Tribunal canadien des droits de la personne

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D.T. 5/93 Décision rendue le 8 avril 1993

LOI CANADIENNE SUR LES DROITS DE LA PERSONNE L.R.C. (1985), ch. B-6 (version modifiée)

TRIBUNAL DES DROITS DE LA PERSONNE

ENTRE PAUL LAGACÉ

le plaignant

COMMISSION CANADIENNE DES DROITS DE LA PERSONNE

la commission

FORCES ARMÉES CANADIENNES

l'intimée

DÉCISION DU TRIBUNAL

Tribunal: Alfred Georges Lynch-Staunton

Ont comparu: Me René Duval Avocat de la Commission canadienne des droits de la personne

Me Donald J. Rennie et le capitaine B. Cathcart Avocats de l'intimée

Dates et lieu de l'audience: du 16 au 19 novembre 1992 Victoria (Colombie-Britannique)

Paul M. Lagacé, le plaignant, est caporal-chef au sein des Forces armées canadiennes (FAC), l'intimée, et a déposé une plainte en date du 16 mai 1988 à Kamloops (Colombie-Britannique) ainsi qu'une plainte modifiée en date du 30 juin 1988 à North Bay (Ontario) auprès de la commission canadienne des droits de la personne (la Commission), soutenant avoir été victime de discrimination fondée sur son état matrimonial et sur sa situation de famille, lesquelles plaintes ont été déposées respectivement comme pièces HR-6 et HR-7. Les deux plaintes sont formulées exactement de la même façon, sauf que la pièce HR-7 comporte également le paragraphe suivant :

[TRADUCTION]

J'ai fait une demande d'admission au régime de soins dentaires pour personnes à charge en septembre 1987 et j'ai alors indiqué que mon état matrimonial était l'union de fait. Ma demande a été acceptée et j'ai versé des primes pendant huit mois. Cependant, mon adhésion a été annulée le 1er mai 1988 et on m'a dit que les unions de fait ne sont pas acceptées selon le régime.

Les deux pièces sont jointes à la présente décision. Pendant la présentation de la preuve, l'avocat de la Commission, Me R. Duval, a fait savoir au Tribunal que le plaignant avait déjà fait une plainte en date du 16 juin 1984 dans laquelle il avait contesté la politique sur l'hébergement de l'intimée. Dans cette plainte, le plaignant a soutenu que le ministère de la Défense nationale avait fait montre de discrimination fondée sur l'état matrimonial et la situation de famille, étant donné que le plaignant s'est vu refuser un logement familial (LF) parce qu'il n'était pas légalement marié, ayant plutôt une conjointe de fait. Cette cause ainsi qu'une autre

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plainte déposée par un certain John F. Schaap, également membre des FAC, ont été entendues par un tribunal canadien des droits de la personne présidé par W John R.A. Douglas, qui a rejeté les deux plaintes dans une décision rendue le 29 février 1988. Voir John F. Schaap et Paul M. Lagacé c. Forces armées canadiennes 9 CHRR 37792-37857. Le plaignant et Schaap ont demandé à la Cour d'appel fédérale d'annuler la décision, ce que celle-ci a fait par un jugement majoritaire prononcé par le juge Hugessen (le juge Pratte ayant souscrit aux motifs de celui-ci) le 20 décembre 1988; le juge Hugessen a décidé que l'état matrimonial dont il est fait mention dans la Loi canadienne sur les droits de la personne ne désigne pas le statut d'une personne mariée, mais plutôt le statut d'une personne par rapport au mariage, soit le fait que la personne soit célibataire, mariée, divorcée ou veuve. Il n'était pas nécessaire de statuer sur la plainte du plaignant concernant la discrimination fondée sur la situation de famille. Voir Schaap et Lagacé et al c. Forces armées canadiennes 95 NR 132. Les deux avocats et le plaignant m'ont également informé que, par suite de cette décision, toutes les questions formulées à la page deux de la plainte modifiée ont été réglées. Si j'ai bien compris, la politique de l'intimée concernant l'état matrimonial en ce qui a trait à des questions comme l'hébergement, les prestations pour soins dentaires, les programmes de présélection, les emplacements pour maisons mobiles et ainsi de suite a été modifiée rétroactivement par suite de la décision de la Cour d'appel fédérale. La seule question à trancher en l'espèce est donc celle

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de savoir si la candidature du plaignant au Programme de formation des aspirants-officiers (PFAO), en date du 16 novembre 1987, a été rejetée par le major R.J. Dunsdon parce que le plaignant vivait en union de fait. Au début de l'audience, l'avocat de,la Commission m'a dit qu'il présenterait de la preuve concernant les événements survenus avant la date de la candidature au PFAO pour me permettre de comprendre le fondement de la plainte. L'avocat de l'intimée a soutenu que cette preuve n'était pas pertinente, mais il a retiré son objection lorsque Me Duval m'a assuré qu'il voulait uniquement me donner des renseignements préliminaires et non revenir sur des éléments de preuve qui avaient déjà été présentés au sujet de la plainte précédente sur laquelle la Cour d'appel fédérale s'est prononcée et certainement pas sur des faits ou des données dont on a peut-être tenu compte pour conclure les règlements susmentionnés. Me Duval a ajouté que son intention était simplement de présenter une chronologie des événements et non une chronologie d'une pratique discriminatoire. A nouveau, on a dit que le litige portait uniquement sur la plainte de discrimination du plaignant fondée sur son état matrimonial en ce qui a trait à sa candidature au PFAO et à la façon dont le major Dunsdon a traité cette demande. Toutefois, Me Duval a mentionné que quelques-uns des renseignements préliminaires pourraient avoir une influence lors de l'examen des allégations du plaignant. J'ai décidé que je tiendrais compte de cette preuve.

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A l'exception de la preuve concernant le préjudice, le seul témoignage en chef a été celui du plaignant. Celui-ci s'est enrôlé dans les Forces armées canadiennes (FAC) en avril 1974 comme recrue, par suite d'un rapport d'entrevue d'enrôlement en date du 29 avril 1974 (déposé comme pièce HR-8). Il avait terminé sa douzième année, mais il n'était pas bilingue. Il a demandé d'être envoyé à Cornwallis, en Nouvelle-Écosse, parce qu'il voulait apprendre l'anglais. Après avoir terminé sa formation de base à Cornwallis, il a été affecté à un régiment blindé de Calgary (Alberta), soit le Lord Strathcona's Horse (Royal Canadians) (LdSH). En 1976, il a été affecté au Moyen-Orient, où il a exercé des fonctions liées au maintien de la paix pendant sept mois. Avant d'être envoyé en Égypte, il a cessé de fumer et, peu après son retour à Calgary, en 1977, il a cessé de boire. Il s'est ensuite orienté vers des activités physiques et vers des activités auprès des alcooliques anonymes, activités qu'il poursuit encore aujourd'hui, et il n'a pas pris un verre depuis. En 1978, il est devenu homme d'équipage et il a été nommé caporal. Le plaignant désirait améliorer sa formation et s'orienter vers une carrière plus intéressante, mais ses chances de poursuivre des études avancées dans les corps blindés étaient restreintes. Il a demandé d'être intégré chez les officiers par l'entremise de son superviseur, qui lui a dit qu'il ne ferait pas un bon officier chargé des hommes d'équipage en raison de ses intérêts et lui a suggéré de choisir un autre métier. Le plaignant a donc changé de spécialité et a suivi une formation comme technicien en défense

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aérienne. Dans son rapport de cours en date du 7 décembre 1978 (pièce HR-11), il a été classé troisième sur trente et a obtenu la note A. Il a été affecté à la station des Forces canadiennes de Kamloops (C.-B.) et a travaillé dans son domaine comme technicien en défense aérienne à titre de caporal. Au début de 1979, alors qu'il se trouvait à Kamloops, il a commencé à participer intensivement aux activités du programme de réadaptation des alcooliques (PRA) et voulait aider les autres personnes inscrites au programme par l'entremise de l'armée. Il a également offert son aide à l'Indian Friendship Centre et au centre détresse-secours ainsi qu'à la Canadian Kung Fu Association. En février 1979, par l'entremise de cette dernière, il a rencontré sa conjointe de fait, Amy, et a commencé à vivre avec elle en janvier 1980. Il demeure encore avec elle aujourd'hui et cette relation est très stable à tous égards. Le plaignant a joué un rôle de père sur tous les plans à l'endroit du fils de sa conjointe. Celle-ci ne désirait pas se marier, en raison des problèmes qu'elle avait déjà vécus, et ne voulait pas divorcer non plus, craignant de mettre en péril son statut d'autochtone. Au printemps de 1980, le plaignant a été choisi par ses commandants pour suivre un programme d'études de deux semaines, pendant l'été, dans le domaine de l'alcool et de la drogue à l'Université de Sherbrooke. En février 1981, le plaignant est devenu admissible à être promu caporal-chef après avoir terminé un cours de chef subalterne. Dans le rapport de cours en date de février 1981 (pièce HR-12), que le major arpenter a signé, on peut lire ce qui suit [TRADUCTION] le caporal Lagacé a fait montre

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d'un potentiel de leadership supérieur à la moyenne. Également en 1981, le plaignant a suivi la deuxième partie du programme d'études dans le domaine de la drogue et de l'alcool, dont il est question plus haut, afin d'avoir plus de chances d'être choisi pour suivre le PRA. Bien qu'il ait effectivement été choisi pour suivre ce programme, il n'a pu le faire, parce qu'il a été affecté à la base des Forces canadiennes de North Bay, en Ontario, le 15 juin 1982. En septembre 1981, il a entrepris un cours d'études universitaires par correspondance et a finalement obtenu un baccalauréat en psychologie et en sociologie de la Simon Fraser University. Il a suivi ce cours, d'une durée normale de quatre ans à temps plein, en huit ans et demi en s'instruisant lui-même et s'est vu décerner la médaille d'argent du gouverneur général. Au cours de son témoignage, il a dit qu'il s'était orienté dans les domaines de la psychologie, de la sociologie et du comportement humain parce qu'il voulait devenir officier de sélection du personnel. Lorsqu'il a été affecté à North Bay, il s'est vu refuser le droit à un logement familial, pour le motif qu'il n'était pas marié et qu'il vivait en union de fait, et il a déposé la plainte susmentionnée. Le plaignant a décrit les procédures d'entrée suivies à son arrivée à North Bay et il a mentionné, entre autres choses, qu'il a été interrogé par le père Dobrowski, aumônier au sein des FAC, qui lui aurait dit ce qui suit (page 116 de la transcription) :

[TRADUCTION]

Pourquoi ne quittes-tu pas ton épouse indienne et ne la renvoies-tu pas avec son fils en Colombie-Britannique pour t'installer dans la caserne et poursuivre tes études? Un bon

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catholique comme toi pourrait se trouver une bonne fille catholique, quelqu'un de ton genre.

J'ai alors demandé si le père Dobrowski serait convoqué comme témoin. voici ce que Me Duval a dit aux pages 116 et 117 :

[TRADUCTION]

Je n'ai pas l'intention de faire témoigner cet homme. J'ignore si mon confrère veut le faire. Encore une fois, pour ma cause et celle de M. Lagacé, si nous devions examiner le refus de façon abstraite, si nous devions chercher à évaluer les remarques du major Dunsdon sans contexte... Nous souhaitons que cet incident et d'autres qui vous seront racontés vous aident à comprendre comment M. Lagacé était perçu par ses supérieurs.

Nous soutenons que c'est cette perception qu'ils avaient de lui, perception qui, selon nous, était fondée sur sa situation de famille inhabituelle, qui explique qu'il n'ait pas été admis au programme en question.

Ce n'est pas ici un cas où nous pouvons présenter une preuve concernant l'intention qu'avaient les personnes qui ont pris la décision; nous pourrions déduire cette intention de ce qu'elles ont dit et c'est pourquoi je vais présenter de la preuve concernant ce que le major lui a dit ou ce que le lieutenant Jodoin lui a dit.

Il se peut que ce soit là simplement un exemple de ce que les gens de l'établissement pensaient généralement de M. Lagacé.

Je ne dis pas que cette preuve vous convaincra de ça, mais je devrais certainement avoir le droit de la présenter. Autrement, nous vous demanderions de jouer au devin, de deviner la pensée des autres personnes et, encore une fois, il s'agit de renseignements préliminaires.

Dans le cadre des procédures d'entrée, il doit voir l'aumônier. Celui-ci soulève la question de sa situation de famille. Il donne les réponses qu'il a mentionnées et il obtient des commentaires.

Cela ne signifie pas que le major a fait montre de discrimination à son égard six ans plus tard, mais cela vous donne une autre indication de la perception négative des Forces à l'égard de ceux qui n'adoptent pas une façon de vivre plus traditionnelle.

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Le plaignant a dit qu'au cours de l'automne 1982, il a présenté une demande d'admission au Programme de formation universitaire - hommes (PFUH), ce qui était une des méthodes employées pour présenter sa candidature aux FAC afin de devenir officier. Il a fait cette demande après avoir terminé une année de cours universitaires par correspondance. La demande en question a été refusée, l'officier de sélection du personnel ayant indiqué que les aptitudes intellectuelles du plaignant lors de son entrée dans l'armée étaient bien inférieures à la moyenne et que, à son avis, le plaignant ne serait pas en mesure de suivre avec succès les cours de niveau universitaire et encore moins d'obtenir un diplôme. Le plaignant a également dit au cours de son témoignage que l'officier de sélection du personnel a fait allusion à sa situation de famille. A l'époque, le plaignant était aux prises avec un certain nombre de problèmes personnels liés à l'hébergement, au refus de sa demande d'adhésion au régime d'assurance-maladie de l'Ontario, à la maladie de sa conjointe et au fait que son médecin était sur son dos parce qu'il ne pouvait adhérer audit régime. Il a donc demandé d'être muté et cette demande lui a été refusée. En 1983, le plaignant a passé un nouveau test d'aptitudes intellectuelles au niveau des officiers et il a obtenu un résultat bien supérieur à la moyenne [TRADUCTION] Je faisais partie des premiers 75 pour cent (p. 123 - pour ce que cela veut dire). Également en 1983, le plaignant a fait une nouvelle demande d'adhésion au PFUH et a présenté une lettre de la Simon Fraser University indiquant qu'il avait obtenu un rendement élevé.

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L'officier de sélection du personnel a refusé cette demande en raison de la situation de famille du plaignant et de la note inférieure à la moyenne qu'il avait obtenue (page 125). En décembre 1983, le plaignant a déposé un grief conformément aux Ordonnances et Règlements royaux 19-26 (O R & R 19-26) au sujet de la politique d'hébergement susmentionnée des FAC. Le 6 février 1984, le plaignant a rencontré son commandant, le major Nickerson, [TRADUCTION] pour discuter de mon grief, qui portait sur l'absence de reconnaissance des unions de fait dans les Forces (p. 127). L'avocat de l'intimée a alors contesté la pertinence de cette preuve, soutenant qu'elle ne permettait pas de déterminer de façon équitable si le major Dunsdon avait fait montre de discrimination. L'avocat de la Commission a allégué que cette preuve était importante pour déterminer si le litige en l'espèce traduisait une perception entretenue au sujet du plaignant à l'époque. Me Duval a répondu qu'il était prêt à admettre que les déclarations précitées de l'aumônier [TRADUCTION] étaient un peu déplacées, sans doute parce que l'aumônier était influencé par sa formation religieuse (p. 128). J'ai décidé que la preuve était admissible et que j'en tiendrais compte. Voici ce que le plaignant a dit au sujet du major Nickerson (p. 133) :

[TRADUCTION]

Il a commencé à me dire que j'étais devenu un fardeau administratif et que cette question d'union libre n'était pas ... ce n'était pas très bien perçu à l'époque et on exerçait des pressions pour que je sois libéré. La menace était là, c'était implicite et il a dit quelque chose au sujet du fait d'avoir parlé d'un problème militaire en dehors de l'armée ou d'une rencontre avec la commission des droits de 9

la personne à l'égard de ce problème. Selon lui, je n'aurais pas dû faire ça. Je ne me rappelle pas ce qu'il a dit exactement, mais il était très ennuyé. J'essaie de me rappeler les termes exacts qu'il a utilisés, parce qu'ils étaient très directs.

A l'automne de 1985, le plaignant a présenté une troisième demande d'inscription au PFUH, laquelle demande a été examinée par le capitaine Gilman, officier de sélection du personnel qui a révisé les deux premières demandes et qui, selon le plaignant, estimait que celui-ci avait été sous-évalué par le capitaine Madill, l'0SP qui avait étudié les deux premières demandes. Le rapport de révision a été déposé comme pièce HR-26 (plus tard au cours de l'audience). Voici ce que le plaignant a dit à la page 139 :

[TRADUCTION]

Il a mentionné qu'il y avait certaines, qu'il y avait une question qui le préoccupait, que c'était, encore une fois, ma situation de famille.

D'après le paragraphe pertinent de la pièce HR-26, il semble que le capitaine Gilman était préoccupé par les répercussions de certaines questions liées aux finances, à l'aide sous forme de prêt, à la gestion monétaire et au coût de l'éducation permanente et du soutien de la famille pour l'ensemble de l'économie locale. Voici ce qu'on peut lire dans le rapport:

[TRADUCTION]

Le caporal Lagacé a constamment cohabité avec la même personne depuis sa visite à Kamloops (de janvier 1979 à juin 1982). Il n'y a aucune preuve indiquant que sa situation personnelle a nui à son travail, à sa formation ou à ses études.

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Le capitaine Gilman a dit que le potentiel du plaignant comme officier était moyen. Lors du dépôt de cette troisième demande, le plaignant avait accumulé cinquante-quatre crédits en vue de l'obtention d'un baccalauréat, ce qui représente près de deux années d'études universitaires. Le plaignant a dit que, le 13 février 1986, il a reçu un avertissement verbal d'un dénommé major Parent, son commandant, en présence d'un certain capitaine Cochran. Cet avertissement est en réalité un conseil verbal dont le texte a été déposé en preuve comme pièce HR-25 (ci-jointe). Ce conseil verbal concernait une entrevue que le plaignant avait accordée aux médias d'information au sujet de la plainte qu'il avait déposée auprès de la CCDP relativement à la politique d'hébergement des FAC et à sa situation de famille. Selon le plaignant, le major Parent lui aurait dit qu'il existait un mécanisme interne pour ce genre de plainte et que le plaignant aurait dû donner aux autorités suffisamment de temps pour leur permettre d'examiner la situation plutôt que d'exprimer aux médias un point de vue négatif au sujet de l'hébergement. Le plaignant a ajouté que le major Parent lui aurait dit ce qui suit :

[TRADUCTION]

«Cette question d'union libre assombrira ta carrière, Paul» (page 144).

Le plaignant a été avisé par son superviseur, l'adjudant-maître Carlyle, que sa troisième demande d'admission à titre d'officier n'avait pas été acceptée, parce qu'il ne convenait pas. Le plaignant a appris plus tard que, d'après une note déposée comme

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pièce R-2 par l'avocat de l'intimée, laquelle note avait été obtenue conformément à la Loi sur la protection des renseignements personnels et versée dans son dossier personnel, son rendement n'avait pas été suffisamment élevé pour lui permettre de devenir officier. C'est à ce moment que plusieurs rapports d'évaluation du rendement (RER) couvrant un certain nombre d'années ont été déposés comme pièces HR-13 (1983), HR-14 (1984), HR-15 (1985), HR-16 (1986), HR-17 (1987), HR-18 (1988), HR-19 (1982), HR-20 (1990) et HR-21 (1991).

En juillet 1986, le plaignant a été envoyé à Kamloops. Avant de quitter North Bay, il a demandé l'autorisation de se rendre à Kamloops pour se trouver une maison, parce qu'il n'y avait pas de logement familial disponible à Kamloops. Il a donc acheté une maison mobile et a demandé un emplacement pour maison mobile à la station de Kamloops, demande qui a été approuvée au début de mai 1986. Le jour de son départ de North Bay, peu après l'arrivée des déménageurs, le plaignant a été avisé que l'autorisation relative à un emplacement pour maison mobile avait été annulée. Le plaignant a dit qu'il rendrait l'affaire publique. Son superviseur lui a demandé du temps pour examiner la situation et, deux heures plus tard, le plaignant a reçu un autre message qui avait pour effet d'annuler le message précédent :

[TRADUCTION]

Oui, maintenant vous pouvez vous rendre à l'emplacement pour maison mobile. Lorsque MO Duval lui a demandé en quoi ces événements indiquent ce que le major Dunsdon pensait de lui, il a répondu en

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ces termes à la page 156:

[TRADUCTION]

Il a organisé tout ça le message venait de Kamloops et avait été envoyé sous ses ordres par la salle de rapport de la base ou de la station. Je crois qu'il n'y a pas -- je veux dire, il ne m'a pas téléphoné, il a simplement envoyé le message par l'entremise de la salle de rapport. Le plaignant a ensuite décrit les procédures d'entrée suivies à Kamloops et a dit qu'il n'y a pas eu de réception pour souligner son arrivée et que, habituellement, il aurait dû rencontrer le commandant, mais ça n'a pas été le cas. Il a ajouté (ce qui ne s'inscrit pas dans la chronologie des événements) que, lorsqu'une personne quitte une base, on lui remet une plaque du mess ou que, dans le cas de Kamloops, un certificat a été remis à tous pour leur participation à la station radar comme derniers militaires actifs. Un certificat photocopié a été déposé comme pièce HR-22; selon le plaignant, ce certificat n'avait pas été signé et, normalement, le major Dunsdon aurait dû le signer. Le plaignant a ajouté que 62 autres personnes ont reçu des certificats signés.

Le plaignant a ensuite poursuivi son témoignage en disant que le major Dunsdon a signé le RER concernant l'année 1986 (pièce HR-16) le 27 janvier 1987. Il s'agit d'un rapport très positif de la part de son superviseur, l'adjudant Hayes. Le major Dunsdon a écrit ce qui suit :

[TRADUCTION]

Le caporal Lagacé a fait montre d'un très grand degré de compétence et d'un grand désir d'exceller dans tout ce qu'il entreprend. Il se classe septième sur les 32 caporaux de

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cette station et deuxième dans son métier.

Il a aussi été mis en preuve que le plaignant avait refusé de signer ce RER. En conséquence, le major Dunsdon a adressé une lettre, la pièce HR-23, en date du 3 février 1987 au Quartier général de la Défense nationale (ci-jointe). Le plaignant a aussi dit que, lorsqu'il a obtenu des documents conformément à la Loi sur la Protection des renseignements personnels, il a trouvé un message en date de juillet 1987 au sujet d'un grief qui avait été [TRADUCTION] déposé auprès de ce Quartier général et il a dit qu'il était étonné que ce document se trouve dans son dossier personnel, étant donné qu'un grief n'est jamais lié à un dossier d'évaluation du rendement ou à un RER confidentiel. Il n'y a aucune preuve indiquant de quel quartier général il s'agit et, à tout événement, cette preuve n'est pas utile.

Le plaignant a dit qu'en novembre 1987, il a rempli une demande d'admission au Programme de formation des aspirants-officiers (PFAO), qui a été déposée comme pièce HR-24. Il a mentionné qu'il n'était pas utile de demander l'adhésion au Programme de formation universitaire, parce qu'il en était à peu près à sa quatrième année d'études universitaires et qu'il n'était pas nécessaire de détenir un diplôme universitaire pour adhérer au PFAO. Il a ajouté qu'il souhaitait devenir officier dans les domaines de l'administration du personnel, de la logistique ou de la sécurité. Le capitaine Halpen, le superviseur du plaignant, a dit à celui-ci qu'il serait utile de demander l'autorisation d'adhérer au PFUH, ce qui est la

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raison de la demande d'adhésion au PFAO. Le litige en l'espèce porte principalement sur cette demande et sur les événements qui y sont reliés. La demande écrite, qui découle de l'ordonnance administrative des Forces canadiennes 9-26 (OAFC 9-26) et qui est déposée comme pièce HR-34, comporte un formulaire à remplir ainsi qu'un énoncé de la politique et de la procédure régissant ce programme. Le formulaire se compose de trois parties. La partie 1 doit être remplie par le requérant, la partie 2, par un médecin militaire et la partie 3, par le commandant du requérant. D'après la pièce HR-24 ci-jointe, la partie 3 a été remplie par le commandant du plaignant, le major R.J. Dunsdon, le 4 janvier 1988. Le major Dunsdon n'a pas recommandé l'adhésion du plaignant, écrivant plutôt ce qui suit :

[TRADUCTION]

Je recommande que le plaignant fasse l'objet d'au moins une ou deux évaluations comme caporal-chef avant d'être recommandé aux fins du PFAO.

Pour sa part, le plaignant dit qu'il avait alors travaillé pendant dix-huit mois sous les ordres du major Dunsdon, soit de juin 1986 à janvier 1988, sans commettre d'infraction ou déposer de plainte. Le plaignant aurait été avisé par l'adjudant Hayes que le major Dunsdon avait refusé la demande; il a alors obtenu un rendez-vous avec celui-ci et cette rencontre a eu lieu le 7 janvier 1988 dans le bureau du major. Voici ce que dit le plaignant au sujet de cette rencontre, aux pages 183 à 185 :

[TRADUCTION]

Q Et de toute évidence, il ne recommande pas que votre demande soit étudiée plus à fond; est-ce que vous lui avez demandé pourquoi il avait fait cette recommandation-là?

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R Oui, je lui ai demandé.

Q Et qu'a-t-il répondu?

R Il a parlé pendant quelque temps; il m'a dit, entre autres choses, que le fait d'avoir formulé une plainte à l'encontre du système jetait de l'ombre sur mes qualités d'officier et que, pour devenir officier, je dois respecter les règlements, que je les approuve ou non.

Q D'accord; j'aimerais maintenant que nous nous arrêtions une seconde; quand il parle des plaintes formulées en dehors du système, de quelles plaintes parle-t-il?

R Je suppose qu'il faisait allusion, à l'époque, à la plainte que j'avais formulée à l'encontre du fait que l'union libre n'était pas reconnue aux fins de l'hébergement.

Q D'accord; alors...

R Alors je lui ai posé une question à ce sujet et il m'a dit, pourquoi ne vous mariez-vous pas pour éviter tous ces problèmes.

Q Il a dit ça?

R Oui.

Q Maintenant, à l'époque, lorsqu'il vous a parlé au sujet du fait que vous vous étiez plaint en dehors du système, quelles autres plaintes aviez-vous formulées en dehors du système, à l'exception de la plainte sur les droits de la personne qui était alors en cours?

R La seule fois où une plainte a été formulée en dehors du système a été la plainte déposée auprès de la Commission des droits de la personne au sujet de l'hébergement et, à un certain moment, la déclaration faite aux médias en 1986.

Q Maintenant, dans quel contexte a-t-il dit pourquoi ne vous mariez-vous pas pour éviter tous ces problèmes?

R Le contexte était le fait que l'union libre était tout simplement inacceptable.

Q D'accord. A-t-il fait d'autres commentaires?

R Nous avons discuté pendant quelque temps, mais rien de vraiment spécial n'a été dit; de façon générale, on m'a dit [TRADUCTION] on vous désapprouve en raison de votre situation.

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Le plaignant a ensuite dit qu'il a rencontré le lieutenant Jodoin, qui remplaçait temporairement le capitaine Halpon, parce qu'il voulait voir le capitaine Belec, l'officier responsable du personnel de la base à Chilliwack. Voici ce que le plaignant dit au sujet de cette entrevue aux pages 186 et 187:

[TRADUCTION]

R Je lui ai demandé, fondamentalement, ce que je pouvais faire pour devenir officier, puisque c'était la quatrième fois que ma demande était rejetée à différents niveaux.

Q Oui?

R Et il m'a dit que j'étais considéré comme un fauteur de trouble.

Q Oui?

R Et que, pour cette raison, la question de ma situation de famille, de ma vie personnelle, était un facteur dont on tenait compte lors de l'étude de ma demande.

Q A-t-il fait un commentaire précis au sujet de votre situation de famille?

R Il a dit que, comme j'avais une conjointe de fait, le mess des officiers, je présume, agit différemment. Je n'ai jamais participé aux activités du mess des officiers. Cependant, d'après ce qu'il a dit, j'ai cru comprendre que ma conjointe ne serait pas acceptée d'emblée parmi les officiers.

Le plaignant a également témoigné au sujet de la rencontre qu'il avait eue avec le capitaine Belec au début de mars 1988 concernant une revue de carrière. ce témoignage apparaît à la page 192 :

[TRADUCTION]

Il a expliqué que la revue de carrière était plutôt démodée, je suppose, et il a ajouté que, en ce qui a trait à ma candidature en vue de devenir officier, j'avais commis une erreur en discutant d'un problème avec les médias, que ça nuisait en fait à ma carrière.

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J'en arrive maintenant au témoignage en chef du major Dunsdon, le premier témoin de l'intimée. Le major Dunsdon s'est retiré de l'armée en 1988, dès la fin de sa période de service comme commandant de la station de Kamloops. Il est entré en fonction en 1962 comme pilote et, depuis, il a participé à de nombreux programmes d'aviation, il a fait une période de service en Europe, il a été instructeur, il s'est occupé de planification opérationnelle et de formation du personnel, il a été commandant d'un escadron, officier d'état-major et, finalement, commandant de la station de Kamloops. Lorsqu'il était commandant, il était chargé des activités liées à la fermeture de la station qui se déroulaient à l'époque où le plaignant a déposé la plainte dont il est question en l'espèce. Il avait sous ses ordres 110 membres du personnel militaire, dont 32 caporaux, et de 55 à 60 civils. Il a entendu parler du plaignant pour la première fois lorsque celui-ci a été muté de North Bay à Kamloops et qu'un problème s'est posé au sujet d'un emplacement pour maison mobile. Il a dit qu'il ne connaissait pas le plaignant auparavant. Il y avait à l'époque cinq ou six emplacements pour maison mobile dont quelques-uns étaient utilisés par des civils. Lors de la réception de l'avis de fermeture de la station, on avait commencé à restreindre l'arrivée de maisons mobiles en raison des problèmes occasionnés par ladite fermeture. Lorsque le sergent Black, l'adjoint de l'adjudant de la station, dont les fonctions comprenaient les services d'hébergement, l'a avisé que le caporal-chef Lagacé aurait un problème puisqu'il avait compris qu'un emplacement pour maison

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mobile avait été réservé, le major Dunsdon a immédiatement décrété une exception et mis un emplacement à la disposition du plaignant. Il a insisté sur le fait qu'il n'avait pas reçu d'ordre ou de directive l'enjoignant d'exclure le plaignant :

[TRADUCTION]

absolument pas. En fait, c'est plutôt l'inverse. J'ai modifié l'ordre, la recommandation qui était en vigueur à la station à l'époque, pour lui permettre d'installer sa maison mobile (page 301). Ce témoignage est entièrement incompatible avec la perception du plaignant, selon lequel le major Dunsdon est à l'origine du problème concernant l'emplacement. J'accepte le témoignage du major Dunsdon sur ce point et je suis d'avis que la suggestion du plaignant est dénuée de tout fondement. Je ne comprends pas comment le plaignant peut formuler pareille suggestion, compte tenu de la connaissance qu'il avait du système, de l'expérience qu'il avait vécue dans le cadre de différentes affectations, y compris une affectation antérieure à Kamloops, du fait qu'environ 110 membres du personnel militaire, dont 32 caporaux, relevaient du major Dunsdon et qu'aucun d'eux ne connaissait le plaignant antérieurement.

En ce qui a trait à la pièce HR-22, le certificat présenté au plaignant, le major Dunsdon explique qu'il ne se souvient pas, mais qu'il l'aurait signé s'il s'était trouvé sur son bureau. Il se rappelle avoir signé [TRADUCTION] un nombre élevé de documents de ce genre, soit environ 10 ou 20 par jour. Lorsqu'on lui a demandé

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s'il se rappelait ne pas l'avoir signé parce qu'il n'aimait pas le plaignant, il a répondu en ces termes à la page 301 :

[TRADUCTION]

R Absolument pas. En fait, c'est plutôt l'inverse. J'ai modifié l'ordre, la recommandation qui était en vigueur à la station à l'époque, afin de lui permettre d'installer sa maison mobile.

Q D'accord. Je vous demande d'examiner la pièce HR-22, qui est un certificat d'adieu. Reconnaissez-vous ce certificat?

R Oui, absolument; il a été préparé par quelques-unes des personnes qui se trouvaient à la station en guise de souvenir pour chacune des dernières personnes qui ont travaillé là juste avant la fermeture de la station.

Q D'accord. Et ce certificat en particulier est celui du caporal-chef Lagacé. L'avez-vous déjà vu auparavant?

R Je ne me rappelle pas avoir vu précisément celui-ci auparavant, non.

Q D'accord. Vous remarquerez, au bas du certificat, dans le coin, qu'il y a un espace réservé pour la signature du commandant.

R Oui.

Q Vous étiez là, est-ce que vous auriez dû signer ce certificat?

R S'il s'était trouvé sur mon bureau. Je me rappelle avoir signé un nombre élevé de documents de ce genre. En fait, ma secrétaire m'en apportait environ 10 ou 20 par jour, parce que ma signature devenait un peu tremblotante lorsque j'essayais d'en signer davantage.

Q Vous rappelez-vous ne pas l'avoir signé parce que vous n'aimiez pas le caporal-chef Lagacé?

R Absolument pas. Je ne me rappelle pas exactement quand cela s'est produit, mais je crois que le caporal-chef Lagacé a quitté la station un peu plus tôt. Il se peut qu'il l'ait reçu avant, en fait, ils étaient tous signés. Je pense que ces certificats ont été distribués au cours du dernier dîner régimentaire, une des fonctions officielles qui se déroulent lorsque nous fermons la station.

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Il a dit que, s'il était autorisé à le faire, il le signerait et qu'il s'excuserait de ne pas l'avoir fait. J'accepte également ce témoignage. A mon avis, en déposant cette pièce, la Commission tente simplement, en vain, de démontrer que le major Dunsdon avait un parti-pris contre le plaignant.

En ce qui a trait aux procédures d'entrée qui étaient en vigueur à la station de Kamloops et dont le plaignant a parlé, le major Dunsdon a dit qu'il était normal pour lui de rencontrer les nouveaux arrivants. Il a dit qu'il ne se rappelait pas avoir eu une rencontre de cette nature avec le plaignant. Voici comment il s'exprime :

[TRADUCTION]

Il se peut que ce soit un simple oubli. C'était pendant l'été. Je n'étais peut-être pas là, soit parce que j'étais en congé ou que j'exerçais une fonction ailleurs à l'époque (page 303).

Il ne se rappelle pas qu'on lui ait demandé explicitement de rencontrer le plaignant, que cette demande lui ait été communiquée par le plaignant lui-même ou par la voie hiérarchique. Si une demande de cette nature avait été formulée, il aurait rencontré Lagacé :

[TRADUCTION]

Absolument. J'avais habituellement pour politique de rencontrer tout le monde (page 303).

Lorsqu'on lui a montré la pièce HR-16, le major Dunsdon a reconnu qu'il s'agissait là du premier RER du plaignant comportant sa signature. Il a ajouté qu'il a sans doute lu les commentaires avant de signer le rapport. Il a indiqué qu'il s'agissait d'un excellent rapport et que le plaignant [TRADUCTION] se classait parmi les premiers chez les caporaux de la station et,

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en fait, c'est probablement grâce à ce rapport qu'il a été promu caporal-chef (page 305). Le major Dunsdon se rappelle que le plaignant a refusé de signer le RER, estimant que ce document ne traduisait pas fidèlement ce qu'il avait fait jusqu'à ce stade. Le major Dunsdon a dit au cours de son témoignage qu'on a expliqué au plaignant que la signature d'un RER ne signifiait pas nécessairement l'acceptation de celui-ci. Lorsqu'on lui a montré la pièce HR-23, le major Dunsdon a expliqué que la procédure normale consistait à demander à chacun de signer son RER et que, si la personne concernée refusait, il fallait inscrire que la personne avait vu le rapport et avait été informée de son contenu. Voici ce que le major Dunsdon dit au sujet de la dernière phrase du paragraphe 3 de ce document (page 308):

[TRADUCTION]

R Parce que j'estimais que c'était la réalité à l'époque, je présume. Il n'y avait pas ... Je n'avais pas beaucoup de liens avec le caporal Lagacé, mais tout ça est survenu en plus de, je crois que j'avais vu son dossier de RER, qui comportait certains avertissements de North Bay au sujet du fait qu'il avait communiqué avec la presse alors qu'on lui avait demandé de ne pas le faire, ou quelque chose du genre.

Dans l'ensemble, après avoir parlé à son adjudant, j'ai eu l'impression qu'il avait tendance à se montrer contestataire sur certains points et j'ai consigné ça au dossier, pour m'assurer que ce commentaire serait inscrit.

Le major Dunsdon a ajouté que, lorsqu'il a rédigé la lettre, il avait à l'esprit le conseil verbal dont il a été question plus tôt ainsi que les commentaires que lui avait formulés l'adjudant Hayes, le superviseur du plaignant, au sujet du fait qu'il était

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contestataire. L'adjudant Hayes, qui voyait le plaignant tous les jours, avait dit au major Dunsdon que le plaignant était contestataire sur certains points. Le major Dunsdon a ensuite dit qu'il se rappelait que le plaignant avait déposé une demande d'adhésion au PFAO, demande qui est le principal point en litige en l'espèce. Il a dit que la demande devait franchir trois niveaux de la voie hiérarchique, soit l'adjudant du plaignant, l'adjudant de la station et un capitaine, avant de lui être présentée. Le major Dunsdon ne se souvient pas des recommandations qui ont été faites, mais il se rappelle en avoir parlé avec l'adjudant Hayes. Il a dit qu'il avait reçu des recommandations écrites qui n'étaient pas très fortes. Un des facteurs dont il fallait tenir compte était le potentiel de leadership, qu'il était difficile d'évaluer pour l'instant, puisque le plaignant venait d'être promu caporal-chef, ce qui correspond au premier niveau de commandement dans l'armée. Il a dit que, en l'absence d'un appui très marqué, il reporterait une recommandation jusqu'à ce que les aptitudes de leadership du plaignant puissent être évaluées, bref, jusqu'à ce que d'autres RER soient préparés. En ce qui a trait aux commentaires qu'il a formulés relativement au fait que le plaignant avait tendance à contester ou à ignorer le système, le major Dunsdon a fait état de trois raisons, soit le conseil verbal existant, le refus du plaignant de signer son RER et certains incidents relatés par le superviseur du plaignant. Le major Dunsdon a dit qu'il n'avait pas eu une réaction exagérée à cet égard. Comme commandant, il n'a pas de liens directs avec les hommes et doit donc, lorsqu'il formule

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des recommandations, se fonder sur le dossier de la personne concernée, sur des discussions avec les superviseurs et sur les RER. Dans ce cas-ci, le RER concernant le plaignant comme caporal-chef ne le plaçait pas en tête de liste, même s'il avait un excellent dossier comme caporal. Il se classait 6e ou 7e parmi les 32 caporaux de la station, ce qui lui a valu d'être promu caporal-chef. Le major Dunsdon a expliqué qu'une cote légèrement inférieure dans le RER du plaignant comme caporal-chef était normale, parce que ses superviseurs immédiats ont eu très peu de temps pour l'évaluer à ce titre. Il est normal que le premier RER d'une personne à un titre donné soit inférieur aux RER suivants, mais le résultat devrait être supérieur au fur et à mesure que les aptitudes de la personne progressent à ce titre. Ce témoignage, dans le cas du plaignant, est appuyé par les huit RER se rapportant aux années 1983 à 1988, 1990 et 1991, soit les pièces HR-13 à HR-18, HR-20 et HR-21.

Le major Dunsdon a signé la demande d'adhésion au PFAO, soit la pièce HR-24, le 4 janvier 1988 et, après avoir eu un entretien avec le plaignant le 7 janvier de la même année, il a dit ce qui suit aux pages 313 et 314 :

[TRADUCTION]

R Après l'avoir signée, j'ai fait venir le caporal-chef Lagacé, je lui en ai parlé et je l'ai déposée dans ma corbeille de sortie. Mon personnel administratif devait s'en occuper, d'une façon ou d'une autre. Je ne sais pas très bien comment on aurait procédé. Bien entendu, elle aurait dû automatiquement être acheminée au niveau supérieur et faire l'objet d'une approbation et d'une recommandation.

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Si j'avais été d'accord, elle aurait franchi les différents niveaux concernés de la voie hiérarchique. Dans ce cas-ci, où je demandais un délai, suivi d'une évaluation un peu plus tard, je ne sais pas.

Le major Dunsdon avait demandé de rencontrer le plaignant, parce qu'il estimait qu'il lui devait des explications au sujet de sa décision. Il a précisé que, pendant l'entretien, le plaignant s'est montré très ennuyé et le major Dunsdon lui a dit qu'il pourrait demander par écrit au commandant de Halberg de revoir la demande dans un délai d'un an. Le major Dunsdon a ajouté que l'affectation à Halberg a été modifiée avant le départ du plaignant, de sorte qu'aucune lettre n'a été envoyée. on a ensuite montré au major Dunsdon le paragraphe 3 de la pièce HR-7, soit la plainte modifiée, et on lui a demandé s'il avait formulé les commentaires qui y figurent. Voici comment il s'exprime à ce sujet (pages 316 et 317) :

[TRADUCTION]

R La situation de famille est un facteur. Nous en avions parlé, et on examine l'ensemble de la personne, notamment si elle doit suivre la formation en vue de devenir officier. vous savez, je n'ai pas dit de façon précise que sa situation de famille à l'époque était un facteur.

Q Mm-hmm?

R Nous avons ensuite brièvement parlé de certains autres aspects. J'ignore quels étaient les mots exacts, mais le caporal-chef semblait avoir des problèmes sur certains points qui revenaient à ce qu'il percevait comme un problème lié au fait qu'il vivait en union libre.

Q MM-Hmm? R Alors, je lui ai dit quelque chose du genre [TRADUCTION] Pourquoi ne vous mariez-vous pas?

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Q Vous avez dit ça; pourquoi?

R C'était une question. Et je ne me rappelle pas exactement quelle a été sa réponse, mais je crois qu'il a dit qu'il ne voulait pas se marier ou qu'elle ne voulait pas se marier.

Q Était-ce parce que vous désapprouviez les unions de fait?

R Absolument pas. En fait, le monde évolue bien rapidement de nos jours. Bon nombre de mes collègues et d'officiers supérieurs de l'armée vivent en union libre. En fait, je dirais qu'à l'époque, de 15% à 20% des membres du personnel de la station de Kamloops vivaient en union de fait, que cette situation ait été confirmée ou non au fil des années.

Q Est-il juste de dire qu'aujourd'hui, tout comme c'était le cas en 1987, vous ne vous opposez pas aux unions de fait?

R Absolument pas.

Q Et plus précisément, la recommandation que vous avez rédigée sur la demande d'adhésion au PFAO de novembre 1987 n'était nullement fondée sur l'état matrimonial du caporal-chef Lagacé?

R Absolument pas.

J'en arrive maintenant au témoignage en chef du capitaine François Jodoin, le témoin suivant de l'intimée qui, en 1988, était lieutenant à Kamloops, plus précisément officier - normes et entraînement. Il ne se rappelle pas avoir eu un entretien avec le plaignant au début de janvier 1988. Il a dit qu'il comprenait le plaignant. Sa responsabilité consistait à veiller à ce que la partie supérieure du formulaire soit remplie conformément aux OAFC, lequel formulaire serait ensuite expédié au commandant. Il n'avait aucune responsabilité liée à la pièce HR-24 une fois que la partie 3 était remplie. Il a dit que, dès que le commandant avait rempli le formulaire, celui-ci était envoyé à l'OSP de la base à

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Chilliwack depuis la salle de rapport de la station. Voici ce qu'il a dit en dernier lieu à ce sujet (pages 382 et 383) :

Q D'accord. Avez-vous dit au caporal-chef Lagacé, le 7 janvier, que votre vie personnelle est examinée de très près lorsque vous êtes officier? R Je ne me rappelle pas.

Q Avez-vous dit au caporal-chef Lagacé que sa conjointe ne serait pas bien admise dans le mess des officiers?

R Je n'ai pas dit ça.

Q Comment savez-vous que vous ne l'avez pas dit?

R Parce que je vivais une situation semblable moi-même.

Q A votre avis, votre conjointe était-elle bien admise?

R Certainement.

Le contre-interrogatoire du capitaine Jodoin par Me Duval a été très bref. Jodoin ne se rappelle pas avoir eu un entretien avec le plaignant; il a mentionné qu'à l'automne de 1987, peu de demandes d'adhésion au PFAO avaient été présentées et que celle du plaignant aurait pu être envoyée à Chilliwack, même si le commandant n'en recommandait pas l'acceptation. Il a dit qu'il vivait encore en union de fait, ce qui ne constituait pas un problème, et qu'il ignore si d'autres personnes éprouvent des difficultés sur ce plan.

Le reste de son témoignage qui est pertinent est tiré des pages 385 et 386 27

[TRADUCTION] Q D'accord. Au cours de votre entretien avec Lagacé, lui avez-vous laissé entendre que le fait de vivre en union libre pouvait lui causer des problèmes?

R Je n'ai pas dit ça.

Q Étes-vous certain?

R Je suis certain. Je n'ai pas dit que le fait de vivre en union libre pouvait être un problème parce que --

Q Est-ce possible que vous l'ayez dit?

R Je dis que c'est impossible.

Q C'est impossible?

R Parce que je vivais une situation semblable moi-même.

Q Très bien.

R Et je n'ai rencontré aucun problème.

Q Avez-vous dit quoi que ce soit à Lagacé au sujet de ses divers griefs et plaintes dans le cadre de cet entretien; avez-vous dit que c'était là une des raisons pour lesquelles sa demande n'était pas approuvée?

R Non.

Q Non. Ce n'est pas possible que vous ayez dit ça?

R Ce n'est pas possible.

Q Avez-vous laissé entendre, au cours de l'entretien que vous avez eu avec Lagacé, que lorsqu'une personne n'est pas d'accord, elle devrait se retirer ou se conformer à la politique? Avez-vous dit ça, oui ou non?

R Non.

Q Non? Avez-vous dit à Lagacé : [TRADUCTION] Nous ne voulons pas de fauteur de trouble chez les officiers?

R Je n'ai pas dit ça.

Je commente maintenant le contre-interrogatoire du plaignant par Me Rennie, avocat de l'intimée.

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Lorsqu'on lui a montré la pièce HR-24, le plaignant a convenu que le major Dunsdon avait formulé des commentaires positifs dans son évaluation et sa recommandation en ce qui a trait à la formation, au travail de bénévole, à la forme physique et aux activités sportives du plaignant. Voici ce qu'il dit à la page 219 :

[TRADUCTION]

Le major Dunsdon ne s'est pas montré particulièrement négatif au sujet de mon rendement ou de ce que j'avais accompli. Il a également convenu que l'évaluation du major Dunsdon en était une qu'il avait le droit de faire et qu'elle n'était pas déraisonnable, même si elle n'était pas nécessaire, tout en admettant que c'était là une question d'opinion. Il a reconnu que le leadership et le potentiel nécessaire pour devenir officier sont des qualités subjectives à évaluer. Il a mentionné qu'il ne pouvait interpréter les intentions du major Dunsdon lorsqu'on lui a demandé s'il était déraisonnable pour le major de demander une preuve de bon rendement pendant un an relativement au nouveau poste qu'il occupait. Il n'a pas déposé de plainte dès qu'il a vu la recommandation du major Dunsdon. Après la rencontre du 7 janvier 1988, au cours de laquelle le major Dunsdon lui a reproché de contester ou d'ignorer le système, il a été incité à croire que le major Dunsdon présumait que son grief et la plainte qu'il avait déposée auprès de la CCDP nuisaient à sa carrière. Il a reconnu que c'était là une supposition. Il n'était pas d'accord avec la politique interdisant à un membre de lire les commentaires narratifs consignés dans un RER. Il a aussi reconnu qu'il avait peut-être eu tort de présumer que le major Dunsdon a été influencé

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négativement par le grief qu'il avait déposé. Il ignorait ce que le major Dunsdon pensait lorsqu'il a formulé la recommandation. Il a convenu que l'armée tient compte de la stabilité, des liens familiaux et de facteurs comme la situation financière, l'alcoolisme, la pharmacodépendance, le jeu, etc. et a admis que son dossier faisait état de problèmes de gestion financière. Il a rencontré des officiers qui sont mariés, divorcés, veufs ou célibataires ou qui vivent en union de fait. Il a admis avoir déposé la plainte (pièce HR-6) le lendemain du jour où il a appris du capitaine Belec, l'OSP de Chilliwack, que sa demande n'avait pas été acheminée et après avoir été reconnu coupable, le 28 avril 1988, d'avoir enfreint un ordre direct. Il a admis aussi avoir déposé la plainte cinq mois après sa demande d'adhésion au PFAO. Il n'a pas demandé au major Dunsdon pourquoi sa demande n'était pas présentée aux instances supérieures. Il a présumé que c'était parce que le major Dunsdon n'aimait pas les gens qui vivaient en union de fait. Lorsque j'ai ordonné au plaignant de répondre à la question, il a admis qu'il n'a pris aucune mesure pour s'assurer que sa demande serait envoyée à Chilliwack lorsqu'il a appris qu'elle ne l'avait pas été. Il ne savait pas si la fermeture imminente de la station et les problèmes administratif s qui en résultaient étaient les raisons pour lesquelles la demande n'avait pas été acheminée. Il a présumé que le major Dunsdon avait personnellement veillé à ce que la demande ne soit pas envoyée à Chilliwack, mais il a admis qu'il était possible que [TRADUCTION] ce soit accidentel.

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Il a admis qu'il n'était pas logique de dire que le major Dunsdon voulait ruiner sa carrière alors que celui-ci avait formulé des commentaires positifs dans ses RER de 1986 et 1988, soit respectivement les pièces HR-16 et HR-18. Il a convenu également que, si le major ne l'avait pas aimé pour des raisons liées à sa situation de famille et qu'il avait voulu ruiner sa carrière, il n'aurait pas formulé de tels commentaires. En outre, a-t-il dit, l'évaluation par le major Dunsdon de son attitude en ce qui a trait au respect des règles est une évaluation subjective. Lorsque, un an plus tard, un autre major qui se trouvait à une base différente a dit du plaignant que son indifférence occasionnelle à l'égard des règlements et des ordres traduisait un manque de discernement et un mauvais jugement, c'était là une évaluation semblable à celle que le major Dunsdon avait faite. Il a admis aussi que, lorsque le major Dunsdon lui a proposé de faire parvenir au commandant d'une autre base une lettre à l'appui de sa demande, c'était là une offre généreuse. Il a convenu qu'il était possible que le refus de sa demande n'ait rien à voir avec son état matrimonial, mais qu'il soit plutôt lié au bien-fondé de sa demande. Il a reconnu qu'il avait eu tort de penser qu'il serait libéré en 1984 par suite de la conversation qu'il avait eue avec le major Nickerson. voici comment il s'exprime à la page 249 :

[TRADUCTION]

R Je crois que, lorsque le major Dunsdon a appris que je vivais en union libre et que j'avais communiqué avec les médias, il a décidé de m'exclure de la station.

31

L'avocat de l'intimée a déposé comme pièce R-1 une lettre en date du 16 décembre 1983; il s'agit d'une lettre dans laquelle le lieutenant-colonel B. Grieves, le commandant du plaignant en 1983, lui faisait savoir que sa demande d'adhésion au PFUH ne serait pas réexaminée. Le plaignant a reconnu que ce document indique que sa demande a été rejetée pour des raisons liées au mérite et à la concurrence. Il a reconnu qu'il y avait des raisons valables de rejeter sa demande d'adhésion au PFUH en 1986. Il a aussi admis que sa candidature présentée en 1990 n'a pas été rejetée en raison de son état matrimonial, mais pour le motif qu'elle avait été traitée trop tard. Il a ajouté que, à cet égard, il a été évalué et considéré comme un candidat inapproprié. Tout au long de sa carrière militaire, a-t-il dit, il a été bien traité à plusieurs égards. Il a reconnu aussi que certaines choses tristes se produisaient et faisaient partie de la vie. En ce qui a trait au conseil verbal, la pièce HR-25, il a dit qu'il avait le droit de se présenter devant les tribunaux de ce pays et que personne ne l'en empêcherait, mais que la cause devrait être débattue devant le Tribunal et non devant les médias. Il a admis que, selon une politique de l'armée, il devait s'abstenir de communiquer avec les médias sans l'autorisation de son commandant. Il a aussi reconnu qu'il n'aurait peut-être pas réussi à suivre le PFAO et qu'il n'y avait aucune garantie de succès. Il a ajouté qu'il savait qu'il ne serait pas accepté comme candidat en vue de devenir officier et qu'il a suivi des études universitaires pour s'assurer d'un emploi

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lorsqu'il serait libéré en 1994. Il s'est prévalu de toutes les possibilités et de tous les avantages dont il disposait.

Lors du réinterrogatoire, comme le plaignant avait attendu cinq mois avant de déposer une plainte (voir plus haut), ce qui laissait sous-entendre une possibilité de fabrication, Me Duval a soutenu qu'il avait le droit de présenter de la preuve supplémentaire. Me Rennie ne s'est pas opposé. J'ai décidé que Me Duval avait le droit de présenter de la preuve, y compris des documents à l'appui de celle-ci. Il a donc déposé la pièce HR-32, soit une lettre en date du 2 février 1988 que le plaignant a adressée à Barbara Westerman, l'enquêteurs précédemment mentionnée. Cette lettre est jointe à la présente décision.

A ce stade de la présentation de la preuve, après une discussion sur la question de savoir si les intérêts du plaignant et de la Commission étaient identiques, le plaignant, qui avait quitté la barre, s'est exprimé en ces termes à la page 293 :

[TRADUCTION]

LE TÉMOIN : Monsieur, je n'ai aucun problème à ce sujet. Ce que je désirais, en déposant la plainte, c'était régler un problème. Ce n'était pas vraiment pour moi.

J'examine maintenant le contre-interrogatoire du major Dunsdon, qui figure aux pages 318 à 376 et qui était plutôt long. Je dois dire que le major Dunsdon s'en est très bien tiré, même si les événements en litige sont survenus quelque quatre ans plus tôt.

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Au cours de ce contre-interrogatoire, Me Duval a fait allusion à une déclaration ou à des notes qu'a préparées une certaine Barbara Westerman, enquêteurs ou agente de la CCDP, après l'entrevue qu'elle a eue avec le major Dunsdon le 12 décembre 1989. Le major Dunsdon a dit que, après la préparation des notes en question, [TRADUCTION] Je ne les ai pas lues, mais je les ai passées rapidement en revue et j'ai signé .... Il a reconnu qu'il avait paraphé chaque page. Lorsque je l'ai interrogé, le major Dunsdon a mentionné qu'il a discuté avec l'enquêteurs pendant quatre ou cinq heures et que, à la fin de l'entrevue, on lui a montré la déclaration; après l'avoir passée rapidement en revue, il a convenu que c'était là essentiellement ce qu'il avait dit. Il a dit que la déclaration avait été écrite de la main de l'enquêteurs, que celle-ci a relu certains éléments spéciaux et qu'il a paraphé chaque page et signé le document. Personne d'autre n'était présent et il n'était pas sous serment.

Cette déclaration n'a pas été déposée en preuve et l'avocat de la commission l'a simplement utilisée à certains moments du contre-interrogatoire du major Dunsdon. Celui-ci a alors confirmé avoir dit ce qui suit [TRADUCTION] Pourquoi ne vous mariez-vous pas pour éviter tous ces problèmes?, tout en précisant que cette question a été posée au cours d'une conversation générale. Lorsqu'on lui a montré la déclaration qu'il avait faite à l'enquêteurs, il a dit qu'il était d'accord avec la deuxième phrase du premier paragraphe complet, dont le texte est le suivant :

34

[TRADUCTION]

Ce n'est que lorsque j'ai eu une conversation avec Lagacé au printemps de 1988 au sujet de sa candidature en vue de devenir officier que j 'ai appris pourquoi il ne voulait pas se marier. Je lui ai demandé de but en blanc pourquoi il ne se mariait pas pour éviter ces problèmes ...

Lorsqu'on lui a demandé quels étaient, à son avis, les problèmes que Lagacé éviterait, il a répondu ce qui suit à la page 321 :

[TRADUCTION]

R Il semblait avoir des problèmes sur ce point. Il estimait que cela le touchait et que ça nuisait à sa carrière, en raison de la perception qu'il avait au sujet du fonctionnement dans l'armée.

Q Avez-vous dit à Lagacé, au cours de cette rencontre, que les choses seraient plus simples pour lui s'il se mariait?

R J'ai probablement laissé sous-entendre que cela lui simplifierait la vie.

Le major Dunsdon a reconnu qu'il a fait la déclaration suivante à l'enquêteurs (page 322) :

[TRADUCTION]

Il aurait été beaucoup plus simple pour lui de ne pas avoir à lutter chaque fois qu'il faisait quelque chose; c'était ça ou se retirer de l'armée, af in que son état matrimonial n'ait pas de conséquence de cette nature.

Il a ensuite dit ce qui suit à Me Duval :

[TRADUCTION]

R Je ne crois pas avoir dit ça dans le contexte où c'est relaté ici. Nous avons eu une discussion générale au sujet de son orientation. De toute évidence, il voulait, il avait fait des études de façon très sérieuse déjà à ce moment-là et il voulait suivre une formation d'officier dans l'armée.

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Cependant, il a reconnu que les commentaires formulés à l'enquêteurs traduisaient bien le contenu de la discussion et que l'enquêteurs n'a pas commis d'erreur en citant mal ce qui lui avait été dit. Il a ensuite ajouté ce qui suit aux pages 323 à 327 :

[TRADUCTION]

Q D'accord. Allons maintenant à la page 8 de la déclaration. J'aimerais que vous aidiez le Tribunal à comprendre la phrase suivante :

[TRADUCTION] ... ou se retirer de l'armée afin que son état matrimonial n'ait pas de conséquence de cette nature.

Quelle était votre idée, Monsieur? Et en quoi son état matrimonial était-il pertinent quant à sa carrière militaire? Quel effet avait-il, à votre avis?

R A mon avis, le principal effet qu'il avait, c'était sur le plan de sa perception.

Q Sa perception?

R Oui.

Q Mais, dans votre déclaration, vous lui proposez, vous lui proposez un choix. Tais-toi et conforme-toi aux règles ou quitte les Forces armées de façon à éviter tout problème lié à ton état matrimonial, c'est ça que vous lui dites, n'est-ce pas?

R C'est ce qui s'est dit, dans l'ensemble.

Q Maintenant, vous parlez --- pardon, je ne voulais pas vous interrompre. Si vous voulez dire quelque chose, allez-y. Nous avons maintenant devant nous un homme qui, selon votre témoignage, semble avoir une perception erronée, c'est-à-dire qu'il croit à tort que son état matrimonial constitue un problème. Et vous êtes là pour en discuter avec lui. Et vous lui dites, entre autres choses, qu'il ferait mieux de quitter les Forces armées afin d'avoir moins de problèmes à cet égard. En disant ça, ne confirmez-vous pas ses craintes, ses doutes ou les choses qu'il s'était imaginées?

R Ça ne s'est pas passé comme ça. C'est après que nous ayons parlé de -- les raisons pour lesquelles je refusais d'envoyer la chose -- la recommandation, nous avons alors eu une discussion générale et, en fait, vous savez, le caporal-

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chef Lagacé semblait croire que son état matrimonial était la cause de tous ses problèmes à l'époque, ce qui, à mon avis, n'était pas le cas.

Q Pourtant, vous lui avez dit que, s'il se retirait et s'orientait ailleurs, il aurait moins de problèmes. Vous lui avez dit ça.

J'aimerais maintenant vous poser une question. Une des raisons pour lesquelles vous vous opposiez à la demande est liée au fait que cette personne contestait le système, qu'elle tentait de contester le système, n'est-ce pas? Elle semblait ignorer le système? N'avez-vous pas fait ce commentaire, et je vous renvoie au document en question, que nous vous avons déjà montré, soit la demande elle-même.

R Mm-hmm?

Q Elle porte la date ... c'est la pièce HR-24. Je ne sais pas si vous l'avez encore.

R Non, je ne l'ai pas. Merci.

Q Dernière phrase :

[TRADUCTION]

«Il a eu tendance dans le passé à s'opposer au système ou à l'ignorer, lorsqu'il n'est pas d'accord».

R Mm-hmm.

Q Et lorsque vous le rencontrez, vous lui dites, tu ferais mieux de te taire ou de te retirer des Forces armées, pour avoir moins de problèmes concernant ton état matrimonial. Est-ce que vous ne lui dites pas qu'il n'aurait pas dû se plaindre ou contester au sujet de ce qu'il estimait lui avoir été refusé en raison de sa situation de famille?

R Non. En fait, les deux choses que je savais, c'est qu'il avait été prévenu verbalement, même s'il y avait une note sur ce point dans son dossier de RER, au sujet du fait qu'il avait eu un entretien avec des journalistes en dehors de l'armée. Je sais aussi personnellement qu'il avait refusé de signer son RER.

Je dois aussi dire que je ne recommande pas de promotion ou d'autres mesures du même genre de façon complètement isolée. J'avais eu une discussion avec ses supérieurs immédiats. Ils n'étaient pas très enthousiastes à l'idée que sa recommandation soit présentée à des instances supérieures. A cette époque, on lui a dit que l'acheminement de sa demande était reporté, parce qu'il venait d'être nommé caporal-chef et que nous n'avions pas eu la chance d'évaluer son rendement.

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En fait, je lui ai même dit, et il s'en souviendra très bien, que j'appuierais une lettre et que j'enverrais même à son nouveau commandant une lettre dans laquelle je recommanderais l'examen de sa demande après une autre évaluation de rendement.

Ce n'est donc pas à ce moment-là que je lui ai dit de faire quoi que ce soit. J'ai simplement écrit, suivant ma recommandation, qu'il devait avoir un autre RER en poche comme caporal-chef, qui est un poste de supervision, avant que sa demande ne soit réexaminée.

Il a ensuite dit qu'il ne savait pas si l'avertissement verbal aurait dû être consigné au dossier du plaignant, mais il l'a vu et il était normal pour lui de vérifier le dossier personnel du plaignant dans le cadre de l'examen de la demande d'adhésion de celui-ci au PFAO.

En ce qui a trait aux commentaires que le surveillant du plaignant, l'adjudant Hayes, a formulés au sujet de la demande, le major Dunsdon dit ce qui suit aux pages 335 et 336 :

[TRADUCTION]

Q De qui avez-vous eu des commentaires négatifs, alors, Monsieur -- quel est son nom? Hayes? L'adjudant? Est-ce la seule personne qui a fait des commentaires négatifs ou qui a exprimé certaines réserves au sujet de la demande de M. Lagacé?

R Je pense que ce que je voulais dire à ce moment-là, je ne croyais pas que c'était vraiment des commentaires négatifs. En fait, le caporal-chef Lagacé était définitivement un technicien compétent. Et il avait vraiment montré de bonnes aptitudes. Je veux dire, le fait qu'il suivait un cours universitaire par correspondance, qu'il travaillait auprès des gens du programme de réadaptation des alcooliques, c'étaient des facteurs très positifs qui militaient en sa faveur et c'est ce qui lui a valu sa promotion comme caporal-chef.

Cependant, lorsque j'ai réfléchi attentivement à la question, j'ai dû tenir compte de toutes les perceptions que j'avais

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obtenues, parce que je ne connais pas l'homme personnellement. J'avais des réserves à son sujet, parce qu'il n'était pas appuyé directement et de façon très enthousiaste par ses superviseurs. J'ai donc reporté l'étude de sa demande.

Q D'accord. Alors, en réalité, cet adjudant n'était pas vraiment-négatif. Tout simplement, il ne formulait pas une recommandation positive très nette. C'est ça?

R C'est ça.

On a montré au major Dunsdon la pièce HR-16, le RER de 1986, dans lequel il avait écrit que le caporal Lagacé était très compétent et se classait septième parmi les 32 caporaux de la station. En réponse à la question de savoir pourquoi il a dit à l'enquêteurs que le plaignant avait obtenu la note la plus basse parmi tous ceux de son métier qui se trouvaient à la base, le major Dunsdon a expliqué que cette évaluation avait été faite alors que le plaignant était caporal-chef et que, lorsque le titulaire du poste en est à sa première année, l'évaluation est généralement plus faible. Il a aussi expliqué que le plaignant était l'un des trois ou quatre caporaux-chefs, qu'une note n'équivaut pas toujours à des commentaires narratifs et qu'il y avait des failles dans l'ensemble du système des RER. Il a ajouté qu'il était possible d'obtenir les résultats de certaines personnes qui ont travaillé en même temps que le plaignant.

Au cours de son interrogatoire en chef, le major Dunsdon a dit qu'il ne connaissait pas le plaignant, mais il a mentionné ce qui suit à l'enquêteurs, à la page 7 de sa déclaration :

[TRADUCTION]

lorsqu'il est arrivé en 1986, j'étais au courant de sa situation

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de famille, je savais qu'il vivait en union libre.

Il a expliqué qu'il était au courant en raison de l'incident de l'emplacement pour maison mobile auquel le plaignant a fait allusion et des renseignements qu'il a obtenus, probablement de l'adjoint de l'adjudant à la station, au sujet de la situation de famille du plaignant.

Lorsqu'on lui a montré la pièce HR-25, soit le document relatif au conseil verbal, le major Dunsdon a dit que le plaignant contestait la politique d'hébergement. Il a ajouté que le dossier personnel du plaignant est arrivé à la station en même temps ou à peu près en même temps que celui-ci. Voici comment il s'exprime à la page 345 :

[TRADUCTION]

R Je crois qu'il vaut probablement la peine de dire aussi, à ce moment-ci, que j'étais d'accord avec ce qui se passait ici à North Bay, et que j'étais d'accord avec la politique; la politique était en vigueur à l'époque, mais je n'étais pas particulièrement d'accord avec cette politique. Et, comme je l'ai mentionné, lorsque je suis arrivé à la station, je ne me suis pas opposé aux autres employés qui avaient des conjoints de fait.

Le major Dunsdon a dit que la lettre qu'ii avait proposé d'envoyer au commandant de la station de Halberg (lequel commandant était un ami) n'a pas été envoyée en raison d'un changement touchant l'affectation du plaignant et du fait que celui-ci avait désobéi à un ordre direct en omettant de se présenter à un dîner régimentaire.

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En ce qui a trait au régime de soins dentaires dont il est question dans la plainte, la major Dunsdon a admis qu'il avait dit ce qui suit à l'enquêteurs (page 17 de la déclaration et page 347 de la transcription)

[TRADUCTION] Au haut de la page, laissez-moi le lire d'abord.

Vers l'automne de 1987, Lagacé avait demandé aux gens de la salle de rapport d'inscrire sa conjointe et son enfant au régime de soins dentaires. C'était contre les règles, mais il l'a fait quand même. Le caporal qui lui a répondu était vraiment étonné. J'en ai entendu parler et l'adhésion a été annulée...

R Mm-hmm.

Q Je reconnais que sa conjointe et son enfant auraient dû être inscrits. S'il était venu me voir, je l'aurais aidé à formuler un grief. En raison de son insistance, j'ai décidé qu'il ne convenait pas d'accepter sa candidature en vue de devenir officier.

Lorsque Me Duval lui a demandé en quoi il avait tort de lutter pour faire reconnaître ses droits en ce qui a trait au régime de soins dentaires, le major Dunsdon a dit ce qui suit à la page 348 :

[TRADUCTION]

R Mais dans ce cas-ci, demander à quelqu'un d'autre, un autre militaire du rang, de faire une chose qui va à l'encontre des règles, ce n'était pas la bonne façon de procéder. Il aurait dû, à ce moment-là, rédiger une forme de grief et l'envoyer, que ce soit par mon entremise ou par l'entremise d'une autre personne, et il aurait été étudié. En fait, comme j'étais entièrement d'accord avec lui au sujet...

Me Duval a ensuite déposé comme pièce HR-33 une lettre en date du 3 mars 1988 que le capitaine Hussey a fait parvenir au plaignant pour l'informer de l'annulation de l'adhésion au régime de soins dentaires.

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Le major Dunsdon a reconnu avoir dit ce qui suit à l'enquêteurs à la page 18 de sa déclaration :

[TRADUCTION]

Cependant, après lui avoir dit que je ne pouvais appuyer sa demande, j'ai ajouté que, s'il n'était pas impliqué dans d'autres incidents ici et qu'il se comportait correctement pendant le mois - je lis mois - à Holberg, j'écrirais une lettre au commandant de Holberg pour recommander que sa demande d'adhésion au PFAO soit acceptée. Toutefois, en raison de l'incident du dîner régimentaire, survenu vers mars ou avril 1985, j'ai retiré cette offre.

Le major Dunsdon a ensuite dit à Me Duval qu'il ignorait si la demande en question était une demande d'adhésion au PFAO ou une demande du plaignant en vue d'être muté à Chilliwack comme conseiller en matière de drogue. Il a aussi admis avoir dit ce qui suit à l'enquêteurs :

[TRADUCTION]

Je songeais ensuite à formuler une faible recommandation en vue de son affectation à Chilliwack; toutefois, après l'incident du régime de soins dentaires, j'ai changé d'idée.

Je savais aussi qu'il faisait du bon travail au centre-ville en matière de formation et de consultation, mais qu'il avait déposé un grief et une plainte auprès de la Commission des droits de la personne. Je ne voulais pas me laisser influencer par le fait qu'il contestait le système.

Il a ajouté qu'il ne pouvait se rappeler de façon précise s'il avait tenu compte de la pièce HR-12, soit le rapport du chef subalterne, lorsqu'il a formulé sa recommandation. Il a précisé que les commentaires négatifs formulés par les superviseurs du plaignant concernaient la question du régime de soins dentaires.

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En outre, il avait eu l'impression que le plaignant était contestataire, mais il n'a pu donner d'exemple de cas où le plaignant ne s'est pas conformé au système. En réponse à la question posée à la page 367, soit Il a le droit de déposer un grief?, il a dit [TRADUCTION] Oh, absolument. En fait, j'étais même d'accord avec son grief.

Il a ajouté qu'il y avait deux militaires du rang, un homme et une femme, qui vivaient ensemble en union libre dans la même maison mobile, ce qu'il autorisait.

L'avocat de la Commission a appelé un témoin expert, Mme Debbie Wilson, qui est actuaire chez William M. Mercer Limited. Elle a dit qu'elle s'occupait principalement des évaluations de régimes de retraite, en plus d'agir comme témoin expert. Dans un rapport déposé comme pièce HR-1, elle a présenté des calculs visant à aider le Tribunal à déterminer la perte que le plaignant a pu avoir subie par suite du refus de sa demande d'adhésion au PFAO en question et de l'obligation de se retirer des FAC le 1er avril 1994.

L'avocat de l'intimée a appelé quatre témoins des FAC, soit le major M.D. McCormack, témoin expert, le capitaine D.J. Zaharychuk, le capitaine T.A. Jackson et le capitaine L.P. Cooper.

Le major McCormack, qui possède une grande expérience en matière d'intégration du personnel et dont j'accepte le témoignage, a

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expliqué les divers programmes d'intégration disponibles. Il a présenté un rapport, la pièce R-3, qui concerne la demande d'adhésion du plaignant au PFAO, soit l'objet de la présente plainte, afin d'évaluer avec précision les chances que le caporal-chef Lagacé avait d'être choisi par le comité de sélection au PFAO de 1988. Le major McCormack a dit qu'il n'avait pas reçu la demande au Quartier général de la Défense nationale, mais qu'il ne pouvait en imputer la responsabilité à qui que ce soit. Il a soutenu que les erreurs administratives sont fréquentes. Il a comparé cet incident à ce qui était survenu lorsque le plaignant a subséquemment déposé une demande concernant un certain capitaine Wong, officier de sélection du personnel, laquelle demande était parvenue au QGDN après la séance du comité de sélection concerné.

Le capitaine D.Z. Zaharychuk, directeur, affectations, carrières et administration - officiers (DPCAO 3-2), a dit qu'il est responsable des politiques relatives aux promotions et des comités de révision des promotions au mérite - officiers), notamment de la politique relative aux promotions depuis le rang d'élève-officier à celui de colonel.

Le capitaine T.A. Jackson, qui compte 34 années de service, a débuté comme signaleur dans le Corps royal canadien des transmissions à l'âge de 17 ans; il a été intégré alors qu'il était sous-officier breveté de deuxième classe (qu'on appelle aujourd'hui maître-adjudant). Il a dit au cours de son témoignage

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qu'il était chargé de l'administration du Programme d'orientation des carrières - officiers (POCO), qui s'applique normalement à tous les programmes d'enrôlement, soit le Programme de formation des officiers de la Force régulière (PFOR), le Programme d'enrôlement direct en qualité d'officier (PEDO), le Programme de formation des aspirants-officiers (PFAO), civils et militaires, et le Programme de formation universitaire - militaires du rang (PFUMR) ainsi que le Programme d'intégration - officiers sortis du rang (PIOSR).

Le capitaine L.P. Cooper, qui compte 20 ans de service, a travaillé pendant huit ans comme commis aux finances; elle a ensuite adhéré au Programme de formation universitaire et, depuis qu'elle est intégrée, elle a travaillé comme contrôleur de station, officier principal des finances et, au cours des deux dernières années, comme officier d'état-major, comptabilité de la solde (politique et méthodes). Elle s'occupe, entre autres choses, des prévisions relatives à la solde pour la Direction des services juridiques du personnel et la Section des droits de la personne. Elle a produit un document intitulé [TRADUCTION] Prévisions hypothétiques sur la solde, qui a été déposé comme pièce R-4 sans objection, ainsi qu'un document intitulé [TRADUCTION] Calcul de la différence de solde (pièce R-5), documents qui concernent tous deux le plaignant.

J'aimerais souligner qu'au début de l'audience, l'avocat de la Commission a déposé un volume intitulé [TRADUCTION] Volume de

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documents comme pièce A; ce volume renferme 23 documents et bon nombre de ceux-ci ont eux-mêmes été déposés comme pièces au fur et à mesure que la preuve a été présentée. Me Duval a mentionné que les documents des onglets 11, 12, 13, 14, 15, 18 et 22 ne sont pas déposés comme pièces et ne font pas partie de sa cause, puisqu'ils concernent les questions qui avaient été réglées.

Je résume maintenant les arguments exposés par chaque avocat au sujet de la question en litige en l'espèce et de l'indemnité.

Me Duval a soutenu que les deux questions en litige en l'espèce étaient les suivantes :

  1. La demande d'adhésion au PFAO du plaignant en date du 16 novembre 1987 a-t-elle été rejetée pour un motif de distinction illicite?
  2. Si la réponse à cette question est affirmative, quelle indemnité serait appropriée dans les circonstances?

Me Duval a fait valoir que la preuve qui est directement pertinente en ce qui a trait à la première question réside dans le témoignage du caporal-chef Lagacé, du major Dunsdon et du capitaine Jodoin. Il a ensuite résumé brièvement le droit, mentionnant que les Forces armées canadiennes peuvent être tenues responsables des actes faits

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par certaines personnes qui ont fait montre de discrimination, que le motif ou l'intention n'est pas pertinent, que la loi prévoit que les employeurs peuvent être tenus responsables de tous les actes faits par leurs employés dans le cadre de leur emploi, c'est-à-dire les actes liés d'une façon ou d'une autre à l'emploi, et que l'employeur peut être jugé responsable même si les actes de discrimination ont été faits en dehors du milieu de travail et des heures de travail. Il a également parlé de la norme de preuve, alléguant que, lorsque le plaignant a établi une preuve de discrimination prima facie, il a droit à la réparation demandée, si aucune justification n'est démontrée. La seule justification réside dans la preuve d'une EPJ (exigence professionnelle justifiée), que l'employeur doit établir. Cette preuve doit être faite selon la balance des probabilités. En d'autres termes, dit- il, lorsqu'une preuve de discrimination a été établie à première vue, il appartient ensuite à la partie intimée de démontrer une justification selon la balance des probabilités. Il ne s'agit pas simplement de présenter une preuve, mais de convaincre. L'intimée a-t-elle réussi à me convaincre, à l'aide de la preuve présentée, que le plaignant n'a pas été victime de discrimination? L'avocat a ajouté que l'existence d'un motif de distinction illicite, lorsqu'il y a d'autres motifs non prohibés, suffit à établir la violation, pourvu que ce motif soit la cause directe. Toujours selon l'avocat, non seulement le fardeau précité est-il celui de l'intimée, mais toute défense doit être interprétée de façon restrictive. A première vue, la preuve présentée pourrait

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justifier une conclusion en faveur du plaignant, si elle n'est pas réfutée. L'avocat a ensuite dit au Tribunal qu'il traiterait presque exclusivement de la demande d'adhésion au PFAO, qui fait l'objet du litige. Il a fait allusion à la pièce HR-8, le document d'enrôlement, à la pièce HR-11, le cours de technicien en défense aérienne, à la pièce HR-12, le cours de chef subalterne, et il a soutenu que l'obtention d'un baccalauréat et de la médaille du gouverneur général indique beaucoup de motivation et de discipline chez le plaignant. Il ajoute que le plaignant n'a pas été contredit lorsqu'il a mentionné que le capitaine Holpen lui a proposé de présenter une demande d'adhésion au PFAO, estimant qu'il avait de bonnes chances d'être accepté, et que le major Dunsdon n'a pas consulté le capitaine Holpen lorsqu'il a étudié la demande. En se fondant sur les pièces HR-16 et HR-17, où l'on peut lire les commentaires de l'adjudant Hayes en faveur de la demande, l'avocat fait remarquer que cette preuve n'est pas contredite. Il ajoute que le major Dunsdon a dit, au cours de son témoignage, qu'il avait entendu des commentaires négatifs de la part de l'adjudant Hayes, mais il n'a pu être précis à ce sujet. Le seul incident précis à la suite duquel le major Dunsdon a eu l'impression que le plaignant contestait le système est l'incident du régime de soins dentaires. Le major Dunsdon a alors dit qu'il n'y avait rien de mal à ce que le plaignant cherche à faire valoir ses droits à l'égard de ce régime, compte tenu de la décision de la Cour d'appel fédérale selon laquelle l'état matrimonial couvre l'union de fait et que les personnes doivent être évaluées selon leurs qualités personnelles

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plutôt que selon des caractéristiques communes. L'avocat a ensuite fait allusion à la pièce R-3 et aux RER du plaignant et a mentionné que la seule année au cours de laquelle le plaignant a obtenu une note inférieure à sept est l'année 1987, au cours de laquelle la demande en question a été faite, de même que la demande d'adhésion au régime de soins dentaires, qui a subséquemment été annulée. L'avocat commente ensuite le conseil verbal (pièce HR-25), dont le texte n'aurait pas dû être consigné dans le dossier personnel du plaignant. Selon l'avocat, le plaignant a dit qu'il n'avait déposé que deux griefs et une seule accusation et cette preuve n'est pas contredite. La plainte qu'il avait déposée auprès de la CCDP en 1984 a été un facteur négatif aux yeux du major Parent et du capitaine Belec. Se reportant au paragraphe 15 de la pièce R-3, soit le rapport du major McCormack, l'avocat allègue qu'il n'y a aucune preuve indiquant que le plaignant a fait montre d'un manque de discernement et d'un mauvais jugement dans le passé ou d'un manque de respect à l'égard des règles et des règlements. La seule différence entre le plaignant et d'autres personnes des Forces armées qui vivent en union libre réside dans le fait que le plaignant cherchait à faire valoir ses droits. L'avocat a semblé comparer la situation que vivait le plaignant à celle du capitaine Jodoin et a fait remarquer qu'il n'était nullement prouvé que l'état matrimonial du capitaine était connu. Il a aussi souligné que Hayes, Holpan, Belec et Parent étaient des témoins importants qui auraient pu contredire le témoignage du plaignant et aider le Tribunal à comprendre les événements ou incidents survenus et que

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je pouvais tirer une conclusion négative de l'omission de présenter des témoins qui auraient pu éclairer le Tribunal.

Me Duval a ensuite commenté la rencontre qui a eu lieu le 7 janvier 1988 entre le plaignant et le major Dunsdon et que le plaignant avait demandée pour savoir pourquoi il n'avait pas été recommandé aux fins du PFAO. Selon l'avocat, le plaignant affirme que le major Dunsdon aurait dit ce qui suit :

  1. [TRADUCTION] Vous devez accepter les règles.
  2. [TRADUCTION] Pourquoi ne vous mariez-vous pas pour éviter tous ces problèmes?

L'avocat a alors rappelé que le major Dunsdon avait dit ce qui suit à l'enquêteurs :

  1. Il connaissait le plaignant avant que celui-ci n'arrive à Kamloops.
  2. [TRADUCTION] Je lui ai demandé de but en blanc pourquoi il ne se mariait pas pour éviter tous ces problèmes.
  3. Il aurait été beaucoup plus simple pour lui de ne pas avoir à lutter chaque fois qu'il fait quelque chose; il
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    devait se conformer ou quitter l'armée, afin que son état matrimonial n'ait pas de conséquences de cette nature.

  5. Il a dit à l'enquêteurs que le plaignant était un cas spécial.
  6. Il a dit à l'enquêteurs que, selon lui, le plaignant avait obtenu la note personnelle la plus faible et on lui a alors rappelé les notes que le plaignant avait obtenues dans deux RER antérieurs.
  7. Comme le plaignant s'était montré insistant, il a décidé qu'il ne convenait pas comme candidat à un poste d'officier.
  8. Il a songé à recommander le plaignant, mais il a changé d'idée à la suite de l'incident du dîner régimentaire.
  9. Le plaignant faisant du bon travail, mais il avait déposé un grief et une plainte auprès de la Commission des droits de la personne.
  10. Le fait de contester le système était pertinent.
  11. Il a dit à l'enquêteurs que, selon le système hiérarchique, si vous ne vous entendez pas avec votre patron, vous ne pouvez obtenir de promotion.

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Me Duval a souligné que le major Dunsdon s'est empressé d'ajouter qu'il ne voulait pas se laisser influencer par le dépôt du grief et de la plainte auprès de la Commission des droits de la personne et il a admis avoir dit à l'enquêteurs que, s'il avait lu le rapport positif concernant le cours de chef subalterne, c'eût été là un facteur positif; toutefois, d'après son contre-interrogatoire, il semble qu'il n'ait jamais vu ce rapport dans lequel il est mentionné que le plaignant s'était classé dans le premier tiers.

Selon Me Duval, il est indubitable que, au cours de l'entretien concernant la question de savoir pourquoi il n'avait pas recommandé le plaignant, le major Dunsdon lui a dit [TRADUCTION] Pourquoi ne vous mariez-vous pas pour éviter tous ces problèmes? et que l'un des problèmes auxquels le major pensait était le fait que le plaignant n'était pas recommandé. Il a ajouté que le major semblait être l'un des rares membres des FAC qui n'ont pas été influencés par l'application d'une nouvelle philosophie au sein de l'armée au sujet de l'état matrimonial. L'avocat a fait valoir que le major Dunsdon n'avait pas recommandé le plaignant pour les raisons suivantes :

  1. Le plaignant vivait en union de fait.
  2. Le plaignant avait déposé un grief et une plainte auprès de la CCDP pour faire reconnaître son statut.

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En ce qui a trait à la partie 3 du formulaire de demande, il importe, selon l'avocat, d'examiner la version française du paragraphe 11 des OAFC, qui indique clairement que, à moins que la recommandation ne soit appuyée, la partie 3 ne devrait pas être remplie. Me Duval a ajouté qu'il n'y a pas de façon plus radicale de refuser une demande que de ne pas l'examiner. Le major Dunsdon a admis que la demande n'a pas été traitée. Me Duval soutient que personne n'a lié ce fait à la fermeture de la base et que la tâche de démontrer que les événements s'étaient déroulés correctement appartenait à l'intimée, ce qu'elle n'a pas fait.

En ce qui a trait au témoignage du capitaine Jodoin, Me Duval allègue que celui-ci a mentionné que le major Dunsdon aurait pu renvoyer le plaignant à Chilliwack aux fins d'une évaluation. Me Duval mentionne qu'il a été étonné lorsque le capitaine Jodoin a dit [TRADUCTION] Je ne me rappelle pas et qu'il a ensuite nié les propos qui auraient été échangés entre lui-même et le plaignant.

Me Duval a ensuite commenté la question de l'indemnité, indiquant qu'à son avis, il y avait peu de différence entre la preuve de l'actuaire qu'il avait appelé à la barre et le témoignage du capitaine Cooper concernant la perte de solde passée. Il a parlé de la perte future et du préjudice moral. Il a ajouté qu'aucune demande n'était formulée au titre des dommages punitifs.

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voici maintenant les arguments de l'avocat de l'intimée.

Selon Me Rennie, la présente cause ne porte pas sur ce qui suit :

  1. Le bien-fondé du conseil verbal donné en 1986 ou des raisons s'y rapportant.
  2. Le bien-fondé ou l'exactitude des évaluations de rendement du plaignant comme caporal et caporal-chef.
  3. L'instruction sommaire, suivie de la déclaration de culpabilité, qui a eu lieu en avril 1988 devant le major Dunsdon.
  4. L'évaluation faite par le major Dunsdon au sujet de la demande d'adhésion du plaignant au PFAO.

Selon Me Rennie, la question en litige est la suivante Les Forces canadiennes ont-elles fait montre de distinction défavorable, en l'espèce, par l'entremise du major Dunsdon, à l'endroit du caporal-chef Lagacé en raison de son état matrimonial? En d'autres termes, a-t-il dit, l'évaluation du potentiel du caporal-chef Lagacé aux fins du programme PFAO a-t-elle été influencée d'une façon ou d'une autre par l'état matrimonial du plaignant? L'union de fait que vivait le plaignant était-elle la cause directe de cette évaluation? Selon l'avocat,

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il appert clairement d'une évaluation du témoignage du plaignant à la lumière du contenu du dossier que tel n'était pas le cas. Me Rennie énumère ensuite 17 points précis du témoignage du major Dunsdon qui, selon lui, indiquent de façon concluante que l'état matrimonial du plaignant n'était pas la cause de l'évaluation du major. Ces points sont les suivants :

  1. A son arrivée à la station des Forces canadiennes de Kamloops, le major Dunsdon ne connaissait pas le caporal-chef Lagacé; il avait simplement vu son nom sur une liste du personnel arrivant.
  2. Le major Dunsdon avait ordonné la fermeture des emplacements pour maisons mobiles, sur les conseils du personnel de la section technique, parce que la station devait être fermée sous peu; cependant, lorsqu'il a constaté que le caporal-chef Lagacé ainsi que sa conjointe et l'enfant de celle-ci seraient grandement incommodés, il a ordonné que l'on mette un emplacement à la disposition du plaignant, le tout en moins de deux heures.
  3. Le major Dunsdon a dit au cours de son témoignage qu'il n'avait rien contre les officiers qui vivaient en union de fait, que 20 % des officiers de la station vivaient probablement de cette manière et que les unions de fait étaient assez répandues.
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  5. La première question qu'il a dû régler lorsqu'il a pris le commandement de la station était la situation de deux militaires du rang (un homme et une femme) qui désiraient vivre ensemble dans une maison mobile à la station, et il a infirmé la décision du commandant antérieur à ce sujet.
  6. Il a dit au cours de son témoignage qu'il souhaitait que la plainte que le plaignant avait déposée auprès du Tribunal en 1984 soit accueillie et que, à son avis, elle était bien fondée. Le major n'avait pas dit ça simplement pour bien paraître; en fait, dans la lettre en date du 3 février 1987 que le major a fait parvenir au QGDN après le refus du plaignant de signer son RER (pièce HR-23), il a écrit ce qui suit : [TRADUCTION] Je ne nie pas qu'il ait le droit de contester toute situation qui lui semble injuste à l'intérieur du système. En fait, il se peut que ce refus soit bien fondé jusqu'à un certain point. Il était plutôt préoccupé par le fait que le plaignant s'était fait connaître auprès des médias et qu'il avait tendance à être contestataire en ce qui a trait aux règlements ou aux procédures avec lesquels il n'était pas d'accord. Le témoignage que le major a fait devant le Tribunal est conforme à la lettre qu'il a rédigée. Le major ne se souciait nullement du fait que le plaignant vivait en union de fait, mais il était préoccupé par l'attitude que celui-ci affichait à l'égard des règlements et des politiques de l'armée.
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  8. Il n'en voulait pas au plaignant. Il a préparé à son égard deux RER comportant des résultats positifs et le premier a probablement valu au plaignant d'être promu caporal-chef. Le second, dans lequel la note était de 6,9 et sur la foi duquel l'avocat de la Commission a demandé au Tribunal de conclure à l'existence d'un motif de distinction, a été fait alors que le plaignant comptait moins d'une année d'expérience comme caporal-chef.
  9. Il a fait venir le plaignant dans son bureau après avoir rempli la partie 3 de la demande, afin de lui expliquer pourquoi il ne l'appuyait pas. C'était quelque chose que le major n'était pas tenu de faire. Pourquoi ferait-il venir le plaignant pour lui dire que la demande était prématurée et qu'il fallait attendre une autre évaluation positive si, en fait, le major désapprouvait l'état matrimonial du plaignant et a laissé entendre que c'était tout à fait illogique?
  10. Le major Dunsdon a dit qu'il croyait sincèrement que la demande était prématurée [TRADUCTION] Au moins une ou deux évaluations comme caporal-chef devraient être faites avant qu'une recommandation ne soit formulée en sa faveur. L'avocat a soutenu que c'était là un avis approprié et le plaignant a reconnu au cours de son contre-interrogatoire que c'était effectivement un avis équitable de la part d'un commandant.
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  12. Le 7 janvier 1988, le major a offert d'envoyer une lettre de recommandation au nouveau commandant du plaignant à Holberg, si le plaignant décidait de présenter une demande d'adhésion au PFAO l'année suivante. Cette proposition n'est guère compatible avec l'allégation selon laquelle le major aurait fait montre de discrimination à l'endroit du plaignant en raison de son état matrimonial.
  13. La pièce HR-24, la demande elle-même, est plutôt positive dans l'ensemble. Le plaignant a convenu qu'elle comportait de nombreux éléments et commentaires positifs et équitables. Le major a mentionné que les activités du plaignant démontraient qu'il avait un potentiel et qu'il s'était bien amélioré, grâce à la formation qu'il avait suivie, à ses interventions comme bénévole et à ses activités physiques. Encore là, ce n'est pas le genre de commentaires formulés par une personne qui reproche à une autre son état matrimonial.
  14. Le plaignant a fait grand cas du commentaire suivant [TRADUCTION] Il avait tendance, dans le passé, à s'opposer au système ou à l'ignorer, lorsqu'il n'était pas d'accord. Le plaignant a mentionné [TRADUCTION] je présume qu'il parlait du fait que je m'étais plaint. Cependant, il n'y a aucune preuve à ce sujet, ce n'est qu'une hypothèse. Le problème que comporte cette thèse, c'est le fait que le major a dit des choses qui étaient bien fondées et que le plaignant a
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    reconnues en contre-interrogatoire. Les éléments auxquels le major a fait allusion étaient le conseil verbal, le refus de signer un RER, l'absence d'appui de la part des cadres hiérarchiques et de son superviseur, l'inscription des personnes à sa charge au régime de soins dentaires par l'exercice de son pouvoir de caporal-chef à l'endroit d'un caporal, tout en sachant qu'il était inadmissible selon les règlements en vigueur à l'époque, et le fait de menacer de dénoncer publiquement l'incident de la maison mobile, qui a été réglé en moins de deux heures. L'avocat a soutenu qu'il y a eu corroboration, de la part du plaignant lui-même, de la preuve indiquant qu'il est contestataire. En ce qui a trait à la critique formulée dans le RER du plaignant, MO Rennie allègue que l'avocat de la Commission accorde trop d'importance au fait que les cadres hiérarchiques n'ont pas été appelés, même s'ils étaient des témoins pertinents. Me Rennie dit qu'ils étaient effectivement pertinents en ce qui a trait à la cause de la Commission. Il ajoute ensuite deux commentaires : d'abord, le fait que le capitaine Halpen ait encouragé le plaignant n'a aucune importance et, en second lieu, le fait qu'un RER comporte des commentaires positifs ne signifie pas nécessairement que le candidat convient aux fins du PFAO.

  16. Lorsqu'on a demandé au major si l'état matrimonial du plaignant était lié d'une façon ou d'une autre aux
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    commentaires qu'il a formulés dans la demande d'adhésion au PFAO, il a répondu par un non catégorique.

  18. En ce qui a trait à la remarque [TRADUCTION] Pourquoi ne vous mariez-vous pas?, le plaignant a admis que ce commentaire a été formulé dans un contexte informel et le major a dit que c'était davantage une question. Selon Me Rennie, si l'on dit que le fait de demander Pourquoi ne vous mariez-vous pas pour éviter les problèmes? équivaut à une forme de discrimination, on va beaucoup plus loin que ce que le Parlement désirait. Quant aux commentaires selon lesquels la situation de famille du plaignant [TRADUCTION] est un facteur dont on tient compte lors de l'examen des qualités requises pour devenir officier, personne ne les nie. Le plaignant a reconnu qu'il convient d'examiner la stabilité de la gestion financière et des relations, que la personne vive en union de fait ou qu'elle soit mariée, divorcée ou veuve, la pharmacodépendance et l'alcoolisme et tous les aspects de la vie personnelle qui sont pertinents lors de l'examen du potentiel de leadership d'une personne. Le plaignant a admis qu'il avait eu des problèmes d'alcool et de gestion financière dans le passé, mais que ces problèmes étaient réglés depuis et qu'ils ne devraient pas être examinés de façon détaillée au cours de la présente enquête, mais il n'en demeure pas moins que le major était au courant.

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Le dernier point que Me Rennie mentionne au sujet du témoignage du major Dunsdon est le fait que le major a été contre-interrogé au sujet d'une déclaration que Me Rennie n'avait pas vue, qui avait été écrite trois ans avant la présente enquête par une enquêteurs qui n'était pas sous serment, après une entrevue de cinq ou six heures qui s'est déroulée en l'absence d'avocats. Me Rennie soutient que le major n'a eu aucun mal à se rappeler la déclaration, qu'il n'y a décelé aucune contradiction et qu'il ne serait pas étonné qu'il y en ait.

Passant au témoignage du capitaine Jodoin, Me Rennie a fait valoir que l'aspect intéressant de ce témoignage est le fait que lui-môme vivait en union libre et que le major était au courant.

Comparativement aux treize points susmentionnés, Me Rennie mentionne que le plaignant invoque quatre points :

  1. L'incident de l'emplacement pour maison mobile a été orchestré par le major, point que Me Rennie a commenté.
  2. Le major ne se trouvait pas à la base pour accueillir le plaignant lorsque celui-ci est arrivé à la mi-juillet. Le major a dit qu'il essayait de rencontrer chacun, mais qu'il ne pouvait pas toujours le faire.
  3. 61

  4. L'absence de signature sur le certificat d'adieu. Le major Dunsdon pense que le certificat a été préparé après le départ du plaignant de la station, parce qu'il a été remis lors du dernier dîner régimentaire. Au cours de la présente enquête, le major Dunsdon a dit spontanément [TRADUCTION] Vous savez, il aurait dû être signé. Je suis bien prêt à le signer maintenant et je m'excuse pour le fait qu'il ne l'a pas été.
  5. La condamnation lors de l'instruction sommaire à l'égard de l'omission du plaignant d'obéir à un ordre direct, selon lequel il devait se présenter à un dîner régimentaire. Cet événement est survenu après le litige en question.

Me Rennie a ajouté que l'avocat du plaignant me demande de conclure que le major Dunsdon a veillé d'une façon ou d'une autre à ce que la demande d'adhésion au PFAO ne parvienne pas au QGDN, ce qui, selon l'avocat, est tout à fait illogique.

Se reportant à la pièce HR-32, soit la lettre que le plaignant a adressée à Barbara Westerman, et à l'allégation selon laquelle il y avait des mesures de représailles, Me Rennie a mentionné au Tribunal que les représailles ne constituent pas une forme de discrimination, mais plutôt un acte criminel selon l'article 59 de la Loi canadienne sur les droits de la personne. Il a ajouté qu'il n'invoque pas seulement ce point à l'appui de sa cause, mais que

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c'était un facteur intéressant, parce qu'il ne croyait pas que le plaignant était vraiment convaincu, en 1988, que la décision du major Dunsdon de ne pas le recommander était liée à son état matrimonial, mais qu'il soupçonnait plutôt le major de chercher à se venger.

Me Rennie a ajouté qu'il avait du mal à comprendre la cause du plaignant : il a d'abord pensé que celui-ci s'opposait aux commentaires formulés dans la demande; toutefois, le plaignant a admis que la plupart des commentaires étaient exacts et il y avait des éléments de preuve permettant au major Dunsdon de conclure que le plaignant a eu tendance, dans le passé, à contester ou à ignorer le système. Il a ensuite cru que les commentaires faits au cours de l'entrevue avec le major Dunsdon étaient à l'origine du problème, mais il a constaté par la suite que ces commentaires [TRADUCTION] constituent davantage une preuve supplémentaire qu'une forme de discrimination. Il semble donc, comme l'indique la plainte exposée dans la pièce HR-32, soit la lettre adressée à Mme Westerman, que ce n'est pas aux paroles du major Dunsdon que le plaignant s'oppose, mais plutôt au fait que le major cherche à se venger. En outre, au cours de la présente audience, Me Duval a laissé entendre que la plainte concernait le fait que la demande n'a pas été traitée parce que le plaignant vivait en union de fait.

Me Rennie fait valoir que la cause du plaignant repose sur une hypothèse, une supposition et une perception que le plaignant a

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admises et qui ont été niées sans équivoque par des témoins qui étaient sous serment. Il ajoute que le plaignant a démontré qu'il avait manifestement tendance à exagérer l'importance d'une conduite ou à lui donner un autre sens. Le plaignant impute un caractère discriminatoire à des événements par ailleurs rationnels et normaux; c'est notamment ce qui s'est produit dans le cas des incidents concernant le père Dubrowski (1982) et le major Nickerson (1984). Le plaignant suppose que le major Nickerson le libérera sous peu et il constate qu'il a tort. Me Rennie me dit que je peux conclure que le plaignant a formulé des hypothèses déraisonnables découlant des conversations tenues. Par ailleurs, le témoignage du major McCormack démontre que le plaignant a perdu, tout au plus, une mince chance de devenir officier dans le cadre du PFAO, en raison du caractère hautement concurrentiel de la démarche. Il a dit que, même si le plaignant a mentionné qu'il ne doutait nullement du fait qu'il deviendrait capitaine, il était logique de penser le contraire, compte tenu des probabilités statistiques. Le major Mccormack est allé un peu plus loin et a démontré que le plaignant avait présenté sa candidature pour quatre postes dans le domaine de la logistique et que 3 % seulement des candidats étaient choisis dans les domaines de la sécurité ou de la logistique. Il aurait fallu que le plaignant obtienne une note d'évaluation globale supérieure à celle de 99 % des candidats évalués lors du concours relatif au premier poste en logistique et supérieure à 98 % dans le cas du deuxième poste. De même, il lui aurait fallu dépasser 93 % des candidats pour le premier poste en sécurité et

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79 % pour le second. De plus, le plaignant n'aurait pas eu autant de temps pour exercer ses fonctions que ses concurrents et il n'y avait aucun lien entre la carrière qu'il avait choisie (groupe professionnel militaire - GPM) et son occupation actuelle et ces deux facteurs lui nuiraient. Il allègue qu'il est évident, d'après le rapport du major McCormack, que [TRADUCTION] beaucoup sont appelés, mais peu sont élus et que la preuve indique que tout ce que le plaignant a perdu, c'est une possibilité.

En réponse à ces arguments, Me Duval a fait valoir qu'il n'est pas nécessaire qu'un motif de discrimination soit la cause directe, mais simplement une des causes et il a invoqué quelques autorités, notamment une décision de la Cour divisionnaire de l'Ontario fondée sur le Code de l'Ontario ainsi qu'une décision du Tribunal fondée sur la Loi fédérale. Il a ajouté que la mention du problème d'alcool que le plaignant a vécu visait à indiquer que le maintien de la participation aux activités des alcooliques anonymes fait partie de la discipline de cet organisme et qu'il est méritoire de la part du plaignant d'avoir poursuivi dans cette veine. Il a ensuite commenté la question de savoir si le plaignant avait perdu une possibilité d'emploi plutôt qu'un emploi et il a cité l'arrêt Morgan. Il est ensuite passé à l'allégation de représailles et a soutenu que, comme le plaignant est un profane, il n'aurait pas nécessairement utilisé le mot représailles selon le sens véritable de ce mot et, sur ce point, il a précisé que le plaignant avait un diplôme en psychologie et en sociologie et non un diplôme en droit.

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Il a soutenu que le fait que la demande n'ait pas été traitée est l'un des éléments dont il faut tenir compte pour déterminer si le plaignant s'est vu refuser ou non le droit de présenter une demande et de bénéficier des avantages pouvant découler de l'acceptation de cette demande, le cas échéant. Il est ensuite revenu à la décision rendue dans l'affaire Morgan et à l'interprétation qui en a été faite dans l'affaire Martin, en ce qui a trait à la limite de l'indemnité, et il a allégué que le maximum de deux ans n'est qu'un guide. En outre, a-t-il soutenu, il est tout à fait en désaccord avec Me Rennie lorsque celui-ci dit ce qui suit [TRADUCTION] les normes de la preuve prima facie et du fardeau de la preuve s'appliquent uniquement dans les causes concernant les règles ou les règlements. Il cite des décisions dans lesquelles la Cour suprême du Canada a jugé que les seuls moyens de contestation disponibles sont ceux qui sont prévus dans un texte de loi et ils doivent être interprétés de façon restrictive. Toujours selon Me Duval, la seule défense appropriée en l'espèce est celle qui est énoncée au paragraphe 15a), l'EPJ de la Loi canadienne sur les droits-de la personne.

En conclusion, les deux avocats m'ont cité les extraits pertinents de l'arrêt Morgan qui concernent la question de la probabilité ainsi que la décision de l'affaire Martin, qui a été rendue par un tribunal des droits de la personne présidé par Me Sidney N. Lederman, c.r., notamment à la page 43, où il est question d'une indemnité déterminée. Ils m'ont ensuite cité la

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page 48 de la décision de Me Lederman, où celui-ci commente l'affaire Morgan, et m'ont invité à lire ces décisions.

DÉCISION

L'avocat du plaignant a soutenu que la preuve pouvait, à première vue, justifier une conclusion en faveur du plaignant, si elle n'était pas contredite. A mon avis, il est évident, d'après l'ensemble de la preuve, que le plaignant n'a pas établi sa cause. Je suis tout à fait d'accord avec les arguments de l'avocat de l'intimée. J'ai été impressionné positivement par le témoignage du major Dunsdon, tant pendant l'interrogatoire en chef que pendant le contre-interrogatoire. Par ailleurs, je n'ai pas été convaincu par le témoignage du plaignant. En fait, il m'a semblé exagéré que celui-ci accuse le major Dunsdon d'avoir orchestré l'incident de l'emplacement pour maison mobile qui est survenu lorsqu'il a été muté de North Bay à Kamloops. Un officier aussi compétent et expérimenté que le major Dunsdon, qui est commandant d'une station et responsable de la fermeture de celle-ci, qui est sur le point de se retirer de l'armée, qui ne connaît pas le plaignant et qui a bien d'autres responsabilités ne cherchera certainement pas à orchestrer ce type d'incident. Bien au contraire, le fait que le problème ait été réglé en moins de deux heures indique un grand professionnalisme de la part du major Dunsdon et confirme qu'il se préoccupait du bien-être de ceux qui étaient sous sa charge. En ce qui a trait à la demande d'adhésion du plaignant au PFAO, il est

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tout à fait raisonnable que le major Dunsdon ait voulu attendre une ou deux autres évaluations à l'égard de celui-ci pour voir comment il se comportait en tant que caporal-chef. Le plaignant a simplement cité hors contexte les remarques que le major Dunsdon a formulées pendant l'entretien qu'il a exigé, et non demandé, comme l'avocat de la Commission l'a soutenu. Ces remarques étaient simplement des questions que le major Dunsdon a posées dans le cadre d'un entretien amical au cours duquel il a conseillé le plaignant. Le major n'était nullement préoccupé par l'état matrimonial du plaignant, comme l'indique certainement le fait que le lieutenant Jodoin, un de ses officiers, a été promu capitaine alors qu'il avait une conjointe de fait. Le lieutenant Jodoin (tel était alors son titre) a nié carrément avoir dit que la conjointe du plaignant serait mal acceptée dans le mess des officiers et j'accepte son témoignage. Il n'est pas logique de penser autrement, puisque le lieutenant Jodoin a lui-même une conjointe de fait. En outre, le major ne s'opposait pas au fait que deux militaires du rang habitent dans la même maison mobile. Le plaignant allègue implicitement que le major a été influencé par le grief et la plainte qu'il avait déposés auprès de la CCDP au sujet de son état matrimonial et de la politique d'hébergement des FAC, mais ses allégations ne reposent sur aucun fondement. Dans ce contexte, le major Dunsdon était préoccupé uniquement par le fait que le plaignant s'était adressé aux médias; en fait, le major a dit au cours de son témoignage qu'il n'était pas d'accord lui non plus avec cette politique, ce qui est corroboré par la lettre en

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date du 3 février 1987 qu'il a fait parvenir au QGDN (pièce HR-23) au sujet d'un RER qui n'avait pas été signé. En ce qui concerne les deux allégations qui sont formulées dans la plainte (pièce HR-7) au sujet de la situation de famille et de la vie personnelle, il est bien certain que l'on examine ces aspects attentivement au moment de déterminer si un candidat possède les qualités requises d'un officier. Il est bien reconnu que la situation de famille et la vie personnelle d'une personne seront examinées chaque fois que la personne en question présente une demande d'emploi, une candidature à un poste donné ou une demande de promotion. Le plaignant a reconnu que des éléments comme la situation financière, la pharmacodépendance, l'alcoolisme et la stabilité sur le plan matrimonial sont des facteurs dont il faut tenir compte lors de l'étude d'une demande d'intégration. L'examen de ces facteurs ne sous-entend pas que l'on désapprouve les unions de fait. La preuve ne démontre nullement que le major Dunsdon a été influencé par l'avertissement verbal, sauf en ce qui a trait au fait que le plaignant s'est adressé aux médias. Quant à son offre de faire parvenir au commandant de Halberg une lettre en vue de recommander le plaignant aux fins d'une demande ultérieure d'adhésion au PFAO, le major avait de bonnes raisons de retirer cette offre, compte tenu de la façon dont le plaignant a demandé l'adhésion au régime de soins dentaires et du fait qu'il a été reconnu coupable d'avoir désobéi à un ordre direct concernant sa présence à un dîner régimentaire. Le major Dunsdon a jugé qu'il s'agissait là d'un incident grave et il avait de bonnes raisons de le penser. A mon

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avis, sauf dans les cas extrêmes de justification, la désobéissance à un ordre direct constituerait un obstacle fatal pour une personne qui désire devenir officier. D'autre part, je n'accorde aucune importance au fait que le certificat n'a pas été signé; à mon avis, le plaignant s'est servi de cet incident pour renforcer ses arguments. On ne saurait attribuer aucun motif ultérieur au major Dunsdon. Quant au fait que la demande d'adhésion au PFAO ne soit pas parvenue à Ottawa, je rejette carrément l'allégation implicite selon laquelle le major n'a pas traité la demande parce qu'il désapprouvait l'état matrimonial du plaignant. Il appert de la preuve que le major Dunsdon a signé la partie 3 de la demande et l'a déposée dans sa corbeille de sortie pour qu'elle soit traitée de la façon administrative habituelle par le personnel de la salle de rapport. Ce témoignage est corroboré par le major McCormack. Il est vrai que c'est le major Dunsdon qui est responsable en dernier ressort à cet égard comme commandant, mais il a le droit et même le devoir de déléguer ces fonctions administratives pour assurer un commandement efficace. Cela se fait couramment dans toute organisation. La preuve révèle que la demande n'a pas été traitée simplement en raison de la fermeture de la station ou par suite d'une erreur commise par le personnel de bureau. On ne peut pas croire que le major Dunsdon ait empêché, que ce soit de façon délibérée ou par négligence, le traitement de la demande. Pourquoi aurait-il pris ce risque alors qu'il était sur le point de se retirer des Forces armées?

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Une bonne partie du témoignage du plaignant concernant les événements survenus avant et après la présentation de sa demande d'adhésion au PFAO n'est pas pertinente, sauf dans la mesure où elle permet de replacer les événements dans leur contexte. Je me demande simplement pourquoi le plaignant n'a pas déposé un grief ou une autre plainte au sujet des remarques qu'auraient formulées les majors Nickerson et Parent. Les rapports de cours du plaignant indiquent clairement qu'il est compétent et respecté, qu'il accomplit très bien ses tâches et qu'il fait montre de leadership et d'initiative. Cependant, cela ne signifie pas que sa demande d'intégration serait automatiquement acceptée. A ce sujet, il convient de répéter : beaucoup sont appelés, mais peu sont élus. Les autres demandes qu'il a présentées n'ont pas été acceptées non plus. A mon avis, comme le plaignant avait reçu des rapports positifs, qu'il avait travaillé durement et qu'il avait obtenu un baccalauréat avec distinction, il a cru qu'il pourrait être intégré et il voulait être intégré pour pouvoir demeurer en fonction jusqu'à l'âge de 55 ans plutôt que de devoir se retirer en 1994 et il s'est mis à penser qu'il était victime de discrimination fondée sur son état matrimonial, lorsqu'il a vu qu'il n'obtenait pas gain de cause.

Je suis d'avis que ni le plaignant non plus que la Commission n'ont établi un cas de discrimination allant à l'encontre de l'article 7 de la Loi canadienne sur les droits de la personne, c'est-à-dire une discrimination fondée sur l'état matrimonial, qui est un motif

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de distinction illicite. Comme j 'en suis arrivé à cette décision, il n'est pas nécessaire que je me prononce sur la question de l'indemnité à laquelle le plaignant aurait pu avoir droit. Cependant, j'ai examiné la preuve et les arguments que les avocats ont présentés à ce sujet. Il suffira de dire que, si j'avais conclu que le major Dunsdon avait fait montre de discrimination en refusant d'appuyer la demande, cette discrimination n'aurait pas été la cause directe d'un préjudice quelconque, sauf un préjudice moral. Le plaignant devait encore surmonter l'obstacle découlant du fait que la demande n'était pas parvenue au QGDN. Cependant, si cette demande y était parvenue, le témoignage du major McCormack et des capitaines Zaharychuk et Jackson indique de façon concluante que le plaignant n'avait pour ainsi dire aucune chance d'être accepté et que, par conséquent, la question de l'indemnité ne se pose pas. Même si le plaignant avait été accepté, il est loin d'être certain qu'il aurait été promu capitaine un jour, bien que, avec le temps, il aurait été nommé élève-officier et promu au grade de second lieutenant et, plus tard, de lieutenant, pourvu que cette promotion soit recommandée par le comité de sélection et qu'il réussisse le cours élémentaire d'officier (CEO). L'indemnité découlant d'une perte de solde n'aurait pas été élevée, compte tenu du niveau de sa solde comme caporal-chef et technicien en défense aérienne ainsi que du critère de deux ans énoncé dans la jurisprudence. Une indemnité allant jusqu'à 5 000 $ au titre du préjudice moral est très subjective et très minime, à mon sens, puisque ses autres demandes d'intégration avaient également été

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refusées et qu'il n'y a aucune preuve indiquant que la discrimination alléguée aurait fait l'objet d'une publicité quelconque. A première vue, le préjudice pourrait être évalué à 1 000 $.

D'autre part, chaque avocat m'a présenté un volume d'autorités énonçant les principes à respecter au sujet de la preuve prima facie, du fardeau de la preuve, de la cause directe, de l'intention, de la responsabilité, de la norme de preuve, de l'interprétation libérale, d'une défense fondée sur une EPJ et de son interprétation, du préjudice et de l'indemnité. Au cours des plaidoiries, les avocats ont également fait allusion à des arrêts qui ne se trouvaient pas dans les volumes sans présenter de citation. Je dois dire qu'il m'a été très difficile d'analyser la thèse de l'avocat de la Commission. La cause porte avant tout sur une question liée à la crédibilité, au poids de la preuve et à une analyse des faits. Les parties ont déposé au total 41 pièces 35 ont été présentées par la commission et six, par l'intimée. La pièce R-3, que l'intimée a déposée, était un rapport du major McCormack, témoin expert que l'intimée a appelé à la barre; ce document m'a semblé très utile pour déterminer les chances de réussite du plaignant et, par conséquent, le préjudice possible. Au total, sept personnes ont témoigné et deux de celles-ci ont parlé de l'évaluation du préjudice du point de vue de la solde et des calculs actuariels. Quatre volumes de transcription ont été produits.

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J'ajoute que la déclaration que le major Dunsdon a faite à l'enquêteurs n'a pas été déposée en preuve et que, comme juge des faits, je n'ai pas eu l'avantage d'évaluer les commentaires que le major Dunsdon a alors formulés (et qui ont été cités au cours du contre-interrogatoire) quant au contexte dans lequel ils ont été dits. Je souligne qu'une ou deux des déclarations qui ont été faites à l'enquêteurs n'étaient certainement pas des remarques que le major Dunsdon a formulées au plaignant lors de l'entrevue qui a suivi l'évaluation de la demande de celui-ci.

La demande du caporal-chef Lagacé est rejetée.

A.G. Lynch-Staunton

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HR-6 Paul LAGACÉ C.P. 802 Kamloops Colombie-Britannique V2C 5M4

les Forces armées canadiennes

101, promenade Colonel By Ottawa Ontario K1A 0K2

(du 4 janvier au 12 avril 1988)

Station des Forces canadiennes Kamloops Colombie-Britannique

l'état matrimonial et la situation de famille

Les Forces armées canadiennes ont fait preuve de discrimination à mon endroit en me refusant une promotion et en me traitant différemment du fait de mon état matrimonial et de ma situation de famille, violant ainsi les articles 7 et 10 de la Loi canadienne sur les droits de la personne.

Je suis membre des Forces armées canadiennes et je vis en union de fait avec ma conjointe et son fils depuis 1980.

(suite à la page suivante)

Kamloops C.-B. 16e mai 88

P. M. Lagacé Catherine M. Levine

Le 16 novembre 1987, j'ai demandé à être inscrit au Programme de formation des aspirants-officiers. Je crois avoir les qualités requises et répondre à tous les critères. Le 4 janvier 1988, le major Dunsdon a rejeté ma candidature. Le 7 janvier 1988, il m'a fait savoir que la situation de famille entre en ligne de compte quand on aspire à devenir officier, ajoutant : Pourquoi ne vous mariez-vous pas pour éviter tous ces problèmes?. Plus tard, ce jour-là, le lieutenant Jodoin m'a dit que ma conjointe de fait ne cadrerait pas bien dans le quartier des officiers, car notre vie personnelle est scrutée à fond quand on est officier.

Je considère également que les incidents suivants confirment que j'ai été traité différemment :

En décembre 1987, en prévision d'une nouvelle affectation à la SFC Holberg, j'ai reçu une série de formulaires de sélection qui est normalement remise aux familles se trouvant dans une telle situation. Ces formulaires servent à recueillir de l'information sur la famille et font partie d'une processus d'évaluation destiné à déterminer la capacité d'adaptation au nouvel endroit.

J'ai rempli les formulaires et les ai envoyés à Ottawa. Le 18 janvier 1988, la SFC Kamloops adressait au QGDN, à Ottawa, un message portant la mention : Le militaire a les qualités voulues pour être affecté à la SFC Holberg. Le 21 janvier 1988, ma candidature était rejetée avec la mention suivante : l'union de fait n'est pas reconnue comme une union légitime... pour ce qui est de la conjointe de fait et de son fils à charge, toute mesure de sélection incombe au militaire et non pas à la SFC. Le 1er février 1988, j'ai appris que j'étais maintenant affecté à la SFC North Bay. Cela me défavorisera sur le plan financier.

Le 8 avril 1988, mon parrain de la SFC North Bay, chargé de m'aider à me réinstaller, m'a appelé pour me conseiller de me mettre en rapport avec l'officier du logement afin de confirmer la réservation d'un emplacement pour maison mobile. Il en avait fait la demande à l'officier qui lui avait répondu qu'il restait deux places libres et qu'aucun nom ne figurait sur la liste d'attente. J'ai parlé à l'officier du logement de la SFC North Bay le 11 avril 1988 et il m'a demandé si j'étais marié et si j'avais déjà vécu à la SFC North Bay. Il m'a aussi demandé si j'étais la même personne qui vivait en union de fait et avait déposé une plainte auprès de la Commission canadienne des droits de la personne. Il a ensuite demandé : quel a été le verdict ?. Puis il m'a signalé qu'il n'y avait aucun emplacement pour maison mobile de disponible. Le 12 avril 1988, j'ai reçu un message de la SFC North Bay indiquant que je n'avais pas droit à un emplacement pour maison mobile parce que les documents indiquent que vous êtes célibataire.

Kamloops (C.-B.) 16e mai 88

P. Lagacé Catherine M. Levine

HR-7

Paul LAGACÉ C.P. 802

Kamloops Colombie-Britannique V2C 5M4

les Forces armées canadiennes

101, promenade Colonel By Ottawa Ontario K1A 0K2

(du 4 janvier au 12 avril 1988)

Station des Forces canadiennes Kamloops Colombie-Britannique

l'état matrimonial et la situation de famille

Les Forces armées canadiennes ont fait preuve de discrimination à mon endroit en me refusant une promotion et en me traitant différemment du fait de mon état matrimonial et de ma situation de famille, violant ainsi les articles 7 et 10 de la Loi canadienne sur les droits de la personne.

Je suis membre des Forces armées canadiennes et je vis en union de fait avec ma conjointe et son fils depuis 1980.

(suite à la page suivante)

North Bay (Ont.) 30e juin 88

P. M. Lagacé

Le 16 novembre 1987, j'ai demandé à être inscrit au Programme de formation des aspirants-officiers. Je crois avoir les qualités requises et répondre à tous les critères. Le 4 janvier 1988, le major Dunsdon a rejeté ma candidature. Le 7 janvier 1988, il m'a fait savoir que la situation de famille (centre en ligne de compte quand on aspire à devenir officier, ajoutant : Pourquoi ne vous mariez-vous pas pour éviter tous ces problèmes?. Plus tard, ce jour-là, le lieutenant Jodoin m'a dit que ma conjointe de fait ne cadrerait pas bien dans le quartier des officiers, car notre vie personnelle est scrutée à fond quand on est officier.

Je considère également que les incidents suivants confirment que j'ai été traité différemment :

En décembre 1987, en prévision d'une nouvelle affectation à la SFC Holberg, j'ai reçu une série de formulaires de sélection qui est normalement remise aux familles se trouvant dans une telle situation. Ces formulaires servent à recueillir de l'information sur la famille et font partie d'une processus d'évaluation destiné à déterminer la capacité d'adaptation au nouvel endroit.

J'ai rempli les formulaires et les ai envoyés à Ottawa. Le 18 janvier 1988, la SFC Kamloops adressait au QGDN, à Ottawa, un message portant la mention : Le militaire a les qualités voulues pour être affecté à la SFC Holberg. Le 21 janvier 1988, ma candidature était rejetée avec la mention suivante : l'union de fait n'est pas reconnue comme une union légitime... pour ce qui est de la conjointe de fait et de son fils à charge, toute mesure de sélection incombe au militaire et non pas à la SFC. Le 1er février 1988, j'ai appris que j'étais maintenant affecté à la SFC North Bay. Cela me défavorisera sur le plan financier.

Le 8 avril 1988, mon parrain de la SFC North Bay, chargé de m'aider à me réinstaller, m'a appelé pour me conseiller de me mettre en rapport avec l'officier du logement afin de confirmer la réservation d'un emplacement pour maison mobile. Il en avait fait la demande à l'officier qui lui avait répondu qu'il restait deux places libres et qu'aucun nom ne figurait sur la liste d'attente. J'ai parlé à l'officier du logement de la SFC North Bay le 11 avril 1988 et il m'a demandé si j'étais marié et si j'avais déjà vécu à la SFC North Bay. Il m'a aussi demandé si j'étais la même personne qui vivait en union de fait et avait déposé une plainte auprès de la Commission canadienne des droits de la personne. Il a ensuite demandé : quel a été le verdict?. Puis il m'a signalé qu'il n'y avait aucun emplacement pour maison mobile de disponible. Le 12 avril 1988, j'ai reçu un message de la SFC North Bay indiquant que je n'avais pas droit à un emplacement pour maison mobile parce que les documents indiquent que vous êtes célibataire.

J'ai souscris au régime de soins dentaires pour les personnes à charge en septembre 1987, indiquant alors comme situation de famille : union de fait. J'ai été accepté et j'ai versé des cotisations durant huit mois. Puis, le 1er mai 1988, on m'a dit que

les gens vivant en union de fait n'étaient pas admissibles au régime, ce qui fait que j'ai cessé d'être assuré.

North Bay (Ont.) 30e juin 88

P. Legacé

HR-23

CONFIDENTIEL

Forces armées canadiennes Commandement aérien

Station des Forces canadiennes Kamloops C.P. 4000 Kamloops (C.-B.) V2C 5R7

Le 3 février 1987

Quartier Général de la Défense Nationale Ottawa, Canada K1A 0K2

A l'attention du DACPNO

RAPPORT D'ÉVALUATION DU RENDEMENT ANNUEL REFUS DE SIGNER 113 455 711 CPL PM LAGACÉ 171

  1. Le militaire susmentionné a refusé de signer son rapport d'évaluation du rendement. Il n'a pas voulu changer d'idée à ce sujet même après que le chef des opérations et le CDOA lui eurent expliqué que le fait de signer un tel rapport ne signifie pas qu'on en accepte le contenu; cela indique seulement que l'on a lu 4A et discuté du contenu des sections 5A et 5C.
  2. Les raisons qu'il a invoquées pour ne pas signer étaient les suivantes:
    1. le texte ne faisait pas mention des efforts très importants qu'il avait déployés durant les premiers mois de l'année;
    2. il était déjà arrivé que le texte du rapport semble plus favorable que la cote qui lui avait été attribuée, de sorte qu'il ne souscrivait pas à la directive interdisant au militaire de voir l'ensemble du rapport.
    3. Le CPL Lagacé a déposé un grief auquel il a fait franchir toutes les étapes de la procédure prévue par le MDN, mais qui a été rejeté à chacune des étapes. Il a ensuite déposé devant la Commission canadienne des droits de la personne une plainte qui fait actuellement l'objet d'audiences. Je ne m'oppose pas à ce qu'il exerce son droit de démasquer toute injustice dont il
    4. pourrait être l'objet. Il se pourrait même que son refus ait du bon. Ce que je crains, toutefois, c'est que le CPL Lagacé, après avoir reçu beaucoup d'attention durant l'examen de son grief, n'ait adopté une attitude d'affrontement à l'égard de tout règlement ou de toute procédure auxquels il ne souscrit pas personnellement.

  3. Sans être disposé à faire quelque recommandation que ce soit pour le moment, j'estime seulement devoir consigner mon inquiétude par écrit.

Le commandant,

R. J. Dunsdon Major

Pièce jointe : 1

CONFIDENTIEL

HR-24

113 455 711 CPLC LAGACÉ P.M.

31 janvier 1954 171 technicien de la défense aérienne

SFC Kamloops 2381 Kamloops (Colombie-Britannique)

Administration (Pers) 68 Logistique 69 Sécurité 81

16 novembre 87 P.M. Lagacé

2 1 1 1 2 5

11 déc. 1987 Dr J.L. Mabee

Le CPLC Lagacé a fait la preuve de sa capacité de poursuivre ses études. Son travail comme conseiller bénévole en matière de drogues et d'alcool, de même que sa bonne condition physique et sa participation aux sports témoignent de son potentiel. Le CPCL Lagacé a été promu à son rang actuel en 1987, et il n'est pas encore possible d'évaluer son aptitude au commandement. Il a eu tendance par le passé à se rebiffer ou à ignorer le système s'il n'était pas d'accord. Je recommande que l'on évalue au moins un ou deux rapports d'évaluation de son rendement comme CPLC avant de recommander son inscription au PFAO.

le 4 janv. 88 R.J. Dunsdon, major

HR-25

Conf .

Mise en garde orale - CPL Lagacé 13 fév. 1986

Agent d'adm. Demander que la mise en garde verbale et les pièces jointes soient versées au dossier personnel confidentiel du CPL Lagacé.

R. Parent major

Commis Prendre note - Verser au dossier personnel

CONFIDENTIEL

MISE EN GARDE ORALE

A la date indiquée ci-dessous, le CPL Lagacé, P.M., technicien de la défense aérienne 171 (113 455 711), a reçu une mise en garde orale sur les points suivants :

Il a contrevenu aux règlements des FC en parlant volontairement et sans permission aux journalistes de la politique des FC en matière de logement et en exprimant des opinions personnelles négatives à ce sujet, sachant que des articles pourraient être publiés, alors que la question en litige faisait l'objet d'un examen de la part des autorités supérieures. C'est la troisième fois que le CPL Lagacé conteste et critique publiquement la politique des FC dans les médias. On lui a fait savoir de vive voix qu'il s'agissait là d'une conduite inacceptable qui témoignait d'un manque de jugement flagrant. On lui a également signalé que si les membres des FC ont des doléances à propos d'une question donnée, un mécanisme est prévu, au sein des FC, pour les exprimer.

Si le CPL Lagacé est pris de nouveau à critiquer publiquement la politique des FC, il recevra un avertissement écrit. Il a également été informé qu'une note relative à cette mise en garde orale sera versée à son dossier personnel à l'unité.

13 fév. 86 R. J. Parent, maj.

DISTRIBUTION

Dossier personnel à l'unité Officier - Maintenance

CONFIDENTIEL

HR-32

C.P. 802 Kamloops (C.-B.) V2C 5M4

Le 2 février 1988

Mme Barbara Westerman Commission canadienne des droits de la personne C.P. 6 #600 - 609 West Hastings Vancouver (C.-B.) V6B 4W4

Madame,

Comme je vous lai mentionné durant notre conversation téléphonique du 2 février 1988, il est devenu nécessaire d'intenter une action judiciaire contre le ministère de la Défense nationale pour une critique récente qui a eu d'importantes répercussions négatives sur ma carrière.

Ce dernier incident a eu lieu le 4 janvier 1988. Bien que cet incident implique une démarche plus directe, il convient de souligner que les officiers de surveillance se sont livrés à de nombreuses critiques verbales depuis que j'ai déposé ma plainte en 1984. J'ai commencé à m'inquiéter du sérieux des menaces le 13 février 1986, lorsque le major R. J. Parent a déclaré : Cette question de l'union de fait et des droits de la personne nuira sans doute à votre carrière dans l'avenir. Cette remarque a été faite durant un entretien d'avertissement oral. Ce qui m'inquiète plus particulièrement, c'est qu'on a versé une note relative à cet avertissement oral dans mon dossier personnel confidentiel. Cela va à l'encontre des règlements et témoigne d'une volonté de nuire à mon avancement professionnel futur.

Lorsque nous sommes déménagés à Kamloops en juin 1986, je croyais que la question de mon union de fait et de ma plainte auprès de la Commission canadienne des droits de la personne ne nuirait pas à ma carrière. Cependant, les observations du major R. J. Dunsdon sur mon formulaire de demande d'inscription au programme de formation des aspirants-officiers confirment qu'il y a bel et bien représailles comme je le prétendais. Vous trouverez ci-joint copie du document en question. Il importe que vous sachiez que mon aptitude au commandement a été évaluée dans le cadre d'un cours de chef subalterne que j'ai suivi en février 1981.

Dans le cadre d'une entrevue avec le major Dunsdon le 7 janvier 1988, j'ai appris que pour devenir officier, il faut être disposé à accepter toutes les règles, même celles auxquelles on ne souscrit pas. Durant cet entretien, on m'a également signalé que la situation de famille entre en ligne de compte quand on aspire à

devenir officier. Le major Dunsdon a clairement indiqué qu'il ne pouvait pas recommander ma candidature parce que vous n'avez pas démontré que vous aviez les qualités nécessaires pour faire un bon officier, et je ne vois pas comment vous pourriez cadrer parmi les officiers. Il a ajouté : Pourquoi ne vous mariez-vous pas pour éviter tous ces problèmes?. L'impression que j'ai gardée de l'attitude du major Dunsdon, c'est que j'avais fait l'erreur de contester des politiques militaires et que j'en subirais les conséquences. Plus tard, ce jour-là, j'ai rencontré le Lt Jodoin pour discuter de la meilleure façon de procéder pour que lion donne suite à ma demande d'inscription au cours de formation des aspirants-officiers. Il a également souligné que ma conjointe de fait ne cadrerait pas bien dans le quartier des officiers, car notre vie personnelle est scrutée à fond quand on est officier.

Comme je l'ai mentionné durant notre conversation téléphonique, il est très peu probable qu'un officier de surveillance admette franchement avoir eu recours à des mesures de représailles. Cependant, il s'agit-là de la première attestation écrite en ce sens. J'ai réussi à acquérir plus de qualités professionnelles que nécessaire, mais je ne peux même pas poser ma candidature pour participer aux programmes. Je demande donc que l'on fasse enquête et que, si la Commission le juge raisonnable, l'on dépose des accusations contre le ministère de la Défense nationale en vertu de 1farticle 45 de la Loi sur les droits de la personne qui interdit le recours à l'intimidation contre toute personne qui a porté plainte aux termes de la Loi. Merci de votre aide à cet égard.

Je vous prie d'agréer, Madame, mes salutations distinguées.

Paul M. Lagacé

P.S. Vous trouverez également ci-joint copie de la note de service et de la mise en garde orale du 13 février 1986.

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