Tribunal canadien des droits de la personne

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DÉCISION RENDUE LE 8 JANVIER 1982

D. T. 1/ 82

LA LOI CANADIENNE SUR LES DROITS DE LA PERSONNE (S. C. 1976- 1977. C. 33 VERSION MODIFIÉE)

LITIGE METTANT EN CAUSE :

PHILIP D. FOUCAULT plaignant,

et

CANADIEN NATIONAL défendeur.

DEVANT : un tribunal des droits de la personne constitué en vertu de l’article 39 de la Loi et formé de M. Wendy Robson.

Ont comparu : Yvon Tarte, pour la Commission canadienne des droits de la personne et Philip Foucault L. L. Band, pour le Canadien National

AUDIENCES TENUES A TORONTO, CANADA, LE 7 JUILLET, LES 14, 15 ET 16 OCTOBRE, ET LE 9 NOVEMBRE 1981.

> Commencée le 7 juillet 1981, l’audience a été ajournée après la présentation de l’exposé de la Commission pour que je puisse statuer sur une motion de renvoi présentée par l’avocat du CN.

Dans une décision datée du 27 juillet suivant, j’ai affirmé que la Commission avait raison à première vue de prétendre que le CN avait commis, en matière d’emploi, un acte discriminatoire fondé sur un handicap physique, enfreignant ainsi l’article 3 et l’alinéa 7a) de la Loi canadienne sur les droits de la personne.

L’audience a repris le 14 octobre. Il s’agissait de déterminer si le refus du CN d’employer M. Foucault se rangeait parmi les cas d’exception prévus à l’alinéa 14 a) de la Loi canadienne sur les droits de la personne :

"14. Ne constituent pas des actes discriminatoires a) les refus, exclusions, expulsions, suspensions, restrictions, conditions ou préférences de l’employeur qui démontre qu’ils sont fondés sur des exigences professionnelles normales ;"

Définition de l’exigence professionnelle normale J’ai suivi le raisonnement du professeur R. L. MacKay, C. R. exposé dans la décision rendue par Frank D. Jones, C. R. dans l’affaire Foreman et al c. Via Rail et consignée dans le volume 1 du Canadian Human Rights Reporter, p. D. 11, raisonnement repris par R. D. Abbott dans l’affaire Voyageur Colonial, dont il est fait état dans le volume 1 du Canadian H. R. R. à la page D. 239. M. Abbott a déclaré ce qui suit :

"Le professeur MacKay a vu d’abord dans l’expression bona fide (normale) un élément subjectif comportant l’idée d’honnêteté, de bonne foi, de sincérité, d’absence de fraude ou de duperie, d’absence de simulation ou de feinte, d’authenticité... Le professeur MacKay a soutenu ensuite que bona fide comporte un élément d’objectivité. La ligne de conduite en matière d’emploi doit non seulement être prescrite honnêtement ou avec de bonnes intentions, mais également être appuyée par des faits et un raisonnement fondé sur la réalité concrête du monde du travail quotidien et de la vie"

(traduction).

Dans la présente affaire, l’avocat de la Commission m’a informé que la Commission ne se fondait pas sur le premier élément de la définition du professeur MacKay, et j’estime par ailleurs que le CN n’a pas agi de mauvaise foi.

Je dois donc étudier la preuve en fonction de l’ élément d’objectivité de la définition du professeur MacKay.

Examen de la preuve M. Rob Edwin Collins, un actuaire, est venu rendre compte des statistiques relatives aux blessures au dos. Il a défini son cadre de référence comme suit :

P. 187.22. (texte anglais original) "J’avais deux objectifs fondamentaux : d’une part, montrer de façon générale l’importance relative des blessures au dos (s’agit- il d’une blessure fréquente par rapport aux autres ? Est- elle plus coûteuse ou moins coûteuse que les autres ?) et, d’autre part, comparer les statistiques que je pourrais obtenir (elles m’ont surtout été fournies finalement par la Commission des accidents de travail) aux statistiques du CN auxquelles j’avais accès, de façon à déterminer si le nombre relatif de blessures au dos et leur coût étaient plus ou moins élevés au CN, et tout particulièrement dans le service des ponts et ouvrages d’art, qu’ailleurs"

(traduction).

Il s’est fondé notamment sur les résumés des statistiques de la Commission des accidents de travail concernant les réclamations reçues pour les années 1978 et 1979 ; sur les données de la Construction Safety Association of Ontario pour 1979 ; sur les rapports mensuels d’accidents du CN préparés régulièrement par l’ingénieur en chef de la région des Grands Lacs pour les périodes allant de mai 1979 à avril 1980 et de mai 1980 à avril 1981.

En résumé, ses recherches ont permis d’établir que 25.1 p. 100 de toutes les réclamations traitées par la Commission des accidents de travail se rapportaient à des blessures au dos. Selon les données de la Construction Safety Association of Ontario, 25.8 p. 100 de toutes les blessures subies l’avaient été au dos. Dans le cas du CN, le chiffre correspondant était de 37.3 p. 100 pour la région des Grands Lacs et de 54.8 p. 100 dans le service des ponts et ouvrages d’art.

La pièce R. 3( B) renferme les conclusions que M. Collins tire sur la fréquence des accidents, à partir des seules données de la Commission des accidents de travail et du CN. Le taux de fréquence des accidents est le nombre d’accidents ayant entraîné une perte de temps par million d’heures- hommes de travail

Commission janvier 1978 janvier 1979 janvier 1978 des accidents à décembre 1978 à décembre 1979 à décembre 1979 de travail

Blessures au dos 7.09 7.45 7.26 Autres blessures 20.98 22.44 21.73 Nombre total de blessures 28.07 29.89 28.99 mai 1979 mai 1980 mai 1979 à avril 1980 à avril 1981 à avril 1981

CN (tous services techniques, région des Grands Lacs)

Blessures au dos 3.79 6.98 5.37 Autres blessures 10.49 7.49 9.01 Nombre total de blessures 14.28 14.47 14.38 mai 1979 mai 1980 mai 1979 à avril 1980 à avril 1981 à avril 1981

CN (Service des ponts et ouvrages d’art, région des Grands Lacs)

Blessures au dos 6.65 22.44 14.39 Autres blessures 9.97 13.81 11.86 Nombre total de blessures 16.62 36.25 26.25

Il en a conclu que le risque de blessure au dos dans le service des ponts et ouvrages d’art de la section des services techniques des Grands Lacs du CN semblerait beaucoup plus élevé que ce que revèlent les statistiques de la Commission des accidents de travail ou les chiffres visant le reste de la section des services techniques des Grands Lacs du CN.

A la lumière des autres témoignages entendus, et particulièrement ceux du docteur McGeough et de M. Brummell, je suis convaincu que c’est effectivement le cas.

MM. Moon et Brummell ont témoigné au sujet des exigences du poste de préposé à l’entretien des ponts au service des ponts et ouvrages d’art de la division des Grands Lacs du CN.

M. Peter Moon est un psychologue industriel diplômé que le CN a engagé pour étudier le travail de préposé à l’entretien des ponts. Pour obtenir tous les renseignements nécessaires, il a passé quelque temps dans la brousse du nord de l’Ontario à surveiller le travail d’un préposé à l’entretien des ponts, et il a fait remplir un questionnaire d’analyse de poste dont les résultats constituent les pièces R. 21 et R. 22. L’analyse a révélé que certaines caractéristiques usuelles du travail de préposé à l’entretien des ponts se situaient au- dessus de 87 en rang centile. P. 689, ligne 9 (texte original anglais) :

"De haut en bas. Milieu extérieur et sale, risque d’invalidité totale, de décès et de diminution partielle permanente, déplacements, travail agenouillé et courbé, risque d’invalidité temporaire, basse température, très grande fatigue physique, escalade, outils et matériel de manutention, trousses de premier soin, vibration, espace de travail restreint ou gênant, contamination de l’air, haute température, balancement, manipulation d’objets, caractéristiques artificielles du milieu, utilisation d’outils et d’instruments non de précision, équilibre corporel, doigté, odorat, intensité sonore, et coordination supérieure des mouvements corporels"

(traduction).

Il a indiqué, en guise de conclusion générale, que le travail de préposé à l’entretien des ponts était, sur le plan physique, l’un des plus exigeants qu’il ait jamais rencontré.

M. Dave Brummell a également fait une déposition de connaisseur sur le travail de préposé à l’entretien des ponts. Actuellement contremaître affecté à des fonctions spéciales au service des ponts et ouvrages d’art du CN, il a vu passablement de préposés à l’entretien des ponts exercer de leurs fonctions au cours de ses cinq années avec le CN. J’ai été très impressionné par sa description lucide des diverses activités accomplies par les hommes qui occupent le poste auquel aspirait M. Foucault, et c’est sans réticence que j’accepte son témoignage au sujet de la nature particulièrement ardue du travail de préposé à l’entretien des ponts. J’accepte en outre son témoignage suivant lequel les hommes en question dépendent beaucoup les uns des autres dans l’accomplissement d’activités telles que l’élinguage et le déplacement d’équipement et de matériaux pesants.

Témoignage médical Médecin chef régional du CN, de VIA Rail et d’Air Canada, le docteur Vincent McGeough fait partie du Bureau du service médical de la région depuis 14 ans. Il est également membre attitré du Canadian Board of Occupational Medicine.

Le docteur a décrit le type habituel d’examen médical que subit un éventuel employé. Une formule du CN, versée au dossier à titre de pièce R. 13, est remplie par un médecin. Si c’est possible, l’éventuel employé est examiné par un médecin du CN, mais dans la plupart des cas la tâche revient à un médecin de district, c’est- à- dire un médecin de famille de la région. En cas de problèmes, on s’attend à ce que le médecin de district communique avec le bureau médical de Toronto, et la décision finale relative à l’état de santé de l’intéressé est prise par le médecin chef régional qui est, à l’heure actuelle, le docteur McGeough.

Il a expliqué à la p. 325, ligne 12 (texte original anglais) :

"Nous procédons de cette façon parce que tout est relatif, et que chaque cas est particulier, vous savez. Nous essayons, dans la mesure du possible, de nous assurer que l’état de santé de l’intéressé lui permet de remplir les exigences de son poste"

(traduction).

Exprimant l’avis que M. Foucault n’était pas en mesure d’accomplir le travail de préposé à l’entretien des ponts, il a déclaré à la page 406, ligne 7 (texte original anglais) :

"Q. Croyez- vous qu’une personne... ou êtes- vous d’avis, en tant que médecin, qu’une personne ayant subi une discectomie du type de celle de M. Foucault a un dos fragile, ou non ?

R. Il a une faiblesse dorsale.

Q. Faiblesse dans quel sens ?

R. En ce sens qu’il peut plus facilement se produire des complications, en ce sens que son dos pourra être blessé plus facilement dans l’avenir, en ce sens qu’il se produira presque toujours une dégénérescence graduelle.

Q. Est- ce qu’un dos pareillement affaibli peut être inquiétant, du point de vue de la sécurité ?

R. Oui.

Q. De quelle façon ?

R. La nature du travail dont nous parlons exige que l’employé soulève des charges excessives et courbe continuellement le dos.

Q. D’après ce que vous connaissez de ce travail, l’employé exécute- t- il ces tâches en tandem avec d’autres ?

R. Oui, c’est le cas.

Q. Quel est donc le problème de sécurité dont vous parlez ?

R. La possibilité de blessure pour lui ou pour les autres augmente beaucoup" (traduction). Le docteur Terrence Pinkney est un médecin généraliste établi à Capreol depuis décembre 1972. Lui et son associé sont les médecins de famille des Foucault.

Le docteur Pinkney est également médecin de district pour le compte du CN ; c’est à ce titre qu’il a examiné M. Foucault et préparé, à l’intention du médecin chef régional du CN, un rapport daté du 24 août 1979 et versé au dossier à titre de pièce R. 13. Le docteur avait en sa possession les dossiers médicaux établis par lui et son partenaire, et il a déclaré que M. Foucault avait subi un examen le 18 août 1978, après qu’il eut ressenti des douleurs à l’endroit où il avait déjà été opéré en se levant le matin du 15 août. Du repos et de la chaleur lui furent prescrits et il revint au bureau le 21 août 1978, avant de retourner au travail le 22 août suivant.

Il a été examiné encore une fois le 20 février 1979, pour une douleur dans le bas du dos, qui n’était toutefois pas située là où il avait déjà été opéré... c’était à la gauche du champ de l’intervention chirurgicale qu’il avait déjà subie (traduction).

Le docteur Pinkney a également déclaré qu’il ne croyait pas, au moment où il avait signé la formule médicale, que M. Foucault était en assez bonne santé pour reprendre son travail, mais qu’il avait agi ainsi par sympathie, p. 296, ligne 18 (texte original anglais) :

"Vous savez, l’intéressé venait tout juste de perdre son emploi de mineur et avait besoin de travail, avec une jeune famille ; je lui ai dit que je ne croyais pas que ce serait accepté, que la décision finale incombait au médecin chef de Toronto, mais j’ai dit que j’y allais de mon approbation, en précisant toutefois qu’il ne devait pas être surpris que ce soit refusé"

(traduction).

Le docteur John Graham Evans a examiné M. Foucault le 16 juin 1981 au nom du CN. Diplômé de l’Université de Toronto, il a étudié la chirurgie à l’Université de Toronto et à Oxford, avant de devenir membre du Collège royal des médecins et chirurgiens du Canada, à titre de chirurgien orthopédiste, en 1959. Ancien chef du service de chirurgie orthopédique de l’hôpital St. Michael’s de Toronto, il est actuellement chirurgien orthopédiste traitant à St. Michael’s et au Scarborough Centenary Hospital, de même que professeur adjoint de chirurgie à l’Université de Toronto.

Il a demandé une nouvelle série de radiographies à la suite de son examen. Son rapport, daté du 17 juin 1981, figure au dossier à titre de pièce R. 10.

Le docteur Evans interprétait comme suit les radiographies de 1981 à la p. 240, ligne 9 (texte original anglais) :

"On pouvait constater une certaine dégénérescence, c’est- à- dire des signes d’usure, de la partie inférieure de son dos, entre la lombaire- 5, dernier segment inférieur mobile, et le segment inférieur suivant. On pouvait aussi observer un léger rétrécissement à ce niveau, et le reste de l’examen ne démontrait rien d’anormal"

(traduction).

Le docteur a également commenté le type d’opération subi par M. Foucault en 1971, en répondant comme suit aux questions qu’on lui posait à la p. 248, ligne 2 (texte original anglais) :

"Q. Compte tenu du type d’opération subi par M. Foucault, c’est- à- dire l’opération d’une hernie discale au niveau de la L- 5, S- 1 avec l’ablation d’une partie de la lame et le rétrécissement de l’espace ainsi que la dégénérescence, comment sa capacité de soulever des poids est- elle affectée, quant à la stabilité et au pivot de la région L- 5, S- 1 ?

R. Cela augmente habituellement la tension et entraîne une baisse d’efficacité avec le temps.

Q. Le risque de blessure ou de problème augmente- t- il ?

R. Oui.

Q. Dans quelle proportion, selon vous ?

R. D’environ 25 à 30 p. 100" (traduction). Le docteur Rénald Simard a examiné M. Foucault au nom de la Commission des droits de la personne le 2 février 1981. Diplômé de l’Université d’Ottawa, il a fait cinq ans de médecine générale, puis quatre ans de perfectionnement en médecine de réadaptation. Actuellement professeur adjoint de médecine à l’Université d’Ottawa dans la Division de médecine de réadaptation, il est également médecin consultant en matière de maladies aiguës auprès d’hôpitaux généraux d’Ottawa, notamment l’Hôpital général et l’Hôpital municipal d’Ottawa, de même que membre à temps plein du personnel du Centre de réadaptation de l’Hôpital royal d’Ottawa. Il est membre du Collège royal des médecins et chirurgiens du Canada.

Son rapport constitue la pièce C. 7. Dans celui- ci et dans son témoignage, le docteur Simard a affirmé qu’il n’avait découvert aucun signe de modifications secondaires des muscles ou du mouvement de l’épine dorsale qui indiquerait une vieille douleur dorsale chronique. Rien n’indiquait non plus que M. Foucault avait été absent du travail autrement que pour de très brèves périodes.

Il a conclu dans son rapport, à la p. 611, ligne 22 (texte original anglais) :

"Le patient devrait être capable d’effectuer du travail ou des exercices physiques d’une difficulté moyenne à grande sans plus de danger de réapparition de problèmes dorsaux que dans le cas d’une personne n’ayant jamais été opérée au dos"

(traduction).

Les médecins étaient d’accord sur certains points. Ils ont convenu que M. Foucault s’était remarquablement bien remis de son opération de 1971. On semble s’entendre sur le fait que les tests neurologiques et autres n’indiquent pas toujours s’il existe ou non un problème dorsal permanent, et que personne ne peut prédire quand le problème pourrait réapparaître et qui pourrait en être victime.

Résumé et conclusion M. Foucault a subi en 1971 une opération qui a consisté à lui enlever une partie ou la totalité du disque situé au niveau L- 5, S- 1. Il a connu des périodes de douleurs dorsales mineures à plusieurs reprises en 1978 et 1979. Il a postulé le poste de préposé à l’entretien des ponts pour le CN et a été examiné par le docteur Pinkney à la fin d’août 1979. Le docteur ayant indiqué sur la formule médicale qu’il était en bonne santé, il a commencé à travailler pour le CN pour être ensuite congédié le 10 septembre 1979 à la suite d’une révision du rapport médical par le médecin autorisé.

Je dois décider si le refus d’emploi du CN était fondé sur une exigence professionnelle normale. Je suis aidé dans cette décision par le raisonnement du tribunal dans l’affaire K. S. Bhinder c. le Canadien National, qui a rendu sa décision le 22 septembre 1981. Ainsi, il est écrit à la p. 80, après un examen approfondi des décisions américaines et canadiennes pertinentes :

"Dans toutes les affaires précitées, les défendeurs ont tenté de justifier un acte discriminatoire en soutenant que les plaignants, du fait d’une caractéristique particulière, étaient moins aptes que les autres candidats à remplir les fonctions de l’emploi en question. Il incombe à l’employeur de démontrer que ses exigences sont vraiment justifiées et qu’elles ne reposent pas sur des suppositions gratuites ou des stéréotypes."

Dans cette affaire, le tribunal a également examiné des cas où la sécurité d’autrui était en cause, et il a conclu à la page 89 :

"Ainsi, les emplois comportant des risques sont traités comme des cas spéciaux d’exception au titre des exigences professionnelles normales, dans la mesure où d’autres personnes sont mises en danger ou se voient imposer d’autres contraintes. L’ampleur de la responsabilité qui incombe à l’employeur d’établir le bien- fondé d’une exigence professionnelle discriminatoire varie selon l’importance du risque encouru et la nécessité de l’exigence en question."

Et dans le résumé, à la page 148 : 11. L’idée d’ exigence professionnelle normale repose sur la détermination de la capacité d’un employé d’exécuter ses fonctions, c’est- à- dire que l’exigence est fonction du mérite. Si, en raison de l’une de ses caractéristiques, une personne est incapable d’exercer les fonctions d’un emploi donné, l’employeur est en droit de l’exclure, même si cette caractéristique constitue un motif de distinction illicite aux termes de la Loi. C’est à l’employeur qu’il incombe de prouver que ses exigences sont vraiment justifiées et qu’elles ne découlent pas d’hypothèses sans fondements ou de stéréotypes.

M. Foucault fait partie d’une catégorie assez exclusive de personnes ayant subi une discectomie. Il postulait un emploi de préposé à l’entretien des ponts, emploi souvent dangereux et toujours exigeant physiquement. Les statistiques font état d’un nombre disproportionné de blessures au dos chez ceux qui exercent cet emploi, ainsi que d’une forte probabilité de rechute chez ceux qui ont déjà eu des problèmes graves au dos. De plus, le préposé à l’entretien des ponts effectue son travail en compagnie d’autres personnes et, compte tenu de l’impossibilité de prévoir la réapparition d’une blessure au dos, M. Foucault pourrait présenter un danger pour ses collègues.

Décision

J’estime donc que le défendeur s’est acquitté du fardeau de la preuve qui lui incombait et que le fait de ne pas engager, comme préposés à l’entretien des ponts, des personnes ayant subi une discectomie constituait une exigence professionnelle normale et non un acte discriminatoire proscrit. La plainte de Philip Foucault est donc rejetée.

Fait à Peterborough, le 24 décembre 1981.

M. WENDY ROBSON

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