Tribunal canadien des droits de la personne

Informations sur la décision

Contenu de la décision

D.T. 2/99

Décision rendue le 11 juin 1999

LOI CANADIENNE SUR LES DROITS DE LA PERSONNE

L.R.C., 1985, c. H-6 (version modifiée)

TRIBUNAL CANADIEN DES DROITS DE LA PERSONNE

ENTRE :

(MARY) JANET BERNARD

la plaignante

et

COMMISSION CANADIENNE DES DROITS DE LA PERSONNE

la Commission

et

CONSEIL SCOLAIRE DE WAYCOBAH

l'intimé

DÉCISION

TRIBUNAL : Guy A. Chicoine Président

ONT COMPARU : Hugh MacIsaac Avocat de Janet Bernard

Odette Lalumière Avocate de la Commission canadienne des droits de la personne

Jamie S. Campbell Avocat du conseil scolaire de Waycobah

DATES ET LIEU DE L'AUDIENCE : Du 11 au 14 janvier 1999 Sydney (Nouvelle-Écosse)

TABLE DES MATIÈRES

I. INTRODUCTION

II. CONTEXTE

III. INCIDENT D'OCTOBRE

IV. RÉACTION DES DIRIGEANTS DE L'ÉCOLE

V. LOI

VI. ANALYSE

VII. MESURES CORRECTIVES

i) Salaire perdu

ii) Réintégration

iii) Indemnité spéciale

iv) Intérêts

v) Excuses

vi) Correction du RE

vii) Dépens

VIII. AUTRES QUESTIONS

i) Compétence

ii) Motif valable

iii) Nouvel employeur

IX. ORDONNANCE

I. INTRODUCTION

Le 27 octobre 1995, le conseil scolaire de Waycobah a mis fin à l'emploi de Mary Janet Bernard à titre de secrétaire. Mme Bernard a déposé une plainte devant la Commission canadienne des droits de la personne, alléguant que son employeur avait exercé, par rapport à son emploi, une discrimination fondée sur une déficience mentale apparente, en contravention de l'article 7 de la Loi canadienne sur les droits de la personne (la LCDP). Son employeur a répliqué que la cessation d'emploi résultait d'un incident survenu le 26 octobre 1995, au cours duquel Mme Bernard a manifesté un comportement répréhensible qui a été préjudiciable aux meilleurs intérêts de l'employeur et qui constituait un motif valable de renvoi sommaire. L'employeur nie que cette déficience mentale apparente ait influé de quelque façon sur la décision de mettre fin à l'emploi de Mme Bernard.

II. CONTEXTE

Mary Janet Bernard est membre de la Première nation de Waycobah, qui est située dans la circonscription d'Inverness dans l'Île-du-Cap-Breton, à environ 160 kilomètres à l'ouest de Sydney. Il s'agit d'une Première nation micmaque dont la population est légèrement supérieure à 600 habitants. Mme Bernard est née et a été élevée à Waycobah. Après avoir terminé sa 12e année à l'école secondaire de Mabou, à Mabou, en Nouvelle-Écosse, elle a fréquenté le Cape Breton Business College où elle a obtenu un certificat de commis-dactylographe en 1977. Elle a ensuite travaillé à Halifax comme secrétaire dans une compagnie d'assurance ainsi qu'au ministère des Affaires indiennes et à Parcs Canada. Durant son séjour à Halifax, Mme Bernard a également étudié durant un an dans le cadre du programme d'études préparatoires à l'inscription à l'université. L'un des cours qu'elle a suivis portait sur la spiritualité autochtone.

En 1980, Mme Bernard a fréquenté la St. Mary's University durant le semestre d'automne, mais a abandonné le cours lorsque son père est décédé en janvier 1981. Par la suite, elle s'est inscrite au University College of Cape Breton où elle a suivi des cours de théologie pendant deux ans. Un peu plus tard, elle a aussi suivi un cours de mannequin à la John Robert Powers Modeling School, à Sydney, en Nouvelle-Écosse.

L'intérêt manifesté par Mme Bernard à l'égard de la profession de mannequin l'a amenée à figurer dans des films et des documentaires. Elle a également pris part au fil des années à de nombreuses activités culturelles partout en Amérique du Nord, y exécutant des danses traditionnelles. Mme Bernard prétend avoir une très bonne connaissance de la spiritualité autochtone en raison de ses études scolaires ainsi que de sa participation à divers pow-wow et activités telles que la Danse du Soleil dans le Dakota du Sud. Elle se considère comme une guide spirituelle autochtone. Parmi ses autres réalisations, mentionnons qu'elle a obtenu une ceinture noire (première dan) au taekwondo et qu'elle est en mesure d'enseigner cet art martial.

Avant son retour à Waycobah, en mars 1993, Mme Bernard a travaillé au ministère des Approvisionnements et Services pendant six ans à titre de secrétaire et d'opératrice d'appareil de traitement de texte. Elle prétend qu'elle était l'une des meilleures secrétaires là-bas.

En mars 1993, Mme Bernard a été embauchée par le conseil scolaire de Waycobah à titre de secrétaire du directeur de l'éducation, M. Brian Arbuthnot. À l'époque, la Première nation de Waycobah commençait à peine à mettre en place son propre système scolaire. Jusqu'alors, les enfants de la réserve de Waycobah fréquentaient l'école du village de Waycocomaugh administrée par le conseil scolaire de la circonscription d'Inverness. L'un des buts avoués de la mise en place par la Première nation de Waycobah de son système scolaire était de s'assurer que la langue et la culture micmaques seraient transmises aux enfants de la communauté. Avant de quitter son poste de directeur, M. Arbuthnot a réaffecté Mme Bernard au poste de secrétaire de l'école élémentaire, poste qu'elle a occupé jusqu'au 27 octobre 1995. À la suite de la cessation de son emploi, Mme Bernard a reçu de M. Arbuthnot une lettre de recommandation générale dans laquelle celui-ci atteste sa compétence à titre de secrétaire et son appui indéfectible à l'école administrée par la communauté de Waycobah.

Au cours des années où Mme Bernard a été au service du conseil scolaire de Waycobah, ce dernier était, à toutes fins pratiques, un comité composé du chef de la Première nation de Waycobah, des six conseillers de bande et de deux ou trois représentants élus de l'ensemble de la communauté. Un témoin a décrit le conseil scolaire comme une entité du conseil de bande sous l'autorité du chef et du conseil. Comme il s'agissait d'une entité créée par eux, ils pouvaient adjoindre au conseil d'autres personnes et les destituer à leur gré.

Il était prévu à l'origine que l'administration du système scolaire serait un jour confiée à un conseil scolaire composé principalement de représentants élus de la communauté. Cependant, on a abandonné en 1997 l'idée de nommer des représentants élus de la communauté au conseil scolaire; aujourd'hui, l'administration de l'école communautaire relève exclusivement du chef et du conseil de bande. Le chef a toujours agi comme président du conseil scolaire.

En février 1995, M. Angus Daniel MacIntyre a été embauché à titre de directeur de l'éducation. À l'époque, le système scolaire administré par le conseil scolaire de Waycobah était constitué de deux établissements distincts. Les élèves de la 1re à la 6e année fréquentaient l'école élémentaire de Waycobah, tandis que ceux de la 7e à la 12e année se rendaient à l'école secondaire premier/deuxième cycle de Waycobah, située à environ un demi-kilomètre plus loin. M. Gordon MacIver agissait comme directeur des élèves de la 1re à la 12e année, même si son bureau était situé dans l'école élémentaire. M. John Hendsbee, le directeur adjoint, avait son bureau à l'école secondaire premier/deuxième cycle. M. MacIver était le surveillant de Mme Bernard puisqu'ils travaillaient tous deux à l'école élémentaire. Les élèves de l'école secondaire se rendaient à l'école élémentaire pour les cours de gymnastique, d'enseignement ménager et d'arts et métiers. L'école élémentaire comptait environ 60 étudiants, comparativement à une bonne trentaine à l'école secondaire.

M. MacIver était de façon générale satisfait des compétences de Mme Bernard à titre de secrétaire de l'école. Il l'a qualifiée de très compétente. Ses fonctions consistaient à agir comme réceptionniste, à faire de la dactylographie pour le directeur et les professeurs, à faire des photocopies et à s'occuper des élèves qui venaient au bureau pour faire faire des photocopies, faire des appels téléphoniques ou livrer des messages des professeurs. Cependant, à l'été 1995, il s'est produit un incident auquel ont été mêlés Mme Bernard, Allan Bernard, qui était orienteur à l'école secondaire premier/deuxième cycle, et Julianna Bernard, qui était la femme d'Allan Bernard et la secrétaire du bureau du conseil scolaire. Bien qu'aucun des témoins n'ait décrit la nature de l'incident, M. MacIver a déclaré qu'Allan Bernard avait fait l'objet d'une ordonnance d'interdiction de communiquer.

À titre d'orienteur, Allan Bernard se rendait parfois à l'école élémentaire où travaillait Mme Bernard. Selon M. MacIver, Mme Bernard devenait chavirée chaque fois qu'Allan Bernard venait à l'école. Le conflit mettait le personnel mal à l'aise, avec le résultat que M. MacIver a décidé de rencontrer Mme Bernard pour tenter de désamorcer la situation. La rencontre a eu lieu au début d'octobre, après les heures de cours, dans une salle de classe de l'école élémentaire, en présence de M. MacIver et de M. M. MacIntyre, le directeur de l'éducation. Les supérieurs de Mme Bernard s'inquiétaient du fait que son conflit avec Allan Bernard causait du dérangement et affectait le moral à l'école. M. MacIntyre a également émis des préoccupations au sujet du fait que Mme Bernard ne faisait pas son travail, qu'elle ne donnait pas les messages, qu'elle s'était rendue dans une salle de professeurs où elle n'aurait pas dû être et qu'elle disait des choses au sujet d'autres professeurs. Il a indiqué que le but de la rencontre, comme toute autre rencontre avec un employé, était de cerner la cause du problème.

Durant la rencontre avec MM. MacIntyre et MacIver, Mme Bernard a montré à ceux-ci environ six flacons de médicaments qu'elle prenait. M. MacIntyre a indiqué qu'elle était à l'époque très égarée. Il a mentionné en outre qu'elle avait décrit les médicaments en question comme étant des stimulants et calmants, un médicament pour régulariser sa tension, un médicament pour les nerfs et l'angoisse et d'autres médicaments du genre. Il a également déclaré que Mme Bernard avait dit ne pas prendre ses médicaments, ce qui était une grande source d'inquiétude tant pour lui que pour que M. MacIver. En fait, il a allégué qu'ils s'inquiétaient tellement de sa santé qu'ils lui ont conseillé de prendre du repos. Mme Bernard a, semble-t-il, refusé de suivre leur conseil. Toutefois, au dire de M. MacIntyre, la rencontre a eu les effets souhaités et la situation s'est améliorée.

Vers la fin de septembre ou au début d'octobre 1995, Mme Bernard a assisté à une réunion du conseil scolaire afin d'y présenter une demande d'augmentation de salaire. Le directeur de l'école, Gordon MacIver, et le directeur de l'éducation, Angus MacIntyre, étaient eux aussi présents à cette réunion. M. MacIver se souvient que Mme Bernard a mentionné que Julianna Bernard venait de recevoir une importante augmentation de salaire. Cependant, Mme Bernard n'a pas été en mesure de convaincre le chef et les conseillers qu'elle méritait elle aussi une augmentation de salaire. Mme Bernard a laissé entendre qu'elle avait été insultée à cette réunion par le chef, Morley Googoo, celui-ci ayant insinué que tout ce qu'elle savait faire était répondre au téléphone. M. MacIver se souvient que lorsque Mme Bernard a quitté l'assemblée, elle était bouleversée et elle pleurait peut-être même. Mme Bernard était, de toute évidence, stressée et troublée.

III. INCIDENT DU 26 OCTOBRE

Octobre est le Mois de l'histoire micmaque dans les écoles de Waycobah. La coutume veut qu'on invite des conférenciers à faire des exposés aux élèves sur divers aspects du patrimoine micmac. Mme Bernard avait proposé de faire, ou avait été invitée à faire, un exposé aux élèves de l'école secondaire premier/deuxième cycle le 26 octobre 1995 à titre de membre d'un groupe de conférenciers invités. Elle a eu des entretiens avec le directeur, Gordon MacIver, à propos du sujet de son exposé; toutefois, les éléments de preuve sont contradictoires quant à savoir si l'exposé devait porter sur les chants micmacs ou plus précisément sur un groupe particulier de joueurs de tambours, ou sur la culture micmaque en général. Il s'est avéré que Mme Bernard a décidé de traiter du sujet général et notamment de certains aspects de la spiritualité autochtone.

Le jour de l'exposé, Mme Bernard s'est présentée à l'école élémentaire où elle travaillait normalement, puis s'est rendue à l'école secondaire premier/deuxième cycle vers 9 heures. À son arrivée près de l'école secondaire, Mme Bernard a vu un groupe d'élèves âgés qui se bousculaient. Lorsqu'elle a passé devant eux, elle a elle aussi été poussée, ce qui, évidemment, l'a choquée. Terry Googoo était l'un des garçons faisant partie du groupe. Environ une semaine auparavant, Mme Bernard avait téléphoné au directeur, M. MacIver, pour qu'on envoie chercher un élève et une élève qui s'étaient enfermés à clé dans la salle de bain des employés de l'école élémentaire. L'élève était Terry Googoo; au dire de Mme Bernard, celui-ci n'était pas content qu'elle l'ait mis dans le pétrin.

Une fois à l'intérieur de l'école, Mme Bernard s'est rendue à la salle de classe où les exposés devaient avoir lieu. Dans son témoignage, elle a déclaré que les élèves ne se calmaient pas et chahutaient. Au moins quatre professeurs étaient présents, soit Mike Stewart, Phyllis Googoo, Victoria MacEachern et Lisa Lunney. Mme Bernard a indiqué que Mike Stewart avait entraîné avec lui quatre ou cinq élèves en dehors de la classe avant le début de l'exposé. Mme Bernard a commencé son exposé sur la culture autochtone, expliquant l'utilisation du tambour sacré et la façon d'apprendre à jouer du tambour. Elle a parlé des quatre couleurs de la spiritualité autochtone et des quatre directions. Elle a également parlé des dons que possédaient certains guides spirituels, dont celui de la télépathie. Elle a comparé la prière selon la tradition catholique romaine à la communication avec les esprits. Elle a indiqué que lorsqu'elle avait dit aux élèves que les personnes qui consomment de l'alcool ou des drogues ne devraient pas devenir des joueurs de tambour, certains d'entre eux, dont Terry Googoo, ont été choqués et sont sortis de la salle. Par la suite, les autres élèves sont demeurés calmes pendant qu'elle faisait jouer l'Hymne à l'honneur à l'aide d'un magnétophone.

Mme Bernard a affirmé dans son témoignage que pendant que l'Hymne à l'honneur jouait, le directeur de l'éducation, Angus MacIntyre, est entré en trombe et avec beaucoup d'éclats dans la salle de classe en compagnie de Gordon MacIver et de John Hendsbee et a interrompu son exposé. Selon Mme Bernard, M. MacIntyre a exigé qu'elle ferme le magnétophone, à défaut de quoi elle serait congédiée. Elle a dit qu'elle s'est sentie déchirée, ne sachant pas si elle devait obéir à l'ordre de M. MacIntyre ou manquer de respect envers le Créateur en fermant le magnétophone. Bouleversée, elle a commencé à pleurer. Elle a mentionné que M. MacIntyre lui avait demandé si elle prenait ses médicaments. Margaret Pelletier, une infirmière qui était elle aussi à l'école pour y faire un exposé, a été priée de la ramener à la maison.

Le souvenir que Mme Bernard a de l'exposé qu'elle a présenté aux élèves de l'école secondaire premier/deuxième cycle diffère à certains égards de la description qu'en ont faite d'autres témoins. Phyllis Googoo a déclaré dans son témoignage que Mme Bernard semblait contrariée même avant de commencer son exposé, notamment parce que les enfants étaient excités et ne se calmaient pas. Elle a indiqué qu'un garçon, Terry Googoo, l'avait toisée et qu'elle n'avait pas aimé cela. Elle a dit aux élèves qu'elle n'avait pas peur de qui que ce soit dans la classe et qu'elle n'était pas intimidée. Il est possible que certains élèves aient pu interpréter cela comme une menace, étant donné que Mme Bernard était ceinture noire au taekwondo. Phyllis Googoo a déclaré dans son témoignage que Mme Bernard avait expliqué aux élèves le sens du chant « Ô Grand Esprit » et qu'elle avait parlé aux élèves du respect. Elle a ajouté que Mme Bernard s'était approchée de la petite amie de Terry Googoo, Debbie

Googoo, et lui avait dit : « Je connais ta mère. » Debbie a répondu que sa mère était décédée. Mme Bernard lui aurait alors dit : « je sais que ta mère est décédée. Je peux communiquer avec elle. » Cela a bouleversé Debbie qui a quitté la salle en compagnie de membres de sa parenté et d'amis. Phyllis Googoo est sortie elle aussi de la classe pour aller retrouver ces élèves. Elle a affirmé y être ensuite retournée pour prendre sa petite fille Cassandra, âgée de 13 ou 14 ans, « parce qu'elle était terrifiée par ce qui se passait » . Elle a affirmé qu'elle a ensuite téléphoné au bureau du conseil scolaire pour demander qu'Angus MacIntyre vienne à l'école, car elle avait de la difficulté à maîtriser la situation. Elle a également demandé au directeur, Gordon MacIver, de venir.

Margaret Pelletier, une infirmière qui travaille à l'hôpital de Baddeck et qui fait de l'action sociale dans la communauté de Waycobah, a également témoigné à l'audience. Elle a indiqué que M. MacIver lui avait demandé de faire un exposé sur les soins infirmiers mais qu'au dernier moment, on avait décidé de parler plutôt des survivants des pensionnats. Elle se souvient qu'un groupe d'élèves chahutait pendant l'exposé de Mme Bernard. Mme Bernard s'est rapproché de ces élèves et a dit à Debbie Googoo que sa mère ne serait pas très contente d'elle. Elle a également indiqué qu'elle pouvait parfois s'entretenir avec sa mère, même si celle-ci était décédée. Debbie a commencé à pleurer et a quitté la salle. Quatre ou cinq élèves l'ont suivie. Mme Pelletier est sortie elle aussi pour tenter de la calmer. Elle a affirmé qu'elle était agacée elle aussi, « car la jeune fille n'avait pas à entendre ce genre de choses » .

Mme Pelletier a affirmé dans son témoignage que M. MacIver lui avait demandé d'accompagner Mme Bernard afin de garder un úil sur elle parce qu'elle était bouleversée. Elle s'est rendue à l'école élémentaire en compagnie de Mme Bernard, puis a ramené cette dernière à la maison. Elle a dit que Mme Bernard lui avait parlé d'une lettre qui était sur une disquette à l'école et qui « expliquerait à M. MacIver pourquoi elle quittait » .

Angus MacIntyre, le directeur de l'éducation, a déclaré dans son témoignage qu'il participait à une réunion dans un restaurant avec le directeur, le directeur adjoint et un consultant lorsqu'il a reçu un appel téléphonique lui indiquant qu'il y avait un problème à l'école. M. MacIntyre a été informé en entrant à l'école que Mme Bernard avait bouleversé Debbie Googoo en lui parlant de sa mère décédée. En entrant dans la salle de classe, il a vu Mme Bernard assise les jambes croisées qui faisait jouer de la musique sur un magnétophone. Il se souvient que l'une des premières choses que Mme Bernard lui a dites était que les élèves étaient irrespectueux . Il l'a invitée à fermer le magnétophone et à céder la place au prochain conférencier. Toutefois, elle voulait continuer de faire jouer le magnétophone. Il a fallu raisonner avec elle pendant cinq ou dix minutes avant qu'elle accepte de les suivre dans le corridor. Il lui a demandé de retourner à son bureau, mais elle a insisté pour retourner dans la salle de classe. Elle a ensuite dit à M. MacIntyre qu'elle n'allait pas demeurer au service du conseil scolaire. M. MacIntyre a demandé à Margaret Pelletier de l'accompagner et de veiller à ce qu'elle rentre à la maison en toute sécurité. Durant le contre-interrogatoire, M. MacIntyre a déclaré ne pas avoir élevé la voix ni crier et qu'il lui avait simplement parlé sur un ton ferme. Il se souvient également de lui avoir demandé si elle prenait ses médicaments. Il a également dit à Mme Bernard de ne pas retourner à l'école tant qu'elle n'aurait pas reçu de ses nouvelles.

Gordon MacIver a déclaré dans son témoignage que Phyllis Googoo lui avait téléphoné pour lui demander de venir à l'école sans tarder. Au moment où il est entré dans la classe, Angus MacIntyre s'entretenait avec Mme Bernard. L'Hymne à l'honneur jouait sur le magnétophone. M. MacIver a présenté le prochain conférencier, puis a quitté la salle en compagnie de Mme Bernard et de M. MacIntyre. Il a demandé à Mme Bernard de retourner à l'école élémentaire, mais celle-ci a insisté pour retourner dans la salle de classe afin de faire jouer un autre chant. Lorsqu'il l'a accompagnée à l'extérieur de la classe la deuxième fois, il lui a demandé à nouveau de retourner à l'école élémentaire mais Mme Bernard lui a répondu : « je m'en fous, je quitte. » Mme Bernard est retourné éventuellement à l'école élémentaire où elle n'est demeurée que quelques minutes, avant que Mme Pelletier la raccompagne à la maison. Plus tard dans l'après-midi, Mme Pelletier est retournée à l'école élémentaire et a informé M. MacIver que Mme Bernard voulait qu'il lise une lettre qui était sur une disquette dans son bureau. M. MacIver a inséré la disquette dans l'ordinateur, puis a imprimé la lettre qui portait la date du 17 octobre 1995.

IV. RÉACTION DES DIRIGEANTS DE L'ÉCOLE

La lettre datée du 17 octobre 1995 était adressée à « Gordan » , c'est-à-dire en fait à M. MacIver. La lettre contenait, entre autres, les passages suivants : « S'il arrive que je ne suis plus avec vous...»; «...je sais que je ne serai plus ici très longtemps. » ; « J'ai accompli ma mission ici. » M. MacIver craignait que certaines des assertions indiquent qu'elle envisageait de se suicider. Cette lettre a suscité chez lui de l'inquiétude et des doutes. Il l'a montrée à M. MacIntyre et lui a fait part de son inquiétude. M. MacIntyre a communiqué aussitôt avec les Services micmacs à la famille pour leur demander d'envoyer un conseiller chez Mme Bernard. MM. MacIntyre et MacIver ont également téléphoné au service de police de la réserve à Eskasoni et lui ont lu la lettre. Dans son rapport sur l'incident, M. MacIver écrit que l'appel a été fait «... étant donné qu'on craignait qu'elle songe à se suicider » . M. MacIntyre a aussi téléphoné au frère de Mme Bernard, Robert, pour lui raconter ce qui s'était passé et lui indiquer que M. MacIver et lui s'inquiétaient de sa santé et de sa sécurité. Il a demandé à Robert d'aller jeter un coup d'oeil.

M. MacIntyre a aussi téléphoné au prêtre catholique, le révérend Dan MacLennan, pour l'informer de l'incident survenu à l'école secondaire premier/deuxième cycle et lui demander de venir expliquer aux élèves ce qui c'était produit.

Les conseillers de bande et les autres membres du conseil scolaire ont eux aussi été informés de l'incident par téléphone. M. MacIntyre a commencé à recueillir des rapports auprès des professeurs et du directeur. Il a également déclaré que des gens de la communauté téléphonaient pour demander qu'on prenne sur-le-champ des mesures, sans quoi ils retireraient leurs enfants de l'école, signifiant par là qu'ils les transféreraient à l'école du village de Waycocomah. Il a affirmé avoir prié instamment ces personnes de lui donner un peu de temps, mais qu'elles lui avaient dit que si Mme Bernard revenait à l'école, leurs enfants en seraient retirés. Ces personnes voulaient que des mesures soient prises sans tarder.

M. MacIntyre a rédigé un rapport d'enquête qui a été présenté au conseil scolaire dans la soirée du 27 octobre 1995. Dans son rapport, M. MacIntyre réitérait les assertions du père McLennan selon lesquelles, tard dans la soirée du 26 octobre, Mme Bernard était encore dans le même état d'esprit que durant la journée à l'école. Il a indiqué également que le père McLennan avait parlé à Mme Bernard dans la matinée du 27 et que celle-ci « continuait de répéter un bon nombre des choses qu'elle avait dites la veille au sujet de Dieu qui parlait par sa bouche, dont elle était le représentant, etc. » . Le rapport précisait : « Il était /est préoccupé par sa santé mentale, même s'il estimait que nous avions fait tout en notre pouvoir dans les circonstances. »

Dans l'après-midi du 27 octobre 1995, M. MacIntyre a rédigé l'ébauche d'une lettre à Mme Bernard visant à l'informer que son emploi au conseil scolaire de Waycobah prendrait fin à 9 h le lundi 30 octobre 1995. La lettre faisait référence à son relevé d'emploi, qui y était joint. L'ébauche en question a été télécopiée à l'avocat du conseil scolaire, qui a conseillé de ne rien y changer.

Le relevé d'emploi (le « RE » ) a été établi par le directeur administratif du conseil scolaire qui, à la demande de M. MacIntyre, a inscrit le code D comme motif d'établissement du RE, lequel signifie « maladie ou blessure » . L'ébauche de la lettre de cessation d'emploi a été incluse dans la documentation présentée au chef et aux conseillers. Le rapport de M. MacIntyre concluait : « Moyennant l'accord du conseil, je vais [l'expédier lundi] à moins d'ordres à l'effet contraire. »

Le chef et le conseil se sont réunis à 8 h le vendredi 27 octobre 1995. M. MacIntyre a affirmé dans son témoignage que d'autres options que la cessation d'emploi avaient été présentées à la réunion; toutefois, son rapport écrit ne fait état d'aucune autre option. M. MacIntyre a reconnu que, même avant que la réunion ne prenne fin, la décision de mettre fin à l'emploi sans tarder faisait l'objet d'un consensus. À la question à savoir si la réunion visait à approuver pour la forme le rapport fourni par Angus MacIntyre, le chef Morley Googoo a répondu « Oui » . On a également demandé au chef si d'autres options avaient été examinées, ce à quoi il a répondu : « Pas à ce moment-là, je ne crois pas. »

La lettre mettant fin à l'emploi et le RE ont été transmis à Mme Bernard.

V. LOI

L'article 7 de la LCDP se lit en partie comme suit :

Constitue un acte discriminatoire, s'il est fondé sur un motif de distinction illicite, le fait, par des moyens directs ou indirects :

a) de refuser d'employer ou de continuer d'employer un individu;

La déficience est un des motifs de distinction illicite.

La LCDP n'indique pas expressément qu'une déficience apparente est un motif suffisant de distinction. D'autres lois sur les droits de la personne, notamment la Human Rights Act de la Nouvelle-Écosse, R.S.N.S. 1989, c. 214, telle que modifiée par S.N.S. 1991, c. 12, article 4, fait état de déficiences apparentes. Cependant, nos tribunaux ont édicté le principe qu'on doit interpréter la législation sur les droits de la personne d'une façon suffisamment vaste et libérale pour atteindre l'objectif consistant à supprimer la discrimination. En vertu de ce principe, divers tribunaux ont inclus divers troubles médicaux tels que la malformation congénitale, l'obésité, la dépression nerveuse et le syndrome d'immuno-déficience acquise (SIDA) dans la définition de déficience. De même, cette approche à l'égard de la législation sur les droits de la personne a entraîné la reconnaissance que l'intention n'est pas un facteur servant à déterminer si un acte discriminatoire a effectivement été commis, et qu'il n'est pas vraiment nécessaire qu'il existe une anomalie qui fasse l'objet de discrimination s'il existe une perception subjective, voire erronée, de l'existence de cette anomalie. Voir : Québec (Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse) c. Montréal (Ville) [1998] A.Q. no 369, paragraphes 90 à 93.

Dans les affaires de discrimination ayant trait à l'emploi, il incombe au plaignant d'établir que l'acte reproché a toutes les apparences d'un acte discriminatoire. Une fois que c'est fait, il incombe au mis-en-cause de fournir une explication raisonnable de l'acte qui lui est reproché (Commission ontarienne des droits de la personne c. Etobicoke [1982] 1 R.C.S. 202 à 208 et Commission ontarienne des droits de la personne et O'Malley c. Simpson Sears Limited [1985] 2 R.C.S., 536 à 558).

L'article 15 prévoit en partie que :

Ne constituent pas des actes discriminatoires :

a) les refus, exclusions, expulsions, suspensions, restrictions, conditions ou préférences de l'employeur qui démontre qu'ils découlent d'exigences professionnelles justifiées;

Une preuve suffisante à première vue est une preuve qui porte sur les allégations qui ont été faites et qui, si l'on y ajoute foi, est complète et suffisante pour justifier un verdict en faveur du plaignant, en l'absence de réplique de l'intimé (O'Malley, supra, p. 558). Les allégations formulées par le plaignant doivent être dignes de foi pour corroborer la conclusion qu'il existe une preuve suffisante à première vue (Dhanjal c. Air Canada, [1997] F.J.J. no 1599, (1997) 139 F.T.R. 37).

Si l'intimé fournit une explication raisonnable quant au présumé comportement discriminatoire, il revient au plaignant de démontrer que celle-ci ne constitue qu'un prétexte et que le comportement de l'employeur était effectivement empreint de discrimination (Israeli c. Commission canadienne des droits de la personne, 4 C.H.R.R. D/1616 à la p. 1617 (confirmé par 5 C.H.R.R. D/2147) et Basi c. Compagnie des chemins de fer nationaux du Canada (1988), 9 C.H.R.R. D/5029.)

Il est souvent difficile d'établir, à l'aide de preuves directes, qu'il y a eu discrimination. Comme on l'a fait remarquer dans l'affaire Basi (supra, D/5038) :

La discrimination n'est pas un phénomène qui se manifeste ouvertement, comme on serait porté à le croire. Il est rare en effet qu'on puisse prouver par des preuves directes qu'un acte discriminatoire a été commis intentionnellement.

La décision rendue dans l'affaire Basi indique qu'il incombe au tribunal d'examiner toutes les circonstances pour déterminer s'il existe de « subtiles odeurs de discrimination » .

Le degré de preuve qui s'applique aux affaires de discrimination est le degré de preuve civile ordinaire, c'est-à-dire la prépondérance. Dans les cas de preuve circonstancielle, le critère à retenir est formulé de la manière suivante :

« On peut conclure à la discrimination quant la preuve présentée à l'appui rend cette conclusion plus probable que n'importe quelle autre conclusion ou hypothèse possible. » (B. Vizkelety, Proving Discrimination in Canada (Toronto), Carswell, 1987, p. 142.)

Dans l'affaire Basi (supra, D/5040), on adopte le critère supplémentaire suivant :

Le mis-en-cause ne se trouve pas réfuter de manière suffisante une conclusion de discrimination du seul fait de pouvoir proposer une explication rationnelle; il doit fournir une explication qui soit crédible tout au long de la preuve; voir Fuller c. Candur Plastics Ltd. (1981) 2 C.H.R.R. D/419.

Il suffit de parvenir à la conclusion que la discrimination est l'un des motifs pour lesquels le mis-en-cause a commis l'acte reproché; il n'est pas nécessaire qu'il s'agisse de la seule raison ou de la raison principale qui a motivé cette décision. Voir Basi c. Compagnie des chemins de fer nationaux du Canada (1988), 9 C.H.R.R. D/5029 (T.D.P.), paragraphes 38496, 38497 et 38498; Holden c. Compagnie des chemins de fer nationaux du Canada (1990), 14 C.H.R.R. D/12 (C.A.F.), page D/15; Canada (Procureur général) c. Uzoaba (1995) 26 C.H.R.R., D/428 à la p. D/431; et Canada (Commission canadienne des droits de la personne) c. Canada (ministère de la Santé nationale et du Bien-être social) (dans l'affaire de Chopra) [1998] F.C.J. no 432, confirmé dans Cour d'appel fédérale, [1997] F.C.J. no 40.

VI. ANALYSE

Mme Bernard a allégué que le conseil scolaire de Waycobah avait exercé à son endroit une discrimination au niveau de l'emploi en mettant fin à son emploi en raison d'une déficience mentale apparente, en contravention de l'article 7 de la LCDP. Je suis convaincu que la plaignante a fait valoir dans les faits des arguments irréfutables établissant que l'acte reproché a toutes les apparences d'un acte discriminatoire.

À mon avis, la déficience mentale apparente a été l'un des facteurs qui ont amené l'employeur à mettre fin à l'emploi. Le chef de la bande, le directeur de l'éducation et le directeur de l'école, qui étaient tous présents à la réunion du conseil scolaire dans la soirée du 27 octobre 1995, soutiennent que l'unique raison de la destitution de Mme Bernard de son poste de secrétaire de l'école élémentaire était la menace des parents de retirer leurs enfants de l'école communautaire si l'on ne mettait pas fin sans tarder à son emploi. D'autre part, il existe beaucoup de témoignages non contredits selon lesquels les personnes à qui il incombait de recommander ou de prendre la décision de mettre fin à l'emploi de Mme Bernard ont été influencées par la perception, voire par la croyance, que Mme Bernard souffrait de troubles mentaux. Une liste partielle des gestes et événements qui m'amènent à cette conclusion figure ci-après.

La réunion avec le directeur de l'éducation, M. MacIntyre, et le directeur de l'école, M. MacIver, au début d'octobre, où Mme Bernard a révélé qu'elle prenait des médicaments pour la tension, les nerfs et l'angoisse. On a décrit Mme Bernard comme égarée et ayant besoin de repos.

La réunion du conseil scolaire à la fin de septembre ou au début d'octobre, où Mme Bernard a demandé une augmentation de salaire, laquelle lui a été refusée. Il semble qu'elle était très énervée et troublée lorsqu'elle a quitté l'assemblée.

M. MacIntyre a demandé à Mme Bernard si elle prenait encore ses médicaments peu après avoir interrompu l'exposé qu'elle présentait aux élèves de l'école secondaire premier/deuxième cycle.

Mme Pelletier, l'infirmière, a dit qu'elle avait été priée d'accompagner Mme Bernard lorsque celle-ci a quitté l'école secondaire premier/deuxième cycle « pour garder un úil sur elle » . Mme Pelletier l'a accompagnée jusqu'à l'école élémentaire puis jusqu'à la maison, et elle a passé beaucoup de temps avec elle après l'incident.

Après avoir récupéré la lettre datée du 17 octobre dans l'ordinateur et l'avoir lue, M. MacIver était tellement inquiet qu'il puisse s'agir d'une note de suicide qu'il l'a montrée aussitôt au directeur, M. MacIntyre.

M. MacIntyre a téléphoné au frère de Mme Bernard, Robert, pour le mettre au courant de l'incident et lui conseiller de rendre visite à sa súur « pour s'assurer qu'il n'y avait pas de danger pour sa santé et sa sécurité » .

M. MacIntyre a téléphoné aux Services micmacs à la famille pour leur demander d'envoyer un conseiller chez Mme Bernard « pour s'assurer que tout allait bien » .

M. MacIntyre a téléphoné au service de police de la réserve à Eskasoni pour l'informer que la lettre datée du 17 octobre constituait peut-être une note de suicide et qu'il « s'inquiétait de sa sécurité » .

M. MacIntyre a téléphoné au prêtre de la paroisse, le père MacLennan, qui a rendu visite à Mme Bernard le soir même et qui a indiqué à M. MacIntyre le lendemain qu'il « s'inquiétait de la santé mentale de Mme Bernard » .

Dans le rapport écrit qu'il a présenté au conseil scolaire le 27 octobre, M. MacIntyre indique qu'il a demandé à Janet si elle prenait ses médicaments; mentionne qu'il a fait raccompagner Janet à la maison par Mme Pelletier; fait état de la lettre du 17 octobre qu'il avait jointe à son rapport à tous les membres du conseil scolaire afin qu'ils puissent la lire; fait mention de l'appel à Robert Bernard afin de demander à celui-ci qu'il rende visite à Janet pour s'assurer qu'il n'y avait pas de danger pour sa santé et sa sécurité; fait référence aux appels d'urgence aux Services micmacs à la famille, au prêtre de la paroisse et au service de police de la réserve; fait état de la rencontre que le père Dan a eue avec Janet dans la matinée du 27 et du fait qu'il avait trouvé que celle-ci était encore bouleversée; signale le fait que le père Dan s'inquiétait de la santé mentale de Mme Bernard; et mentionne que l'avocat du conseil scolaire avait revu la lettre de cessation d'emploi avant la réunion du conseil scolaire.

Le motif inscrit sur le relevé d'emploi est « maladie » . Le directeur de l'éducation a choisi ce motif, même s'il existait d'autres options possibles (p. ex., « démission » , « renvoi » , « autre » ).

Il se peut que la décision de mettre fin à l'emploi de Mme Bernard comme secrétaire de l'école élémentaire ait été influencée dans une certaine mesure par les menaces des membres de la communauté de Waycobah de retirer leurs enfants de l'école communautaire; toutefois, j'estime que le conseil scolaire et son conseiller, M. MacIntyre, étaient persuadés que Mme Bernard était atteinte de troubles mentaux. L'empressement avec lequel le conseil scolaire a agi et le fait qu'il n'ait pas donné à Mme Bernard l'occasion d'expliquer le comportement qu'elle avait manifesté à l'école secondaire premier/deuxième cycle vont de pair avec le jugement du conseil scolaire et de ses conseillers voulant que Mme Bernard souffrait de troubles mentaux et qu'il était inutile, par conséquent, de discuter avec elle de l'incident.

Même si les menaces des parents de retirer leurs enfants de l'école communautaire étaient peut-être réelles, le conseil scolaire ne peut, dans la mesure où ces menaces étaient elles mêmes fondées sur un motif de distinction, justifier son propre comportement en reprochant aux parents de l'avoir amené à poser un geste discriminatoire. B. Vizkelety, dans son ouvrage intitulé Proving Discrimination in Canada (Toronto) : Carswell, 1987), indique à la page 137 :

Il arrive qu'un mis-en-cause tente de justifier un traitement inégalitaire en rejetant le blâme sur d'´ autres personnes » ; toutefois, dans un tel cas, la discrimination n'en est pas moins réelle et évidente. En outre, les objections de ces « autres personnes » en supposant qu'elles soient réelles ó peuvent être elles mêmes fondées sur des préjugés ou des stéréotypes.

Il semble que, dans les heures qui ont suivi l'incident à l'école secondaire premier/deuxième cycle, la rumeur se soit répandue parmi les étudiants et dans la communauté de Waycobah que Mme Bernard était « folle » . Mme Bernard a indiqué dans son témoignage que, le jour de l'incident, elle avait amené son fils de huit ans voir le père MacLennan car il était très agacé que d'autres étudiants lui disent « Ta mère est folle » . Cette perception, qui originait de la collectivité dans son ensemble ou qui y était entretenue, ne peut excuser le comportement de l'employeur de Mme Bernard. La façon sommaire dont le conseil scolaire a réagi aux demandes voulant qu'on mette fin sans tarder à l'emploi de Mme Bernard est résumée dans l'interrogatoire du chef Morley Googoo (pages 713 et 714 de la transcription) :

Q. Décririez-vous ce qui s'est produit comme une approbation pour la forme du rapport fourni par Angus MacIntyre?

R. Oui.

Q. Qu'est-ce qu'Angus MacIntyre a recommandé?

R. Angus MacIntyre s'est surtout prononcé en faveur du renvoi. Beaucoup de parents ont dit qu'ils retireraient leurs enfants de l'école. Ils étaient pour le faire si la situation n'était pas prise en main. Notre communauté est une très petite communauté. Ces événements ont vraiment agacé et inquiété beaucoup de gens. Nous étions nous aussi très inquiets lorsqu'on nous a fait part de tout ce qui s'était produit. Nous avons rendu une décision en nous fondant sur les gestes posés. Nous les avons jugés déplacés et nous avons décidé de mettre fin à l'emploi.

Q. A-t-on examiné d'autres options que la cessation d'emploi?

R. Pas à ce moment-là, je ne crois pas (Ö).

En affirmant à l'audience que la déficience mentale apparente n'a aucunement influé sur la décision de mettre fin à l'emploi de Mme Bernard, l'employeur n'a aucunement tenté d'invoquer comme moyen de défense que l'acte discriminatoire était fondé sur une exigence professionnelle justifiée. Le conseil scolaire intimé s'est plutôt contenté d'invoquer les protestations de certains membres de la communauté qui exigeaient le renvoi de Mme Bernard, à défaut de quoi ils enverraient leurs enfants dans une autre école, pour défendre sa décision de mettre fin à son emploi comme secrétaire de l'école élémentaire.

Cependant, la preuve démontre que la déficience mentale apparente, ou la croyance que Mme Bernard était « folle » , expliquait dans une très large mesure la réaction de la communauté face à l'incident. L'employeur n'était pas justifié de se servir de cela comme excuse pour mettre fin à l'emploi de Mme Bernard, étant donné que les protestations de la population étaient elles-mêmes fondées sur la croyance collective que Mme Bernard devait être dérangée mentalement pour avoir fait ce qu'elle avait fait. Autrement dit, les protestations de la population constituaient une exhortation à exercer une discrimination fondée sur un motif illicite. Je suis également d'avis, en tout état de cause, que le conseil scolaire a agi sur la recommandation du directeur de l'éducation et que son rapport au conseil scolaire était teinté, voire totalement empreint, de la perception que Mme Bernard était atteinte de troubles mentaux. Je juge donc que le conseil scolaire de Waycobah, en refusant de continuer d'employer Mme Bernard, a commis un acte discrinatoire fondé sur un motif de distinction illicite, à savoir la déficience mentale apparente.

VII. MESURES CORRECTIVES

Compte tenu de ma conclusion à savoir que le conseil scolaire de Waycobah a commis un acte discriminatoire, il me reste maintenant à déterminer les mesures correctives à prendre à l'endroit de Mme Bernard. À cet égard, je m'en remets à l'article 53 de la Loi, ainsi qu'à la jurisprudence qui a établi que dans les affaires de discrimination, le but de l'indemnisation est de réparer le tort causé à la victime de l'acte discriminatoire, compte tenu des principes de la prévisibilité raisonnable et du caractère lointain du dommage. (Voir Canada (Procureur général c. McAlpine [1989] 3 C.F. 530).

i) Salaire perdu

L'alinéa 53(2)c) de la Loi prescrit que lorsqu'il juge une plainte fondée, le Tribunal peut ordonner à la personne trouvée coupable d'un acte discriminatoire d'indemniser la victime de la totalité, ou de la fraction des pertes de salaire et des dépenses entraînées par l'acte.

La Commission et Mme Bernard ont demandé que Mme Bernard soit indemnisée de la perte de revenu subie entre le 27 octobre 1995 et la date de la présente décision, moins le montant qu'elle a reçu du conseil de bande de Waycobah sous forme de prestations hebdomadaires d'aide sociale pendant une partie de cette période. L'intimé, le conseil scolaire de Waycobah, a fait valoir qu'aux fins de la détermination du salaire perdu, je devrais tenir compte des prestations d'assurance-emploi reçues par Mme Bernard au cours de la période de 52 semaines qui a suivi sa cessation d'emploi et que la période visée par le calcul devrait prendre fin le 14 février 1997, soit la date où le conseil scolaire a été démantelé et où l'on aurait vraisemblablement mis fin à l'emploi de Mme Bernard en raison de la restructuration du système de gestion scolaire.

En ce qui concerne d'abord la question des prestations d'assurance-emploi touchées par la victime à la suite de sa cessation d'emploi, je suis d'avis que l'article 45 de la Loi sur l'assurance-emploi, L.C. 1996, c. 23, exige que l'employé, dans les cas où on lui accorde des dommages-intérêts, rembourse au receveur général toute prestation d'assurance-emploi reçue au cours de la même période. En outre, l'article 46 de la Loi sur l'assurance-emploi exige que tout employeur auquel on ordonne d'indemniser une victime du salaire perdu s'enquière du remboursement dû au receveur général, déduise le montant en question de la rémunération qu'il doit payer et le remette au receveur général à titre de remboursement d'un versement excédentaire de prestations. Je m'abstiendrai donc de déduire quoi que ce soit du montant attribué à titre de dommages-intérêts au titre du salaire perdu, et je laisserai aux parties le soin de déterminer qui remboursera au receveur général le montant qui lui est dû, conformément à la loi.

En ce qui concerne la période de temps sur laquelle on doit se fonder pour calculer le salaire perdu, je suis d'avis que la prétention de l'intimé, le conseil scolaire de Waycobah, selon laquelle on aurait mis fin à l'emploi de Mme Bernard le 14 février 1997, relève pour dire le moins de la spéculation. Selon le témoignage du chef Morley Googoo, lorsque le conseil de bande a restructuré l'administration scolaire et démantelé le conseil scolaire, la personne qui agissait comme commis aux finances du conseil scolaire, soit Julianna Bernard, a été « refoulée » vers le poste de secrétaire de l'école, poste qu'elle avait occupé pendant peut-être douze ans, avant d'accéder au poste qu'elle détenait au bureau du conseil scolaire.

Bien que les parties n'aient produit aucun élément de preuve en ce qui concerne le salaire versé à Julianna Bernard à titre de commis aux finances, nous savons que le fait que Julianna Bernard ait reçu une importante augmentation de salaire était l'une des raisons qui avaient incité Mme Bernard à se rendre à la réunion du conseil scolaire vers la fin de septembre ou le début d'octobre 1995 pour demander une augmentation de salaire. Aucun élément de preuve n'a été présenté pour démontrer que Julianna Bernard était disposée à accepter le poste de secrétaire de l'école au salaire que touchait Mme Bernard. En outre, aucun élément de preuve n'incite à croire que Julianna Bernard avait le droit de « supplanter » la secrétaire de l'école, pour des raisons d'ancienneté ou pour d'autres motifs, au moment de la suppression du poste de commis aux finances. D'autre part, la preuve indique que Mme Bernard était une secrétaire très compétente et que, abstraction faite du différend qu'elle avait eu avec Allan Bernard et qui avait rendu le personnel mal à l'aise pendant une brève période en septembre ou octobre 1995, son rendement à titre de secrétaire de l'école n'était pas mis en doute. Je ne suis pas convaincu que Mme Bernard aurait perdu son poste de secrétaire de l'école le 14 février 1997 par suite de la restructuration qui est entrée en vigueur à cette date. Par conséquent, la période sur laquelle porte le calcul du salaire perdu doit aller jusqu'à la date de la présente décision.

Après la période de 52 semaines où des prestations d'assurance-emploi lui ont été versées, Mme Bernard a reçu directement du conseil de bande de Waycobah une prestation hebdomadaire d'aide sociale de 119 $. Cette prestation s'ajoutait aux autres avantages dont elle bénéficiait à titre de membre de la communauté de Waycobah (p. ex., logement, services publics). Elle aurait bénéficié de ces avantages, qu'elle ait été au service du conseil scolaire ou non. Étant donné que le conseil scolaire et le conseil de bande de Waycobah ont constamment été une seule et même entité à toutes fins pratiques, toutes les parties sont d'avis que je dois déduire de l'indemnité accordée au titre du salaire perdu, le montant reçu du conseil de bande au titre de l'aide sociale. Je souscris à cette prétention.

Mme Bernard a droit d'être indemnisée du salaire perdu à compter de la date de son renvoi le 27 octobre 1995 jusqu'à celle de la présente décision, ce qui représente une période de 187 semaines, au taux de 325 $ par semaine, moins les prestations hebdomadaires de 119 $ qu'elle a reçues au titre de l'aide sociale durant 135 semaines. Par conséquent, le calcul est le suivant :

Revenu perdu durant 187 semaines 60 775 $

Moins : Prestations d'aide sociale, 135 semaines -16 065 $

Perte de salaire nette 44 710 $

Qu'il s'agisse d'une affaire civile ou d'une affaire en matière de droits de la personne, le tribunal doit, lorsqu'il accorde une indemnité au titre du salaire perdu, déterminer si le plaignant a fait des efforts pour limiter cette perte en cherchant un autre emploi ou une autre source de rémunération. Mme Bernard a indiqué dans son témoignage qu'elle avait posé sa candidature à d'autres postes auprès du conseil de la réserve de la Première nation de Waycobah ainsi qu'à des emplois en dehors de la réserve, mais que ses efforts n'avaient pas porté fruit. Bien que la preuve à cet égard soit limitée, je suis conscient qu'il incombe au mis-en-cause dans les cas de renvoi abusif de convaincre le tribunal que le plaignant n'a pas pris des mesures raisonnables pour limiter ses pertes. À la page 234 de son ouvrage intitulé The Law of Dismissal in Canada (Aurora : Canada Law Book, 1985), Levitt précise ce qui suit :

« Il incombe à l'employeur de prouver d'abord que l'employé n'a pas limité sa perte et ensuite qu'il aurait trouvé un autre poste comparable s'il en avait cherché un. »

Deux des témoins, soit Robert Bernard et le chef Morley Googoo, ont déclaré dans leur témoignage que le taux de chômage dans la réserve de la Première nation de Waycobah était généralement supérieur à 80 p. 100 et qu'un grand nombre des personnes qui ont un emploi sont des employés du conseil du bande de Waycobah. Il n'est donc pas étonnant que l'employeur n'ait pas cité à comparaître de témoins pour indiquer qu'il existe dans la communauté ou à proximité des postes semblables à celui duquel Mme Bernard a été destituée.

En déterminant si Mme Bernard a fait des efforts pour limiter ses pertes, je suis conscient de la situation particulière dans laquelle se trouve Mme Bernard à titre de membre d'une communauté des Premières nations. Mme Bernard est née et a été élevée dans la réserve de la Première nation de Waycobah. Bien qu'elle ait vécu en dehors de la réserve pendant un certain temps afin de poursuivre ses études et ses intérêts professionnels, elle est délibérément revenue à sa communauté d'origine pour vivre près de sa famille et être avec les siens. C'est dans cette communauté qu'elle veut élever son fils. Son appui au système scolaire communautaire, où la langue et la culture autochtones étaient également enseignées et pratiquées, était indéniable. Son lieu de résidence est Waycobah et elle a droit aux avantages au titre du logement et aux autres avantages dont elle ne bénéficierait pas si elle vivait en dehors de la réserve. À moins qu'elle et son fils quittent la réserve de la Première nation de Waycobah, Mme Bernard avait, et a encore, peu de chances de trouver un emploi similaire à celui qu'elle occupait à titre de secrétaire de l'école. Je suis convaincu que, dans les circonstances, Mme Bernard a tenté de limiter sa perte mais qu'elle a été incapable, sans qu'elle y soit pour quelque chose, de trouver un autre emploi.

ii) Réintégration

La Commission et Mme Bernard demandent la réintégration dans un poste de secrétaire comportant des fonctions comparables à celles exercées avant le renvoi. Il semble que l'avocate de la Commission et celui de la plaignante soient conscients que le paragraphe 54(2) de la LCDP ne permette pas le retrait d'un employé d'un poste qu'il a accepté de bonne foi. Il n'y a qu'un poste de secrétaire d'école dans la réserve de la Première nation de Waycobah et il est occupé par Julianna Bernard. Rien n'indique que Julianna Bernard n'ait pas accepté ce poste de bonne foi. Cela étant, il faut se demander si le conseil de bande de Waycobah pourrait composer avec une ordonnance exigeant la réintégration de Mme Bernard dans un poste similaire.

Le conseil de bande de Waycobah est le principal employeur de la réserve de la Première nation de Waycobah. Mme Bernard a postulé sans succès divers emplois dans la réserve depuis son renvoi du poste de secrétaire de l'école. Je suis d'avis que le Conseil de bande de Waycobah pourrait trouver pour Mme Bernard un poste de secrétaire similaire s'il y avait une incitation suffisante, c'est-à-dire si Mme Bernard continuait de toucher un salaire de 325 $ par semaine à compter de la date de la présente décision jusqu'à celle où une offre d'emploi lui serait faite. Cette offre doit concerner un poste qui correspond aux compétences, à l'expérience et à la formation de Mme Bernard et doit comporter une rémunération égale ou supérieure à celle qu'elle touchait à titre de secrétaire de l'école.

En ce qui concerne la réintégration, j'ordonne au conseil de bande de Waycobah d'offrir à Mme Bernard, à la première occasion raisonnable, un poste de secrétaire comportant des fonctions et responsabilités similaires à celles qu'elle exerçait à titre de secrétaire de l'école. Jusqu'à ce que Mme Bernard commence à occuper un tel emploi, le conseil de bande de Waycobah doit continuer de lui verser un salaire de 325 $ par semaine à compter de la date de la présente décision. Si une offre d'emploi raisonnable n'est pas faite à Mme Bernard dans un délai raisonnable, ou s'il surgit un différend quant aux modalités d'une telle offre, je me réserve la possibilité d'entendre d'autres témoignages et de me pencher sur la question à la demande de l'ensemble des parties ou de l'une d'elles.

III) Indemnité spéciale

Avant d'être modifié en 1998, le paragraphe 53(3) de la LCDP prescrivait que s'il en venait à la conclusion que l'acte avait été délibéré ou inconsidéré, ou si la victime de l'acte discriminatoire en avait souffert un préjudice moral, le Tribunal pouvait ordonner le versement d'une indemnité maximale de 5 000 $.

En l'espèce, le conseil scolaire a fait preuve à mon avis de négligence quant à sa façon de procéder pour mettre fin à l'emploi de Mme Bernard en raison de sa déficience mentale apparente. L'incident qui a amené le conseil scolaire à envisager le renvoi de Mme Bernard n'était pas lié à son emploi de secrétaire de l'école élémentaire. L'empressement avec lequel les rapports de l'incident ont été établis, les nombreuses communications avec des organismes et personnes à l'extérieur au sujet de la santé de Mme Bernard, le fait qu'on n'ait pas fourni à Mme Bernard la possibilité de se faire entendre avant son renvoi et la vitesse avec laquelle la décision de mettre fin à son emploi a été prise sont autant d'éléments permettant de conclure que l'employeur s'est comporté de façon négligente.

La question à savoir si Mme Bernard a souffert ou a été blessée dans son amour-propre par suite de son renvoi pour des motifs discriminatoires est encore plus évidente. Mme Bernard était un membre accompli et respecté de la communauté micmaque. Elle se considérait comme une guide spirituelle, même si tous les membres de la collectivité ne la percevaient pas comme telle. Le fait que Mme Bernard ait été renvoyée pour cause de maladie est vite devenu de notoriété publique. Mme Bernard a indiqué dans son témoignage que son fils de huit ans faisait l'objet de sarcasmes du genre « Ta mère est folle » et qu'elle a dû éventuellement l'inscrire à l'école du village de Waycobah. Le fait que Mme Bernard ait été interrogée par des représentants de l'assurance-emploi au sujet de sa prétendue maladie et qu'on lui ait demandé des attestations médicales l'a également mise dans l'embarras.

Mme Bernard a affirmé que le fait de perdre son emploi pour cause soi-disant de maladie l'a blessée dans son amour-propre. Elle a trouvé difficile de continuer de pratiquer la spiritualité autochtone. Le refus du conseil de bande de lui offrir un autre emploi met en relief son sentiment que certaines personnes au sein de la communauté ne la considèrent pas suffisamment bien pour occuper un emploi. Elle ne trouve plus autant de plaisir à participer à la culture autochtone qu'elle en éprouvait avant d'être étiquetée malade mentale par son employeur.

Compte tenu de la négligence manifestée par l'employeur ainsi que des souffrances et de la perte d'amour-propre subies par Mme Bernard, j'ordonne au conseil de bande de Waycobah de lui verser 5 000 $ à titre d'indemnité spéciale.

iv) Intérêts

Dans l'affaire Canada (Forces armées) c. Morgan (1991) 21 C.H.R.R. D/87

(C. A. F.), on a soutenu que les tribunaux étaient justifiés de croire que leur pouvoir d'indemniser la victime de façon adéquate les autorisait à accorder des intérêts. Des intérêts doivent être accordés uniquement si l'on juge que cela est nécessaire pour couvrir la perte (paragraphe 18, page D/94). Je suis d'avis que Mme Bernard doit toucher des intérêts sur la perte de salaire nette qu'elle a subie à compter du moment de son renvoi jusqu'à la date de la présente décision. Comme aucun élément de preuve n'indique que Mme Bernard a été contrainte d'emprunter de l'argent pour compenser sa perte de salaire nette, il semble que l'objectif d'indemnisation serait atteint en accordant à Mme Bernard des intérêts au taux dont elle aurait bénéficié de temps à autre si son argent avait été placé. À cet égard, le taux d'intérêt devrait être calculé en se fondant sur le taux des obligations d'épargne du Canada.

J'ai déjà souligné que Mme Bernard ou l'intimé devra rembourser au receveur général le versement excédentaire de prestations. Comme il ne semble pas y avoir d'obligation de payer des intérêts au receveur général, j'ordonne que des intérêts simples soient versés à Mme Bernard seulement sur la différence entre le salaire qu'elle aurait reçu, soit 325 $ par semaine, et le montant qu'elle a touché à titre de prestations d'assurance-emploi durant les 52 semaines qui ont suivi sa cessation d'emploi. Par la suite, des intérêts simples doivent être payés sur sa perte de salaire nette, soit sur la différence entre le salaire qu'elle aurait reçu, c'est-à-dire 325 $ par semaine, et le montant qu'elle a touché à titre de prestations d'aide sociale, soit 119 $ par semaine, jusqu'à la date de la présente décision.

Compte tenu, d'une part, de la variation des taux d'intérêt depuis octobre 1995 et, d'autre part, du fait que la perte de salaire se soit accumulée sur une base hebdomadaire, je suis d'avis qu'il serait équitable de calculer de la façon suivante les intérêts accumulés jusqu'à ce jour :

Pour la perte de salaire subie durant la période de 52 semaines où des prestations d'assurance-emploi ont été versées, c'est-à-dire du 27 octobre 1995 au 25 octobre 1996 (la période d'assurance-emploi) :

Perte de salaire nette (période d'assurance-emploi)

x

Taux d'intérêt moyen des OEC durant la période de 52 semaines

x

52 semaines

2

52

PLUS

Perte de salaire nette (période d'assurance-emploi)

x

Taux d'intérêt moyen des OEC durant les 135 dernières semaines

x

135 semaines

52

Pour la perte de salaire subie après la période initiale de 52 semaines, c'est-à-dire entre le 26 octobre 1996 et le 28 mai 1999 (la période d'aide sociale) :

Perte de salaire nette (période d'aide sociale)

x

Taux d'intérêt moyen des OEC durant les 135 dernières semaines

x

135 semaines

2

52

Aucun intérêt n'est accordé à l'égard de l'indemnité spéciale, étant donné que, de toute façon, l'indemnité maximale (y compris les intérêts) est de 5 000 $. Voir Canada (Procureur général) c. Morgan (1991), 21 C.H.R.R. D/87 et Canada (Procureur général c. Hébert [1996] F.C.J. 1457.

v) Excuses

Mme Bernard a demandé au Tribunal d'ordonner que le conseil scolaire de Waycobah lui présente des excuses.

Dans les affaires où le comportement de l'intimé a été empreint d'insensibilité, les tribunaux ont ordonné que des excuses soient présentées -- voir Uzoaba c. Canada (Services correctionnels) (1994), 26 C.H.R.R. D/361, confirmé [1995], 2 C.F. 569 et Swan c. Canada (Forces armées) (1994), 25 C.H.R.R. D/312, modifiée (1995), 25 C.H.R.R. D/333 (C.F 1re inst.).

J'ai déjà traité des facteurs aggravants entourant le renvoi de Mme Bernard pour le motif de distinction illicite, sous la rubrique « Indemnité spéciale » . Je suis d'avis que l'employeur de Mme Bernard, qui est maintenant représenté par le chef et le conseil de la Première nation de Waycobah, devrait présenter par écrit des excuses à Mme Bernard dans les trente jours suivant la présente décision, et j'ordonne qu'il en soit ainsi.

vi) Correction du RE

Mme Bernard a également demandé qu'on corrige le RE pour le motif qu'un futur employeur pourrait en demander copie. La copie du RE présentée à l'audience précise qu'il s'agit d'un document protégé en vertu des dispositions de la Loi sur la protection des renseignements personnels et de la Loi sur l'accès à l'information. Je suis d'avis qu'il n'est pas nécessaire d'ordonner la correction de ce document. Toutefois, j'ordonne qu'une copie de la présente décision et qu'une copie de la lettre d'excuses soient versées au dossier personnel de Mme Bernard au bureau de la bande de la Première nation de Waycobah. Développement des ressources humaines Canada sera avisé de l'erreur quant à la désignation de la raison pour laquelle le RE a été établi, lorsque le versement excédentaire de prestations d'assurance-emploi sera remboursé au receveur général.

vii) Dépens

Me MacIsaac a représenté la plaignante, Mme Bernard, à l'audience. La Commission était représentée par Me Lalumière. Me MacIsaac a présenté de façon remarquable la preuve au nom de son client. Bien que Me MacIsaac et Me Lalumière se soient partagés la tâche d'interroger les témoins de la plaignante et de la Commission, c'est Me MacIsaac qui a contre-interrogé les témoins de l'intimé. Me MacIsaac a contribué à exposer la cause du plaignant, notamment grâce à un plaidoyer final bien présenté. C'est un fait bien connu, en outre, que dans le cas des plaintes touchant les droits de la personne, les intérêts représentés par la Commission ne sont pas toujours les mêmes que ceux du plaignant. Conformément au paragraphe 50(1) de la LCDP, le plaigant a le droit d'être représenté par son propre avocat; dans les cas où le plaignant obtient gain de cause, les dépens doivent être octroyés de façon à ne pas atténuer l'effet correctif de l'indemnité accordée.

J'adopte le raisonnement énoncé dans l'affaire Grover c. Canada (Conseil national de recherches du Canada) (1992), 18 C.H.R.R. D/1 à la page D/55 :

Si les réparations ont pour but d'indemniser intégralement et suffisamment le plaignant qui a été victime d'actes discriminatoires, alors à coup sûr la conséquence que constituent les dépens fait partie intégrante d'une réparation adéquate pour le plaignant qui a gain de cause. Nous estimons que la représentation de M. Grover par Me Bennett était tout à fait nécessaire et a constitué un élément très utile de la présentation de toute cette affaire. Nous ne voulons d'aucune façon laisser entendre que la preuve de la Commission n'a pas été présentée d'une manière totalement satisfaisante par Me Engleman, qui a occupé pour elle tout au long de l'instance. En effet, sa présentation a été également utile au tribunal. Nous accorderions donc à M. Grover les frais de son avocat dans la présente instance selon le tarif de la Cour fédérale.

L'intimé doit payer les frais de l'avocat de Mme Bernard selon le tarif de la Cour fédérale.

VIII) AUTRES QUESTIONS

i) Compétence

Dans l'exposé des détails et le mémoire exposant des points de droit qu'il a présentés préalablement à l'audience, l'intimé prétend que le Tribunal canadien des droits de la personne n'est pas habilité à juger cette affaire, étant donné que l'article 67 de la Loi canadienne sur les droits de la personne prescrit ce qui suit : « La présente loi est sans effet sur la Loi sur les Indiens et sur les dispositions prises en vertu de cette loi. » .

L'application de l'article 67 aux décisions prises par un conseil de bande a été discutée dans l'affaire Bande indienne de Shubenacadie c. Commission canadienne des droits de la personne, C.F. 1re inst., T-2358-95, le 30 octobre 1997. En l'espèce, le Tribunal canadien des droits de la personne a conclu que le chef et le conseil de bande avaient exercé à l'endroit des plaignants une discrimination fondée sur la race et l'état matrimonial en refusant de verser des prestations d'aide sociale à des conjoints non indiens de membres de bandes indiennes. À la page 17, la Cour précise ce qui suit :

Je ne crois pas que la décision dont il s'agit en l'espèce soit une décision visée par l'article 67 de la Loi canadienne sur les droits de la personne. Il ne fait aucun doute qu'une décision a été prise par le conseil de bande, et il se peut fort bien qu'elle ait été prise en vertu du Règlement sur le mode de procédure au conseil des bandes d'Indiens, mais aucun élément de preuve ne laisse entendre que la décision a été prise en vertu d'une disposition de la Loi sur les Indiens. Indubitablement, l'article 67 reconnaît que certaines dispositions de la Loi sur les Indiens et de ses règlements peuvent être en conflit avec la Loi canadienne sur les droits de la personne et, dans un tel cas, la Loi sur les Indiens et son Règlement auront préséance, mais je ne crois pas que l'on puisse dire que l'article 67 enlève du champ de la Loi canadienne sur les droits de la personne toutes les décisions prises par les conseils des bandes indiennes dans la mesure où elles sont prises en vertu du Règlement sur le mode de procédure aux conseils des bandes d'Indiens. Si le législateur fédéral avait voulu soustraire toutes les décisions prises par les conseils des bandes indiennes au contrôle de la Commission des droits de la personne, il l'aurait expressément prévu au lieu d'édicter l'article 67. L'article 67 protège les décisions autorisées par la Loi sur les Indiens et par son Règlement, mais non toutes les décisions prises par les conseils des bandes indiennes. Je crois que cette conclusion s'accorde avec les remarques incidentes de l'arrêt Desjarlais (Re). L'article 67 ne vient donc pas en aide au requérant.

Bien que le paragraphe 114(2) de la Loi sur les Indiens autorise le ministre à établir, diriger et entretenir et des écoles pour les enfants indiens, il est difficile à mon avis d'établir un lien réel entre cet article de la Loi sur les Indiens et la décision du conseil scolaire de Waycobah de mettre fin à l'emploi de Mme Bernard à titre de secrétaire de l'école. Il ne s'agissait pas en l'espèce d'une décision prise « en vertu de la Loi sur les Indiens ª. L'objection de l'intimé relativement à la question de la compétence est rejetée.

ii) Motif valable

L'intimé a fait valoir à l'audience que la maladie mentale apparente n'a aucunement influé sur sa décision de mettre fin à l'emploi de Mme Bernard à titre de secrétaire de l'école. L'intimé a plutôt soutenu que la conduite de Mme Bernard à l'école secondaire premier/deuxième cycle de Waycobah, que j'ai qualifiée d'incident du 26 octobre, constituait un motif valable de renvoi immédiat. L'intimé a allégué que la conduite de Mme Bernard au cours de cette « expérience religieuse » avait eu pour effet d'effrayer les élèves et de mettre en péril le système scolaire. L'intimé a affirmé qu'il n'avait d'autre choix que de mettre fin à son emploi.

Compte tenu du fait que j'ai déjà conclu que la maladie mentale apparente avait grandement influé sur la décision du conseil scolaire de Waycobah à mettre fin à l'emploi de Mme Bernard, décision qui constituait un acte discriminatoire par rapport à son emploi, je n'ai pas à déterminer si les gestes posés par l'employée étaient suffisants pour justifier un renvoi pour un motif valable. Toutefois, il est très évident que les parties estimaient qu'il s'agissait là d'une importante question et la preuve présentée à l'audience a révélé les préoccupations tant du plaignant que de l'intimé en ce qui touche l'à-propos de l'exposé présenté par Mme Bernard aux élèves de l'école secondaire premier/deuxième cycle.

En dépit de certaines contradictions dans la preuve quant à ce qui a transpiré exactement au cours de l'exposé relativement à ce qui a été dit par Mme Bernard, à ce qu'elle a fait et à la réaction des élèves, il est évident que cet exposé a eu un effet particulièrement traumatisant à tout le moins pour certains élèves et qu'il a même bouleversé les adultes qui étaient présents. À la défense de son exposé, la plaignante a cité un témoin, Noel Raymond Knockwood, qui est un spécialiste de l'histoire des Micmacs ainsi que de la spiritualité et de la culture autochtones. M. Knockwood était présent lorsque la plaignante a décrit dans son témoignage le contenu de l'exposé qu'elle a présenté aux élèves et il était de façon générale d'accord pour dire que Mme Bernard avait décrit et expliqué correctement beaucoup d'aspects intéressants de la spiritualité et de la culture autochtones. Par ailleurs, M. Knockwood a également fait valoir que les élèves n'étaient pas bien préparés à l'expérience qu'ils allaient vivre. Il en est résulté un comportement inopportun des élèves et peut-être une réaction excessive de Mme Bernard. Mme Bernard n'a pas réussi à calmer les élèves dont le comportement l'a mise sur la défensive. Ce ne fut une bonne expérience ni pour le présentateur ni pour l'auditoire.

Je suis d'avis que le directeur de l'école et les organisateurs de cet événement n'ont pas préparé de façon adéquate les présentateurs ou les élèves; par conséquent, il était injuste de blâmer seulement Mme Bernard pour l'échec de son exposé. Pour ces raisons, j'aurais conclu que la cessation immédiate n'aurait pas été justifiée, compte tenu particulièrement du fait que Mme Bernard n'agissait pas à titre de secrétaire de l'école au moment où, selon les allégations, elle a manifesté un comportement répréhensible. Bien qu'il aurait été opportun de la réprimander d'une façon ou d'une autre, je ne crois pas, compte tenu de ce qui a transpiré par la suite, qu'il soit nécessaire à ce moment-ci de lui imposer une sanction ou une punition ou de me prononcer de façon définitive quant au genre de mesures qu'il aurait été opportun de prendre. De toute évidence, Mme Bernard a suffisamment souffert des indiscrétions qu'elle a commises en rapport avec l'exposé qu'elle a présenté aux élèves de l'école secondaire premier/deuxième cycle de Waycobah, le 26 octobre 1995.

iii) Nouvel employeur

Dans cette affaire, l'intimé est le « conseil scolaire de Waycobah » . La preuve présentée à l'audience a permis d'établir que le conseil scolaire de Waycobah était une entité créée par le conseil de bande de Waycobah. Le conseil scolaire était composé du chef, des six conseillers de bande et de deux ou trois représentants élus de l'ensemble de la communauté. La preuve documentaire présentée à l'audience, y compris le RE transmis à Mme Bernard au moment de la cessation d'emploi, fait état du « conseil scolaire de Waycobah » à titre d'employeur.

À l'audience, il a également été révélé que le conseil scolaire de Waycobah à proprement parler n'existe plus depuis 1997, mais que l'administration de l'école communautaire a été assumée par le chef et les six conseillers de bande, sans l'aide de représentants de l'ensemble de la communauté.

Ni la plaignante ni la Commission n'a demandé que la plainte soit modifiée pour désigner le chef et le conseil de bande de la Première nation de Waycobah comme intimés. Si une telle requête avait été présentée, j'y aurais fait droit. Cependant, je suis également convaincu que la participation du chef et du conseil de bande de la Première nation de Waycobah les empêche de soulever, à la fin de l'audience, le fait que l'ancien employeur a mis fin à ses activités.

Dans l'affaire Bouvier c. Metro Express (1992), 17 C.H.R.R. D/313, l'entreprise intimée, qui faisait l'objet de la plainte, a subséquemment été vendue à une autre entreprise. Le tribunal a jugé qu'il n'avait pas le pouvoir de rendre le nouvel employeur responsable des actes discriminatoires commis par l'employeur précédent. Cependant, il a ajouté que cela ne signifie pas pour autant qu'un nouvel employeur ne sera jamais responsable des actes discriminatoires commis par les employés de l'employeur précédent. Ainsi, si la vente d'une entreprise est le résultat d'une opération fictive entre deux entreprises étroitement liées, par exemple entre des entreprises ayant des administrateurs ou actionnaires communs, le recours à un tel subterfuge, qui viserait à se soustraire aux effets de la Loi canadienne sur les droits de la personne, n'empêcherait pas le nouvel employeur d'être tenu responsable.

Le changement en ce qui concerne la gestion du système scolaire de la Première nation de Waycobah en 1997 n'était en aucune façon lié à cette plainte, et je crois que seules des raisons légitimes ont justifié la restructuration. Toutefois, la seule différence qui existe entre le conseil scolaire de Waycobah qui a existé jusqu'en 1997 et l'administration actuelle du système scolaire de Waycobah, c'est-à-dire le chef et le conseil de bande de la Première nation de Waycobah, ce sont les deux ou trois représentants de l'ensemble de la communauté. Le conseil scolaire de Waycobah était, à toutes fins pratiques, un comité formé du chef et de l'administration du conseil de bande. Le fait que ce comité ait été démantelé n'absout pas le chef et le conseil de bande de la responsabilité de leurs actions; par conséquent, j'estime que toutes les mesures correctives que j'ai imposées par la présente décision ont force exécutoire pour le chef actuel et le conseil de bande de la Première nation de Waycobah.

IX. ORDONNANCE

Pour les raisons mentionnées, je déclare que l'intimé a transgressé les droits de Mme Bernard aux termes de la Loi canadienne sur les droits de la personne, et j'ordonne :

  1. que le conseil scolaire de Waycobah ou son successeur, le chef et le conseil de bande de la Première nation de Waycobah, versent à Mme Bernard la somme de 44 710 $, qui correspond à sa perte de salaire nette jusqu'au 28 mai 1999;
  2. que le conseil scolaire de Waycobah ou son successeur, le chef et le conseil de bande de la Première nation de Waycobah, offrent à Mme Bernard, à la première occasion raisonnable, un poste de secrétaire comportant des fonctions et responsabilités semblables à celles qu'elle exerçait à titre de secrétaire de l'école et que, dans l'intervalle, ils versent à Mme Bernard la somme de 325 $ par semaine; et que, aux fins de l'exécution de cette disposition, le Tribunal continue d'être saisi de cette question;
  3. que le conseil scolaire de Waycobah ou son successeur, le chef et le conseil de bande de la Première nation de Waycobah, versent à Mme Bernard la somme de 5 000 $ à titre d'indemnité spéciale;
  4. que des intérêts, calculés en se basant sur le taux d'intérêt des obligations d'épargne du Canada selon la méthode décrite dans cette décision, soient payés à l'égard de la perte de salaire nette;
  5. que le conseil scolaire de Waycobah ou son successeur, le chef et le conseil de bande de la Première nation de Waycobah, présentent par écrit des excuses dans les trente jours suivant cette décision;
  6. qu'une copie de cette décision soit versée dans le dossier personnel de Mme Bernard au bureau de la bande de la Première nation de Waycobah;
  1. que le conseil scolaire de Waycobah ou son successeur, le chef et le conseil de bande de la Première nation de Waycobah, assument les frais du conseiller juridique de Mme Bernard selon le tarif de la Cour fédérale.

DATÉ à Estevan, en Saskatchewan, ce 28e jour de mai 1999.


GUY A. CHICOINE
 Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.