Tribunal canadien des droits de la personne

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CANADIAN HUMAN RIGHTS TRIBUNAL TRIBUNAL CANADIEN DES DROITS DE LA PERSONNE

MAURICE BRESSETTE

le plaignant

- et -

COMMISSION CANADIENNE DES DROITS DE LA PERSONNE

la Commission

- et -

CONSEIL DE BANDE DE LA PREMIÈRE NATION DE KETTLE ET STONY POINT

l'intimé

DÉCISION CONCERNANT LA MODIFICATION DE LA PLAINTE

2004 TCDP 02
2004/01/15

MEMBRE INSTRUCTEUR : J. Grant Sinclair

[TRADUCTION]

[1] Le plaignant, Maurice Bressette, a déposé auprès de la Commission canadienne des droits de la personne une plainte en date du 30 mars 2002 contre l'intimé, le Conseil de bande de la Première nation de Kettle Point et de Stony Point. Dans sa plainte, le plaignant allègue que l'intimé a exercé à son endroit une discrimination fondée sur la situation de famille en refusant de l'embaucher à titre de travailleur en service social familial, contrevenant ainsi à l'art. 7 de la Loi canadienne sur les droits de la personne.

[2] Le 30 octobre 2003, le Tribunal a tenu une audience préliminaire pour examiner deux requêtes, l'une présentée par l'intimé qui conteste la compétence du Tribunal en vertu de l'art. 67 de la Loi, et l'autre déposée par le plaignant qui vise à modifier sa plainte afin d'y ajouter des allégations voulant que l'intimé ait exercé des représailles contre lui et contrevenu ainsi à l'art. 14.1 de la Loi.

[3] La requête du plaignant n'a pas été examinée à l'audience préliminaire. Le Tribunal a plutôt ordonné que la requête visant à modifier la plainte soit examinée par voie d'observations écrites des parties, les observations écrites du plaignant devant être déposées avant le 7 novembre 2003 et celles de l'intimé, avant le 17 novembre 2003. En outre, le Tribunal a indiqué que l'audience se déroulerait du 19 au 23 avril 2004 et du 26 au 30 avril 2004. Les dates de divulgation ont été fixées au 31 mars 2004 (plaignant) et au 27 février 2004 (intimé).

[4] Le TCDP et les tribunaux provinciaux des droits de la personne ont rendu un certain nombre de décisions traitant de la modification d'une plainte pour y ajouter une allégation de représailles. (Voir Kavanagh c. Service correctionnel du Canada (31 mai 1999), T505/2298 (T.C.D.P.); Entrop c. Compagnie pétrolière impériale Ltée (1994) 23 C.H.R.R. D/186; Fowler v. Flicka Gymnastics Club, [1998] (T.D.P.C.-B. no 2); Schnell c. Machiavelli Associates c. John Micka (25 avril 2001), T/594/5200 (T.C.D.P.)).

[5] Certains principes découlent de ces décisions. Une plainte déposée auprès de la Commission n'a rien d'une mise en accusation. Le Tribunal a le pouvoir de modifier une plainte afin d'y ajouter d'autres allégations, dans la mesure où un préavis suffisant est donné à l'intimé afin de ne pas lui causer préjudice et de lui permettre de se défendre de façon appropriée. Le fait que la modification proposée porte sur un article de la Loi qui est différent de celui invoqué dans la plainte initiale ne prive pas le Tribunal de sa compétence.

[6] Il ne devrait pas être nécessaire que des allégations voulant que des représailles aient été exercées à la suite d'une plainte donnent lieu à une instance distincte. En fait, on devrait autoriser une modification, à moins qu'il soit manifeste et évident que les allégations faisant l'objet de la demande de modification ne sauraient être jugées fondées. Un exemple évident, du moins pour ce qui est des allégations de représailles, serait un cas où on pourrait démontrer que les présumés actes de représailles se sont produits avant le dépôt de la plainte. Le Tribunal ne devrait pas s'engager dans un examen approfondi du bien-fondé de la modification. Un tel examen devrait être fait uniquement au regard de l'ensemble de la preuve, au terme d'une audience en bonne et due forme.

[7] Dans ses observations écrites, le plaignant fait état de nombreux incidents qui sont survenus après le 30 mars 2002 et qui, allègue-t-il, constituent des représailles. À mon avis, quelques-uns des multiples incidents cités par le plaignant peuvent à juste titre être qualifiés de représailles. Il n'est pas manifeste et évident que ces allégations du plaignant ne sauraient être jugées fondées.

[8] Cela ne veut pas dire que le plaignant a établi que l'intimé a contrevenu au paragraphe 14.1 de la Loi. Le plaignant devra prouver cela à l'audience. Le présent Tribunal a simplement conclu que la plainte initiale doit être modifiée afin d'y ajouter une allégation aux termes de l'article 14.1 de la Loi.

[9] Dans ses observations écrites, l'intimé fait valoir que les observations et la documentation du plaignant ne sont que la continuation d'un dialogue entre le chef de bande, l'administrateur de la bande et le Conseil de bande, et que cela ne devrait ni ne saurait être qualifié de représailles. À mon avis, ce n'est pas une raison de refuser la modification. Il s'agit là d'un argument à faire valoir, à l'appui de la preuve, au moment de l'audience.

[10] Enfin, en ce qui touche la question du préjudice causé à l'intimé, je constate que ce dernier sait depuis au moins le 22 octobre 2003, date à laquelle remonte le dépôt de sa requête, que le plaignant avait l'intention de demander cette modification. L'intimé sait également depuis cette date quels sont les incidents et la documentation sur lesquels le plaignant se fonde. De plus, depuis le 7 novembre 2003, le plaignant a divulgué à l'intimé d'autres documents décrivant d'autres incidents qu'il entend citer. Le plaignant doit par ailleurs faire une pleine divulgation avant le 31 mars 2004.

[11] À mon avis, l'intimé a été suffisamment informé de la preuve à réfuter et ne subira aucun préjudice si le Tribunal autorise la modification.

[12] Par conséquent, il est fait droit à la requête du plaignant visant à modifier la plainte initiale afin d'y ajouter une allégation de représailles aux termes de l'art. 14.1 de la Loi.

Signed by

J. Grant Sinclair

OTTAWA (Ontario)

Le 15 janvier 2004

PARTIES AU DOSSIER

DOSSIER DU TRIBUNAL :

T827/7703

INTITULÉ DE LA CAUSE :

Maurice Bressette c. Conseil de bande de la Première nation de Kettle Point et de Stony Point

DATE DE LA DÉCISION
DU TRIBUNAL :

Le 15 janvier 2004

ONT COMPARU :

Maurice Bressette

en son propre nom

Patrick O'Rourke

au nom de la Commission canadienne des droits de la personne

Jonathon George

au nom de l'intimé

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