Tribunal canadien des droits de la personne

Informations sur la décision

Contenu de la décision

TRIBUNAL CANADIEN DES DROITS DE LA PERSONNE CANADIAN HUMAN RIGHTS TRIBUNAL

JIM SMITH

le plaignant

- et -

COMMISSION CANADIENNE DES DROITS DE LA PERSONNE

la Commission

- et -

COMPAGNIE DES CHEMINS DE FER NATIONAUX

l'intimée

DÉCISION

2008 TCDP 15
2008/05/09

MEMBRE INSTRUCTEUR : J. Grant Sinclair

I. INTRODUCTION

A. La blessure au dos de M. Smith

B. Le retour de M. Smith au travail après sa blessure

II. LES QUESTIONS EN LITIGE

III. DÉCISION

IV. CONCLUSIONS DE FAIT

A. Tentatives de réaffecter M. Smith au poste qu'il occupait avant de se blesser

B. Premier PRT - Décembre 2000 - Mécanicien de locomotive

C. Deuxième PRT - Mars 2001 - Mécanicien de locomotive

D. Troisième PRT - Avril 2001 - Mécanicien de locomotive

(i) Réunion du 12 juillet 2001 Tentative de régler la situation de M. Smith

(ii) Évaluation du Dr Clarke

(iii) Offre d'emploi temporaire de la CN - 16 juillet 2001

(iv) Évaluation des capacités fonctionnelles de M. Smith - Octobre/novembre 2002

(v) Autres possibilités d'emploi à Terrace

E. Appel de M. Smith à la commission de révision de la WCB - Décision - 14 mars 2003

F. PRT - juin et juillet 2003 - Coordonnateur de formation des trains à Prince George

G. Quatrième PRT - Coordonnateur de formation des trains - Prince George, juin et juillet 2003

(i) Tâches du coordonnateur de formation des trains

(ii) Préoccupations de M. Smith au sujet du PRT pour le poste de coordonnateur de formation des trains

H. Formation technique - Coordonnateur de formation des trains - Parc Thornton - Vancouver, juin 2003

(i) Première étape du PRT - Parc Thornton à Vancouver

a) Journaux de M. Smith

(ii) Deuxième étape du PRT - Prince George - juillet 2003

a) Journaux de M. Smith

I. Grief du syndicat déposé pour M. Smith, juin 2002

J. Cinquième PRT - Coordonnateur adjoint de formation des trains - Janvier 2004

(i) Tâches de M. Smith et responsabilités du coordonnateur adjoint de formation des trains

(ii) Annulation du PRT au poste de coordonnateur adjoint de formation des trains

K. Autre possibilité d'occuper le poste de coordonnateur adjoint de formation des trains

L. Demande de pension d'invalidité du Régime de pensions du Canada présentée par M. Smith

M. M. Smith peut-il travailler, ou est-il invalide de façon permanente? Faits dont il faut tenir compte

(i) Lettre du 21 septembre 2004

(ii) Demande de contrôle judiciaire de la décision de l'arbitre

(iii) La décision du WCAT - Février 2006

(iv) Notes cliniques de 2006 du Dr Appleton

(v) Recommandation au Dr Keyes, neurologue

(vi) Demande de M. Smith : prestations de retraite pour invalidité de la CN

(vii) Demande de travail de M. Smith auprès de la CN, envoyée par courriel le 29 juin 2006

(viii) Proposition d'accommodement pour M. Smith - Septembre 2006

(ix) Plainte de M. Smith en matière de droits de la personne et réparations demandées

V. MOTIFS DE LA DÉCISION

A. La CN a-t-elle agi de façon discriminatoire ou a-t-elle exercé des représailles envers M. Smith en rejetant sa demande de pension d'invalidité de la CN?

B. La CN a-t-elle pris des mesures d'accommodement pour M. Smith?

VI. CONCLUSION

I. INTRODUCTION

[1] James Smith est le plaignant en l'espèce. Il est mécanicien de locomotive pour la Compagnie des chemins de fer nationaux du Canada (CN), mais il n'occupe plus cette fonction depuis 2001.

[2] M. Smith a commencé à travailler pour la CN comme serre-freins à Edmonton en 1979. En 1981, il a déménagé à Prince George (Colombie-Britannique) et a travaillé comme chef de train et serre-freins. En 1987, il s'est qualifié pour le poste de mécanicien de locomotive et a commencé à travailler dans ce poste pour la CN.

[3] En 1989, M. Smith a déménagé à Terrace (Colombie-Britannique), où il habite présentement avec sa femme. Ils aiment beaucoup habiter à Terrace. Mme Smith travaille comme assistante de bibliothèque pour la commission scolaire locale. Elle est diplômée à titre de pharmacienne. Leurs enfants n'habitent plus à la maison.

A. La blessure au dos de M. Smith

[4] Les événements qui ont finalement poussé M. Smith à déposer une plainte de discrimination, le 28 février 2002, devant la Commission canadienne des droits de la personne, ont débuté le 17 novembre 1997. C'est ce jour-là qu'il s'est blessé au dos en déplaçant un dérailleur (qui pèse environ 60 livres) pour pouvoir sortir la locomotive d'un atelier de la CN à Prince Rupert. Il a décrit la situation en disant : [traduction] quelque chose à lâché dans mon dos.

B. Le retour de M. Smith au travail après sa blessure

[5] M. Smith a quitté le travail le 17 novembre 1997. Il a vu son médecin, le Dr Appleton, qui a déposé un rapport de médecin traitant à la Worker's Compensation Board (WCB) (commission des accidents de travail), le 20 novembre 1997, dans lequel il attestait que M. Smith souffrait de douleurs aiguës au bas du dos. Le Dr Appleton a expliqué qu'il prévoyait que M. Smith puisse retourner au travail le 27 novembre 1997. M. Smith a déposé une demande à la WCB le 25 novembre 1997.

[6] Pendant qu'il était en arrêt de travail, M. Smith a fréquenté la Skeena Work Conditioning Clinic (une clinique de conditionnement au travail). Selon le rapport du 18 février 1998 de la clinique, M. Smith était apte à retourner à ses tâches régulières sans limite.

[7] M. Smith est bien retourné au travail le 27 février 1998. Après son retour au travail, il a signalé qu'il avait de la difficulté à s'asseoir en raison de douleurs à la jambe gauche et dans le bas du dos. Comme mécanicien de locomotive, il était assis la plupart du temps alors qu'il conduisait la locomotive de Terrace à d'autres endroits sur la ligne du Nord de la CN, tels que Prince George, Prince Rupert, Smithers et Kitimat.

[8] M. Smith a de nouveau quitté le travail le 19 février 1999. En raison de la détérioration de l'état de M. Smith, le Dr Appleton a référé M. Smith en chirurgie (une discectomie lombaire du disque L5-S1 gauche). M. Smith a été opéré le 12 mars 1999 à Vancouver par le Dr Padilla. D'après M. Smith, la chirurgie a amélioré son état. La douleur qu'il ressentait était beaucoup moins intense.

[9] Après son opération, M. Smith a tenté d'appliquer un certain nombre de plans de retour au travail, élaborés en collaboration avec la WCB et la CN pendant la période de 2000 à 2004. Trois des plans visaient à permettre à M. Smith de réintégrer le poste de mécanicien qu'il avait avant de se blesser. Les deux autres plans prévoyaient former M. Smith pour qu'il puisse travailler comme coordonnateur de formation des trains ou comme assistant au coordonnateur de formation des trains à Prince George. Pour occuper ce poste, M. Smith devait déménager de Terrace à Prince George.

[10] Aucun de ces plans de retour au travail n'a connu de succès. M. Smith a cessé de travailler comme mécanicien en mars 2001. Il n'est jamais retourné travailler pour la CN, mais il est toujours sur la liste des employés de la CN, sans paye ni avantages.

II. LES QUESTIONS EN LITIGE

[11] Les questions en litige en l'espèce, telles qu'elles sont définies par M. Smith dans son exposé des précisions, sont les suivantes :

  1. La CN a-t-elle agi de façon discriminatoire envers M. Smith en raison de sa déficience et de sa situation familiale en ne prenant pas de mesures d'accommodement lui permettant d'occuper un emploi convenable dans la région de Terrace?
  2. La CN a-t-elle agi de façon discriminatoire et/ou a-t-elle exercé des représailles envers M. Smith, parce qu'il a maintenu sa plainte, en faisant de fausses déclarations à la WCB au sujet du caractère approprié des mesures d'accommodement qu'elle lui avait offertes comme mécanicien de locomotive et comme coordonnateur de formation des trains à Prince George, en faisant de fausses déclarations au sujet des difficultés d'ordre médical qu'il éprouvait pendant sa formation à Prince George et en faisant de fausses déclarations au sujet de sa capacité de mener à bien les deux programmes de coordonnateur de formation des trains à Prince George?
  3. La CN a-t-elle agi de façon discriminatoire et/ou a-t-elle exercé des représailles envers M. Smith lorsqu'elle a rejeté sa demande de pension d'invalidité?

[12] En ce qui a trait à l'argument de M. Smith selon lequel il devait obtenir une mesure d'accommodement à Terrace, il s'agit en l'espèce de la troisième instance judiciaire dans laquelle M. Smith soulève cette question. Elle a d'abord été soulevée dans un grief présenté par le syndicat de M. Smith, la Fraternité des ingénieurs de locomotives, le 26 juin 2002. Ce grief a été rejeté par l'arbitrage le 14 juillet 2003.

[13] La question a ensuite été soulevée dans l'appel que M. Smith a interjeté auprès du Worker's Compensation Appeal Tribunal (WCAT), qui a été entendu le 29 novembre 2005. Dans la décision qu'il a rendue le 10 février 2006, le WCAT a aussi rejeté l'argument de M. Smith selon lequel la CN devrait lui donner un accommodement à Terrace.

[14] Néanmoins, M. Smith soulève la même question devant le Tribunal.

III. DÉCISION

[15] J'ai conclu que :

  1. La CN a accommodé M. Smith en préparant trois programmes de retour au travail modifié pour qu'il puisse reprendre du service comme mécanicien de locomotive à Terrace, et ensuite en lui offrant le poste de coordonnateur ou de coordonnateur adjoint de formation de trains à Prince George.
  2. La CN n'a pas commis d'acte discriminatoire et n'a pas exercé de représailles envers M. Smith dans ses interactions avec la WCB.
  3. La preuve ne soutient pas la conclusion selon laquelle M. Smith a une invalidité totale et permanente qui l'empêche de travailler. La CN n'a pas agi de façon discriminatoire et n'a pas exercé de représailles envers M. Smith en lui refusant la pension d'invalidité.

[16] La plainte de M. Smith est rejetée.

IV. CONCLUSIONS DE FAIT

A. Tentatives de réaffecter M. Smith au poste qu'il occupait avant de se blesser

[17] M. Smith a avisé Connie Araujo, la responsable de son dossier à la WCB, des difficultés qu'il éprouvait au sujet de son retour au travail. Elle a demandé au Dr McDougall, un conseiller médical du WCB, d'examiner la preuve médicale au dossier de M. Smith et de la conseiller quant à savoir si M. Smith avait une invalidité fonctionnelle permanente qui l'empêcherait de retourner au travail comme mécanicien.

[18] Dans son rapport du 29 septembre 1999, le Dr McDougall a noté que M. Smith avait déclaré qu'il éprouvait encore des difficultés à s'asseoir, ce qu'il devait faire la majeure partie du temps dans le poste qu'il occupait avant de se blesser. Il ne pouvait pas dire, à ce moment, si M. Smith pouvait reprendre son poste de mécanicien.

[19] Le Dr McDougall a recommandé certaines restrictions de travail pour M. Smith, soit le fait d'éviter de soulever des charges de façon répétitive ou de soulever des charges lourdes, d'éviter d'exécuter des rotations et de se pencher, et de changer de la position assise à une position debout, puis de marcher, lorsqu'il travaillait.

[20] La WCB s'est arrangée pour que le WorkAble Centre à Terrace vienne visiter le lieu de travail pour examiner les besoins physiques liés aux postes de mécanicien et de conducteur/serre-freins à la CN. Cette mesure a été prise en partie en réponse à la demande précédente de M. Smith d'être transféré à un poste de conducteur/serre-freins.

[21] Karen Chasney, une ergothérapeute agréée travaillant pour WorkAble, a visité le lieu de travail à Terrace le 7 octobre 1999. Dans le rapport qu'elle a préparé le 21 octobre 1999, Mme Chasney a fait une description détaillée des tâches et des responsabilités pour les deux postes. Elle a aussi mentionné les inquiétudes dont M. Smith lui avait fait part lors de leur rencontre le 8 octobre 1999, au sujet de son retour au travail au poste de mécanicien.

[22] Dans son rapport, Mme Chasney était contre l'idée que M. Smith obtienne un poste de chef de train/serre-freins en raison du risque important qu'il se blesse de nouveau. Elle recommandait que M. Smith reprenne le poste qu'il avait avant de se blesser. Il devait commencer à titre de remplaçant pour retrouver sa tolérance pour le travail et ensuite suivre un programme de retour progressif au travail, qui serait coordonné par la CN, la WCB et lui-même. Elle a aussi suggéré que M. Smith alterne entre une position assise et une position debout lorsqu'il conduisait la locomotive.

[23] Dans un certain nombre de rapports du médecin traitant envoyés à la WCB entre septembre et novembre 1999, le Dr Appleton a noté que M. Smith déclarait que ses symptômes n'avaient pas changé et qu'il continuait à avoir des problèmes lorsqu'il devait rester assis pour une période prolongée. Le Dr Appleton n'était pas certain que M. Smith pourrait suffisamment changer de position lorsqu'il conduisait la locomotive, comme le rapport WorkAble le suggère.

[24] M. Smith est retourné au travail le 13 décembre 1999, sur une ligne de Terrace à Kitimat. Il a été capable de se rendre à Kitimat, mais n'a pas été capable de revenir. Il a plutôt pris un taxi pour se rendre de Kitimat à Terrace.

[25] Le Dr Appleton a examiné M. Smith au début janvier 2000. M. Smith avait déclaré qu'il ressentait de fortes douleurs lorsqu'il restait assis plus de 20 à 30 minutes, selon la chaise sur laquelle il était assis. Le Dr Appleton était d'avis que M. Smith ne pouvait plus occuper le poste de mécanicien en raison des périodes prolongées au cours desquelles il devait rester assis.

[26] Mme Araujo a pris des arrangements pour qu'un autre médecin consultant de la WCB, le Dr Naismith, examine M. Smith, ce qu'il a fait le 28 janvier 2000. M. Smith a déclaré au Dr Naismith que les principales exigences physiques de son travail étaient de s'asseoir et de conduire la locomotive de façon sécuritaire. S'il devait rester assis plus de deux heures, il ressentait des douleurs au dos.

[27] Le Dr Naismith n'était pas d'avis que la blessure de M. Smith causait une contre-indication médicale à toute activité qui entraînait ses symptômes. Il croyait que la description de M. Smith au sujet de sa tolérance limitée lorsqu'il était assis était possible sur le plan biologique. Cependant, sa tolérance et la douleur qu'il ressentait ne pouvaient pas être mesurées de façon médicale. Il était d'accord avec le Dr Appleton que M. Smith devait restreindre le temps qu'il était assis en fonction d'un niveau raisonnable de confort.

[28] Les renvois aux spécialistes se sont poursuivis. Le 17 février 2000, le Dr F. Gouws, un conseiller médical de la WCB, a renvoyé M. Smith au Dr Wing, un chirurgien orthopédique, pour qu'il subisse un autre examen médical. Le Dr Wing a examiné M. Smith le 5 mai 2000. Dans son rapport médical, le Dr Wing n'a pas recommandé qu'il y ait une autre chirurgie. Il était d'avis que M. Smith pouvait faire un certain type de travail et a suggéré un programme de retour au travail modifié. Si M. Smith ne pouvait plus travailler comme mécanicien, il faudrait lui trouver un autre poste.

[29] En juillet 2000, Todd McDonald, un conseiller en réadaptation professionnelle de la WCB, a commencé à s'occuper du dossier de M. Smith. Il voulait mettre en place un programme de retour au travail (PRT) progressif et a demandé à Erin Fawcett, une agente préposée aux réclamations de la CN, de communiquer avec les responsables de la sécurité de la CN pour déterminer s'il serait dangereux pour M. Smith de se tenir debout pendant qu'il conduisait la locomotive. Erin Fawcett a confirmé que les responsables de la sécurité de la CN ne pensaient pas que cela poserait un problème en matière de sécurité.

B. Premier PRT - Décembre 2000 - Mécanicien de locomotive

[30] M. McDonald a demandé à la CN d'élaborer un PRT progressif et la CN a demandé à Karlene Dawson, une spécialiste en kinésiologie et une professionnelle en gestion de dossiers d'invalidité, pour qu'elle s'en charge. Mme Dawson a préparé un PRT, que la WCB et la CN ont examiné et approuvé.

[31] Pour préparer le PRT de M. Smith, Mme Dawson a consulté le superviseur de M. Smith à Terrace au sujet des tâches d'un mécanicien. Elle a examiné les renseignements de la WCB au sujet des limites médicales ou des contre-indications quant au retour de M. Smith à l'emploi qu'il occupait avant de se blesser et elle a aussi examiné le rapport WorkAble du 21 octobre 1999 qui soulignait les exigences physiques de l'emploi et les recommandations pour M. Smith.

[32] Le 22 août 2000, Mme Dawson a discuté avec M. Smith au sujet du plan de retour au travail qu'elle préparait pour lui. Ils ont parlé de ses tolérances et de la période pendant laquelle il était capable d'être assis ou de rester debout. Il lui a expliqué qu'il était capable de conduire pendant environ deux heures à la fois et qu'il faisait environ cinq heures d'exercice à la maison à ce moment-là. Il lui a aussi dit que, tant qu'il continuait ses exercices, son dos ne lui faisait pas si mal.

[33] Mme Dawson a présenté le PRT à M. Smith le 8 septembre 2000. Elle lui a demandé d'examiner le plan et de lui faire parvenir ses commentaires et ses préoccupations. Il pensait que c'était un plan un peu trop agressif et il n'était pas certain qu'il serait capable de le suivre. Mme Dawson était surprise. Elle croyait que les renseignements qu'elle avait, ainsi que les tolérances dont M. Smith lui avait parlé, concordaient avec le PRT.

[34] M. Smith a vu le Dr Wing de nouveau le 23 octobre 2000. Mme Araujo avait envoyé le PRT de M. Smith au Dr Wing et lui avait demandé ses commentaires. Le Dr Wing était d'avis que le plan était tout à fait approprié pour M. Smith. Il a recommandé que M. Smith bouge et change de position de temps en temps pendant son travail.

[35] Le PRT devait débuter le 12 décembre 2000. M. Smith effectuerait deux voyages par semaine pour les deux premières semaines du plan. Il aurait trois jours de congé pendant ces semaines pour qu'il puisse se reposer et continuer à faire ses exercices à la maison.

[36] Sa semaine de travail augmenterait progressivement de façon à ce qu'un voyage supplémentaire soit ajouté chaque semaine. Pendant cette période, M. Smith serait la quatrième personne dans une équipe composée de trois membres, ce qui signifie qu'il ne serait pas le principal responsable de la conduite de la locomotive. Le plan précisait aussi qu'il devrait alterner la position assise avec la position debout.

[37] Selon le plan, M. Smith devait tenir un journal de sa situation et le télécopier chaque semaine aux Services de santé au travail de la CN. Il devait inscrire ses tâches, tout symptôme physique et si les symptômes augmentaient ou diminuaient, afin que la CN puisse apporter les modifications nécessaires à son poste.

[38] Le 15 décembre 2000, Mme Dawson a écrit au Dr Appleton au sujet des spasmes que M. Smith disait ressentir lorsqu'il conduisait la locomotive. Dans sa lettre, elle a inclus le PRT de M. Smith et une analyse des exigences physiques du poste de mécanicien. Elle a demandé l'avis du Dr Appleton au sujet des spasmes et de la question à savoir si les spasmes étaient causés par un état pathologique sous-jacent qui pouvait affecter son emploi à titre de mécanicien de locomotive.

[39] Dans sa réponse du 19 décembre 2000, le Dr Appleton a précisé que M. Smith était en état de reprendre le travail de façon progressive, comme l'indiquait le plan, et que son état de santé était stable. Le Dr Appleton a aussi suggéré que M. Smith puisse se déplacer de façon plus fréquente et a rappelé qu'il était contre-indiqué qu'il reste assis de façon prolongée.

[40] M. Smith est retourné au travail le 12 décembre 2000. Le 12, le 14 et le 19 décembre, il a travaillé sur la ligne de Terrace à Kitimat en alternant la position assise avec la position debout. Le 21 décembre, il n'a fait que le voyage d'aller.

[41] Le 28 décembre 2000, M. Smith devait faire le voyage à Kitimat. Alors qu'il s'est assis dans la locomotive en attendant de partir, il a ressenti des spasmes aigus. Il a dû sortir de la locomotive et s'étendre sur le plancher du poste de triage. Sa femme est venue le chercher et l'a amené à l'hôpital. Il a été examiné, a reçu des médicaments et est retourné à la maison.

[42] M. Smith a été en mesure de faire le voyage de retour de Terrace à Kitimat le 29 décembre. Cependant, dans le voyage Terrace/Kitimat du 2 janvier 2001, il a déclaré que ses spasmes étaient tellement fréquents et aigus qu'il ne pouvait pas faire le voyage de retour. Il a pris un taxi jusqu'à Terrace et est resté allongé sur le banc arrière tout le long du voyage. M. Smith a été incapable de terminer son PRT.

[43] Le 24 janvier 2001, on a demandé l'opinion médicale du Dr Trent Faraday, conseiller médical de la WCB, quant à savoir s'il y avait eu des changements importants dans l'état médical de M. Smith depuis janvier 2000. Il a répondu le 25 janvier 2001 qu'il n'y avait pas eu de changement dans l'état de santé de M. Smith.

[44] Le Dr Faraday a aussi confirmé les restrictions en matière de travail physique de M. Smith :

éviter de soulever des poids de plus de 30 livres;

éviter de rester assis pour des périodes prolongées;

éviter les tâches qui l'obligent à pousser, à tirer, à transporter des poids et à se pencher de façon excessive;

avoir la possibilité de changer de la position assise à la position debout et de marcher lorsqu'il en ressent le besoin.

[45] Le Dr Faraday a conclu que M. Smith devait terminer le PRT élaboré par Mme Dawson et approuvé par le Dr Wing.

C. Deuxième PRT - Mars 2001 - Mécanicien de locomotive

[46] Avant l'élaboration du PRT de décembre 2000, M. Smith avait suggéré à la CN de lui donner un poste de mécanicien dans le parc à matériel remorqué à Terrace. Après l'échec du premier PRT, et en réponse à la suggestion de M. Smith, Mme Dawson a préparé un nouveau plan. La WCB n'a pas participé à l'élaboration du plan. Il a été préparé à la demande de la CN.

[47] Ce PRT prévoyait que M. Smith travaillerait dans le parc à matériel remorqué, il travaillerait deux heures sur la locomotive de gare de triage et une heure dans le poste de triage. Il serait un employé de surplus et il devrait essayer d'effectuer le plus de tâches possible pour la durée du plan.

[48] Il s'agissait d'un plan de transition, selon lequel M. Smith devait graduellement augmenter le nombre d'heures et de quarts qu'il faisait chaque semaine. M. Smith pouvait prendre des pauses s'il en avait besoin puisqu'il était un employé de surplus dans l'équipe.

[49] Le PRT devait débuter en mars 2001 et devait durer de deux à quatre semaines. Le Dr Coppin, un conseiller médical, a écrit au Dr Appleton et lui a fait parvenir une copie du PRT. Le Dr Coppin a précisé que ce PRT prévoyait des tâches modifiées et se limitait au travail dans le parc local, ce qui éviterait à M. Smith de se trouver dans la cabine de commande d'une locomotive pendant des périodes prolongées. Il a demandé l'appui du Dr Appleton, qui a approuvé le plan.

[50] Le 6 mars 2001, le Dr Appleton a écrit dans ses notes cliniques que M. Smith, son représentant syndical et les représentants de la CN s'étaient rencontrés et s'étaient entendus sur un autre PRT qui ne comprenait pas de travail mécanique important. Le Dr Appleton a déterminé qu'il s'agissait d'une offre raisonnable et en a discuté longuement avec M. Smith.

[51] M. Smith a débuté le PRT le 1er mars 2001. Cependant, il a été incapable de le terminer. Le 28 mars 2001, Mme Dawson, M. Smith, son représentant syndical, Wayne Wiederspiel, et le surintendant de la CN à Terrace, Darren Payment, se sont rencontrés. Lors de cette rencontre, ils ont discuté du fait que M. Smith ne faisait pas vraiment de progrès. Il avait de la difficulté à conduire la locomotive et il était incapable de continuer au rythme qui était prévu par le PRT. Ils ont tous convenu que le PRT devrait être annulé.

[52] M. Smith a expliqué qu'il n'avait aucun problème avec les tâches qu'on lui avait attribuées dans le parc à matériel remorqué, mais la tâche de faire fonctionner la locomotive de gare de triage lui causait des difficultés. Il ressentait des douleurs et des spasmes musculaires lorsqu'il dû augmenter ses heures de travail dans la locomotive.

[53] Après la rencontre du 28 mars 2001, M. Wiederspiel a offert des suggestions à Mme Dawson qui pourraient aider M. Smith à retourner à l'emploi qu'il avait avant de se blesser. Ces suggestions comprenaient l'ajout d'un tapis en caoutchouc dans la locomotive pour diminuer les vibrations du moteur et le retrait du dossier du siège de conducteur pour que M. Smith puisse s'agenouiller sur le siège lorsqu'il conduisait. Il a aussi recommandé que M. Smith prenne des pauses pour se reposer. M. Wiederspiel a demandé à la CN de remettre en application le PRT de mars et d'y ajouter certaines de ses suggestions.

D. Troisième PRT - Avril 2001 - Mécanicien de locomotive

[54] La CN a accepté la demande de M. Wiederspiel. Mme Dawson a élaboré un autre PRT avec l'aide de M. Wiederspiel. Le PRT précédent a été modifié afin d'ajouter un tapis de caoutchouc, de garantir que M. Smith avait des bottes de protection confortables qui lui donnaient un soutien adéquat lorsqu'il travaillait, de permettre à M. Smith d'être assis, debout ou à genoux quand il en ressentait le besoin et de retirer le dossier du siège dans la cabine de commande de la locomotive.

[55] Mme Dawson a envoyé une copie de ce PRT à M. Smith le 26 avril 2001. Il a examiné le plan et a envoyé à Mme Dawson ses commentaires, qui comprenaient certaines modifications que Mme Dawson a ajoutées au plan.

[56] D'après Mme Dawson, M. Smith n'a jamais mentionné qu'il était incapable de terminer ce PRT. En fait, dans sa lettre à Mme Dawson, il a clairement laissé entendre qu'il était prêt à suivre ce PRT.

[57] Mme Dawson a aussi envoyé une copie au Dr Appleton le 26 avril 2001. Elle lui a expliqué les modifications et lui a demandé son appui. Le 22 mai, le Dr Appleton a répondu qu'il croyait que la cabine de la locomotive était peut-être trop petite pour permettre à M. Smith de varier sa posture. Il avait des doutes quant à savoir si l'état de M. Smith allait s'améliorer et il se demandait si M. Smith ne devrait pas se trouver un autre emploi. Le Dr Appleton a rejeté le plan et M. Smith ne l'a jamais commencé.

(i) Réunion du 12 juillet 2001 Tentative de régler la situation de M. Smith

[58] Le 14 juin 2001, le Dr Appleton a écrit à Ken Beddie, gestionnaire du bureau de la WCB à Terrace, lui demandant d'organiser une réunion pour essayer de régler la situation de M. Smith. Il avait demandé à Mme Araujo de le faire, mais elle avait refusé. Le Dr Appleton a écrit qu'il avait été indigné de cette réponse, et c'est pourquoi il écrivait à Ken Beddie. À titre de médecin, il était d'avis que M. Smith ne pouvait pas reprendre son poste de mécanicien puisqu'il devait rester debout ou assis pendant de trop longues périodes. Il croyait qu'une réunion était la seule façon de régler la situation.

[59] Une rencontre a eu lieu le 12 juillet 2001 à Terrace, qui réunissait M. Smith et le Dr Appleton, Karlene Dawson, Murray Swanson, le Dr Faraday et le Dr Vaney, tous de la CN, et Ken Beddie, Connie Araujo et Vivien Millin, une conseillère en réadaptation professionnelle.

[60] Ils ont discuté des tentatives infructueuses de réaffecter M. Smith au poste qu'il occupait avant de se blesser. Mme Dawson a expliqué que la CN et le syndicat cherchaient un autre poste pour M. Smith, mais qu'en raison de coupures dans la région, il n'y avait pas d'ouvertures. Cependant, si M. Smith était prêt à déménager, la CN serait en mesure de lui offrir un poste différent.

[61] Le 30 mars 2001, le Dr Appleton avait écrit au Dr Clarke, un neurologue, pour lui demander d'évaluer M. Smith. Il a demandé au Dr Clarke s'il était capable de trouver une cause physiologique ou psychologique aux symptômes de M. Smith.

[62] M. Smith a vu le Dr Clarke le 11 juillet 2001, mais il n'avait pas encore envoyé son rapport médical au Dr Appleton. Les gens présents à la réunion voulaient attendre les résultats du rapport et ils ont aussi convenu qu'il serait utile que M. Smith subisse une évaluation des capacités fonctionnelles.

[63] La CN devait payer pour cette évaluation, elle devait organiser la tenue de l'évaluation.

(ii) Évaluation du Dr Clarke

[64] Dans son rapport du 11 juillet 2001, le Dr Clarke a noté un certain nombre de conclusions médicales au sujet de M. Smith. Ces conclusions comprenaient les préoccupations dont M. Smith lui avait fait part, soit les spasmes qu'il ressentait au dos de façon intermittente depuis 1997. M. Smith a expliqué au Dr Clarke que ses spasmes apparaissaient lorsqu'il était assis pendant des périodes de 20 à 60 minutes, selon la chaise, ou s'il restait debout pendant des périodes de 30 à 60 minutes. Il a aussi dit au Dr Clarke que s'il ne s'assoyait pas ou qu'il ne restait pas debout pendant des périodes prolongées, il ressentait très peu de spasmes. Il se traitait lui-même en se couchant sur le dos, sur un coussin chauffant et disait que cela fonctionnait très bien. Il a aussi expliqué au Dr Clarke qu'il était très actif, il marchait de sa résidence jusqu'à la piscine, il faisait régulièrement environ 40 longueurs à la nage et il jardinait.

[65] L'évaluation du Dr Clarke a révélé que l'examen neurologique de M. Smith était normal et qu'il n'y avait pas beaucoup de points non organiques. S'il gérait attentivement ses activités et qu'il ne restait pas assis ou debout pour des périodes prolongées, il était plutôt confortable et était capable de fonctionner de façon plutôt normale.

[66] Le Dr Clarke a conclu que, compte tenu des antécédents de M. Smith depuis 1997 en ce qui a trait à ses spasmes et du fait que son travail exige qu'il soit assis ou debout pendant des périodes prolongées, il était peu probable qu'il soit capable de retourner au poste qu'il avait avant de se blesser. Il était donc un bon candidat pour une nouvelle formation.

[67] Dans ses notes cliniques du 14 février 2002, en réponse à l'évaluation du Dr Clarke, le Dr Appleton a noté que ni lui, ni le Dr Clarke n'étaient en mesure de découvrir la cause et la nature exactes des spasmes musculaires de M. Smith.

(iii) Offre d'emploi temporaire de la CN - 16 juillet 2001

[68] Tant le Dr Appleton que M. Smith étaient préoccupés par le fait que M. Smith n'avait pas gagné de revenu depuis un certain temps. Rob Reny, le cadre de direction des Ressources humaines pour l'Ouest du Canada, a discuté de nombreuses fois avec Dan Shewchuk, le vice-président du syndicat, au sujet des programmes de retour au travail de M. Smith et des prochaines mesures qui devaient être prises.

[69] Lors de la réunion du 12 juillet 2001, on a demandé à la CN si elle pouvait offrir à M. Smith un emploi de courte durée, en attendant l'évaluation du Dr Clarke, afin de soulager les problèmes financiers de M. Smith.

[70] La CN lui a offert un emploi de trois semaines dans le parc à Terrace et M. Swanson lui a indiqué qu'il devait se présenter au travail le 16 juillet 2001.

[71] M. Smith a envoyé un courriel à M. Swanson plus tard le même jour pour lui demander un résumé des tâches proposées. Il lui a demandé ce résumé parce qu'il voulait que le Dr Appleton approuve les tâches qu'on lui attribuerait. Comme le Dr Appleton était présent à la réunion lors de laquelle on a discuté de l'emploi de courte durée, il n'est pas très clair pourquoi M. Smith a fait cette demande.

[72] M. Swanson a envoyé un résumé par courriel à M. Smith le 16 juillet 2001. Les tâches comprenaient du travail sédentaire de bureau, l'inventaire des fournitures de bureau et de papeterie, la conduite d'un véhicule dans le parc d'une durée allant de vingt minutes à deux heures avec la possibilité de sortir du véhicule pour s'étirer pendant les arrêts et la marche pour aider à inspecter les trains dans le parc, marche qui ne dépasserait pas une distance d'un kilomètre.

[73] M. Smith ne s'est pas présenté au travail le 16 juillet. M. Swanson a téléphoné à M. Smith le 16 juillet et a laissé un message sur son répondeur dans lequel il précisait qu'il lui avait envoyé le résumé des tâches. Il a aussi laissé un message sur le répondeur le 10 août dans lequel il lui demandait de le rappeler pour lui expliquer pourquoi il ne s'était pas présenté au travail.

[74] Au départ, M. Smith a dit à la CN qu'il n'avait pas reçu le courriel de M. Swanson avant le 23 août et qu'il ne se souvenait pas d'avoir reçu des messages de M. Swanson sur son répondeur.

[75] À l'audience devant le Tribunal, M. Smith a témoigné qu'il n'avait pas été honnête envers la CN. Il avait bien reçu la liste de tâches par courriel le 16 juillet et il avait reçu au moins un des messages de M. Swanson. En fait, il était en vacances avec sa femme et il n'est revenu qu'à la fin août. M. Smith ne voulait pas que la CN sache qu'il était parti en vacances avec sa femme au lieu de se présenter au travail.

(iv) Évaluation des capacités fonctionnelles de M. Smith - Octobre/novembre 2002

[76] L'évaluation des capacités fonctionnelles de M. Smith a eu lieu le 3, le 8 et le 21 octobre 2002. Elle a été effectuée par Julie Veilleux, une ergothérapeute. Mme Veilleux a examiné la capacité fonctionnelle et les capacités physiques de M. Smith. Elle a visité le lieu de travail deux fois pour vérifier les tâches et les exigences physiques du poste de mécanicien de locomotive.

[77] La première visite des lieux a été au parc à Terrace et comprenait un voyage de Kitimat à Terrace dans une locomotive. La deuxième visite a eu lieu au parc Thornton de la CN à Vancouver. L'objectif était d'examiner d'autres types de locomotives de la CN.

[78] Dans son rapport d'évaluation professionnelle du 6 novembre 2002, Mme Veilleux a conclu que les capacités physiques de M. Smith correspondaient bien aux exigences physiques du poste de mécanicien. Cependant, elle a tiré la conclusion générale qu'elle n'était pas en mesure de déterminer, avec un degré raisonnable de confiance, si M. Smith était capable de travailler comme mécanicien à temps plein. Elle a noté que M. Smith avait été incapable de terminer avec succès trois PRT. Il n'y avait cependant aucune preuve objective permettant d'expliquer ce fait. Elle a proposé un autre PRT, qui serait surveillé de près par des professionnels en réadaptation médicale.

(v) Autres possibilités d'emploi à Terrace

[79] Pendant la période d'avril 2001 à mai 2003, des discussions avec la CN ont eu lieu au sujet d'autres possibilités d'emploi pour M. Smith à Terrace. On a demandé à Daryl Payment, surintendant de l'exploitation à Terrace, s'il était possible de donner à M. Smith un poste dans le service de navettes pour les équipes de train. Il a répondu que, comme il y avait un nombre limité de trains en fonction dans le nord de la Colombie-Britannique, il ne s'agissait pas d'une solution viable. M. Payment ne voyait pas quel autre poste il pouvait trouver pour M. Smith à Terrace.

[80] En février 2003, M. Smith a discuté avec Judy McKenzie, une agente du personnel à la CN, au sujet de possibilités d'emploi à Terrace. Il a suggéré qu'il pouvait conduire les équipes de train dans le complexe ferroviaire de Terrace, monter un site Web pour la CN ou faire du travail à l'ordinateur, ou mettre sur pied un programme au sujet de l'Opération Gareautrain pour les écoles locales.

[81] La CN était d'avis que le complexe ferroviaire de Terrace était petit et ne possédait pas suffisamment de bureaux ou de postes sédentaires qui répondaient aux restrictions de M. Smith. Compte tenu de la baisse de l'activité économique dans la région de Terrace, le niveau d'achalandage de la CN avait grandement diminué. Beaucoup des postes autres que la conduite des locomotives avaient été éliminés ou transférés à des complexes ferroviaires plus grands comme ceux de Prince George, d'Edmonton ou de Vancouver.

[82] En ce qui a trait au montage d'un site Web, les sites Web de la CN sont préparés par un fournisseur de services externe ou par le groupe de la Technologie de l'information (TI) du CN à Montréal.

[83] La CN avait un contrat avec un service de taxis pour transporter les équipes dans le terminal. Ce travail exigeait de l'employé qu'il reste assis pendant de longues périodes. De plus, ce type de poste ne pouvait pas devenir un emploi à temps plein.

[84] Les responsables de l'exploitation à Terrace et l'équipe de retour au travail de M. Smith, toutes des personnes qui possédaient de l'expérience et des connaissances au sujet de l'exploitation de la CN à Terrace, avaient examiné attentivement toutes les possibilités d'emploi à Terrace. Il n'y avait aucun poste qui pouvait convenir à M. Smith, sauf si un poste, qui autrement ne serait pas nécessaire, était créé pour lui.

[85] L'objectif de la CN était de trouver un emploi rémunéré et à temps plein pour M. Smith qu'il pourrait occuper à long terme, et non de créer des projets de travail. Les suggestions de M. Smith au sujet d'un emploi à Terrace ne pouvaient pas se traduire par un emploi constructif à long terme.

E. Appel de M. Smith à la commission de révision de la WCB - Décision - 14 mars 2003

[86] En janvier 2002, M. Smith a interjeté appel au tribunal de révision de la WCB au sujet d'un certain nombre de décisions que les agents de la WCB avaient prises quant à sa demande d'indemnisation. Parmi les questions que le tribunal de révision devait trancher, il devait déterminer si un emploi modifié à titre de mécanicien de locomotive pouvait convenir à M. Smith. Le tribunal de révision a conclu dans sa décision du 14 mars 2003 que l'emploi que M. Smith occupait avant de se blesser, même modifié, ne convenait pas compte tenu de son état de santé indemnisable.

[87] Le tribunal a conclu que l'emploi idéal pour M. Smith lui permettrait d'être assis, de se tenir debout et de marcher lorsqu'il en ressentait le besoin. Un conducteur de locomotive a très peu l'occasion de marcher et s'il se tient debout, il ne peut le faire que d'une façon très limitée.

[88] Le tribunal de révision a accordé à M. Smith des prestations de réhabilitation professionnelle et une compensation pour la perte de revenu. Il a donné à la WCB et à la CN le choix de trouver à M. Smith un autre poste au sein de la CN ou de le former pour un autre emploi.

F. PRT - juin et juillet 2003 - Coordonnateur de formation des trains à Prince George

[89] Le 15 avril 2003, peu de temps après que le tribunal de révision de la WCB ait rendu sa décision, Todd McDonald, un conseiller en réhabilitation professionnelle à Terrace, a écrit à Tom Brown, surintendant de l'exploitation de la CN à Prince George.

[90] Il a suggéré que la WCB et la CN visent la réhabilitation professionnelle pour M. Smith dans le cadre des restrictions de travail que le conseiller médical de la WCB a précisées.

[91] M. Brown à répondu à M. McDonald le 7 mai 2003. Il offrait de former M. Smith comme coordonnateur de formation des trains à Prince George (Colombie-Britannique). Cela comprenait de la formation technique à Vancouver et de la formation sur les lieux à Prince George. Il croyait que le poste offrirait à M. Smith une stabilité d'emploi optimale. Il a aussi noté que cet emploi était en majeure partie un emploi sédentaire qui respectait bien les restrictions de travail de M. Smith.

G. Quatrième PRT - Coordonnateur de formation des trains - Prince George, juin et juillet 2003

[92] Tanya Gordon, qui était alors coordonnatrice du retour au travail pour la CN, a préparé un autre plan transitionnel de retour au travail pour M. Smith, cette fois dans le poste de coordonnateur de formation des trains à Prince George. Mme Gordon est une spécialiste agréée en kinésiologie qui se spécialise en réhabilitation professionnelle et en gestion des limitations fonctionnelles.

[93] Le PRT présenté à la CN prévoyait des séances de formation, au parc Thornton à Vancouver pour la formation technique du 2 au 27 juin 2003, et à Prince George du 29 juin au 28 juillet pour la formation pratique sur les lieux de travail.

[94] Pour élaborer le PRT, Mme Gordon a tenu compte de certains facteurs, tels que les restrictions de travail de M. Smith déterminées par la WCB, les exigences physiques et les conditions de travail, l'analyse d'emploi pour le poste de coordonnateur de formation des trains et l'évaluation des capacités fonctionnelles de M. Smith effectuée en octobre 2002.

(i) Tâches du coordonnateur de formation des trains

[95] Les coordonnateurs de formation des trains à Prince George sont entièrement responsables du fonctionnement du parc de Prince George. Ils contrôlent la répartition des trains qui arrivent à la gare et la composition des trains qui quittent la gare. Ils dirigent les équipes pour ces opérations. Ils servent de personnes-ressources pour toutes les questions des clients et de personnes à contacter en cas d'urgence au sein de la gare de Prince George.

[96] Les coordonnateurs de formation des trains travaillent dans un bureau. Ils peuvent être assis ou rester debout à leur bureau. Compte tenu de la liberté de mouvements qu'offrent les téléphones cellulaires et les radios portatives, ils n'ont pas besoin de toujours rester à leur bureau. Ils peuvent sortir dans le parc et prendre des pauses, mais ils doivent toujours avoir leur radio ou leur téléphone avec eux.

[97] L'équipement utilisé par les coordonnateurs de formation des trains comprend un ordinateur branché au réseau de la CN, une radio portative, une radio à leur bureau, un téléphone, un téléphone cellulaire et plusieurs écrans au-dessus de leur bureau pour surveiller le fonctionnement du parc grâce à des caméras.

[98] Les tâches physiques d'un coordonnateur de formation des trains comprennent l'entrée de données à l'ordinateur, la lecture de données à l'écran d'ordinateur, la surveillance des écrans et l'utilisation de la radio ou du téléphone. Ces tâches peuvent être effectuées en position assise ou debout.

[99] L'objet le plus lourd qu'un coordonnateur de formation des trains a à lever est un téléphone. Il s'agit de l'emploi le plus sédentaire de tous les emplois des chemins de fer de la CN.

[100] Le poste de coordonnateur de formation des trains est un poste essentiel à la sécurité. Il sert de personne-contact pour toute urgence dans le parc ou pour tout problème qui pourrait survenir pour les équipes de ligne dans la région. Pour cette raison, il est essentiel que le coordonnateur puisse être rejoint à tout moment pendant son quart de travail.

(ii) Préoccupations de M. Smith au sujet du PRT pour le poste de coordonnateur de formation des trains

[101] Au départ, M. Smith était contre cette proposition. Il a expliqué à M. McDonald qu'il aimerait que la CN tente de lui donner un poste à Terrace avant qu'il pense à déménager à Prince George. L'une des raisons justifiant cette demande était que son épouse tenait beaucoup à son propre emploi et qu'elle ne voudrait pas déménager.

[102] Avant l'application du plan, Mme Gordon avait discuté avec M. Smith. Il avait certaines réserves au sujet de la date de début du plan, il trouvait que c'était trop rapide et il avait des engagements avec sa famille en juin, alors il devait se trouver à Terrace. Il avait aussi des préoccupations au sujet de la façon dont la formation se déroulerait et au sujet du fait qu'elle aurait lieu à Vancouver et non à Terrace.

[103] Mme Gordon a expliqué à M. Smith que le matériel et le personnel de formation se trouvaient seulement au parc Thornton. L'accès à ces ressources était essentiel.

[104] Elle a aussi expliqué à M. Smith qu'il serait payé au taux horaire d'un coordonnateur de formation des trains pendant sa formation et que la CN s'attendait à ce qu'il soit sur les lieux huit heures par jour. S'il n'était pas en formation, il devait être à la salle d'entraînement pour suivre son programme d'exercices.

[105] La CN paierait son logement, son transport à partir de Terrace et pour y retourner, ainsi qu'une indemnité journalière pour couvrir ses dépenses. En ce qui a trait aux engagements de M. Smith en juin, Mme Gordon a ajusté le calendrier pour qu'il puisse être à Terrace comme prévu.

H. Formation technique - Coordonnateur de formation des trains - Parc Thornton - Vancouver, juin 2003

[106] M. Smith a finalement accepté de suivre le PRT, mais il a continué à soutenir que la CN devrait lui trouver un poste à Terrace.

[107] Le syndicat, quant à lui, a accepté que M. Smith était capable de travailler comme coordonnateur de formation des trains. Le syndicat a cependant demandé à la CN, sans doute à la demande de M. Smith, que ce dernier obtienne un poste de coordonnateur de formation des trains à Terrace.

[108] La CN ne pouvait pas le faire. Il n'y avait aucun besoin opérationnel à Terrace pour un coordonnateur de formation des trains. Le coordonnateur de Prince George s'occupe de la gare de Terrace et le coordonnateur d'Edmonton contrôle les déplacements sur les rails des autres centres à l'extérieur de Prince George et de Vancouver.

[109] En plus du manque de besoin opérationnel, il n'était pas possible que la CN ait un seul coordonnateur de formation des trains à Terrace puisqu'il s'agit d'un poste essentiel à la sécurité, qui nécessite une présence tous les jours 24 heures sur 24.

[110] M. McDonald, s'exprimant pour la WCB, était en faveur de la formation de M. Smith pour le poste à Prince George et il a encouragé M. Smith à accepter le poste. Mme Gordon avait fourni une copie du PRT à M. McDonald, qui l'avait approuvé.

(i) Première étape du PRT - Parc Thornton à Vancouver

[111] Le PRT était divisé en deux étapes : la formation en classe au parc Thornton et la formation pratique à Prince George.

[112] Pendant la première semaine, M. Smith devait faire six heures de formation. Il avait beaucoup de temps pour se lever, prendre des pauses, marcher un peu et changer de positions lorsqu'il en ressentait le besoin. Il avait deux heures par jour pour utiliser le centre de conditionnement physique des employés, qui se trouve à distance de marche du bureau.

[113] M. Smith devait commencer sa journée à 8 h 30 et la terminer à 14 h 30, journée qui augmenterait à huit heures les mardis et jeudis de la deuxième semaine. Cela lui permettrait d'augmenter sa tolérance et son endurance pour les quarts de travail de huit heures.

[114] La WCB devait donner l'approbation finale au sujet du PRT et la décision finale quant au caractère approprié du poste. M. McDonald a demandé des rapports hebdomadaires à Mme Gordon au sujet de l'évolution du plan et des problèmes qui pouvaient se présenter et auxquels la WCB devrait répondre.

[115] M. Smith a commencé sa formation le 2 juin 2003. Le 6 juin 2003, Mme Gordon a rencontré M. Smith. Il lui a dit qu'il croyait qu'il ne recevait pas la bonne formation, puisqu'il ne s'agissait pas d'une formation en classe. Elle lui a expliqué que la WCB voulait accélérer son retour au travail, que la formation en classe ne se donnait qu'une fois par année et qu'il recevrait la formation complète pour devenir coordonnateur de formation des trains.

[116] M. Smith a obtenu les modules de formation pour le poste de coordonnateur de formation des trains et a eu un accès direct à un gestionnaire qui connaissait bien le matériel. Il a aussi obtenu l'accès au système informatique qu'il allait utiliser lorsqu'il commencerait son emploi comme coordonnateur.

[117] M. Smith a demandé qu'on lui donne une chaise appropriée pour ses problèmes de dos. La CN lui a offert plusieurs chaises qui se trouvaient déjà dans le bureau, y compris une chaise de réceptionniste, une chaise de dactylo, une chaise Obusforme à dossier haut, mais il a été incapable d'en trouver une qui lui convenait.

[118] M. Smith était d'avis que la CN n'avait pas fait des efforts suffisants pour essayer de lui trouver une chaise adéquate. Il a même offert d'accompagner un agent de la CN à un magasin spécialisé pour y trouver une chaise. Cependant, il ne le ferait que pendant les heures de travail, pas après la fin de son quart. Il a finalement demandé à la CN de transporter sa chaise personnelle de sa maison jusqu'à Vancouver, ce que la CN a fait.

[119] D'après la CN, les chaises qui lui avaient été offertes étaient toutes des chaises qui respectaient ou dépassaient les normes ergonomiques de l'époque. Elles avaient toutes un dossier ajustable, des sièges dont la hauteur était ajustable et des accoudoirs ajustables.

[120] La chaise personnelle de M. Smith était faite d'une seule pièce, le dossier, les accoudoirs et le siège n'étaient pas ajustables. La seule modification que M. Smith y avait apportée était l'ajout d'un coussin Obusforme pour son dos. Sa chaise ne respectait aucune des normes ergonomiques recommandées.

a) Journaux de M. Smith

[121] Une importante partie du PRT était le fait que M. Smith devait tenir un journal quotidien dans lequel il devait inscrire les tâches qu'il avait effectuées et tous les symptômes qu'il avait ressentis avant, pendant et après chaque tâche. Il devait aviser Mme Gordon (elle lui avait donné son numéro de téléphone et de téléavertisseur) s'il avait des difficultés avec les tâches pour qu'elle puisse modifier le plan.

[122] M. Smith a inscrit dans son journal que, dès la première journée, il a ressenti de la douleur et des spasmes dans le dos au cours de la journée. Il réagissait à ces douleurs en marchant, en prenant des médicaments, ou en se couchant dans la salle de réunion. Parfois, il retournait à son hôtel et se couchait sur un coussin chauffant qui diminuait ses spasmes.

[123] À mesure que sa formation a avancé, il a écrit que ses spasmes et ses douleurs au dos ont augmenté. À la troisième semaine, il a indiqué que sa jambe gauche lui faisait mal, qu'elle devenait engourdie et que sa démarche en était visiblement affectée. Parfois, il devait quitter la formation plus tôt que prévu et retourner à l'hôtel afin de pouvoir s'étendre sur son coussin chauffant.

[124] Bien qu'on lui ait demandé, M. Smith a fourni très peu de détails au sujet de ses tâches quotidiennes. En fait, il a surtout écrit à propos de son niveau de confort, des difficultés physiques auxquelles il faisait face et de ce qu'il faisait pour soulager la douleur et les spasmes qu'il ressentait.

[125] M. Smith croyait que l'objectif des journaux était d'aviser Mme Gordon et l'équipe du PRT des tâches qui aggravaient son état physique. À son avis, il n'était pas nécessaire de fournir plus de détails puisque Mme Gordon connaissait ses tâches. Elle pouvait examiner les résumés de son superviseur et les rapports hebdomadaires sur son progrès, dont ils discutaient lors des réunions hebdomadaires.

[126] Les réunions hebdomadaires entre Mme Gordon, M. Smith et son superviseur ou ses formateurs faisaient partie du PRT. Lors de la réunion du 13 juin 2003, ils ont discuté de certains points et M. Smith a soulevé un certain nombre de questions. Il était d'avis qu'il réussissait bien sa formation. Il commençait à comprendre le système informatique et il croyait que les moments où il suivait des coordonnateurs de formation des trains au parc Thornton étaient très utiles.

[127] Cependant, il se sentait poussé à faire des journées de huit heures. Mme Gordon a précisé que, pendant la deuxième semaine, il ne devait travailler pendant huit heures que le mardi et le jeudi, et que le reste de la semaine, il travaillerait pendant six heures, ce qu'il avait bien réussi pendant la première semaine.

[128] M. Smith a aussi mentionné ses préoccupations au sujet de la fréquence des spasmes qu'il ressentait au dos et des difficultés que cela lui causait. Mme Gordon lui a dit que, s'il souffrait de spasmes ou qu'il avait simplement une mauvaise journée, il pouvait lui téléphoner et ils discuteraient des choix qui s'offraient à lui, comme la possibilité d'aller s'entraîner au centre de conditionnement physique, de se reposer en allant aux toilettes ou de prendre une pause et de se rendre à son hôtel.

[129] Mme Gordon lui a aussi expliqué que les tâches de son poste respectaient ses restrictions. Il avait la possibilité de se lever, de marcher et de changer de position lorsqu'il en ressentait le besoin.

[130] M. Smith a aussi avisé Mme Gordon qu'il n'aimait pas le fait qu'il devait toujours manger dans un restaurant. Elle lui a fait remarquer que son hôtel offrait l'accès à une cuisine et à un réfrigérateur. M. Smith pouvait cuisiner ses propres repas, mais il a répondu qu'il n'aimait pas cuisiner pour une seule personne.

[131] Lors de la réunion, M. Smith a expliqué qu'il n'aimait pas habiter dans un hôtel. Il avait de la difficulté à dormir. Mme Gordon lui a répondu que la CN ne transporterait pas son lit de Terrace à Vancouver.

[132] Mme Gordon était d'avis que les préoccupations de M. Smith confirmaient la tendance qu'elle avait remarquée au cours de l'élaboration du PRT et au cours des deux premières semaines de formation : M. Smith cherchait, de façon régulière, à trouver des barrières qui n'étaient pas liées à la composition du plan.

[133] De plus, ses plaintes au sujet de ses spasmes dans le dos étaient particulièrement préoccupantes parce que les spasmes étaient plus fréquents et duraient plus longtemps. Le poste de coordonnateur de formation des trains est un poste essentiel à la sécurité et M. Smith devait être disponible à tout moment pendant son quart de travail. S'il quittait le bureau pour s'étendre ou retourner à son hôtel, il ne serait pas capable de répondre à une urgence.

(ii) Deuxième étape du PRT - Prince George - juillet 2003

[134] M. Smith a terminé la première étape du PRT le 20 juin 2003, soit sa dernière journée au parc Thornton. Lors de la réunion hebdomadaire du 20 juin 2003, à laquelle M. Smith et l'équipe du PRT ont assisté, Bruce Feltham, le gestionnaire chargé de la formation de M. Smith, a expliqué qu'il croyait que M. Smith avait acquis environ 75 p. 100 des compétences et des connaissances nécessaires pour le poste de coordonnateur de formation des trains. Il pouvait acquérir le reste lors de la formation pratique à Prince George.

[135] Dave Radford, le surintendant adjoint du Transport à Prince George, était entièrement responsable de la coordination du programme de formation de M. Smith à Prince George. Il devait organiser les quarts de formation de M. Smith et surveiller et gérer son évolution par rapport au programme. Il a réservé l'hébergement pour M. Smith à Prince George, a organisé son transport à partir de Terrace et pour y retourner, ainsi que son transport dans Prince George pour se rendre de l'hôtel au bureau du parc à matériel remorqué et de retour du bureau à l'hôtel.

[136] Le superviseur qui a été attribué à M. Smith devait garantir que ce dernier recevait la formation appropriée. Les quarts de travail de M. Smith étaient organisés afin qu'il puisse avoir une bonne vue d'ensemble de ce qui se passait dans la gare, y compris de l'importance du fait que le personnel à la gare puisse communiquer avec le coordonnateur de formation des trains en tout temps.

[137] La formation de M. Smith à Prince George a débuté le 2 juillet 2003. Avant le début de cette étape, vers la fin juin, M. Radford a rencontré M. McDonald pour lui faire visiter la gare. La visite comprenait le bureau du parc, soit le lieu de travail du coordonnateur de formation des trains où M. Smith travaillerait. M. Radford a expliqué de quelle façon le bureau serait rénové afin de répondre aux besoins de M. Smith. Il a aussi précisé la nature des activités dans le parc et les exigences du poste.

[138] Les rénovations du bureau comprenaient l'ajout d'un poste de travail ajustable qui permettrait à M. Smith de travailler tant en position assise qu'en position debout. On allait lui fournir une chaise ergonomique et le bureau allait être élargi pour qu'il y ait suffisamment d'espace pour ces meubles.

[139] M. Radford était prêt à faire les dépenses nécessaires, mais compte tenu de l'étendue des travaux nécessaires, il préférait attendre que M. Smith occupe le poste de façon permanente. Entre-temps, la CN a fait envoyer la chaise personnelle de M. Smith de Vancouver à Prince George.

[140] Mme Gordon a aussi expliqué à M. Smith que lorsqu'il aurait terminé avec succès le PRT et qu'il serait confirmé qu'il occuperait le poste de façon permanente, le matériel de bureau nécessaire serait acheté et le bureau serait rénové.

[141] M. Smith devait travailler tant la semaine que la fin de semaine. Son horaire était différent d'une semaine à l'autre pour lui permettre d'apprendre à connaître les différents quarts de travail et leurs aspects distincts.

a) Journaux de M. Smith

[142] Comme pour la première étape, M. Smith devait écrire dans un journal tous les jours. Il devrait y inscrire les tâches qu'il avait accomplies, s'il avait eu des difficultés et s'il avait ressenti des symptômes. Encore une fois, M. Smith a surtout mentionné le niveau de douleur et les symptômes qu'il ressentait. Il a rarement décrit ses tâches et n'a pas fait de lien entre ses symptômes et les tâches.

[143] De temps en temps, il utilisait les journaux pour exprimer son désaccord avec Mme Gordon, par exemple en ce qui a trait à ses restrictions de travail et à son état indemnisable. Dans l'inscription qu'il a faite le 2 juillet, il a demandé à Mme Gordon de lui fournir une description d'emploi et des fonctions d'un coordonnateur de formation des trains, ainsi que le niveau de classification et la cotation numérique.

[144] Brad Butterwick, le superviseur de M. Smith, suivait les progrès de M. Smith à Prince George. Il a avisé Tanya Gordon que du 2 au 5 juillet, M. Smith était arrivé au travail à l'heure prévue. M. Butterwick a ajouté qu'il n'avait pas remarqué de problèmes quant à des douleurs et à des spasmes dans le dos, à part le fait que M. Smith s'appuyait sur son bureau.

[145] La situation est restée la même, sauf le 10 juillet. M. Butterwick a déclaré qu'il avait remarqué que M. Smith tremblait, qu'il suait et qu'il était très pâle. Il a été transporté en taxi à l'urgence de l'hôpital local, où il a été examiné et a reçu son congé.

[146] D'après les journaux de M. Smith, dans la semaine du 2 juillet, il a quitté le bureau plus tôt dans l'un de ses cinq quarts de travail. Dans la semaine du 10 juillet, il a quitté plus tôt trois fois sur cinq, dans la semaine du 17 au 21 juillet, il a quitté plus tôt trois fois sur cinq, et dans la semaine du 25 juillet, il a quitté plus tôt dans l'un de ses quatre quarts de travail. Il a mentionné dans ses journaux que ces jours-là, il avait ressenti des spasmes douloureux.

[147] À un certain moment pendant cette période, Terry Petry, agent de la gestion des risques à la CN et membre de l'équipe du PRT, a demandé à M. Smith de donner plus de détails au sujet de ses tâches dans ses journaux. M. Smith a répondu qu'il avait des tâches de coordonnateur de formation des trains. S'il devait inscrire, à la minute près, chaque fois qu'il était assis, qu'il se déplaçait ou qu'il allait aux toilettes, etc., il s'éloignerait de la raison principale pour laquelle il se trouvait à Prince George.

[148] M. Petry a aussi demandé à M. Smith s'il était résolu à déménager à Prince George. M. Smith a répondu qu'il était prêt à changer de domicile et à déménager sa famille à Prince George, mais qu'il le faisait par contrainte. Il disait être contraint de le faire parce qu'il croyait que la CN n'avait pas fait tous les efforts nécessaires pour lui trouver un poste à Terrace, ou n'avait pas sérieusement examiné sa demande en ce sens.

[149] Le 22 juillet 2003, le Dr Appleton a écrit à M. McDonald. M. Petry avait demandé à M. Smith une lettre de son médecin qui expliquait ses spasmes. Dans la lettre, le Dr Appleton a écrit que M. Smith lui avait dit qu'il ressentait des spasmes dans le dos régulièrement. Pour soulager les spasmes, il prenait des médicaments, s'allongeait, s'étirait et relaxait.

[150] Il a aussi écrit que M. Smith lui avait dit que le poste de coordonnateur de formation des trains exigeait qu'il soit assis jusqu'à 95 p. 100 du temps et qu'il n'avait pas souvent la possibilité de bouger, de marcher ou de s'étirer. Il est vrai que, sur papier, l'analyse des exigences physiques et des conditions de travail pour le poste de coordonnateur de formation des trains indiquait que l'employé restait assis 95 p. 100 du temps et était debout 5 p. 100 du temps.

[151] Cependant, ce n'était pas le cas pour M. Smith. Il pouvait s'asseoir, se tenir debout ou marcher selon ses besoins. En fait, dans deux ou trois entrées dans ses journaux, il a écrit qu'il avait pu bouger, changer de position et se promener à l'extérieur.

[152] M. McDonald a répondu au Dr Appleton le 10 septembre 2003. Il a avisé le Dr Appleton qu'il avait été mal informé au sujet de l'exigence de rester assis 95 p. 100 du temps. Le poste de coordonnateur de formation des trains était tout à fait convenable pour M. Smith. Il n'avait pas à rester assis de façon prolongée. En fait, compte tenu de son expérience comme conseiller en réhabilitation professionnelle, M. McDonald n'avait jamais vu un emploi qui offrait autant de souplesse au niveau des changements de positions, que ce soit dans le bureau ou à l'extérieur.

[153] Mme Gordon commençait à s'inquiéter de l'augmentation de la fréquence des spasmes, que M. Smith avait inscrite dans ses journaux, et de son besoin de s'étendre parfois pendant une heure ou plus. Elle était aussi préoccupée par le nombre de fois où M. Smith quittait le bureau à l'avance.

[154] Elle a dit à M. Smith que ses journaux ne comprenaient pas les renseignements requis. Plutôt que de décrire les tâches qu'il faisait, il discutait plutôt de ses niveaux de douleur, de son inconfort et de ce qu'il faisait pour régler cet inconfort. Elle lui a rappelé que les journaux servaient à suivre ses activités quotidiennes et à déterminer quelles activités lui causaient des problèmes.

[155] Finalement, le 29 juillet 2003, Dave Radford a écrit à M. Smith pour l'aviser que, bien que la CN croyait qu'il était capable d'effectuer le travail d'un coordonnateur de formation des trains sans formation supplémentaire, il n'avait pas démontré d'engagement envers son emploi. Il avait refusé de suivre les directives au sujet de ses inscriptions dans son journal. Il avait tendance à quitter son lieu de travail ou à ne pas s'occuper de son travail pour plutôt consacrer son temps à des questions qui n'étaient pas liées au travail, de façon de plus en plus fréquente et longue à mesure que le plan avançait. En raison de ces problèmes, en plus des observations objectives de ses superviseurs à Prince George, la CN a annulé le PRT. M. Smith est retourné à Terrace.

[156] Le 5 août 2003, Mme Gordon a écrit une longue lettre à M. McDonald dans laquelle elle précisait les raisons pour lesquelles la CN avait annulé le PRT. Elle a mentionné le fait que M. Smith avait démontré qu'il possédait les aptitudes physiques et mentales nécessaires pour le poste de coordonnateur de formation des trains. Cependant, à son avis, il avait constamment posé des obstacles à son retour au travail qui ne faisaient pas partie des lignes directrices que la WCB avait envoyées à la CN au sujet de ses capacités physiques et de son état indemnisable.

[157] Elle a mentionné la fréquence des spasmes de M. Smith et l'exigence qu'il avait imposée selon laquelle il devait s'allonger pendant qu'il travaillait. Mme Gordon a noté que le poste de coordonnateur de formation des trains permettait une grande souplesse pour qu'il puisse prendre des pauses, s'étirer, faire de courtes promenades et s'allonger pendant de courtes périodes. Lorsqu'il travaillait à son bureau, M. Smith pouvait travailler debout ou assis. Il pouvait aussi marcher à l'extérieur lorsqu'il n'avait pas de tâches de bureau, s'il apportait une radio portative ou un téléphone cellulaire.

[158] Mme Gordon a aussi mentionné le fait que, de temps à autres, M. Smith était incapable de terminer son quart de travail. La fréquence de ses départs hâtifs et le temps qu'il passait allongé sur le sol avaient un effet négatif sur sa formation sur les lieux du travail. Le poste de coordonnateur de formation des trains est un poste essentiel à la sécurité qui exige qu'il soit capable de répondre à une situation d'urgence. Le fait que M. Smith avait besoin de quitter le bureau ou de s'allonger sur le sol pendant de longues périodes l'empêchait de répondre à des urgences.

[159] En ce qui a trait au niveau d'engagement de M. Smith envers son PRT à Prince George, ses superviseurs ont remarqué qu'il avait peu d'intérêt et d'engagement envers le plan. Cela se reflétait aussi dans son défaut ou son refus d'inscrire plus de détails dans son journal.

[160] Mme Gordon a conclu que si ces problèmes pouvaient être résolus, la CN était prête à poursuivre le PRT, qui serait suivi d'un poste permanent à titre de coordonnateur de formation des trains.

[161] Dans une lettre qu'il a écrite le 17 septembre 2003 à M. McDonald, M. Smith a longuement répondu aux points que Mme Gordon avait soulevés. Il a précisé qu'il n'avait pas choisi son état de santé. Il ressentait des spasmes musculaires et des douleurs et il ne pouvait régler la situation qu'en prenant des médicaments, en appliquant de la chaleur sur son dos et en s'allongeant.

[162] En ce qui a trait aux journaux, M. Smith a répondu qu'il avait bien mentionné les tâches qu'il avait effectuées, les problèmes qu'il avait au sujet du poste de travail et la conduite dans le parc, et les niveaux de douleurs qu'il avait ressenties. Il a expliqué qu'on ne lui avait jamais donné de rétroaction ou de réponse au sujet des problèmes qu'il avait mentionnés.

[163] Plus tôt, le 18 août 2003, M. Smith avait écrit à M. McDonald pour lui affirmer son engagement à déménager. Il a mentionné qu'il avait participé au programme de formation de six semaines à Vancouver et à Prince George. Il avait fait peinturer l'extérieur de sa maison à Terrace et sa femme et lui avaient fait le tour de Prince George pour regarder des maisons. Bien qu'ils ne voulaient pas déménager, M. Smith était d'avis que ces actions démontraient sa détermination et son engagement à retourner au travail.

I. Grief du syndicat déposé pour M. Smith, juin 2002

[164] Il convient de noter que pendant que M. Smith disait à la CN qu'il était prêt à déménager à Prince George, sous la contrainte, il a aussi demandé à son syndicat de déposer un grief en son nom dès le 11 juin 2001. Le syndicat l'a fait le 26 juin 2002. Dans son énoncé des questions en litige, présenté le 9 juillet 2003, le syndicat soutenait que des mesures d'accommodement devaient être prises pour M. Smith dans la gare de Terrace, où il habitait. Le défaut de la CN de le faire constituait une violation de la convention collective et de l'obligation de la CN, en vertu de la Loi canadienne sur les droits de la personne (LCDP), de prendre des mesures d'accommodement pour M. Smith.

[165] Le grief a été rejeté. L'arbitre devait trancher la question de savoir si la CN s'était acquittée de son obligation, prévue par la LCDP, de prendre des mesures raisonnables d'accommodement envers l'invalidité de M. Smith.

[166] Dans son jugement rendu le 14 juillet 2003, l'arbitre Piché a accepté le point de vue de la CN selon lequel il n'y avait pas de travail qui convenait à M. Smith à Terrace. L'obligation de prendre des mesures d'accommodement, si cela n'impose pas une contrainte excessive, n'oblige pas la CN à créer un poste qui n'a aucune valeur pour la compagnie.

[167] L'arbitre Piché a conclu que la CN avait pris des mesures raisonnables d'accommodement lorsqu'elle a tenté de réintégrer M. Smith dans le poste qu'il occupait avant de se blesser, puis lorsqu'elle a offert à M. Smith le poste de coordonnateur de formation des trains.

[168] En ce qui a trait aux difficultés causées par le déménagement de M. Smith et de sa famille à Prince George, l'arbitre a conclu que l'obligation de prendre des mesures d'accommodement ne tenait pas la CN responsable de tous les aspects économiques et familiaux de la vie de M. Smith. L'obligation de la CN se limite à l'accommodement en matière d'emploi et de lieux de travail.

[169] Le 1er octobre 2003, M. McDonald a écrit à M. Smith pour l'aviser que la WCB ne lui verserait plus de prestations de réhabilitation professionnelle. Cette décision était fondée sur le fait que le poste de coordonnateur de formation des trains convenait à son retour au travail, compte tenu de son état de santé et de ses restrictions de travail. À son avis, le PRT n'avait pas connu de succès en raison des obstacles que M. Smith avait placés. Par conséquent, la WCB ne participerait plus à un programme de retour au travail pour M. Smith et M. Smith n'aurait pas le droit de réclamer des pertes de revenus prévues.

[170] M. Smith a demandé à la section de révision de la WCB de réviser la décision de M. McDonald du 1er octobre 2003. L'agent de révision a confirmé la décision le 12 juillet 2004.

[171] Le 9 août 2004, un agent de prestations d'invalidité de la WCB a écrit à M. Smith pour l'aviser que le poste de coordonnateur de formation des trains était un poste approprié qui respectait ses restrictions de travail.

[172] M. Smith a demandé une révision de cette décision. Dans sa décision du 31 mars 2005, l'agent de révision a conclu que le poste de coordonnateur de formation des trains constituait un accommodement approprié pour M. Smith. La rémunération était comparable à celle qu'il avait avant de se blesser. Il était raisonnable que M. Smith ait à déménager pour occuper ce poste. M. Smith a porté cette décision en appel auprès du Worker's Compensation Appeal Tribunal.

J. Cinquième PRT - Coordonnateur adjoint de formation des trains - Janvier 2004

[173] La saga des mesures d'accommodement ne s'est cependant pas terminée le 29 juillet 2003. Peu de temps après la décision de l'arbitre, Rob Reny de la CN et Dave Brummund du syndicat ont discuté et ont communiqué par écrit. M. Brummund a demandé à M. Reny si la CN pouvait rétablir le PRT pour le poste de coordonnateur de formation des trains à Prince George. Le syndicat était d'avis que M. Smith était capable d'occuper ce poste.

[174] Le CN a accepté de le faire, mais elle a affecté M. Smith au poste de coordonnateur adjoint de formation des trains. On a demandé à Mme Gordon de préparer un PRT modifié. Il devait débuter le 12 janvier 2004 et devait se terminer le 30 janvier 2004. Le poste était conçu expressément pour M. Smith, en fonction de ses restrictions de travail. La CN paierait son salaire, ses frais de transport de Terrace à Prince George, et de retour à Terrace, son hébergement, son transport au travail et de retour à l'hôtel et une indemnité quotidienne pour ses dépenses.

[175] La CN a aussi accepté que, lorsque M. Smith aurait terminé avec succès sa formation, elle lui donnerait un poste de travail et une chaise ergonomique, elle installerait du plancher plus souple dans le bureau et elle rénoverait le bureau de la gare pour que cet équipement puisse être installé.

[176] Comme pour le plan précédent, M. Smith devait tenir des journaux dans lesquels il devait inscrire les tâches qu'il accomplissait, ses niveaux de confort et les difficultés auxquelles il faisait face, le cas échéant.

(i) Tâches de M. Smith et responsabilités du coordonnateur adjoint de formation des trains

[177] M. Smith devait aider le coordonnateur de formation des trains en fonction. Il n'avait pas la responsabilité principale du poste. M. Smith avait accès à la salle des premiers soins et il pouvait quitter le bureau du coordonnateur de formation des trains lorsqu'il avait besoin de s'allonger et de s'occuper de ses maux de dos.

[178] Le poste de coordonnateur adjoint de formation des trains n'est pas un poste essentiel à la sécurité. Cela offrait à M. Smith plus de possibilités de se lever, de s'allonger et de marcher que le poste de coordonnateur.

[179] À la demande de M. Smith, la CN a fait venir sa chaise personnelle de Terrace à Prince George.

[180] M. Smith n'a pas terminé ce PRT. Selon son journal, il a travaillé du 12 janvier au 27 janvier 2004. Il a écrit qu'il avait beaucoup de difficultés avec cette tentative de retour au travail. Ses inscriptions dans son journal sont détaillées, mais portent sur les problèmes médicaux qu'il avait et ne mentionnent pas les tâches qu'il effectuait.

[181] Bien que Mme Gordon et d'autres membres de l'équipe de transition aient plusieurs fois rappelé à M. Smith l'importance des renseignements dans les journaux, M. Smith a reconnu qu'il y avait écrit peu de choses au sujet des tâches qu'il accomplissait.

[182] M. Smith a confirmé que, comme coordonnateur adjoint de formation des trains, il pouvait se lever, bouger ou quitter le bureau pour aller s'allonger parce que le coordonnateur de formation des trains pouvait couvrir son poste pendant ce temps. Il a aussi reconnu que le poste de coordonnateur adjoint était moins exigeant que le poste de coordonnateur.

[183] M. Smith a confirmé que, pendant qu'il travaillait comme coordonnateur adjoint de formation des trains, on ne lui avait pas demandé de faire quoi que ce soit qui dépassait ses restrictions de travail.

(ii) Annulation du PRT au poste de coordonnateur adjoint de formation des trains

[184] M. Radford a remarqué qu'au début, M. Smith réussissait très bien. Cependant, plus le temps avançait, plus les heures que M. Smith passait à travailler pendant son quart diminuaient. M. Radford craignait que cela interrompe le cycle de formation. M. Smith devait être formé selon un échéancier précis et il prenait du retard sur le calendrier.

[185] Le 29 janvier 2004, M. Smith a laissé un message sur la boîte vocale du bureau de M. Radford pour lui demander s'ils pouvaient se rencontrer le plus tôt possible dans un restaurant à Prince George. M. Radford s'y est rendu en voiture et a vu M. Smith, qui semblait souffrir de douleurs. Ce dernier a demandé à M. Radford de l'accompagner jusqu'à son hôtel.

[186] M. Smith a expliqué à M. Radford qu'il ressentait des douleurs importantes. À ce moment, M. Radford a conclu qu'il fallait mettre fin au PRT. La meilleure façon d'aider M. Smith était de lui permettre de retourner à Terrace où il pourrait être avec sa femme et son médecin, et où il pourrait régler ses problèmes médicaux.

K. Autre possibilité d'occuper le poste de coordonnateur adjoint de formation des trains

[187] Le 13 février 2004, après l'annulation du PRT, M. Brummund a écrit à M. Reny pour lui demander de donner une autre chance à M. Smith d'occuper le poste de coordonnateur adjoint de formation des trains. Il a demandé à la CN de fournir à M. Smith une chaise ergonomique et un poste de travail ajustable, et de faire vérifier le milieu de travail par un ergothérapeute, qui pourrait suggérer des modifications.

[188] Le 29 juin 2004, M. Reny a répondu à M. Brummund que la CN donnerait une dernière chance à M. Smith de reprendre le travail comme coordonnateur adjoint de formation des trains à Prince George. Cependant, M. Smith devait s'engager envers la CN, par écrit, à compléter le plan et à fournir des journaux dans lesquels les entrées quotidiennes étaient détaillées.

[189] M. Reny était préoccupé par le fait que le retour au travail de M. Smith avait connu si peu de succès. Dans ses communications avec M. Brummund, il voulait qu'il soit très clair que la CN s'attendait à ce que M. Smith participe activement et qu'il coopère avec toute future tentative de retour au travail. La CN n'était toujours pas certaine si M. Smith était prêt à déménager.

[190] La CN allait entreprendre les rénovations nécessaires et l'achat d'équipement dès que le PRT aurait été terminé avec succès. La CN offrirait aussi la même souplesse qui avait été offerte dans les programmes de retour au travail précédents, ce qui permettrait à M. Smith de changer de position selon ses besoins. De plus, il pourrait s'allonger dans la salle de premiers soins si c'était nécessaire.

[191] M. Brummund a répondu à M. Reny le 13 août 2004. Le syndicat demandait une définition précise du mot [traduction] engagement et une explication sur la façon dont la CN s'attendait à ce que M. Smith [traduction] complète le plan.

[192] Quant aux journaux, le syndicat était d'avis que M. Smith avait rempli les journaux comme on lui avait demandé, mais que la CN n'avait fait aucun ajustement par rapport à ses problèmes médicaux.

[193] M. Reny a réécrit à M. Brummund le 20 août 2004. Il a confirmé que la CN apporterait les modifications requises dès que M. Smith avait terminé avec succès le programme de retour au travail. Il a noté les conclusions de la WCB et des Services de santé au travail de la CN selon lesquelles ces modifications n'étaient pas essentielles à la réussite de la formation de M. Smith. La CN demandait seulement que M. Smith suive un programme de base de trois semaines afin qu'elle puisse déterminer s'il était capable de travailler dans cet environnement.

[194] De façon plus importante, la CN offrait à M. Smith le poste permanent de coordonnateur adjoint de formation des trains à Prince George, qui entrerait en vigueur immédiatement. Cependant, M. Smith devait coopérer en ce qui a trait aux inscriptions dans les journaux de ses tâches quotidiennes à titre de coordonnateur adjoint, afin que les modifications nécessaires puissent être apportées à son emploi ou à son lieu de travail. La CN offrait aussi de rembourser les frais de déménagement de M. Smith à Prince George. M. Reny a demandé l'accord du syndicat et de M. Smith.

[195] Le 1er septembre 2004, M. Smith a écrit à M. Brummund en réponse à la lettre de M. Reny. Il a soutenu qu'il n'y avait rien de nouveau dans la proposition. À son avis, la CN n'offrait aucune nouvelle solution, modification ou voie de recours.

[196] Le 12 octobre 2004, M. Reny a envoyé un courriel à M. Brummund dans lequel il précisait que l'objectif de la CN avait été, et était toujours, d'offrir à M. Smith un emploi permanent à long terme. Rien n'avait changé dans l'exploitation à Terrace qui permettrait à M. Smith d'y obtenir un tel emploi. Il a demandé au syndicat de répondre à la proposition du CN du 20 août 2004.

[197] M. Reny a envoyé un courriel à M. Brummund le 11 janvier 2005, dans lequel il demandait une réponse du syndicat. Dans son courriel du 18 janvier 2005 envoyé à M. Brummund, M. Reny a mentionné que la CN avait modifié son offre en réponse aux demandes précises du syndicat. Il a de nouveau demandé l'opinion du syndicat.

[198] M. Reny a répété sa demande dans les courriels qu'il a envoyés à M. Shewchuck le 14 juin 2005, le 15 août 2005 et le 7 septembre 2005.

[199] Malgré les nombreuses tentatives de M. Reny d'obtenir l'opinion du syndicat au sujet de l'offre du 20 août 2004, le syndicat n'a jamais officiellement répondu.

L. Demande de pension d'invalidité du Régime de pensions du Canada présentée par M. Smith

[200] Le 17 février 2002, M. Smith a présenté une demande de prestations d'invalidité du Régime de pensions du Canada (RPC). Selon les critères d'admissibilité, le demandeur doit souffrir d'une invalidité qui l'empêche de travailler de façon régulière, à temps plein, à temps partiel ou de façon saisonnière. L'invalidité doit être à long terme et d'une durée inconnue.

[201] La demande de prestations d'invalidité de M. Smith a été rejetée. L'expert en invalidité a rendu sa décision le 12 avril 2002, dans laquelle il concluait que, dans le dossier qu'on lui avait remis, les rapports médicaux indiquaient que, bien que M. Smith ne pouvait pas occuper un emploi qui exigeait qu'il reste assis ou debout de façon prolongée, il était tout de même capable d'effectuer certains types de tâches.

[202] M. Smith a demandé un réexamen de cette décision. Sa demande de réexamen a été rejetée le 29 août 2002, parce qu'il ne satisfaisait pas au critère d'invalidité.

[203] M. Smith a alors porté la décision en appel devant le tribunal de révision du RPC, qui a entendu l'appel le 10 mars 2004. À l'audience, M. Smith a soutenu qu'il était absolument incapable de travailler depuis février 2002. Sa femme et lui ont présenté des observations verbales au tribunal à ce sujet.

[204] M. Smith a aussi présenté une lettre du Dr Appleton, datée du 3 mars 2004. Dans sa lettre, le Dr Appleton a résumé l'état de santé et les restrictions de travail de M. Smith et a ensuite déclaré qu'il était d'avis que M. Smith était entièrement invalide et ne pouvait pas conserver d'emploi valable.

[205] M. Smith a incité le Dr Appleton à écrire cette lettre. Dans ses notes cliniques du 3 mars 2004, le Dr Appleton a noté qu'il avait rencontré M. Smith et que ce dernier lui avait dit qu'il portait en appel une décision défavorable au sujet des prestations d'invalidité du RPC. L'audience aurait lieu le 10 mars et M. Smith avait besoin d'une lettre d'appui.

[206] Cette lettre du Dr Appleton contredisait l'opinion qu'il avait exprimée dans sa lettre du 28 mars 2002, dans laquelle le Dr Appleton s'adressait à qui de droit. Il y avait décrit l'état de santé de M. Smith, son opération au dos et ses restrictions de travail. Le Dr Appleton avait poursuivi en précisant que, malgré ces restrictions, M. Smith aurait été capable de retourner au travail le 10 juin 2001. Le Dr Appleton avait écrit cette lettre en lien avec la demande d'assurance-emploi de M. Smith.

[207] Le tribunal de révision a rendu sa décision le 28 avril 2004. Il a conclu que les invalidités de M. Smith l'empêchaient d'avoir un travail régulier et rémunérateur depuis février 2002, date à laquelle il avait présenté sa première demande de prestations d'invalidité du RPC. Le tribunal a accordé à M. Smith une pension d'invalidité rétroactive à juin 2002.

[208] Dans sa demande de prestations d'invalidité du RPC, M. Smith a accepté d'aviser le RPC de tout changement à son état de santé ou de tout retour au travail (à temps plein, à temps partiel, en bénévolat, en période d'essai ou en réadaptation). Il ne l'a pas fait.

[209] M. Smith n'a pas avisé le RPC de ses deux PRT de juin 2003 et de janvier 2004, pendant lesquels il a reçu son plein salaire. Il n'a pas avisé le RPC de l'évaluation de ses capacités fonctionnelles qu'il a subie en novembre 2002, dans laquelle il était précisé que ses capacités physiques et fonctionnelles lui permettaient de travailler.

[210] M. Smith n'a pas avisé la CN, son syndicat, ni la WCB qu'il avait présenté une demande de prestations d'invalidité du RPC en février 2002. Il ne leur a pas parlé de la lettre du Dr Appleton, écrite le 4 mars 2004, dans laquelle le docteur précisait que M. Smith était invalide et ne pouvait plus occuper d'emploi valable.

[211] M. Smith n'a pas mentionné, dans sa demande au RPC, devant le tribunal de révision du RPC, ni par la suite, qu'il était l'un des membres fondateurs de la Northwest Injured Workers Association (NIWA), qui a été constituée en société le 2 février 2002. L'un des principaux objectifs de cette organisation était de fournir des conseils et du soutien aux travailleurs accidentés qui participent au processus de la WCB.

[212] M. Smith est un bénévole très actif au sein de la NIWA. Il a joué un rôle important dans la constitution de la NIWA en société. Il a organisé un certain nombre de rassemblements et de réunions à Terrace et à d'autres endroits de la région, au cours desquels il a aussi agi à titre de conférencier. Il a beaucoup participé aux activités de financement pour la NIWA afin de couvrir les coûts des activités et de payer les salaires des postes rémunérés. M. Smith espérait que, si ses efforts en matière de campagnes de financement étaient couronnés de succès, on lui offrirait un des postes rémunérés.

[213] M. Smith a postulé à l'automne 2002 ou 2003 pour le poste de conseiller des travailleurs auprès du ministre du Travail. S'il obtenait le poste, il devait aider les demandeurs de prestations de la WCB en les guidant à travers le processus de la WCB.

M. M. Smith peut-il travailler, ou est-il invalide de façon permanente? Faits dont il faut tenir compte

(i) Lettre du 21 septembre 2004

[214] En septembre 2004, le Dr Appleton a écrit une lettre à qui de droit. Dans sa lettre, le Dr Appleton donnait son opinion quant à l'offre la plus récente de la CN, telle qu'elle était décrite dans la lettre que M. Reny avait écrite le 20 août 2004. Le Dr Appleton était d'avis que la situation de travail n'était pas différente de la formation précédente que M. Smith avait essayée, soit celle de coordonnateur adjoint de formation des trains.

[215] M. Smith a convenu que l'avis du Dr Appleton au sujet du poste de coordonnateur adjoint de formation des trains à Prince George était fondé sur ce que lui-même lui avait dit. Il a expliqué qu'il avait demandé cette lettre au Dr Appleton et qu'il voulait l'avis du docteur quant à savoir s'il était capable d'effectuer les tâches d'un coordonnateur adjoint de formation des trains. Les motifs de M. Smith à ce sujet ne sont pas clairs. Il avait déjà eu l'avis du Dr Appleton le 3 mars 2004, qu'il avait présenté au tribunal de révision du RPC, lequel avis disait que M. Smith était incapable de travailler.

(ii) Demande de contrôle judiciaire de la décision de l'arbitre

[216] Le syndicat a déposé une demande de contrôle judiciaire de la décision de l'arbitre, demande qui a ensuite été abandonnée. L'avocat du syndicat, Clayton Cook, en avait discuté avec M. Smith et lui avait expliqué que les chances de succès étaient faibles.

[217] Dans un long message qu'il a envoyé par télécopieur à M. Cook le 20 juin 2004, M. Smith contestait cette conclusion. Après avoir décrit en détail les faits de sa situation, M. Smith a répété son opinion que le syndicat avait défendue lors de l'arbitrage : la CN avait l'obligation de lui trouver un poste à la gare où il travaillait avant de chercher à lui trouver un poste ailleurs. Il n'acceptait pas la décision de l'arbitre selon laquelle la CN avait fait des efforts raisonnables en vue de respecter cette obligation.

[218] M. Smith voulait que le contrôle judiciaire se poursuive. Il était soutenu qu'il était capable de travailler à cette époque, certainement à Terrace. Cependant, dans ses discussions avec M. Cook et dans les télécopies qu'il lui a envoyées, M. Smith ne lui a jamais dit qu'il recevait des prestations d'invalidité du RPC.

(iii) La décision du WCAT - Février 2006

[219] Comme il l'a été mentionné plus tôt, M. Smith a porté un certain nombre de décisions de la WCB en appel au Workers' Compensation Appeals Tribunal (WCAT), y compris la décision du 31 mars 2005 dans laquelle un agent de révision a refusé à M. Smith des prestations d'invalidité permanente. L'appel a eu lieu le 29 novembre 2005. M. Smith était représenté par un avocat.

[220] Dans la décision qu'il a rendue le 10 février 2006, le WCAT a confirmé la décision de l'agent de révision selon laquelle M. Smith n'avait pas droit à des prestations d'invalidité permanente fondées sur la perte de salaire prévue. Le WCAT a fondé sa décision sur les motifs suivants :

la preuve médicale démontre que l'emploi idéal pour M. Smith lui permettrait de s'asseoir, de se tenir debout et de marcher lorsqu'il en ressent le besoin;

le poste de coordonnateur adjoint de formation des trains respecte ses restrictions de travail et offre à M. Smith une possibilité d'emploi idéal ainsi qu'une grande souplesse lui permettant de traiter ses spasmes au dos lorsqu'il en ressent;

M. Smith est capable d'occuper le poste de coordonnateur adjoint de formation des trains;

l'argument de M. Smith selon lequel la WCB et la CN ont l'obligation de chercher un poste pour lui à Terrace avant de chercher ailleurs est rejeté. Si la CN pouvait trouver un emploi approprié ailleurs, il est tout à fait illogique qu'elle cherche un emploi au salaire minimum à Terrace et qu'elle paie des prestations d'invalidité permanente pour couvrir la différence du salaire perdu;

M. Smith n'a pas d'attaches permanentes à Terrace. Il y a habité pendant 16 ans, mais il a habité à Prince George auparavant, pendant huit ans. Sa femme a un emploi à temps partiel et travaille en deçà de ses qualifications à titre de pharmacienne. Ses enfants ont quitté la maison. Dans l'ensemble, les attaches de M. Smith à Terrace ne sont pas solides et sa préférence envers Terrace ne justifie pas qu'il obtienne des prestations d'invalidité permanente;

la CN a agi de bonne foi en offrant à M. Smith deux possibilités de formation à Prince George et en lui offrant ensuite le poste permanent. M. Smith n'a pas agi de bonne foi parce qu'il n'a pas saisi l'offre;

les difficultés auxquelles il a fait face pendant sa formation étaient causées, en majeure partie, par lui-même. L'intensité de ses spasmes au dos, le niveau auquel certaines activités causent ces spasmes, le niveau d'invalidité qu'ils causent et la nécessité pour M. Smith de s'allonger afin de les traiter ne sont prouvés que par les rapports de M. Smith. Ils ne sont pas vérifiables de façon indépendante;

M. Smith a refusé un emploi qui était convenable, disponible et qui lui assurait un salaire équivalent à celui qu'il recevait avant de se blesser.

(iv) Notes cliniques de 2006 du Dr Appleton

[221] Le 7 février 2006, M. Smith a rencontré le Dr Appleton. Dans ses notes cliniques, le Dr Appleton a noté que M. Smith demandait l'arbitrage à la Commission des droits de la personne au sujet de ses maux de dos et de [traduction] l'incapacité de la CN de lui offrir un emploi de substitution. Le Dr Appleton était d'avis que la CN avait offert à M. Smith un emploi de substitution qui aurait pu lui convenir, à l'extérieur de Terrace, mais M. Smith a refusé d'y aller.

[222] Après avoir décrit les symptômes de M. Smith et ses activités actuelles, le Dr Appleton a écrit que M. Smith avait un historique de problèmes au niveau des disques lombaires et que ce problème continu était aggravé lorsque M. Smith devait rester assis ou debout pendant des périodes prolongées. Cependant, son analyse des spasmes au dos ne correspond pas à celle de M. Smith. Le Dr Appleton croyait fermement qu'il y avait une composante largement reliée aux émotions dans ce cas. Il a soutenu par contre qu'il ne croyait pas que M. Smith simulait la douleur.

[223] Le Dr Appleton a conclu ses notes en expliquant qu'il avait dit à M. Smith, de façon non équivoque, qu'il ne trouvait aucune source physiologique aux spasmes et qu'il ne serait pas en mesure de corroborer une raison physique pour ces maux si on lui demandait.

[224] M. Smith a de nouveau rencontré le Dr Appleton le 24 mai 2006, quelques jours avant le début de l'audition de sa plainte devant le Tribunal. Dans ses notes cliniques, le Dr Appleton a noté que M. Smith était préoccupé par les commentaires du Dr Appleton dans ses notes du 7 février 2006, selon lesquels il soutenait qu'on avait offert à M. Smith un emploi de substitution à l'extérieur de Terrace, qu'il avait refusé.

[225] Le Dr Appleton a corrigé ce point en notant que son commentaire portait sur une consultation antérieure au cours de laquelle M. Smith et lui avaient discuté de la possibilité de travailler à l'extérieur de la région, dans un poste qui respectait ses blessures. À ce moment, M. Smith lui a dit qu'il serait difficile pour lui de déménager en raison de l'emploi de sa femme. Le Dr Appleton a conclu qu'il ne savait pas si la CN pourrait offrir à M. Smith un emploi convenable, compte tenu de ses blessures.

(v) Recommandation au Dr Keyes, neurologue

[226] M. Smith a demandé au Dr Appleton de le renvoyer à un autre spécialiste au sujet des spasmes qu'il ressentait au bas du dos. M. Smith avait trouvé le nom du Dr Keyes, un neurologue. Bien que le Dr Appleton ne croyait pas que le Dr Keyes pourrait vraiment aider, il a fait la recommandation.

[227] Le Dr Keyes a examiné M. Smith le 1er novembre 2006. Après son rendez-vous avec le Dr Keyes, M. Smith lui a écrit et lui a mentionné que la dernière fois qu'il avait tenté de retourner au travail, son employeur lui avait offert un emploi en informatique où il devait rester assis ou debout à son poste de travail. Il avait de la difficulté avec cet emploi en raison de ses douleurs et de ses spasmes musculaires.

[228] La majeure partie du rapport du 9 novembre 2006 du Dr Keyes offrait un diagnostic médical détaillé et technique de l'état de M. Smith. Il a conclu que M. Smith souffrait d'un pincement discal important qui causait ses douleurs au bas du dos. Il n'a pas recommandé une autre opération, mais a précisé que les spasmes et les douleurs de M. Smith devaient être traités avec des médicaments et de la physiothérapie continue.

(vi) Demande de M. Smith : prestations de retraite pour invalidité de la CN

[229] Le 18 mai 2006, M. Smith a présenté une demande de prestations de retraite pour invalidité de la CN. Pour être admissible, un employé doit être complètement invalide, de façon permanente. Une invalidité complète et permanente est définie par la CN comme suit : [traduction] une invalidité physique ou mentale qui empêche une personne d'effectuer tout emploi qu'elle peut raisonnablement occuper en fonction de son éducation, de sa formation et de son expérience, et dont il est raisonnable de croire qu'elle durera pour le reste de la vie de cette personne. C'était la première fois que M. Smith laissait entendre à la CN qu'il souffrait d'une invalidité complète et permanente.

[230] Dans la demande qu'il a remplie et signée, M. Smith a reconnu qu'il recevait des prestations du RPC. Il a aussi reconnu qu'il n'y a aucune possibilité de lui trouver des mesures d'accommodement en raison de son invalidité. Il a dégagé la CN de toute responsabilité en matière d'accommodement qu'elle puisse avoir envers lui.

[231] Le Dr Appleton a rempli la section réservée au médecin traitant de la demande de M. Smith. Il a inscrit que M. Smith souffrait d'un relâchement des disques lombaires et de douleurs lombaires de nature mécanique dans le bas du dos, qui existaient depuis des années. Le Dr Appleton a mentionné les restrictions de travail de M. Smith, telles que précisées par la WCB : ne pas rester assis trop longtemps, ne pas trop se pencher, ne rien lever de lourd et changer de position fréquemment.

[232] En ce qui a trait à l'invalidité complète et permanente de M. Smith, telle que décrite dans le critère d'admissibilité, le Dr Appleton a écrit qu'il n'y avait aucun emploi qui respectait ces restrictions.

[233] La CN n'a pas accepté la demande de M. Smith. Le Dr Lapierre, médecin en chef de la CN, a écrit à M. Smith le 13 juin 2006 pour l'aviser qu'il ne satisfaisait pas au critère d'admissibilité. D'après les renseignements médicaux disponibles, rien n'indiquait que ses restrictions médicales l'empêchaient de travailler.

[234] Pour arriver à cette conclusion, le Dr Lapierre a examiné les renseignements médicaux dans le dossier de M. Smith du département des Services de santé au travail de la CN et dans la décision du tribunal de révision du RPC. Le Dr Lapierre a tenu compte de la décision du WCAT du 10 février 2006 et, en particulier, des conclusions du WCAT selon lesquelles le poste de coordonnateur adjoint de formation des trains est un emploi convenable que M. Smith peut occuper, il respecte ses restrictions de travail et le salaire de ce poste équivaut à celui que M. Smith gagnait avant de se blesser.

[235] Il a aussi tenu compte de l'offre d'emploi que la CN a faite à M. Smith le 20 août 2004. Cette offre permettait d'évaluer la capacité de M. Smith à travailler en comparant ses restrictions de travail avec les exigences du poste.

[236] Compte tenu de ces renseignements, le Dr Lapierre a conclu que M. Smith n'était pas complètement invalide et qu'il ne satisfaisait donc pas aux critères d'admissibilité pour les prestations d'invalidité de la CN.

[237] Le Dr Lapierre a soutenu que la décision du tribunal de révision du RPC avait peu de valeur dans sa propre conclusion. La décision comprenait peu de renseignements médicaux sur lesquels il pouvait se fonder.

[238] Le Dr Lapierre n'a pas discuté avec les responsables de la CN au sujet de la plainte en matière de droits de la personne que M. Smith avait déposée. Il n'a pas du tout mentionné cette plainte dans sa décision de rejeter la demande de prestations d'invalidité de M. Smith.

(vii) Demande de travail de M. Smith auprès de la CN, envoyée par courriel le 29 juin 2006

[239] Le 29 juin 2006, M. Smith a envoyé un courriel à David Trites, le coordonnateur de retour au travail de la CN qui avait remplacé Tanya Gordon. Ce courriel a été envoyé 10 jours après le début de l'audience devant le Tribunal, le 19 juin 2006. Dans son courriel, M. Smith a indiqué qu'il était heureux d'apprendre que M. Trites et Lynn Chorley (la chef d'équipe des Services de santé au travail de la CN) lui cherchaient du travail qui correspondait à ses capacités, puisque le poste de coordonnateur adjoint de formation des trains ne lui convenait pas. Il a précisé qu'il serait très intéressé par tout poste ou toute idée qu'ils puissent avoir. Il a demandé que M. Trites ou que le gestionnaire de Terrace lui fasse part de toutes leurs idées.

(viii) Proposition d'accommodement pour M. Smith - Septembre 2006

[240] Lorsqu'il a conclu son témoignage en interrogation principal en septembre 2006, on a demandé à M. Smith s'il accepterait un emploi convenable à ce moment. Il a proposé que la CN lui offre un poste de coordonnateur adjoint de formation des trains à Terrace. Quant aux accommodements dont il aurait besoin pour effectuer son travail à Terrace, M. Smith a présenté la liste suivante :

une chaise convenable;

un poste de travail dont la hauteur est ajustable;

un endroit où il pourrait s'allonger, qui possède une prise de courant pour qu'il puisse y brancher son coussin chauffant;

un tapis antifatigue sur le plancher;

la souplesse lui permettant de quitter son poste de travail et de marcher ou de s'allonger lorsqu'il en sent le besoin.

[241] L'offre du 20 août 2004 de la CN, qui est toujours en vigueur, prévoit qu'à la fin de la formation de M. Smith, la CN rénovera le bureau du coordonnateur de formation des trains, y installera un plancher coussiné et fournira à M. Smith une chaise ergonomique convenable et un poste de travail ajustable.

[242] M. Smith aurait aussi accès à un lieu où il pourrait s'allonger et il aurait la possibilité de quitter son poste de travail lorsqu'il en a besoin. Il pourrait le faire parce que le poste de coordonnateur adjoint n'est pas un poste essentiel à la sécurité et qu'il n'a pas les responsabilités principales du coordonnateur de formation des trains.

[243] La seule différence entre l'offre de la CN et la proposition de M. Smith était que l'un des postes se trouvait à Prince George et l'autre se trouvait à Terrace. M. Smith n'a pas expliqué pourquoi il croyait qu'il était capable d'occuper le poste de coordonnateur adjoint de formation des trains à Terrace, mais pas à Prince George.

(ix) Plainte de M. Smith en matière de droits de la personne et réparations demandées

[244] Dans sa plainte du 28 février 2002 à la Commission canadienne des droits de la personne, M. Smith soutient que la CN a agi de façon discriminatoire envers lui en raison de son invalidité parce qu'elle n'a pas pris de mesures d'accommodement et qu'elle ne lui a pas offert d'emploi de substitution.

[245] Au paragraphe 49 de son exposé modifié des précisions, daté du 6 juin 2006, M. Smith demande une ordonnance obligeant la CN à lui trouver un accommodement raisonnable dans la région de Terrace, soit en lui permettant d'occuper le poste de coordonnateur de formation des trains, ou le poste de coordonnateur adjoint de formation des trains, soit en lui offrant un autre emploi convenable.

[246] Au paragraphe 52A de son exposé des précisions, M. Smith demande une ordonnance obligeant la CN à accepter sa demande de prestations d'invalidité et à rembourser les prestations auxquelles il n'a pas eu droit, parce qu'il était incapable de travailler et que la CN ne lui a pas offert d'emploi convenable.

[247] À la fin de son témoignage en septembre 2006, le Tribunal a posé des questions à M. Smith au sujet des incohérences entre sa demande d'accommodement visant l'obtention d'un poste convenable à Terrace et sa demande dans laquelle il tentait d'obtenir un remboursement des prestations auxquelles il avait droit parce qu'il était incapable de travailler et que la CN ne lui avait pas offert d'emploi convenable.

[248] L'avocat de M. Smith a écrit une lettre au Tribunal le 19 février 2007, dans laquelle il présentait la réponse de son client selon laquelle il ne demandait plus la réparation inscrite au paragraphe 49, soit que la CN lui offre un accommodement convenable à Terrace.

[249] Par l'entremise de son avocat, M. Smith a expliqué que :

[traduction]

[...] en partie en raison du résultat de la recommandation [...] à Dr Keyes, sa réponse à la question est qu'il ne souhaite pas poursuivre cette demande de réparation, puisqu'il ne croit plus qu'il sera capable de se rétablir suffisamment pour pouvoir travailler de façon régulière. Ainsi, cela signifie que M. Smith reconnaît maintenant, en rétrospective par rapport à l'année 2007, qu'il n'a pas été capable de travailler pendant cette période, pendant presque toute la période touchée par la présente plainte [...] Il ne reconnaît pas qu'il était [...] il ne le croyait pas, il ne l'a pas accepté tant qu'il n'a pas été forcé d'arriver à cette conclusion, très récemment. Il n'était pas du même avis en 2001 ou en 2002. À cette époque, il espérait toujours qu'avec le temps, il serait capable de travailler. Bien entendu, beaucoup de preuves existent pour étayer le fait qu'il a essayé de le faire.

V. MOTIFS DE LA DÉCISION

A. La CN a-t-elle agi de façon discriminatoire ou a-t-elle exercé des représailles envers M. Smith en rejetant sa demande de pension d'invalidité de la CN?

[250] Pour avoir gain de cause, M. Smith doit établir une preuve prima facie qu'il y a eu discrimination. Pour ce faire, il doit démontrer qu'il répondait au critère d'admissibilité de la pension d'invalidité lorsque sa demande a été rejetée.

[251] Pour établir prima facie qu'il y a eu des représailles, M. Smith doit démontrer que sa demande a été rejetée parce qu'il a déposé une plainte à la CCDP.

[252] En ce qui a trait aux allégations de discrimination, M. Smith a soutenu que, en rétrospective par rapport à l'année 2007, il a conclu qu'il n'était pas capable de travailler de façon régulière. Ses motifs sont fondés en partie sur son renvoi au Dr Keyes.

[253] La décision quant à savoir si M. Smith est atteint d'une invalidité complète et permanente l'empêchant de travailler doit être fondée sur des preuves médicales objectives. La seule preuve médicale à ce sujet est la lettre du 3 mars 2004 que le Dr Appleton a écrite à qui de droit, dans laquelle il déclarait qu'il était d'avis que M. Smith était complètement invalide et ne pouvait plus travailler.

[254] Cependant, il faut accorder très peu de poids à cet avis, pour un certain nombre de raisons. Premièrement, l'avis médical a été écrit à la demande de M. Smith. Il a avisé le Dr Appleton de l'appel au RPC et lui a expliqué qu'il avait besoin de son soutien.

[255] Deuxièmement, le Dr Appleton, dans sa lettre du 28 mars 2002 en soutien à la demande d'assurance-emploi de M. Smith, a indiqué que M. Smith pouvait retourner au travail le 10 juin 2001.

[256] Troisièmement, le Dr Appleton, qui est le médecin praticien qui connaît le mieux l'état de santé de M. Smith, n'a jamais été appelé à témoigner pendant l'audience, même si la première semaine de l'audience a eu lieu à Terrace, où le Dr Appleton habite. Pendant les autres semaines, l'audience a eu lieu à Vancouver. L'avocat de M. Smith a mentionné au Tribunal que le Dr Appleton serait à Vancouver pendant l'une de ces semaines.

[257] M. Smith n'a donné aucune explication quant au fait que le Dr Appleton n'a pas témoigné devant le Tribunal.

[258] Quatrièmement, les notes cliniques du Dr Appleton et ses rapports de médecin traitant pour la WCB ont été présentés pour le docteur pendant l'audience. Cependant, en l'absence du Dr Appleton, la CN a été incapable de contre-interroger le témoin et de tester la validité de son avis médical au sujet de M. Smith. Pour la même raison, l'évaluation que le Dr Appleton a présentée dans la demande de prestations d'invalidité que M. Smith a déposée à la CN n'a pas pu être vérifiée en contre-interrogation.

[259] Cinquièmement, certains éléments de preuve démontrent que le Dr Appleton a agi comme mandataire pour M. Smith. Ces éléments comprennent les lettres du 28 mars 2002 et du 3 mars 2004, qu'il a écrites à la demande de M. Smith.

[260] Parmi ces éléments de preuve se trouve aussi l'intervention, au nom de M. Smith, auprès de M. Beddie. Le Dr Appleton avait demandé une réunion en personne avec M. Smith, la CN et les responsables de la WCB afin de trouver une solution à la situation de travail de M. Smith.

[261] Finalement, le fait qu'aucun des spécialistes qui ont examiné M. Smith, y compris le Dr Wing, le Dr Clarke et le Dr Keyes, n'a offert un avis médical selon lequel M. Smith était complètement invalide et ne pouvait plus travailler.

[262] Cependant, c'est plus que l'absence de preuve médicale objective qui me porte à conclure que M. Smith était capable de travailler. Ses propres actions, de 2002 à 2004, nient la conclusion qu'il était incapable de travailler.

[263] Au même moment où M. Smith recevait des prestations d'invalidité du RPC, à partir de juin 2002, M. Smith :

a demandé à son syndicat, le 9 juillet 2003, de porter en arbitrage son grief au sujet du fait que la CN devait lui trouver un emploi convenable à Terrace;

a, en juillet 2004, discuté avec l'avocat du syndicat et a répété, par télécopie à l'avocat, que la demande de contrôle judiciaire de la décision de l'arbitrage devrait être maintenue et que la CN avait l'obligation de lui trouver un emploi à Terrace;

a maintenu son appel au WCAT en novembre 2005, dans lequel il soutenait que la WCB avait l'obligation de lui trouver du travail à Terrace avant de lui en chercher ailleurs;

a proposé, lors de l'audience devant le Tribunal en septembre 2006, qu'une mesure d'accommodement acceptable serait que la CN lui offre le poste de coordonnateur adjoint de formation des trains à Terrace;

a, dans son exposé des précisions de juin 2006, demandé par voie de recours à ce qu'on lui donne le poste de coordonnateur ou de coordonnateur adjoint de formation des trains, à Terrace, ou tout autre emploi de substitution acceptable. M. Smith a seulement retiré cette demande en février 2007, lorsqu'on lui a fait remarquer les incohérences entre cette demande et celle qu'il avait présentée à la CN, soit d'approuver sa demande de prestation d'invalidité de la CN;

a, dans son courriel du 29 juin 2006 à David Trite, le coordonnateur de retour au travail de la CN, exprimé le fait qu'il serait intéressé par tout travail que lui-même ou le gestionnaire à Terrace suggérerait et qui respecte ses capacités;

n'a jamais avisé le RPC, comme il avait accepté de le faire dans sa demande au RPC, qu'il avait suivi une formation d'essai en juillet 2003 et en janvier 2004, ni qu'il travaillait comme bénévole pour la NIWA;

n'a pas avisé la CN, l'avocat du syndicat ni l'arbitre qu'il recevait des prestations d'invalidité parce qu'il était incapable de travailler.

[264] Il est évident que M. Smith croyait qu'il était capable de travailler, que ce soit comme coordonnateur de formation des trains, comme coordonnateur adjoint ou dans tout autre poste convenable à Terrace.

[265] Je conclus qu'en l'absence de toute preuve médicale crédible et objective, et compte tenu des actions et du point de vue de M. Smith, il n'est pas atteint d'une invalidité complète et permanente qui l'empêche de travailler.

[266] En ce qui a trait à son allégation selon laquelle la CN a exercé des représailles contre lui parce qu'il avait déposé une plainte à la CCDP, j'accepte le témoignage du Dr Lapierre qui soutenait qu'il avait pris sa décision en fonction d'éléments objectifs et qu'il n'avait pas tenu compte de la plainte en matière de droits de la personne de M. Smith.

B. La CN a-t-elle pris des mesures d'accommodement pour M. Smith?

[267] M. Smith soutient qu'il était atteint d'une invalidité, qu'il ne pouvait pas reprendre l'emploi qu'il occupait avant de se blesser et que la CN lui a offert un emploi de substitution convenable. Si l'on accepte que M. Smith a établi une preuve prima facie, la question est de déterminer si la CN a pris des mesures d'accommodement pour son invalidité.

[268] Il existe deux principes de droit, énoncés par la Cour suprême du Canada dans Central Okanagan School District No. 23 c. Renaud, [1992] R.C.S. 970, qui sont pertinents en l'espèce. Premièrement la Cour a précisé que les mesures que l'auteur de la discrimination doit prendre pour s'entendre avec le plaignant sont limitées par les expressions raisonnables et sans s'imposer de contrainte excessive. Il s'agit là non pas de critères indépendants, mais de différentes façons d'exprimer le même concept. Ce qui constitue des mesures raisonnables est une question de fait qui variera selon les circonstances de l'affaire.

[269] Le deuxième principe de l'arrêt Renaud est le fait que lorsqu'un employé demande un accommodement, il doit accepter tout accommodement raisonnable, même s'il ne s'agit pas de la mesure qu'il préfère. Si l'employé refuse une offre d'accommodement qui est raisonnable compte tenu des circonstances, alors l'employeur est acquitté de son obligation.

[270] Il convient d'examiner toutes les circonstances en l'espèce. À la demande de la WCB, la CN a préparé le PRT no 1 qui devait commencer en décembre 2000. Il s'agissait d'un PRT progressif qui tenait compte des tâches d'un mécanicien de locomotive, des limites de travail de M. Smith précisées par la WCB, du rapport WorkAble de 1999 et des discussions avec M. Smith au sujet de ses tolérances et de ses activités à ce moment.

[271] Le plan a aussi été examiné et approuvé par le Dr Appleton, le Dr Wing et le Dr Faraday, qui avaient confirmé les restrictions de travail de M. Smith. M. Smith n'a pas terminé ce PRT.

[272] En réponse à une suggestion que M. Smith avait faite plus tôt, la CN a élaboré le PRT no 2 qui devait débuter en mars 2001. Il s'agissait d'un PRT progressif qui comprenait des tâches allégées et du travail dans le parc de locomotives local, qui évitait que M. Smith reste en position assise prolongée dans la cabine de locomotive. Le Dr Coppin et le Dr Appleton ont tous les deux conclu qu'il s'agissait d'un plan raisonnable. M. Smith n'a pas terminé ce PRT.

[273] Le PRT no 3 a été lancé par M. Wiederspiel du syndicat, qui a demandé à la CN de réactiver le plan précédent. La CN a accepté et a modifié le plan en tenant compte des suggestions du syndicat.

[274] M. Smith a aussi examiné le plan et a suggéré des modifications supplémentaires à Mme Dawson. Il n'a jamais dit à Mme Dawson qu'il s'opposait à ce plan modifié.

[275] Il est clair que l'objectif de la WCB et de la CN était de réattribuer M. Smith au poste qu'il occupait avant de se blesser. M. Smith doutait certainement de sa capacité à le faire. Le Dr Appleton avait recommandé que M. Smith évite de rester assis de façon prolongée, et le Dr McDougall, le Dr Faraday et le Dr Wing avaient souscrit à cette recommandation.

[276] Compte tenu du fait que les PRT ont été élaborés et prescrits afin de servir de programme de retour au travail progressif qui respectait la recommandation du Dr Appleton, du fait que les PRT no 1 et no 2 avaient été approuvés non seulement par la WCB, mais aussi par les conseillers médicaux de M. Smith et les conseillers de la CN, et du fait que le PRT no 3 a été élaboré à la demande du syndicat de M. Smith, je conclus que ces trois PRT constituaient des mesures d'accommodement raisonnables au sens du principe Renaud.

[277] Au cours de la période d'avril 2001 à mars 2003, les responsables de l'exploitation à Terrace et l'équipe de retour au travail de M. Smith ont examiné d'autres emplois possibles pour lui à Terrace. M. Smith a aussi offert des suggestions à des agents du personnel de la CN à Edmonton.

[278] La preuve démontre qu'il n'y avait pas de possibilités d'emploi à Terrace qui conviendraient à M. Smith, sauf si l'on créait un poste qui n'était pas requis. Les suggestions de M. Smith ne lui permettaient pas de s'assurer un emploi rémunéré à long terme.

[279] En mai 2003, la CN et la WCB, avec l'appui du syndicat, ont proposé le PRT no 4 afin d'offrir à M. Smith le poste de coordonnateur de formation des trains à Prince George. Sa formation a eu lieu en juin et juillet 2003. Une fois de plus, M. Smith n'a pas terminé sa formation et le plan a été annulé.

[280] En janvier 2004, la CN a offert à M. Smith le PRT no 5, soit le poste de coordonnateur adjoint de formation des trains à Prince George. Cette offre devait entrer en vigueur immédiatement. M. Smith n'avait qu'à terminer le programme de formation. Il n'a pas accepté l'offre. Elle est toujours en attente.

[281] La preuve démontre définitivement que le poste de coordonnateur adjoint de formation des trains est le [traduction] poste idéal pour M. Smith, compte tenu de ses restrictions de travail. Il lui permet d'être assis, de se lever et de marcher lorsqu'il en ressent le besoin. Il peut quitter son lieu de travail et se rendre à une pièce désignée pour s'allonger. Le poste n'en est pas un qui est essentiel à la sécurité.

[282] Le tribunal de révision de la WCB a aussi conclu qu'il s'agissait du poste idéal pour M. Smith dans sa décision du 14 mars 2003. Le WCAT a eu la même opinion dans sa décision du 10 février 2006. L'arbitre Piché a conclu que le poste de coordonnateur de formation des trains était un accommodement raisonnable qui convenait à l'invalidité de M. Smith, conformément à la LCDP.

[283] M. Smith a témoigné que ses spasmes musculaires, qu'il avait ressentis pendant sa formation, l'empêchaient d'occuper le poste de coordonnateur de formation des trains. Cependant, c'est ce que M. Smith a déclaré au Dr Appleton, dans ses journaux et devant le Tribunal. Cette preuve n'est pas objective et ne peut pas être vérifiée de façon indépendante, comme le WCAT l'a fait remarquer. Comme je l'ai déjà noté, M. Smith a eu la possibilité d'appeler le Dr Appleton à témoigner, ou tout autre médecin qui l'avait évalué. Il a choisi de ne pas le faire.

[284] Dans ses notes cliniques du 7 février 2006, le Dr Appleton a écrit qu'il était d'avis qu'il y avait une composante largement émotionnelle aux spasmes musculaires de M. Smith et qu'il ne pouvait pas trouver de raison physiologique aux spasmes.

[285] À ce sujet, je conviens avec la conclusion du WCAT selon laquelle M. Smith a lui-même causé la majeure partie des difficultés qu'il a eues pendant sa formation comme coordonnateur de formation des trains.

[286] Il faut aussi tenir compte du fait que M. Smith a continué à insister, devant le WCAT et devant le Tribunal, qu'il devait obtenir un poste de coordonnateur de formation des trains à Terrace. S'il était capable d'occuper ce poste à Terrace, alors il était capable de le faire à Prince George. Je peux seulement conclure que M. Smith n'était pas prêt à déménager de Terrace à Prince George.

[287] L'obligation de M. Smith, en vertu de l'arrêt Renaud, est d'accepter tout accommodement raisonnable. Il ne peut pas s'attendre à une solution parfaite. L'offre de la CN de lui donner un poste de coordonnateur ou de coordonnateur adjoint de formation des trains est un accommodement raisonnable compte tenu des circonstances. M. Smith ne s'est pas acquitté de son obligation énoncée dans l'arrêt Renaud. La CN s'est donc acquittée de son obligation de prendre des mesures d'accommodement.

[288] M. Smith a aussi soutenu que la CN a agi de façon discriminatoire envers lui en raison de sa situation familiale. Il a fait valoir que le déménagement à Prince George aurait un effet négatif pour Mme Smith. Elle devrait démissionner de son poste de bibliothécaire adjointe à Terrace.

[289] La situation familiale n'est pas un motif qui figure dans la plainte de M. Smith. Dans ses observations finales, il n'a présenté aucun précédent qui appuie l'argument selon lequel il y a eu discrimination fondée sur la situation familiale.

[290] De plus, je souscris à l'opinion de l'arbitre Piché selon laquelle l'obligation de prendre des mesures d'accommodement prévue par la LCDP ne rend pas l'employeur responsable des aspects économiques et familiaux de l'employé.

VI. CONCLUSION

[291] La CN a pris des mesures d'accommodement pour l'invalidité de M. Smith. Elle n'a pas fait preuve de discrimination et n'a pas exercé de représailles envers M. Smith lorsqu'elle a interagi avec la WCB. La CN n'a pas fait preuve de discrimination et n'a pas exercé de représailles envers M. Smith lorsqu'elle a rejeté sa demande de prestations d'invalidité.

[292] La plainte de M. Smith est rejetée.

Signé par
J. Grant Sinclair

OTTAWA (Ontario)
Le 9 mai 2008

PARTIES AU DOSSIER

DOSSIER DU TRIBUNAL :

T939/5904

INTITULÉ DE LA CAUSE :

Jim Smith c. Compagnie des chemins
de fer nationaux

DATE ET LIEU DE L'AUDIENCE :

Les 19 au 23 juin 2006
Terrace (Colombie-Britannique)

Les 14 au 18 août 2006
Les 11 au 15 septembre 2006
Les 12 au 16 mars 2007
Les 19 au 23 mars 2007
Vancouver (Colombie-Britannique)

DATE DE LA DÉCISION SUR REQUÊTE
DU TRIBUNAL :

Le 9 mai 2008

ONT COMPARU :

James Sayre

Pour le plaignant

(Aucune représentation)

Pour la Commission canadienne des droits de la
personne

Adrian Elmslie / Joseph H. Hunder

Pour l'intimée

 Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.