Tribunal canadien des droits de la personne

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TRIBUNAL CANADIEN DES DROITS DE LA PERSONNE CANADIAN HUMAN RIGHTS TRIBUNAL

CATHERINE HOYT

la plaignante

- et -

COMMISSION CANADIENNE DES DROITS DE LA PERSONNE

la Commission

- et -

COMPAGNIE DES CHEMINS DE FER NATIONAUX DU CANADA

l'intimée

- et -

TRAVAILLEURS UNIS DES TRANSPORTS

la partie intéressée

DÉCISION

MEMBRE INSTRUCTEUR : Julie c. Lloyd

2006 TCDP 33
2006/08/18

[TRADUCTION]

I. INTRODUCTION

II. LES FAITS

A. La plaignante

B. L'intimée

(i) Le triage Walker

(ii) Le système de loco-commande

(iii) Le système d'ancienneté au CN - Le tableau de remplacement

(iv) La politique du CN en matière d'accommodement

III. LES FAITS DONNANT LIEU À LA PLAINTE

A. La première offre d'accommodement du CN

B. La deuxième offre d'accommodement du CN

C. La troisième offre du CN - Le poste de conducteur de véhicule de transport de l'équipe et la question de la garde d'enfant

IV. ANALYSE

A. La plaignante a-t-elle établi une preuve prima facie de discrimination fondée sur le sexe?

(i) Le refus d'employer ou de continuer d'employer

(ii) Le fait d'être défavorisée en cours d'emploi

B. La justification du CN

C. La conduite du CN était-elle justifiée? S'agissait-il d'une EPJ?

(i) Le lien rationnel

(ii) La croyance sincère

(iii) La nécessité raisonnable

D. Le syndicat a-t-il entravé les tentatives faites par le CN en vue de fournir un accommodement à Mme Hoyt?

E. La plaignante a-t-elle établi une preuve prima facie de discrimination fondée sur la situation de famille?

F. La justification du CN

G. La conduite du CN était-elle justifiée? La conduite était-elle une EPJ?

H. Conclusion de discrimination

V. LES REDRESSEMENTS DEMANDÉS

A. Par la plaignante

(i) Une ordonnance prévoyant que le CN révise sa politique en matière d'accommodement

(ii) Une indemnité pour pertes de salaire et d'avantages

(iii) Une indemnité pour préjudice moral

(iv) Une indemnité spéciale

(v) Les frais juridiques

(vi) Les intérêts

(vii) La rétention de compétence par le Tribunal

B. Le redressement demandé par la partie intéressée

(i) Les frais juridiques

(ii) Une déclaration

I. INTRODUCTION

[1] La plaignante, Catherine Hoyt, allègue que son employeur, la Compagnie des chemins de fer nationaux du Canada (CN), ne lui a pas fourni un accommodement quant à sa grossesse et quant à ses obligations parentales. Elle soutient que le CN a par conséquent exercé à son endroit de la discrimination fondée sur son sexe et sur sa situation de famille, en contravention de l'article 7 de la Loi canadienne sur les droits de la personne (la Loi ou la LCDP).

[2] Le syndicat de la plaignante, les Travailleurs unis des transports (le syndicat), a demandé et a obtenu le statut de partie intéressée à l'instance. Dans son exposé des précisions, le CN allègue que le syndicat n'a pas agi d'une manière coopérative ou raisonnable à l'égard de l'accommodement à offrir à Mme Hoyt. Le membre chargé de la gestion de l'instance a décidé que, compte tenu de ces allégations, la réputation du syndicat pouvait être entachée du fait de l'instance et que, par conséquent, il était approprié d'accorder au syndicat le statut qu'il demandait; il a ordonné que le syndicat soit autorisé à présenter de la preuve, à procéder à des interrogatoires et à des contre-interrogatoires de témoins et à présenter des observations à l'égard des questions pour lesquelles ses intérêts pouvaient être compromis et à l'égard de sa participation aux efforts d'accommodement.

[3] L'audience a duré 10 jours en avril 2006 et a comporté une visite sur les lieux au triage Walker au terminal d'Edmonton du CN. Tant la plaignante que l'intimée ont participé à l'audience et étaient représentées par des avocats. Le syndicat a participé à l'audience et était représenté par un avocat. La Commission canadienne des droits de la personne n'a pas participé à l'audience.

[4] Pour les motifs ci-après énoncés, j'ai conclu que le CN a affectivement exercé de la discrimination à l'endroit de Mme Hoyt en omettant de lui fournir un accommodement quant à sa grossesse et j'ai conclu de plus que le CN a omis de lui fournir un accommodement quant à ses obligations parentales. La plainte de Mme Hoyt est par conséquent fondée.

II. LES FAITS

A. La plaignante

[5] Mme Hoyt fait partie de la troisième génération de sa famille à travailler dans le domaine des chemins de fer. Ses deux grands-pères, son père, deux de ses oncles et son frère ont travaillé au CN. De plus, elle est mariée avec un employé des chemins de fer.

[6] En juillet 1991, Mme Hoyt a été embauchée par le CN. Elle a d'abord travaillé à titre d'aide-soudeuse dans différentes régions de l'Ontario, puis au printemps de 1995 elle a postulé un emploi au terminal d'Edmonton du CN et elle a obtenu cet emploi. Elle savait, compte tenu des antécédents de sa famille, que cela lui offrirait une bonne carrière et lui procurerait une bonne façon de gagner sa vie et celle de sa famille, comme cela avait été le cas pour d'autres membres de sa famille.

[7] Quelques mois après avoir changé de lieu de travail, Mme Hoyt a obtenu un poste de chef de train de manuvre au triage Walker à Edmonton. Mme Hoyt était chef de train de manuvre au moment du dépôt de la plainte.

B. L'intimée

[8] L'intimée, le CN, exploite une ligne de chemin de fer et son entreprise consiste au transport de marchandises par voie ferrée partout au pays.

[9] Les événements pertinents quant à la présente plainte ont eu lieu au terminal d'Edmonton du CN. Le terminal d'Edmonton comprend le triage Walker et trois triages satellites, soit le Bissell, le Cloverbar et Scotford. Environ 100 employés travaillent dans les triages. De plus, une partie de l'administration du terminal d'Edmonton était faite à cette époque dans l'édifice du CN au centre-ville d'Edmonton. Environ 200 employés travaillaient dans l'édifice administratif du centre-ville.

[10] Une brève description de la nature de ces installations et de certaines des activités du CN sera utile pour comprendre les questions pertinentes quant à la présente plainte.

(i) Le triage Walker

[11] À différents endroits dans tout le pays, l'intimée a des installations qui permettent l'assemblage et le réassemblage des trains selon les besoins. Le triage Walker est l'une de ces installations. Les chefs de train au triage Walker trient les wagons. Les trains entrent dans le triage avec des wagons en route vers divers lieux. Parfois, 20 wagons d'un train en particulier doivent continuer leur route vers la côte ouest alors que 30 autres wagons doivent se rendre dans le nord de l'Alberta et ainsi de suite. Les trains doivent être désassemblés et ensuite réassemblés de façon à ce que les wagons continuent leur route vers leur destination définitive.

[12] La procédure utilisée pour trier les trains est plutôt ingénieuse. Le triage Walker a une butte de gravité. La butte de gravité est une pente très légèrement inclinée. Les trains sont poussés sur la crête de cette pente et les wagons sont séparés, soit individuellement soit en groupe, lorsqu'ils sont sur le point de descendre l'inclinaison. Il y a, au bas de la butte de gravité, quarante voies séparées. Le réglage des aiguillages des voies permet à chaque wagon ou groupe de wagons d'être dirigé vers l'une ou l'autre des voies.

[13] Les wagons, une fois qu'ils sont arrêtés sur la voie sur laquelle ils ont été dirigés, sont alors réassemblés en préparation de leur départ. Le réassemblage est effectué par des chefs de train de manuvre qui utilisent des locomotives de triage pour pousser les wagons sur les voies jusqu'à ce qu'ils soient fixés les uns aux autres dans l'ordre approprié. Une fois que les wagons ont été correctement assemblés, ils sont prêts à partir pour le tronçon suivant de leur voyage.

[14] L'ampleur de l'opération au triage Walker est remarquable; le triage et ses voies s'étendent sur plusieurs milles. Les wagons qui entrent dans le triage et le quittent ensuite pèsent 30 tonnes lorsqu'ils sont vides et peuvent peser de 120 à 130 tonnes lorsqu'ils sont pleins. Les enfilades de wagons qui entrent dans le triage ou qui y sont préparés pour en partir ont souvent un mille de long. Au cours d'une année, à chaque heure, des wagons sont poussés sur les voies du triage à mesure qu'ils sont triés pour former des trains.

[15] La sécurité est une préoccupation primordiale au CN, comme cela a été démontré au cours de notre visite des lieux. Nous avons reçu de l'équipement de sécurité et nous avons été guidés avec beaucoup de soins sur les lieux visités. La sécurité fait partie de la conception même du matériel ferroviaire. Par exemple, le système de freinage des trains utilise de la pression d'air. Cependant, la pression d'air n'est pas utilisée pour appliquer les freins; elle est utilisée pour les relâcher. Cette conception assure que s'il y a une perte de pression d'air en raison d'une faille du matériel, le train s'arrêtera. Les employés du CN décrivent ce système comme une protection en cas de défaut; le matériel est conçu de façon à ce qu'un manquement entraîne une situation sécuritaire plutôt qu'une situation dangereuse.

(ii) Le système de loco-commande

[16] Un des progrès techniques introduits au triage d'Edmonton est la loco-commande (beltpack) ou l'unité de contrôle de locomotive (L.C.U.). Une loco-commande permet à un chef de train de manuvre de faire fonctionner une locomotive comme fonctionne une voiture comportant une commande à distance. L'unité, qui pèse environ 6 livres, est portée en étant fixée au corps par un harnais. Elle contient des interrupteurs, des cadrans et des commutateurs qui permettent au chef de train de manuvre de mettre en marche, d'arrêter et de contrôler la vitesse et la direction d'une locomotive. La loco-commande comporte en outre une caractéristique de sécurité. La loco-commande, si elle est inclinée dans un angle de plus de 45 degrés, arrêtera la locomotive après quelques secondes à moins que l'unité soit réinitialisée par le chef de train. Il s'agit d'une fonction d'urgence conçue afin d'éviter un accident ou d'autres blessures si le chef de train tombe ou a un malaise pendant qu'il fait fonctionner une locomotive. La loco-commande est un autre exemple d'une conception de protection en cas de défaut.

[17] Avant l'implantation des loco-commandes vers 1995, le CN utilisait des équipes de trois personnes pour le triage des trains. Une personne, le mécanicien de locomotive, prenait place dans la locomotive elle-même pendant que les deux autres se trouvaient sur le terrain à chaque extrémité du train. Les trois personnes communiquaient par radio. Le CN utilisait encore à l'occasion une équipe de trois personnes au triage Walker à l'époque se rapportant à la plainte. Lorsque les loco-commandes ont été mises en application, les instructions générales d'opération du CN prévoyaient que les deux chefs de train de manuvre devaient porter une loco-commande et, de plus, que le chef de train à l'extrémité avant du mouvement contrôlait le train. L'extrémité avant du mouvement est l'avant du train. Lorsque le train change de direction, l'avant change d'une extrémité à l'autre. Étant donné que les trains changent souvent de direction durant le processus de triage, les chefs de train doivent s'échanger la commande quand la direction change. Cette procédure est appelée l'échange du signal de commande (pitch and catch). Quand les trains changent de direction, un chef de train de manuvre échange le contrôle du train avec l'autre chef de train.

[18] À l'époque se rapportant à la présente plainte, il y avait au CN un désaccord quant à la question de savoir s'il était sécuritaire que le CN utilise une équipe de deux chefs de train de triage dans laquelle un des chefs de train utilise une loco-commande et l'autre une radio avec émetteur-récepteur. Le syndicat croyait que cette méthode ne serait pas sécuritaire. La direction ne partageait pas cette opinion. Les procès-verbaux du comité du CN en matière de santé et de sécurité montrent que ce désaccord était une question en litige. Les instructions d'opération générales à ce moment exigeaient que dans une équipe de deux chefs de train, les deux chefs de train utilisent une loco-commande. Les instructions d'opération prévoyaient en outre que, si une loco-commande avait une défectuosité, l'équipe devait récupérer une nouvelle loco-commande dès que cela était raisonnablement possible.

(iii) Le système d'ancienneté au CN - Le tableau de remplacement

[19] L'intimée a des activités vingt-quatre heures par jour. Des trains sont triés vingt-quatre heures par jour, chaque jour de l'année. Le travail par quarts fait partie de la vie d'un employé des chemins de fer tout comme fait partie de sa vie l'imprévisibilité des horaires de jour en jour et de semaine en semaine.

[20] Les horaires de travail des employés de triage au CN sont établis en fonction de l'ancienneté. Les employés qui ont suffisamment d'ancienneté peuvent avoir une affectation régulière. Ces employés sont informés chaque vendredi de leur horaire de travail pour toute la semaine à venir. Cependant, il peut arriver qu'un employé qui a reçu une affectation régulière soit informé à court préavis que ses services sont requis pour un poste supérieur, ou plus élevé dans la hiérarchie de travail du CN, à celui de son affectation régulière. Ces postes supérieurs, une fois qu'ils sont offerts, doivent être acceptés par l'employé.

[21] Les horaires des employés qui ont moins d'ancienneté sont établis en fonction du tableau de remplacement. Le tableau de remplacement est un outil qui permet à l'employeur de désigner les employés dont il a besoin pour des quarts de travail et des affectations. Les employés sont inscrits sur ce tableau par ordre d'ancienneté et les quarts de travail sont établis dans cet ordre. Les employés qui ont le plus d'ancienneté et dont le nom apparaît sur le tableau de remplacement obtiennent plus de quarts de travail réguliers à des moments plus favorables de la journée et de la semaine, alors que les employés qui ont moins d'ancienneté obtiennent des quarts de travail moins réguliers à des moments moins favorables de la journée et de la semaine.

[22] Pour s'assurer qu'un employé obtienne un quart de travail particulier ou pour lui permettre d'éviter un quart de travail particulier, il est habituellement nécessaire qu'on lui fournisse une exemption quant aux réalités imprévisibles du tableau de remplacement. On parle alors du statut d'ancienneté privilégiée. Le consentement du syndicat est nécessaire pour qu'un employé obtienne ce statut.

(iv) La politique du CN en matière d'accommodement

[23] Le CN a en place une politique qui traite des besoins d'accommodement des employés. Ses Directives aux chefs hiérarchiques concernant les mesures d'adaptation établissent que la jurisprudence s'attend à ce que les entreprises fassent des efforts raisonnables d'adaptation, sans toutefois s'imposer de contraintes excessives; elle établissent de plus que le coût des mesures d'adaptation doit être extrêmement élevé pour justifier le refus d'une demande de telles mesures.

[24] Un document intitulé Mesures d'adaptation - Liste de contrôle à l'intention des chefs hiérarchiques expose le processus d'accommodement qui doit être engagé lorsque des mesures d'adaptation sont demandées. La liste de contrôle donne au chef hiérarchique la directive de rencontrer d'abord l'employé à l'égard des besoins d'accommodement, d'établir les besoins essentiels du poste habituel de l'employé, de consulter d'autres représentants du CN si nécessaire et le syndicat, puis de décider si les fonctions du poste actuel de l'employé peuvent être ajustées pour lui fournir un accommodement ou s'il peut être affecté à des fonctions différentes qui fourniraient un accommodement quant à ses besoins ou ses restrictions. Les chefs hiérarchiques ont la directive d'informer l'employé de leurs décisions, de donner des motifs quant à ces décisions et de conserver des dossiers détaillés des mesures prises dans le processus d'accommodement.

III. LES FAITS DONNANT LIEU À LA PLAINTE

[25] En février 2002, après 11 années de service auprès de l'intimée, Mme Hoyt a appris qu'elle était enceinte. Elle a commencé à avoir certaines douleurs et certains malaises au travail. Son médecin l'a examinée et il a écrit au CN une lettre dans laquelle il expliquait que Mme Hoyt, en raison de sa grossesse, avait besoin que certaines modifications soient apportées à son travail. Le médecin a ordonné que Mme Hoyt évite les dangers, en particulier les activités ardues, et qu'elle travaille des heures régulières. Le médecin a de plus ordonné qu'elle évite d'utiliser une loco-commande.

[26] Le 18 février 2002, Mme Hoyt a donné la lettre du médecin au surintendant du CN qui l'a informée qu'elle devrait retourner chez elle en congé sans solde jusqu'à ce que le CN ait le temps d'examiner l'affaire.

A. La première offre d'accommodement du CN

[27] Le 25 février 2002, un surintendant adjoint a fourni à Mme Hoyt une lettre qui établissait les mesures d'accommodement que le CN avait établies. Le CN avait proposé qu'elle soit placée sur le quart de travail de l'après-midi en tant que chef de train de manuvre à la butte du triage Walker. Ce poste exigerait que Mme Hoyt porte une loco-commande. Dans la lettre, le CN demandait d'autres clarifications quant aux restrictions médicales et terminait la lettre comme suit :

[traduction]

Pour le moment, il n'y a pas de fonctions modifiées qui ne requièrent pas l'utilisation de l'équipement du système de télécommande des locomotives de manuvre (LCS). Compte tenu de tous les tests effectués et des rapports techniques, la position de la compagnie est que l'équipement du LCS est visé par les directives réglementaires et ne pose aucun problème se rapportant à la santé.

Si vous estimez ne pas pouvoir faire fonctionner l'équipement du LCS, la compagnie vous accordera un congé sans solde. Pour le moment, il n'est pas raisonnablement possible de modifier les fonctions de votre emploi de façon à ce que l'équipement du LCS ne soit pas utilisé.

La référence à l'équipement du LCS est une référence à la loco-commande.

[28] Mme Hoyt était affligée par cette offre d'accommodement. Le poste à la butte du triage Walker, selon son expérience, était plus dur que son emploi habituel de chef de train de manuvre. Dans ce poste, il n'y avait qu'un chef de train de manuvre qui travaillait seul pour séparer les wagons, un à un ou en groupe, avant que les wagons commencent à descendre sur la voie ferrée. Le poste était, à son avis, difficile et incessant. Le poste exigeait également l'utilisation de la loco-commande. Son médecin avait ordonné qu'elle n'utilise pas la loco-commande. Elle a téléphoné à son syndicat. Le syndicat ne savait rien de la proposition d'accommodement faite par le CN.

[29] Mme Hoyt est retournée chez son médecin le lendemain. Le médecin a fourni une lettre plus détaillée dans laquelle il expliquait les raisons pour lesquelles la loco-commande ne devait pas être utilisée :

[traduction]

Le port d'une loco-commande causera une pression abdominale et un poids sur le ftus qui se développe. Cela contribuera également à des maux de dos à mesure que la grossesse avance. Il est donc préférable qu'une loco-commande ne soit pas utilisée pendant le reste de la grossesse.

Mme Hoyt a fourni au CN cette deuxième lettre.

B. La deuxième offre d'accommodement du CN

[30] Après avoir reçu cette deuxième note du médecin, le CN a préparé un deuxième plan d'accommodement et a communiqué cette deuxième proposition au syndicat. Le CN proposait que Mme Hoyt occupe son ancien poste de chef de train de manuvre, mais qu'elle ne porte pas une loco-commande et qu'on lui fournisse plutôt une radio. Son collègue dirigerait le train dans les deux directions. Le CN proposait de plus qu'elle occupe le quart de travail régulier de l'après-midi et, en conséquence, il serait nécessaire que Mme Hoyt obtienne le statut d'ancienneté privilégiée. Le consentement du syndicat serait nécessaire.

[31] Le syndicat a examiné cette deuxième proposition et a exprimé deux préoccupations. La première préoccupation était la sécurité. Comme cela a été mentionné, le syndicat avait adopté depuis longtemps la position selon laquelle il était dangereux d'utiliser une seule loco-commande dans une équipe de deux chefs de train. Le syndicat a de plus exprimé une préoccupation à l'égard du statut d'ancienneté privilégiée. Il a demandé au CN une assurance que serait indemnisé tout employé qui perdrait un quart de travail en raison du fait que ce statut était conféré à Mme Hoyt. Le CN a refusé de donner cette assurance. Le syndicat a rejeté cette proposition principalement en raison de la question de la sécurité et accessoirement en raison de la question de l'ancienneté.

[32] Mme Hoyt partageait les préoccupations exprimées par le syndicat. Elle estimait également qu'il n'était pas sécuritaire de travailler en tant que chef de train de manuvre sans porter une loco-commande. Elle était de plus préoccupée par le fait que si le CN lui donnait un poste au triage d'un statut autre qu'un poste qu'elle pouvait obtenir suivant son statut d'ancienneté, elle pourrait subir du harcèlement sur le lieu de travail. Mme Hoyt a témoigné qu'une collègue avait reçu récemment un tel accommodement. Mme Hoyt a entendu les commentaires désobligeants que faisaient d'autres collègues qui se plaignaient du traitement spécial que la femme recevait et Mme Hoyt a dû se porter à la défense de cette collègue. Le véhicule de sa collègue a fait l'objet de vandalisme au cours de cette période. Mme Hoyt était préoccupée par le fait que ce serait elle qui ferait maintenant l'objet de ces commentaires.

[33] Le syndicat a proposé certains autres postes pouvant être utilisés pour fournir un accommodement à Mme Hoyt, notamment ce qui suit :

  • un poste de service, à savoir un poste d'aide général au triage;
  • un poste de service à la butte de gravité ;
  • un poste de conducteur de véhicule de transport de l'équipe au triage;
  • un poste de travail sédentaire dans un des bureaux de l'administration du CN;
  • un poste dans une équipe de trois personnes, puisque ces équipes n'utilisaient pas de loco-commandes.

Le CN a rejeté toutes ces propositions.

[34] Le 1er mars 2002, le CN a écrit ce qui suit à Mme Hoyt :

[traduction]

La compagnie a entrepris un examen des fonctions de remplacement ou des modifications à vos fonctions actuelles compte tenu de votre grossesse. Le résultat d'un tel examen est que pour le moment la compagnie n'est pas en mesure de vous fournir un accommodement.

Vos restrictions physiques se situent effectivement dans les paramètres du poste de chef de train adjoint de l'affection de l'après-midi à la tour ouest au triage Walker, mais votre ancienneté ne vous permet pas d'occuper automatiquement ce poste. Pour pouvoir vous affecter à un tel poste, la compagnie doit obtenir l'accord du CCSOCF des TUT.

La compagnie a discuté de l'accommodement avec le syndicat, mais les représentants n'étaient pas disposés à conclure un accord qui dérogerait aux dispositions de la convention collective portant sur l'ancienneté.

La compagnie continuera de chercher d'autres possibilités qui répondent à vos restrictions et vous informera en conséquence.

Si vous avez des questions ou si vous avez besoin de renseignements additionnels, veuillez communiquer avec le soussigné au [...].

La référence au CCSOCG des TUT est une référence au syndicat.

[35] Le congé sans solde de Mme Hoyt s'est poursuivi. Elle a reçu certaines prestations de maladie au cours de la période pertinente.

[36] Mme Hoyt a écrit à son employeur une lettre datée du 4 mars 2002 par laquelle elle demandait des renseignements. Elle voulait que le CN l'informe quant aux postes envisagés pour elle et elle voulait savoir qui serait sa personne-ressource au CN. Elle n'a pas reçu de réponse à cette demande. De plus, Mme Hoyt a déposé auprès de Développement des ressources humaines Canada une plainte par laquelle elle alléguait que son employeur avait enfreint aux obligations d'accommodement prévues par le Code canadien du travail, a déposé une plainte auprès de la Commission canadienne des droits de la personne et a participé au processus de grief avec le syndicat.

C. La troisième offre du CN - Le poste de conducteur de véhicule de transport de l'équipe et la question de la garde d'enfant

[37] Le 25 mai 2002, alors qu'elle était en congé sans solde depuis trois mois et demi, le CN a informé la plaignante qu'il avait pour elle un poste de conducteur de véhicule de transport de l'équipe au triage Walker. Elle travaillerait pendant le quart de l'après-midi du mardi au samedi de chaque semaine à compter du 28 mai 2002. Mme Hoyt a immédiatement accepté ce poste.

[38] La famille Hoyt avait un enfant de deux ans à la maison. Mme Hoyt a expliqué que son horaire, avant que sa grossesse donne lieu à un besoin d'accommodement, était plutôt variable. Elle travaillait selon le tableau de remplacement et elle recevait un avis de deux heures quant à ses affectations sur les quarts de jour, d'après-midi et de nuit. Si son époux était au travail, elle appelait des amis et des adolescents du voisinage pour faire garder sa fille. La personne qui gardait se rendait à la maison de la famille Hoyt. Sa fille ne s'est jamais fait garder ailleurs qu'à la maison.

[39] Lorsqu'elle a eu connaissance de son nouvel horaire, Mme Hoyt a su qu'elle aurait à prendre des dispositions pour faire garder sa fille. Elle savait aussi qu'elle devrait faire garder sa fille tous les samedis étant donné que le poste que son époux occupait au CN, compte tenu de son statut d'ancienneté, faisait en sorte qu'il devait travailler presque tous les samedis.

[40] En février 2002, lorsqu'elle a appris qu'elle était enceinte et que son médecin l'a informée qu'elle aurait besoin d'un accommodement, Mme Hoyt a tenu pour acquis qu'elle aurait un quart de travail régulier et qu'elle devrait prendre des dispositions pour faire garder son enfant. Elle a communiqué avec une femme d'une ville voisine qui exploitait un service de garde en milieu familial. Cette femme, qui est mariée à un employé des chemins de fer, connaissait bien le style de vie des familles dont les parents travaillent pour l'industrie des chemins de fer et était disposée à fournir un accommodement quant aux besoins plutôt inhabituels en matière de garde d'enfants, acceptant de garder des enfants le jour et la nuit, sept jours par semaine. Mme Hoyt a obtenu une place pour sa fille dans ce service de garde. Elle n'a pas obtenu un accommodement aussi rapidement qu'elle s'y attendait. Lorsqu'elle a téléphoné à ce même service de garde à la fin de mai, elle a appris qu'il n'était plus possible que sa fille s'y fasse garder.

[41] Mme Hoyt a pris contact avec d'autres personnes, principalement des adolescents du voisinage qui avaient gardé sa fille dans le passé. Elle a pu, durant la courte période du 25 au 28 mai, prendre des dispositions, sauf pour trois samedis en juin.

[42] Lorsqu'elle est retournée au travail le 28 mai 2002, Mme Hoyt a informé le CN de son problème quant à la garde de son enfant. Elle a demandé à titre d'accommodement que son horaire soit modifié de façon à ce qu'elle n'ait pas à travailler le samedi pendant ces trois semaines. Le superviseur adjoint, Rick Sherbo, l'a informée qu'il verrait ce qu'il pouvait faire.

[43] Le 4 juin 2002, Mme Hoyt est retournée au bureau de M. Sherbo afin de voir quelles dispositions avaient été prises. On l'a informée que le CN lui fournirait un accommodement en lui permettant de prendre des congés sans solde pour ces journées.

[44] Mme Hoyt a commencé à être contrariée. Elle a eu une altercation avec M. Sherbo avant le début de son quart de travail. En quittant le bureau de M. Sherbo, elle a pris conscience qu'elle n'était pas apte à travailler. Elle était très contrariée et elle ne se sentait pas capable de conduire de façon sécuritaire le véhicule de transport de l'équipe. Elle a quitté le travail et en conduisant vers la maison elle était essoufflée et elle a eu certaines douleurs abdominales. Elle était inquiète quant à sa propre santé et quant à la santé de son ftus. Elle avait eu des problèmes de santé au cours de sa première grossesse. Elle s'est rendue directement à l'hôpital. Elle a été en observation, a subi certains tests et a quitté l'hôpital le même jour. Le lendemain, elle s'est rendue chez son médecin et il l'a informée que le stress qu'elle continuait à subir quant à l'accommodement à l'égard de sa grossesse mettait sa santé en danger et pouvait faire du tort à son ftus. Le médecin lui a ordonné de s'absenter du travail pendant un mois.

[45] Mme Hoyt est restée à la maison comme le médecin lui avait ordonné de le faire. Le CN a contesté sa demande d'indemnisation des accidentés du travail et cette demande a été rejetée. Elle a reçu certaines prestations de maladie.

[46] Au début de juillet 2002, Mme Hoyt est retournée au travail en tant que conducteur de véhicule de service et a continué à exercer cette fonction jusqu'à ce qu'elle parte en congé de maternité. Son deuxième enfant est né au cours de l'automne 2002.

IV. ANALYSE

[47] L'article 7 de la LCDP établit que constitue un acte discriminatoire, s'il est fondé sur un motif de distinction illicite, le fait de refuser d'employer ou de continuer d'employer un individu, et de le défavoriser en cours d'emploi.

[48] Il appartient d'abord au plaignant d'établir une preuve prima facie de discrimination. Une fois que le plaignant s'est acquitté de cette tâche, le fardeau de preuve passe à l'intimé à qui il appartient d'établir que la mesure adoptée ou la décision prise découlait d'une exigence professionnelle justifiée et qu'une mesure d'accommodement constituerait une contrainte excessive (alinéa 15(1)a) et paragraphe 15(2) de la LCDP).

A. La plaignante a-t-elle établi une preuve prima facie de discrimination fondée sur le sexe?

[49] Une preuve prima facie de discrimination est celle qui porte sur les allégations qui ont été faites et qui, si on leur ajoute foi, est complète et suffisante pour justifier un verdict en faveur de la plaignante, en l'absence de réplique de l'employeur intimé (O'Malley c. Simpson-Sears Ltd., [1985] 2 R.C.S. 536, au paragraphe 28).

[50] La discrimination fondée sur la grossesse constitue de la discrimination fondée sur le sexe (paragraphe 3(2) de la LCDP et Brooks c. Canada Safeway Ltd., [1989] 1 R.C.S. 1219).

[51] Je conclus selon la preuve de la plaignante qu'une preuve prima facie de discrimination fondée sur le sexe a été établie. En particulier, la preuve de la plaignante établit que le CN a refusé de continuer de l'employer et que le CN l'a défavorisée en se fondant sur un motif de distinction illicite.

(i) Le refus d'employer ou de continuer d'employer

[52] Mme Hoyt était enceinte. Elle a commencé à avoir certaines douleurs et certains malaises au travail. Elle est allée consulter son médecin. Son médecin l'a examinée et, dans une lettre, il a donné quatre directives claires et simples. Elle a apporté la lettre au CN. On lui a dit de retourner chez elle et on lui a donné un statut d'employé en congé sans solde.

[53] Le CN a fait deux offres d'accommodement à Mme Hoyt en février 2002. Mme Hoyt a rejeté la première proposition et le syndicat, avec l'appui de Mme Hoyt, a rejeté la deuxième proposition.

[54] Les propositions d'accommodement faites par le CN donnent lieu à l'analyse effectuée par la Cour suprême du Canada dans l'arrêt Renaud, [1992] 2 R.C.S. 970, au paragraphe 39, qui nous rappelle que lorsqu'un employeur a communiqué une proposition qui fournirait un accommodement complet quant aux besoins ou restrictions d'un employé, qui est raisonnable dans les circonstances, l'obligation de l'employeur est remplie. Il appartient alors à l'employé et, dans un environnement syndiqué, au syndicat, d'accepter la proposition et d'en faciliter la mise en application. Si le besoin d'accommodement d'un employé est complètement et correctement satisfait, l'employeur ne sera pas tenu de démontrer que l'accommodement équivalait à une contrainte excessive.

[55] La Cour d'appel fédérale a également examiné cette question. M. le juge Pelletier, rédigeant l'opinion commune de la Cour d'appel dans l'arrêt Hutchinson c. Canada (Ministre de l'Environnement), [2003] 4 C.F. 580, au paragraphe 75, a mentionné que lorsqu'il peut être démontré qu'un employeur a pris des mesures raisonnables et a fait des propositions raisonnables qui répondraient aux limitations d'un employé, l'employé n'a pas été défavorisé et une preuve prima facie n'a pas été établie.

[56] J'estime que ni l'une ni l'autre des propositions du CN ne fournissait un accommodement quant aux besoins de Mme Hoyt.

[57] La première proposition d'accommodement du CN était directement contraire à au moins une des restrictions médicales établies par le médecin de Mme Hoyt. Son médecin lui avait dit de ne pas utiliser une loco-commande. Le poste exigeait l'utilisation d'une loco-commande. Mme Hoyt croyait de plus que le poste serait indûment ardu et ainsi contraire à une deuxième des directives de son médecin. Cette offre n'était pas d'une nature envisagée par l'arrêt Renaud; elle ne fournissait pas un accommodement quant aux restrictions établies par son médecin.

[58] La deuxième proposition d'accommodement du CN ne fournissait pas non plus un accommodement à Mme Hoyt. Cette proposition, si elle avait été mise en application, même si elle respectait toutes les restrictions établies par le médecin de Mme Hoyt, donnait lieu à d'autres préoccupations importantes, à savoir : la sécurité et l'ancienneté.

[59] Le syndicat a adopté la position que suivant cette proposition Mme Hoyt ne serait pas en sécurité dans la cour de triage. Mme Hoyt, une chef de train de manuvre expérimentée, avait également cette préoccupation. Les instructions d'opération générales du CN exigeaient que les deux chefs de train portent une loco-commande lorsqu'ils travaillaient dans une équipe de deux chefs de train. La proposition du CN exempterait seulement Mme Hoyt de cette directive en milieu de travail. Comme cela a été mentionné précédemment, la sécurité est une priorité au CN. Les mesures de sécurité sont une partie de l'équipement et une partie de la culture de cette industrie. La préoccupation quant à la sécurité était raisonnable dans les circonstances et représentait un autre besoin parmi les besoins d'accommodement de Mme Hoyt. Le poste offert ne répondait pas à ce besoin et il ne satisfaisait pas complètement les besoins d'accommodement de Mme Hoyt.

[60] La discrimination peut résulter tant de la conduite qui crée un désavantage pratique que des messages qu'une telle conduite peut véhiculer (Vriend c. Alberta, [1998] 1 R.C.S. 493, au paragraphe 100). Le message véhiculé par cette proposition est manifeste. Si elle était mise en application, la proposition signifierait que Mme Hoyt - seulement Mme Hoyt - seulement la femme enceinte - se déplacerait dans le triage Walker, parmi ses 40 voies ferrées, les wagons en mouvement pesant de 30 à 130 tonnes et s'étendant sur un mille de long, sans l'équipement et la protection que les instructions d'opération générales procurent à tous les autres employés travaillant dans une équipe de deux chefs de train. Le message que la mise en application de cette proposition véhiculerait est à première vue discriminatoire.

[61] Cette proposition créait aussi pour Mme Hoyt une crainte raisonnable d'être exposée à d'autres actes discriminatoires si elle devait obtenir un statut d'ancienneté privilégiée. Cette préoccupation était fondée sur l'expérience récemment vécue par une collègue qui avait subi de la part de collègues des commentaires inappropriés et d'autres méfaits. Cette préoccupation qu'avait Mme Hoyt était un autre élément de son besoin d'accommodement et la deuxième proposition du CN ne satisfaisait pas à ce besoin.

[62] Puisqu'elle avait rejeté les offres d'accommodement, Mme Hoyt a été en congé sans solde pendant trois mois et demi. Mme Hoyt n'était pas malade. Elle n'était pas blessée. Elle était une femme enceinte, en santé et au début de sa grossesse. Je conclus que la preuve prima facie a été établie. Entre la mi-février et la fin de mai 2002, la plaignante a été victime de discrimination puisqu'elle n'a pas obtenu un accommodement adéquat quant à sa grossesse.

(ii) Le fait d'être défavorisée en cours d'emploi

[63] Il existe de plus des éléments de preuve démontrant que Mme Hoyt a été traitée de façon différente et qu'elle a été défavorisée en cours d'emploi par rapport à d'autres employés qui n'avaient pas la même caractéristique qu'elle avait, soit être enceinte.

[64] Marvin Sawatzky a témoigné lors de l'audience. M. Sawatzky, un chef de train du CN et un mécanicien de locomotive, s'est blessé à la cheville trois jours avant que Mme Hoyt présente sa demande d'accommodement. M. Sawatzky a obtenu une note de son médecin, l'a apportée au CN et on lui a dit de se présenter au travail le lendemain. Il a d'abord travaillé dans le bureau de l'administration, puis on lui a donné un poste de conducteur de véhicule de transport de l'équipe. Son quart de travail était du lundi au vendredi et commençait à 7 h 30. M. Sawatzky était payé pour tout le quart de travail même s'il quittait le lieu de travail après le repas du midi tous les jours pour aller faire de la physiothérapie. Il retournait à la maison après son rendez-vous. M. Sawatzky est retourné à son emploi habituel au début de mai.

[65] L'époux de Mme Hoyt, qui travaillait en tant que chef de train au CN, parmi d'autres emplois occupés chez cet employeur, est devenu incapable d'utiliser une loco-commande neuf jours après qu'est né le besoin d'accommodement de Mme Hoyt. M. Hoyt avait des maux de dos causés par le harnais de la loco-commande. Comme M. Sawatzky, M. Hoyt a remis au CN une note du médecin qui exposait son besoin d'accommodement. On lui a dit de se présenter au travail le lendemain matin. M. Hoyt s'est joint à M. Swatzky dans un bureau de l'administration sur le triage et il a fait du travail administratif. Il a par la suite été affecté à un poste dans la zone de protection qui comportait la manuvre d'une locomotive dans une équipe de trois personnes. Les équipes de trois personnes n'utilisent pas de loco-commandes. Il est retourné à son poste habituel au début d'avril 2002 après que le CN eut réussi à faire des ajustements à son harnais. M. Hoyt n'a pas été affecté à une équipe de deux chefs de train dans laquelle il devait utiliser une radio plutôt qu'une loco-commande.

[66] Le CN ne pouvait pas, cependant, trouver pour Mme Hoyt un accommodement autre que ce qu'il avait proposé. Elle restait à la maison.

[67] Cette différence de traitement elle-même établit une preuve prima facie de discrimination (Saskatchewan (Human Rights Commission) c. Canadian Odeon Theatres Ltd. (1985), 6 C.H.R.R. D/2682, à D/2689). L'omission du CN d'avoir fourni un accommodement raisonnable à Mme Hoyt entre la mi-février et la fin de mai 2002, en particulier alors que d'autres employés ont obtenu des mesures d'accommodement sans peine, est suffisante pour établir une preuve prima facie de discrimination. Il appartient maintenant au CN de justifier sa conduite selon la prépondérance des probabilités.

B. La justification du CN

[68] Le CN justifie sa conduite en disant qu'il a fait une proposition d'accommodement raisonnable satisfaisant à son obligation prévue par la loi de fournir un accommodement et que Mme Hoyt et le syndicat ne se sont pas acquittés de leur obligation d'accepter l'accommodement raisonnable. Le syndicat était de plus fautif parce qu'il n'a pas communiqué son rejet de la proposition avant la fin d'avril 2002. Finalement, il n'y avait pas au CN d'autres postes disponibles qui auraient pu être offerts à Mme Hoyt jusqu'à ce que le poste de conducteur de véhicule de transport de l'équipe devienne disponible. La preuve du CN à l'égard de la question de la justification est la suivante :

[69] Les objectifs du CN lorsqu'il a traité la demande d'accommodement présentée par Mme Hoyt comportaient deux volets. Premièrement, le CN préférait que ses employés continuent dans la mesure du possible à exercer le métier qu'ils exercent habituellement. Deuxièmement, le CN préférait que ses employés occupent des postes d'accommodement viables, c'est-à-dire des postes utiles aux opérations du CN.

[70] Lorsque, au départ, le CN a reçu la demande d'accommodement de la plaignante et la note du médecin, le superviseur adjoint du CN, Rick Sherbo, s'est renseigné auprès d'autres services du CN afin de voir s'ils avaient des postes disponibles pour une femme enceinte. Il n'a rien trouvé. À ce moment, le CN réduisait le nombre de ses postes administratifs et il avait éliminé peu auparavant certains postes créés pour fournir un accommodement à des employés, étant donné qu'il avait jugé que ces postes n'avaient aucune utilité pour la compagnie.

[71] M. Sherbo a remis la note du médecin à son supérieur, M. Valliere. M. Valliere et M. Sherbo étaient d'avis que l'utilisation de la loco-commande ne présentait aucune inquiétude sur le plan médical pour une femme enceinte. De plus, les restrictions à l'égard des dangers et des activités trop ardues n'étaient pas claires pour les deux hommes. Ils ont décidé d'offrir à Mme Hoyt un poste comportant l'utilisation d'une loco-commande à la butte du triage Walker. Ils estimaient que ce poste serait moins ardu qu'un poste dans le triage. Ils ont de plus décidé de demander au médecin de Mme Hoyt des éclaircissements à l'égard de ses restrictions. Ce poste répondait aux objectifs d'accommodement du CN.

[72] Après avoir reçu la deuxième note du médecin, M. Sherbo et M. Valliere ont discuté de nouveau de l'affaire. Le deuxième poste, celui que Mme Hoyt occuperait dans une équipe de deux chefs de train sans porter une loco-commande, avait été transformé de façon à satisfaire aux objectifs d'accommodement du CN et aux restrictions établies par le médecin. M. Sherbo a témoigné comme suit : [traduction] C'est fondamentalement ce à quoi nous sommes arrivés comme accommodement viable. Le CN a présenté cette proposition au syndicat. Le syndicat, comme nous le savons, a rejeté cette proposition.

[73] M. Sherbo a alors écrit à Mme Hoyt la lettre du 1er mars 2002 l'informant que le syndicat avait rejeté la proposition d'accommodement du CN et qu'il n'y avait pas au CN d'autres postes disponibles pour lui fournir un accommodement quant à sa grossesse.

[74] Les autres solutions proposées par le syndicat ont été rejetées parce que selon le CN elles n'étaient pas viables.

[75] M. Sherbo a dit qu'il a continué, de temps à autre, à se renseigner à l'égard des postes disponibles. Il n'en a trouvé aucun. Il a de plus déclaré qu'après le 1er mars 2002, l'affaire [traduction] est montée à l'autre étage. Il n'était pas au courant des décisions prises ou du raisonnement du CN à l'égard des décisions prises après cette date.

[76] À la mi-mars 2002, un mois après que Mme Hoyt a fait sa première demande d'accommodement et un mois après qu'on l'a envoyée à la maison en congé sans solde, Susan Blackmore, une agente de ressources humaines du CN, a commencé à s'occuper du dossier. Le CN demandait à Mme Blackmore de tenter de convaincre le syndicat de changer d'idée et de consentir à la deuxième proposition d'accommodement. Le CN estimait que l'accommodement était une solution bonne et viable. Elle a parlé à un représentant du syndicat et a fait un suivi par de la correspondance dans laquelle elle demandait une réponse. Mme Blackmore a témoigné qu'elle avait bon espoir que le syndicat modifie sa position et que, même si elle attendait une réponse, elle s'était renseignée de façon non officielle auprès d'autres services afin de voir s'il y avait des postes disponibles. Elle n'a trouvé aucun poste pour Mme Hoyt. Mme Blackmore a expliqué que [traduction] au CN, les postes offrant un accommodement sont limités. À la fin d'avril, le syndicat a présenté de façon officielle au nom de Mme Hoyt un grief de principe. Mme Blackmore a témoigné que ce n'est qu'à ce moment qu'elle a pris conscience que le syndicat ne modifierait pas sa position.

[77] À la fin de mai 2002, on a offert à Mme Hoyt le poste de conducteur de véhicule de transport de l'équipe. Les témoins du CN ne savaient pas quand le poste de conducteur de véhicule de transport de l'équipe était devenu disponible ni la raison pour laquelle il était disponible. Cette décision a été prise par M. Valliere. Il n'a pas été appelé comme témoin.

C. La conduite du CN était-elle justifiée? S'agissait-il d'une EPJ?

[78] L'article 15 de la LCDP prévoit que la conduite d'un employeur, si elle est fondée sur une exigence professionnelle justifiée (EPJ), ne sera pas un acte discriminatoire.

[79] Pour satisfaire au fardeau de preuve, un employeur doit démontrer qu'il s'est acquitté de son obligation de fournir un accommodement raisonnable à moins que cela cause une contrainte excessive (Commission ontarienne des droits de la personne c. Simpson Sears, [1985] 2 R.C.S. 536, voir également Central Alberta Dairy Pool c. Alberta (Human Rights Commission) (1990), 12 C.H.R.R. D/417).

[80] La Cour suprême du Canada, dans l'arrêt Colombie-Britannique (Public Service Employee Relations Commission) c. British Columbia Government and Service Employees' Union (B.C.G.S.E.U.) (Grief Meiorin), [1999] 3 R.C.S. 3 (Meiorin), expose l'obligation d'accommodement d'un employeur et l'analyse selon laquelle les efforts d'un employeur doivent être évalués.

[81] Pour établir cette justification, à savoir l'existence d'une EPJ, l'employeur doit prouver ce qui suit :

  1. qu'il a adopté la norme ou pris la décision dans un but rationnellement lié à l'exécution du travail en cause (Meiorin, précité, au paragraphe 58);
  2. qu'il a adopté la norme ou pris la décision en croyant sincèrement qu'elle était nécessaire pour réaliser le but légitime lié au travail (Meiorin, précité, au paragraphe 60);
  3. que la norme adoptée ou la décision prise était nécessaire pour réaliser le but légitime lié au travail (Meiorin, précité, au paragraphe 62).

(i) Le lien rationnel

[82] Pour satisfaire au premier volet du critère énoncé dans l'arrêt Meiorin, l'employeur doit démontrer qu'une décision prise est rationnellement liée au travail en cause. L'accent dans cette première étape ne porte pas sur la validité de décisions particulières qui ont été prises, mais plutôt sur la validité d'une fin plus générale.

[83] Les décisions prises par le CN lorsqu'il a tenté de fournir un accommodement à Mme Hoyt ont été d'abord de l'envoyer chez elle en congé sans solde jusqu'à ce que la note du médecin soit prise en compte, puis de lui offrir un poste à la butte du triage Walker et ensuite de lui offrir au triage un poste de chef de train dans lequel elle ne porterait pas de loco-commande. Le CN n'a pas pu trouver d'autres postes pour fournir un accommodement à Mme Hoyt jusqu'à la fin de mai 2002.

[84] Le CN a donné deux raisons quant aux décisions prises à l'égard de l'accommodement à Mme Hoyt. Le CN préférait que ses employés continuent à exercer le métier qu'ils exercent habituellement lorsque cela était raisonnablement possible. Le CN préférait de plus que ses employés occupent des postes viables, c'est-à-dire des postes utiles à ses opérations.

[85] Je conclus que dans l'ensemble ces objectifs généraux, à savoir la volonté que les employés continuent à exercer le métier qu'ils exercent habituellement et la viabilité économique, sont raisonnables et que les décisions sont rationnellement liées aux objectifs énoncés par le CN.

(ii) La croyance sincère

[86] La deuxième étape du critère de l'arrêt Meiorin est l'élément subjectif du critère. L'employeur doit démontrer qu'il a adopté la norme particulière en croyant sincèrement qu'elle était nécessaire à la réalisation de son objet. L'employeur doit en outre démontrer qu'il a agi sans qu'il ait eu l'intention de faire preuve de discrimination envers le demandeur (Meiorin, précité, au paragraphe 60).

[87] Je conclus que le CN ne s'est pas acquitté de son fardeau à cette deuxième étape de l'analyse.

[88] Le CN est un employeur important et averti. Le CN a un service de la gestion du risque et un service de ressources humaines qui comptent de nombreux employés qui s'occupent sur une base quotidienne des questions se rapportant à l'accommodement. Les employés du service des ressources humaines représentent leur employeur lors des arbitrages de griefs sur le lieu de travail, répondent aux plaintes déposées par les employés en vertu du Code canadien du travail et aux plaintes déposées en vertu de la LCDP. Le CN a beaucoup de ressources et il est approprié de considérer que cet employeur comprend le contenu de son obligation de fournir un accommodement selon ce que prévoient les lois et selon la formulation du Tribunal et de nos cours de justice.

[89] Le CN a en matière d'accommodement des politiques qui formulent de façon raisonnable, quoique peu en profondeur, le contenu de l'obligation d'accommodement et qui exposent les procédures devant être utilisées par les chefs hiérarchiques du CN lorsqu'ils examinent les demandes d'accommodement. Le CN a omis de suivre une grande partie de sa propre politique en matière d'accommodement lorsqu'il a traité la demande d'accommodement présentée par Mme Hoyt.

[90] Compte tenu de toutes les circonstances, je conclus que le CN ne croyait pas que sa décision était raisonnablement nécessaire et qu'il ne croyait pas qu'il n'exerçait pas de la discrimination à l'endroit de Mme Hoyt dans ses efforts d'accommodement ou qu'il croyait de façon inconsidérée qu'il ne le faisait pas.

[91] Comme cela a été établi précédemment dans les présents motifs, les offres d'accommodement faites à Mme Hoyt ne répondaient pas à son besoin d'accommodement. En outre, comme je l'expliquerai plus en détail ci-après, les efforts du CN pour fournir un accommodement à Mme Hoyt étaient cruellement loin de son obligation de lui fournir un accommodement, comme cette obligation est examinée à fond, ci-après et ne suivent pas adéquatement sa propre politique en matière d'accommodement. Le CN savait ou devait savoir qu'il se livrait à un acte discriminatoire. Le CN n'a pas satisfait à ce deuxième volet du critère.

(iii) La nécessité raisonnable

[92] La troisième étape du critère de l'arrêt Meiorin exige que l'employeur démontre, selon la prépondérance des probabilités, que la ou les décisions prises sont raisonnablement nécessaires à la réalisation de ses objectifs liés au travail. La décision sera raisonnablement nécessaire si l'employeur peut démontrer qu'il ne peut pas fournir un accommodement à un employé sans subir une contrainte excessive (Meiorin, précité, au paragraphe 62, voir également Hutchinson, précitée, au paragraphe 70, et Audet c. CN, 2006 TCDP 25, au paragraphe 50).

[93] Le CN a fait deux propositions d'accommodement qui serviraient son objectif selon lequel Mme Hoyt continuerait à exercer le métier qu'elle exerce habituellement et celui selon lequel elle occuperait un poste utile aux opérations du CN. J'ai conclu précédemment qu'aucune de ces propositions ne répondait aux besoins d'accommodement raisonnables de Mme Hoyt. La première proposition ne satisfaisait pas aux restrictions médicales établies par son médecin. La deuxième proposition soulevait des préoccupations importantes quant à la sécurité et une préoccupation selon laquelle le fait d'accorder à Mme Hoyt un statut d'ancienneté privilégiée lui ferait subir encore plus de discrimination. Le syndicat a rejeté de façon raisonnable cette proposition.

[94] Le CN a conclu qu'il ne pouvait offrir aucun autre poste à Mme Hoyt et que cette dernière resterait chez elle en congé sans solde. Cette décision était-elle raisonnablement nécessaire au sens envisagé dans l'arrêt Meiorin? J'estime qu'elle ne l'était pas.

[95] Il faut d'abord, à l'égard du troisième volet du critère, examiner le processus adopté pour évaluer la question de l'accommodement, puis examiner la teneur réelle de la décision rendue (Meiorin, précité, au paragraphe 66).

[96] Un employeur doit démontrer que le processus adopté pour évaluer la question de l'accommodement était approprié. Un employeur doit être soucieux et respectueux des aptitudes, des capacités et de l'apport potentiel des employés qui ont besoin d'accommodement (Meiorin, précité, au paragraphe 64, et voir également Audet, précitée, au paragraphe 51); un employeur doit, en matière d'accommodement, examiner en profondeur des méthodes de rechange qui pourraient être moins discriminatoires, et démontrer que toute méthode de rechange examinée a été rejetée pour des motifs appropriés (Meiorin, précité, au paragraphe 65, et voir également Audet, précitée, au paragraphe 62); un employeur doit être innovateur tout en étant pratique lorsqu'il évalue des questions d'accommodement. Je conclus que le CN n'a pas respecté ces exigences du processus.

[97] Je conclus que le CN n'a pas été soucieux ou respectueux des aptitudes, des capacités et de l'apport potentiel de Mme Hoyt. Le CN n'a pas pris de mesures visant à découvrir les aptitudes et capacités réelles de Mme Hoyt. Le CN n'a même pas rencontré Mme Hoyt d'une manière constructive au cours de cette période, même si sa propre politique en matière d'accommodement prévoit comme première étape du processus une rencontre avec l'employé. Le CN n'a préparé aucun profil détaillé des aptitudes et capacités de Mme Hoyt pour l'assister dans son examen. Mme Hoyt était une femme en bonne santé qui avait beaucoup à offrir à son employeur. Nous savons qu'elle avait de l'expérience en soudure et, parce qu'elle travaillait depuis longtemps pour le CN, elle connaissait très bien les opérations du CN. Quelles autres aptitudes et capacités pouvait-elle avoir? Cette étape de collecte de renseignements est cruciale dans le processus d'accommodement et le CN n'en a pas tenu compte. Il est peu probable que, sans avoir une véritable appréciation de qui était Mme Hoyt et de ce qu'elle pouvait faire pour aider la compagnie, un employeur soit correctement capable de s'occuper de ses autres obligations procédurales.

[98] Je conclus que le CN n'a pas démontré qu'il avait examiné en profondeur toutes les méthodes de rechange en vue de l'accommodement à offrir à Mme Hoyt. Le CN n'a pas démontré qu'il avait lui-même généré et examiné quelque autre possibilité aux propositions faites, et ce malgré les directives contenues dans sa propre politique en matière d'accommodement prévoyant qu'il devait se renseigner, examiner en détail d'autres possibilités et conserver des dossiers à l'égard de chaque étape du processus. Aucun dossier n'a été présenté en preuve. En outre, le CN a rejeté les propositions présentées par le syndicat. Certains des postes proposés auraient permis à Mme Hoyt de continuer à exercer le métier qu'elle exerçait habituellement ou d'occuper un poste assez étroitement lié à son métier et auraient ainsi satisfait au premier objectif du CN en matière d'accommodement. La raison pour laquelle le CN a rejeté ces propositions était qu'à son avis elles n'étaient pas viables. Le CN n'a présenté aucun élément de preuve démontrant qu'il a examiné en détail chacune des propositions ou qu'il a examiné en détail les coûts de mise en application de l'une ou l'autre de ces propositions; il n'a pas non plus présenté d'éléments de preuve démontrant que le coût serait exagéré. Le CN n'a pas démontré que son rejet des propositions du syndicat était fondé sur des facteurs appropriés.

[99] Les efforts faits par le CN pour fournir un accommodement à Mme Hoyt, autres que les deux propositions dont il a été précédemment traité, se limitaient à des demandes de renseignements faites par téléphone. Contrairement à la directive contenue dans la politique du CN en matière d'accommodement, aucun dossier n'avait été tenu quant à ces demandes et nous ne pouvons donc pas connaître l'étendue, la profondeur et la persévérance des recherches à cet égard. Mme Blackmore a témoigné qu'elle s'est renseignée auprès d'autres services par téléphone après qu'elle a commencé à s'occuper de l'affaire à la mi-mars 2002. M. Sherbo a témoigné que lui aussi avait téléphoné à divers services du CN pour tenter de trouver un poste pouvant répondre aux besoins d'une employée [traduction] qui était enceinte. Il avait aussi fait à l'occasion de telles demandes de renseignements en personne. Ce type de recherche non officielle est loin de l'obligation établie dans l'arrêt Meiorin. Ce type de recherche est de plus humiliant pour Mme Hoyt et met en évidence l'importance de l'étape préliminaire de collecte de renseignements et de son lien crucial avec la protection de la dignité humaine.

[100] Le CN essayait, par ces demandes de renseignements par téléphone, de trouver des postes disponibles, c'est-à-dire des postes à pourvoir, adoptant la position que s'il n'y avait pas de postes à pourvoir le CN était incapable d'offrir un accommodement à un employé.

[101] Bien que ce point de vue très étroit quant à une recherche de postes d'accommodement réponde à l'objectif de viabilité du CN quant au travail, il ne satisfait pas, à lui seul, à son obligation de fournir un accommodement. La juge McLachlin fait remarquer dans l'arrêt Meiorin qu'[i]l peut être idéal, du point de vue de l'employeur, de choisir une norme d'une rigidité absolue. Elle explique ensuite, cependant, que pour être justifiée en vertu de la législation sur les droits de la personne la norme doit tenir compte de facteurs concernant les capacités uniques ainsi que la valeur et la dignité inhérentes de chaque personne dans la mesure où cela n'impose aucune contrainte excessive (Meiorin, précité, au paragraphe 62). Le CN n'a pas démontré que ce point de vue étroit à l'égard de l'accommodement était le mieux qu'il puisse faire sans subir de contrainte excessive.

[102] Les employeurs doivent être innovateurs dans leur recherche de l'accommodement à fournir à un employé. Ils doivent faire preuve de flexibilité et de créativité. Le CN n'a pas démontré qu'il avait fait de façon appropriée de l'innovation ou qu'il avait fait preuve de flexibilité ou de créativité.

[103] J'estime que la décision Saunders c. Kentville (Town), [2004] N.S.H.R.B.I.D. no 9, est riche en renseignements. Dans cette affaire, une commission d'enquête de Nouvelle-Écosse examinait la plainte formulée par une policière qui alléguait que son détachement ne lui avait pas fourni un accommodement du fait de son sexe et de sa grossesse. Le président Deveau a utilisé l'analyse établie dans l'arrêt Meiorin dans le contexte d'un petit service de police en Nouvelle-Écosse. Le président a conclu que, même s'il s'agissait d'un petit service de 12 à 14 employés, et même si l'accommodement était peu commode, l'employeur ne s'est pas acquitté de son obligation de fournir un accommodement étant donné qu'il a fait peu d'efforts visant à regrouper un certain nombre de tâches et de fonctions sur une base temporaire pour trouver une façon de fournir un accommodement à la plaignante. Le président a conclu que l'employeur avait une obligation d'étudier à fond pleinement et complètement les possibilités de fonctions légères dans la mesure où cela ne causait pas une contrainte excessive. L'employeur n'avait pas prouvé que c'est ce qu'il avait fait.

[104] Le CN est une entreprise beaucoup plus grande. Le CN avait environ 100 employés qui travaillaient sur le terrain de triage au terminal d'Edmonton au cours de la période pertinente et environ 200 autres employés qui travaillaient à l'édifice administratif du centre-ville. Avec un si grand nombre de fonctions professionnelles exercées à partir du terminal d'Edmonton, un employeur faisant correctement preuve d'innovation et de flexibilité pourrait sûrement tenter de créer, modifier ou réaménager une ou plusieurs fonctions professionnelles pour fournir un accommodement à Mme Hoyt d'une manière répondant à ses objectifs liés au travail. Le CN n'a présenté aucun élément de preuve démontrant qu'il avait fait ce type de recherche.

[105] Allant au-delà du processus utilisé par le CN dans son examen de l'accommodement à fournir à Mme Hoyt et voyant la teneur des décisions rendues, il est clair que le CN n'a pas démontré que ses décisions étaient justifiées selon la manière envisagée dans l'arrêt Meiorin. Le CN n'a présenté aucun élément de preuve donnant à penser qu'il subirait une contrainte excessive en offrant à Mme Hoyt un poste de remplacement à titre d'accommodement. Comme le Tribunal a récemment fait remarquer, un employeur doit démontrer d'une manière réelle et concrète qu'il existe une contrainte excessive (Audet, précitée, au paragraphe 106). Je conclus que le CN n'a pas démontré que lorsqu'il a reçu la première demande d'accommodement faite par Mme Hoyt il était impossible de lui trouver un autre poste le lendemain, comme il l'a fait pour M. Sawatzky et pour M. Hoyt.

[106] Le CN ne s'est pas acquitté de son fardeau de preuve prévu par l'alinéa 15(1)a) de la LCDP; il n'a pas démontré qu'il lui serait impossible de fournir un accommodement à Mme Hoyt qui tiendrait compte de sa grossesse sans subir une contrainte excessive.

D. Le syndicat a-t-il entravé les tentatives faites par le CN en vue de fournir un accommodement à Mme Hoyt?

[107] Le CN allègue dans son exposé des précisions que le syndicat a entravé ses tentatives visant à fournir un accommodement à Mme Hoyt. Premièrement, le syndicat a refusé de donner son consentement quant à un poste de chef de train dans une équipe de deux chefs de train dont un seul utiliserait une loco-commande. Deuxièmement, le syndicat n'a pas communiqué sa position avant le mois d'avril 2002 et, en conséquence, l'accommodement pouvant être offert à Mme Hoyt a été retardé.

[108] J'estime que le syndicat n'a pas entravé les efforts d'accommodement. Premièrement, le syndicat n'a pas agi de manière incorrecte en rejetant l'accommodement proposé par le CN. J'ai mentionné précédemment que les préoccupations quant à la sécurité et quant à l'ancienneté exprimées par le syndicat et partagées par Mme Hoyt étaient des éléments de ses besoins d'accommodement raisonnables. Dans ces circonstances, le rejet du syndicat de l'accommodement proposé par le CN n'était pas incorrect. En outre, l'obligation du syndicat de faciliter l'accommodement ne naît que lorsque sa participation est nécessaire pour rendre l'accommodement possible et qu'aucune autre solution raisonnable n'a été trouvée ou n'aurait pu raisonnablement être trouvée (Renaud, précité, au paragraphe 50). J'ai conclu précédemment que le CN n'avait pas démontré qu'il n'y avait aucun autre poste qui aurait pu être offert à Mme Hoyt.

[109] Je conclus de plus, selon la preuve, que le syndicat n'a pas entravé la tentative d'accommodement faite par le CN en tardant à communiquer sa position au CN. Le syndicat a raisonnablement rejeté, sans délai et à plus d'une reprise, la deuxième offre d'accommodement faite par le CN. Le syndicat, par l'intermédiaire de plus d'un de ses représentants, a rejeté la proposition du CN le 26 février, le 28 février et le 1er mars 2002. Le syndicat a fait plusieurs propositions quant à d'autres postes qui auraient pu être offerts à Mme Hoyt. Le CN a rejeté toutes les propositions faites par le syndicat. Le CN n'a pris aucune autre mesure en vue de fournir un accommodement à Mme Hoyt avant la fin de mai 2002. J'ai précédemment conclu que le CN n'a pas démontré qu'il ne pouvait pas rapidement fournir un accommodement à Mme Hoyt. Elle aurait dû être de retour au travail.

[110] Environ un mois après que Mme Hoyt a demandé pour la première fois un accommodement, le CN a engagé Mme Blackmore pour essayer de convaincre le syndicat de changer d'idée. Mme Blackmore a témoigné qu'elle avait compris que le syndicat examinait sa demande et qu'elle espérait qu'il changerait d'idée. Mme Blackmore et le CN ont attendu. Mme Hoyt est restée chez elle.

[111] La preuve du syndicat était que sa position selon laquelle il n'était pas sécuritaire que dans une équipe de deux chefs de train un seul utilise une loco-commande était une position qui datait de longtemps et, de plus, qu'il n'avait jamais songé à modifier sa position en ce qui concerne l'accommodement proposé à Mme Hoyt. La preuve du syndicat est que le délai écoulé avant qu'il réponde aux demandes de Mme Blackmore dépendait du fait qu'il cherchait des renseignements additionnels avant de finaliser son grief.

[112] Le CN prétend que c'est le délai écoulé avant que le syndicat réponde à la demande de reconsidérer sa position présentée par Mme Blackmore qui a créé le délai écoulé avant de fournir un accommodement à Mme Hoyt ou qui y a contribué.

[113] La preuve du CN selon laquelle il pensait que le syndicat pouvait se laisser convaincre de modifier sa position et examinait en fait une telle modification à l'égard de l'accommodement de Mme Hoyt semble quelque peu trompeuse compte tenu de l'historique de l'affaire. Le syndicat rejetait depuis longtemps la position du CN à cet égard. En outre, les représentants du syndicat ont rejeté clairement la proposition à trois reprises entre le 26 février et le 1er mars 2002.

[114] Il n'est pas nécessaire que je tire une conclusion quant à savoir si le CN croyait sincèrement que le syndicat, entre la mi-mars et la fin d'avril, examinait la possibilité de modifier sa position. J'ai conclu que cette proposition n'était ni raisonnable ni nécessairement raisonnable. J'ai de plus conclu que le CN le savait ou devait le savoir. Mme Hoyt aurait dû obtenir un accommodement bien avant que Mme Blackmore commence à s'occuper de l'affaire à la mi-mars, plus d'un mois après le début du congé sans solde de Mme Hoyt.

[115] Je conclus que le syndicat n'a pas entravé les efforts d'accommodement faits par le CN.

E. La plaignante a-t-elle établi une preuve prima facie de discrimination fondée sur la situation de famille?

[116] À l'égard d'un individu, suivant la LCDP, constitue un acte discriminatoire, s'il est fondé sur un motif de distinction illicite, le fait [...] de le défavoriser en cours d'emploi (alinéa 7b)). Mme Hoyt allègue qu'en plus de subir de la discrimination fondée sur le sexe, elle a subi de la discrimination fondée sur la situation de famille.

[117] La discrimination fondée sur ce motif a été définie par la jurisprudence comme s'entendant de [...] mesures ou d'attitudes qui ont pour effet de limiter les conditions d'embauche ou les perspectives d'emploi des employés sur la base d'une caractéristique liée à leur [...] famille (Ontario (Commission des droits de la personne) c. M. A et al, [2000] O.J. no 4275 (C.A.); confirmé par [2002] A.C.S. no 67].

[118] Dans une décision antérieure à l'affaire Ontario, mais clairement conforme à la définition qu'on y retrouve, le Tribunal a examiné les exigences en matière de preuve qui permettent d'établir une preuve prima facie :

[...] la preuve doit indiquer que la situation de famille comprend le fait d'être parent et les tâches et obligations de cette personne comme membre de la société et que la plaignante était un parent qui devait remplir ces tâches et obligations. La preuve doit aussi démontrer que, en raison de ces tâches et obligations ainsi que de la règle de l'emploi impartial, la plaignante n'a pas eu de chances de travail égales et entières (Brown c. Canada (Ministère du Revenu national, Douanes et Accise), [1993] D.C.D.P. no 7, à la page 13). (Voir également Woiden et al c. Dan Lynn, D.T. 09/02)

[119] La Cour d'appel de la Colombie-Britannique, dans l'arrêt Health Sciences Assn. of British Columbia c. Campbell River and North Island Transition Society, [2004] B.C.J. no 922, a formulé de façon différente la preuve nécessaire pour établir une preuve prima facie. La Cour d'appel a statué que les paramètres de la situation de famille en tant que motif de discrimination dans le code en matière de droits de la personne de la Colombie-Britannique ne doivent pas être établis de façon trop large puisque cela pourrait causer [traduction] de la perturbation ou des torts sérieux sur le lieu de travail. La Cour a indiqué qu'une preuve prima facie est établie [traduction] lorsqu'une modification d'une condition d'emploi imposée par un employeur entraîne une perturbation grave à l'égard d'une importante obligation parentale ou autre obligation familiale de l'employé. Le juge Low a fait remarquer que la preuve prima facie serait difficile à établir dans des cas de conflit entre les exigences de travail et les obligations familiales.

[120] Avec déférence, je ne souscris pas à l'analyse de la Cour d'appel de la Colombie-Britannique. Les codes en matière de droits de la personne, en raison de leur statut de loi fondamentale, doivent être interprétés de façon libérale afin qu'ils puissent mieux réaliser leurs objectifs (Commission ontarienne des droits de la personne et O'Malley c. Simpson-Sears Ltd., [1985] 2 R.C.S. 536, à la page 547, Compagnie des chemins de fer nationaux du Canada c. Canada (Commission canadienne des droits de la personne), [1987] 1 R.C.S. 1114, aux pages 1134 à 1136; Robichaud c. Canada (Conseil du Trésor), [1987] 2 R.C.S. 84, aux pages 89 et 90). Il serait, à mon avis, inapproprié de choisir un motif de distinction illicite et de lui donner une définition plus restrictive.

[121] À mon humble avis, les préoccupations définies par la Cour d'appel, à savoir la perturbation grave et les torts sérieux sur le lieu de travail, peuvent être des questions appropriées à examiner suivant l'analyse de l'arrêt Meiorin, et en particulier suivant le troisième volet de l'analyse, à savoir la nécessité raisonnable. Dans le contexte de l'évaluation de l'importance de la contrainte, il se peut qu'une mesure d'accommodement donne lieu à des questions comme la perturbation grave sur le lieu de travail et l'effet grave sur le moral des employés, qui sont des facteurs appropriés (voir l'arrêt Central Alberta Dairy Pool c. Alberta (Commission des droits de la personne), [1990] 2 R.C.S. 489, aux pages 520 et 521). Il appartient à l'employeur d'établir au cas par cas l'existence d'une contrainte excessive. Une simple crainte que la mesure d'accommodement entraînerait une contrainte excessive n'est pas un motif approprié, à mon humble avis, pour écarter l'analyse.

[122] La preuve particulièrement pertinente quant à cet élément de la plainte naît au moment où on a donné à Mme Hoyt le poste de conducteur de véhicule de transport de l'équipe à la fin de mai 2002. Cependant, ces faits font partie de l'ensemble de la situation et ne constituent pas une plainte distincte. Pour bien comprendre l'élément de la plainte qui porte sur la situation de famille, il faut considérer que les faits pertinents quant à cette deuxième allégation font partie des relations continues entre Mme Hoyt et le CN relativement à la question de sa demande d'accommodement antérieure.

[123] Mme Hoyt avait trouvé un service de garde pour sa fille en février, puisqu'elle s'attendait à ce que le CN lui fournisse rapidement un accommodement quant aux restrictions établies par son médecin. Elle a trouvé un service de garde qui pouvait répondre aux besoins inhabituels des employés des chemins de fer. Le CN ne lui a pas fourni un accommodement rapidement. Lorsque le CN lui a finalement téléphoné le 25 mai pour lui dire de se présenter au travail le 28 mai, Mme Hoyt a téléphoné à ce service de garde et elle a appris qu'il n'y avait plus de places disponibles. Elle a appelé d'autres personnes, principalement des adolescents du voisinage, qu'elle avait déjà engagées pour garder son enfant. Ces adolescents n'étaient pas disponibles puisqu'ils étaient à l'école durant la semaine, jusqu'à la fin de juin. Au cours du préavis de trois jours reçu du CN, elle a pu prendre des dispositions pour faire garder sa fille, sauf pour trois samedis en juin.

[124] Lorsqu'on lui a demandé pourquoi elle n'avait pas fait une recherche plus systématique quant à un service de garde, Mme Hoyt a expliqué qu'il aurait été difficile de trouver un service de garde ouvert le samedi ou aussi tard qu'elle aurait besoin, étant donné qu'elle était affectée à un quart de travail d'après-midi qui nécessitait qu'elle travaille de 15 h à 23 h. De plus, elle a expliqué que même si elle avait pu trouver un service de garde, il n'aurait pas été possible de faire les vérifications appropriées ou de prendre le temps de se familiariser avec le service de garde et d'habituer sa fille à le fréquenter. Sa fille âgée de deux ans, comme cela a été précédemment mentionné, ne s'était jamais fait garder ailleurs que dans sa propre maison et Mme Hoyt ne voulait pas la placer abruptement dans un lieu qu'elle ne connaissait pas avec des gens qu'elle ne connaissait pas.

[125] Lorsqu'elle a demandé un accommodement, et en particulier lorsqu'elle a demandé de travailler pendant un quart de travail qui lui permettrait d'éviter de travailler les samedis de ces trois semaines, le CN a rejeté la proposition. Le CN l'a informée qu'il lui permettrait de prendre des congés sans solde pour ces trois samedis.

[126] Le CN semble nier que Mme Hoyt ait été défavorisée en cours d'emploi. Le CN a une politique qui consiste à aider les parents qui vivent des situations dans lesquelles ils ne peuvent pas faire garder leurs enfants. Plutôt que de prendre des mesures disciplinaires contre un employé qui s'absente d'un quart de travail pour cette raison, le CN permet à l'employé de s'absenter sans être payé pendant quelques quarts de travail afin de lui permettre de prendre les dispositions nécessaires. Le CN traitait Mme Hoyt de la même manière dont il traitait tous les autres employés ayant des préoccupations quant à la garde d'enfants. Le fait que le CN traitait Mme Hoyt de la même manière dont il traitait d'autres employés ayant des préoccupations quant à la garde d'enfants ne signifie pas que Mme Hoyt n'a pas été défavorisée en cours d'emploi.

[127] Le CN n'a pas fourni un accommodement à Mme Hoyt pendant trois mois et demi. Elle est restée à la maison en congé sans solde. Au moment où le CN a finalement rendu disponible un poste de conducteur de véhicule de transport de l'équipe, Mme Hoyt n'avait plus la possibilité de faire garder son enfant au service de garde avec lequel elle avait précédemment pris des dispositions. Elle n'a pas pu obtenir un autre service de garde pour trois semaines. On lui a toutefois offert une fois de plus un congé sans solde. Dans ces circonstances, je conclus que, à première vue, il était discriminatoire pour le CN de ne pas fournir un accommodement à l'égard de la modeste demande qui résultait de sa conduite fautive antérieure.

[128] Il est aussi frappant de voir la différence avec le traitement offert à M. Sawatzky, l'employé qui conduisait le véhicule de transport de l'équipe avant elle. Il conduisait le véhicule du lundi au vendredi. De plus, M. Sawatzky quittait son travail plus tôt pour aller faire de la physiothérapie chaque jour et il était payé pendant les périodes où il faisait de la physiothérapie. On répondait largement à ses besoins. Pourquoi les besoins d'accommodement de Mme Hoyt n'ont-ils pas été satisfaits?

[129] Je conclus que la preuve prima facie a été établie. Mme Hoyt a démontré selon la preuve qu'elle était un parent et qu'elle avait des tâches et obligations de parent à accomplir. Mme Hoyt a tenté d'obtenir, dans un très court délai, un service de garde d'enfants de qualité qui ne causerait pas un stress indu à sa petite fille. Elle a réussi en grande partie et elle n'avait besoin qu'on lui fournisse un accommodement que pour trois jours. La directive du CN selon laquelle elle pouvait rester à la maison ces trois samedis, sans être payée, faisait en sorte qu'elle n'avait pas de chances de travail égales et entières chez son employeur.

F. La justification du CN

[130] Le CN justifiait le rejet de la demande de Mme Hoyt de travailler du lundi au vendredi pendant trois semaines en juin en disant que le surintendant Valliere avait fait certaines recherches et avait déterminé que le quart de travail du mardi au samedi était le plus viable au CN étant donné que les taxis étaient particulièrement occupés le vendredi et le samedi et étaient ainsi plus souvent en retard pour passer prendre les membres de l'équipe. Des équipes en retard coûtaient de l'argent.

G. La conduite du CN était-elle justifiée? La conduite était-elle une EPJ?

[131] Passant à l'analyse de l'alinéa 15(1)a) selon ce qui est énoncé dans l'arrêt Meiorin, je conclus que les deux premiers volets du critère ont été établis par le CN. Premièrement, la décision de créer un quart de travail du mardi au samedi avait un lien rationnel avec un objectif de productivité lié au travail du CN. M. Valliere a déterminé que le quart de travail du mardi au samedi était le quart de travail pendant lequel le véhicule de transport de l'équipe était le plus utile au CN. Deuxièmement, je conclus que le CN a pris la décision en croyant sincèrement qu'elle était nécessaire pour réaliser cet objectif et qu'il n'y avait pas d'animosité discriminatoire.

[132] Cependant, je conclus que l'employeur ne s'est pas acquitté de son fardeau établi suivant le troisième volet du critère. Le CN n'a présenté aucun élément de preuve démontrant qu'il aurait subi une contrainte excessive s'il avait adapté l'horaire de Mme Hoyt. Mme Hoyt aurait, pendant trois semaines, travaillé un dimanche ou un lundi, des jours pendant lesquels un véhicule de transport de l'équipe n'était pas aussi utile au CN. Subsidiairement, le CN aurait dû payer un autre employé pour conduire le véhicule de transport de l'équipe les samedis ou donner aux employés ayant besoin de se déplacer la directive d'appeler un taxi, comme le CN faisait quand il n'y avait pas de véhicule de transport de l'équipe en service. Le CN n'a présenté aucun élément de preuve quant aux coûts en cause et il n'a pas démontré qu'il aurait subi une contrainte excessive. Je conclus que le CN ne s'est pas acquitté de son fardeau à cet égard.

H. Conclusion de discrimination

[133] Pour tous les motifs énoncés, je conclus que Mme Hoyt a fait l'objet de discrimination du fait de son sexe et de sa situation de famille, en contravention de l'article 7 de la LCDP, parce que l'intimée a omis de lui fournir un accommodement. Je conclus que le CN n'a pas établi que son omission d'avoir fourni un accommodement qui tenait compte du sexe et de la situation de famille de Mme Hoyt découlait d'une exigence professionnelle justifiée suivant l'article 15 de la LCDP. La plainte de Mme Hoyt est par conséquent fondée.

V. LES REDRESSEMENTS DEMANDÉS

A. Par la plaignante

(i) Une ordonnance prévoyant que le CN révise sa politique en matière d'accommodement

[134] Mme Hoyt demande une ordonnance, suivant l'alinéa 53(2)a) de la LCDP, prévoyant que le CN prenne, en consultation avec la Commission canadienne des droits de la personne, des mesures de redressement à l'égard de son omission de fournir un accommodement approprié à ses employés.

[135] J'ai entendu au cours de l'audience de la preuve quant aux antécédents du CN en matière d'accommodement aux employés. La preuve fournie par le CN présentait certaines histoires d'une réussite et la preuve fournie par le syndicat et celle fournie par Mme Hoyt établissaient l'existence d'histoires moins réussies. On m'a remis des décisions portant sur des arbitrages de griefs, mais aucun employé, autre que Mme Hoyt, n'a présenté un témoignage sur une expérience vécue lorsqu'il a eu besoin de mesures d'accommodement. L'avocate de la plaignante demandait avec insistance que je tire une conclusion selon laquelle il existait au CN de la discrimination systémique et que j'accorde le redressement demandé sur le fondement de cette conclusion. J'estime, cependant, que la preuve dont dispose le Tribunal n'était pas adéquate pour que je tire quelque conclusion qu'il existe des problèmes systémiques à l'égard des processus du CN en matière d'accommodement ou pour que j'ordonne un redressement sur le fondement d'une telle conclusion.

[136] Je conclus, cependant, que l'ordonnance demandée par la plaignante devrait être accordée. D'abord, bien que le CN ait une politique en matière d'accommodement, cette politique n'a pas été suivie. La politique envisage des rapports axés sur l'attention et la consultation entre le CN et ses employés qui ont besoin de mesures d'accommodement. Le CN doit en premier lieu rencontrer l'employé, afin de découvrir les besoins, examiner les possibilités, documenter les mesures prises et communiquer à l'employé les mesures prises et les raisons des décisions rendues. La preuve établit clairement que le CN n'a pas suivi les directives à cet égard lorsqu'il a examiné les possibilités d'accommodement à offrir à Mme Hoyt.

[137] La preuve démontre également que le CN, par l'intermédiaire de ses employés chargés de faciliter l'accommodement, a adopté à l'égard de l'accommodement à Mme Hoyt une méthode qui, de façon alarmante, est loin de son obligation de fournir un accommodement. Je suis convaincue que la politique en matière d'accommodement du CN ne formule pas suffisamment clairement le contenu de l'obligation de l'employeur de fournir un accommodement et les directives quant au processus de l'arrêt Meiorin. Je suis également convaincue que le CN n'a pas pris les mesures nécessaires pour s'assurer que ses employés qui traitaient la demande d'accommodement présentée par Mme Hoyt comprennent le contenu de l'obligation de l'employeur et suivent les directives quant au processus énoncées dans l'arrêt Meiorin. Je conclus pour ces raisons que cette demande de redressement est justifiée.

[138] J'ordonne, suivant l'alinéa 53(2)a) de la LCDP, que le CN mette fin aux actes discriminatoires et que le CN prenne, en consultation avec la Commission canadienne des droits de la personne relativement à leurs objectifs généraux, des mesures de redressement ou des mesures destinées à prévenir des actes semblables, et en particulier que le CN prenne les mesures nécessaires pour s'assurer que l'intimée et ses employés chargés de faciliter l'accommodement comprennent le contenu de l'obligation de l'employeur de fournir un accommodement aux employées enceintes et le processus à utiliser pour en faciliter l'application.

(ii) Une indemnité pour pertes de salaire et d'avantages

[139] Suivant l'alinéa 53(2)c) de la LCDP, j'ordonne au CN d'indemniser Mme Hoyt pour toutes pertes de salaires et d'avantages subies du 18 février 2002 jusqu'à la date à laquelle elle a recommencé à conduire le véhicule de transport de l'équipe en juillet 2002. J'ai été informée que Mme Hoyt a reçu du CN certaines sommes d'argent à titre d'indemnité partielle pour pertes de salaire au cours de cette période et j'ordonne que l'indemnité soit ajustée en conséquence.

(iii) Une indemnité pour préjudice moral

[140] Mme Hoyt a témoigné à l'égard de l'effet émotionnel que la conduite du CN a créé pour elle. Mme Hoyt a décrit qu'au départ elle s'était sentie perplexe. Elle avait tenu pour acquis que le CN s'acquitterait de son obligation légale de lui fournir un accommodement. Elle a ensuite senti qu'elle était trahie par son employeur, elle avait le sentiment que son employeur ne l'appréciait pas et elle était déprimée. Nos tribunaux ont reconnu le rôle central qu'occupe l'emploi d'un individu quant à son sens d'identité, à son estime de soi et à son bien-être moral (Renvoi relatif à la Public Service Employee Relations Act (Alb.), [1987] 1 R.C.S. 313, à la page 368). Il est triste, mais non surprenant d'entendre que la conduite de l'employeur de Mme Hoyt lui a causé un préjudice moral. L'anxiété et la détresse d'être à la maison, sans obtenir aucun accommodement et sans recevoir quelque communication de la part du CN, même après avoir écrit une lettre demandant des renseignements, ont augmenté à mesure que le temps a passé. Mme Hoyt s'inquiétait du fait que le temps pendant lequel elle ne travaillait pas ferait en sorte qu'elle ne serait pas admissible à des prestations de maternité au titre de l'assurance-emploi. La conduite du CN a sérieusement ébranlé Mme Hoyt à un moment qui aurait autrement pu être une période heureuse pour elle et les membres de sa famille alors qu'ils planifiaient la venue d'un enfant et qu'ils en rêvaient.

[141] Mme Hoyt était en grande détresse à son retour au CN après avoir accepté le poste de conducteur de véhicule de transport de l'équipe. Lorsqu'elle a appris que le CN refusait une fois de plus de lui fournir un accommodement raisonnable et faisait valoir que, après trois mois et demi de congé sans solde, l'accommodement qu'elle recevrait quant aux questions de garde d'enfants serait trois jours supplémentaires de congés sans solde, Mme Hoyt est devenue très agitée et bouleversée. Ses symptômes étaient aigus au point qu'elle a dû se rendre à l'hôpital peu après son altercation avec M. Sherbo. Son médecin a ordonné qu'elle s'absente du travail pendant un mois étant donné que la détresse qu'elle avait, et qu'elle continuerait probablement d'avoir à son lieu de travail en raison de la plus récente position discriminatoire du CN, compromettrait sa propre santé et celle de son enfant à naître.

[142] Je conclus que Mme Hoyt a subi un important préjudice moral. J'ordonne au CN, suivant le paragraphe 53(3) de la LCDP, de payer à Mme Hoyt une indemnité de 15 000 $ pour ce préjudice moral.

(iv) Une indemnité spéciale

[143] La plaignante demande une indemnité spéciale. En vertu de la LCDP, le Tribunal a le pouvoir d'accorder une indemnité spéciale maximale de 20 000 $ s'il en vient à la conclusion qu'un intimé a commis un acte délibéré ou inconsidéré (paragraphe 53(3)). J'ai conclu que le CN savait qu'il se livrait à un acte discriminatoire ou qu'il croyait de façon inconsidérée qu'il ne le faisait pas. Il est par conséquent approprié d'accorder une indemnité spéciale et j'accorde une indemnité de 10 000 $.

(v) Les frais juridiques

[144] La plaignante demande une ordonnance prévoyant que l'intimée paie les frais juridiques qu'elle a engagés au cours de la présente instance. L'alinéa 53(2)c) donne au Tribunal, s'il conclut qu'une plainte est fondée, le pouvoir de rendre entre autres une ordonnance prévoyant que l'intimé indemnise la victime pour des dépenses entraînées par l'acte.

[145] La question de savoir si l'alinéa 53(2)c) donne au Tribunal le pouvoir d'adjuger une indemnité pour des frais juridiques a fait l'objet d'une certaine controverse devant la Cour fédérale. On a conclu dans deux décisions que le Tribunal a effectivement une telle compétence : (Canada (Procureur général) c. Thwaites (1994), 21 C.H.R.R. D/224, Canada (Procureur général) c. Brooks, [2006] CF 500(1re inst.). On a conclu dans une autre décision que le Tribunal n'a pas une telle compétence (Canada (Procureur général) c. Green, [2004] 4 C.F. 629 (1re inst.).

[146] Les décisions de la Cour fédérale qui confirment la compétence du Tribunal mentionnent qu'il n'y a aucune raison de limiter le sens ordinaire de l'expression des dépenses entraînées de façon à exclure les frais juridiques engagés par une victime. Le fait que les avocats et les juges puissent donner un sens particulier au mot frais ne fournit aucun fondement permettant de prétendre que le sens ordinaire de l'expression dépenses entraînées exclut les frais juridiques (voir Thwaites, par le juge Gibson).

[147] Le Tribunal a exercé la compétence d'adjuger des frais. La présidente Mactavish (maintenant juge à la Cour fédérale) a utilisé une méthode précise quant à la question de la compétence du Tribunal (Nkwazi c. Canada (Service correctionnel), [2001] DCDP no 29). Souscrivant à la conclusion de la décision Thwaites tirée en utilisant une interprétation conventionnelle de la loi, la présidente Mactavish a mentionné que la loi en matière de droits de la personne, compte tenu de son statut fondamental et quasi constitutionnel, doit recevoir une interprétation libérale conforme à son but non seulement à l'égard des droits protégés par une telle loi, mais aussi à l'égard des pouvoirs accordés au Tribunal en matière de redressement (Nkwazi, au paragraphe 13; voir également Compagnie des chemins de fer nationaux du Canada c. Canada, [1987] 1 R.C.S. 1114, à la page 1136; Robichaud c. La Reine, [1987] 2 R.C.S. 84).

[148] Je partage l'opinion voulant qu'une conclusion selon laquelle le Tribunal a la compétence d'adjuger des dépens soit défendable et appropriée selon les principes habituels d'interprétation des lois. En outre, une telle conclusion est requise selon l'interprétation libérale et conforme au but que la LCDP incite à avoir.

[149] Je partage également l'opinion de la présidente Mactavish selon laquelle, [l]orsqu'il juge que la plainte est fondée, le Tribunal doit, sous réserve des principes de la prévisibilité des dommages et de l'atténuation des pertes, tenter dans la mesure du possible, de remettre la victime dans la position où elle aurait été, n'eut été de l'acte discriminatoire (Nkwazi, précitée, au paragraphe 17). Je partage de plus l'opinion selon laquelle la LCDP, en conférant une compétence en matière de redressement, précise clairement que le Tribunal a le pouvoir de prendre des mesures de redressement qu'il juge pertinentes compte tenu des circonstances qui entourent l'affaire (Nkwazi, précitée, au paragraphe 18).

[150] Premièrement, il ne peut y avoir aucun doute que le CN peut, quant aux frais juridiques, remettre Mme Hoyt dans la position où elle était auparavant. Les témoins du CN ont confirmé que la compagnie est en très bonne situation financière. Un article de journal a été déposé comme pièce au cours de l'instance. L'article du Toronto Star est daté du 21 avril 2006 et il établit que le CN a affiché pour le premier trimestre de 2006 un profit de 362 millions de dollars.

[151] Deuxièmement, j'estime qu'aucune question pouvant à bon droit limiter une adjudication de frais n'a été soulevée à l'égard de la prévisibilité ou de l'atténuation. J'ai conclu que le CN savait ou devait savoir qu'il se livrait à un acte discriminatoire. Les frais juridiques de Mme Hoyt ont résulté d'un acte discriminatoire. Il aurait dû être tout à fait prévisible pour cet employeur averti qu'un employé soumis à la sorte de conduite révélée en preuve dans la présente affaire retiendrait les services d'un avocat et engagerait des frais juridiques.

[152] Troisièmement, je n'ai connaissance d'aucun fait qui puisse suggérer que la question de l'atténuation puisse s'appliquer en l'espèce d'une façon à limiter à bon droit une adjudication de frais. Je n'ai pas conclu que la plaignante ou son avocate ont adopté des positions déraisonnables ou ont prolongé indûment la présente instance. Je n'ai connaissance d'aucune offre de règlement qui a pu être faite par le CN avant l'audience. Si une offre de règlement plus avantageuse que les redressements ordonnés a été faite, une telle offre pourrait s'appliquer à la question de l'atténuation. Dans l'éventualité où il y a eu une offre de règlement de la nature de celle décrite, j'invite les avocats à présenter des observations additionnelles.

[153] Je conclus dans les circonstances que, sous réserve d'une preuve démontrant qu'il y a eu une offre de règlement comme j'ai mentionné précédemment, les frais juridiques de la plaignante devraient être remboursés et j'ordonne au CN de rembourser à la plaignante ses frais juridiques raisonnables. J'encourage les parties à s'efforcer de s'entendre quant à un montant approprié à cet égard, mais je demeure saisie de l'affaire dans l'éventualité où il ne leur serait pas possible d'arriver à une entente.

(vi) Les intérêts

[154] De l'intérêt est payable à l'égard de toutes les adjudications faites dans la présente décision suivant le paragraphe 53(4) de la Loi. L'intérêt sera de l'intérêt simple calculé sur une base annuelle à un taux qui équivaut au taux bancaire (séries mensuelles) établi par la Banque du Canada, suivant le paragraphe 9(12) des Règles de procédure du Tribunal. À l'égard de l'indemnité pour préjudice moral et de l'indemnité spéciale, l'intérêt courra à compter de la date de la plainte.

(vii) La rétention de compétence par le Tribunal

[155] Le Tribunal demeure saisi de l'affaire pour recevoir de la preuve, entendre des observations additionnelles et rendre d'autres ordonnances, dans l'éventualité où les parties n'arriveraient pas à conclure une entente à l'égard de toute question résultant de la présente décision et à l'égard de l'interprétation ou de la mise en application des redressements ordonnés. Dans l'éventualité où les parties ont besoin de directives quant à quelque question se rapportant au redressement, autre que l'ordonnance suivant l'alinéa 53(2)a), ils peuvent en demander au plus tard 60 jours après la date de la présente décision.

B. Le redressement demandé par la partie intéressée

(i) Les frais juridiques

[156] Le syndicat, une partie intéressée, demande le remboursement de ses frais juridiques. J'estime que le Tribunal n'a pas compétence pour faire une adjudication à cet égard. L'alinéa 53(2)c) confère la compétence d'ordonner à l'intimé d'indemniser la victime à l'égard des dépenses entraînées par l'acte. J'estime que, à l'égard de cet alinéa de la Loi, suivant une interprétation conventionnelle ou suivant une interprétation libérale conforme à son but, cette compétence d'ordonner des redressements n'existe que lorsque le Tribunal a conclu qu'il y a eu un acte discriminatoire et alors seulement pour la victime de l'acte discriminatoire. Le syndicat a ressenti du mécontentement du fait des allégations faites par le CN à son égard. Cependant, le syndicat n'allègue pas qu'il a été victime d'un acte discriminatoire.

(ii) Une déclaration

[157] Le syndicat tente d'obtenir de la part du Tribunal une déclaration selon laquelle il n'a pas commis une faute quant aux mesures prises pour fournir un accommodement à Mme Hoyt. J'estime que je n'ai pas compétence pour faire une telle déclaration pour une partie intéressée. J'ai traité de la conduite du CN et de celle du syndicat dans la présente décision. Cela devra suffire.

Julie c. Lloyd

Ottawa (Ontario)
Le 18 août 2006

PARTIES AU DOSSIER

DOSSIER DU TRIBUNAL : T1036/1705
INTITULÉ DE LA CAUSE : Catherine Hoyt c. la Compagnie des chemins de fer nationaux du Canada
DATE ET LIEU DE L'AUDIENCE :

Les 3, 4, 5, 6 et 7 avril 2006
Les 24, 25, 26, 27 et 28 avril 2006

Edmonton (Alberta)

DATE DE LA DÉCISION DU TRIBUNAL : Le 18 août 2006
ONT COMPARU :
Leanne Chahley Pour la plaignante
(Aucun représentant) Pour la Commission canadienne des droits de la personne
Joseph Hunder Pour l'intimée
Michael Church Pour la partie intéressée
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