Tribunal canadien des droits de la personne

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Canadian Human Rights Tribunal Tribunal canadien des droits de la personne

ENTRE :

RICHARD WARMAN

le plaignant

- et -

COMMISSION CANADIENNE DES DROITS DE LA PERSONNE

la Commission

- et -

FRED KYBURZ

l'intimé

MOTIFS DE LA DÉCISION

2003 TCDP 18

2003/05/09

MEMBRES INSTRUCTEURS : Anne L. Mactavish, présidente

Shirish Chotalia, membre

Eve Roberts, c.r., membre

(TRADUCTION)

TABLE DES MATIÈRES

I. INTRODUCTION

II. DÉFAUT DE FRED KYBURZ DE COMPARAÎTRE À L'AUDIENCE

III. LES QUESTIONS À EXAMINER

IV. LE VOLET DE LA PLAINTE RELEVANT DE L'ARTICLE

A. M. Kyburz a-t-il diffusé ou fait diffuser de façon répétée les messages contenus dans le site Web en question?

B. Ces messages ont-ils été diffusés en recourant aux services d'une entreprise de télécommunication relevant de la compétence du Parlement?

C. Les questions abordées dans les messages sont-elles susceptibles d'exposer à la haine ou au mépris des personnes appartenant à un groupe identifiable sur la base des critères énoncés à l'article 3?

i) Quelles sont les questions abordées dans les messages diffusés par M. Kyburz?

ii) Les questions abordées dans les messages sont-elles susceptibles d'exposer à la haine ou au mépris des personnes appartenant à un groupe identifiable sur la base des critères énoncés à l'article 3?

D. Conclusion concernant le volet de la plainte relevant de l'article 13

V. LE VOLET DE LA PLAINTE RELEVANT DE L'ATICLE 14.1 - REPRÉSAILLES

A. Les soi-disant messages de représailles

B. Les messages non divulgués

C. Analyse du volet de la plainte concernant les représailles

VI. L'AVIS DE DROIT D'AUTEUR

VII. LES MESURES DE REDRESSEMENT

A. Le volet de la plainte relevant de l'article 13

i) Ordonnance de cesser et de s'abstenir

ii) Indemnité spéciale

iii) Intérêts

iv) Sanction pécuniaire

B. Le volet de la plainte relevant du paragraphe 14.1

i) Ordonnance de cesser et de s'abstenir

ii) Indemnité pour préjudice moral

iii) Intérêts

iv) Indemnité spéciale

VIII. L'ORDONNANCE

I. INTRODUCTION

[1] Richard Warman est un avocat d'Ottawa. Le 2 février 2002, M. Warman a déposé auprès de la Commission canadienne des droits de la personne une plainte contre Fred Kyburz. Dans sa plainte, M. Warman a allégué que M. Kyburz a utilisé son site Web pour diffuser des messages exposant à la haine ou au mépris des groupes identifiables, contrevenant ainsi à l'article 13 de la Loi canadienne sur les droits de la personne. M. Warman a ultérieurement modifié sa plainte, avec l'autorisation du Tribunal, afin d'y inclure une autre allégation, à savoir que M. Kyburz a exercé des représailles contre lui parce qu'il a porté plainte à la Commission des droits de la personne, ce qui va à l'encontre de l'article 14.1 de la Loi. M. Warman a allégué que ces représailles ont été exercées au moyen du compte personnel de courrier électronique et du forum de discussion de M. Kyburz.

II. DÉFAUT DE FRED KYBURZ DE COMPARAÎTRE À L'AUDIENCE

[2] Ni M. Kyburz ni aucun mandataire n'a comparu à l'audience sur la plainte de M. Warman. Le dossier révèle que M. Kyburz s'est vu signifier personnellement la documentation concernant la plainte. Les documents signifiés à M. Kyburz comprenaient l'avis d'audience, qui indiquait les dates et le lieu de celle-ci. Peu après qu'ils eurent été signifiés à M. Kyburz, ces documents ont été retournés au Tribunal, avec la mention [TRADUCTION] Retournés pour fraude et absence de compétence inscrite en travers de la page liminaire, suivie de ce qui semblait être la signature de M. Kyburz (1). M. Kyburz a également transmis au Tribunal un avis de droit d'auteur concernant le nom d'Ernst-Friedrich Kyburz.

[3] Le Tribunal est convaincu que M. Kyburz a été avisé de la plainte de M. Warman et de la tenue de l'audience en l'espèce. Cette conclusion est confirmée par le matériel téléchargé à partir du forum Web de M. Kyburz, qui démontre très clairement que ce dernier était au courant de l'audience et a décidé de ne pas participer à l'instance.

III. LES QUESTIONS À EXAMINER

[4] En ce qui concerne le volet de la plainte de M. Warman relevant de l'article 13, il y a trois questions à examiner pour déterminer s'il est fondé (2) :

  1. M. Kyburz a-t-il diffusé ou fait diffuser de façon répétée les messages contenus dans le site Web en question?
  2. Ces messages ont-ils été diffusés en recourant aux services d'une entreprise de télécommunication relevant de la compétence du Parlement?
  3. Les questions abordées dans les messages sont-elles susceptibles d'exposer à la haine ou au mépris des personnes appartenant à un groupe identifiable sur la base des critères énoncés à l'article 3?

[5] Le Tribunal doit également déterminer si M. Kyburz a exercé ou menacé d'exercer des représailles contre M. Warman en raison de la plainte déposée initialement par ce dernier auprès de la Commission canadienne des droits de la personne en vertu de l'article 13, en contravention de l'article 14.1 de la Loi canadienne sur les droits de la personne.

[6] Si l'un et(ou) l'autre volet de la plainte sont fondés, il faudra déterminer les mesures de redressement qui s'imposent.

IV. LE VOLET DE LA PLAINTE RELEVANT DE L'ARTICLE 13

A. M. Kyburz a-t-il diffusé ou fait diffuser de façon répétée les messages contenus dans le site Web en question?

[7] Le volet de la plainte de M. Warman relevant de l'article 13 a trait à un site Web, dont l'adresse est www.patriotsonguard.org. Durant son témoignage, M. Warman a identifié de nombreux documents qu'il avait téléchargés à partir de ce site, y compris la page d'accueil et de nombreux feuillets d'information quotidiens (FIQ). La page d'accueil décrit la mission des Patriots on Guard et précise que la page Web est présentée par Fred Kyburz, de Coleman, en Alberta. Chaque FIQ débute par un message de bienvenue qui invite le lecteur à s'abonner au bulletin de nouvelles mensuel des Patriots on Guard. Les frais d'abonnement doivent être acquittés auprès de Fred Kyburz, Poste restante, Bureau de poste de Blairmore, Blairmore (Alberta).

[8] M. Warman a indiqué dans son témoignage qu'il avait fait des recherches dans le site www.register.com qui, a-t-il expliqué, fournit les noms des titulaires d'adresse Web. Ces recherches ont révélé que le titulaire inscrit du site www.patriotsonguard.org était Fred Kyburz, Poste restante, Bureau de poste de Blairmore, Blairmore (Alberta).

[9] Au regard de la preuve qui lui a été présentée, le Tribunal conclut que Fred Kyburz avait la haute main sur le site www.patriotsonguard.org. En outre, le Tribunal est persuadé que M. Kyburz a fait diffuser le matériel contenu dans ce site-là. Le fait qu'un site Web soit un médium relativement passif qui exige que le lecteur pose des gestes concrets pour avoir accès au matériel qui y est publié n'atténue en rien la situation : M. Kyburz, en téléchargeant le matériel vers le serveur Web, a diffusé le matériel en question (3).

[10] Le dernier point à examiner est l'élément de répétition. Le degré de diffusion de ces messages atteste l'efficacité d'Internet comme outil de communication. Le site Web des Patriots on Guard avait un compteur de visiteurs. Le 10 septembre 2001, au moment où M. Warman a téléchargé le feuillet du jour, le nombre de visiteurs s'établissait à 61 370.

[11] Par conséquent, nous sommes convaincus que M. Kyburz a diffusé ou fait diffuser de façon répétée les messages contenus dans le site Web en question.

B. Ces messages ont-ils été diffusés en recourant aux services d'une entreprise de télécommunication relevant de la compétence du Parlement?

[12] Les messages visés par le volet de la plainte de M. Warman relevant de l'article 13 sont ceux qui figuraient sur le site Web des Patriots on Guard. Le dernier message du genre qui a été publié porte la date du 21 décembre 2001 et semble avoir été téléchargé par M. Warman ce jour-là.

[13] Comme nous l'expliquerons plus en détail plus loin dans la présente décision, M. Warman s'est plaint du contenu du site Web des Patriots on Guard au fournisseur de services Internet de M. Kyburz, ce qui a amené ce dernier à retirer le service. Dans son témoignage, M. Warman a affirmé que le site des Patriots on Guard a été fermé en permanence vers la fin de décembre 2001 ou au début de janvier 2002.

[14] On ne sait trop quelle version de l'article 13 s'applique au site Web des Patriots on Guard. La version initiale de la Loi canadienne sur les droits de la personne ne traitait pas de façon explicite des communications Internet. Cela n'a rien d'étonnant puisque la promulgation de l'article 13 remonte à 1977, soit bien avant qu'Internet ne devienne partie intégrante de notre vie. Dans le cadre de la réforme dont la législation canadienne a fait l'objet par suite de la proclamation de la Loi contre le terrorisme (4) le 24 décembre 2001, la Loi canadienne sur les droits de la personne a été modifiée afin d'ajouter la disposition suivante au paragraphe 13(2) :

Il demeure entendu que le paragraphe (1) s'applique à l'utilisation d'un ordinateur, d'un ensemble d'ordinateurs connectés ou reliés les uns aux autres, notamment d'Internet, ou de tout autre moyen de communication semblable…

[15] Toutefois, il n'importe pas en fin de compte de déterminer si les messages de M. Kyburz ont été diffusés avant que les modifications soient apportées à la législation (5). Dans Citron et autres c. Zündel (6), le Tribunal a conclu que la version antérieure de l'article 13 s'appliquait aux communications Internet; nous faisons nôtre le raisonnement énoncé par le Tribunal dans cette affaire.

C. Les questions abordées dans les messages sont-elles susceptibles d'exposer à la haine ou au mépris des personnes appartenant à un groupe identifiable sur la base des critères énoncés à l'article 3?

i) Quelles sont les questions abordées dans les messages diffusés par M. Kyburz?

[16] Afin de situer en contexte les messages litigieux, il est utile d'examiner la mission des Patriots on Guard, telle que décrite par ce groupe. Selon la page d'accueil de leur site Web, les Patriots on Guard … sont une organisation ayant pour mission de mettre en garde la population contre le travestissement des droits et libertés des citoyens, particulièrement de la part des tribunaux et des organismes d'application de la loi, au Canada et dans le monde entier . Pour remplir sa mission, l'organisation a recours aux FIQ. La plupart des FIQ reprennent des articles provenant d'autres sources, qui sont suivis d'un éditorial. Souvent, les éditoriaux sont rédigés à la première personne et semblent être l'œuvre de M. Kyburz.

[17] Un grand nombre des FIQ publiés initialement portent sur les présumés méfaits des Juifs ashkénazes (7). Par exemple, le FIQ du 22 octobre 2000 renferme plusieurs articles qui sont tirés de ce qui semble être un site Web syrien d'actualités et qui traitent d'actes d'agression ou de terrorisme auxquels se serait livré l'État d'Israël. Ces articles sont suivis d'un éditorial de M. Kyburz, dans lequel ce dernier explique sa compréhension de la différence entre ce qu'il appelle les Juifs du Sang dits séfarades et les Juifs ashkénazes. Les Juifs ashkénazes, qui selon M. Kyburz représentent environ 90 % de la population juive mondiale, ne sont pas de vrais Juifs mais plutôt des individus qui ont épousé la religion judaïque dans le courant du XIIIe siècle.

[18] M. Kyburz se défend d'être antisémite, affirmant que ses écrits visent à dissiper certains préjugés qu'ont certaines personnes à l'égard des Juifs . À cet égard, il écrit :

[TRADUCTION]

Je ne suis pas anti-Juifs. J'en ai contre certaines pratiques des Juifs ashkénazes. Ce sont eux qui sont à l'origine de toute la violence. Ce sont eux qui sont l'élément moteur des Nations Unies. Ce sont eux qui ont conçu le système actuel de prêts usuraires qui est la source de tellement de difficultés et de destruction. Ce sont eux qui ont la haute main sur les médias grand public qui diffusent des mensonges et des renseignements trompeurs. Ce sont eux qui contrôlent le côté sale de l'industrie cinématographique. Communisme , terrorisme , guerre et Juifs ashkénazes sont autant de synonymes.

Et M. Kyburz d'ajouter :

[TRADUCTION]

Je tiens toutefois à répéter qu'il y a des Juifs honnêtes, même parmi les Juifs ashkénazes. Nous ne devons pas nous en prendre aux Juifs mais plutôt à leurs activités sournoises, tout en nous attachant à dénoncer ceux qui s'adonnent à ces bassesses. Nous devons également nous en prendre à leurs laquais sans scrupule - les dirigeants gouvernementaux qui n'y pensent pas à deux fois avant d'exécuter leurs projets meurtriers.

[19] Un sentiment similaire est exprimé dans le FIQ du 24 octobre 2000. Commentant un article intitulé The 'English' Jew Behind the Foundation of Israel , M. Kyburz écrit :

[TRADUCTION]

«N'est-il pas étonnant que l'on découvre toujours que ce sont les Ashkénazes - qualifiés à tort de Juifs - qui sont les instigateurs des guerres. Partout où ils sont présents, les impostures, les fourberies et les meurtres sont monnaie courante.»

[20] Le 25 octobre 2000, M. Kyburz a publié un article de William Pierce intitulé There will be Hell to pay . Ce long article est très remarquable par l'attitude fielleuse manifestée envers les Juifs. L'auteur y aborde un certain nombre de questions, notamment le trafic d'esclaves de race blanche auquel les Juifs se seraient adonnés. Pierce affirme que l'esclavage blanc est florissant en Israël, où cette activité n'est pas illégale dans la mesure où les esclaves ne sont pas des Juifs. En fait, il prétend que l'esclavage blanc est sanctionné par la religion juive.

[21] Pierce évoque également le rôle des Juifs dans le domaine de la pornographie juvénile, faisant référence au démantèlement à Moscou d'un réseau de pornographie juvénile, présumément dirigé par trois Juifs. Il décrit les activités des pornographes en ces termes :

[TRADUCTION]

Il est presque impossible d'imaginer jusqu'à quel point la pornographie juvénile peut être une activité dégoûtante. Je ne parle pas ici des vidéos montrant des filles bien roulées de 15 ou 16 ans en train de faire l'amour. Je parle de choses tellement perverses et ignobles que la plupart des Américains ont peine à les imaginer. Je parle d'hommes filmés pendant qu'ils ont des relations sexuelles avec des fillettes de deux ou trois ans. Je parle de jeunes enfants de race blanche auxquels on inflige des sévices sexuels et qui sont violés à mort devant la caméra au grand plaisir de maniaques qui sont excités sexuellement à la vue de telles horreurs.

[22] Au sujet des maniaques ou, si l'on préfère, des consommateurs de pornographie juvénile, Pierce déclare :

[TRADUCTION]

«Ces malades, je suis désolé de le dire, ne sont pas tous Juifs, mais les Juifs sont en nombre disproportionné parmi eux.»

[23] Pierce explique ensuite que les médias américains n'assurent pas la couverture de ces choses-là, en raison de l'emprise des Juifs sur les médias.

[24] Comment doit-on lutter contre ceux qui se livrent à ces activités pornographiques? Selon Pierce, [TRADUCTION] ces gens-là devraient tout simplement être tués sur-le-champ, peu importe l'endroit où ils se trouvent . Après avoir décrit la mainmise des Juifs sur les médias, il précise :

[TRADUCTION]

«Qui plus est, les gens qui favorisent et encouragent ce genre d'individualisme extrême, de par la suprématie qu'ils exercent sur les médias, devraient tous être carrément exterminés.»

[25] Toutefois, Pierce ne limite pas ses commentaires à l'extermination des Juifs qui s'adonnent à la pornographie juvénile ou qui ont la haute main sur les médias. Il va jusqu'à prétendre, en fait, que l'élimination de tous les Juifs en Russie serait justifiée :

[TRADUCTION]

Les Juifs ont saigné à blanc la Russie au cours des 70 années de régime marxiste. Ils ont assassiné des dizaines de millions de Russes - les meilleurs - dans les camps de travail communistes, dans le sous-sol du quartier général de la police secrète ou en bordure des fosses communes aménagées dans les forêts partout en Russie et en Ukraine; ils ont forcé des milliers des plus belles jeunes femmes russes à se prostituer et en ont fait des esclaves après la chute du communisme; et voilà qu'ils enlèvent maintenant des enfants russes et les violent à mort devant la caméra afin de produire des films de pornographie juvénile à l'intention de riches occidentaux pervers. Les Juifs sont chanceux d'exercer encore une domination sur la majorité des stations de télévision et autres médias de masse en Russie - car si jamais le peuple russe devient vraiment conscient de ce que les Juifs lui font encore subir, il se soulèvera et les tuera, jusqu'au dernier, posant ainsi un geste tout à fait légitime.

[26] Tout en reconnaissant que ce ne sont pas tous les Juifs qui s'adonnent à la pornographie juvénile, Pierce pose comme postulat que tous les Juifs devraient être tenus responsables de ces [TRADUCTION] horribles atrocités , étant donné que [TRADUCTION] … ceux qui ne s'adonnent pas à la pornographie juvénile protègent ceux qui le font .

[27] Il ne semble pas que Fred Kyburz soit l'auteur de cet article; cependant, l'article 13 de la Loi n'exige pas que ce soit le cas. On est en présence d'un acte discriminatoire si l'intimé a abordé des questions susceptibles d'exposer à la haine ou au mépris des personnes appartenant à un groupe identifiable sur la base des critères énoncés à l'article 3, et ce, peu importe qui a rédigé le matériel.

[28] Comme pour les FIQ antérieurs, M. Kyburz a fait suivre d'un éditorial de son crû l'article qu'il a publié sur son site Web. Quels commentaires lui inspire l'article de Pierce? Il affirme :

[TRADUCTION]

J'aimerais préciser que les Juifs qui s'adonnent à ce genre d'atrocités ne sont pas de vrais Juifs. Il s'agit de Juifs ashkénazes qui ont épousé la foi juive pour des motifs politiques, comme nous l'avons vu dans le FIQ précédent. À l'avenir, je les désignerai simplement sous le nom d' Ashkénazes . Ce sont des escrocs. Ce sont eux qui sont à l'origine du communisme. Ce sont eux qui ont concocté les multiples façons d'écœurer les gens dans le monde entier. Ce sont eux qui ont conçu le système de prêts usuraires afin de nous saigner à blanc. Ce sont eux qui tiennent les rênes de l'OMS. Ce sont eux qui font la promotion des vaccins afin de nous rendre malades et dépendants à l'égard de leurs sociétés pharmaceutiques. Ce sont eux qui tiennent les commandes aux Nations Unies. Il n'y a rien d'étonnant à ce que les Nations Unies soient une machine meurtrière? Ce sont eux qui dictent la loi à nos gouvernements.

M. Kyburz termine son éditorial avec l'énoncé suivant :

* Avertissement *

Si les bons Juifs ne dénoncent pas les mauvais Juifs (les Ashkénazes), ils sont tout aussi coupables qu'eux!

[29] Commentant les observations formulées à la télévision par un ancien agent du SCRS au sujet de groupes comme les Patriots on Guard, M. Kyburz a écrit dans son FIQ du 9 novembre 2000 :

[TRADUCTION]

D'abord, je vous dirai que vous êtes bien mal avisé de qualifier de Juifs les meurtriers, agresseurs d'enfants, terroristes et pédophiles. Bien qu'ils se disent Juifs, ils ne le sont pas. Ils sont Ashkénazes. Sont-ils les fils de Satan? Je ne sais pas. Ce que je sais, c'est qu'il serait impossible que des enfants de Satan puissent commettre de pires crimes que ces gens-là…

[30] Dans le FIQ du 17 novembre 2000, qui renferme un extrait d'un livre intitulé Truth and Justice versus Lies and Hatred, M. Kyburz renchérit sur l'idée voulant que les Juifs ashkénazes soient des escrocs. Dans l'extrait en question, on met en doute le nombre de victimes de l'holocauste durant la Seconde Guerre mondiale, donnant à entendre qu'il n'est pas de six millions, comme on le prétend souvent, mais plutôt de l'ordre de 200 000 à 300 000. Dans une certaine mesure, les Juifs ont été, selon l'auteur, les artisans de leur propre malheur :

[TRADUCTION]

Les mesures anti-Juifs - qu'on a qualifiées à tort de mesures antisémites - prévues par les programmes nationaux-socialistes ont constitué, en fait, un affront aux Juifs qui étaient loyaux à l'État allemand. Le mouvement sioniste, qui s'étend au monde entier, a pris ces mesures parce qu'elles étaient essentielles pour soutenir ses efforts pour atteindre ses propres buts. C'est pourquoi le mouvement sioniste a entretenu le climat d'affrontement entre le gouvernement du Troisième Reich et les Juifs à l'échelle internationale. C'est quelque chose que nous ne sommes pas censés savoir aujourd'hui. Les sionistes étaient persuadés que leurs coreligionnaires ne seraient intéressés à coloniser la Palestine que s'ils faisaient l'objet d'une ségrégation dans leur pays d'accueil. Ils se sont même réjouis de l'adoption des lois de Nuremberg parce que celles-ci apportaient de l'eau à leur moulin, c.-à-d. qu'elles allaient dans le sens de leurs aspirations.

M. Kyburz dit avoir décider de publier cet extrait … pour dévoiler une partie de la vérité au sujet de l'holocauste .

[31] Dans son FIQ du 18 novembre 2000, M. Kyburz fait suivre un article dans lequel on critique les mesures prises par les Israéliens contre les Palestiniens durant la dernière Intifada du commentaire ci-après :

[TRADUCTION]

Les Ashkénazes sont dans leur élément. Ils excellent dans l'art de détruire les biens et la vie. C'est ce qu'ils font le mieux. Ils s'adonnent à leur art partout et chaque fois que cela leur est possible, comme ils l'ont fait au fil des siècles.

[32] Les observations formulées par M. Kyburz dans son FIQ du 18 décembre 2000 marquent le début d'un virage. Les Juifs sionistes sont désormais mis sur le même pied que les Juifs ashkénazes. Selon M. Kyburz, le plan d'action des Juifs sionistes devrait également provoquer la consternation chez le lecteur :

[TRADUCTION]

Maintenant, les Khazars (8) (Juifs sionistes) qui tiennent les commandes et créent les guerres pour Israël sont également les maîtres du NOI [nouvel ordre international (9)]. Pouvez-vous imaginer le sort qui vous attend, une fois que ces gens-là seront les maîtres absolus? N'oubliez pas que Staline était l'un d'eux. Il a tué des dizaines de millions de ses propres concitoyens. Selon certaines estimations, il en aurait exterminé jusqu'à une centaine de millions. Ces êtres dépravés ne sont pas devenus plus civilisés dans l'intervalle. Si on ne réussit pas à les stopper, nous ferons les frais de la colère de leur esprit dépravé et retors. Pour ma part, l'idée de devenir une de leurs victimes ne m'excite pas. Et vous qu'en pensez-vous?

Dans son FIQ du 25 mars 2001, M. Kyburz, faisant référence au FIQ du 25 octobre 2000, écrit :

[TRADUCTION]

[Cela] démontre la vraie nature des Juifs sionistes. Les enlèvements d'enfants, la pornographie juvénile, la pédophilie, l'esclavage et les meurtres sont leur spécialité. Cette spécialité, ils l'exercent au sein de nos tribunaux, des universités, des gouvernements, de la police, de la profession médicale - où ils se spécialisent dans les avortements -, partout où ils ont la possibilité de détruire la vie.

[33] Les FIQ subséquents décrivent les Juifs sionistes ou ashkénazes comme les terroristes les plus impitoyables au monde, comme des êtres non respectueux des droits, des libertés et de la vie d'autrui (10), comme un groupe de criminels et d'assassins dénués de tout scrupule, comme des sous-hommes atteints de démence (11), comme des gens qui tueront une grande proportion de la population mondiale si on ne les arrête pas (12).

[34] Les commentaires de M. Kyburz ne se limitent pas toujours aux Juifs sionistes ou ashkénazes et s'appliquent parfois à l'ensemble des Juifs. Par exemple, dans son FIQ du 21 décembre 2000, il écrit : [TRADUCTION] Les Juifs ont causé un tort incroyable dans le monde entier au fil des siècles. Il s'en prend ensuite particulièrement aux Juifs sionistes, affirmant qu'ils ne changeront jamais leurs façons de faire, car ce sont :

[TRADUCTION]

...des escrocs, des criminels, des bellicistes, des pédophiles, des gens qui sont contre la vie et pleins de haine… Voilà leur vraie nature. Ils ne peuvent changer et ne changeront pas. Si nous ne voulons pas qu'ils détruisent notre civilisation, notre mode de vie, nos droits et nos libertés, nous devrions veiller à les écarter de la prise de décisions. Par conséquent, il faut éviter de les admettre dans quelque institution gouvernementale que ce soit.

[35] Dans son témoignage, Richard Warman a indiqué qu'il est devenu conscient de l'existence du site Web des Patriots on Guard en mars 2001, alors qu'il s'occupait d'affaires de droits de la personne. Il a communiqué avec le fournisseur de services Internet de M. Kyburz afin de le sensibiliser au contenu du site. À la suite de cette démarche, le fournisseur en question a coupé l'accès au site, puis a fermé celui-ci. Selon M. Warman, le site Web des Patriots on Guard a été inaccessible pendant quelques jours en avril 2001 mais est redevenu accessible quelques jours plus tard par l'entremise d'un fournisseur de services différent.

[36] Les efforts faits par M. Warman pour faire fermer le site Web ne sont pas passés inaperçus auprès de M. Kyburz. Le 7 avril 2001, M. Warman a reçu un message électronique de quelqu'un qui s'est identifié comme étant Fred Kyburz et dont l'adresse électronique était kyburz@telusplanet.net. Les circonstances entourant l'envoi du message, ainsi que son contenu, prouvent selon la prépondérance des probabilités que l'expéditeur était M. Kyburz. Le message, dont copie a été transmise à des douzaines d'autres destinataires, peut être qualifié de diatribe contre M. Warman qui avait fait fermer le site Web des Patriots on Guard.

[37] Lorsqu'on examine le message, on constate que M. Kyburz a tenu pour acquis que M. Warman était lui-même de race juive. En fait, son venin est en grande partie dirigé vers M. Warman et ses frères juifs sionistes :

[TRADUCTION]

Vous avez le culot de me qualifier d' antisémite ! Je ne suis PAS antisémite - contrairement à vous! Je suis contre la vermine, la criminalité, les mauvais traitements envers les enfants, la pornographie juvénile et la propagande sioniste.

Vous êtes un antisémite parce que les gens de votre espèce ont les mains souillées du sang de milliers de Juifs et de millions de Blancs. Vous êtes antisémite, anti-Blancs et anti-droit… Ne vous ai-je pas prévenu, bande d'idiots, de mon intention de dénoncer votre plan sioniste à visée communiste. Maintenant vous m'avez donné une bonne raison de tenir ma promesse. Je vais mettre au grand jour, vous verrez, beaucoup d'atrocités que les gens de votre acabit ont commises. Vous verrez qui sont les VRAIS antisémites.

Vous qualifiez ma dénonciation des gestes déviants et des actes criminels des gens de votre espèce de haine contre un groupe identifiable (c.-à-d., en l'occurrence le peuple juif) . Il ne s'agit pas de haine de ma part; en revanche, vos frères sionistes manifestent, eux, une haine indicible contre des innocents (c.-à-d., les enfants de race blanche), de par leurs machinations insidieuses et meurtrières. Je dénoncerai sous peu les motivations qui peuvent amener vos frères juifs sionistes à agir ainsi. Vous pouvez hurler et crier aussi fort que vous pouvez que je suis ANTISÉMITE. Plus vous crierez fort, plus je dénoncerai vos intentions qui sont d'une bassesse répugnante. Allez-y. Je suis prêt pour la bataille.

[38] M. Kyburz a ensuite commencé à faire régulièrement référence à M. Warman dans ses FIQ. Ainsi, dans son FIQ du 5 août 2001, il écrit :

[TRADUCTION]

N'oubliez pas que ces Juifs sont les Juifs sionistes, et particulièrement les Juifs ashkénazes - qui sont tous des communistes invétérés. Ce sont également eux qui ont la mainmise sur les médias dans le monde entier. Ils sont aussi bien en selle à Hollywood. Est-il étonnant que les nouvelles que rapportent les médias soient déformées? Est-il étonnant qu'Hollywood ne produise que des saloperies?

Richard Warman... [M. Kyburz énumère ensuite les noms d'autres personnes qui se sont attirées ses foudres]... suis-je antisémite parce que je dénonce ces esprits criminels et meurtriers que vous appuyez et protégez avec tant de ferveur?

[39] Le FIQ du 15 décembre 2001 fait référence aux efforts de M. Warman pour faire fermer le site Web de M. Kyburz. Dans ce feuillet, M. Kyburz désigne expressément M. Warman par son nom. On trouve aussi dans le même texte le passage suivant :

[TRADUCTION]

Nous devons faire cesser les actions viles et basses et les incroyables atrocités de ces esprits mesquins. Seule une dénonciation complète peut permettre de mettre fin à ces machinations meurtrières. Il est difficile, voire impossible, pour une personne normale de comprendre comment quelqu'un peut être aussi méchant. Nous ferons mieux de nous faire à l'idée avant que ces gens-là nous empoisonnent avec les vaccins et autres poisons médicamentaux qu'ils nous offrent.

[40] Dans son FIQ du 18 décembre 2001, M. Kyburz qualifie M. Warman de misérable , indiquant qu'il est un laquais à la solde du gouvernement sioniste-communiste d'Israël. M. Kyburz traite ensuite les gens comme M. Warman d' [TRADUCTION] êtres criminels moins qu'humains qui … ne reculent devant aucun crime pour atteindre leur but qui est de dominer le monde entier .

[41] La dernière allusion à Richard Warman dans le site Web des Patriots on Guard est contenue dans le FIQ du 20 décembre 2001. Après avoir fait observer que les Juifs (sionistes) sont aussi méchants qu'ils l'ont toujours été et qu'ils s'emploient à fomenter des guerres dans le but d'en retirer des profits, M. Kyburz poursuit :

[TRADUCTION]

Richard Warman, si vous pouvez prouver que j'ai tort, sortez de votre tanière. Envoyez-moi un message électronique pour me faire part de vos objections. Ne soyez pas un lâche ou un poltron. Signez votre message. Et surtout ne vous avisez pas de faire fermer à nouveau mon site Web parce que vous n'aimez pas mon franc-parler. Si cela vous offusque que je dise la vérité, alors modifiez vos façons d'agir et amenez vos compagnons sionistes à faire de même. Je sais qu'il est presque impossible pour vous de changer de caractère. Vous êtes par nature vil, malhonnête et fourbe et il en est de même de vos frères sionistes.

[42] Peu après l'affichage de ce message sur le Web, le site des Patriots on Guard a été fermé définitivement. La preuve n'indique pas clairement si cette situation a été le résultat des efforts de M. Warman.

ii) Les questions abordées dans les messages sont-elles susceptibles d'exposer à la haine ou au mépris des personnes appartenant à un groupe identifiable sur la base des critères énoncés à l'article 3?

[43] Le témoignage du Dr Karen Mock, psychologue qui a été reconnue experte en matière de discrimination, d'antisémitisme, de racisme et de matériel haineux, a aidé le Tribunal à examiner cette question. En l'espèce, le matériel publié sur le site Web n'avait rien de subtil ou de nuancé; il était foncièrement haineux. Toutefois, le témoignage du Dr Mock a aidé à cerner certains thèmes antisémites traditionnels évoqués dans les documents, notamment la notion de meurtre rituel , l'objectif allégué de domination mondiale des Juifs et leur emprise manifeste sur diverses institutions (13).

[44] Les tribunaux se sont penchés sur la définition des termes hatred (haine) et contempt (mépris) dans certaines affaires relevant de l'article 13. Dans Canada (Commission des droits de la personne) c. Taylor (14), la Cour suprême du Canada a fait siennes les définitions de hatred et de contempt citées par le tribunal dans la décision Nealy c. Johnston (15). Dans Nealy, le tribunal a affirmé :

Le terme hatred connote un ensemble d'émotions et de sentiments comportant une malice extrême envers une autre personne ou un autre groupe de personnes. Quand on dit qu'on haït quelqu'un, c'est que l'on ne trouve aucune qualité qui rachète ses défauts. Toutefois, il s'agit d'un terme qui ne fait pas appel nécessairement au processus mental de regarder quelqu'un de haut et il est fort possible de haïr quelqu'un que l'on estime supérieur à soi en intelligence, en richesse ou en pouvoir. Aucun des synonymes utilisés dans le dictionnaire pour le terme hatred ne donne d'indice sur les motifs de la malice. Par contraste, contempt est un terme qui suggère le processus mental consistant à regarder quelqu'un de haut ou à le traiter comme inférieur.

[45] Dans Nealy, le tribunal s'est également interrogé sur le sens du mot exposer , tel qu'employé dans l'article 13. Citant la décision rendue par le tribunal initial dans Taylor, le tribunal a affirmé dans Nealy :

On ne trouve pas habituellement le verbe exposer dans les lois destinées à empêcher la propagande haineuse. Par contre, il est dans la majorité des cas question, par exemple dans le Règlement découlant de la Loi sur la radiodiffusion, dans les dispositions de la Loi sur les postes et dans divers articles connexes du Code criminel, de propos insultants ou injurieux, ou de déclarations qui incitent à la haine ou la fomentent.

Le verbe inciter veut dire attiser; fomenter signifie soutenir activement. Le verbe exposer est un terme plus passif, qui semble indiquer que la personne qui transmet le message n'a pas l'intention de susciter une réaction violente chez la personne qui le reçoit. Exposer à la haine implique également un genre de communication plus subtile et indirecte que l'insulte vulgaire ou le langage injurieux non déguisé. Le verbe exposer signifie : laisser une personne ou une chose sans protection; laisser sans abri ou défense; soumettre au danger, au ridicule, à la censure, etc. En d'autres termes, si un individu crée les conditions propices à la haine, laisse le groupe identifiable exposé à la rancune ou à l'hostilité, s'il le place dans une situation où il risque d'être haï, où la haine et le mépris sont inévitables, alors cet individu tombe sous le coup du paragraphe 13(1) de la Loi sur les droits de la personne.

[46] De l'avis du Tribunal, il ne fait aucun doute que les messages diffusés sur le site Web des Patriots on Guard sont susceptibles d'exposer à la haine ou au mépris les personnes de confession juive. En s'en prenant particulièrement aux Juifs ashkénazes, M. Kyburz a exercé une discrimination à l'égard des Juifs d'ascendance européenne en raison de leur religion ainsi que de leur origine nationale ou ethnique.

[47] Toutefois, M. Kyburz ne s'en prend pas uniquement aux Juifs d'ascendance européenne. Tout en concluant que les messages exposent à la haine ou au mépris les Juifs en général, et pas seulement les Juifs ashkénazes, le Tribunal désire faire remarquer que même si M. Kyburz s'acharne particulièrement sur les Juifs ashkénazes (16), certains de ses commentaires portent sur la soi-disant méchanceté et les soi-disant méfaits de l'ensemble des Juifs. En outre, M. Kyburz donne à entendre que les non-Ashkénazes sont complices des prétendues méchancetés des Juifs ashkénazes. Dans un certain nombre d'articles qu'il a publiés sur son site Web, M. Kyburz ne fait pas de distinction entre les Juifs ashkénazes et les Juifs qui ne sont pas d'origine européenne.

[48] Quand on les lit dans leur contexte, les messages publiés sur le site Web des Patriots on Guard indiquent au lecteur que les Juifs sont foncièrement retors et perfides et qu'ils ont un instinct meurtrier. Non seulement veulent-ils enlever, corrompre et tuer des enfants de race blanche , mais leur but ultime est de changer le monde. De tels messages ne peuvent que contribuer à fomenter la haine contre le peuple juif. Les messages qui préconisent ouvertement l'extermination du peuple juif, notamment ceux que renferme l'article de Pierce, sont encore plus inquiétants.

[49] En outre, l'emploi par M. Kyburz de termes tels que [TRADUCTION] sous-hommes , ordures , vermines et voyous pour décrire les juifs risque très certainement d'amener certains lecteurs à percevoir les Juifs comme des êtres inférieurs et à les mépriser en tant que peuple. Comme l'a fait remarquer le Dr Mock dans son témoignage, cette tactique qui consiste à déshumaniser le peuple juif était courante dans la propagande nazie. En faisant voir les Juifs comme des êtres moins qu'humains, il était plus facile, comme l'a expliqué le Dr Mock, de les tuer.

[50] Le caractère persuasif de ces messages est rehaussé par le recours par M. Kyburz à ce que le Dr Mock a qualifié d' approche pseudo-théorique , ainsi qu'en témoignent les allusions à [TRADUCTION] l'éminent historien David Irving et à la quête de vérité d'Ernst Zundel . Les références aux articles publiés par des groupes comme l'Institute for Historical Review, organisme voué à la démythification de l'holocauste, illustrent également cette technique.

[51] En ce qui concerne l'allégation de M. Warman selon laquelle les messages de M. Kyburz constituent une discrimination contre les Juifs en raison de leur race, il convient de faire remarquer que le Dr Mock a indiqué dans son témoignage que les Juifs n'appartiennent pas à la même race, mais plutôt à la même religion. Nous faisons nôtre la remarque du Dr Mock selon laquelle M. Kyburz a tenté, toutefois, de racialiser les Juifs en donnant à entendre que les divers traits de caractère qu'il leur prêtait étaient innés. Ses nombreux commentaires au sujet des gens de leur espèce , de même que les références à des choses comme la véritable nature des Juifs sionistes attestent ce fait. Le dernier FIQ illustre particulièrement cette tactique; on y lit que les Juifs sionistes ne changeront jamais parce que ce sont [TRADUCTION] … des escrocs, des criminels, des bellicistes, des pédophiles, des gens qui sont contre la vie et pleins de haine… Voilà leur nature. Ils ne peuvent changer et ne changeront pas.

[52] Le fait que les Juifs ne constituent pas une race n'annule pas pour autant ce volet de la plainte de M. Warman. La jurisprudence en matière de droits de la personne a interprété les dispositions interdisant la discrimination fondée sur un motif de discrimination illicite comme incluant l'interdiction d'exercer une discrimination en raison de l'appartenance perçue au groupe protégé (17). Par conséquent, le Tribunal conclut que les messages contenus dans le site Web des Patriots on Guard sont susceptibles d'exposer à la haine ou au mépris des personnes appartenant à la religion juive en raison de leur race perçue, ainsi que leur religion et, dans le cas des Juifs ashkénazes, de leur origine nationale ou ethnique.

D. Conclusion concernant le volet de la plainte relevant de l'article 13

[53] Tel qu'indiqué dans un des articles publiés sur le site Web des Patriots on Guard, le droit international reconnaît le droit des individus à la liberté d'opinion et d'expression. Ainsi, l'article 19 de la Déclaration universelle des droits de l'homme (18) précise que ce droit ... implique le droit de ne pas être inquiété pour ses opinions et celui de chercher, de recevoir et de répandre, sans considération de frontière, les informations et les idées par quelque moyen d'expression que ce soit… .

[54] Bien qu'il constitue l'une des pierres angulaires d'une société libre et démocratique, le droit à la liberté d'opinion et d'expression n'est pas un droit illimité. Dans certains cas, la protection de la société restreint ce que peuvent dire les individus. C'est la raison pour laquelle il est illégal de crier Au feu! dans une salle de cinéma remplie lorsqu'il n'y a pas d'incendie, de lancer une alerte à la bombe ou de proférer des menaces de mort à l'endroit de quelqu'un d'autre.

[55] Dans Taylor, la Cour suprême du Canada a eu l'occasion d'examiner la portée de l'article 13 de la Loi canadienne sur les droits de la personne à la lueur des principes du droit international ainsi que de la protection de la liberté d'opinion et d'expression garantie par la Charte (19). La Cour a conclu que même si l'article 13 portait atteinte à la liberté d'opinion et d'expression, cette atteinte était justifiée par l'engagement international envers l'élimination de la propagande haineuse ainsi que par celui du Canada envers les valeurs de l'égalité et du multiculturalisme.

[56] Ayant conclu que Fred Kyburz a abordé de façon répétée, en recourant aux services d'une entreprise de télécommunication relevant de la compétence du Parlement, des questions susceptibles d'exposer à la haine ou au mépris des personnes appartenant à la religion juive, nous estimons que le volet de la plainte de M. Warman relevant de l'article 13 est fondé.

V. LE VOLET DE LA PLAINTE RELEVANT DE L'ARTICLE 14.1 - REPRÉSAILLES

A. Les soi-disant messages de représailles

[57] Après la fermeture du site Web des Patriots on Guard, un forum de discussion en ligne des Patriots on Guard a été créé. M. Warman a expliqué qu'un forum de discussion est un babillard électronique où les gens peuvent publier des messages et lire les messages publiés par d'autres personnes. Le forum de discussion des Patriots on Guard était une tribune libre; autrement dit, n'importe qui pouvait s'y inscrire et participer aux discussions en ligne. En outre, un membre pouvait décider de se faire acheminer automatiquement par courrier électronique tout nouvel article publié sur le site, et ce, dès que celui-ci y était affiché. M. Warman s'est inscrit au forum sous un nom fictif et, par conséquent, a eu accès aux messages affichés.

[58] Le matériel affiché sur le site du forum de discussion des Patriots on Guard est de nature similaire à celui qui était publié sur le site Web des Patriots on Guard et comprend des messages signés par Fred Kyburz et expédiés à partir de l'adresse électronique freburz@yahoo.ca. Le moment où le forum de discussion a été créé, de même que le nom de ce forum et les questions abordées dans les articles affichés, prouvent que l'instigateur est M. Kyburz. Cette conclusion est confirmée par les messages électroniques échangés (reproduits dans l'onglet 28 de la pièce HR-1) dans lesquels M. Kyburz fait mention de son site Web http://www.patriotsonguard.org .

[59] En outre, nous concluons que c'est M. Kyburz qui est l'auteur des nombreux messages affichés sur le site du forum. Nous en sommes venus à cette conclusion parce que nous avons constaté que ces messages ont été signés par M. Kyburz - Fred ou Fred Kyburz . Dans beaucoup de cas, le contexte ainsi que la teneur des messages indiquent clairement que leur auteur est M. Kyburz.

[60] Le 5 février 2002, Richard Warman a déposé sa plainte initiale auprès de la Commission canadienne des droits de la personne. Le 26 avril 2002, M. Kyburz a affiché les messages électroniques que lui et un producteur de l'émission de télévision W-5 de CTV se sont échangés à propos d'une émission de télévision consacrée au mouvement anti-fisc (20). Dans les premiers messages électroniques, le producteur demandait à M. Kyburz s'il serait disposé à participer à l'émission. M. Kyburz a refusé l'offre. Après la diffusion de l'émission, M. Kyburz a fait parvenir au producteur un long message électronique pour lui faire part de son dégoût, dans lequel figurait le passage suivant :

[TRADUCTION]

Vous pouvez maintenant aller vous plaindre à la Commission canadienne des droits de la personne de mon antisémitisme, comme l'a fait votre confrère sioniste Richard Warman, un employé précieux de la Cour fédérale du Canada et du ministère de la Justice - quelle jolie bande de lurons! La CCDP est un organisme qui se défend en niant la vérité. Ces gens-là sont tombés bien bas. Ils doivent nier la vérité pour protéger leur comportement criminel. Ils ont une conscience tellement aberrante qu'ils croient au bien-fondé de leurs propres raisonnements pervers. Richard Warman doit être votre précieux allié…

[61] M. Kyburz reproduit ensuite une lettre qu'il dit avoir envoyée à l'honorable John Richard, juge en chef de la Cour fédérale du Canada, où M. Warman travaillait auparavant. Après avoir fait état des démarches faites par M. Warman pour faire fermer son site Web, ainsi que de la plainte déposée par M. Warman devant la Commission canadienne des droits de la personne, M. Kyburz déclare :

[TRADUCTION]

Je parle d'une foule de choses sur mon site Web. Je parle d'esclavage, de meurtres, d'activités terroristes, de pédophilie, de guerre, d'impôt, de droits inaliénables des individus, de prostitution enfantine, de pornographie juvénile, etc. J'y ai affiché les opinions d'autres personnes et des articles de journaux, de même que mes propres conclusions.

Certains articles traitent des faits et gestes de Juifs qui s'adonnent à diverses activités criminelles : pornographie juvénile, prostitution enfantine, esclavage, meurtre, génocide, etc. Il s'agit de crimes qui ont fait les manchettes. Warman, qui est Juif, s'offusque du fait que ses confrères juifs et leurs activités diaboliques soient dénoncés, ce qui explique, bien sûr, sa plainte à la Commission canadienne des droits de la personne. Il approuve donc sans réserve des crimes immondes -prostitution juvénile, pornographie enfantine, meurtre, génocide, esclavage et exécution de gens innocents, etc. Aucun individu ayant ne serait-ce qu'une once de conscience n'appuierait ni n'approuverait des activités aussi atroces et indignes de la part d'un être humain. De toute évidence, M. Warman est dénué de toute conscience…

Par conséquent, je vous demande, Monsieur, de prendre sans tarder les mesures suivantes :

  1. congédier sur-le-champ M. Richard Warman de son poste au sein du gouvernement en lui refusant toute indemnité de départ. À aucun moment à l'avenir devra-t-on permettre qu'il soit réembauché dans la fonction publique ou qu'il remplisse un rôle consultatif auprès d'un organisme gouvernemental ou d'un employé de l'État. S'il n'est pas congédié sans indemnité de départ d'ici le 12 avril 2002, je dénoncerai publiquement le fait que vous approuvez sans réserve les crimes susmentionnés commis par des employés du ministère de la Justice. Je veillerai également à ce que les Canadiens soient pleinement informés du fait que tous les juges au Canada approuvent les crimes précités (à moins qu'un juge ne démontre clairement par les décisions qu'il rend qu'il n'approuve pas ces crimes et que ses décisions sont vraiment fondées sur les lois du pays .)
  2. ordonner à M. Richard Warman de m'écrire une lettre d'excuses;
  3. ordonner que M. Richard Warman demande à mon fournisseur de services antérieur (Rackspace) de réactiver mon site Web sur celui David Icke (21);
  4. faire cesser sans tarder l'enquête que mène la Commission canadienne des droits de la personne à mon sujet et à propos de mon site Web.

[62] La lettre au juge en chef indique qu'une copie sera transmise à tous les députés et sénateurs. M. Kyburz demande également aux lecteurs d'écrire au juge en chef [TRADUCTION] … pour lui dire leur façon de penser . Rien dans la documentation dont le Tribunal a été saisi n'indique que le juge en chef Richard ait jamais répondu à la lettre de M. Kyburz, et rien n'indique non plus que M. Warman ait subi des conséquences défavorables à titre d'employé à la suite de l'expédition par M. Kyburz de cette lettre au juge en chef.

[63] Dans un message affiché ultérieurement, M. Kyburz reproduit certaines lettres échangées dans le cadre de l'enquête de la Commission sur la plainte de M. Warman. Commentant l'une des lettres de M. Warman, M. Kyburz écrit :

[TRADUCTION]

M. Warman, étant donné que vous lisez religieusement chaque mot que j'écris, je ne vois pas le besoin de vous faire tenir copie du présent message. Je suis sûr que vous en prendrez connaissance. Je veillerai à ce que tous les députés et sénateurs, de même que le juge en chef de la Cour fédérale du Canada et tous les membres de la Commission, en reçoivent copie. J'en enverrai également une copie à bien d'autres gens. J'ose croire que l'idée de devenir célèbre est loin de vous déplaire. Mais vous vous en remettrez. Beaucoup de gens se familiariseront avec le nom de Richard Warman et tout ce qu'il connote. Vous devez être aux oiseaux!

La liberté de parole est quelque chose de non existant ou d'interdit lorsqu'il est question des atrocités commises par les Juifs et les sionistes. Cependant, lorsqu'on parle des atrocités des NAZIS, personne ne peut même poser une question. L'hypocrisie semble un mode de vie chez vous et vos confrères sionistes. M. Warman, sachez que pour toute personne équilibrée, vous avez l'air d'un minable. Ce qui est bon pour vous est interdit à tous les autres. Ce que vous et vos confrères sionistes faites toute la journée, les autres ne peuvent le faire. Vous semblez avoir fait de la discrimination votre mode de vie…

Pauvre idiot. Vous pleurez comme un bébé qui s'ennuie de sa mère. Pensez-vous que je devrais endurer sans mot dire vos abus, vos tactiques terroristes à mon endroit, vos escroqueries, vos mensonges, vos manœuvres d'intimidation, vos menaces, votre fourberie, votre comportement immonde à mon endroit? Ne pensez pas que je vais me laisser faire bêtement! Vous avez commencé cette bataille; c'est pas le temps pour vous de vous défiler. Montrez-nous de quel bois vous vous chauffez. Je déteste avoir à faire à des poltrons. Vous aurez vite fait de constater que le panier de crabes que vous avez ouvert le restera longtemps. Vous allez vous retrouver avec une poursuite judiciaire sur les bras bientôt - trop tôt à votre goût! Peut-être serez-vous confronté à plusieurs poursuites. Cela sera de la petite bière comparativement à la campagne de publicité à laquelle vous aurez droit si vous ne faites pas réactiver par Rackspace mon site Web ainsi que celui de David Icke avant que la pub ne soit diffusée (22)…

Si les membres de la Commission poursuivent leur enquête à mon sujet, ils auront droit au même traitement que celui que je vous réserve. Vous ne perdez certes rien pour attendre. Préparez-vous et sachez que je ne suis pas le seul à éprouver un profond dégoût face à votre comportement criminel. [Souligné dans l'original]

[64] Dans le message subséquent, le menaces de M. Kyburz à l'endroit de M. Warman deviennent encore plus explicites. Il affirme :

[TRADUCTION]

J'ai appris aujourd'hui même que M. Richard Warman aura à répondre à des accusations de libelle et d'extorsion d'ici la fin d'août. Je déposerai moi-même de telles accusations si cette enquête sur moi et mon site Web n'est pas interrompue sans tarder et si M. Warman ne réactive pas mon site Web auprès de Rackspace ainsi que le site Web de David Icke. Si je décide moi aussi d'emprunter cette voie, M. Warman ne sera pas le seul défendeur. Tous les membres de la Commission, de même que vous-même [M. Kyburz mentionne ensuite les noms de deux employés de la Commission], serez nommés dans la poursuite. Toutefois, ce sera le cadet de vos soucis. Les dépliants vous causeront plus de maux de tête que les poursuites en justice. Il y aura une avalanche de dépliants. Les dépliants peuvent ruiner votre carrière professionnelle ainsi que votre vie. Ce n'est pas une menace, mais bien un avertissement et un avis raisonnable que je donne à vous tous. Des juges et des agents de police ont vu leur carrière, de même que la vie de leur famille, être grandement bouleversées, voire détruites. N'oubliez pas, messieurs dames, que le crime ne paie pas. Les accusations mensongères que portent les vrais coupables contre les gens qui tentent de répandre la vérité ne seront pas tolérées plus longtemps.

Je vous ai servi maints avertissements. Mon intention n'est pas de détruire la vie ou la carrière de qui que ce soit. Cependant, les gens qui ne respectent pas les lois du pays devront payer le prix de leur violation irresponsable des droits et libertés que les individus ont en vertu de la common law. Laissez-moi vous dire une chose : le crime ne paie pas et il faudra mettre un terme à une carrière fondée sur la criminalité.

Le message est signé Ernst-Friedrich Kyburz . Il y est précisé qu'une copie a été transmise aux députés et sénateurs, aux députés de l'Assemblée législative de l'Alberta, au juge en chef Richard, aux membres de la Commission canadienne des droits de la personne et à [TRADUCTION] bien d'autres personnes .

[65] Dans le message du 11 juin 2002, M. Kyburz reproduit un article du National Post décrivant les mesures prises par Transports Canada en réaction à la menace terroriste. Après avoir commenté ce qu'il décrit comme les actes criminels du gouvernement, M. Kyburz ajoute : [TRADUCTION] Je me demande si cette idée a été concoctée par Richard Warman ou quelqu'un du même acabit? Ces gens-là sont vraiment obsédés et ne cherchent qu'à restreindre la liberté partout. Terrorisme, meurtre et génocide, voilà leurs spécialités… Après avoir qualifié M. Warman de terroriste, M. Kyburz poursuit :

[TRADUCTION]

«Nous devons faire tout en notre pouvoir pour débarrasser le Canada des terroristes.»

[66] Les articles subséquents publiés par M. Kyburz renferment de nombreuses allusions à Richard Warman, dont certaines se présentent sous la forme de commentaires désobligeants qui, souvent, ont rapport à sa présumée appartenance à la religion juive. D'autres prennent davantage la forme de menaces implicites. C'est le cas notamment du commentaire voulant que Richard Warman ait [TRADUCTION] gâché son avenir . Dans certains articles de discussion, les menaces sont plus directes. Par exemple, l'article du 22 juillet comporte une farce à propos des avocats - transmise à M. Warman afin d' [TRADUCTION] égayer sa journée . M. Kyburz fournit l'explication suivante : [TRADUCTION] Je sais que vous êtes déprimé à la perspective du dépôt d'accusations criminelles contre vous ainsi que de la diffusion de dépliants au sujet de votre excellente réputation. Le 1er août 2002, M. Kyburz écrit : [TRADUCTION] Richard Warman, nous vous avons vu à travers votre jeu ainsi que votre racket diabolique. Préparez-vous : le phénomène d'action-réaction a été déclenché.

[67] Six jours plus tard, M. Kyburz a publié un reportage au sujet du décès d'un agent de police appelé Eric Taylor, dans lequel on allègue que ce dernier a été abattu par un certain Don Matthews qui, précise-t-on, était le président de la National Constitutional Academy, [TRADUCTION] un groupe qui croit que la police n'a pas le pouvoir de faire appliquer la loi . Après avoir affirmé qu'il [TRADUCTION] … déteste toute forme de violence , M. Kyburz affirme :

[TRADUCTION]

Que font les gens lorsqu'ils se sentent traqués et ne voient pas d'issue? Que feront-ils lorsqu'ils s'apercevront qu'on porte atteinte jour après jour à leurs droits et libertés, qu'on leur ment effrontément et qu'on déforme les lois du pays afin que tous et chacun soient asservis par les organismes gouvernementaux, y compris les tribunaux et la police?

Est-ce que les gens au sein de ces organismes gouvernementaux pensent vraiment qu'ils peuvent commettre de telles exactions sans coup férir? Pensent-ils vraiment que les gens attendront bêtement d'être abattus et n'opposeront pas de résistance? J'ai bien peur que beaucoup de gens feront comme Don Matthews : ils aligneront un de ces apôtres du nouvel ordre international dans leur mire, puis appuieront sur la gâchette.

Eh bien! M. Richard Warman, sachez qu'un certain nombre de gens vous ont bien à l'œil, comme vous vous en doutez bien. Les gens ont cessé de prendre à la légère vos abus, vos menaces, vos mensonges et vos comportements sans scrupule. Ceci n'est pas une menace, mais bien un avertissement dont vous voudrez bien tenir compte avant que vous n'ayez plus d'ennuis que vous en avez déjà. Les ennemis que vous vous êtes fait ne sont pas dupes de vos tactiques sionistes. Vous ne réussirez pas à les garder sous votre coupe, et ce, même avec l'aide de vos confrères sionistes. Ils se noieront eux-mêmes dans le lisier de porc dans lequel ils ont tenté d'entraîner le monde entier.

B. Les messages non divulgués

[68] La documentation déposée en preuve devant le Tribunal comprend un certain nombre de messages affichés sur le site Web du forum des Patriots on Guard peu avant la date prévue du début de l'audience. L'avocate de la Commission a demandé de déposer en preuve cette documentation, même si elle n'a pas été communiquée à M. Kyburz avant l'audience, comme l'exigent les Règles de procédure provisoires du Tribunal. Le Tribunal a autorisé le dépôt de celle-ci, tout en réservant sa décision quant au poids qu'il conviendrait de lui attribuer, compte tenu du fait qu'elle n'a pas été communiquée à M. Kyburz avant l'audience.

[69] La non-divulgation des documents pose un dilemme intéressant au Tribunal. Les obligations que les Règles de procédure provisoires du Tribunal imposent aux parties en matière de divulgation visent à faire en sorte que chaque partie connaisse la preuve qu'il lui faudra réfuter à l'audience. Dans le cas de la partie intimée, la divulgation préalable à l'audience permet également de prendre conscience de toute l'étendue des allégations dont elle fait l'objet et d'évaluer ainsi son degré d'exposition possible.

[70] En l'espèce, même si on pourrait soutenir que M. Kyburz n'a pas été informé de l'intention de la Commission de citer les plus récents messages qu'il a publiés, M. Warman a allégué dans sa plainte que l'acte discriminatoire revêtait un caractère continu. En outre, si M. Kyburz avait comparu à l'audience, le Tribunal aurait vraisemblablement autorisé la Commission à produire les preuves supplémentaires, car M. Kyburz aurait eu de la difficulté à démontrer que les documents en question le prenait de court ou lui causaient un préjudice quelconque puisque c'est lui qui semble en être l'auteur. Cela soulève la question à savoir si l'on devrait permettre que la partie intimée soit dans une position plus avantageuse en refusant de participer à une audience du Tribunal que celle dans laquelle elle aurait été si elle avait comparu.

[71] Cependant, il n'est point nécessaire que cette question ait été résolue à la fin de la journée. Les documents supplémentaires n'ajoutent pas grand-chose à la plainte, si ce n'est qu'ils contribuent à illustrer davantage le genre de messages que nous avons déjà décrits.

C. Analyse du volet de la plainte concernant les représailles

[72] Il ne fait aucun doute que M. Kyburz a exercé et menacé d'exercer des représailles contre M. Warman parce que celui-ci avait déposé une plainte auprès de la Commission canadienne des droits de la personne en vertu de l'article 13.

[73] L'exemple le plus flagrant de représailles est la lettre que M. Kyburz a apparemment fait parvenir au juge en chef Richard en vue de faire congédier M. Warman de la Cour fédérale du Canada. L'échec apparent de la tentative de M. Kyburz est sans importance : le seul fait pour la partie intimée de tenter de faire du tort à la partie plaignante parce que celle-ci a déposé une plainte constitue une infraction à l'article 14.1 (23). En faisant parvenir une copie de sa lettre à de nombreuses autres personnes, M. Kyburz avait, de toute évidence, l'intention de ternir le plus possible la réputation de M. Warman.

[74] Les menaces de mort dont M. Warman a fait l'objet sont encore plus inquiétantes. La crainte manifeste exprimée par M. Kyburz, selon laquelle quelqu'un pourrait aligner l'un de ces apôtres du nouvel ordre international dans sa mire et appuyer sur la gâchette, juste après qu'il eut mentionné qu'on avait pris acte des activités de M. Warman, peut être raisonnablement interprétée comme un avertissement voilé que la vie de ce dernier était en danger. De même, la déclaration contenue dans le message du 11 juin 2002 qui associait M. Warman au terrorisme, suivie de l'exhortation à faire tout en son pouvoir pour débarrasser le Canada des terroristes, peut être raisonnablement interprétée comme une menace pesant sur la vie de M. Warman.

[75] S'ajoutent à cela les menaces non équivoques et répétées consistant à orchestrer contre M. Warman une campagne de publicité dans le but avoué de ruiner sa carrière et sa vie, ainsi que les nombreuses attaques verbales à son endroit ainsi que contre sa réputation et les motifs sous-jacents au dépôt de la plainte.

[76] Bien que M. Kyburz ait fait des allusions à M. Warman sur le site Web du forum en raison de ses efforts pour faire fermer le site Web des Patriots on Guard, avant qu'il ne dépose sa plainte devant la Commission canadienne des droits de la personne, la teneur et la fréquence de ses commentaires ont changé après le dépôt de celle-ci. Les références à M. Warman sont devenues plus fréquentes mais aussi plus virulentes. Beaucoup de messages faisaient directement référence à la plainte de M. Warman ou à l'enquête de la Commission. Tel qu'indiqué, d'autres messages comprenaient diverses formes de menace à l'endroit de M. Warman. Il est évident que le dépôt de la plainte a joué un rôle important dans l'escalade de la campagne menée par M. Kyburz contre M. Warman. Cela montre clairement qu'il y a eu contravention à l'article 14.1 de la Loi canadienne sur les droits de la personne; par conséquent, ce volet de la plainte de M. Warman est lui aussi maintenu.

[77] Avant d'en finir avec la question des représailles, il convient de noter que M. Warman a également indiqué dans son témoignage qu'il croyait que M. Kyburz avait joué un rôle dans le dépôt des accusations criminelles dont il avait fait l'objet. Le cas échéant, cela équivaudrait très certainement à des représailles. Toutefois, la preuve documentaire qui nous a été présentée permet vraiment de douter que M. Kyburz ait été à l'origine du dépôt de ces accusations (24). Même s'il est fort probable que M. Kyburz ait été tenu au courant de la situation en ce qui touche les accusations criminelles, il semble que celles-ci aient dans les faits été déposées par deux autres personnes qui trouvaient elles-mêmes à redire aux activités de M. Warman. Au regard de l'ensemble de la preuve dont nous disposons à ce sujet, nous ne sommes pas persuadés que le dépôt des accusations criminelles dont M. Warman a fait l'objet constituaient des représailles de la part de M. Kyburz en raison de la plainte présentée en vertu de l'article 13. Cependant, M. Kyburz a bel et bien menacé de déposer lui-même des accusations criminelles contre M. Warman, ce qui, dans ce contexte, constitue un autre exemple de représailles.

VI. L'AVIS DE DROIT D'AUTEUR

[78] Tel qu'indiqué précédemment, M. Kyburz a fait parvenir au Tribunal un avis de droit d'auteur concernant le nom d'Ernst-Friedrich Kyburz. Toutefois, M. Kyburz n'a fourni au Tribunal aucune explication quant au but de cette initiative. Qu'il suffise de dire que le fait d'expédier un avis de droit d'auteur ne peut empêcher quelqu'un d'être jugé coupable d'une infraction à une loi comme la Loi canadienne sur les droits de la personne.

VII. LES MESURES DE REDRESSEMENT

[79] Ayant jugé que les deux volets de la plainte de M. Warman relevant respectivement de l'article 13 et de l'article 14.1 sont fondés, il nous reste à nous prononcer sur un dernier point, soit les mesures de redressement. Les articles 13 et 14.1 de la Loi canadienne sur les droits de la personne prévoient chacun des mesures de redressement différentes; par conséquent, chaque plainte sera traitée séparément en ce qui touche les mesures de redressement à adopter.

A. Le volet de la plainte relevant de l'article 13

i) Ordonnance de cesser et de s'abstenir

[80] Dans les cas où il juge qu'une plainte relevant de l'article 13 est fondée, le Tribunal est habilité, en vertu de l'alinéa 54(1)a) de la Loi, à ordonner à la partie intimée de mettre fin à l'acte discriminatoire et à prendre, en consultation avec la Commission, des mesures de redressement ou des mesures destinées à prévenir des actes semblables.

[81] Les communications Internet posent un défi particulier au Tribunal lorsqu'il s'agit de concevoir une mesure de redressement efficace. La nature unique de la technologie Internet, y compris les difficultés liées à l'existence de multiples juridictions du fait que le cyberespace n'a pas de frontières, ainsi que la mobilité des cibles en raison du recours à des sites miroirs, soulèvent des préoccupations légitimes quant à l'efficacité des ordonnances de cesser et de s'abstenir de diffuser des messages haineux par Internet.

[82] En dépit de ces restrictions, une ordonnance de cesser et de s'abstenir, tel qu'indiqué par le Tribunal dans Zündel, peut avoir des conséquences à la fois pratiques et symboliques. Du point de vue pratique, une telle ordonnance devrait empêcher la partie intimée de continuer de communiquer du matériel semblable à celui décrit dans cette décision. En outre, la dénonciation publique des actes qui ont fait l'objet du dépôt d'une plainte par M. Warman en vertu de l'article 13 revêt une importante valeur symbolique. Nous faisons nôtre l'observation du Tribunal dans Zündel, à savoir que le Parlement, au nom de tous les Canadiens, a décidé que notre société ne saurait tolérer la diffusion de messages haineux par téléphone. […] les victimes de haine ont droit à l'avantage que constitue le plein poids de [l']autorité [du Tribunal] .

[83] Par conséquent, le Tribunal ordonne que Fred Kyburz et toute autre personne agissant de concert avec lui mettent fin à l'acte discriminatoire qui consiste à utiliser ou à faire utiliser un téléphone de façon répétée, en recourant ou en faisant recourir aux services d'une entreprise de télécommunication relevant de la compétence du Parlement, pour aborder ou faire aborder des questions comme celles dont il est fait état dans les pièces HR-1 et HR-2, ou d'autres questions de nature essentiellement similaire, qui sont susceptibles d'exposer à la haine ou au mépris une ou plusieurs personnes appartenant à un groupe identifiable sur la base des critères énoncés à l'article 3, acte qui va à l'encontre du paragraphe 13(1) de la Loi canadienne sur les droits de la personne. Il convient de préciser par souci de clarté que M. Kyburz doit, en vertu de la présente ordonnance, cesser de faire de la publicité au sujet du matériel diffusé sur le site Web des Patriots on Guard qui est maintenant affiché sur le site Web Archive.org, ou de renvoyer d'autres internautes à celui-ci.

[84] Bien que le volet de la plainte de M. Warman relevant de l'article 13 concerne le site Web des Patriots on Guard, il est évident que, depuis le dépôt de la plainte, M. Kyburz a utilisé le site Web du forum des Patriots on Guard comme moyen de transmettre ses messages haineux. Par conséquent, l'ordonnance du Tribunal s'applique également au matériel affiché sur le site Web du forum. Comme il faudra un certain temps pour démanteler le site Web du forum, le Tribunal ordonne que M. Kyburz ferme le site en question dans les sept jours qui suivront la signification de la présente décision. Cette disposition ne devrait pas être interprétée comme autorisant M. Kyburz à dire ce qu'il veut dans l'intervalle. À cette fin, le Tribunal ordonne que M. Kyburz cesse et s'abstienne de publier de nouveaux messages Internet du genre de ceux visés par le volet de la plainte relevant de l'article 13, que ce soit sur le site Web du forum des Patriots on Guard ou ailleurs sur Internet, dès que la décision du Tribunal lui aura été signifiée.

[85] La Commission a demandé que le Tribunal ordonne que sa décision soit signifiée à M. Kyburz par la poste prioritaire et par courrier électronique. Compte tenu des très graves conséquences que risquerait d'entraîner pour M. Kyburz le non-respect de la présente décision, le Tribunal est d'avis qu'il n'est pas opportun de rendre une telle ordonnance. En outre, comme c'est la Cour fédérale qui est chargée de l'exécution des ordonnances du TCDP, nous sommes d'avis qu'il ne serait pas acceptable que ce Tribunal cherche à dicter à la Cour fédérale ce qui constituerait un avis suffisant à M. Kyburz, dans le cas où il faudrait recourir à une procédure d'exécution.

[86] La Commission a également demandé que le Tribunal ordonne à M. Kyburz de communiquer avec Archive.org afin de faire supprimer le matériel publié sur le site Web des Patriots on Guard. Nous avons des préoccupations quant au caractère exécutoire d'une telle ordonnance. Pareille demande exigerait selon toute vraisemblance une explication de M. Kyburz quant aux raisons pour lesquelles il demande la suppression du matériel. Cela pourrait obliger M. Kyburz à dire quelque chose qui à son avis ne correspond pas à la vérité, ce qui, selon la Cour fédérale, pose problème (Stevenson c. Service canadien du renseignement de sécurité (25)). En outre, si les efforts de M. Kyburz devaient se révéler vains, on pourrait mettre en doute subséquemment la sincérité de sa demande, ce qui impliquerait le genre d'évaluation subjective qui pourrait rendre l'exécution difficile. Il nous semble qu'une demande de la Commission à Archive.org, accompagnée d'un exemplaire de la présente décision, serait beaucoup plus susceptible de donner des résultats; par conséquent, nous refusons de rendre l'ordonnance demandée. À défaut d'une autorisation en ce sens dans la Loi, le Tribunal ne peut rendre une ordonnance contre un tiers. Cependant, nous encourageons les propriétaires du site Web Archive.org à songer sérieusement à supprimer le matériel offensant que renferme leur site.

ii) Indemnité spéciale

[87] Dans les cas où la victime est expressément nommée dans les messages qui constituent l'acte discriminatoire aux termes de l'article 13 de la Loi canadienne sur les droits de la personne, l'alinéa 54(1)b) de la Loi autorise le Tribunal à ordonner à la partie intimée de verser une indemnité spéciale pouvant atteindre 20 000 $. L'alinéa 54(1)b) intègre par renvoi le paragraphe 53(3) de la Loi, qui prévoit que le Tribunal peut ordonner à l'auteur d'un acte discriminatoire de payer une telle indemnité s'il en vient à la conclusion que ... l'acte a été délibéré ou inconsidéré .

[88] Lorsqu'on évalue s'il est opportun de rendre en l'espèce une telle ordonnance, il ne faut pas oublier que l'acte discriminatoire dont il s'agit est la diffusion de messages haineux, en contravention de l'article 13 de la Loi. Par conséquent, les seuls messages litigieux pour l'instant sont ceux visés par le volet de la plainte de M. Warman relevant de l'article 13, à savoir les messages publiés sur le site Web des Patriots on Guard. Bien que le message électronique de M. Kyburz à M. Warman ainsi que les messages publiés dans le site Web du forum des Patriots on Guard soient pertinents par rapport aux mesures de redressement à prendre à l'égard de la contravention à l'article 14.1, nous n'avons pas tenu compte de ces messages aux fins des mesures de redressement relevant de l'article 13.

[89] C'est à la suite des efforts de M. Warman pour faire fermer son site que M. Kyburz a commencé à faire régulièrement allusion à M. Warman et à le désigner par son nom dans les messages publiés sur le site Web des Patriots on Guard. Les références à M. Warman, qui sont remarquables par leur virulence, étaient motivées, du moins en partie, par la perception de M. Kyburz voulant que M. Warman soit lui-même Juif. Cela correspond à une tendance qui se répète dans les messages Web de M. Kyburz : dès que quelqu'un s'oppose à ses vues, cette personne est aussitôt assimilée à la conspiration juive mondiale.

[90] Dans son témoignage, M. Warman a indiqué qu'il n'était pas Juif. À notre avis, le fait que M. Warman ne soit pas lui-même Juif n'atténue en rien le caractère haineux des attaques dont il a fait l'objet de la part de M. Kyburz. Ces attaques étaient de toute évidence motivées, du moins en partie, par la perception de M. Kyburz voulant que M. Warman soit Juif. Fort de cette croyance, M. Kyburz a attribué à M. Warman des traits de caractère très négatifs ainsi qu'un comportement criminel. M. Warman a été très vexé par cette façon d'agir, ce que nous trouvons fort compréhensible. À notre avis, M. Warman est une victime de l'acte discriminatoire.

[91] Le comportement de M. Kyburz était à la fois délibéré et inconsidéré. À notre avis, M. Warman a droit à une indemnité appréciable à ce titre. Par conséquent, le Tribunal accorde à M. Warman la somme de 15 000 $ à titre d'indemnité spéciale, conformément à l'alinéa 54(1)b) de la Loi.

iii) Intérêts

[92] Les sanctions non pécuniaires imposées en vertu de la Loi canadienne sur les droits de la personne donnent droit au paiement d'intérêts (26). Conformément à la règle 9(12) des Règles de procédure provisoires du Tribunal canadien des droits de la personne, les sommes d'argent consenties à titre d'indemnités spéciales conformément à la présente décision donnent droit au paiement d'intérêts. Les intérêts courront à compter de la date de cette décision, et ce, jusqu'à la date du paiement. Cependant, la somme totale versée à titre d'indemnité spéciale, y compris les intérêts, ne peut en aucun cas être supérieure à 20 000 $ (27).

iv) Sanction pécuniaire

[93] L'alinéa 54(1)c) de la Loi autorise le Tribunal à ordonner à la partie intimée, dans le cas d'une plainte relevant de l'article 13, de verser en guise de sanction pécuniaire une somme pouvant atteindre 10 000 $. L'inclusion de cette disposition dans les modifications de 1998 à la Loi représente une rupture importante par rapport à l'approche traditionnelle voulant que les dédommagements dans les affaires de droits de la personne visent d'abord et avant tout à redresser plutôt qu'à punir. Jusqu'à maintenant, aucune ordonnance n'a été rendue par le Tribunal en vertu de cette disposition.

[94] Les indemnités spéciales accordées en vertu de l'alinéa 54(1)b) à l'égard des plaintes relevant de l'article 13 visent à indemniser les personnes expressément nommées dans les messages haineux. Par contraste, les sanctions pécuniaires imposées en vertu de l'alinéa 54(1)c) de la Loi se veulent l'expression de l'opprobre de la société à l'égard du comportement de la partie intimée (28).

[95] Afin de décider s'il y a lieu d'imposer à M. Kyburz une sanction pécuniaire en l'espèce, le législateur a précisé que nous devions tenir compte de plusieurs facteurs, notamment … de la nature et de la gravité de l'acte discriminatoire ainsi que des circonstances l'entourant , ainsi que de la nature délibérée de l'acte, des antécédents discriminatoires de son auteur et de sa capacité de payer (29) . Nous examinerons chacun de ces facteurs à tour de rôle.

[96] En ce qui concerne la nature et la gravité de l'acte discriminatoire ainsi que les circonstances l'entourant, nous avons conclu que M. Kyburz a communiqué de façon répétée des messages méchants, vicieux et radicaux au sujet des Juifs. Non seulement ces messages ont-ils attribué des actes criminels multiples et variés aux adeptes de la foi juive, qu'ils ont décrits comme des êtres foncièrement corrompus et déviants, mais certains d'entre eux sont allés jusqu'à prôner l'extermination pure et simple des Juifs comme groupe. Cet élément milite fortement en faveur de l'imposition d'une sanction pécuniaire importante.

[97] Nous avons conclu que M. Kyburz était responsable des messages communiqués au moyen du site Web des Patriots on Guard. Il est évident, compte tenu des messages proprement dits, qu'il a communiqué cette information en connaissance de cause, sachant qu'elle bouleverserait beaucoup de gens. Toutefois, au regard de l'ensemble de la preuve présentée au Tribunal, rien n'indique que M. Kyburz se soit adonné auparavant à des actes discriminatoires, ce qui constitue une circonstance atténuante.

[98] Le dernier élément que doit examiner le Tribunal est la capacité de M. Kyburz de payer une indemnité tenant lieu de sanction pécuniaire. À cet égard, nous faisons observer que les seuls renseignements dont nous disposons à ce sujet est la déclaration non assermentée qu'on retrouve dans un des messages publiés par M. Kyburz sur le Web, à savoir qu'il est sans le sou (30). Dans ses conclusions finales, l'avocate de la Commission a indiqué qu'il n'incombe pas à la Commission de démontrer que M. Kyburz a les moyens de payer, mais que le fardeau de la preuve à cet égard appartient à ce dernier, puisque c'est surtout lui qui sait ce qui en est.

[99] La position de la Commission est étayée par au moins quelques précédents. Dans R. v. Noseworthy (31), la Cour d'appel de Terre-Neuve s'est penchée sur la question du fardeau de la preuve par rapport à la capacité de payer d'un individu, faisant remarquer ce qui suit :

[TRADUCTION]

Dans le cours ordinaire d'une instance, il appartient à la partie qui invoque ou fait valoir une circonstance particulière de produire la preuve nécessaire à l'appui. Vu la présomption d'innocence, la situation est différente dans un procès criminel. C'est à la Couronne qu'il incombe du début à la fin de démontrer, au-delà de tout doute raisonnable, tous les faits nécessaires pour conclure à la culpabilité de l'accusé. Toutefois, la présomption d'innocence prend fin au moment où le tribunal de première instance conclut que l'accusé est coupable de l'infraction dont il est inculpé. À compter de ce moment-là, toute thèse qui est présentée ou soutenue est examinée au regard du principe normal selon lequel il incombe à la partie qui invoque ou fait valoir une circonstance de fait de produire les preuves nécessaires à l'appui.

[100] Il convient de noter que les observations de la Cour dans Noseworthy ont été formulées dans le contexte du droit criminel. La Cour a fait observer que le Code criminel n'impose pas au juge de première instance l'obligation générale de faire enquête sur la capacité de payer de l'intéressé, sauf dans certaines circonstances. Par contraste, le paragraphe 54(1.1) précise que le Tribunal doit tenir compte de la capacité de payer de la partie intimée avant d'imposer une amende. Cela dit, nous sommes d'avis que les observations de la Cour au sujet du fardeau de la preuve concernant la capacité de payer de l'intéressé s'appliquent également à nos délibérations aux termes de cette disposition de la Loi canadienne sur les droits de la personne.

[101] D'après certains témoignages présentés en l'espèce, qui n'ont cependant pas été recueillis sous serment et qui n'ont pas donné lieu à un contre-interrogatoire, M. Kyburz a peut-être certaines ressources. Eu égard à la façon dont la preuve a été produite, nous ne pouvons à notre avis y attribuer beaucoup de poids, bien que nous l'ayons examinée. Nous avons également tenu compte du fait qu'il s'agit, de toute évidence, d'une première infraction commise par M. Kyburz. Même si la gravité du manquement à l'article 13 justifierait sans doute l'imposition de la peine maximale prévue par la loi ou d'une peine se rapprochant de celle-ci, ces facteurs ont persuadé le Tribunal qu'il conviendrait d'imposer une sanction un peu moins sévère. Au regard de l'ensemble des circonstances énoncées au paragraphe 54(1.1), nous ordonnons à M. Kyburz de verser la somme de 7 500 $ en guise de sanction pécuniaire.

[102] Le paiement doit être fait par chèque visé ou mandat-poste établi à l'ordre du Receveur général du Canada. Le Tribunal doit recevoir le paiement dans les 35 jours qui suivront la signification de la présente décision à M. Kyburz.

B. Le volet de la plainte relevant du paragraphe 14.1

i) Ordonnance de cesser et de s'abstenir

[103] Les recours à l'égard des infractions à l'article 14.1 de la Loi canadienne sur les droits de la personne sont régis par l'article 53 de la Loi. L'alinéa 53(2)a) autorise le Tribunal à ordonner à la partie intimée de cesser de s'adonner à l'acte discriminatoire, s'il le juge à propos.

[104] Nous ordonnons à M. Kyburz de cesser et de s'abstenir d'exercer des représailles contre M. Warman parce qu'il a déposé une plainte devant la Commission canadienne des droits de la personne. Cette ordonnance s'applique aux actes de représailles, y compris, mais non de façon limitative, les messages électroniques et les messages publiés sur le Web, qu'il s'agisse du site Web du forum des Patriots on Guard ou ailleurs sur Internet, qui sont similaires au matériel que renferment les pièces HR-1 et HR-2. En outre, nous ordonnons à M. Kyburz de cesser de menacer M. Warman ou de tenter de nuire à sa carrière, par l'intermédiaire d'Internet ou par un autre moyen.

[105] Contrairement à ce qui est le cas pour le démantèlement du site Web du forum, qui exige certains gestes concrets de la part de M. Kyburz, nous ne voyons aucune raison de retarder la prise d'effet de ce volet de notre ordonnance. Nous enjoignons M. Kyburz de cesser d'exercer des représailles dès qu'il aura été avisé de la décision du Tribunal.

ii) Indemnité pour préjudice moral

[106] L'alinéa 53(2)e) autorise le Tribunal à ordonner le versement d'une somme pouvant atteindre 20 000 $ en guise d'indemnité à la victime de l'acte discriminatoire qui a souffert un préjudice moral par suite de l'acte discriminatoire. En l'espèce, la Commission demande que Richard Warman bénéficie de l'indemnité maximale prévue par la Loi.

[107] Certes, les actes de représailles posés par M. Kyburz en l'espèce étaient très graves. M. Kyburz a non seulement vitupéré publiquement et de façon répétée contre M. Warman, mais il semble avoir activement tenté de nuire à son emploi, allant jusqu'à demander qu'il soit congédié. Les menaces voilées proférées par M. Kyburz à la vie de M. Warman sont encore plus troublantes.

[108] Il est clairement ressorti du témoignage de M. Warman qu'il a été quelque peu secoué par ses expériences avec M. Kyburz. M. Warman a dit craindre pour sa propre sécurité, ainsi que pour celle de ses proches. Il a également décrit dans son témoignage les conséquences que les actes de représailles commis par M. Kyburz ont eues sur sa vie quotidienne, ainsi que les mesures qu'il a jugées nécessaires de prendre pour sa propre sécurité, dont l'intervention de la police.

[109] Cela dit, le Tribunal estime que M. Warman n'est pas une personne qui se laisse abattre. De toute évidence, il s'était en quelque sorte donné comme mission d'empêcher des gens comme M. Kyburz de propager leur haine sur le Web. Il semble que le fait que M. Warman ait été convaincu de la justesse de sa cause ait contribué à le protéger quelque peu contre les effets négatifs que les actes de M. Kyburz auraient pu avoir sur une personne plus vulnérable. À cet égard, nous notons que nous n'avons été saisis d'aucune preuve, médicale ou autre, indiquant que les faits et gestes de M. Kyburz ont eu des répercussions sur la santé de M. Warman.

[110] Au regard de l'ensemble des circonstances, nous sommes d'avis qu'il convient d'ordonner le versement à M. Warman d'une indemnité pour préjudice moral de 15 000 $.

iii) Intérêts

[111] Conformément à la règle 9(12) des Règles de procédure provisoires du Tribunal canadien des droits de la personne, l'indemnité pour préjudice moral qui doit être versée à M. Warman pour compenser le préjudice moral dont il a souffert donne droit au versement d'intérêts. Les intérêts courront à compter de la date de la présente décision, et ce, jusqu'à la date du paiement. Cependant, l'indemnité totale qui peut être versée au titre du préjudice moral, y compris les intérêts, ne peut dépasser 20 000 $ (32).

iv) Indemnité spéciale

[112] Bien que le paragraphe 53(3) de la Loi permette d'accorder une indemnité spéciale en cas d'infraction au paragraphe 14.1, nous n'accordons pas d'indemnité à ce titre en l'espèce, aucune demande en ce sens n'ayant été faite.

VIII. L'ORDONNANCE

[113] Pour les motifs énoncés précédemment, nous déclarons que Fred Kyburz a porté atteinte aux droits de M. Warman aux termes de la Loi canadienne sur les droits de la personne, et nous ordonnons, en ce qui touche l'infraction à l'article 13 :

  1. que Fred Kyburz et toute autre personne agissant de concert avec lui mettent fin à l'acte discriminatoire qui consiste à utiliser ou à faire utiliser un téléphone de façon répétée, en recourant ou en faisant recourir aux services d'une entreprise de télécommunication relevant de la compétence du Parlement, pour aborder ou faire aborder des questions comme celles dont il est fait état dans les pièces HR-1 et HR-2 ou d'autres questions de nature essentiellement similaire qui sont susceptibles d'exposer à la haine ou au mépris des personnes appartenant à un groupe identifiable sur la base des critères énoncés à l'article 3, acte qui va à l'encontre du paragraphe 13(1) de la Loi canadienne sur les droits de la personne. Cette ordonnance exige notamment que M. Kyburz cesse de faire de la publicité au sujet du matériel diffusé sur le site Web des Patriots on Guard, qui est maintenant affiché sur le site Web Archive.org, ou de renvoyer d'autres internautes à celui-ci;
  2. que l'on accorde à M. Kyburz un délai de sept jours à compter de la date de signification de la décision du Tribunal pour fermer le site Web du forum des Patriots on Guard. En outre, le Tribunal ordonne que M. Kyburz cesse et s'abstienne de publier de nouveaux messages Internet du genre de ceux visés par le volet de la plainte relevant de l'article 13, que ce soit sur le site Web du forum des Patriots on Guard ou ailleurs sur Internet, dès que la décision du Tribunal lui aura été signifiée;
  3. que M. Kyburz verse à M. Warman la somme de 15 000 $ en guise d'indemnité spéciale, conformément à l'alinéa 54(1)b) de la Loi;
  4. que des intérêts soient versés sur la somme accordée à M. Warman en guise d'indemnité spéciale, conformément à la règle 9(12) des Règles de procédure provisoires du Tribunal canadien des droits de la personne. Les intérêts courront à compter de la date de la présente décision, et ce, jusqu'à la date du paiement. Toutefois, la somme totale versée à titre d'indemnité spéciale, y compris les intérêts, ne peut dépasser 20 000 $;
  5. que M. Kyburz verse une somme de 7 500 $ à titre de sanction pécuniaire. Le paiement doit être fait au moyen d'un chèque visé ou d'un mandat-poste établi à l'ordre du Receveur général du Canada. Le Tribunal doit recevoir le paiement dans les 35 jours qui suivront la signification de la présente décision à M. Kyburz.

En ce qui concerne l'infraction au paragraphe 14.1, le Tribunal ordonne :

  1. que, dès qu'il aura été avisé de la décision du Tribunal, M. Kyburz cesse et s'abstienne d'exercer des représailles contre M. Warman parce qu'il a déposé une plainte devant la Commission canadienne des droits de la personne. Cette ordonnance s'applique à la diffusion de messages électroniques et de messages Internet - sur le site Web du forum des Patriots on Guard ou ailleurs sur Internet - qui sont similaires au matériel que renferment les pièces HR-1 et HR-2. En outre, le Tribunal ordonne à M. Kyburz de cesser de menacer M. Warman ou de tenter de nuire à sa carrière;
  2. que M. Kyburz verse à M. Warman la somme de 15 000 $ pour compenser le préjudice moral qu'il a subi;
  3. que des intérêts soient payés sur la somme qui sera versée à M. Warman en guise d'indemnité pour préjudice moral, conformément à la règle 9(12) des Règles de procédure provisoires du Tribunal canadien des droits de la personne. Les intérêts courront à compter de la date de la présente décision, et ce, jusqu'à la date du paiement. Cependant, le montant total qui sera versé en guise d'indemnité pour préjudice moral, y compris les intérêts, ne peut dépasser 20 000 $.

« Originale signée par »


Anne L. Mactavish, présidente

Shirish Chotalia, membre

Eve Roberts, c.r., membre

OTTAWA (Ontario)

le 9 mai 2003

TRIBUNAL CANADIEN DES DROITS DE LA PERSONNE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

DOSSIER DU TRIBUNAL NO : T726/3102

INTITULÉ DE LA CAUSE : Richard Warman c. Fred Kyburz

LIEU DE L'AUDIENCE : Ottawa (Ontario)

(les 17 et 18 mars 2003)

DATE DE LA DÉCISION DU TRIBUNAL : le 9 mai 2003

ONT COMPARU :

Richard Warman en son propre nom

Pam MacEachern au nom de la Commission canadienne des droits de la personne

1. 1 D'après les messages électroniques qui ont été échangés (inclus dans l'onglet 30 de la pièce HR-1), M. Kyburz a retourné les documents que lui avaient transmis la Commission et le Tribunal après y avoir fait des annotations similaires, initiative qui correspondait à une décision stratégique de sa part.

2. 2 Payzant et autres c. McAleer et Canadian Liberty Net, 26 C.H.R.R. D/271, confirmée par 26 C.H.R.R. D/280 (C.F., 1re inst.).

3. 3 Schnell c. Machiavelli and Associates Emprize Inc., 43 C.H.R.R. D/453, par. 127.

4. 4 L.C. 2001, ch. 41, art. 88.

5. 5 Selon M. Warman, le site des Patriots on Guard et son contenu sont encore accessibles sur Internet par l'intermédiaire du site Archive.org. M. Warman a expliqué qu'Archive.org est un service créé par une université américaine qui vise à rassembler et cataloguer le plus grand nombre de pages Web possible. Rien n'indique que M. Kyburz ait demandé que son matériel soit archivé par Archive.org. Par conséquent, il est possible que ce soit Archive.org, et non M. Kyburz, qui diffuse l'information à ce moment-ci.

6. 6 (2002), 41 C.H.R.R. D/274. Voir aussi Schnell, précitée.

7. 7 Le Dr Mock, l'experte citée par la Commission, a expliqué que les Juifs ashkénazes sont ceux qui sont de descendance européenne.

8. 8 Dans des messages antérieurs, M. Kyburz a défini les Khazars comme le groupe d'Européens de la fin du Moyen Âge qui ont épousé la foi juive et sont devenus les Juifs ashkénazes.

9. 9 Le Dr Mock a expliqué que le nouvel ordre international est un terme quelque peu méprisant utilisé pour décrire la nouvelle répartition du pouvoir que les forces juives seraient en train de réaliser.

10. 10 Pièce HR-1, onglet 20.

11. 11 Pièce HR-1, onglet 21.

12. 12 Pièce HR-1, onglet 22.

13. 13 On trouve dans le matériel un certain nombre d'allégations selon lesquelles les Juifs exercent leur emprise sur les médias, les tribunaux, la police, les Nations Unies, les écoles et universités, l'industrie du divertissement, le système bancaire, les États-Unis d'Amérique, le gouvernement du Canada, les sociétés pharmaceutiques, la profession médicale et les sociétés internationales.

14. 14 [1990] 3 R.C.S. 893.

15. 15 (1989), 10 C.H.R.R. D/6450 at D/6469. (T.C.D.P.).

16. 16 Il convient également de noter que le Dr Mock a indiqué dans son témoignage que les Juifs ashkénazes représentent la majorité de la population juive à l'échelle mondiale.

17. 17 Québec (Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse) c. Montréal (Ville); Québec (Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse) c. Boisbriand (Ville), [2000] 1 R.C.S. 665. Voir également Via Rail Canada Inc. c. Canada (Commission des droits de la personne.) (no 2) (1999), 33 C.H.R.R. D/127 (TCDP).

18. 18 Rés. no 217A (III) de l'A.G., Doc. N.U. A/810 (1948). Voir également le Pacte international relatif aux droits civils et politiques, 999 R.T.N.U. 171, art. 19.

19. 19 Charte canadienne des droits et libertés, Partie I de la Loi constitutionnelle de 1982, édictée en tant qu'annexe B de la Loi de 1982 sur le Canada (R.-U.), 1982, ch. 11, art. 2.

20. 20 Les membres du mouvement anti-fisc contestent, bien sûr, le pouvoir légal des gouvernements fédéral et provinciaux de percevoir des impôts et d'exiger que les personnes qui conduisent des véhicules à moteur soient titulaires d'un permis. (Pièce HR-1, onglet 13)

21. 21 Aucune explication n'a été fournie au Tribunal au sujet de la référence au site Web de David Icke.

22. 22 Dans des messages publiés antérieurement sur le Web, M. Kyburz fait allusion à ce qu'il appelle le programme de publicité . Il s'agirait d'une tactique employée contre les gens avec lesquels M. Kyburz s'est brouillé et qui consisterait à distribuer dans le quartier qu'habite la personne ciblée des dépliants relatant les méfaits qu'elle aurait commis.

23. 23 Il convient de noter que rien n'indique que la lettre destinée au juge en chef Richard ait vraiment été expédiée, si ce n'est la déclaration non solennelle de M. Kyburz voulant qu'il l'ait vraiment envoyée. Que la lettre ait été expédiée ou non au juge en chef, M. Kyburz savait, en publiant celle-ci sur le site Web du forum, que M. Warman et d'autres personnes la verraient. M. Kyburz avait, de toute évidence, l'intention de vexer M. Warman et de porter atteinte à sa réputation, ce qui va à l'encore de l'article 14.1.

24. 24 Voir la pièce HR-2, onglet 50.

25. 25 2003 CFPI 341.

26. 26 Canada (Procureur général) c. Morgan, [1992] 2 C.F. 401 (C.A.F.).

27. 27 Hébert c. Canada (Forces armées canadiennes), (1993), 23 C.H.R.R. D/ 107 (C.F., 1re inst.).

28. 28 Schnell, précitée, par. 163.

29. 29 Loi canadienne sur les droits de la personne, par. 54(1.1).

30. 30 Pièce HR-1, onglet 33, p. 256.

31. 31 [2000] N.J. No. 255.

32. 32 Voir Hébert, précitée.

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