Tribunal canadien des droits de la personne

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Tribunal canadien
des droits de la personne

Tribunal's coat of arms

Canadian Human
Rights Tribunal

Référence : 2003 TCDP  12

Date : le 7 mars 2003

Numéros des dossiers : T627/1501, T628/1601

 

[TRADUCTION FRANÇAISE]

 

Entre :

Amanda Day

la plaignante

- et -

Commission canadienne des droits de la personne

la Commission

- et -

Ministère de la Défense nationale et Michael Hortie

les intimés

Décision sur requête

Membre : Paul Groarke

 



Introduction

[1]  À l’ouverture de l’audience, les intimés ont sollicité une ordonnance de huis clos. À titre subsidiaire, ils ont demandé une ordonnance de non-publication. La plaignante s’est opposée aux deux demandes. Après avoir reçu les observations de toutes les parties, j’ai rejeté la demande de huis clos et ordonné une interdiction de publication. J’ai informé les parties que je fournirais des motifs écrits à une date ultérieure.

[2]  L’affaire est régie par le paragraphe 52(1) de la Loi canadienne sur les droits de la personne, qui confère au Tribunal le pouvoir de :

52.(1) […] prendre toute mesure ou rendre toute ordonnance pour assurer la confidentialité de l’instruction s’il est convaincu que, selon le cas :

[…]

  • b) il y a un risque sérieux d’atteinte au droit à une instruction équitable de sorte que la nécessité d’empêcher la divulgation de renseignements l’emporte sur l’intérêt qu’a la société à ce que l’instruction soit publique;

  • c) il y a un risque sérieux de divulgation de questions personnelles ou autres de sorte que la nécessité d’empêcher leur divulgation dans l’intérêt des personnes concernées ou dans l’intérêt public l’emporte sur l’intérêt qu’a la société à ce que l’instruction soit publique;

  • d) il y a une sérieuse possibilité que la vie, la liberté ou la sécurité d’une personne puisse être mise en danger par la publicité des débats.

Les intimés ont reconnu qu’il leur incombait d’établir la nécessité d’une ordonnance protégeant la confidentialité de l’instruction, et qu’il s’agissait d’un lourd fardeau de preuve. Ils ont aussi reconnu qu’une telle ordonnance ne devrait pas être accordée lorsqu’il existe d’autres moyens de protéger les parties et les témoins.

[3]  La demande dont je suis saisi soulève différents intérêts. La première série d’intérêts qui militent en faveur de la publication semble relever du domaine public. La common law repose sur un processus indépendant, impartial et public. Des considérations liées à la Charte canadienne des droits et libertés (la « Charte ») entrent aussi en jeu. On m’a renvoyé à la garantie de liberté de la presse prévue à l’alinéa 2b) de la Charte, qui exige de manière générale que le processus décisionnel soit mené en public. L’alinéa 2b) va peut-être plus loin, cependant, puisqu’il protège la liberté d’opinion et d’expression, ce qui est impossible sans un accès à l’information qui permet cette expression.

[4]  La deuxième série d’intérêts qui militent en faveur de la publication relève du domaine privé. Par exemple, l’article 11 de la Charte garantit à tout inculpé le droit à un procès public. On peut trouver un droit similaire dans la procédure en matière de droits de la personne, qui accorde au plaignant ou à l’intimé le droit de demander une audience publique. L’article 7 de la Charte pourrait aussi comporter un certain droit à une audience publique, dans le cas où cet aspect aurait des répercussions sur l’intégrité psychologique des participants. Dans l’arrêt Blencoe c. Colombie‑Britannique (Human Rights Commission) [2002] 2 R.C.S. 307, la Cour suprême a conclu que rien ne s’oppose à l’application de l’article 7 dans le cadre d’une procédure en matière de droits de la personne lorsque les circonstances le justifient.

[5]  Du point de vue opposé, la plupart des préoccupations en l’espèce ont trait à la vie privée de la personne. Il est intéressant de constater que l’article 7 peut aussi entrer en jeu dans un tel contexte, dans la mesure où il protège l’intégrité psychologique de la personne qui pourrait être compromise par un processus ouvert. Le libellé de l’alinéa 52(1)d) de la Loi canadienne sur les droits de la personne (la « Loi »), qui reprend les mêmes termes que l’article 7, le confirme. On m’a aussi renvoyé à l’article 8 de la Charte, qui a été interprété de manière à protéger la vie privée de la personne.

[6]  La question de l’équité semble se poser des deux côtés de la question, puisque le principe de la publicité des débats semble être né de la croyance selon laquelle des audiences publiques sont sujettes à un examen minutieux et sont donc intrinsèquement plus équitables que les audiences à huis clos. La Chambre étoilée occupe une place importante dans notre histoire juridique. Les intimés ont fait valoir, au contraire, qu’un processus public qui détruit la réputation de parties innocentes est fondamentalement intrusif et injuste. Ils ont affirmé qu’une audience qui permet la publication d’allégations extravagantes et injustifiées est inéquitable, même si elle offre à toutes les parties une occasion complète et suffisante de présenter leurs arguments. J’estime qu’il est évident que la notion d’équité énoncée à l’alinéa 52(1)b) de la Loi va au-delà des simples questions de procédure.

I.  La règle fondamentale

[7]  Malgré le large éventail d’intérêts qui entrent en jeu dans la présente requête, la règle fondamentale applicable semble tout à fait claire. Les audiences doivent généralement se dérouler en public. Plus que toute autre chose, il s’agit de rendre des comptes. Le processus ne doit pas être caché; j’estime que c’est par là qu’il faut commencer. Le mandat d’organismes d’enquête comme le Tribunal est d’établir publiquement les faits qui se sont produits dans un ensemble de circonstances donné. À mon avis, cela nécessite un processus ouvert, dans lequel les positions concurrentes sont soumises à l’examen du public.

[8]  Ce principe est valable, que les allégations soient fondées ou non. Le droit de savoir du public n’est pas limité aux conclusions d’un tribunal, et il englobe généralement les allégations qui ont été formulées, aussi offensantes puissent-elles être. D’autres préoccupations entrent en jeu dans le contexte des droits de la personne, puisque l’un des objectifs des procédures en la matière est de sensibiliser le public. Par ailleurs, les considérations de cette nature s’appliquent dans toutes les affaires et ne sont pas limitées aux cas où le bien-fondé d’une plainte est établi. Dans les situations où les plaintes ne sont pas retenues, les objectifs éducatifs d’une procédure en matière de droits de la personne sont quand même servis par des audiences publiques.

[9]  La question est donc de savoir si les circonstances de l’affaire dont je suis saisi sont suffisantes pour justifier une dérogation à la règle générale. Il me suffit, pour pouvoir me prononcer, de consulter les critères énoncés au paragraphe 52(1) de la Loi, en restant attentif à toute considération liée à la Charte.

II.  Huis clos

[10]  Pour décider de la demande de huis clos, je ne vois aucune nécessité d’aller au-delà des principes généraux. Le public jouit d’un certain droit de savoir ce qui se passe lors des audiences. Des allégations offensantes sont soulevées dans de nombreuses affaires et, pour justifier le huis clos, il faut quelque chose de plus. Une procédure en matière de droits de la personne devrait être ouverte au public en toutes circonstances, sauf les plus impérieuses. J’estime que l’intégrité et la réputation de la procédure seraient compromises si le huis clos était décrété simplement parce que des audiences traitent de questions personnelles délicates. L’une des conséquences du huis clos serait la mise sous scellés de la transcription dans son ensemble, une manière de procéder qui a pour effet d’effacer l’audience du dossier public. C’est aller beaucoup trop loin.

[11]  Dans l’affaire Bouvier c. Métro Express, (1992) 17 CHRR 313, au paragraphe 6, le Tribunal a examiné une demande similaire qui visait à obtenir le huis clos en vertu d’un article antérieur et plus austère de la Loi, au motif, semble-t-il, que le processus risquerait de porter atteinte à la réputation de la société intimée. Le Tribunal a refusé le huis clos en ces termes :

Vu l’importance primordiale du caractère public du processus judiciaire dans notre société, tout particulièrement dans le domaine des droits de la personne où l’aspect éducatif de ce processus joue un rôle de premier plan, et vu les arrêts Procureur général de la Nouvelle‑Écosse c. MacIntyre, 1982 CanLII 14 (CSC), [1982] 1 R.C.S. 175 et Edmonton Journal c. Alberta, 1989 CanLII 20 (CSC), [1989] 2 R.C.S. 1326, nous avons refusé la demande de huis clos présentée par Loomis.

Je pense qu’il existe un droit du public à l’examen, qui accorde aux simples citoyens le droit d’assister aux instances judiciaires et d’observer le fonctionnement du système.

[12]  Il est impossible de le faire à huis clos, et ce serait une erreur de prétendre qu’en fait, l’audience n’a pas eu lieu. Si les intimés sont tout à fait sans tache et au-delà de tout reproche, cela ne change rien au fait que ces allégations ont été formulées. Je ne suis pas convaincu que les intimés seront blâmés d’avoir rendu ce fait public, puisqu’il peut être interprété de différentes façons. J’estime que nous devons nous fier à la capacité du public de faire la part des choses entre de simples allégations et des déclarations de fait. Si un membre du public devait confondre les deux, les intimés auraient à leur disposition les voies de recours civiles habituelles.

[13]  La plaignante a ouvertement exprimé son manque de confiance à l’égard d’une audience à huis clos et a insisté sur son droit de confronter les intimés en public. Elle a aussi présenté des observations écrites dans lesquelles elle faisait valoir que ce serait une erreur de [traduction] « cacher » l’audience au public. Ces observations m’apparaissent fondées. Le fait que des allégations de cette nature soient formulées au cours d’une procédure en matière de droits de la personne ne devrait pas être dissimulé au public. Ce raisonnement va au-delà de l’audience et englobe la transcription de l’instruction, qui devrait pouvoir être examinée. Cela sert l’intérêt de la société mentionné à l’article 52, mais aussi les finalités juridiques et historiques des audiences.

[14]  Avant de me pencher sur la demande d’ordonnance de non-publication, je tiens à préciser que j’ai évoqué la possibilité d’ordonner un huis clos bref, advenant que des allégations particulières remplissent les critères énoncés au paragraphe 52(1) de la Loi. On m’a toutefois informé que cette solution serait peu pratique, vu le nombre d’allégations, et qu’elle entraînerait des interruptions constantes du processus. Il faudrait aussi que des parties de la transcription soient mises sous scellés et retirées du dossier public. Je ne suis pas à l’aise avec une telle façon de procéder dans la présente affaire, et j’estime qu’il est préférable de donner au public l’accès à la transcription, laquelle pourrait toujours faire l’objet d’une interdiction de publication. Je crois que cela va aussi loin que possible pour protéger à la fois les intérêts des parties et le droit de savoir du public.

III.  L’interdiction de publication

[15]  La publication semble être une question distincte. L’intimé m’a renvoyé à Dagenais c. Société Radio‑Canada, [1994] A.C.S. no 104 (QL), qui concernait une ordonnance interdisant à la Société Radio‑Canada de diffuser une émission de télévision traitant de l’objet d’une accusation en matière criminelle. Même si les faits de cet arrêt n’ont pas de réelle incidence sur l’affaire dont je suis saisi, la décision de la majorité énonce le critère général à appliquer à une requête de ce type. Ainsi, une ordonnance de non‑publication ne devrait être rendue que si :

  • 1) elle est nécessaire pour écarter le risque que le procès ou l’audience soit inéquitable;

  • 2) ses effets bénéfiques sont plus importants que ses effets préjudiciables sur la libre expression de ceux qui sont touchés par l’ordonnance.

Les intimés ont fait valoir que ce critère établit les paramètres fondamentaux de toute demande d’ordonnance de non‑publication.

[16]  Des préoccupations de même nature découlent des alinéas 52(1)b) et c) de la Loi, où un libellé quelque peu différent est néanmoins utilisé. L’article dispose qu’une ordonnance de confidentialité peut être accordée si « la nécessité d’empêcher la divulgation de renseignements l’emporte sur l’intérêt qu’a la société à ce que l’instruction soit publique ». Cette disposition reconnaît qu’une telle nécessité peut se présenter dans les situations où « il y a un risque sérieux d’atteinte au droit à une instruction équitable », ou encore « un risque sérieux de divulgation de questions personnelles ou autres » susceptible de causer un préjudice indu aux personnes concernées. Bien que l’alinéa d) puisse soulever des préoccupations de même nature, j’estime suffisant de me concentrer sur les précédentes considérations.

[17]  On constatera que l’affaire Dagenais et bien d’autres traitent de la liberté de la presse. À mon sens, il serait imprudent de faire des commentaires sur cet aspect de la question, en l’absence d’observations de la part d’une partie intéressée qui pourrait faire valoir les éléments nécessaires au nom de la presse. Comme l’affaire Dagenais est une affaire criminelle, elle met aussi l’accent sur les intérêts de l’inculpé, ce qui fait intervenir la présomption d’innocence garantie par l’article 11 de la Charte. La principale décision sur laquelle les intimés se fondent à cet égard est A. v. C. [1994] B.C.J. no 488 (B.C.S.C.) (QL), où il s’agissait d’une poursuite en diffamation découlant de plaintes extravagantes déposées auprès de la police et du Collège des médecins et fondées sur des violences sexuelles alléguées. Le tribunal avait ordonné l’utilisation de pseudonymes. L’affaire m’a été citée au soutien de la proposition voulant que la présomption d’innocence ait pour effet de protéger les parties dans les instances civiles.

[18]  Je ne peux analyser l’affaire en détail. Au paragraphe 23, la Cour suprême de la Colombie‑Britannique a néanmoins adopté le point de vue exprimé dans l’affaire Hirt v. College of Physicians and Surgeons of British Columbia, [1985] 3 W.W.R. 350, à la page 364, où le juge d’appel McFarlane déclare :

[traduction]

 

L’accès du public aux tribunaux et aux dossiers des tribunaux est nécessaire pour que la société puisse avoir l’assurance que justice a été rendue. Le secret suscite des doutes dans l’esprit du public, mais dans les sociétés libres et démocratiques, on reconnaît depuis de nombreuses années qu’il existe des limites raisonnables au principe selon lequel la justice doit être rendue au grand jour. La véritable justice doit respecter les droits ou la réputation des personnes innocentes.

Bien que l’affaire traite de plusieurs autres questions, voilà la proposition essentielle qui m’a été soumise.

[19]  Les avocats des intimés ont fondé la plupart de leurs observations sur la réputation et l’innocence des personnes que la plaignante accuse d’inconduite grave et d’inconvenances sexuelles [traduction] « scandaleuses ». Les intimés ont fait valoir que la présomption d’innocence qui s’applique dans un contexte criminel s’applique aussi aux allégations méprisables formulées dans le cadre d’autres instances. Par exemple, il a été porté à mon attention que deux des témoins faisaient l’objet de plaintes distinctes auprès de la Commission canadienne des droits de la personne. La Commission n’a pas poursuivi l’enquête sur ces plaintes, et celles-ci n’ont jamais été renvoyées au Tribunal. Les intimés m’ont donné à entendre que leurs témoins étaient maintenant [traduction] « replongés » dans le processus contre leur gré.

[20]  Des arguments de cet ordre paraissent plus convaincants dans une affaire de harcèlement, où les droits de la personne entrent parfois dans la sphère de certaines allégations habituellement traitées par des instances criminelles. Par exemple, en l’espèce, je suis saisi d’allégations de viol et de sodomie forcée. Le véritable point en litige semble être les allégations de nature sexuelle. On a fait valoir que de telles allégations entraînaient une stigmatisation particulière dans notre société, de sorte que le couvert de la confidentialité se justifiait plus aisément que pour d’autres allégations. M. Houston a déclaré officiellement que des [traduction] « allégations horribles » seraient formulées au cours de l’interrogatoire des témoins, y compris, peut-être, des allégations de maltraitance d’enfants.

[21]  La plaignante elle-même peut avoir des intérêts concurrents. Dans l’affaire Bouvier, précitée, au paragraphe 7, le Tribunal a cité l’affaire Edmonton Journal c. Alberta, [1989] 2 R.C.S. 1326, p. 1361, dans laquelle madame la juge Wilson avait reconnu qu’un processus public pouvait servir des intérêts plus personnels :

Mais en plus de l’intérêt du public en général dans un processus judiciaire public, il peut y avoir des arguments impérieux en sa faveur qui concernent les intérêts de l’ensemble des plaideurs. Beaucoup d’entre eux se sentent dédommagés moralement par la révélation publique des injustices qu’ils estiment avoir subies seuls et sans aucun secours de la société. En effet, c’est peut-être la première fois qu’un conjoint peut parler ouvertement d’événements qui se sont déroulés dans l’intimité du domicile. Ils peuvent se sentir réconfortés par l’appui public que leur donne le système contre des humiliations qu’ils ont subies en privé. (Page 1361.)

Les intimés ont essentiellement fait valoir qu’il fallait se garder d’aller trop loin en ce sens. Un plaignant ne devrait pas être autorisé à punir publiquement un intimé ou des tiers innocents lorsque le bien-fondé des plaintes n’est pas établi. L’audience n’est pas non plus un exercice thérapeutique. Il y a un risque — du moins dans certains cas — que le processus juridictionnel soit utilisé à des fins inappropriées ou parallèles.

[22]  La version française de l’alinéa 52(1)c) semble soutenir un tel argument. Un exercice de pondération s’impose. Je suis néanmoins d’avis qu’il est possible de répondre, au moins en partie, aux intérêts décrits par madame la juge Wilson en permettant à la plaignante de formuler ses allégations en public, avec ou sans ordonnance de non-publication. Les parties ont le droit de se faire entendre en justice. Les remarques de la juge Wilson n’ont pas empêché le Tribunal, dans l’arrêt Bouvier, de rendre une ordonnance de non-publication partielle dans des circonstances moins impérieuses que celles qui nous occupent. Selon l’intimé, il est impossible de procéder ainsi dans l’affaire dont je suis saisi, vu l’étendue des allégations et la notoriété de l’affaire dans la collectivité locale. J’ai déjà dit que je préférerais rendre une ordonnance de non‑publication plutôt que d’ordonner à répétition le huis clos pour certaines parties des témoignages.

[23]  Un autre aspect de la question requiert toutefois un examen sérieux. La plaignante s’est opposée à la demande d’ordonnance de confidentialité. Comme les intimés l’ont fait valoir, il existe néanmoins de bonnes raisons de protéger sa vie privée dans cette affaire. Tout au long de l’instance, les intimés ont soutenu que la plaignante souffre de [traduction] « maladie mentale » et d’idées délirantes. On m’a avisé qu’elle serait contre‑interrogée sur les moindres détails de sa vie personnelle et de ses antécédents psychologiques, ce qui soulève de très graves préoccupations en matière de protection de la vie privée. Je reconnais la position adoptée par la plaignante : elle s’est tout de même opposée à plusieurs reprises à la divulgation des détails de son dossier médical et psychologique. Il me semble qu’une ordonnance de confidentialité lui procurerait une certaine protection sous ce rapport.

[24]  Je ne puis faire de remarques sur le bien-fondé de l’affaire dont je suis saisi. Je n’ai toutefois aucun doute que de nombreuses personnes innocentes ont pu subir d’énormes dommages personnels et publics à la suite d’allégations de nature sexuelle, qui ont un caractère ignominieux pour notre société. Il ne faudrait pas sous-estimer la honte et l’humiliation que ces personnes subissent, et le système ne devrait pas les victimiser. J’estime que les intérêts du public et, peut-être, de la plaignante peuvent être protégés par un réexamen de la question à la fin de l’audience, où toute interdiction de publication pourra être levée. Je note au passage que les avocats des intimés ont exprimé une préoccupation supplémentaire concernant le langage employé par la plaignante pour formuler les allégations en cause, ainsi qu’une préoccupation ayant trait à des accusations moins préjudiciables comme le vol. Je ne crois pas que ces préoccupations soient suffisantes pour justifier une ordonnance de non-publication.

IV.  Décision

[25]  En conséquence, j’interdis la publication de tout élément de preuve ou de toute question susceptible d’être soulevée au cours de la présente audience. J’estime que cela est dans l’intérêt de toutes les parties, y compris de la plaignante, et que la publication compromettrait l’équité de l’instruction et causerait un préjudice indu aux personnes concernées. En l’occurrence, je suis convaincu que de telles considérations l’emportent sur les règles normales en faveur d’une audience publique.

[26]  Je tiens à préciser que cette interdiction est révocable, et qu’elle peut être reconsidérée si d’autres parties souhaitent aborder la question, ou encore si les circonstances de l’audience le justifient. Elle ne s’étend à aucune de mes conclusions ni à la décision finale en l’espèce.

 

Signée par

 

Paul Groarke

Membre du Tribunal

Ottawa (Ontario)

Le 7 mars 2003


Tribunal canadien des droits de la personne

Parties au dossier

Dossier du Tribunal : T627/1501 and T628/1601

Intitulé de la cause: Amanda Day c. Ministère de la Défense nationale et Michael Hortie

Date de la décision sur requête du Tribunal : 7 mars 2009

 

Comparutions :

Amanda Day , pour la plaignante

Joyce Thayer , pour l'intimé

J. David Houston, pour Michael Hortie

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