Tribunal canadien des droits de la personne

Informations sur la décision

Contenu de la décision

TRIBUNAL CANADIEN DES DROITS DE LA PERSONNE CANADIAN HUMAN RIGHTS TRIBUNAL

TAMARATIE ROOPNARINE

la plaignante

- et -

COMMISSION CANADIENNE DES DROITS DE LA PERSONNE

la Commission

- et -

BANQUE DE MONTRÉAL

l'intimée

DÉCISION

2010 TCDP 5
2010/03/19

MEMBRE INSTRUCTEUR : Shirish P. Chotalia, Q.C.

I. LA PLAINTE

A. Déficience physique - Emploi

II. LES CONCLUSIONS FACTUELLES

A. Conclusions en l'espèce

B. Les faits non contestés et l'accès à la justice

C. Désaccord au sujet des questions de fait

D. Nouveaux éléments de preuve au sujet de compressions

E. Le rapport d'enquête de la Commission

III. LE DROIT

A. Établissement d'une preuve prima facie de discrimination

B. Réponse

C. La preuve

IV. Analyse

A. Mme Roopnarine a-t-elle établi qu'elle a été victime de discrimination?

(i) Licenciement

a) Preuve prima facie établie

b) Explication raisonnable, qui n'est pas un prétexte, établie

(ii) Traitement différent préjudiciable en milieu de travail

a) Aucune preuve prima facie établie

b) Explication raisonnable établie

c) Aucun droit distinct à l'accommodement

V. LA DÉCISION

I. LA PLAINTE

A. Déficience physique - Emploi

[1] Mme Roopnarine a travaillé pour la Banque de Montréal (BMO) pendant 31 ans. Elle a été embauchée par BMO en 1975, alors qu'elle avait 20 ans, et a occupé divers postes, d'opératrice de machine de contrôle à commis à la saisie de données, d'agente de recouvrement à enquêteure en matière de fraude. BMO l'a congédiée le 15 février 2007 et lui a donné une indemnité de cessation d'emploi. À cette époque, elle était en congé autorisé, à titre d'accommodement pour une blessure au poignet. Ce congé devait être prolongé sur présentation d'un rapport médical à cet effet. BMO a congédié Mme Roopnarine avant que ce rapport n'ait été présenté. Mme Roopnarine soutient qu'elle a été congédiée en raison de sa déficience.

[2] Plus particulièrement, Mme Roopnarine présente les arguments suivants : son rendement, jusqu'à son congédiement, était satisfaisant et ses évaluations de rendement avant 2003 en faisaient état; ses évaluations de rendement subséquentes étaient erronées et injustes; le processus et le contenu de ses évaluations ne respectaient pas la procédure établie et les gestionnaires ne lui ont pas mentionné de problèmes de rendement; alors qu'elle souffrait d'une blessure au poignet, BMO s'est servie de ces évaluations comme prétexte pour la congédier, alors que le véritable motif derrière son congédiement était que BMO ne souhaitait pas prendre de mesures d'accommodement pour sa blessure au poignet.

II. LES CONCLUSIONS FACTUELLES

A. Conclusions en l'espèce

Antécédents professionnels

[3] En janvier 2002, Mme Roopnarine a tenté d'obtenir une promotion. Elle souhaitait quitter le service de recouvrement et obtenir un poste plus élevé d'enquêteure en matière de fraude. Elle s'est présentée à l'entrevue pour ce poste, mais elle n'a pas été retenue. Puis, toujours en janvier 2002, elle a présenté sa candidature pour un poste d'analyste en matière de fraude et elle a obtenu une mutation latérale à ce poste.

[4] Elle travaillait dans le volet de fraude hypothécaire connu sous le nom de Gemini, dans l'équipe de détection des fraudes. Son travail consistait à mener des enquêtes et des analyses sur les demandes qui étaient possiblement liées à de la fraude hypothécaire. Par exemple, si l'identité d'un client qui tentait d'obtenir une hypothèque était mise en doute, Mme Roopnarine devait prendre des mesures afin de déterminer si la demande d'hypothèque était frauduleuse ou satisfaisante. Cette enquête comprenait un examen des renseignements à l'ordinateur, une discussion avec l'employeur du demandeur pour vérification, un examen visant à établir si le numéro d'assurance sociale et l'adresse du demandeur correspondaient, ainsi qu'une analyse des renseignements de crédit. Après avoir effectué une enquête approfondie, elle devait déterminer s'il y avait fraude. S'il n'y avait pas de fraude, la demande d'hypothèque était autorisée. La demande était envoyée à une autre équipe, qui avisait le demandeur que sa demande était satisfaisante. Si Mme Roopnarine déterminait à tort que la demande d'hypothèque était insatisfaisante, alors qu'elle aurait dû être autorisée, BMO perdait un client, puisque la demande était rejetée. BMO avait 24 heures pour aviser le demandeur d'hypothèque que sa demande était acceptée ou rejetée.

[5] L'équipe de détection de fraude de BMO comportait cinq volets, dont Gemini et CRDS. Le volet CRDS visait à détecter la prise de contrôle de comptes. Il s'agissait du volet de base dans lequel les nouveaux employés et les étudiants recevaient leur formation de départ.

[6] Lorsque Mme Roopnarine a été mutée en 2002, elle a conservé son échelon et son niveau de rémunération et elle est devenue l'employée qui occupait l'échelon le plus élevé et qui recevait la rémunération la plus importante de toute l'équipe de détection de fraude. Dès la date de sa mutation, elle a reçu beaucoup de formation continue au cours des années, tant dans le volet Gemini que dans le volet CRDS. Cependant, en mai 2006, elle n'avait toujours pas acquis les compétences nécessaires pour effectuer les tâches d'une analyste en matière de fraude dans ces deux volets. Quant à elle, Mme Roopnarine croyait qu'elle méritait une promotion à un poste plus élevé d'enquêteure en matière de fraude depuis 2002. Pourtant, même jusqu'en janvier 2007, elle avait été incapable d'acquérir l'ensemble de compétences de base pour travailler dans deux des cinq volets, ou elle avait refusé de le faire. Ses problèmes de rendement ont été documentés à partir de l'évaluation de rendement de la fin d'année 2003-2004.

[7] Dans un examen semestriel de son rendement, pour la période du 1er novembre 2003 au 30 avril 2004, il a été noté qu'elle avait de la difficulté avec sa productivité et sa compétence. Mme Roopnarine a contesté cette évaluation et, dans son évaluation de fin d'année pour la période du 1er novembre 2003 au 31 octobre 2004, elle a reçu la cote [traduction] répond aux attentes . Dans cette évaluation de fin d'année, on reconnaissait qu'elle avait amélioré l'ensemble de sa productivité depuis juillet, auquel moment ses gestionnaires lui ont retiré certaines de ses tâches régulières pour qu'elle puisse se concentrer sur un plan de formation complet en matière de compétences. Cependant, l'évaluation faisait aussi état de sa réticence à suivre les normes prescrites, du fait qu'elle devait améliorer ses compétences et augmenter l'efficacité et l'efficience de l'équipe et du fait qu'elle recevait et appliquait la rétroaction à contrecur. Plutôt que d'accepter qu'elle devait s'améliorer, Mme Roopnarine a adopté une attitude défensive. Elle a d'abord refusé de signer son évaluation de rendement de 2003-2004, malgré ses nombreuses discussions avec les employés de BMO et leurs commentaires. Elle a finalement signé son évaluation et y a annexé ses notes personnelles au sujet de son rendement.

[8] BMO a continué de lui fournir de la formation et du soutien. Dans son évaluation de fin d'année pour 2004-2005, elle a de nouveau reçu la cote [traduction] répond aux attentes et l'évaluation en général était plus positive que celle de l'année précédente. Il y était confirmé qu'elle avait une connaissance approfondie du volet Gemini et une connaissance fonctionnelle du volet CRDS. Par contre, il y était aussi précisé qu'il était essentiel que Mme Roopnarine reçoive plus de formation afin de mettre l'importance sur la formation continue et l'amélioration de ses compétences et qu'il était obligatoire qu'elle satisfasse aux exigences minimales du service. Elle a signé et accepté cette évaluation.

Problèmes de rendement - avant la blessure au poignet

[9] En avril 2006, Mme Jamie Khan est devenue gestionnaire de l'équipe de détection de la fraude. Mme Khan travaillait pour BMO depuis 24 ans et elle avait de l'expérience dans les prêts, les hypothèques, la détection de la fraude et les services d'enquête.

[10] Dans le cadre de son initiative de gestion, elle a rencontré personnellement chacun des 15 employés de l'équipe de détection de la fraude pour discuter de leurs compétences et de leurs objectifs. De tous les 15 membres, Mme Khan a observé que, sauf pour Mme Roopnarine, chaque membre était capable de travailler dans au moins trois des cinq volets et que bon nombre d'entre eux étaient capables de travailler dans quatre des cinq volets. Pourtant, Mme Roopnarine avait travaillé principalement dans un seul volet, soit Gemini.

[11] Mme Khan a rencontré Mme Roopnarine vers avril 2006. Mme Roopnarine lui a dit qu'elle était très qualifiée et qu'elle occupait un échelon élevé. Elle lui a aussi dit qu'elle était déçue de ne pas avoir été retenue pour la promotion au poste d'enquêteure en matière de fraude dans un autre domaine en 2002. Mme Khan lui a dit qu'il lui ferait plaisir de l'aider à améliorer et à étendre son ensemble de compétences pour qu'elle soit plus qualifiée lorsqu'une occasion se présenterait à l'avenir. Par conséquent, pour améliorer sa connaissance d'autres volets et pour ramener son ensemble de compétences au niveau de ses collègues moins anciens, Mme Khan a dit à Mme Roopnarine qu'elle la transfèrerait au volet CRDS. Mme Khan a expliqué que lorsque Mme Roopnarine aurait maîtrisé les compétences nécessaires pour ce volet et qu'elle y travaillerait de façon satisfaisante, elle retournerait au volet Gemini pour y améliorer ses compétences. Mme Khan a transféré Mme Roopnarine au volet CRDS le 11 mai 2006.

[12] Pour le volet CRDS, Mme Khan a offert à Mme Roopnarine une formation intensive du 12 au 16 mai 2006, pendant laquelle un formateur s'est assis avec elle à son bureau pour la guider et lui a montré comment produire des rapports CRDS, comment traiter les retraits internationaux et comment faire des rapports au sujet de son travail dans des téléchargements aux gestionnaires. Mme Roopnarine devait enquêter et relever les cas d'écrémage dans les comptes des clients. L'écrémage est un type de fraude de carte de crédit par lequel les criminels retirent de l'argent des comptes bancaires. L'analyste de jour a la responsabilité de télécharger le système à 8 h, midi et 16 h et d'examiner les comptes ciblés pour vérifier s'ils ont été écrémés .

[13] Tant le volet Gemini que le volet CRDS nécessitent de la part de l'analyste qu'il mette un ordinateur en marche et qu'il utilise un clavier et une souris pour examiner les comptes ciblés. L'analyste doit inscrire un numéro pour obtenir les renseignements. Il y a très peu de différences entre les exigences physiques des deux postes. Cependant, plus de comptes doivent être traités dans le volet CRDS. Alors qu'elle travaillait dans le volet CRDS, Mme Roopnarine continuait de travailler de temps à autres dans le volet Gemini. Malgré avoir reçu de la formation pour le volet CRDS et de l'encadrement continu de Mme Khan, Mme Roopnarine était incapable de travailler dans le volet CRDS ou elle ne souhaitait pas le faire. Elle ne respectait pas les procédures. Elle ne traitait pas le nombre minimal de comptes et ne suivait pas l'horaire de téléchargement.

[14] Mme Roopnarine a reconnu ses problèmes de rendement et, quelques mois après son transfert dans l'équipe du CRDS, elle a demandé à Mme Khan d'être retransférée à celle de Gemini, où il était plus difficile d'évaluer son mauvais rendement. Mme Roopnarine a continué de se plaindre à Mme Khan du fait qu'elle était déçue de ne pas avoir obtenu d'augmentation de salaire ni de promotion.

[15] Entre mai 2006 et octobre 2006, Mme Khan et Mme Roopnarine se sont rencontrées de nombreuses fois, parfois en présence de Mme Coupland, la gestionnaire de Mme Khan. Mme Khan a souvent offert à Mme Roopnarine des critiques constructives, tant au sujet du volet CRDS que du volet Gemini. Mme Khan lui a dit qu'elle n'enquêtait pas pleinement les cas suspects de fraude et qu'elle travaillait au hasard plutôt que de façon systématique, comme on lui demandait. En même temps, elle a aussi offert à Mme Roopnarine de la formation et du soutien continus de façon à l'aider. Le 1er juin 2006, Mme Roopnarine s'est entendue avec Mme Khan que dès qu'elle satisferait aux attentes en matière de rendement pour volet CRDS, Mme Khan la transfèrerait au volet Gemini. Malgré cette entente, Mme Roopnarine a continué de se plaindre, jusqu'en septembre 2006, du fait que son expérience, ses connaissance et ses compétences ne coïncidaient pas avec son rôle dans le volet CRDS et qu'elle souhaitait retourner au volet Gemini. Elle ne s'est pas plainte de ses tâches par rapport à une quelconque blessure au poignet.

[16] Après cinq mois dans le volet CRDS, malgré avoir reçu de la formation et de l'encadrement approfondis, de la rétroaction et du soutien continu, Mme Roopnarine était incapable d'effectuer le travail. Elle avait des problèmes techniques et une mauvaise productivité : elle traitait 7,5 comptes par heure, alors que la norme du service était de 25 à 35 comptes par heure. Plusieurs fois, elle a négligé de suivre toute la procédure du volet CRDS et elle travaillait au hasard. Elle avait aussi des problèmes techniques. Par exemple, en juin 2006, elle a de nouveau fait glisser un fichier maître du volet CRDS dans le mauvais dossier, ce qui a entraîné une perte de productivité pour les autres analystes, qui ne pouvaient pas le trouver et qui ne pouvaient donc pas travailler sur d'autres comptes. Lorsque Mme Khan a confronté Mme Roopnarine au sujet de ces problèmes, cette dernière a continué d'insister qu'elle voulait retourner dans le volet Gemini. Elle n'a reçu aucune prime de rendement et aucune augmentation de son salaire de base en 2006.

Douleurs au poignet, avant l'accommodement

[17] Au cours de son emploi, Mme Roopnarine a eu un certain nombre de déficiences qui nécessitaient un accommodement. BMO est un employeur de grande envergure et, conformément à ses politiques d'accommodement gérées par Oncidium Health Group (Oncidium), elle a accommodé Mme Roopnarine en 2003 lorsqu'elle a demandé une modification à son poste de travail en raison d'une blessure, modification qui a été effectuée. BMO avait un contrat avec un tiers pour la gestion des déficiences et ce tiers travaillait en collaboration avec Oncidium. Oncidium était chargé d'évaluer les demandes d'accommodement et de vérifier que toutes les demandes d'accommodement étaient évaluées de façon équitable et impartiale.

[18] La première fois que Mme Roopnarine a dit à Mme Khan qu'elle ressentait de la douleur au poignet était le 5 octobre 2006, lors d'une conversation générale. À l'époque, Mme Roopnarine avait inscrit cette conversation dans son journal. En réponse, Mme Khan lui a dit de présenter un rapport médical à l'appui d'une demande d'accommodement et qu'elle respecterait l'avis du médecin. Mme Roopnarine a communiqué avec les Ressources humaines et Oncidium et a reçu le 11 octobre 2006 les formulaires médicaux que son médecin devait remplir. Mme Roopnarine a envoyé à Oncidium l'évaluation du médecin le 17 octobre 2006. L'évaluation faisait état de douleurs chroniques et aiguës au poignet et suggérait que BMO limite à quatre heures par jour le temps que Mme Roopnarine passait à l'ordinateur. La durée de cet accommodement n'était pas précisée. Cependant, il était expliqué dans l'évaluation que le médecin avait référé Mme Roopnarine à un neurologue. Mme Roopnarine a traité directement avec Oncidium au sujet de ses douleurs au poignet. Mme Khan n'a pas participé à l'évaluation de la demande d'accommodement.

Évaluation de rendement de 2006

[19] À titre de gestionnaire de Mme Roopnarine, Mme Khan devait préparer son évaluation de rendement de 2006 quant au travail effectué du 1er novembre 2005 au 31 octobre 2006. Mme Khan a suivi la politique de BMO pour préparer l'évaluation. Elle a demandé à Mme Roopnarine de lui présenter ses commentaires. À la mi-octobre 2006, Mme Khan a de nouveau rencontré Mme Roopnarine pour l'aviser qu'elle n'atteignait pas les normes et pour lui donner de l'encadrement afin qu'elle les atteigne.

[20] Malheureusement, le 19 octobre 2006, Mme Roopnarine a été impliquée dans un accident de voiture et a dû s'absenter du travail en raison des blessures qu'elle a subies lors de cet accident. Elle a touché des prestations d'invalidité de courte durée (ICD). Elle est retournée au travail le 14 novembre 2006. Le 16 novembre 2006, Oncidium a avisé Mme Khan que les renseignements médicaux que Mme Roopnarine avait présentés étaient insuffisants pour qu'elle reçoive un accommodement pour sa blessure au poignet. Après son retour au travail, Mme Roopnarine s'est plainte de façon informelle à Mme Khan au sujet de son poignet. Mme Khan savait que Mme Roopnarine traitait avec Oncidium au sujet d'un accommodement pour son poignet. Mme Khan attendait des directives de la part d'Oncidium. À cette époque, Mme Roopnarine traitait directement avec Oncidium et elle avait demandé à son médecin d'envoyer à la compagnie ses dossiers complets.

[21] Le 16 novembre 2006, Mme Khan a demandé à Mme Roopnarine de préparer une autoévaluation de son rendement. Mme Roopnarine a écrit une autoévaluation élogieuse en utilisant un langage abstrait qui comprenait des phrases telles que [traduction] négocie pour atteindre une situation favorable à tous en influençant des stratégies personnalisées aux situations d'entreprises et en mettant en place des ententes pour atteindre les objectifs des deux parties . Elle n'a pas évalué sa performance en des termes concrets au sujet du nombre de comptes qu'elle examinait et téléchargeait, ni dans le volet Gemini ni dans le volet CRDS, et elle n'a pas abordé la qualité de ses enquêtes. Son autoévaluation était difficile à comprendre et inexacte.

[22] Mme Khan a aussi consulté les anciens gestionnaires de Mme Roopnarine pour évaluer la première moitié de l'exercice financier, puisqu'elle n'était gestionnaire que depuis avril 2006. Compte tenu de la rétroaction qu'elle a obtenue, Mme Khan a évalué les difficultés antérieures de Mme Roopnarine dans le volet Gemini comme suit : [traduction] Tara a eu des problèmes avec la présentation, l'atténuation et l'analyse des demandes. Ses demandes ne faisaient [traduction] pas l'objet d'une enquête approfondie et il n'y [avait] pas de suivi en temps opportun. Souvent, les demandes [étaient] placées à l'étape impossible d'atténuer , ce qui a causé une perte de clientèle à BMO. Malgré l'encadrement, Mme Roopnarine n'a pas pris de [traduction] mesures correctives pour améliorer son rendement. Après avril 2006, Mme Khan a évalué que malgré le fait qu'elle avait obtenu cinq mois de formation, Mme Roopnarine était toujours dans la catégorie en apprentissage du volet CRDS. Elle avait [traduction] de la difficulté à respecter l'horaire et les téléchargements du volet CRDS .

[23] Essentiellement, Mme Roopnarine ne respectait pas l'horaire de téléchargement, créait des problèmes techniques, ne traitait pas l'ensemble complet des comptes bancaires et travaillait au hasard plutôt que systématiquement, comme elle le devait. Par conséquent, il y avait des lacunes dans son travail et le travail des quarts suivants en était affecté. Bien que Mme Roopnarine ait reçu quelques courriels de félicitations au sujet de son travail pendant l'exercice financier, dont deux venaient de Mme Khan, il s'agissait de courriels envoyés dans le cadre d'un programme d'encouragement connu sous le nom de Bravo qui ne reflétait pas le rendement individuel des employés. Mme Roopnarine n'avait pas acquis les compétences nécessaires pour travailler aux volets CRDS et Gemini. Cela allait à l'encontre des objectifs de BMO qui visaient à s'assurer que tous les analystes pouvaient travailler dans la majorité des volets, permettant ainsi une flexibilité des horaires ainsi qu'une analyse et une connaissance complète du service. Pour cette raison, Mme Khan a évalué que le travail de Mme Roopnarine était inférieur à celui de ses pairs. Par conséquent, elle lui a donné la cote [traduction] contribution inférieure aux attentes .

[24] Plus tard, Mme Khan a rencontré Mme Coupland pour discuter de l'évaluation de rendement. Mme Coupland l'a signée le 30 novembre 2006 et a écrit [traduction] concentrez-vous sur les occasions de développement et acceptez l'encadrement [d'un] point de vue positif . Mme Khan a ensuite signé l'évaluation le 18 décembre 2006 et a rencontré Mme Roopnarine le même jour, auquel moment elle lui a donné une copie papier de l'évaluation pour en discuter. Mme Khan avait réservé une heure pour discuter de l'évaluation. Cependant, après deux minutes, Mme Roopnarine a annoncé à Mme Khan qu'elle ne souhaitait en discuter qu'avec Mme Coupland. Mme Roopnarine a refusé de signer l'évaluation. Elle a déclaré qu'elle voulait une copie électronique du document. Mme Khan a refusé de lui donner de copie électronique parce que Mme Roopnarine avait déjà modifié et réécrit des portions de courriels qu'elle lui avait envoyés. Mme Khan ne voulait pas que son évaluation originale soit modifiée. Mme Khan a accepté d'organiser une réunion avec Mme Coupland.

[25] Par la suite, les problèmes de rendement de Mme Roopnarine ont continué. Tout au long de décembre 2006, Mme Khan a continué de recevoir des courriels d'autres gestionnaires qui se plaignaient du rendement de Mme Roopnarine. Par exemple, en décembre 2006, 39 des comptes bancaires de BMO ont été touchés par une attaque frauduleuse, c'est-à-dire que de l'argent a été écrémé dans ces comptes. Pourtant, Mme Roopnarine avait conclu qu'aucun de ces comptes ne nécessitait une enquête pour fraude possible. Son mauvais rendement s'est poursuivi. Par exemple, à la mi-décembre 2006, lors d'une journée donnée, elle n'a travaillé que 28 minutes dans toute la journée.

Processus d'accommodement

[26] Entre temps, le médecin de Mme Roopnarine a envoyé un rapport écrit à Oncidium le 27 décembre 2006 dans lequel il résumait la période pendant laquelle il a été le médecin de Mme Roopnarine et il mentionnait que le travail de Mme Roopnarine devait être modifié afin qu'elle ne travaille que quatre heures par jour avec un clavier et une souris. Le 2 janvier 2007, après avoir reçu le rapport du médecin de Mme Roopnarine, Oncidium a avisé BMO qu'il approuvait l'accommodement pour la blessure au poignet de la plaignante pour la période du 2 janvier 2007 au 4 février 2007. Oncidium a aussi avisé Mme Roopnarine et BMO que des renseignements supplémentaires à jour devaient lui être envoyés pour justifier un accommodement après le 4 février.

[27] Mme Khan a immédiatement accommodé Mme Roopnarine en approuvant une réduction de travail à l'ordinateur de 7,5 heures à 4 heures consécutives par jour de travail dans le volet CRDS. Comme l'équipe de détection de la fraude était entièrement informatisée, BMO n'a pas offert à Mme Roopnarine des tâches supplémentaires pour les 3,5 heures restantes, mais elle l'a payée pour la journée entière. De plus, en janvier 2007, BMO a modifié l'horaire de travail de Mme Roopnarine pour lui permettre de se rendre à des rendez-vous de physiothérapie pour les blessures qu'elle avait subies lors de son accident de voiture.

Rencontre avec Mme Coupland

[28] Comme Mme Roopnarine l'avait demandé, le 10 janvier 2007, Mme Coupland et Mme Khan l'ont rencontrée pour discuter de l'évaluation de 2006. Mme Roopnarine a continué de se plaindre au sujet de ses cinq dernières années d'emploi et du fait qu'elle n'avait pas obtenu de promotion. Il y a eu très peu de discussion au sujet de l'évaluation. Quelques minutes après le début de la rencontre, Mme Roopnarine a déclaré à Mme Coupland [traduction] Jamie est une menteuse , en parlant de Mme Khan. Mme Khan et Mme Coupland ont toutes les deux été choquées. En conséquence, Mme Khan est restée silencieuse pendant le reste de la rencontre. Après environ une heure de discussion, Mme Coupland s'est impatientée et a dit à Mme Roopnarine d'en [traduction] venir à l'objet de la rencontre, en pointant la table. Après la rencontre, Mme Coupland a envoyé un courriel à Mme Roopnarine dans lequel elle déclarait [traduction] votre comportement lors de notre rencontre aujourd'hui, lorsque vous avez accusée Jamie d'être une menteuse, était complètement inacceptable. Vous n'avez formulé aucune excuse au cours de la rencontre. Jamie a passé beaucoup de temps avec vous depuis son arrivée au poste de gestionnaire et elle a fait preuve d'une patience extraordinaire envers vous, au point où elle a passé moins de temps avec les autres membres de votre équipe. Mme Coupland a ajouté que Mme Roopnarine continuait de regarder vers le passé et continuait de blâmer les autres pour son propre rendement. Ces comportements avaient constitué 90 p. 100 de la rencontre.

[29] Le même jour, Mme Roopnarine a téléphoné à la gestionnaire de Mme Coupland, Mme Penny, pour lui demander de la rencontrer. Entre temps, Mme Khan, malgré avoir été accusée d'être une menteuse, a continué de traiter Mme Roopnarine de façon positive et utile.

[30] Cependant, comme Mme Roopnarine ne s'est jamais excusée de son comportement, ni pendant la rencontre, ni après le courriel de Mme Coupland, cette dernière et Mme Penny ont pris la décision de mettre fin à l'emploi de Mme Roopnarine. Les politiques d'emploi du BMO permettaient le congédiement soit pour un motif suffisant ou avec un avis et une indemnité de cessation d'emploi en guise de préavis. Les politiques disciplinaires comprenaient une approche en plusieurs étapes pour les congédiements pour motif suffisant, mais donnaient aux gestionnaires un pouvoir discrétionnaire pour le congédiement sans préavis dans certains cas. Comme Mme Roopnarine était une employée de longue date et qu'il aurait été difficile de la congédier pour un motif suffisant, au sens légal du terme, BMO a choisi de la congédier en lui donnant une indemnité de cessation d'emploi et une indemnité de préavis.

[31] Le 13 février 2007, juste avant la date de congédiement, Oncidium a avisé Mme Khan qu'aucun autre document médical n'avait été envoyé à l'appui d'une prolongation d'accommodement après le 4 février 2007 et que la compagnie attendait un rapport médical puisqu'elle savait que Mme Roopnarine devait avoir un rendez-vous avec un spécialiste dans un avenir rapproché.

[32] Le 15 février 2007, Mme Coupland a congédié Mme Roopnarine et lui a envoyé une lettre de congédiement qui portait la date du jour même. Mme Khan n'a pas participé à cette décision. La lettre de Mme Coupland précisait que [traduction] la présente confirme que votre emploi à la BMO prendra fin, avec indemnité de cessation d'emploi, en date du 15 février 2007 . Comme il l'était mentionné dans la lettre, BMO a donné à Mme Roopnarine une indemnité de maintien de salaire pour 95 semaines, du 16 février 2007 au 12 décembre 2008. La valeur du versement de salaire était de 86 955 $. Mme Roopnarine a aussi reçu un paiement de 2 952 $, qui représentait la prime de rendement correspondant à son indemnité de maintien de salaire. Ce montant devait être payé à la fin de la période de maintien de salaire. Ses avantages sociaux ont été maintenus, ainsi que ses cotisations à son fonds de pension, pendant les 95 semaines et elle a eu droit à des services de consultation aux fins du replacement.

Après le congédiement

[33] Mme Roopnarine a vu le neurologue en janvier 2007. Le neurologue a envoyé son rapport, daté du 13 mars 2007, à Oncidium vers la fin mars. Le rapport confirmait qu'elle souffrait de microtraumatismes répétés et qu'il n'y avait aucun signe de syndrome du canal carpien.

[34] Mme Roopnarine a ensuite été impliquée dans un deuxième accident de voiture le 19 avril 2007. Elle a intenté une poursuite civile contre le propriétaire et conducteur d'un autre véhicule impliqué dans la collision, dans laquelle poursuite elle demandait des dommages-intérêts de 1 500 000 $ (600 000 $ en dommages-intérêts généraux et 900 000 $ en dommages-intérêts spéciaux). Elle soutenait qu'elle avait subi des blessures physiques importantes.

[35] En date de l'audience, soit le 25 janvier 2010, Mme Roopnarine n'avait pas encore trouvé d'emploi depuis son congédiement de BMO. Elle a tenté d'atténuer sa perte de salaire en se cherchant un autre emploi.

B. Les faits non contestés et l'accès à la justice

[36] Grâce à une active gestion préparatoire à l'audience et une exploration des questions avec les avocats au début de l'audience, les avocats ont convenu d'un certain nombre de faits. Cette entente au sujet des faits a accéléré le processus d'audience et a probablement entraîné une réduction des coûts des parties en ce qui a trait aux frais juridiques. Ceci est particulièrement important compte tenu de l'arrêt Canada (Procureur général) c. Mowat, 2009 CAF 309, dans lequel la Cour d'appel fédérale a conclu que le Tribunal n'a pas compétence pour accorder des frais juridiques au plaignant qui obtient gain de cause, et compte tenu du fait qu'il n'existe aucune disposition portant sur l'attribution de frais juridiques aux intimés ou aux plaignants qui n'obtiennent pas gain de cause. L'entente a aussi permis au Tribunal de préciser la teneur de l'audience et de réduire le nombre de questions à trancher. De plus, la preuve médicale du médecin généraliste et du neurologue a été déposée sans que des assignations à témoigner ne soient envoyées à ces médecins, qui étaient réticents à l'idée de participer à l'audience, ce qui a aussi économisé des frais aux parties, qui auraient probablement eu à couvrir les frais nécessaires pour que les médecins témoignent. L'affidavit du médecin de famille de Mme Roopnarine a plutôt été présenté pour établir la véracité de son contenu et BMO a renoncé à son droit de contre-interroger le médecin. Enfin, les parties ont convenu que seulement deux témoins comparaîtraient : Mme Roopnarine et Mme Khan.

C. Désaccord au sujet des questions de fait

[37] En arrivant aux conclusions de fait ci-dessus, j'ai examiné attentivement toute la preuve. Il y avait des divergences surprenantes entre le témoignage de Mme Roopnarine et celui de Mme Khan au sujet des questions de rendement, du comportement de Mme Roopnarine et du congédiement. J'ai décidé d'accepter le témoignage de Mme Khan lorsqu'il y avait divergence avec le témoignage de Mme Roopnarine pour différentes raisons. Malgré le contre-interrogatoire long et exhaustif de l'avocat de Mme Roopnarine, Mme Khan est restée calme et franche. En général, j'ai trouvé que Mme Khan était sincère, claire et cohérente. Elle était juste et équilibrée. Par exemple, elle a reconnu que Mme Roopnarine lui avait parlé de ses douleurs au poignet en novembre 2006. J'ai remarqué que le témoignage de Mme Khan concordait avec la preuve documentaire. Elle a fait preuve d'indépendance en ce sens que, bien qu'elle ait été la gestionnaire de Mme Roopnarine et qu'elle ait évalué son rendement en deçà des attentes, elle n'a pas pris la décision finale de la congédier. Cette décision a été prise par sa gestionnaire, Mme Coupland. J'ai aussi remarqué que son témoignage ne faisait état d'aucune agitation ou hostilité envers Mme Roopnarine, lorsqu'elle a expliqué comment Mme Roopnarine l'avait qualifiée de menteuse . Dans l'ensemble, j'ai conclu que le témoignage de Mme Khan était complètement cohérent.

[38] Cependant, j'ai eu de la difficulté avec le témoignage de Mme Roopnarine pour diverses raisons. M. McKillop est un avocat compétent et j'ai trouvé que son contre-interrogatoire de Mme Roopnarine était juste et respectueux. Il lui a constamment donné l'occasion de modifier son témoignage et il a déployé de réels efforts pour comprendre son témoignage et s'assurer qu'il n'était pas présenté de manière inexacte. Pourtant, Mme Roopnarine a souvent refusé de répondre franchement à des questions banales, en ne répondant que par oui ou non . Par exemple, lorsqu'on lui a présenté sa description d'emploi, elle a refusé de confirmer qu'il s'agissait bien des tâches liées à son poste jusqu'à ce qu'on lui demande de nombreuses fois. Elle a refusé de reconnaître que le fait qu'elle signale qu'une demande d'hypothèque était possiblement frauduleuse entraînait le rejet de cette demande, jusqu'à ce qu'on lui pose de nombreuses questions à ce sujet. Elle a agi de façon réservée et défensive tout au long du contre-interrogatoire. Elle a finalement reconnu qu'elle n'avait avisé Mme Khan de sa blessure au poignet qu'en octobre 2006. À la fin du contre-interrogatoire, elle a reconnu que ses problèmes de rendement en 2004 et en 2005, ainsi que ses problèmes de rendement dans le volet Gemini pendant les six premiers mois de 2006, n'étaient pas liés à sa blessure au poignet.

[39] J'ai aussi remarqué que le témoignage de Mme Roopnarine comportait de nombreuses incohérences. Par exemple, elle a modifié son témoignage de nombreuses fois en contre-interrogatoire, après qu'on lui a donné l'occasion de le faire. Elle a nié avoir reçu beaucoup de formation pour le volet CRDS et, lorsqu'on lui a montré les notes détaillées de la formation de quatre semaines donnée en mai 2006 à ses collègues, elle a finalement accepté qu'elle avait reçu une partie de cette formation. Elle ne se souvenait pas avoir reçu une partie de la formation et elle a nié avoir participé à une grande partie de la formation. J'ai comparé ce témoignage à celui de Mme Khan au sujet du fait que la formation a été donnée, témoignage qui coïncidait avec les notes du formateur décrivant les instructions concrètes qui avaient été données. Pour une autre question, Mme Roopnarine a nié avoir été mécontente de l'évaluation de rendement de 2006, même si elle s'en est plainte auprès de Mme Coupland, puis de Mme Penny.

[40] Mme Roopnarine a d'abord nié, dans son témoignage en interrogatoire principal et en contre-interrogatoire, qu'elle avait eu des problèmes de rendement. Puis, plus tard en contre-interrogatoire, elle a reconnu qu'elle avait fait des erreurs en 2004. Cependant, elle a immédiatement insisté sur la différence entre insouciance et erreur . Elle a d'abord nié avec véhémence le fait qu'elle ait pu avoir des problèmes de rendement depuis 2004. M. McKillop lui a fait le récit de 25 incidents et, en contre-interrogatoire, elle en a reconnu une partie. Par exemple, elle avait signé l'évaluation de rendement de 2005 et avait accepté qu'elle devait améliorer ses compétences pour satisfaire aux normes de base du service. Au départ, elle a nié le fait qu'elle ne respectait pas les directives et la procédure, mais elle a ensuite reconnu ce fait. Après un interrogatoire intensif, elle a finalement reconnu qu'elle avait accepté la recommandation de son formateur en juin 2006 selon laquelle elle devait se concentrer sur son travail dans le volet CRDS pour maintenir une constance dans les téléchargements et l'envoi d'alertes. Elle a finalement accepté qu'on l'a avisée, en juin 2006, qu'elle avait fait glisser un fichier maître du volet CRDS dans le mauvais dossier, mais a nié que cela avait créé des problèmes importants pour ses collègues, qui ne pouvaient pas y avoir accès. Elle a déclaré que le problème technique avait été corrigé en 15 à 20 minutes par le service de TI, alors que Mme Khan a déclaré que le problème avait été résolu après une journée et demie.

[41] De façon plus importante, Mme Roopnarine a nié avoir qualifié Mme Khan de menteuse, malgré le fait que Mme Coupland avait envoyé un courriel à ce sujet à Mme Penny, courriel dont une copie conforme avait été envoyée à Mme Khan peu après la rencontre et dont une copie papier avait été donnée à Mme Roopnarine. Elle n'a pas prouvé que le courriel n'était pas fiable. En contre-interrogatoire, Mme Roopnarine a d'abord refusé de reconnaître que le fait de qualifier un gestionnaire de menteur était grave, mais elle a ensuite admis qu'un tel comportement serait inacceptable.

[42] Elle a exagéré son témoignage. Par exemple, elle a sous-entendu qu'elle était responsable de la création d'une partie du processus dans le volet Gemini, alors qu'il n'existait aucune preuve qu'une personne de son niveau ait pu participer à la conception. Un autre point qui m'a frappée est son autoévaluation élogieuse de 2006 : elle a utilisé un niveau de langue soutenu et abstrait pour décrire son travail, plutôt que de présenter des exemples concrets de ses compétences. Je suis d'avis que cet effort de donner une allure positive à son rendement était malhonnête. J'ai aussi eu de la difficulté à croire qu'elle n'avait pas vu sa déclaration pour son action au civil, au sujet de son accident survenu en avril 2007, et qu'elle n'était pas au courant de l'état de cette action. D'ailleurs, lors d'une conférence préparatoire à l'audience, j'avais demandé à l'avocat de Mme Roopnarine, en sa présence, de communiquer avec l'avocat qu'elle avait retenu pour son action au civil afin d'obtenir et de présenter les documents pertinents. Dans l'ensemble, j'ai conclu que Mme Roopnarine n'était pas crédible. J'ai relevé de nombreuses incohérences dans son témoignage.

D. Nouveaux éléments de preuve au sujet de compressions

[43] L'avocat de Mme Roopnarine n'avait pas préparé d'argumentation écrite à la fin de l'audience et a demandé l'occasion de déposer des observations écrites. J'ai accepté. Dans ces observations et dans des courriels, l'avocat de Mme Roopnarine a soutenu que M. McKillop ne pouvait pas soutenir que Mme Roopnarine avait été congédiée conformément à une politique de BMO de congédier les employés dont le rendement était mauvais, compte tenu de la situation économique, parce que cet argument n'avait pas été présenté dans l'exposé des précisions de BMO. Je conviens avec l'avocat de Mme Roopnarine que l'argument des compressions n'a été soulevé pour la première fois qu'à l'audience. Par conséquent, je n'accorde aucun poids à cet aspect de l'argumentation de BMO.

E. Le rapport d'enquête de la Commission

[44] En l'espèce, le rapport d'enquête de la Commission a été présenté sur consentement. Bien que les arguments de l'avocat de Mme Roopnarine étaient fondés sur des conclusions de fait et des conclusions tirées du rapport d'enquête de la Commission, je n'accorde aucun poids aux conclusions de fait et aux conclusions de la Commission. Je me fonde sur la preuve présentée à l'audience.

III. LE DROIT

A. Établissement d'une preuve prima facie de discrimination

[45] L'article 7 de la Loi dispose que constitue un acte discriminatoire, s'il est fondé sur un motif de distinction illicite, le fait de refuser d'employer ou de continuer d'employer un individu. La déficience fait partie de la liste des motifs de discrimination illicites établie à l'article 3 de la Loi. Selon l'article 25, déficience , aux fins de l'application de la Loi, signifie [...] déficience physique ou mentale, qu'elle soit présente ou passée, y compris le défigurement ainsi que la dépendance, présente ou passée, envers l'alcool ou la drogue .

[46] Dans une affaire portant sur les droits de la personne présentée au Tribunal, le plaignant doit d'abord établir une preuve prima facie de discrimination. La preuve prima facie est celle qui porte sur les allégations qui ont été faites et qui, si on leur ajoute foi, est complète et suffisante pour justifier un verdict en faveur de la partie plaignante, en l'absence de réplique de la partie intimée. La réponse de l'intimé ne devrait pas être prise en compte dans la décision à savoir si le plaignant a établi une preuve prima facie de discrimination. (Voir Ontario (Commission des droits de la personne) et O'Malley c. Simpson Sears Ltd., [1985] 2 R.C.S. 536, et Lincoln c. Bay Ferries Ltd., 2004 CAF 204.) Il a été statué que les affirmations du plaignant doivent être crédibles pour qu'on autorise la conclusion selon laquelle il existait une preuve prima facie, Dhanjal c. Canada (Commission canadienne des droits de la personne), (1997) 139 F.T.R. 37, au paragraphe 6).

B. Réponse

[47] Une fois que la preuve prima facie de discrimination est établie, le fardeau de la preuve incombe par la suite à l'intimé, qui doit montrer que l'acte discriminatoire allégué ne s'est pas produit tel qu'allégué ou que l'acte était d'une manière ou d'une autre non discriminatoire ou justifié. (Maillet c. Canada (Procureur général), 2005 TCDP 48, au paragraphe 4; LCDP, article 15.). Voir aussi Canada c. Lambie, 1996 CanLii 3940 (C.F.). Lorsqu'on examine une action, plutôt qu'une transaction découlant d'une politique existante, il faut commencer par examiner si la transaction entre les parties, dans son ensemble, entraîne un traitement préjudiciable fondé sur des motifs de distinction illicites (Hutchinson c. Canada (Ministre de l'Environnement) (C.A.), 2003 CAF 133, [2003] 4 C.F. 580). Il n'est pas nécessaire que la discrimination soit l'unique raison de l'acte reproché pour qu'une plainte soit accueillie. Il suffit que la discrimination ne soit que l'une des raisons de l'acte ou de la décision. (Holden c. Compagnie des chemins de fer nationaux (1990), 14 C.H.R.R. D/12 (C.A.F.).)

C. La preuve

[48] La jurisprudence reconnaît la difficulté d'établir des allégations de discrimination au moyen d'une preuve directe. Comme le Tribunal l'a noté dans la décision Basi c. Compagnie des chemins de fer nationaux du Canada (1988), 9 C.H.R.R. D/5029 (T.C.D.P.), la discrimination n'est pas un phénomène qui se manifeste ouvertement, comme on serait porté à le croire. Il est rare en effet qu'on puisse démontrer par des preuves directes qu'un acte discriminatoire a été commis intentionnellement. On doit plutôt tenir compte de l'ensemble des circonstances afin de déterminer s'il existe de subtiles odeurs de discrimination.

[49] Essentiellement, cependant, la plaignante en l'espèce doit établir un lien entre sa déficience et la décision de l'employeur de la congédier (Mills c. Culp Transport Inc. 2009 TCDP 17). (Voir aussi Benoit c. Bell Canada, 2005 CF 926, aux paragraphes 15 et 16).

IV. Analyse

A. Mme Roopnarine a-t-elle établi qu'elle a été victime de discrimination?

(i) Licenciement

a) Preuve prima facie établie

[50] BMO a reconnu qu'à l'époque du congédiement, Mme Roopnarine souffrait d'une déficience, soit sa blessure au poignet causée par des microtraumatismes répétés, et qu'un rapport de spécialiste visant le prolongement de la période d'accommodement devait être présenté sous peu. En ce qui a trait à ses autres blessures, Mme Roopnarine n'a pas prétendu qu'elle n'avait pas été accommodée pour les blessures qu'elle a subies lors de son accident de voiture du 19 octobre 2006. En effet, elle a reconnu qu'elle avait été en congé et qu'elle avait reçu des prestations d'ICD. Dans ses observations écrites, l'avocat de Mme Roopnarine a mentionné qu'elle était blessée au cou, aux épaules, à la main et aux doigts lorsqu'elle a été congédiée. Cependant, la seule preuve médicale présentée par le médecin de famille de Mme Roopnarine ne portait que sur ses blessures à la main et au poignet. Lors des conférences préparatoires à l'audience, les deux avocats ont convenu que la seule blessure en question pour l'audience était la blessure au poignet causée par des microtraumatismes répétés.

[51] L'argument fondamental de Mme Roopnarine, tel qu'établi dans l'exposé des précisions et présenté au début de l'audience, est que BMO l'a congédiée de façon soudaine et inattendue alors qu'elle souffrait d'une blessure au poignet, qu'elle était en congé à titre d'accommodement pour cette blessure, qu'elle faisait de la physiothérapie pour soigner sa déficience et qu'elle attendait un rapport d'un spécialiste pour que la période d'accommodement soit prolongée. À l'époque de son congédiement, elle souffrait de douleurs causées par des microtraumatismes répétés. Aucune analyse fonctionnelle n'a été effectuée.

[52] Comme BMO n'a réellement contesté aucun de ces faits, je conclus que Mme Roopnarine a établi une preuve prima facie de discrimination fondée sur la déficience.

b) Explication raisonnable, qui n'est pas un prétexte, établie

[53] Cependant, je conclus que BMO a présenté une explication raisonnable qui n'est pas un prétexte pour le congédiement. La blessure au poignet de Mme Roopnarine n'a pas été un facteur dans la décision de la congédier. Mme Roopnarine était plutôt une employée difficile qui croyait qu'elle avait droit à une promotion et à une augmentation de salaire en raison de ses années de services et de son échelon salarial. Elle avait pour objectif d'être promue à un poste d'enquêteure principale en matière de fraude. Cependant, elle ne voulait pas atteindre les normes de base pour le poste d'analyste subalterne en matière de fraude, ou elle en était incapable. Elle ne voulait ou ne pouvait pas maîtriser les compétences de base du volet CRDS. Elle refusait d'accepter la critique constructive. Par conséquent, Mme Roopnarine a tenté de retourner au volet Gemini, où il était plus difficile de remarquer ses lacunes en matière de rendement. Même dans le volet Gemini, elle n'avait pas réussi à effectuer des évaluations complètes et satisfaisantes des demandes d'hypothèques et elle avait besoin de formation supplémentaire pour y arriver. Elle a refusé de signer son évaluation de rendement de 2006. Elle a refusé de discuter de ses lacunes avec Mme Khan. Elle a plutôt décidé de présenter une plainte à la gestionnaire de Mme Khan. Abruptement, elle a ouvert la rencontre en déclarant [traduction] Jamie est une menteuse , en parlant de Mme Khan. Même si la rencontre a duré une heure, elle ne s'est jamais excusée, à ce moment là ou après, pour cette remarque. Mme Khan avait traité Mme Roopnarine avec une patience perpétuelle et lui avait offert du soutien personnel quotidien, ainsi que de la formation continue et exhaustive. Mme Coupland a décidé que BMO ne tolérerait pas un tel manque de respect de la part d'un employé envers un gestionnaire compétent, sympathique et intelligent. Je conclus que cette décision n'était pas discriminatoire.

[54] Tout au long de son emploi, BMO a donné à Mme Roopnarine de la rétroaction au sujet de son rendement.

[55] En raison du comportement de Mme Roopnarine lors de la rencontre du 10 janvier 2007, ainsi que de ses problèmes de rendement et de sa réticence à respecter les procédures, BMO a choisi de la congédier. Comme elle était une employée de longue date, BMO a décidé de lui donner un avis et une indemnité de cessation d'emploi.

[56] Les problèmes de rendement de Mme Roopnarine n'étaient pas liés à sa blessure au poignet et étaient antérieurs à celle-ci. Mme Roopnarine a voulu retourner au volet Gemini, où son mauvais rendement était plus difficile à évaluer. Elle ne souhaitait pas y retourner parce que l'utilisation du clavier y était moindre et parce qu'un tel accommodement était nécessaire pour sa blessure au poignet. Bien qu'il ait pu y avoir une utilisation moins importante du clavier dans le volet Gemini, la preuve n'est pas suffisante pour démontrer que le transfert au volet Gemini était nécessaire comme mesure d'accommodement pour la blessure au poignet. Le médecin de famille de Mme Roopnarine n'a pas demandé un tel accommodement. BMO a respecté les mesures d'accommodement recommandées par le médecin de Mme Roopnarine dans le volet CRDS.

[57] BMO a accepté sa responsabilité en matière d'accommodement envers Mme Roopnarine. En effet, BMO a pris des mesures d'accommodement pour elle après son accident de voiture du 19 octobre 2006. En raison de problèmes médicaux découlant de cet accident, elle s'est absentée du travail et a reçu des prestations d'ICD. En janvier 2007, BMO a modifié l'horaire de travail de Mme Roopnarine afin de lui permettre de se rendre à des rendez-vous de physiothérapie pour traiter ses blessures subies lors de l'accident de voiture. Rien ne porte à croire que les efforts d'accommodement de BMO en ce qui a trait à l'accident de voiture étaient insuffisants. Du 2 janvier 2007 jusqu'à la date de congédiement, BMO a pris des mesures d'accommodement pour la blessure au poignet de Mme Roopnarine en réduisant à quatre heures par jour son temps d'utilisation d'un ordinateur, comme le médecin l'avait recommandé. De plus, le comportement de Mme Khan et de Mme Coupland n'a pas été affecté par le processus d'évaluation d'Oncidium.

[58] Il ne s'agit pas non plus en l'espèce d'un cas où il faut déterminer si Mme Roopnarine avait les capacités physiques lui permettant d'effectuer son travail. Ses capacités physiques n'ont joué aucun rôle dans la décision de BMO de la congédier. Les seuls facteurs dans cette décision étaient son rendement et son comportement.

[59] Bref, je conclus que le comportement de BMO et son explication pour le congédiement sont raisonnables et ne sont pas liés à la blessure au poignet de Mme Roopnarine; ils étaient de bonne foi et n'étaient pas un prétexte. J'ai examiné attentivement la preuve pour y relever l'odeur subtile de la discrimination, afin de déterminer si BMO a utilisé le mauvais rendement de Mme Roopnarine comme prétexte pour la congédier et afin de déterminer si les problèmes de rendement de Mme Roopnarine étaient causés ou aggravés par sa blessure au poignet. Ni l'un ni l'autre n'était le cas en l'espèce. Il n'est pas interdit à un employeur de congédier un employé ayant une déficience pour des motifs non discriminatoires, comme le mauvais rendement qui n'est pas lié à la déficience. (Voir Crouse c. Canadian Steamship Lines Inc., 2001 CanLII 8493 (T.C.D.P.) et Coulter c. Purolator Courier Ltd., 2004 TCDP 37. Voir aussi Desormeaux c. Ottawa, 2005 CAF, 311.) Compte tenu de la prépondérance des probabilités, les limites physiques de Mme Roopnarine n'ont joué aucun rôle dans la décision de BMO de la congédier.

(ii) Traitement différent préjudiciable en milieu de travail

a) Aucune preuve prima facie établie

[60] La plainte de Mme Roopnarine portait sur le licenciement et sur la façon dont le comportement qui a précédé celui-ci a entraîné un congédiement discriminatoire. Mme Roopnarine n'a pas soutenu dans son exposé des précisions qu'elle avait été victime d'un traitement différent préjudiciable avant son congédiement. Cependant, j'ai mentionné cette période aux deux avocats à l'audience. Comme ils n'arrivaient pas à s'entendre à ce sujet, j'ai décidé d'aborder cette question dans la présente décision afin d'en assurer l'intégralité.

[61] Je ne conclus pas que Mme Roopnarine a établi une preuve prima facie de discrimination pour la période précédant son congédiement, soit à partir du mois d'octobre 2006. L'alinéa 7b) interdit le traitement différent en milieu de travail. Pour déterminer s'il y a eu acte discriminatoire, la perception ou la conviction de Mme Roopnarine n'est pas suffisante : Filgueira c. Garfield Container Transport Inc., 2005 TCDP 32, au par. 41, conf. 2006 CF 785.

[62] Après avoir examiné toute la preuve pour y relever l'odeur subtile de discrimination, je conclus que BMO n'a pas agi de façon discriminatoire envers Mme Roopnarine pendant son emploi et après qu'elle ait avisé Mme Khan de sa blessure au poignet, le 5 octobre 2006. Au contraire, Mme Khan a déployé tous les efforts pour l'aider à améliorer ses compétences afin de faciliter ses futures possibilités d'avancement de carrière. Les problèmes de rendement de Mme Roopnarine et son comportement étaient une préoccupation pour BMO depuis 2004. Mme Roopnarine a refusé d'accepter la critique et les directives et, malgré avoir reçu de la formation, elle n'a pas réussi à s'améliorer dans un poste de niveau d'entrée dans le volet CRDS. Selon la prépondérance des probabilités, sa blessure au poignet d'octobre 2006 n'a joué aucun rôle dans les efforts continus de Mme Khan de l'aider et de lui donner des directives.

[63] Pendant l'audience, j'ai précisément demandé aux avocats si la demande d'Oncidium visant l'obtention de renseignements médicaux était une question réelle en l'espèce. L'avocat de Mme Roopnarine a déclaré qu'il s'agissait d'une question réelle en ce sens que BMO aurait raisonnablement dû savoir que Mme Roopnarine avait une déficience depuis mai 2006, du moins depuis octobre 2006, que des renseignements médicaux supplémentaires n'auraient pas dû être demandés et que BMO aurait dû prendre des mesures d'accommodement plus tôt. Malgré les observations orales de l'avocat de Mme Roopnarine, la question n'a pas été soulevée dans l'exposé des précisions de Mme Roopnarine. BMO a toujours cru que l'affaire en l'espèce portait sur le congédiement et a exprimé de la surprise lors de la communication tardive de cette question. Par conséquent, elle ne m'a pas été présentée correctement. Contrairement à l'avis de son avocat, Mme Roopnarine a témoigné qu'elle était satisfaite du processus de communication d'Oncidium.

[64] De plus, le processus d'accommodement de BMO correspondait à son devoir d'accommoder un employé qui déclare avoir une déficience. La plaignante avait le devoir de faciliter son accommodement, devoir qui comprenait l'obligation de se conformer à la demande raisonnable de l'employeur de fournir des renseignements médicaux pertinents : Tweten c. RTL Robinson Enterprises Ltd., 2005 TCDP 8. Dès qu'Oncidium a reçu le rapport médical, la compagnie a transmis les renseignements aux employés de BMO, qui ont mis en place les mesures d'accommodement suggérées par le médecin de Mme Roopnarine. (Voir aussi Wong c. Banque Royale du Canada, 2001 CanLII 8499 (T.C.D.P.))

[65] Oncidium et BMO ont agi de bonne foi dans leurs interactions avec Mme Roopnarine.

[66] Mme Roopnarine a soutenu à l'audience et dans ses observations écrites présentées après l'audience qu'Oncidium avait unilatéralement imposé la date d'expiration du 4 février 2007 pour la période d'accommodement. Je ne crois pas que cette restriction était déraisonnable compte tenu du fait que le médecin de Mme Roopnarine avait confirmé dans son rapport du 17 octobre 2006 qu'elle devait voir un spécialiste. Comme sa lettre du 27 décembre 2006 a confirmé que Mme Roopnarine avait un rendez-vous avec le spécialiste le 18 janvier 2007, il n'était pas déraisonnable qu'Oncidium s'attende à recevoir le rapport avant le 4 février 2007 afin de déterminer si l'accommodement devait se poursuivre. De plus, cette question n'a aucune incidence en l'espèce puisque BMO n'a pas mis fin à l'accommodement le 4 février 2007, mais a plutôt continué d'accommoder Mme Roopnarine jusqu'à son congédiement.

[67] En ce qui a trait à l'allégation de Mme Roopnarine selon laquelle BMO n'a pas effectué d'analyse fonctionnelle avant de la congédier, j'ai déjà conclu que BMO ne l'avait pas congédiée en raison de sa déficience, mais plutôt en raison de son mauvais rendement et de son comportement.

[68] En ce qui a trait à son argument selon lequel BMO aurait dû la transférer au volet Gemini, où elle aurait eu un meilleur accommodement pour sa blessure au poignet, la preuve médicale ne permet pas d'établir qu'un retour au volet Gemini l'aurait aidé à réduire sa douleur au poignet. Son médecin a restreint son utilisation prolongée de la souris et du clavier, définissant utilisation prolongée comme une utilisation de plus de quatre heures. Mme Khan a décidé, pour des raisons de gestion raisonnables, que Mme Roopnarine devait parfaire ses compétences au niveau d'entrée dans le volet CRDS et elle a accommodé Mme Roopnarine de façon raisonnable dans son poste au CRDS en respectant les restrictions. Mme Roopnarine a continué à demander d'être retournée au volet Gemini parce qu'elle ne réussissait pas dans le volet CRDS et que son travail était plus difficile à surveiller dans le volet Gemini. Comme il l'a été précisé plus tôt, sa demande d'être retournée au volet Gemini n'était pas une demande d'accommodement pour sa blessure au poignet.

[69] À partir du 2 janvier 2007, Mme Roopnarine n'a travaillé que quatre heures par jour, qui en comptait normalement 7,5. BMO lui payait son salaire pour les trois heures où elle ne travaillait pas. En ce qui a trait à l'argument de Mme Roopnarine selon lequel BMO aurait dû lui donner du travail non informatisé supplémentaire pour le reste de la journée, le rapport médical ne mentionnait pas un tel accommodement. Il y était seulement précisé qu'elle ne devait pas utiliser un clavier et une souris pendant plus de quatre heures par jour. Mme Roopnarine n'a pas avisé BMO, avant l'audience, qu'elle souhaitait que ces quatre heures de travail soient étalées sur la journée complète de 7,5 heures. Elle a ainsi manqué à son obligation d'aviser BMO de l'accommodement qu'elle souhaitait obtenir et de présenter les renseignements médicaux pertinents pour cette demande. (Voir Tweten c. RTL Robinson Enterprises Ltd., 2005 TCDP 8.) De plus, bien que le processus d'accommodement soit personnalisé, la plaignante ne peut pas s'attendre à une solution parfaite : Centre universitaire de santé McGill (Hôpital général de Montréal) c. Syndicat des employés de l'Hôpital général de Montréal, 2007 CSC 4, [2007] 1 R.C.S. 161, au paragraphe 22. On ne ma pas présenté de jurisprudence à lappui de largument selon lequel BMO avait une obligation en vertu de la LCDP de créer du travail pour la plaignante.

[70] Enfin, Mme Roopnarine a soutenu que BMO n'avait mentionné les problèmes de rendement qu'après qu'elle a déclaré qu'elle souffrait d'une blessure au poignet. Cette allégation est contraire à la preuve selon laquelle Mme Roopnarine avait des problèmes de rendement qui inquiétaient BMO depuis 2004 et que ces problèmes se sont poursuivis jusqu'à la date de congédiement. Mme Khan a agi de façon raisonnable et patiente avec Mme Roopnarine dans toutes leurs interactions. Elle était réellement prête à aider Mme Roopnarine en prenant des mesures d'accommodement. Elle lui a donné de la rétroaction constructive et de la formation continue pour l'aider à améliorer ses compétences. Je n'accepte pas l'argument selon lequel Mme Coupland a agi de façon discriminatoire envers Mme Roopnarine.

b) Explication raisonnable établie

[71] Même si la preuve a permis d'établir une preuve prima facie de discrimination, BMO a présenté une explication raisonnable qui n'est pas un prétexte pour ses actions d'octobre 2006 jusqu'au congédiement, comme je l'ai précisé plus tôt.

c) Aucun droit distinct à l'accommodement

[72] Enfin, la plaignante ne peut pas soulever un argument distinct selon lequel BMO a agi de façon discriminatoire envers elle en ne prenant pas de mesures d'accommodement pour sa blessure au poignet. Le défaut de prendre des mesures d'accommodement n'est ni un motif de distinction illicite ni une pratique discriminatoire au sens de la LCDP. La LCDP ne prévoit aucun droit distinct à l'accommodement. L'obligation d'accommodement n'existe que dans le contexte du paragraphe 15(2) de la LCDP et seulement lorsque l'intimé présente une justification de bonne foi à titre de défense à une allégation de discrimination. [Graham c. Société canadienne des postes 2007 TCDP 40.]

V. LA DÉCISION

[73] Pour les présents motifs, je conclus que BMO a congédié Mme Roopnarine en raison de ses problèmes de rendement. Sa déficience, soit la blessure au poignet causée par des microtraumatismes répétés, n'était pas un facteur dans la décision de la congédier.

[74] En ce qui a trait aux questions de l'accommodement avant le congédiement, je conclus que BMO a tenté d'accommoder Mme Roopnarine et a pris des mesures d'accommodement appropriées au sujet de sa blessure au poignet. BMO lui a demandé de présenter un rapport médical qui précisait le type d'accommodement requis. Dès que BMO a reçu ce rapport, des mesures d'accommodement ont été prises pour que Mme Roopnarine ne travaille pas plus de quatre heures par jour avec une souris et un clavier. Les employés de BMO n'ont pas agi de façon discriminatoire envers elle en cours d'emploi.

[75] Par conséquent, je rejette la plainte puisqu'elle n'est pas fondée. J'ai examiné la preuve, tant chacun de ses éléments que l'ensemble qu'ils forment collectivement, et je n'y ai relevé aucune contravention à l'article 7 de la LCDP.

Signée par
Shirish P. Chotalia, Q.C.

OTTAWA (Ontario)
Le 19 mars 2010

PARTIES AU DOSSIER

DOSSIER DU TRIBUNAL : T1405/3109
INTITULÉ DE LA CAUSE : Tamaratie Roopnarine c. Banque de Montréal
DATE ET LIEU DE L'AUDIENCE : 25 au 29 janvier 2010
Toronto, Ontario
DATE DE LA DÉCISION DU TRIBUNAL : 19 mars 2010
ONT COMPARU :
Fola Adekusibe
Emmaunel Akioyamen
Pour la plaignante
(Aucune représentation) Pour la Commission canadienne des droits de la personne
Malcolm MacKillop Meighan Ferris-Milles Alison Adam Pour l'intimée
 Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.