins de comparaison, ce niveau peut donc être considéré comme le niveau pertinent qui a été attribué à ces employés selon l'ancienne norme SH. A la suite de la réévaluation de la description d'emploi-clé selon la norme SG conformément à l'ordonnance sur consentement, ces employés ont été classés au niveau 4. Cela signifie qu'aucun changement n'a été apporté à la classification de ces employés à la suite de la démarche faite conformément au paragraphe 4(2) de l'ordonnance sur consentement.

Si la réévaluation faite par l'intimé est appropriée, il n'y a aucune différence de traitement entre les deux systèmes de classification, une fois que l'on a corrigé les différences évidentes que comportent les écarts numériques. Cela signifierait qu'il n'y a aucune preuve de discrimination précise fondée sur le sexe dans le cas des représentants en santé communautaire ou, à tout le moins, qu'il n'y a aucune conséquence discriminatoire qui doit encore être corrigée.

Par ailleurs, dans la mesure où la réévaluation que l'intimé a faite selon la norme SG est erronée et que les représentants en santé communautaire devraient être classés à un niveau supérieur, il y aurait, à tout le moins, une différence de traitement entre l'ancienne norme SH et la norme SG. A moins que cette différence ne puisse s'expliquer autrement, cela permettrait de conclure que les représentants en santé communautaire sont victimes de discrimination fondée sur le sexe à la suite de leur classification selon l'ancienne norme SH plutôt que la norme SG.

La plaignante et l'intimé ont tous deux demandé à une personne spécialisée en classification de venir témoigner au sujet de la question de savoir si la description d'emploi-clé des représentants en santé communautaire devrait être évaluée selon la norme SG. Avant de comparer la version de ces deux témoins, nous avons une réserve générale à formuler au sujet du témoignage de Christopher Jones, le témoin de la plaignante, concernant l'évaluation des représentants en santé communautaire. Nous craignons que son opinion au sujet des exigences du poste soit fondée sur un ensemble hétéroclite des diverses fonctions de ces employés plutôt que sur la description d'emploi-clé que les parties ont mutuellement acceptée comme fondement du processus d'évaluation. Compte tenu du fait que les fonctions

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sont très variées, comme nous l'avons déjà mentionné, ce témoin a peut-être été porté à surévaluer le poste. A notre avis, il est peu probable qu'une seule personne exécute pleinement toutes ces fonctions diverses.

L'évaluation d'un poste consiste à évaluer différents facteurs de la description de poste selon une série de degrés. Pour la plupart des facteurs, la norme de classification comporte une description de chaque degré ainsi qu'une liste des postes repères qui servent d'exemples de ce degré du facteur. Un certain nombre de points est attribué à chaque degré.

On obtient le niveau de classification en additionnant les points correspondant au degré attribué à chaque facteur. Dans l'ancienne norme SH et la norme SG, les écarts numériques correspondant aux niveaux de classification ne sont pas indiqués. Cependant, il appert de la preuve que les écarts numériques indiqués dans la norme SG sont identiques aux écarts mentionnés dans la nouvelle norme SH, qui se veut une réplique de la norme SG. En conséquence, nos conclusions concernant les écarts numériques pertinents sont fondées sur les écarts indiqués dans la nouvelle norme de classification SH, qui constitue la meilleure preuve présentée devant nous au sujet de ces écarts.

Voici comment l'intimé a évalué l'emploi-clé lors de la réévaluation qu'il a faite selon la norme SG :

Facteur Degré Points

Aptitudes et connaissances

Connaissances fondamentales 3 39 Compréhension et jugement 3 65 Formation professionnelle précise 3 75

Effort

Effort mental 2 46 Effort physique 1 20

Responsabilité

Ressources ou services 2 58 Sécurité d'autrui 1 15

Conditions de travail

Environnement 1 12 Risques A 14

L'addition donne ici un total de 334 points pour un poste de niveau GS-4, soit un nombre qui se situe à l'intérieur de l'écart de 331-380 points correspondant au niveau 4.

Voici les facteurs qui sont contestés et le nombre de points que M. Jones aurait attribués à ces facteurs :

Facteur Degré Points

Compréhension et jugement 5 105

14

Formation professionnelle précise 6 200 Sécurité d'autrui 3 75 Environnement 2 36 Risques B1 23

L'utilisation des évaluations de M. Jones donnerait lieu à un total de 602 points pour un poste de niveau GS-9, soit un total qui se situe à l'intérieur de l'écart de 581 à 630 points correspondant au niveau 9. Nous soulignons que c'est là la position que M. Jones a finalement adoptée au cours de son témoignage, bien que la plaignante ait antérieurement soutenu que les représentants en santé communautaire devraient être classés au niveau GS-6.

Avant d'examiner chacun des facteurs sous la rubrique générale des aptitudes et connaissances, nous aimerions commenter un élément qui a fait l'objet d'une grande controverse au cours de l'audience, en l'occurrence, l'importance à accorder lors de la classification au fait que l'une des tâches des représentants en santé communautaire, selon la description d'emploi-clé, consiste à servir d'interprètes entre les membres de la population autochtone qui utilisent une langue autochtone et les professionnels de la santé qui ne parlent pas cette langue. L'intimé a soutenu que la tâche d'interprétation n'était pas pertinente aux fins de la classification, parce que le gouvernement fédéral avait pour politique de ne pas évaluer les postes en fonction de la possibilité d'utiliser plusieurs langues.

Les raisons de cette politique semblent être liées aux difficultés éprouvées lors de l'utilisation du système de classification pour rémunérer les employés bilingues selon la politique sur les langues officielles du Canada. Nous ne sommes pas convaincus que ce raisonnement a un lien quelconque avec la question de savoir si la fonction d'interprètes des représentants en santé communautaire devrait être reconnue lors de l'évaluation des facteurs apparaissant sous la rubrique Aptitudes et connaissances. D'abord, la tâche d'interprète est différente de la simple capacité d'utiliser deux langues. Selon l'ancienne norme de classification SH, l'aptitude à s'exprimer dans une langue autochtone était effectivement reconnue comme un élément dans l'évaluation des connaissances fondamentales pour deux postes repères, soit l'aide-hygiéniste et la femme de chambre, poste de soins infirmiers.

Par ailleurs, notre tâche consiste à évaluer les représentants en santé communautaire selon la norme SG, qui ne comporte aucune mention de l'utilisation de langues. Comme nous sommes tenus de nous fonder sur la norme SG pour déterminer si la classification de ces employés était discriminatoire, nous ne ferons pas allusion de façon précise à l'exigence linguistique dans notre évaluation. Dans l'ensemble, nous sommes d'avis que l'inclusion de la langue comme élément pertinent donnerait lieu à des conclusions identiques à celles que nous tirerons au sujet des facteurs mentionnés sous la rubrique Aptitudes et connaissances sans en tenir compte.

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Voici la description du degré 3 pour le facteur Compréhension et jugement de la norme SG :

Le travail exige une compréhension suffisante pour travailler à l'intérieur des pratiques établies et des directives et permet une certaine latitude de jugement dans l'application desdites pratiques et directives (postes repères : contremaître du service de nettoyage, cuisinier, tailleur, agent d'expulsion, contremaître d'entrepôt).

Le degré 4 est décrit comme suit :

Le travail exige une certaine compréhension des principes et méthodes pertinents et permet une certaine latitude de jugement dans l'interprétation des directives ou la résolution des problèmes (poste repère : gardien en chef de parc).

Le degré 5 est décrit comme suit :

Le travail exige une compréhension approfondie d'un ensemble de principes et méthodes pertinents et permet une certaine latitude de jugement dans l'interprétation des directives ou la résolution des problèmes (postes repères : chef steward, gardien principal).

Même s'il ne semble pas que les responsabilités en matière de soins de la santé selon la description d'emploi-clé exigent du représentant en santé communautaire qu'il connaisse bien un large éventail de questions liées aux soins de la santé, nous sommes d'avis que le degré de compréhension et de jugement est celui de l'exercice d'une certaine latitude de jugement à l'intérieur des pratiques établies. Il serait extrêmement dangereux qu'un représentant en santé communautaire dispose d'une certaine latitude de jugement dans l'interprétation des directives et dans la résolution des problèmes en matière de soins de santé, étant donné qu'il n'est pas tenu d'avoir les connaissances théoriques nécessaires dans le domaine pour comprendre les conséquences possibles.

Peut-être dispose-t-il d'une certaine latitude de jugement pour interpréter les directives administratives, mais même là, il semble que les pratiques soient bien établies et qu'il s'agisse davantage d'une latitude dans l'application, et non dans l'interprétation. Une comparaison avec les postes repères justifie cette évaluation. Par conséquent, nous sommes d'avis que le degré 3 que l'intimé a attribué à ce facteur est approprié.

Il n'y a pas de description de degré pour la formation professionnelle précise. Il y a un guide de profil qui indique que le degré maximum de formation pour les postes autres que les postes de supervision est le degré 5. Il ne semble donc pas concevable qu'un représentant en santé communautaire puisse être classé au degré 6 d'après la norme SG, comme le soutient M. Jones.

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Voici les postes repères aux fins d'une comparaison entre les degrés 3 à 5:

Degré 3 : contremaître du service de nettoyage, infirmière responsable d'une équipe de travail, agent d'expulsion

Degré 4 : contremaître du service de nettoyage, boucher, cuisinier, magasinier des pièces de rechange

Degré 5 : tailleur, gardien principal, contremaître d'entrepôt

L'évaluation de ce facteur selon la norme SG est manifestement problématique. En raison de l'absence de description des divers degrés, il n'y a pas de fondement permettant d'attribuer un degré plutôt qu'un autre sur une base préliminaire. Même si le guide de profil fixe des limites restreintes à l'égard de certains sous-groupes de la catégorie SG, dans le cas du sous-groupe des services personnels divers, qui semble très pertinent pour les représentants en santé communautaire, un écart de 1 à 5 degrés est reconnu.

L'évaluateur doit donc s'en remettre entièrement à des comparaisons avec les postes repères, mais ceux-ci ne fournissent pas de progression claire en ce qui a trait à la formation professionnelle requise. Effectivement, la progression la plus évidente dans les critères d'évaluation de ce facteur pour les postes repères semble être liée davantage à la supervision qu'à la formation.

Cette constatation est particulièrement évidente lorsque l'on compare les deux postes repères des contremaîtres du service de nettoyage, qui sont séparés d'un degré en ce qui a trait à la formation professionnelle précise. Les critères d'évaluation du degré 4 diffèrent de ceux du degré 3, dans la mesure où le degré 4 nécessite une bonne connaissance des méthodes et produits, tandis que le degré 3 exige uniquement une connaissance; en outre, le degré 4 exige des aptitudes à travailler par l'entremise de superviseurs subalternes, ce qui n'est pas demandé pour le degré 3.

Dans la même veine, la distinction la plus évidente entre les critères d'évaluation des postes repères du degré 5 et ceux du degré 4 en ce qui a trait à la formation professionnelle précise réside dans la nécessité de savoir comment superviser. Seul le poste repère de contremaître de service de nettoyage, parmi ceux du degré 4, comporte cet élément de formation professionnelle précise et, pour ce poste, la supervision est un élément même dans les critères d'évaluation du degré 3.

Tant la plaignante que l'intimé ont présenté une preuve de la formation requise. La preuve de la plaignante était peut-être moins pertinente, étant donné qu'elle portait sur un nouveau programme de formation qui, d'après ce qui a été révélé, n'avait été suivi par aucun des représentants en santé communautaire dont la classification est contestée. Néanmoins, le manuel de formation que l'intimé a déposé en preuve renferme des exigences comparables en matière de formation. La principale différence réside dans

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le fait que le programme de formation décrit dans le manuel porte surtout sur la formation sur place, tandis que le nouveau programme de formation est offert dans un collège communautaire. D'après les exigences se rapportant à la norme SG, les deux types de programmes sont acceptés comme méthodes permettant d'acquérir la formation professionnelle précise.

En dernier ressort, nous sommes d'avis que la formation requise d'un représentant en santé communautaire appartient davantage au degré 4 qu'au degré 3, compte tenu de l'éventail des connaissances requises plutôt que de la profondeur des connaissances devant être acquises au sujet d'une pratique donnée en matière de soins de santé. Nous sommes convaincus que la formation requise est, à tout le moins, comparable à celle qui est décrite dans les critères d'évaluation des postes repères auxquels on a attribué le degré 4, soit 100 points. Cependant, elle est inférieure à celle qui est requise pour les postes repères classés au degré 5, parce qu'aucune formation en supervision n'est requise, contrairement aux exigences relatives aux postes repères du degré 5.

En ce qui a trait au critère de la sécurité d'autrui, le degré 1 est décrit comme suit :

Les possibilités de blesser ou d'embarrasser d'autres personnes sont mineures (postes repères : concierge, cuisinier, magasinier des pièces de rechange).

Le degré 2 est décrit comme suit :

Des mesures de prudence raisonnables doivent être prises pour éviter de blesser ou d'embarrasser d'autres personnes. Les dommages ou l'embarras pouvant survenir sont de nature mineure (postes repères : contremaître du service de nettoyage, chef steward, agent d'expulsion, contremaître d'entrepôt).

Le degré 3 est décrit comme suit :

Il faut prendre des mesures spéciales pour éviter de causer des dommages ou de l'embarras à d'autres personnes. Les types de dommages pouvant être causés appartiennent à la catégorie de la perte de temps, comme les brûlures graves, les blessures aux yeux ou les membres broyés. L'embarras résulte de l'aggravation du stress émotif (postes repères : gardien principal, gardien en chef de parc).

Il nous serait difficile de déterminer le degré approprié si nous disposions uniquement de la version des deux spécialistes en classification qui ont témoigné au nom de la plaignante et de l'intimé. La difficulté découle de la différence d'approche. L'approche du témoin de l'intimé, Penny Carter, est axée sur la responsabilité de l'employé à l'égard d'activités qui, en soi, sont susceptibles de causer des dommages à d'autres personnes. Nous devrions convenir avec elle que les activités d'un représentant en santé communautaire qui visent à atténuer les problèmes de santé comportent peu de risques de cette nature.

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Pour sa part, M. Jones estime qu'il faut tenir compte du risque découlant de la responsabilité du représentant en santé communautaire qui consiste à promouvoir des pratiques sanitaires appropriées. Si cette tâche n'est pas bien accomplie, il peut y avoir des risques pour la santé de la population; il ne s'agirait pas tellement de risques découlant directement des activités du représentant, mais plutôt de risques causés indirectement par l'omission de ce dernier de prévenir des pratiques inappropriées.

A la lecture de la norme SG, nous sommes portés à croire que la promotion des soins par d'autres est considérée comme un élément pertinent en ce qui a trait au facteur de la responsabilité liée à la sécurité d'autrui. Les critères d'évaluation de ce facteur pour les postes repères du contremaître du service de nettoyage, du chef steward et du contremaître d'entrepôt, classés au degré 2, ainsi que du gardien principal et du gardien en chef de parc, classés au degré 3, sont fondés dans tous les cas sur ce genre de préoccupation au sujet de la sécurité et non seulement sur la possibilité que les activités de l'employé causent directement des dommages à autrui.

En dernier ressort, il nous a été plus facile d'évaluer ce facteur à la suite des visites sur place que l'intimé a faites alors que les audiences étaient en cours. Selon le témoignage d'Yvon Lauzier, les comités qui ont fait les visites sur place ont convenu d'un degré 2 pour le facteur de la sécurité d'autrui dans le cas des représentants en santé communautaire, bien que M. Lauzier lui-même ait hésité à aller au-delà du degré 1. Les emplacements visités comprenaient la réserve God's Lake Narrows, sur laquelle la description d'emploi-clé était fondée.

Notre propre lecture de la description de ce facteur qui apparaît dans la norme SG ainsi qu'une comparaison avec les postes repères nous mènent à la même conclusion. En conséquence, nous sommes d'avis que l'évaluation appropriée de ce facteur est le degré 2, soit 45 points.

Dans le cas du facteur de l'environnement, le degré 1 est décrit comme suit:

Bon environnement de travail; conditions désagréables minimes. (Postes repères : femme de ménage, préposé à la tour d'observation, contremaître des pièces de rechange)

Le degré 2 est décrit comme suit :

Environnement de travail assez bon comportant un risque important d'être exposé à une condition désagréable ou un risque occasionnel d'être exposé à plusieurs conditions désagréables ou à une condition très désagréable. (Postes repères : concierge, boucher, aide de cuisine, plongeur, agent d'expulsion, surveillant)

La contestation concernant ces degrés porte principalement sur les visites à domicile que doit faire le représentant en santé communautaire. Il semble que les représentants en santé communautaire, dont l'employé de God's Lake Narrows sur lequel la description d'emploi-clé est fondée,

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passent la majeure partie de leur temps de travail dans un type de centre de santé qui correspond à la description du degré 1. Par ailleurs, les représentants en santé communautaire font des visites au domicile des personnes atteintes de maladies chroniques et peuvent être tenus de contrôler les risques liés à la santé communautaire, comme les installations sanitaires ou les installations d'élimination des ordures. Ces tâches sont reconnues dans la description d'emploi-clé. Certains éléments de la preuve permettent de conclure que l'employé qui accomplit ces tâches est exposé à des conditions désagréables et que ce risque est suffisamment élevé pour justifier l'attribution du degré 2.

Une des conditions désagréables alléguées réside dans l'environnement extérieur de nombreuses réserves autochtones. Même si les membres du tribunal demeurent tous dans des grands centres urbains, près de la frontière sud du Canada, et qu'ils sont donc impressionnés par la preuve concernant les conditions climatiques et naturelles auxquelles les représentants en santé communautaire sont exposés dans les régions autochtones du nord, nous ne sommes pas convaincus que le risque restreint de subir ces conditions lors des visites à domicile constitue en soi un risque important d'être exposé à une condition désagréable. Après tout, il s'agit simplement de l'environnement extérieur normal de la région.

Les visites à domicile peuvent comporter d'autres conditions désagréables, comme la présence de chiens ou d'autres éléments désagréables à l'intérieur de la maison. Cependant, nous ne sommes pas convaincus que l'employé court un risque plus grand que celui de se voir occasionnellement exposé à des conditions désagréables de cette nature.

Dans la description d'emploi-clé, on exige explicitement du titulaire du poste qu'il fournisse des soins d'urgence sur une base temporaire. Au cours de l'exécution de cette tâche, l'employé peut être exposé à des conditions désagréables liées tant à l'état physique de la personne qui a besoin de soins qu'aux conditions climatiques ou autres conditions qui peuvent avoir créé l'état d'urgence ou exister en même temps. Cependant, encore là, la preuve indiquerait plutôt que ce risque n'est qu'occasionnel.

Selon la description d'emploi-clé, l'employé participe à l'administration de tests et de traitements au centre de santé. Dans la plupart des cas, ces démarches ne comportent pas de conditions désagréables, mais l'employé peut être exposé à l'occasion aux désagréments liés aux fluides et déchets corporels.

Enfin, l'emploi-clé comporte des tâches de surveillance et de contrôle des facteurs environnementaux touchant la santé. D'après le témoignage de l'employé affecté au poste sur lequel la description d'emploi-clé était fondée, il semble que cette tâche exige le contrôle des installations sanitaires et des installations d'élimination des ordures. Il est bien évident que cette tâche comporte un risque pour l'employé d'être exposé à des conditions désagréables. Il semblerait que ce risque ne soit pas simplement occasionnel, même si l'on ne connaît pas très bien l'importance de ce risque par rapport à l'ensemble du travail du représentant en santé communautaire.

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A notre avis, même si l'emploi-clé ne comporte pas pour l'employé un risque important d'être exposé à une condition désagréable, il existe un risque occasionnel d'être exposé à plusieurs conditions désagréables. Nous croyons également que le risque d'être exposé à des conditions désagréables qui est mentionné dans les descriptions des postes repères justifie cette évaluation. En conséquence, nous sommes d'avis qu'il convient d'attribuer le degré 2, ou 36 points, à ce facteur.

L'attribution de degrés aux risques est fondée sur deux aspects. Un aspect à deux volets concerne la gravité probable des blessures, soit A) les blessures mineures, comme les coupures, les éraflures ou les brûlures et B) les blessures qui entraînent la perte de temps, comme les fractures, les brûlures graves, les blessures à l'oeil ou la perte d'un doigt. L'autre aspect à deux volets porte sur la fréquence d'exposition inévitable aux risques, laquelle exposition peut être (1) occasionnelle et (2) fréquente. Les postes repères sont les suivants :

Degré A1 :messager, tailleur Degré A2 :cuisinier, contremaître des pièces de rechange Degré B1 :concierge, préposé à la tour d'observation

La plaignante et l'intimé s'entendent pour dire que l'exposition aux risques est occasionnelle. Le point contesté concerne la gravité des dommages.

Nous ne sommes pas convaincus que la gravité des blessures que le représentant en santé communautaire peut subir dépasse celle qui est représentée par le volet A), c'est-à-dire les blessures mineures comme les coupures, les éraflures ou les brûlures. Même si un représentant en santé communautaire peut être exposé à des risques de maladie au cours de l'exécution de tâches liées aux soins de santé, lorsqu'il prend des précautions normales, le risque qu'il a de contracter cette maladie semble négligeable. Nous sommes donc d'avis que le degré A1 apparaissant dans l'évaluation de l'intimé est approprié.

Compte tenu de nos conclusions, voici l'évaluation appropriée du représentant en santé communautaire selon la norme SG, à l'aide de la description d'emploi-clé :

Facteur Degré Points

Aptitudes et connaissances

Connaissances fondamentales 3 39 Compréhension et jugement 3 65 Formation professionnelle précise 4 100

Effort

Effort mental 2 46 Effort physique 1 20

Responsabilité

Ressources ou services 2 58 Sécurité d'autrui 2 45

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Conditions de travail

Environnement 2 36 Risques A 14

Le total de ces éléments donne 413 points pour un niveau GS-5, soit un total situé à l'intérieur de l'écart de 381 points à 430 points correspondant au niveau 5.

Cette conclusion indique qu'il y a effectivement une différence entre la classification au niveau 4 des représentants en santé communautaire qui découle de la simple conversion des évaluations faites selon l'ancienne norme SH et l'application de la norme SG. Cela nous amène à nous demander si cette différence constitue une discrimination fondée sur le sexe qui est visée par la plainte initiale.

Dans l'ordonnance sur consentement, l'intimé s'est réservé le droit de formuler toute observation concernant la classification des représentants en santé communautaire, lequel droit comprenait, à notre avis, la possibilité d'expliquer, autrement que par la discrimination fondée sur le sexe, pourquoi ces employés auraient pu être classés à un niveau inférieur selon l'ancienne norme SH comparativement à la classification qu'ils auraient obtenue selon la norme SG. Cependant, dans les observations qu'il a présentées au Tribunal, l'intimé a cherché surtout à justifier son évaluation de la description d'emploi-clé au niveau 4 selon la norme SG plutôt qu'à expliquer comment une sous-évaluation pourrait être justifiée pour des motifs autres que des motifs discriminatoires.

Effectivement, nous estimons qu'il y a des raisons de croire que la discrimination systémique constitue l'élément principal, sinon le seul élément qui a donné lieu à l'évaluation inférieure faite par l'intimé. Il est évident que, même si c'est un homme qui occupait le poste sur lequel la description d'emploi-clé était fondée, le représentant en santé communautaire est habituellement une femme.

La sous-évaluation du facteur de la formation professionnelle précise, compte tenu d'un manuel de formation qui exige un large éventail de connaissances des pratiques liées aux soins de santé, peut traduire la présomption selon laquelle les femmes, en raison du rôle traditionnel qu'elles ont joué comme bonnes à tout faire, surtout dans les régions rurales, acquièrent une bonne partie de ces connaissances sans formation spéciale. Nous nous demandons si, dans l'éventualité où le poste serait considéré comme un poste revenant typiquement aux hommes, on serait encore d'avis que toutes ces connaissances des pratiques en matière de soins de santé sont à ce point acquises.

De la même façon, nous nous demandons si la sous-évaluation du facteur de l'environnement traduit une présomption selon laquelle les conditions rencontrées lors des visites à domicile ou lors des tests ou traitements normaux dans un centre de santé ne sont pas désagréables. Ce sont là des conditions qui sont habituellement considérées comme des conditions normales pour les femmes, en raison du rôle traditionnel qu'elles ont joué comme ménagères et bonnes à tout faire.

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A tout événement, étant donné que le groupe SH est un groupe à prédominance féminine et que le groupe SG est un groupe à prédominance masculine et qu'il n'y a aucune autre explication, nous sommes d'avis que l'évaluation de la description d'emploi-clé au niveau 4 à la suite de la conversion de l'ancienne classification SH, comparativement à l'évaluation au niveau 5 qui est appropriée selon la norme SG, est discriminatoire et va à l'encontre de l'article 7 de la Loi canadienne sur les droits de la personne. Nous reviendrons plus loin sur la question de la réparation découlant de cette conclusion.

AIDES-DIÉTÉTISTES A STE-ANNE-DE-BELLEVUE

Même si les aides-diététistes de Ste-Anne-de-Bellevue occupaient aussi plusieurs postes différents, la preuve présentée devant nous indique que les descriptions de poste de ces employés ne peuvent être distinguées les unes des autres. En conséquence, nous devons trancher une question relativement simple, soit celle de savoir si la réévaluation de cette description de poste que l'intimée a faite selon la norme SG est appropriée.

Conformément à la disposition relative à la conversion qui est énoncée dans l'ordonnance sur consentement, ces employés ont été classés au niveau 1. Après la réévaluation faite conformément au paragraphe 4(1) de l'ordonnance sur consentement, ils sont demeurés au niveau 1 selon la norme SG. La plaignante soutient que, selon la norme SG, ces employés devraient être classés au niveau 2; en conséquence, la simple conversion de ces employés au niveau 1 constitue une discrimination fondée sur le sexe entre l'ancienne norme SH et la norme SG.

Si la réévaluation de l'intimé est appropriée, il n'y a pas de différence de traitement entre les deux systèmes de classification, lorsque l'on rajuste les différences évidentes dans les écarts numériques. Cela signifierait qu'il n'y a aucune preuve de discrimination fondée sur le sexe dans le cas des aides-diététistes de Ste-Anne-de-Bellevue ou que, à tout le moins, il n'y a aucune conséquence discriminatoire qui doit encore être corrigée.

L'intimé a évalué ces postes comme suit :

Facteur Degré Points

Aptitudes et connaissances Connaissances fondamentales 1 15 Compréhension et jugement 1 25 Formation professionnelle précise 1 25

Efforts

Effort mental 1 20 Effort physique 2 46

Responsabilité

Ressources ou services 1 25

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Sécurité d'autrui 1 15

Conditions de travail

Environnement 2 36 Risques A 14

Cette évaluation donne un total de 211 points pour un poste de niveau GS-1, soit un total qui se situe à l'intérieur de l'écart de moins de 230 points correspondant au niveau 1.

L'objection de la plaignante à l'égard de cette évaluation porte sur un facteur précis, soit l'effort physique. D'après le témoignage de M. Jones, le degré 3 devrait être attribué à ce facteur (73 points). Si tel était le cas, le total obtenu serait de 238 points pour un poste de niveau GS-2, c'est-à-dire un total qui se situe à l'intérieur de l'écart de 231 à 280 points correspondant au niveau 2.

Selon la norme SG, le degré 2 est décrit comme suit en ce qui a trait à l'effort physique :

Le travail demande un effort physique modéré, comme la nécessité constante de se tenir debout ou de marcher, les périodes de répit étant courtes, ou la manipulation constante d'objets légers. Les fonctions demandent parfois un effort physique plus grand pour de courtes périodes. (Postes repères : femme de ménage, boucher, cuisinier, messager, infirmière chargée d'une équipe de travail, surveillant, magasinier des pièces de rechange).

Le degré 3 est décrit comme suit :

Le travail exige un effort physique considérable; par exemple, le titulaire devra grimper fréquemment, travailler dans des échelles, manipuler des objets de poids moyen ou travailler dans une position difficile. Les fonctions exigent à l'occasion un effort physique plus grand pour de courtes périodes. (Postes repères : concierge, aide de cuisine, plongeur, manoeuvre d'entrepôt).

Selon la plaignante, la simple conversion de l'ancienne évaluation des SH à un niveau SG-1 est discriminatoire, surtout à la lumière de la comparaison avec le poste repère d'aide de cuisine selon la norme SG. Le travail des aides-diététistes est très semblable à celui du poste repère des aides de cuisine. Cependant, le degré 3 est attribué à l'effort physique requis de l'aide de cuisine. Même si l'évaluation de ce poste repère est également plus élevée en ce qui a trait aux risques, soit le degré A2 (22 points) plutôt que le degré A1 (4 points), cette différence d'évaluation ne suffit pas pour modifier le niveau attribué. Cependant, la différence de 27 points entre le degré 2 et le degré 3 dans le cas de l'effort physique suffirait à faire grimper l'évaluation d'un niveau (de 1 à 2).

L'objection de la plaignante à l'égard de l'évaluation des aides- diététistes que l'intimé a faite selon le paragraphe 4(1) de l'ordonnance

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sur consentement est bien compréhensible, à la lumière de ce poste repère donné. En l'absence de ce poste repère, il aurait été difficile de contester l'évaluation, étant donné que la description et les autres postes repères du degré 3 se caractérisent tous par la nécessité de soulever des poids lourds ou par un effort physique considérable. Même si certains éléments de la preuve que la plaignante a présentée au sujet des aides- diététistes de Ste-Anne-de-Bellevue indiquent que ces employés sont appelés à soulever des poids lourds, l'ensemble de la preuve démontre le contraire. La manipulation d'objets lourds semble plutôt être confiée à d'autres employés qui sont classés au niveau 2.

Même si l'intimé soutient que le poste repère de l'aide de cuisine exige la manipulation d'objets lourds ou des efforts physiques considérables selon la norme SG, il n'est pas fait mention de ces caractéristiques dans les critères d'évaluation proprement dits du degré 3 de ce poste repère. Le seul élément indiquant qu'un effort exceptionnel est requis est la mention du fait que la période de marche et de maintien en position debout est prolongée, mais cette durée de l'effort est également couverte par le degré 2, qui se caractérise par la nécessité constante de marcher ou de se tenir debout.

Non seulement les critères d'évaluation de l'effort physique dans le cas du poste repère de l'aide de cuisine ne font aucunement état de la manipulation d'objets lourds ou d'efforts physiques considérables, mais la description des tâches de ce poste repère n'indique pas à première vue que des efforts exceptionnels sont requis. L'intimé a tenté d'expliquer l'évaluation inférieure qu'il a attribuée aux aides-diététistes en disant que les fonctions de nettoyage et de transport des fournitures alimentaires dont il est question dans la description de tâches du poste repère d'aide de cuisine exigent des efforts physiques considérables. Cependant, l'aide- diététiste est appelé lui aussi à accomplir des tâches de nettoyage et de manipulation de fournitures alimentaires qui sembleraient comprendre le transport. Il n'est pas évident, d'après la norme SG, que les efforts exigés de l'aide de cuisine (poste repère) pour l'exécution d'un travail similaire doivent être plus grands.

Nous sommes donc en quelque sorte confrontés à un dilemme. Si le poste repère d'aide de cuisine de la norme SG n'existait pas, nous serions convaincus que le degré 2 attribué à l'effort physique et, par conséquent, la classification au niveau 1 des aides-diététistes sont appropriés. Cependant, ce poste repère justifie l'attribution du degré 3 à l'effort physique et, par conséquent, la classification au niveau GS-2.

En dernier ressort, nous sommes d'avis qu'il ne faut pas accorder une importance concluante à un seul poste repère pour déterminer comment un poste serait classifié selon la norme SG. Il semble qu'il y ait une lacune dans la norme de classification en ce qui a trait à la façon dont le poste repère d'aide de cuisine est décrit ou que l'effort physique de ce poste repère ne soit pas correctement évalué. Cependant, lorsque nous examinons l'ensemble de la norme et les postes repères, il nous apparaît évident que, pour que l'on attribue à un poste donné le degré 3 pour l'effort physique, ce poste doit nécessiter la manipulation d'objets lourds ou des efforts

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physiques considérables. En conséquence, nous sommes d'avis que le degré 2 attribué à l'effort physique exigé des aides-diététistes de Ste-Anne-de- Bellevue au cours de la réévaluation qui a été faite selon le paragraphe 4(1) de l'ordonnance sur consentement est approprié.

A la lumière de cette conclusion, l'évaluation des postes de niveau SG-1 à la suite de la conversion faite conformément à l'ordonnance sur consentement et la classification qui résulte de la réévaluation sont identiques. Il n'y a aucune différence permettant de conclure à l'existence de discrimination en ce qui a trait à la classification de ces employés.

LA NOUVELLE NORME DE CLASSIFICATION DES SERVICES HOSPITALIERS

Selon le paragraphe 8(1) de l'ordonnance sur consentement, l'intimé s'est engagé à réviser la norme de classification SH de façon qu'elle corresponde à la norme de classification SG. De l'avis de la plaignante, une comparaison entre l'ancienne norme SH et la norme SG indique qu'il y avait discrimination fondée sur le sexe sur le plan de la classification et que cette discrimination se poursuit, du moins en partie, selon la nouvelle norme SH.

Les facteurs à évaluer selon l'ancienne norme SH et la norme SG étaient déjà les mêmes, tout comme les degrés pour chaque facteur et les points attribués à chacun d'eux. Hormis quelques différences mineures, les descriptions des facteurs étaient déjà les mêmes selon les deux normes de classification.

Les différences importantes qui existaient entre les deux normes de classification au moment de la plainte appartenaient à deux catégories. D'abord, les écarts numériques selon lesquels les niveaux étaient attribués aux postes étaient différents. En deuxième lieu, les postes repères utilisés pour illustrer l'application des normes étaient différents.

Lors de la révision de la norme SH selon l'ordonnance sur consentement, les différences mineures touchant la description de facteurs ont été éliminées et les écarts numériques permettant d'attribuer les niveaux selon la norme SH ont été corrigés de façon à être identiques à ceux de la norme SG. En outre, les mots désignant explicitement un sexe dans la norme SH ont été remplacés par des mots pouvant désigner l'un ou l'autre sexe. Dans la mesure où l'un ou l'autre de ces aspects de l'ancienne norme SH comportait une discrimination fondée sur le sexe, cette discrimination a été éliminée à la suite de la révision.

Le point encore en litige entre la plaignante et l'intimé concerne les postes repères. La plaignante soutient essentiellement que les postes repères sont décrits et évalués de façon à perpétuer la discrimination fondée sur le sexe à l'encontre des employés du groupe SH, lorsqu'ils sont évalués selon la nouvelle norme SH comparativement aux employés du groupe SG évalués d'après la norme SG.

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S'il y a discrimination, comme l'allègue la plaignante, il s'agit d'une discrimination systémique. Il n'y a aucune preuve indiquant que certaines exigences de la nouvelle norme SH entraînent, directement ou indirectement, une discrimination fondée sur le sexe lorsqu'on les compare aux exigences de la norme SG. Il faut plutôt déterminer si les postes repères de la nouvelle norme SH sous-entendent des présomptions subtiles au sujet de la valeur du travail traditionnellement accompli par des femmes, lesquelles présomptions donnent lieu à de la discrimination comparativement aux postes repères de la norme SG.

La question de savoir s'il y a discrimination systémique dépend surtout de l'application du type d'analyse qui a été présentée au cours du témoignage du Dr Hagniere au sujet de cette discrimination. Cependant, il y a un élément de la preuve objective qui permet de conclure que la nouvelle norme SH est discriminatoire comparativement à la norme SG.

La réévaluation des postes conformément au paragraphe 4 de l'ordonnance sur consentement a été faite au niveau central par des agents de l'intimé. On a choisi 33 descriptions de postes qui ont été évaluées, notamment la description d'emploi-clé proposée pour les représentants en santé communautaire. Les 32 autres postes évalués étaient 29 postes de niveau SH-1 et trois postes de couturières. L'évaluation des postes des couturières et des représentants en santé communautaire n'a donné lieu à aucun changement en ce qui a trait au niveau attribué lors de la conversion des anciens niveaux SH aux niveaux SG. Cependant, 15 des 29 postes SH-1 ont été classés comme postes de niveau SG-2 et un de ces 29 postes est devenu un poste de niveau SG-3.

Une fois que la nouvelle norme SH a été approuvée conformément au paragraphe 8(1) de l'ordonnance sur consentement, elle a été distribuée aux ministères concernés et appliquée à l'intérieur de ceux-ci afin d'évaluer les postes individuellement. Entre-temps, la majorité des 16 postes choisis qui ont été classés à un niveau supérieur conformément au paragraphe 4 de l'ordonnance sur consentement semblent avoir disparu ou avoir fait l'objet d'une modification importante en ce qui a trait à la description de poste.

Cependant, la plaignante a pu identifier six de ces 16 postes qui existaient encore sans avoir subi de changements importants et qui avaient été évalués à nouveau selon la nouvelle norme SH. A cette époque, chacun de ces postes avait été classé au niveau 1. Ainsi, tous les anciens postes SH-1 qui ont été élevés au niveau 2 selon la norme SG et qui n'avaient pas encore été modifiés lorsque la nouvelle norme SH a été appliquée semblent avoir été classés au niveau 1 suivant la nouvelle norme SH.

Cela indique à la fois qu'il y a une différence dans le traitement, sans tenir compte de la différence évidente dans les écarts numériques des niveaux, entre l'ancienne norme SH et la norme SG et que la même différence persiste selon la nouvelle norme SH. Compte tenu de la prédominance des femmes dans le groupe SH et de la prédominance des hommes dans le groupe SG, il est permis de conclure que cette différence engendre de la discrimination fondée sur le sexe.

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Les niveaux de classification attribués selon la nouvelle norme SH peuvent encore faire l'objet d'un appel conformément à la procédure normale de règlement des griefs portant sur la classification. Lors des audiences, la plaignante et l'intimé avaient convenu de suspendre l'audition de ces appels jusqu'au résultat de la présente cause. On ignore donc si les appels peuvent donner lieu à une modification de ces résultats. Toutefois, la preuve indique que la majorité des appels relatifs à la classification sont rejetés. Il n'y a donc aucune raison de penser que les résultats découlant de la réévaluation de ces six postes selon la norme SG et les résultats provenant de l'application de la nouvelle norme SH à ces mêmes six postes ne constituent pas une comparaison significative de ces deux normes quant à leur application.

L'intimé soutient que cette preuve n'est pas importante, pour le motif que ces six postes ne représentent qu'une partie infime du nombre total de postes qui ont fait l'objet de l'évaluation. Cependant, ce sont là des postes que l'intimé a choisis comme étant représentatifs de l'ensemble des postes appartenant au niveau de classification HS-1 qu'il a entrepris d'évaluer conformément au paragraphe 4(1) de l'ordonnance sur consentement. A la lumière de ce fait, nous ne pouvons que conclure que l'évaluation de ces employés au niveau 2 selon la norme SG et au niveau 1 selon l'ancienne et la nouvelle normes SH est importante.

La preuve ne révèle aucune explication adéquate de ce résultat qui serait fondée sur des motifs autres que de la discrimination. Effectivement, dans l'énoncé de deux des critères d'évaluation découlant de la nouvelle norme SH, on mentionne expressément qu'il s'agit d'une confirmation de l'ancienne évaluation SH. Il ne saurait être plus clair que cette application de la nouvelle norme SH est un prolongement du traitement précédemment accordé à ces postes selon l'ancienne norme SH.

En ce qui a trait à la preuve plus subjective de la discrimination systémique, la plaignante se fonde surtout sur le fait que les postes repères ressemblent aux postes précis dont l'évaluation est également contestée. L'ancienne norme SH comprend un poste repère de préposé à l'alimentation et la nouvelle norme SH comprend un poste repère d'aide- diététiste. Tous deux ont été classés à un niveau inférieur au poste repère similaire de l'aide de cuisine de la norme SG. On se fonde également sur la preuve selon laquelle les aides-diététistes de Ste-Anne- de-Bellevue ont été sous-évalués conformément au paragraphe 4(1) de l'ordonnance sur consentement et auraient dû se voir attribuer le même niveau GS-2 que les aides de cuisine (poste repère) pour conclure que le poste repère des aides-diététistes a été sous-évalué dans la norme SH.

De la même façon, il y a un poste repère des aides-hygiénistes tant dans l'ancienne que la nouvelle normes SH. On invoque la preuve indiquant que la description d'emploi-clé des représentants en santé communautaire a été sous-évaluée selon la norme SG pour soutenir que le poste repère des aides- hygiénistes est sous-évalué dans la norme SH.

La classification des postes véritables peut légitimement exiger l'utilisation de renseignements supplémentaires en plus de ceux qui se

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trouvent dans la description de poste proprement dite. La tâche consiste à évaluer correctement le poste lui-même, que celui-ci soit pleinement décrit ou non dans la description de poste officielle. Ce n'est pas le cas pour les postes repères. Un poste repère n'est utile que dans la mesure où des renseignements complets permettant de comprendre l'évaluation du poste en question sont énoncés par écrit dans la description de poste ou les critères d'évaluation du poste repère. Ainsi, même s'il convenait que la plaignante démontre, à l'aide d'une autre preuve, que les représentants en santé communautaire et les aides-diététistes de Ste-Anne-de-Bellevue ont été sous-évalués, cette preuve ne nous est guère utile aux fins de déterminer si les postes repères sont sous-évalués.

Les postes repères en question sont manifestement différents des postes dont le niveau de classification est contesté. Ainsi, le poste repère de l'aide-hygiéniste semble correspondre surtout au poste d'un agent d'information en santé communautaire plutôt qu'à celui de préposé aux soins, même dans la mesure restreinte où la prestation de soins est prévue dans la description d'emploi-clé. Le poste repère de l'aide-diététiste semble correspondre surtout à celui d'aide à la cafétéria à qui l'on a confié la responsabilité supplémentaire de nettoyer les légumes. Pour leur part, les aides-diététistes de Ste-Anne-de-Bellevue accomplissent diverses tâches dans une cuisine commerciale.

En raison de ces différences, nous ne sommes pas convaincus que ces postes repères sont sous-évalués dans la norme SH comparativement à la norme SG. Le poste repère de l'aide-hygiéniste est classé à un niveau inférieur à l'évaluation que nous avons jugée appropriée pour la description d'emploi- clé du représentant en santé communautaire selon la norme SG quant aux facteurs des connaissances fondamentales (degré 1 plutôt que degré 2), de la formation professionnelle précise (degré 3 plutôt que degré 4), des ressources et services (degré 1 plutôt que degré 2), de la sécurité d'autrui (degré 1 plutôt que degré 2) et de l'environnement (degré 1 plutôt que degré 2). Cependant, toutes ces classifications inférieures peuvent être justifiées dans le cas d'une personne qui travaille uniquement à titre d'agent d'information plutôt que de préposé aux soins.

Le poste repère de l'aide-diététiste est classé à un niveau inférieur à celui que nous avons jugé approprié pour les aides-diététistes de Ste-Anne- de-Bellevue quant au facteur de l'environnement (degré 1 plutôt que degré 2). Cette classification peut être justifiée par le fait que les tâches du poste repère se rapportent principalement à du travail en cafétéria, qui est plus agréable que le milieu de la cuisine commerciale où les travailleurs de Ste-Anne-de-Bellevue passent une bonne partie de leur temps. Le travail en cuisine du poste repère consiste principalement à nettoyer les légumes; la personne qui occupe ce poste n'est pas nécessairement exposée à la chaleur des appareils de cuisson ou au froid des réfrigérateurs, contrairement aux travailleurs de Ste-Anne-de-Bellevue. Par ailleurs, l'employé qui utilise des couteaux et des éplucheurs pour préparer les légumes est exposé aux risques du poste repère au degré A2, plutôt qu'aux risques du degré A1 correspondant aux employés de Ste-Anne- de-Bellevue.

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En ce qui a trait à l'effort physique, pour lequel la plaignante a soutenu que le degré 3 attribué aux employés de Ste-Anne-de-Bellevue correspond à l'évaluation du poste repère des aides de cuisine selon la norme SG, il appert clairement des critères d'évaluation de ce poste repère selon la nouvelle norme SH que le poste en question exige moins d'efforts. En conséquence, même si nous avions abondé dans le sens de la plaignante en ce qui a trait à la classification des employés de Ste-Anne-de-Bellevue, l'évaluation du poste repère de l'aide-diététiste au degré 2 semble justifiée comparativement à la norme SG.

Une des caractéristiques générales de la nouvelle norme SH qui est contestée est l'utilisation de descriptions de poste abrégées pour les postes repères SH comparativement à l'utilisation de descriptions de poste complètes dans la norme SG. On soutient que ces descriptions de poste abrégées ont pour effet d'atténuer l'importance du travail. Une évaluation inférieure de postes qui sont vraiment équivalents peut sembler justifiée selon ce type de description de poste repère, comparativement à l'évaluation d'un poste décrit de façon plus complète selon la norme SG, ce qui pourrait donner lieu à des évaluations inférieures des postes réels selon la norme SH.

L'intimé explique l'utilisation des descriptions de poste abrégées en disant qu'il s'agit d'un nouveau style de rédaction des normes de classification que l'on utilisera aussi dans la norme SG lorsque celle-ci fera l'objet d'une révision en profondeur. Il n'en demeure pas moins que, entre-temps, il y a une différence évidente entre les deux normes.

Les conséquences alléguées sur le plan de l'équité en matière d'emploi sont plausibles et sont peut-être réelles dans le cas du poste repère de l'aide- hygiéniste selon la nouvelle norme SH. Une comparaison entre la description de ce poste repère qui apparaît dans la nouvelle norme SH et la description plus complète que l'on peut lire dans l'ancienne norme SH indique que des tâches importantes liées à l'interprétation entre les autorités sanitaires et les membres de la population autochtone ne sont pas mentionnées dans la description abrégée. Ces tâches pourraient justifier une évaluation supérieure des facteurs comme les connaissances fondamentales, la formation professionnelle précise et la sécurité d'autrui.

Une autre différence importante entre la nouvelle norme SH et la norme SG réside dans le fait que la liste des postes repères qui constituent des exemples des différents facteurs évalués est exhaustive. L'évaluation de chaque poste repère est indiquée pour chaque facteur. Dans la norme SG, seuls quelques postes repères sélectionnés sont énumérés sous chaque facteur et, effectivement, deux ou trois postes repères ne sont aucunement mentionnés. Étant donné qu'il faut travailler à partir de la liste des postes repères pour chaque facteur lorsqu'on utilise une norme, lorsqu'un poste repère n'est pas mentionné à l'égard d'un facteur, il est peu probable qu'il jouera un rôle quelconque dans l'évaluation de celui-ci.

Bien que ce ne soit pas toujours le cas, il semble que, généralement, lorsqu'un poste repère n'est pas mentionné à l'égard d'un facteur donné, il

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a été évalué à un degré peu élevé pour ce facteur. En conséquence, la répartition apparente des postes repères sous chaque facteur dans la norme SG comporte une plus grande proportion d'évaluations à un niveau supérieur que ce qui existe effectivement entre les postes repères. Cela peut engendrer une tendance à élever les niveaux d'évaluation, puisqu'on a ainsi l'impression que la norme entre les postes repères est supérieure à ce qu'elle est en réalité.

D'autre part, comme la liste est exhaustive dans la nouvelle norme SH, la norme véritable est évidente. Étant donné qu'une proportion plus élevée de postes repères semblent avoir été classés au degré le plus bas pour chaque facteur, cela peut donner lieu à une baisse des évaluations comparativement à la norme SG, où le répertoriage sélectif donne à penser que la proportion d'évaluations faibles est moins importante.

Dans le cas de plusieurs facteurs évalués selon la nouvelle norme SH, le plus haut poste repère indiqué est évalué à un degré plus bas que celui qui apparaît dans la norme SG. Selon toute vraisemblance, on hésitera beaucoup à évaluer un facteur à un degré supérieur à celui qui a été attribué pour le poste repère. En conséquence, le fait que les postes repères les plus hauts sont habituellement évalués à un degré inférieur selon la nouvelle norme SH comparativement à la norme SG a tendance à maintenir les évaluations à un niveau plus bas.

Ainsi, même si plusieurs caractéristiques des descriptions de postes repères de la nouvelle norme SH sont susceptibles d'engendrer des évaluations inférieures comparativement à celles de la norme SG, l'examen de ces caractéristiques est problématique dans ce cas. L'utilisation de descriptions d'emploi abrégées pour les postes repères, l'utilisation d'une liste exhaustive, plutôt que sélective, des postes repères sous les facteurs d'évaluation et l'absence de postes repères à des degrés plus élevés comparativement à la norme SG constituent, dans la plupart des cas, des innovations propres à la nouvelle norme SH. La majeure partie de l'ancienne norme SH ressemblait à la norme SG pour chacun de ces aspects. On peut donc soutenir que, si ces caractéristiques entraînent de la discrimination fondée sur le sexe entre la nouvelle norme SH et la norme SG, il n'y avait pas de discrimination semblable selon l'ancienne norme SH et cette discrimination n'est donc pas visée par la plainte.

D'autre part, nous sommes d'avis que ces caractéristiques comportent des éléments de discrimination systémique fondée sur le sexe. Comparativement à la norme SG, la nouvelle norme SH donne généralement l'impression que les employés SH font moins de travail que les employés SG, que la norme de classification du travail SH se situe à un degré inférieur à celle du travail SG et que l'évaluation maximale de plusieurs facteurs du travail SH est inférieure à celle du travail SG. Cela dénote une présomption selon laquelle le travail SH, qui est accompli surtout par des femmes, a moins de valeur que le travail SG, qui est accompli surtout par des hommes.

En outre, il n'y a aucune preuve permettant de réfuter cette analyse de la nouvelle norme SH. Les agents de l'intimé qui ont participé à la révision de la norme SH conformément au paragraphe 8(1) ont fait valoir en termes

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très clairs qu'ils s'étaient limités à tenter de reproduire les évaluations qui seraient obtenues selon la norme SG et qu'ils n'ont aucunement cherché à évaluer la nouvelle norme à la lumière de facteurs liés à l'équité dans l'emploi.

En raison de la différence dans les écarts numériques des niveaux de classification, l'ancienne norme SH donnait ouvertement lieu à une classification des employés SH à un niveau inférieur à celui des employés classifiés de la même façon selon la norme SG. A notre avis, cette classification traduisait en bonne partie une présomption selon laquelle ce travail, qui est accompli surtout par des femmes, a moins de valeur que le travail équivalent accompli surtout par des hommes du groupe SG. Il s'agit là de la même présomption et de la même discrimination systémique fondée sur le sexe qui se manifeste sous les formes que nous avons relevées dans la norme SH.

Le simple fait que cette présomption se présente maintenant sous des formes différentes ne l'exclut pas de la portée de la plainte. Il s'agit de la même discrimination, mais la forme est plus subtile, ce qui est le principal problème lié à la discrimination systémique.

Cela ne signifie pas que l'intimé a tenté délibérément de perpétuer les conséquences de la discrimination fondée sur le sexe qui existait entre l'ancienne norme SH et la norme SG. Cela signifie simplement que cette discrimination s'est effectivement poursuivie. Si l'intimé avait envisagé de façon plus large les responsabilités qu'il avait selon l'ordonnance sur consentement, il aurait peut-être pu éviter cette conséquene.

Même si nous avons tort de conclure que la discrimination systémique fondée sur le sexe se poursuit de cette façon subtile dans l'application de la nouvelle norme SH comparativement à la norme SG, il y a encore la preuve objective des résultats découlant des évaluations successives de six postes HS-1 représentatifs suivant le paragraphe 4(1) de l'ordonnance sur consentement et, par la suite, conformément à la nouvelle norme SH suivant le paragraphe 8(1) de l'ordonnance sur consentement. Le fait que ces postes ont été classés au niveau 1 lors d'une conversion directe de l'ancienne norme HS, qu'ils ont été classés au niveau 2 lorsqu'ils ont été évalués selon la norme SG, puis rabaissés au niveau 1 lorsqu'ils ont été évalués selon la nouvelle norme SH nous suffit pour conclure qu'il y a eu violation de l'article 7 de la Loi canadienne sur les droits de la personne, étant donné que les employés SH sont surtout des femmes et que les employés SG sont surtout des hommes. Nous sommes d'avis que cette violation existait au moment de la plainte et qu'elle se poursuit dans l'application de la nouvelle norme SH.

CORRECTION DE LA NORME DE CLASSIFICATION

Étant donné que cette discrimination peut, à son tour, toucher la question de la rémunération des représentants en santé communautaire, nous examinerons d'abord la question de la réparation découlant de notre conclusion selon laquelle l'application de la nouvelle norme de classification SH constitue un prolongement de la discrimination fondée sur

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le sexe qui existait dans l'application de l'ancienne norme SH comparativement à la norme SG.

Comme il s'agit d'une cause qui dure depuis longtemps, le tribunal estime que nous devrions délivrer une ordonnance réparatrice finale. Nous ne sommes pas prêts, dans le présent dossier, à conserver notre compétence afin d'accorder à la plaignante et à l'intimé une autre possibilité de convenir d'une réparation à la lumière de nos conclusions au sujet du bien- fondé de la cause. Mise à part la question de savoir s'il serait approprié que nous tentions de conserver notre compétence, nous sommes convaincus que la plaignante et l'intimé ont épuisé toutes les possibilités d'en arriver à un règlement du conflit au moyen d'une entente et que, pour mettre fin au litige, nous devons délivrer une ordonnance définitive.

Si nous avons bien compris les arguments de la plaignante, celle-ci préférerait que notre tribunal délivre une ordonnance ayant pour effet de corriger les aspects discriminatoires de la nouvelle norme SH. Cependant, nous ne sommes pas prêts à le faire. Même si nous sommes convaincus que la preuve présentée devant nous nous a suffisamment éclairés au sujet du processus de classification pour nous permettre de conclure que la nouvelle norme SH est discriminatoire, le Tribunal n'a pas pour autant reçu la formation nécessaire au cours de l'audience pour rédiger une norme de classification.

Nous doutons aussi de notre pouvoir de délivrer pareille ordonnance. Les pouvoirs de réparation directe dont le Tribunal dispose en vertu du paragraphe 53(2) de la Loi semblent plutôt restreints et portent sur des réparations comme une indemnisation, une ordonnance enjoignant à la partie fautive de mettre fin à une contravention de la Loi ou une ordonnance en vue d'accorder certains droits, chances ou avantages pour l'avenir. Le seul pouvoir qui semblerait couvrir la rédaction d'une ordonnance réparatrice comportant des mesures aussi complexes que la nouvelle rédaction de la norme de classification SH est celui qui permet d'exiger l'adoption de mesures en consultation avec la Commission des droits de la personne conformément à l'alinéa 53(2)a). Même si les réparations pouvant être accordées en vertu de ce pouvoir peuvent comprendre l'adoption de mesures affirmatives pour corriger une discrimination antérieure (voir CN c. Canada (Commission des droits de la personne), [1987] 1 R.C.S. 1114, cette disposition ne semble pas couvrir une ordonnance rétroactive semblable à celle qui serait nécessaire pour régler le problème de la classification du groupe d'employés SH pour la période allant jusqu'au 27 juillet 1987 selon ce qui était alors l'étape ultérieure de l'ordonnance sur consentement.

Compte tenu de notre conclusion selon laquelle la nouvelle norme de classification SH donne lieu à de la discrimination fondée sur le sexe comparativement à la norme SG et qu'il s'agit du prolongement de la discrimination découlant de l'application de l'ancienne norme SH, nous sommes d'avis que la réparation immédiate appropriée est une ordonnance enjoignant à l'intimé de cesser d'utiliser l'ancienne et la nouvelle normes de classification SH ou toute autre norme de classification des employés SH qui est discriminatoire de la même façon comparativement à la norme SG.

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Afin d'offrir une réparation complète le plus tôt possible, nous ordonnerions à l'intimé, en consultation avec la Commission canadienne des droits de la personne, de rédiger une nouvelle norme de classification SH qui n'engendre pas de discrimination systémique en sous-évaluant le travail du groupe d'employés SH comparativement à celui du groupe d'employés SG.

Compte tenu de la preuve présentée devant nous, nous présumons que cette démarche pourra être longue. Étant donné que l'effet de la norme de classification SH qui découlera de notre ordonnance ne sera pas rétroactif et que, comme nous l'avons décidé, l'application de la norme de classification SH adoptée par l'intimé suivant le paragraphe 8 de l'ordonnance sur consentement donne lieu à de la discrimination continue contrairement à la Loi, la seule réparation directe disponible pour corriger cette discrimination est un dédommagement.

Une des conséquences découlant de notre conclusion selon laquelle la nouvelle norme de classification SH est un prolongement de la violation de l'article 7 découlant de l'application de l'ancienne norme de classification SH est que la reclassification faite conformément au paragraphe 8 de l'ordonnance sur consentement a peut-être eu pour effet de prolonger certains effets négatifs pour les employés du groupe SH comparativement aux employés du groupe SG. Cette possibilité est démontrée par le fait que l'évaluation à la hausse des six postes représentatifs selon la norme SG a été ramenée au niveau précédent lorsque les postes ont été reclassifiés suivant la nouvelle norme SH.

A l'exception du cas des représentants en santé communautaire, dont nous parlerons plus loin, il semble que toute perte subie jusqu'au 26 juillet 1987 a été compensée par l'application de l'ordonnance sur consentement. Comme nous ne pouvons trouver aucun pouvoir nous permettant de délivrer une ordonnance rétroactive en ce qui a trait à la la reclassification, nous en arrivons à la conclusion que toute indemnisation pour la période suivant le 27 juillet 1987 devrait être fondée sur la méthode appliquée conformément à la partie I de l'ordonnance sur consentement pour calculer l'indemnisation à l'égard de la période allant jusqu'au 26 juillet 1987. En conséquence, pour la période allant du 27 juillet 1987 à la date de notre ordonnance, les employés SH qui ont été lésés par la reclassification faite conformément au paragraphe 8 de l'ordonnance sur consentement comparativement à la classification qui aurait découlé de l'application de la norme SG ont droit à un dédommagement selon la méthode de calcul prévue à la partie I de l'ordonnance sur consentement.

Après la date de la présente ordonnance, nous sommes d'avis que la discrimination ne constituerait pas un prolongement de la discrimination allant à l'encontre de la Loi canadienne sur les droits de la personne qui a fait l'objet de la plainte présentée devant nous si, jusqu'à la mise en oeuvre d'une nouvelle norme de classification adoptée conformément à notre ordonnance, l'intimé décide de reclassifier les employés SH selon la norme de classification SG. La question de savoir s'il y a d'autres objections à cette reclassification, en droit ou selon la convention collective, n'est pas une question de notre ressort.

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Cependant, jusqu'à ce que les employés SH soient reclassifiés selon la norme SG ou une norme SH compatible avec notre ordonnance, il est possible que l'application de l'ancienne et de la nouvelle normes SH continue d'avoir des effets néfastes. En conséquence, pour la période allant de la date de la présente ordonnance jusqu'à la mise en oeuvre d'une norme de classification SH adoptée conformément à notre ordonnance, les employés SH lésés par la classification selon l'une ou l'autre des normes SH précédentes ont le droit de recevoir une indemnisation continue calculée selon la partie I de l'ordonnance sur consentement. Bien entendu, si l'intimé peut, entre-temps, reclassifier un employé SH suivant la norme SG, on ne pourrait plus dire que l'employé est lésé parce que son poste est classé à un niveau inférieur comparativement à un poste équivalent classifié selon la norme SG.

Dans la mesure où il y a d'autres questions liées à la classification qui ne sont pas réglées à la suite de l'application de la nouvelle norme SH, notre ordonnance aurait pour effet d'interdire l'utilisation de l'ancienne ou de la nouvelle normes SH pour les résoudre. Nous présumons que, jusqu'à ce qu'une norme SH soit adoptée conformément à notre ordonnance, ces questions devront être résolues à la lumière de la norme SG ou reportées.

INDEMNISATION DES REPRÉSENTANTS EN SANTÉ COMMUNAUTAIRE

Selon la plaignante, les employés qui, d'après elle, ont été classifiés de façon erronée suivant le paragraphe 4 de l'ordonnance sur consentement devraient être dédommagés pour la période de l'application rétroactive de l'ordonnance sur consentement, c'est-à-dire pour la période allant du 9 septembre 1980 au 26 juillet 1987. Si la réévaluation initiale de l'intimé avait été faite conformément à nos conclusions, l'ordonnance sur consentement aurait donné lieu à une indemnisation couvrant cette période. Par conséquent, pour ordonner une réparation complète, il nous faudrait offrir une indemnisation équivalente.

D'autre part, le Tribunal hésite à ce stade-ci à rendre une ordonnance d'indemnisation pour une période qui remonte à plus de dix ans. Notre hésitation est encore plus grande lorsque nous tenons compte de la grande variété des rôles de chacun des représentants en santé communautaire. Cela signifie que notre évaluation au niveau 5 fondée sur la description d'emploi-clé est peu pertinente en ce qui a trait à l'évaluation appropriée des autres représentants en santé communautaire.

Étant donné que le seul pouvoir de réparation du Tribunal qui couvre clairement les effets antérieurs d'une contravention de la Loi canadienne sur les droits de la personne réside dans l'octroi d'une indemnité, nous sommes d'avis que la balance penche en faveur de l'octroi d'une indemnité complète aux représentants en santé communautaire, même s'il s'agit d'une longue période. Nous avons constaté que ces employés ont longtemps été les victimes d'une grande discrimination fondée sur le sexe à la suite de la sous-évaluation de leur poste par l'intimé et que cette discrimination s'est poursuivie malgré la réévaluation faite suivant le paragraphe 4(2) de l'ordonnance sur consentement.

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En conséquence, nous ordonnerons que les représentants en santé communautaire qui ont travaillé pour l'intimé en tout temps au cours de la période allant du 9 septembre 1980 au 26 juillet 1987 reçoivent une indemnité équivalant à la différence entre les rajustements paritaires reçus conformément à l'ordonnance sur consentement et les paiements qui auraient été versés suivant ladite ordonnance si les représentants en santé communautaire avaient été classés au niveau GS-5 plutôt qu'au niveau GS-4. Ces paiements demeureront assujettis à toutes les autres dispositions pertinentes de l'ordonnance sur consentement, sauf la disposition fixant au 31 décembre 1990 la date limite pour les demandes de paiement des anciens employés.

En ce qui a trait à la période débutant le 27 juillet 1987, ces employés ont droit à une indemnisation calculée de la même façon que l'indemnisation accordée aux autres employés lésés à la suite de l'application de la nouvelle norme de classification SH qui a été adoptée conformément au paragraphe 8 de l'ordonnance sur consentement, c'est-à-dire la méthode de calcul prévue à la partie I de l'ordonnance en question.

RÉCLAMATIONS DES ANCIENS EMPLOYÉS

Selon l'ordonnance sur consentement, les anciens employés SH avaient jusqu'au 31 décembre 1990 pour demander les paiements auxquels ils avaient droit. Étant donné que cette date est déjà passée et que ces personnes devront probablement faire de nouvelles démarches pour réclamer toute autre indemnité à laquelle ils ont droit selon notre ordonnance, cette date ne peut s'appliquer à ces réclamations. A notre avis, il est raisonnable qu'une date limite semblable soit fixée pour que l'on puisse finalement fermer le dossier.

Par ailleurs, nous ne sommes pas certains de pouvoir affirmer que toutes les réclamations seront pleinement échues avant que l'intimé n'ait effectivement mis en oeuvre la norme de classification SH non discriminatoire que nous exigeons dans notre ordonnance. En conséquence, nous ordonnerons que le droit des anciens employés SH de demander une indemnité conformément à notre ordonnance demeure en vigueur jusqu'à l'expiration d'un an suivant la date de notre décision, la date d'une décision rendue par un tribunal appelé à réviser notre décision ou la date de mise en oeuvre de cette norme SH, selon la plus tardive de ces dates.

COMPÉTENCE SUPPLÉMENTAIRE

Vers la fin de l'audience, la plaignante a demandé au Tribunal s'il devrait prendre connaissance des questions pouvant découler de l'application du paragraphe 11 de l'ordonnance sur consentement. A l'époque, nous avons refusé d'examiner la question, en partie parce que la plaignante tentait d'interrompre la présentation par l'intimé de sa cause et en partie parce qu'il s'agissait manifestement d'une nouvelle question qui ne faisait pas partie de celles qu'elle avait mentionnées lorsque nous avons commencé à entendre la preuve en novembre 1989.

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La question de savoir si la possibilité que nous avons de conserver de notre compétence selon le paragraphe 11 de l'ordonnance sur consentement peut encore être invoquée devant nous n'a pas été plaidée par ailleurs au cours du litige. La plaignante a fait savoir que, à son avis, il est possible que nous soyons appelés à exercer cette compétence plus tard.

Bien que nous ne puissions peut-être pas nous prononcer définitivement à ce sujet, étant donné que les parties n'ont pas eu l'occasion de plaider à cet égard, les points en litige sont les mêmes que ceux qui ont été pleinement débattus devant nous lors de l'examen de la question préliminaire de savoir si notre Tribunal était functus officio. A notre avis, si nous tentions de conserver notre compétence dans le présent litige après la présente décision, nous ne respecterions pas le principe du functus officio.

Nous estimons que, si la plaignante désirait avoir recours au présent Tribunal conformément au paragraphe 11 de l'ordonnance sur consentement pour trancher les questions qui ne sont pas encore réglées, il aurait fallu continuer l'ajournement selon les dispositions initiales de l'ordonnance sur consentement jusqu'à ce que la plaignante soit prête à soumettre toutes les questions non encore réglées dans le cadre d'une seule procédure. Le principe du functus officio vise, entre autres choses, à éviter l'avalanche des litiges par le morcellement des procédures. Permettre à la plaignante de réouvrir plus tard la cause devant le présent Tribunal conformément au paragraphe 11 de l'ordonnance sur consentement irait directement à l'encontre de cet objectif.

Si la plaignante a des préoccupations fondées sur la Loi canadienne sur les droits de la personne au sujet des répercussions des résultats de l'initiative mixte syndicale\patronale sur le règlement de sa plainte de 1981 par l'ordonnance sur consentement et la présente décision, elle devra, à notre avis, engager de toutes nouvelles procédures.

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ORDONNANCE

Attendu que la plainte initiale dans la présente cause est fondée en ce qui a trait aux salaires et à la classification des employés des services hospitaliers; et

Attendu que le Tribunal est d'avis que les pratiques discriminatoires de l'intimé à l'égard de la classification des représentants en santé communautaires au niveau 4 et à l'égard de la nouvelle norme de classification SH comparativement à la norme SG n'ont pas été corrigées par l'entente des parties, le Tribunal statue comme suit :

  1. l'intimé est tenu de cesser de classifier les employés des services hospitaliers en se fondant sur la norme de classification des services hospitaliers en date de décembre 1966, et ses modifications, ou sur la norme de classification des services hospitaliers de juillet 1989 ou toute autre norme de classification des employés des services hospitaliers qui est discriminatoire de la même façon comparativement à la norme de classification des services généraux de juin 1969;
  2. l'intimé doit, en consultation avec la Commission canadienne des droits de la personne, adopter et mettre en oeuvre, le plus tôt possible, une norme de classification des services hospitaliers qui ne comporte aucune discrimination systémique fondée sur le sexe comparativement à la norme de classification des services généraux;
  3. sous réserve de toutes les autres dispositions pertinentes de l'ordonnance sur consentement en date du 15 juillet 1987 qui ne sont pas incompatibles avec la présente ordonnance, les personnes qui travaillaient pour le ministère de la Santé et du Bien-être social comme représentants en santé communautaire en tout temps au cours de la période allant du 9 septembre 1980 au 26 juillet 1987 ont droit à une indemnisation selon le montant de la différence entre les rajustements paritaires reçus conformément à l'ordonnance sur consentement en date du 15 juillet 1987 et les paiements qui auraient été versés selon ladite ordonnance, si ces employés avaient été classés au niveau GS-5 plutôt qu'au niveau GS-4 aux fins de ces paiements;
  4. toute personne qui occupait un poste au sein des services hospitaliers en tout temps au cours de la période allant du 27 juillet 1987 à la date de la présente ordonnance et qui a été lésée par la classification faite conformément à une norme de classification des services hospitaliers comparativement à la classification qui s'appliquerait à un poste équivalent selon la norme de classification des services généraux a droit à une indemnité calculée selon la même méthode qui a été utilisée pour à la période allant jusqu'au 26 juillet 1987 suivant la Partie I de l'ordonnance sur consentement en date du 15 juillet 1987, y compris une indemnisation des représentants en santé communautaire qui travaillaient pour le ministère de la Santé et du Bien-être social d'après une classification au niveau GS-5 plutôt qu'au niveau GS-4;
  5. 38

  6. toute personne qui occupe un poste au sein des services hospitaliers en tout temps au cours de la période allant de la date de la présente ordonnance jusqu'à la date de la mise en oeuvre d'une norme de classification des services hospitaliers adoptée suivant la clause (2) de la présente ordonnance et qui est lésée par une classification faite conformément à une norme de classification des services hospitaliers comparativement à la classification qui s'appliquerait à un poste équivalent selon la norme de classification des services généraux a droit à une indemnité calculée selon la méthode qui a été utilisée pour la période allant jusqu'au 26 juillet 1987 selon la Partie I de l'ordonnance sur consentement en date du 15 juillet 1987;
  7. lorsqu'une personne ayant droit à une indemnité selon la clause (3), (4) ou (5) a cessé ou cesse d'être un employé des services hospitaliers de l'intimé, le droit à une indemnité ne pourra être exercé que s'il est revendiqué au moyen d'une demande écrite adressée au dernier ministère ou organisme employeur ou à l'intimé dans un délai d'un an suivant la date de la présente décision, la date d'une décision rendue par un tribunal appelé à réviser la présente décision ou la date de mise en oeuvre d'une norme de classification des services hospitaliers adoptée conformément à la clause (2), selon la plus tardive de ces dates.

FAIT à Ottawa le 19 mars 1991.

Robert W. Kerr, président

Jane Banfield, membre du Tribunal

John I. Laskin, membre du Tribunal

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