Tribunal canadien des droits de la personne

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TRIBUNAL CANADIEN DES DROITS DE LA PERSONNE CANADIAN HUMAN RIGTS TRIBUNAL

MICHELINE MONTREUIL

la plaignante

- et -

COMMISSION CANADIENNE DES DROITS DE LA PERSONNE

la Commission

- et -

FORCES CANADIENNES

l'intimée

DÉCISION SUR UNE QUESTION PRÉLIMINAIRE

MEMBRE INSTRUCTEUR : Pierre Deschamps

2006 TCDP 56

2006/11/02

Canadian Human
Rights Tribunal

[1] Il s'agit, en l'espèce, d'une requête de la Commission canadienne des droits de la personne demandant l'exclusion des témoins experts de l'intimée lors du témoignage de leurs collègues experts et de celui de l'expert de la Commission, le docteur Beltrami.

[2] La Commission soutient ainsi que leur présence lors de l'audition de l'expert de la Commission et des experts de l'intimée entacherait leur témoignage, ceux-ci pouvant être influencés dans leur témoignage subséquent, causant ainsi préjudice au contre-interrogatoire de ceux-ci par la plaignante et la Commission.

[3] Au soutien de ses prétentions, la Commission réfère à diverses décisions judiciaires portant sur l'exclusion de témoins ordinaires. Aucune des décisions qu'elle soumet ne porte sur l'exclusion de témoins experts.

[4] Pour la Commission, il n'y a pas lieu de faire cette distinction, la seule distinction pertinente étant celle entre le témoin qui est une partie et le témoin qui ne l'est pas.

[5] La Commission souligne qu'un des rapports d'experts qui sera produit par l'intimée fut cosigné par trois des experts que l'intimée entend faire entendre. Elle soutient que, si les experts de l'intimée sont présents lors du contre-interrogatoire de l'un d'eux, cela sera préjudiciable à son contre-interrogatoire.

[6] La plaignante souscrit à la position de la Commission concernant l'exclusion des témoins experts de l'intimée.

[7] Pour sa part, l'intimée s'objecte à l'exclusion de ses témoins experts lors de l'audience.

[8] Parmi les décisions citées par l'intimée au soutien de sa position, se trouve la décision rendue par la Cour d'appel du Québec dans Montpetit c. Léger [1999] J.Q. no 1216. Dans cette cause, le juge de première instance avait ordonné l'exclusion des témoins experts du défendeur lors du contre-interrogatoire de l'un d'eux par le procureur du demandeur.

[9] Dans sa décision, la Cour d'appel devait opérer une distinction très nette entre les témoins ordinaires et les témoins experts, émettant l'opinion que, suivant la jurisprudence, l'exclusion des témoins ordinaires est la règle alors que l'exclusion même partielle des témoins experts est l'exception et qu'elle ne peut en droit être légalement justifiable que dans des circonstances exceptionnelles.

[10] Le Tribunal est d'opinion que le fait pour les experts de l'intimée d'avoir cosigné un rapport conjoint ne constitue pas un cas de circonstances exceptionnelles justifiant une dérogation à la règle de la présence des témoins experts lors d'une audience.

[11] Comme le fait remarquer la Cour d'appel du Québec dans Montpetit c. Léger, il est possible que la plaignante et la Commission subissent un préjudice du fait de la présence de ces experts lors du contre-interrogatoire de l'un d'eux. Toutefois, comme le souligne encore la Cour d'appel: le juge du procès sera en mesure, le cas échéant, de tirer toute conclusion défavorable quant à leur crédibilité.

[12] En conséquence, le Tribunal rejette la requête de la Commission. Les témoins experts de l'intimée pourront être présents tout au long du témoignage de la plaignante, de l'expert de la Commission, de même que lors du témoignage de leurs collègues experts lorsque ces derniers seront appelés comme témoins. L'expert de la Commission pourra également être présent lors du témoignage de la plaignante, de même que lors du témoignage des témoins experts de l'intimée.

Signée par

Pierre Deschamps

QUÉBEC (Québec)

Le 2 novembre 2006

PARTIES AU DOSSIER

DOSSIER DU TRIBUNAL :

T1047/2805

INTITULÉ DE LA CAUSE :

Micheline Montreuil c. Les Forces canadiennes

DATE ET LIEU DE L'AUDIENCE :

Les 23 au 27 octobre 2006
Les 30 octobre au 2 novembre 2006

DATE DE LA DÉCISION SUR REQUÊTE RENDUE SUR LE BANC:

Le 2 novembre 2006

ONT COMPARU :

Micheline Montreuil

Pour elle-même

Ikram Warsame

Pour la Commission canadienne des droits de la personne

Guy Lamb / Pauline Leroux

Pour l'intimée

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