Tribunal canadien des droits de la personne

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TRIBUNAL CANADIEN DES DROITS DE LA PERSONNE CANADIAN HUMAN RIGHTS TRIBUNAL

MICHELINE MONTREUIL

la plaignante

- et -

COMMISSION CANADIENNE DES DROITS DE LA PERSONNE

la Commission

- et -

COMITÉ DES GRIEFS DES FORCES CANADIENNES

l'intimé

DÉCISION SUR REQUÊTE

2006 TCDP 36
2006/08/25

MEMBRE INSTRUCTEUR : Athanasios D. Hadjis

[TRADUCTION]

[1] Lors d'une conférence téléphonique de gestion de cas qui a eu lieu le 21 juin 2006, le Comité des griefs des Forces canadiennes (le Comité) a exprimé des réserves quant au caractère suffisant du résumé de Me Micheline Montreuil concernant le témoignage que prévoit donner son témoin, Pierre Lacasse. Par conséquent, Me Montreuil a préparé un résumé plus détaillé qu'elle a remis au Comité peu de temps après. Le 11 juillet 2006, le Comité a informé le Tribunal que, selon lui, le résumé modifié du témoignage de M. Lacasse ne comprenait toujours pas assez de détails.

[2] Dans ce résumé modifié, lequel comprend environ 20 lignes, Me Montreuil explique que M. Lacasse témoignera qu'il est un militaire à la retraite et qu'il a travaillé pour le Comité à titre contractuel jusqu'en novembre 2003. Il témoignera qu'il a entendu deux gestionnaires du Comité (dont les noms figurent dans le résumé) faire des remarques désobligeantes à propos de Me Montreuil, lesquelles remarques comprenaient des propos selon lesquelles elle ne serait pas embauchée parce qu'elle est transgenre et qu'il serait difficile d'imaginer qu'une transgenre travaille comme agente des griefs. Selon le résumé, M. Lacasse témoignera également qu'il n'a jamais rencontré Me Montreuil et qu'il n'a aucun lien de parenté avec elle. Il témoignera également que c'est lui qui a communiqué avec Me Montreuil pour l'informer quant à la conversation qu'il avait entendue.

[3] Le Comité prétend que le résumé n'est pas complet parce que les détails suivants n'y figurent pas :

Dans quel contexte la conversation a-t-elle eu lieu?

Quelles étaient les personnes présentes et quelles sont celles qui ont participé à la conversation?

À quelle personne les remarques ont-elles été faites?

À combien de reprises les remarques ont-elles été faites et à quelle(s) date(s)?

À quel endroit les remarques ont-elles été faites?

Où M. Lacasse se trouvait-il lorsqu'il a entendu les remarques?

[4] Le Comité prétend qu'il sera incapable de préparer sa défense tant qu'il n'aura pas obtenu de réponses à ces questions.

[5] Le résumé du témoignage prévu fait partie de l'exposé des précisions que chacune des parties doit préparer et déposer en conformité avec le paragraphe 6(1) des Règles de procédure du Tribunal. Hormis le résumé, l'exposé des précisions doit comprendre une liste des documents qui seront divulgués et doit énumérer les faits pertinents que la partie cherche à prouver à l'appui de ses prétentions, ainsi que sa position sur les questions juridiques soulevées et sur le redressement qu'elle demande, le cas échéant.

[6] Comme le Tribunal l'a souligné dans Alliance de la fonction publique du Canada c. Territoires du Nord-Ouest (Ministre du Personnel), [2000] D.C.D.P. no 9 (T.C.D.P.)(QL), paragraphe 7, une partie n'a droit qu'aux faits essentiels que la partie adverse invoque en plaidant sa cause. La partie qui dépose l'exposé des précisions n'a pas à plaider sa preuve à ce stade-ci. Selon moi, ce principe devrait logiquement s'appliquer aux résumés des témoignages qui font partie de l'exposé des précisions. Comme le Tribunal l'a déclaré, l'objet visé par le dépôt de l'exposé des précisions est de préciser les points à débattre en l'espèce et de démontrer le bien-fondé des arguments auxquels les autres parties devront répondre en présentant leur propre preuve.

[7] En l'espèce, les précisions fournies dans le résumé modifié de Me Montreuil suffisent tout à fait à informer le Comité des arguments qu'il doit réfuter. Le Comité a été informé que M. Lacasse témoignera qu'il a entendu les deux gestionnaires visés parler de Me Montreuil en termes désobligeants et mentionner qu'elle ne serait pas embaucher parce qu'elle était transgenre.

[8] Il appert des observations écrites du Comité figurant dans sa requête que ses réserves concernant le caractère suffisant du résumé de Me Montreuil tirent leur origine du fait que les deux cadres visés qui auraient tenu la conversation affirment ne pas se souvenir de cette discussion.

[9] Je ne vois pas en quoi cela a une incidence sur l'affaire dont je suis saisi. Il n'est pas rare que deux parties adverses donnent des versions contradictoires quant à des évènements. C'est précisément la raison pour laquelle on tient des audiences et pourquoi des tribunaux sont appelés à rendre des décisions après avoir entendu l'ensemble des éléments de preuve. Il est important de ne pas perdre de vue que c'est à Me Montreuil qu'incombe le fardeau ultime de prouver ses prétentions au moyen d'éléments de preuve qui peuvent comprendre le témoignage de M. Lacasse concernant la présumée conversation. Si le Comité, s'appuyant sur la parole de ses employés, estime qu'il a des motifs de mettre en doute l'exactitude et la véracité du témoignage de M. Lacasse, il peut examiner ces questions en le contre-interrogeant.

[10] Je ne vois donc aucun motif pour lequel j'ordonnerais à Me Montreuil de fournir des détails supplémentaires concernant le témoignage que se propose de donner M. Lacasse. La requête du Comité est rejetée.

Athanasios D. Hadjis

Ottawa (Ontario)
Le 25 août 2006

PARTIES AU DOSSIER

DOSSIER DU TRIBUNAL : T1108/8905
INTITULÉ DE LA CAUSE : Micheline Montreuil c. le Comité des griefs des Forces canadiennes
DATE DE LA DÉCISION DU TRIBUNAL : Le 25 août 2006
ONT COMPARU :
Micheline Montreuil Pour elle-même
Ikram Warsame Pour la Commission canadienne des droits de la personne
Nadine Dupuis Pour l'intimé
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