Tribunal canadien des droits de la personne

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Canadian Human Rights Tribunal Tribunal canadien des droits de la personne

ENTRE :

SHANNON WACHAL

Plaignante

- et -

COMMISSION CANADIENNE DES DROITS DE LA PERSONNE

La Commission

- et -

MANITOBA POOL ELEVATORS

L’intimé

MOTIFS DE LA DÉCISION

T.D. 5/00 2000/09/27

TRIBUNAL : J. Grant Sinclair, président

(TRADUCTION)

I. INTRODUCTION

[1] La plaignante, Shannon Wachal, souffre d'allergies et d'asthme. Mme Wachal a été embauchée par l'intimé, l'organisme Manitoba Pool Elevators, à titre de commis aux documents sur les achats de grain, au service de la comptabilité des silos à céréales de comté. Elle a débuté son travail le 15 avril 1996, à l'administration centrale de Manitoba Pool Elevators, dans l'édifice de la Banque Royale, au 220, avenue Portage, Winnipeg. Mme Wachal travaillait au sixième étage de cet immeuble de bureaux à niveaux multiples.

[2] Le 23 août 1996, le Manitoba Pool Elevators a mis fin à son emploi en appuyant sa décision sur les absences du travail trop fréquentes de Mme Wachal. Durant la période de quatre mois au cours de laquelle Mme Wachal a travaillé chez Manitoba Pool Elevators, elle a manqué un total de 11 jours de travail répartis en six occasions distinctes.

[3] Mme Wachal prétendait que ses absences étaient dues à des réactions allergiques et asthmatiques provoquées par les travaux de rénovation effectués aux bureaux du sixième étage. Elle a porté plainte auprès de la Commission canadienne des droits de la personne le 24 octobre 1997, alléguant que le Manitoba Pool Elevators avait mis fin à son emploi en raison de sa déficience et qu'il n'avait pas fait les adaptations nécessaires en raison de sa déficience, contrairement aux exigences de l'article 7 de la Loi canadienne sur les droits de la personne.

II. CONCLUSION DES FAITS

[4] Shannon Wachal souffre d'allergies et d'asthme depuis l'âge de six ans. Divers facteurs comme la poussière, la moisissure, l'humidité élevée et les changements de saisons peuvent déclencher des crises d'asthme. Mme Wachal peut contrôler son asthme à l'aide de médicaments et en évitant le plus possible les circonstances à l'origine de ses problèmes.

[5] Mme Wachal a posé sa candidature au poste de commis aux documents sur les achats de grain auprès du Manitoba Pool Elevators lorsqu'un ami l'a informée de l'affichage du poste. Le poste était de durée déterminée d'environ deux ans assortie d'une période de probation de six mois. L'affichage du poste indiquait également que le Manitoba Pool Elevators adhérait au principe de l'équité en matière d'emploi et invitait les membres de certains groupes déterminés, dont les personnes ayant une déficience, à s'identifier.

[6] Lors de son entrevue pour le poste de commis, Mme Wachal n'a pas fait mention de ses allergies ou de sa condition asthmatique. Elle n'a pas senti le besoin de le faire, car elle avait travaillé pendant six ans à l'administration centrale d'une autre société céréalière sans éprouver un quelconque problème dans un tel milieu. Le Manitoba Pool Elevators n'a exigé aucun examen médical.

[7] Au moment de l'embauche de Mme Wachal, le Manitoba Pool Elevators avait entrepris des travaux de rénovation de certains étages de son administration centrale. Les travaux n'avaient pas encore commencé au sixième étage, et au moment de son embauche, Mme Wachal n'a pas été informée des travaux projetés.

A. Fonctions du poste

[8] Mme Wachal travaillait du lundi au vendredi, de 8 h à 16 h, sous la supervision de Penny Lee Blundon. Mme Wachal exécutait des tâches courantes journalières qui devaient être complétées à des heures déterminées tout au long de la journée. En plus de ses fonctions journalières, Mme Wachal était responsable de la préparation de deux rapports de fin de mois, d'un journal des achats et d'un rapport de majoration. Ces rapports représentaient le cumul de toutes les entrées journalières faites par Mme Wachal.

[9] Les rapports de fin de mois devaient être prêts les cinquième et sixième jours ouvrables du mois suivant. Il était indispensable que ces rapports soient prêts aux dates prévues parce que les autres services en dépendaient pour respecter les échéances applicables à leurs propres rapports. Mme Wachal a été informée de ces échéances dès le début de son emploi.

[10] Les tâches de Mme Wachal comprenaient également la préparation du journal des achats et des rapports de majoration pour la fin de l'année financière de Manitoba Pool Elevators, le 21 juillet. Ces rapports représentaient une compilation de 12 mois et ils devaient être prêts les troisième et cinquième jours ouvrables d'août. Mme Wachal a été informée dès le début de l'importance de ces échéances applicables aux rapports.

[11] Mme Wachal devait préparer des feuilles de calcul électronique dans lesquelles elle devait faire les écritures. Mme Blundon ne surveillait pas le travail journalier de Mme Wachal, mais elle devait examiner ses rapports mensuels et y indiquer les erreurs à corriger ou les modifications à y apporter. Mme Wachal devait apporter les modifications nécessaires et retourner la version corrigée à Mme Blundon.

[12] Selon son évaluation du rendement de Mme Wachal au travail, qui a été déposée à la présente audience, Mme Blundon s'attendait à de meilleurs résultats, surtout à cause des six années d'expérience de Mme Wachal dans une autre société céréalière. Elle n'en jugeait pas moins que Mme Wachal continuait à faire des erreurs dans son travail, et Mme Blundon ne voyait aucune amélioration dans le travail de Mme Wachal. Mme Blundon n'a jamais soulevé la question du rendement au travail avec Mme Wachal, pas plus que la lettre de renvoi définitif de Mme Wachal ne faisait mention de son rendement au travail comme motif de renvoi.

B. Absences du travail

[13] Entre le 15 avril et le 23 août 1996, Mme Wachal s'est absentée du travail en six occasions totalisant 11 jours ouvrables. Les quatre premières absences et les motifs de ces absences sont les suivantes : le 22 avril 1996 - « a manqué une journée de travail après avoir été impliquée dans un accident de voiture le dimanche 21 avril 1996; » le 13 mai 1996 - « absence du travail en raison d'une forte réaction allergique au MSG; » les 6 et 7 juin 1996 - « absence due à des allergies et à des problèmes de sinus; » le 8 juillet 1996 - « a quitté le bureau à 9 h en raison de problèmes d'allergies; » le 9 juillet 1996 - « absence pour raison de maladie - allergies; »

Mme Wachal a elle-même rapporté ces absences en remplissant la formule « Confirmation de congé » pour les journées où elle était absente. Ces formules indiquent les motifs des absences, et elles ont été signées par Mme Wachal, Mme Blundon et Brita Chell, gestionnaire de la Comptabilité des opérations céréalières.

[14] Mme Blundon et Mme Wachal ont eu une rencontre, le 10 juillet 1996. Mme Blundon a organisé cette rencontre parce qu'elle jugeait que l'absentéisme de Mme Wachal causait un problème, surtout parce que les absences se produisaient à la fin du mois. Mme Blundon lui a expliqué que ses absences causaient des problèmes de moral aux autres membres du personnel qui devaient faire son travail lorsqu'elle était absente.

[15] Mme Blundon se souvient que Mme Wachal lui avait répondu que quelque chose dans l'immeuble devait la déranger, car elle n'avait pas eu ce problème dans son milieu de travail précédent. Mme Blundon ne s'est pas renseignée davantage sur les allergies ou l'asthme que Mme Wachal avait donnés comme motifs de ses absences, en juin et juillet. Mme Wachal a dit à Mme Blundon que ses absences et le fardeau qu'elles imposaient à ses compagnons de travail la mettaient mal à l'aise. Selon son témoignage, Mme Wachal n'était pas à l'aise de discuter de ses problèmes d'allergies en détail avec Mme Blundon. Elle n'a pas dit à Mme Blundon qu'elle croyait que les travaux de rénovation étaient à l'origine de ses problèmes d'allergies, pas plus qu'elle n'a demandé d'être placée dans un autre lieu de travail. Lors de la rencontre du 10 juillet, Mme Blundon a demandé à Mme Wachal de fournir un certificat médical pour toute future absence du travail.

[16] Mme Wachal a demandé une adaptation, une fois. Le service de la comptabilité devait se réinstaller dans un espace temporaire, au sixième étage, le 23 juillet 1996. Mme Wachal a envoyé à Mme Blundon un courriel demandant de ne pas se présenter au travail le 23 juillet parce qu'elle avait des problèmes d'allergies dus à la poussière soulevée par le déménagement. Mme Blundon a répondu qu'il n'y avait aucun problème et lui a accordé la permission de s'absenter.

C. Attestation médicale avant la cessation d'emploi

[17] Mme Wachal a été absente en deux autres occasions, les 7 et 8 août 1996 et les 21, 22 et 23 août 1996.

[18] Mme Wachal a fourni à Mme Blundon un certificat médical de son médecin de famille, le Dr Bedi, pour son absence du 7 août 1996. Ce certificat établissait que Mme Wachal était sous les soins du médecin depuis le 7 août et qu'elle pourrait retourner au travail le 9 août. Le motif indiqué pour son absence était « incapacité due à la maladie ». Le Dr Bedi a également fourni un certificat médical daté du 22 août 1996 pour l'absence du 21 au 23 août 1996. Il a indiqué que Mme Wachal était « incapable de travailler depuis le 21 août 1996 pour cause de maladie ». Mme Wachal n'a pas remis le certificat à Mme Blundon parce qu'elle ne l'a pas demandé. Elle ne pouvait pas se souvenir si elle avait remis le certificat à quelqu'un d'autre, chez Manitoba Pool Elevators, mais elle pensait qu'elle pouvait l'avoir remis à M. Mulvihill, le gestionnaire des ressources humaines, lorsqu'elle l'a rencontré, le 26 août 1996, afin de discuter de sa cessation d'emploi.

[19] Quant à ses absences d'avril et de mai, Mme Wachal a téléphoné à Mme Blundon et lui a dit qu'elle ne viendrait pas au travail en lui indiquant les motifs. Les autres fois où elle n'est pas venue au travail, Mme Wachal a téléphoné à sa compagne de travail et lui a dit qu'elle ne venait pas travailler, mais sans préciser les motifs de son absence. Cette compagne de travail devait transmettre le message à Mme Blundon.

D. Absences et rapports de fin de mois

[20] Il semble que Mme Wachal était au travail les jours que les rapports de fin de mois d'avril devaient être remis. Elle était absente du travail le 6 et 7 juin 1996 ainsi que les 8 et 9 juillet 1996, les jours limites pour la remise des rapports de fin de mois de mai et de juin. Les rapports de fin d'année financière devaient être remis les 6 et 8 août, tandis que les rapports de fin de mois devaient être remis les 8 et 9 août 1996. Mme Wachal était absente les 7 et 8 août, alors qu'elle était au travail le 6 août, mais elle a été incapable de dire si elle avait terminé un de ces rapports. Ses dernières absences, du 21 au 23 août, ne se sont pas produites un jour où des rapports de fin de mois devaient être remis.

E. Attestation médicale après la cessation d'emploi

[21] Lors de l'audience, la Commission a déposé un certificat médical du Dr Bedi daté du 5 septembre 1996, un rapport médical de la Dre June James, l'allergologue de Mme Wachal, daté du 5 septembre 1996, et un rapport médical du Dr Bedi daté du 25 mai 2000. Ce dernier rapport, demandé par l'avocat de la Commission, résume les notes cliniques du Dr Bedi relatives aux consultations de Mme Wachal entre le 1er juillet 1989 et décembre 1999.

[22] Mme Wachal a témoigné qu'elle avait consulté le Dr Bedi parce qu'elle avait besoin d'une attestation médicale pour ses absences au cours du mois d'août ainsi que d'une ordonnance pour obtenir des médicaments afin de contrôler ses allergies. Dans son témoignage, elle a également dit avoir parlé au Dr Bedi de ses problèmes médicaux au travail et du fait que les travaux de construction aggravaient sa condition.

[23] Cependant, lorsqu'on l'a interrogée par la suite, Mme Wachal n'était pas d'accord pour dire que la première fois qu'elle a rencontré le Dr Bedi relativement à sa situation au travail était le 7 août 1996. En fait, Mme Wachal a dit qu'elle n'avait aucune idée quant au moment où elle aurait consulté le Dr Bedi pour ce problème en 1996, mais que le Dr Bedi avait probablement documenté toutes ses visites.

[24] Le rapport médical renferme l'historique détaillé du diagnostic du Dr Bedi et du traitement prescrit à Mme Wachal entre 1989 et 1999. Le rapport médical du 25 mai 2000 du Dr Bedi ne fait aucune référence à une quelconque consultation de Mme Wachal en 1996. On n'y trouve aucune référence à un quelconque problème d'allergie ou d'asthme que Mme Wachal a eu en 1996 ou à la cause de tout autre problème. La seule référence du rapport à 1996 a trait aux médicaments qu'elle prenait.

[25] Dans son rapport médical du 5 septembre 1996, le Dr Bedi certifiait connaître Mme Wachal depuis 1989 et qu'elle souffrait d'allergies et d'asthme. Il déclarait également que Mme Wachal était incapable de travailler dans un milieu renfermant beaucoup de poussière, de pollen ou d'autres allergènes. Ce rapport ne renferme rien de plus.

[26] Dans son rapport médical, la Dre James indique qu'elle a d'abord rencontré Mme Wachal en 1979, puis de nouveau en 1991 lors d'une visite de suivi. Il n'y a aucune indication selon laquelle la Dre James l'a revue depuis ce temps. La Dre James a également noté que Mme Wachal a commencé à travailler chez Manitoba Pool Elevators en mai 1996, et que peu de temps après, des travaux de construction ont débuté au lieu de travail. Elle a également noté que Mme Wachal a manqué plusieurs jours de travail au cours d'une période de quatre mois et qu'elle a fait de fréquentes visites pour rencontrer le Dr Bedi qui a été à même de corroborer l'évolution défavorable de son asthme, et des congés de maladie pertinents ont été accordés. Ce rapport semble se fonder sur les renseignements fournis par Mme Wachal. Tel qu'il est indiqué précédemment, aucune visite ou description de l'évolution défavorable de l'asthme de Mme Wachal n'est documentée par le Dr Bedi.

F. Travaux de rénovation

[27] Selon le témoignage de Mme Wachal, ce sont la poussière et les allergènes causés par les travaux de rénovation au sixième étage qui ont fortement aggravé ses allergies et son asthme et causé ses absences. Selon ses souvenirs, les travaux de rénovation ont débuté quelques semaines après son entrée en fonctions, le 15 avril 1996. Elle n'était pas certaine de la date exacte. Selon elle, les travaux devaient avoir débuté avant le 6 juin 1996, car elle était absente du travail le 7 juin 1996.

[28] Barbara Gyselinck, gestionnaire des Services spéciaux de Manitoba Pool Elevators, était la coordonnatrice de tous les travaux de rénovation. Mme Gyselinck a été beaucoup plus précise sur cette question. Selon elle, les travaux de rénovation du sixième étage devaient se faire en deux étapes au cours de la période du 10 juin au 20 septembre 1996. La première phase comprenait la rénovation d'une partie du sixième étage laissée vacante par le départ d'un autre service. Ces travaux ont débuté le 10 juin 1996 et se sont terminés vers le 18 ou le 20 juillet.

[29] Mme Gyselinck a également témoigné que la partie dans laquelle ont été effectués les travaux de la phase I avait été scellée par rapport à la partie où travaillait Mme Wachal. Les deux secteurs étaient séparés par des murs mitoyens permanents du plancher au plafond, à l'exception de deux très petites parties des murs où des murs secs temporaires avaient été érigés. Le seul endroit où il y avait une certaine interface était la partie du sixième où se trouvait l'ascenseur et qui était adjacente à la porte d'entrée de la zone où se faisaient les travaux. Les ouvriers utilisaient un des ascenseurs comme ascenseur de service pour monter les matériaux de construction et les sortir.

[30] Le personnel de la comptabilité s'est installé dans les locaux à bureaux temporaires rénovés vers le 23 juillet. À ce moment, les travaux dans leurs locaux originaux avaient débuté et devaient se poursuivre jusqu'à leur conclusion, vers le 20 ou le 23 septembre 1996. Le personnel de la comptabilité a alors réintégré ses locaux à bureaux rénovés.

[31] Le Manitoba Pool Elevators avait également obtenu au treizième étage des locaux à bureaux temporaires munis de liaisons informatiques et téléphoniques avec les bureaux principaux. Ces bureaux étaient à la disposition des employés dont la santé aurait pu être affectée par les travaux de rénovation. Avant les rénovations au sixième étage, un employé avait fait part de ses inquiétudes vis-à-vis des émanations de peinture, mais il semble qu'il n'y ait eu aucun problème. Les superviseurs étaient au courant de la disponibilité de ces bureaux additionnels, mais ce renseignement n'a pas été communiqué clairement au personnel. Durant les rénovations, aucun employé n'a demandé à travailler au treizième étage.

[32] Selon Mme Wachal, elle était visiblement affectée par les travaux de rénovation, au travail. Elle a dit qu'elle éternuait et toussait en diverses occasions, tout au long de la journée, et que ses yeux étaient rougis et larmoyants. Elle devait également utiliser ses inhalateurs de Ventalin pour soulager ces symptômes. Mme Wachal a également témoigné que ces symptômes étaient évidents pour ses compagnons de travail qui travaillaient à environ cinq pieds d'elle.

[33] Mme Blundon a apporté la preuve du contraire. Durant la période au cours de laquelle le personnel de la comptabilité se trouvait dans les locaux à bureaux temporaires, le poste de travail de Mme Blundon se trouvait à environ 12 ou 15 pieds de Mme Wachal. Elle n'a remarqué aucun des symptômes décrits par Mme Wachal, pas plus qu'elle ne l'a vue se servir d'un inhalateur ou de tout autre médicament. Mme Wachal ne lui a pas dit non plus qu'elle souffrait d'allergies dues aux rénovations ni demandé d'être réaffectée ailleurs durant les travaux de rénovation.

[34] Brita Chell, la gestionnaire de la Comptabilité des céréales, a occupé un bureau dans les locaux temporaires. Même si elle n'avait pas des contacts quotidiens avec Mme Wachal, elle la rencontrait de temps à autre. Selon elle, elle n'a jamais remarqué un des symptômes dont Mme Wachal soutient avoir souffert durant les travaux de rénovation.

G. Décision

[35] Le fait que Mme Wachal souffre d'une déficience, à savoir des allergies et l'asthme, ne fait aucun doute, et personne ne conteste le fait que ses allergies peuvent être aggravées par la poussière ou la moisissure qui peuvent déclencher une crise d'asthme débilitante. Personne ne conteste non plus le fait que le Manitoba Pool Elevators a mis fin à l'emploi de Mme Wachal en raison de ses absences excessives du travail.

[36] Les questions dont il faut décider dans ce cas sont les suivantes.

  1. Les absences de Mme Wachal de son travail étaient-elles dues à sa déficience?
  2. Si tel est le cas, s'est-elle acquittée de son obligation d'informer le Manitoba Pool Elevators de sa déficience et des incidences des travaux de rénovation sur sa santé?
  3. Le Manitoba Pool Elevators a-t-il rempli son obligation de fournir à Mme Wachal des aménagements, y compris de se renseigner sur la nature et l'importance de sa déficience et de fournir des adaptations pertinentes.

En abordant d'abord la question fondamentale de la relation entre les absences et la déficience, il est clair que les deux premières absences, en avril et mai 1996, n'étaient pas reliées à la déficience de Mme Wachal. Il est difficile de déterminer si les autres absences étaient dues à la déficience et cela soulève de nombreuses questions de crédibilité.

[37] Mme Wachal a soutenu constamment que ses absences étaient dues aux allergènes produits par les travaux de rénovation. Elle a attribué ses absences des 7 et 8 juin 1996 à des allergies et à des problèmes de sinus engendrés par les travaux de rénovation. Mais Mme Wachal ne pouvait pas dire quand les travaux avaient débuté. Selon moi, le témoignage de Mme Gyselinck démontre clairement que les travaux au sixième étage ont débuté le 10 juin 1996.

[38] L'absence de Mme Wachal en juin et juillet a coïncidé avec les dates de remise du rapport de fin de mois de mai. Son absence du début d'août a coïncidé de nouveau avec les dates de remise des rapports de fin de mois et de fin d'année financière. Seule sa dernière absence n'a pas coïncidé avec une date de remise de rapport de fin de mois.

[39] Mme Wachal n'a fourni aucune explication plausible quant à la raison pour laquelle la poussière et les allergènes engendrés par les travaux de rénovation lui causent habituellement des problèmes aux dates de remise des rapports de fin de mois, mais pas les autres jours du mois. Elle n'a pas non plus fourni une quelconque raison plausible pour laquelle elle n'a pas dit à Mme Blundon ou à quiconque d'autre chez Manitoba Pool Elevators que les travaux de rénovation provoquaient chez elle de sérieux problèmes de santé.

[40] Mme Wachal a eu l'occasion de parler de ce qui, selon elle, était la source de ses problèmes, lors de sa rencontre du 10 juillet avec Mme Blundon. Elle ne l'a pas fait. La seule fois où elle a prévu être absente, le 23 juillet, Mme Blundon a rapidement acquiescé à sa demande.

[41] Selon moi, l'attestation médicale présente une lacune importante. Mme Wachal a témoigné qu'elle était allée voir le Dr Bedi afin d'obtenir des certificats médicaux pour ses absences de juillet et d'août. Mais lorsqu'elle a été interrogée davantage, elle n'avait aucune idée du moment où elle a rencontré le Dr Bedi, en 1996, relativement à ses problèmes médicaux au travail.

[42] Dans ses certificats médicaux des 7 et 22 août 1996 et du 5 septembre 1996, le Dr Bedi ne fait aucune référence à des consultations de Mme Wachal. Les motifs donnés par le Dr Bedi aux absences ont été une incapacité due à la maladie sans fournir des détails ou des explications sur la nature de l'incapacité ou de la maladie de Mme Wachal.

[43] Le rapport médical du 25 mai 2000 du Dr Bedi, qui résume ses notes cliniques, se distingue par l'absence de toute référence à un quelconque problème médical engendré par des allergies ou l'asthme, en 1996. Le rapport de la Dre James semble anecdotique et il n'est étayé par aucun des rapports du Dr Bedi.

[44] Ni le Dr Bedi ni la Dre James n'ont été appelés à fournir une preuve médicale lors de l'audience. La Commission s'est plutôt fiée aux certificats médicaux et au rapport médical du Dr Bedi et, dans une moindre mesure, au rapport de la Dre James.

[45] Selon moi, cette preuve médicale est insuffisante pour appuyer la conclusion voulant que les absences du travail de Mme Wachal étaient dues à sa déficience.

[46] Enfin, il y a le témoignage de Mme Wachal selon lequel ses symptômes au travail étaient tels qu'il était évident qu'elle souffrait d'allergies. Les témoignages divergent sur cette question. Mme Blundon, qui travaillait tout près de Mme Wachal, n'a remarqué aucun de ses symptômes. Mme Wachal n'a cité aucun de ses compagnons de travail à témoigner même si elle en a rencontré quelques-uns, à l'occasion, depuis qu'elle a quitté Manitoba Pool Elevators. En me fondant sur mon évaluation de ces deux témoins, je suis enclin à accepter le témoignage de Mme Blundon sur ce point.

[47] En conclusion, je trouve, selon la prépondérance des probabilités, que la Commission et la plaignante n'ont pas prouvé que les absences du travail de la plaignante étaient dues à sa déficience et que son emploi chez Manitoba Pool Elevators a pris fin à cause de sa déficience. En raison de cette conclusion, je n'ai pas à traiter les autres questions.

[48] La plainte est par les présentes rejetée.

J. Grant Sinclair, président

OTTAWA, Ontario Le 27 septembre 2000

TRIBUNAL CANADIEN DES DROITS DE LA PERSONNE AVOCAT INSCRIT AU DOSSIER

NO DE DOSSIER DU TRIBUNAL : T544/0200

INTITULÉ : Shannan Wachal c. Manitoba Pool Elevators

LIEU DE L'AUDIENCE : Winnipeg, Manitoba Les 31 juillet et 1er août 2000

DÉCISION DU TRIBUNAL RENDUE LE : 27 septembre 2000

ONT COMPARU :

Shannon Wachal En son nom

Odette Lalumière Pour la Commission canadienne des droits de la personne

Kristen L. Gibson Pour Manitoba Pool Elevators

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