Tribunal canadien des droits de la personne

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TRIBUNAL CANADIEN DES DROITS DE LA PERSONNE CANADIAN HUMAN RIGHTS TRIBUNAL

YVONNE SUGIMOTO

la plaignante

- et -

COMMISSION CANADIENNE DES DROITS DE LA PERSONNE

la Commission

- et -

BANQUE ROYALE DU CANADA

l'intimée

DÉCISION

2007 TCDP 5
2007/02/21

MEMBRE INSTRUCTEUR : J. Grant Sinclair

[TRADUCTION]

I. LES FAITS

A. L'admissibilité à la participation au régime de retraite avant le 1er mai 1974

B. La modification apportée au régime de retraite le 1er mai 1974

C. La modification apportée au régime de retraite en 1980

D. La modification apportée au régime de retraite en 1987 - la retraite anticipée

E. Le rachat d'années de service basé sur le sexe de 1996 (RASBS)

(i) L'historique du RASBS

(ii) Le rapport Mercer de février 1995

(iii) La résolution prise par le conseil d'administration le 5 décembre 1995.

F. La modification apportée au régime du RASBS le 5 septembre 2003

G. Mme Sugimoto et le RASBS

(i) Correspondance et consultation initiales

(ii) Les états récapitulatifs des avantages personnels de Mme Sugimoto

(iii) Le système de pension PD BenPlus

H. La réouverture de 2001

I. Mme Sugimoto et la plainte qu'elle a déposée au BSIF

II. L'ANALYSE

A. Le critère de la preuve prima facie et les questions à trancher

B. Mme Sugimoto a-t-elle établi une preuve prima facie de participation au régime de retraite avant mai 1974?

C. L'intimée a-t-elle répondu à la preuve prima facie de discrimination?

D. Le RASBS avait-il un caractère sélectif et était-il, par conséquent, discriminatoire?

E. La réouverture de 2001 est-elle discriminatoire au point d'établir une distinction entre les participants et les non participants?

III. LA DÉCISION

[1] Yvonne Sugimoto est la plaignante dans la présente affaire. Elle a déposé une plainte, datée du 9 décembre 2002, auprès de la Commission canadienne des droits de la personne (CCDP). Elle prétend que la Banque Royale du Canada (BRC), dans les dispositions de son régime de retraite, a fait montre de discrimination à son endroit en lui imposant un traitement différent préjudiciable en raison de son sexe, et ce, en contravention des articles 7, 10 et 21 de la Loi canadienne sur les droits de la personne (LCDP).

[2] La différence de traitement préjudiciable dont Mme Sugimoto se plaint est la suivante : en vertu du régime de retraite de la BRC, un homme qui a le même âge que Mme Sugimoto et qui possède la même expérience de travail à la BRC peut prendre sa retraite à l'âge de 56 ans, et ce, avec pleine pension. Si Mme Sugimoto désirait prendre sa retraite au même âge, le montant de pension annuelle qu'elle recevrait serait 35 p. 100 moins élevé que celui reçu par son collègue de sexe masculin. Afin de recevoir, comme son collègue masculin, le plein montant de pension, Mme Sugimoto devrait travailler 70 mois de plus. Cette situation est due au fait que Mme Sugimoto n'a pas été autorisée à participer à la réouverture de 2001 alors que la BRC a autorisé ses collègues de sexe masculin à y participer.

[3] Afin de comprendre l'incidence que cette situation a eue sur Mme Sugimoto, il faut d'abord comprendre comment fonctionne le régime de retraite de la BRC et voir comment il a évolué au cours des 30 dernières années.

[4] Avant de prendre sa retraite, Mme Sugimoto participait au régime de retraite à prestations déterminées de la BRC. En vertu de ce régime, un employé pouvait participer comme contributeur ou comme non-contributeur. Dans le régime de retraite contributif, le montant de prestation de retraite annuel est égal à 1,3 p. 100 x le salaire moyen de fin de carrière x le nombre d'années de service ouvrant droit à pension pendant lesquelles le participant a contribué. Dans le régime non contributif, le pourcentage est de 0,9 plutôt que de 1,3 et les participants ne contribuent pas.

[5] Un participant peut accumuler des années de contribution ou des années de non-contribution ou une combinaison des deux. Le participant contribue 4 ou 6 p. 100 de son salaire selon échelle salariale. La BRC s'occupe du financement de la valeur actuarielle ainsi que du financement des frais d'administration du régime.

[6] Mme Sugimoto a conclu une entente de continuation du salaire et a quitté son emploi à la BRC en mars 2002. La BRC lui a versé un salaire jusqu'à ce qu'elle prenne une retraite anticipée le 4 octobre 2006.

I. LES FAITS

A. L'admissibilité à la participation au régime de retraite avant le 1er mai 1974

[7] Mme Sugimoto est née le 4 octobre 1951 et elle a commencé à travailler pour la BRC le 23 février 1970. Elle était alors âgée de 18 ans. Avant le 1er mai 1974, c'est à l'âge de 21 ans que le personnel de sexe masculin de la BRC pouvait commencer à participer au régime contributif. Or, ce n'était qu'à l'âge de 24 ans que le personnel de sexe féminin pouvait commencer à participer à ce même régime.

B. La modification apportée au régime de retraite le 1er mai 1974

[8] Le 1er mai 1974, le régime de retraite a été modifié en vue de porter à 30 ans l'âge auquel les employés, hommes et femmes, pouvaient commencer à participer au régime. Les employés qui participaient déjà au régime, mais qui n'avaient pas 30 ans, se sont vu offrir le choix de continuer à participer au régime comme contributeur ou de surseoir à leur participation jusqu'à l'âge de 30 ans. S'ils sursoyaient à leur participation, ils n'accumulaient aucune année de service ouvrant droit à pension avant de recommencer à participer au régime à l'âge de 30 ans.

[9] Les participants au régime qui avaient plus de 30 ans le 1er mai 1974 pouvaient choisir de continuer à participer au régime comme contributeurs ou comme non-contributeurs. La modification du 1er mai 1974 n'a eu aucune incidence sur la situation de Mme Sugimoto. Elle avait 22 ans à l'époque.

C. La modification apportée au régime de retraite en 1980

[10] Le 1er mars 1978, la Loi canadienne sur les droits de la personne est entrée en vigueur. Cette loi prévoyait un délai de grâce de deux ans afin de permettre l'harmonisation, avec ses dispositions, des régimes de retraite réglementés par le gouvernement fédéral.

[11] Le 1er septembre 1980, la BRC a modifié le régime de retraite et a fixé la date à laquelle un employé pouvait commencer à participer au régime au premier en date des événements suivants : date à laquelle l'employé atteignait l'âge de 25 ans ou date à laquelle il travaillait à la BRC depuis cinq ans sans interruption. En ce qui concerne les employés qui participaient déjà au régime, la date à laquelle ils ont commencé à participer a été fixée rétroactivement au 1er mars 1980 (et ce, afin de respecter la fin du délai de grâce).

[12] Mme Sugimoto avait 26 ans et a commencé à participer au régime de retraite à titre de contributeur le 1er mars 1980. Le 1er mars 1985, elle a choisi de devenir non-contributeur, ce qui était permis par le régime après 5 années de participation à titre de contributeur.

D. La modification apportée au régime de retraite en 1987 - la retraite anticipée

[13] Le 1er janvier 1987, le régime de retraite a été modifié afin de permettre aux participants au régime à titre de contributeur ou de non-contributeur, comptant 35 années de service ouvrant droit à pension, de prendre leur retraite après l'âge de 55 ans, et ce, avec pleine pension annuelle. Pour chaque année en deçà de 35 années de service ouvrant droit à pension, la pension annuelle serait réduite de 5 p. 100. L'âge normal de la retraite était 65 ans.

E. Le rachat d'années de service basé sur le sexe de 1996 (RASBS)

(i) L'historique du RASBS

[14] L'introduction en 1987 de la possibilité de pouvoir prendre une retraite anticipée a créé un problème important quant aux femmes qui participaient au régime de retraite et qui, avant 1974, ne pouvaient commencer à participer au régime que trois ans après leurs collègues de sexe masculin. Cette inégalité de traitement avait des conséquences quant à la retraite anticipée et quant à la pleine pension et cela posait problème.

(ii) Le rapport Mercer de février 1995

[15] En 1995, la BRC a commencé à explorer des façons de corriger les conséquences possibles des règles d'admissibilité en vigueur avant mai 1974. Elle a retenu les services de la société William Mercer afin de voir quelles stratégies elle pourrait adopter et quelles incidences celles-ci pourraient avoir sur le régime.

[16] Dans son rapport de février 1995 intitulé Analysis of past discriminatory practices in Canadian Pension Plans, Mercer a souligné que les employés de sexe féminin de la BRC, comme Mme Sugimoto, qui n'avaient pas atteint l'âge de 24 ans au 1er mai 1974, ne pouvaient accumuler aucune prestation de retraite quant aux trois années de service comprises entre les âges de 21 et de 24 ans. De plus, comme Mme Sugimoto n'était pas admissible à participer au régime avant le 1er mars 1980, elle ne pouvait accumuler aucune prestation de retraite quant à ses années de service comprises entre le 1er mai 1974 et le 1er mars 1980.

[17] Le rapport Mercer soulignait que certaines institutions financières canadiennes avaient éliminé rétroactivement, de leurs régimes de retraite, toutes les pratiques discriminatoires antérieures; certaines avaient apporté des rajustements rétroactifs qui avaient éliminé en partie leurs pratiques discriminatoires antérieures; certaines institutions n'ont rien fait.

[18] Le rapport Mercer soulignait que la BRC n'avait jamais apporté aucune modification rétroactive à son régime de retraite. Cependant, si la BRC désirait faire une exception quant à cette politique, Mercer proposait deux solutions.

[19] La BRC a décidé d'appliquer une troisième solution, à savoir compter comme années de service ouvrant droit à pension, sous le régime contributif, les années de service d'un employé de sexe féminin entre l'âge de 21 ans et la date la plus rapprochée entre la date à laquelle l'employé de sexe féminin a commencé à participer au régime, la date à laquelle elle a eu 24 ans et le 1er mai 1974.

[20] Dans son rapport, Mercer ne recommandait pas de prendre en compte la période comprise entre mai 1974 et mars 1980, et ce, pour deux raisons. Premièrement, il serait très conjectural de deviner ce qu'une personne qui a aujourd'hui entre 21 et 24 ans aurait fait en 1974, à savoir si elle aurait choisi de continuer à participer à titre de contributeur ou aurait choisi de surseoir à sa participation. Deuxièmement, cette prise en compte aurait pour conséquence d'accorder aux employés qui ne participaient pas au régime un avantage injuste par rapport aux employés qui participaient au régime en 1974 et qui avaient dû prendre une décision à cette époque et non pas 20 ans plus tard.

(iii) La résolution prise par le conseil d'administration le 5 décembre 1995.

[21] La question a d'abord été examinée par le comité des ressources humaines de la BRC qui a recommandé que certaines modifications rétroactives soient apportées au régime de retraite. Le 5 décembre 1995, le conseil d'administration de la BRC a adopté une résolution autorisant le comité de gestion du régime de retraite [traduction] à modifier le régime de retraite de la Banque Royale en vue de permettre aux femmes concernées de racheter des prestations au titre de l'une ou l'autre des années de service travaillées. Dans sa résolution, le comité a reconnu que les règles d'admissibilité au régime en vigueur avant 1974 avaient empêché les femmes de participer au régime au même âge que les hommes, une pratique qui est maintenant considérée comme étant discriminatoire.

[22] La résolution susmentionnée a été mise en application grâce à ce qu'on a appelé le rachat d'années de service basé sur le sexe de 1996. Le RASBS était une offre unique qui a été faite aux employés de sexe féminin qui avaient commencé à participer au régime au plus tard le 1er mars 1980, et qui, avant le 1er mai 1974, avaient travaillé à temps plein sans interruption entre l'âge de 21 et 24 ans. Les personnes admissibles pouvaient racheter jusqu'à trois années additionnelles de service ouvrant droit à pension et ces années étaient comprises dans la période de temps située entre la date la plus éloignée entre la date du 21e anniversaire de la personne admissible et la date à laquelle celle-ci avait commencé à travailler à la banque, et la date la plus rapprochée entre la date du 24e anniversaire de la personne admissible et le 1er mai 1974.

[23] Après que le RASBS fut entré en vigueur, Mercer, l'actuaire du régime, a calculé que l'augmentation nette de l'engagement actuariel de la BRC quant au RASBS était d'environ 13 millions de dollars, et ce, après contributions des employés, lesquelles contributions se situaient entre 3 et 4 millions de dollars.

F. La modification apportée au régime du RASBS le 5 septembre 2003

[24] Les avantages additionnels accordés en vertu du RASBS nécessitaient une modification du régime de retraite. Fait intéressant, ce n'est que le 5 septembre 2003 qu'une modification fut apportée, avec date d'entrée en vigueur le 1er janvier 1996, plus de sept ans après l'adoption de la résolution du conseil de 1995. La modification a été adoptée par une résolution du comité de gestion du régime de retraite, lequel avait été autorisé par le conseil à apporter des modifications au régime.

[25] La raison de ce retard (tel qu'expliqué par Gary Dobbie, premier vice-président BRC, Rémunération et avantages sociaux, dans la lettre du 25 mars 2003 qu'il a envoyée au Bureau du surintendant des institutions financières) était que, après 1996, les participants au régime de retraite ainsi que les anciens participants au régime de retraite s'étaient adressés à plusieurs reprises à la BRC afin de lui demander de leur accorder des avantages supplémentaires fondés sur le RASBS. Afin de s'assurer que le RASBS soit offert de façon équitable et uniforme, la BRC a reporté la modification du régime jusqu'à ce que l'affaire soit pleinement examinée et réglée.

[26] Afin de comprendre comment la modification de 2003 fonctionne, celle-ci doit être située dans le contexte de la Section C (Canada) du régime de retraite de la Banque Royale, tel que modifié et reformulé le 1er janvier 2002. Il s'agit de la plus récente modification apportée au libellé du régime remis par les parties au Tribunal.

[27] Le paragraphe 2.01(6) définit [traduction] Date d'admission comme étant la date à laquelle une personne est admise à participer au régime. Le mot [traduction] Participant est défini au paragraphe 2.01(38) comme étant un employé qui a été admis à participer au régime en vertu des règles d'admissibilité prévues à l'article 3 du régime et qui a toujours droit aux avantages prévus dans le régime. L'expression [traduction] Acquisition des droits aux prestations qui figure au paragraphe 2.01(71) signifie acquisition du droit à une pension différée après l'accumulation d'un nombre précis d'années de service.

[28] L'article 4 est intitulé [traduction] Service et ce mot est défini à l'article 4.05 comme étant l'emploi continu d'un employé à la BRC. L'expression [traduction] Années de service ouvrant droit à pension qui figure au paragraphe 4.04(1) est la période de service qui commence à la date d'admission du participant et qui se termine à la date la plus rapprochée entre la date de la retraite, la date de cessation d'emploi, la date de décès en cours d'emploi ou la date à laquelle le participant compte 35 années de service.

[29] L'article 4.06 intitulé [traduction] Inclusion d'années de service antérieures prévoit que, lorsque, avant 1987, l'emploi d'un participant prend fin avant que celui-ci n'ait acquis le droit aux prestations et que celui-ci a été réembauché par la BRC après 1986, les années de service antérieures sont incluses dans les années de service ouvrant droit à pension du participant.

[30] L'article 4.07 est intitulé [traduction] Inclusion d'années de service antérieures au choix du participant. Le paragraphe 4.07(1) mentionne que le participant qui compte des années de service ouvrant droit à pension, à titre de contributeur, avant 1987, dont l'emploi a pris fin avant qu'il n'ait acquis les droits d'acquisition aux prestations au titre de ces années de service et qui a été réembauché avant le 1er janvier 1987, peut demander à l'administrateur du régime d'inscrire la période d'emploi antérieure comme années de service ouvrant droit à pension.

[31] Le paragraphe 4.07(2) intitulé [traduction] Choix fait par les participants de sexe féminin quant à la période d'emploi antérieure au 1er mai 1974 reproduit la modification du RASBS de 2003. Ce paragraphe énumère les règles d'admissibilité au RASBS et prévoit que les participants admissibles peuvent demander à l'administrateur du régime d'inscrire leur période d'emploi antérieure au 1er mai 1974, comprise entre l'âge de 21 et 24 ans, dans les années de service ouvrant droit à pension.

[32] Le paragraphe 4.07(2) énumère également les modalités de paiement quant au RASBS et prévoit de plus que la période d'années de service ouvrant droit à pension du RASBS n'a aucune incidence sur la date d'admission du participant et que le participant n'est pas présumé avoir été participant au cours cette période.

[33] Il est très important de souligner que les libellés de l'article 4.06, du paragraphe 4.07(1) et du paragraphe 4.07(2), indiquent qu'il s'agit d'exceptions à la définition d'années de service ouvrant droit à pension qui figure à l'article 4.04.

G. Mme Sugimoto et le RASBS

(i) Correspondance et consultation initiales

[34] L'offre du RASBS a été transmise aux participants au régime admissibles grâce à un document interne de la BRC intitulé [traduction] Entre nous. Ce document est daté du 24 janvier 1996 et son gros titre est ainsi libellé : [traduction] La Banque Royale s'apprête à corriger l'écart qui existe dans le régime de retraite entre le traitement réservé aux hommes et le traitement réservé aux femmes.

[35] Ce document mentionne que l'un des objets déclarés, à la suite d'une série de conférences tenues par la BRC un an auparavant, était de faire de la BRC un chef de file en matière d'égalité des sexes. Afin d'y arriver, la BRC apporterait, dans la mesure du possible, des modifications à ses politiques antérieures qui ne concordaient pas avec ses politiques actuelles en matière de sexe. L'une des iniquités antérieures qui a été relevées était l'inégalité qui existait entre les hommes et les femmes quant aux règles d'admissibilité au régime de retraite antérieures à 1974.

[36] Afin de corriger cette iniquité, les femmes qui avaient travaillé sans interruption pour la BRC avant mai 1974, et qui avaient entre 21 et 24 ans à l'époque, se verraient offrir une occasion unique de racheter jusqu'à trois années de participation au régime à titre de contributeur.

[37] Les employés intéressés qui désiraient obtenir des renseignements additionnels ont reçu un document intitulé [traduction] Pratiques discriminatoires antérieures fondées sur le sexe de la Banque Royale. Ce document faisait état que les employés admissibles pouvaient racheter des prestations de retraite sous le régime contributif et fixait les modalités, les coûts, etc., de cette offre.

[38] Le 17 mai 1996, le centre de services en ressources humaines a distribué aux employés un autre document qui faisait suite à la lettre d'information Entre nous. Ce document portait sur la politique spéciale, susmentionnée, permettant aux employés de sexe féminin admissibles, qui travaillaient à temps plein pour la BRC avant le 1er mai 1974 et qui avaient entre 21 et 24 ans, de racheter des années de participation au régime de retraite.

[39] Mme Sugimoto était intéressée par cette offre et elle a soumis un formulaire de demande de renseignements mentionnant qu'elle désirait racheter trois années de participation au régime de retraite et qu'elle était admissible à se prévaloir de cette offre. Elle a reçu une [traduction] Demande de rachat d'années de participation au régime de retraite - Employés de sexe féminin - Choix de 1996 et elle l'a remplie.

[40] La Demande faisait état des renseignements suivants : la date de naissance de Mme Sugimoto; le 4 octobre 1951, sa date d'entrée en fonction ininterrompue; le 23 février 70, la date à laquelle elle a commencé à participer au régime; le 1er mars 80, les années de service qu'elle désirait racheter; 1,5833 (19 mois) la date à laquelle elle était présumée avoir commencé à participer au régime de retraite; le 1er août 78. Figurait également dans la Demande, une déclaration selon laquelle le rachat de prestations de retraite ne prévoyait des années de service additionnelles qu'aux fins du calcul des prestations et qu'aux fins de l'actualisation de la retraite anticipée. Mme Sugimoto devait verser un montant de 4 835 $ au titre du rachat des années de participation, ce qu'elle a fait.

[41] Selon ce que Mme Sugimoto avait compris, du moins en ce qui avait trait au RASBS, la BRC avait tenté d'éliminer l'écart entre les sexes. Mais, selon elle, il existait toujours une inégalité de traitement entre les employés de sexe masculin et les employés de sexe féminin du même âge qui possédait la même expérience de travail.

[42] Donc, le 12 juillet 1996, Mme Sugimoto a écrit à la coordinatrice RSVP. Elle a souligné que les participants de sexe masculin qui possédaient la même expérience de travail qu'elle, qui avaient le même âge qu'elle et qui avaient choisi de continuer à participer au régime à titre contributif plutôt que de surseoir à leur participation, pourraient prendre leur retraite 72 mois plus tôt qu'elle. Mme Sugimoto a demandé si la BRC faisait des efforts pour éliminer l'écart qui existait toujours quant à la période de temps comprise entre 1974 et 1980.

[43] Susan Ormiston, la coordinatrice RSVP a répondu par lettre datée le 17 septembre 1996. Elle a écrit que, en introduisant le RASBS, la BRC reconnaissait que cette mesure ne pouvait pas régler et ne réglait pas toutes les iniquités antérieures figurant dans le régime. Elle a mentionné d'autres motifs qui reprenaient ceux qui avaient déjà été mentionnés dans le rapport Mercer du 8 février 1995.

[44] La BRC avait songé à offrir un rachat quant à la période comprise entre 1974 et 1980, mais elle avait rejeté cette idée parce que cela aurait été injuste pour les employés qui avaient choisi de surseoir en 1974. Si ces employés avaient alors su qu'il y aurait une modification quant à la retraite anticipée, ils auraient pris une décision différente.

[45] De plus, si la BRC permettait aux employés qui s'étaient prévalus du RASBS de racheter les années de service comprises dans la période susmentionnée, elle pourrait faire l'objet de demandes similaires de la part des nouveaux employés dont l'âge de participation au régime était de 30 ans.

[46] Mme Sugimoto a également reçu une lettre datée du 23 décembre 1996 de la part de Brad Lambert, vice-président, Opérations bancaires, Colombie-Britannique et Yukon. Dans cette lettre, que celui-ci a écrite en réponse aux demandes de rachat d'années de participation à la retraite quant à la période comprise entre 1974 et 1980, M. Lambert a souligné que, avec le recul, il était possible de présumer qu'un certain nombre d'employés auraient continué de participer au régime en 1974. La présomption était cependant que les personnes qui désiraient racheter la période comprise entre 1974 et 1980, auraient choisi de surseoir en 1974 s'ils avaient été participants au régime. Cette présomption était fondée sur le fait que la majorité des personnes qui n'avaient à l'époque que quelques années de service à leur actif avaient justement sursis à leur participation. M. Lambert a réitéré que le RASBS avait contribué à éliminer, dans une grande mesure, l'iniquité qui existait antérieurement entre le traitement des hommes et le traitement des femmes, mais n'avait pas réglé tous les problèmes.

[47] Mme Sugimoto a également fait part à une personne qui travaillait au service des prestations de retraite du fait qu'elle désirait se prévaloir du rachat. Elle affirme qu'on lui a dit que, lorsqu'elle avait élaboré le RASBS, la BRC avait conclu que, parce que la majorité des employés appartenant à son groupe d'âge avaient choisi de surseoir à leur participation au régime en mai 1974, les participants au RASBS auraient probablement choisi eux aussi de surseoir à leur participation. Selon Mme Sugimoto, la BRC a présumé que, elle et les autres, avaient sursis à leur participation au régime à compter du 1er mai 1974.

[48] À ce stade, il ne restait qu'une chose que Mme Sugimoto ne comprenait pas. C'était la question de la date présumée du début de participation au régime qu'elle avait vue pour la première fois dans sa demande de RASBS.

[49] Mme Sugimoto affirme qu'elle a appelé la ligne d'aide Connections que la BRC avait installée afin de pouvoir donner des renseignements aux employés quant au RASBS. Mme Sugimoto a parlé à Carol Ann Clark et lui a demandé pourquoi on lui attribuait le 1er août 1978 comme date présumée de début de participation au régime et non pas la période comprise entre le 1er octobre 1972 et le 1er mai 1974.

[50] Selon Mme Sugimoto, Mme Clark lui a dit qu'on avait fait cela à des fins administratives dans le but de démontrer qu'elle avait participé de façon continue au régime de retraite et que, en fait, elle avait racheté des années de participation au régime à titre contributif quant à la période susmentionnée.

[51] Mme Sugimoto a également parlé à Evelyn Murphy, à la ligne d'aide Connections, qui lui a dit que les expressions participation au régime de retraite/prestations de régime de retraite/années de service ouvrant droit à pension étaient interchangeables. Dans leurs témoignages devant le Tribunal, Marianne Wilson et Gary Dobbie ont souscris à cette affirmation.

[52] Mme Sugimoto a affirmé que Mme Murphy, lors de cette même conversation, lui a dit que, en se prévalant du RASBS, elle avait racheté une participation au régime quant à la période comprise entre le 1er octobre 1972 et le 1er mai 1974.

[53] Mme Sugimoto était convaincue que, après s'être prévalue du RASBS, elle était sur un pied d'égalité, en ce qui avait trait aux prestations de retraite, avec ses collègues de sexe masculin qui avaientt choisi en 1974 de surseoir à leur participation au régime. Elles et eux étaient admissibles à une pension non réduite à l'âge de 61 ans et 10 mois. Il n'y avait plus de problème lié au sexe et elle n'a pas poussé l'affaire plus loin en 1996.

(ii) Les états récapitulatifs des avantages personnels de Mme Sugimoto

[54] L'état récapitulatif d'avantages personnels est un rapport annuel, distribué par la BRC à ses employés, dans lequel figurent les détails de l'ensemble des avantages liés à leur emploi . En ce qui concerne les détails relatifs à sa retraite, l'état récapitulatif de Mme Sugimoto pour 1994 faisait état de sa date de naissance comme étant le 4 octobre 1951, de sa date de début de participation au régime comme étant le 1er mars 1980, de ses années de service ouvrant droit à pension sous le régime contributif comme étant comprises entre le 1er mars 1980 et le 4 mars 1985. La date de début de sa retraite anticipée, après 35 années portées à son crédit comme participante au régime, était le 28 février 2015.

[55] L'état récapitulatif de Mme Sugimoto pour 1997, lequel était postérieur au RASBS, faisait état des mêmes renseignements avec l'ajout des années de service ouvrant droit à pension sous le régime contributif, soit la période comprise entre le 1er août 1978 et le 28 février 1980 et la période comprise entre le 1er mars 1980 et le 4 mars 1985. La date présumée de début de participation au plan, c'est-à-dire le 1er août 1978, avait également été ajoutée. La date de retraite anticipée avec 35 années portées au crédit de Mme Sugimoto comme participante au régime était maintenant le 31 juillet 2013, ce qui était dû au rachat de 19 mois de service qu'elle avait fait en vertu du RASBS. Tous les états récapitulatifs des avantages personnels subséquents de Mme Sugimoto, jusqu'à 2001 inclusivement, comprenaient ces mêmes renseignements.

(iii) Le système de pension PD BenPlus

[56] Mme Sugimoto a également soumis un imprimé d'ordinateur tiré du système de pension PD BenPlus. Ce système est un outil de modélisation de retraite généré par ordinateur que la BRC met, en ligne, à la disposition des participants au régime. Il a été introduit en octobre 2001 afin de permettre aux employés de faire des calculs quant à leur retraite et d'élaborer des scénarios de planification de retraite disponibles sur le réseau Intranet de la BRC. L'employé entre un certain nombre de données hypothétiques comme l'augmentation de salaire prévue et la prime ouvrant droit à pension, l'âge de la retraite, etc. D'autres données figurant sur l'imprimé provenaient des dossiers de retraite de la BRC.

[57] L'imprimé est daté du 17 septembre 2001 et il comprend cinq pages. Sur la page no 2, il y a une case intitulée [traduction] Détails sur les années de service ouvrant droit à pension. Cette case indique que Mme Sugimoto fait partie du régime de retraite à prestations déterminées et que sa période d'années de service va du 1er mars 1980 jusqu'à aujourd'hui. Sa période d'années de service ouvrant droit à pension sous le régime contributif est indiquée comme allant du 1er mars 1980 au 4 mars 1985 et sa période antérieure d'années ouvrant droit à pension sous le régime contributif est indiquée comme allant du 1er octobre 1972 au 1er mai 1974.

[58] Une clause d'exonération figure sur la page no 4 de l'imprimé. Elle mentionne qu'il est possible que les renseignements figurant sur l'imprimé ne soient pas justes, complets ou actuels. Elle mentionne également que les renseignements ne sont fournis qu'à des fins d'estimations et que celles-ci sont fondées sur des hypothèses entrées par l'employé, lesquelles hypothèses pourraient changer dans l'avenir. La clause d'exonération prévoit ensuite que les véritables prestations de retraite seront fondées sur les dispositions du régime et s'il y a incompatibilité entre l'imprimé et le régime, c'est le régime qui l'emportera.

H. La réouverture de 2001

[59] La réouverture de 2001 est une offre qui a été faite par la BRC à ses employés en service et aux employés retraités, hommes et femmes, qui avaient sursis à leur participation au régime entre le 1er mai 1974 et leur trentième anniversaire de naissance. En vertu de cette offre, les employés avaient la possibilité de faire traiter leur période de sursis, dans le calcul de leurs prestations de retraite, comme une période de participation non contributive.

[60] La campagne de réouverture de 2001 a été initiée par un certain nombre de personnes qui remettaient en cause la décision qu'elles avaient prise le 1er mai 1974 en sursoyant à leur participation. Après trois années de négociation avec la BRC, elles ont menacé de déposer un recours collectif si la BRC ne prenait aucune mesure corrective.

[61] La BRC a retenu les services d'un certain nombre de cabinets d'avocat afin que ceux-ci examinent le libellé de la modification du régime du 1er mai 1974. Ceux-ci ont affirmé que la modification pouvait être interprétée comme offrant trois choix aux participants qui n'avaient pas 30 ans. Le premier choix était de continuer à participer au régime à titre de contributeur, le deuxième choix était de surseoir à sa participation jusqu'à l'âge de 30 ans, le troisième choix était de continuer à participer au régime mais à titre de non-contributeur. Aucune interprétation juridique n'exigeait que la BRC offre la réouverture de 2001 aux autres participants au régime.

[62] Après avoir examiné cet avis juridique, la BRC a exigé que William Mercer évalue les coûts comportés par le troisième choix. Dans son évaluation des coûts, Mercer a tenu compte des deux groupes suivants :

Le groupe A - Les participants au régime qui avaient choisi de surseoir à leur participation le 1er mai 1974. Mercer a évalué le coût de l'offre qui consistait à leur accorder des années additionnelles de service ouvrant droit à pension du 1er mai 1974 jusqu'à la date la plus rapprochée entre le 1er mars 1980 et l'âge de 30 ans;

Le groupe B - Les employés de sexe masculin qui avaient moins de 21 ans et les employés de sexe féminin qui avaient moins de 24 ans au 1er mai 1974 et qui n'étaient pas admissibles à participer au régime. Mercer a évalué le coût de l'offre qui consistait à leur offrir des années additionnelles de service ouvrant droit à pension à compter de la date la plus éloignée entre le 1er mai 1974 et la date à laquelle l'employé avait atteint l'âge de 21 ans jusqu'au 1er mars 1980.

[63] Mercer a souligné que, au 1er janvier 2001, le groupe A comptait 304 femmes et 290 hommes et que le groupe B comptait 885 femmes et 53 hommes. L'augmentation des coûts actuariels pour la BRC quant au groupe A a été évaluée à 23 178 000 $. Pour le groupe B, l'augmentation a été évaluée à 28 346 000 $.

[64] Après avoir reçu le rapport Mercer, la BRC a songé à offrir la réouverture de 2001 aux participants du groupe B. Elle a décidé de ne pas le faire parce qu'elle aurait dû modifier le régime, ce qui eut été onéreux. De plus, la BRC a estimé qu'il ne convenait pas de faire cette offre au groupe B et de ne pas la faire aux autres catégories d'employés qui ne participaient pas au régime le 1er mai 1974.

[65] Dans sa lettre du 26 septembre 2001, la BRC a offert aux employés du groupe A ainsi qu'aux employés retraités qui avaient sursis à leur participation au régime le 1er mai 1974, la possibilité de participer à titre de non contributeur quant à leur période de sursis. On rapporte que 260 femmes et 250 hommes se sont prévalus de la réouverture de 2001. Cette offre n'a pas été faite à Mme Sugimoto. La BRC n'a pas tenu compte que celle-ci était une participante au régime qui avait sursis à sa participation au régime le 1er mai 1974.

[66] La BRC a qualifié la réouverture de 2001 comme étant une nouvelle interprétation de la modification du régime de mai 1974. À ce titre, il n'était pas nécessaire de modifier le régime afin de mettre en uvre la réouverture de 2001. La BRC ne faisait qu'administrer le régime en conformité avec le libellé du régime. Elle le faisait par le biais du processus administratif.

[67] Il y avait toutefois une modification au régime qui avait trait à la réouverture de 2001. L'article 1.02 [traduction] Historique du régime fut modifié afin de fournir une explication quant à la réouverture de 2001, laquelle est appelée, dans cette disposition, la [traduction] Correction de 2001.

I. Mme Sugimoto et la plainte qu'elle a déposée au BSIF

[68] Lorsque Mme Sugimoto a entendu parler de la réouverture de 2001, elle a demandé à la BRC la raison pour laquelle cette offre ne lui avait pas été faite. On lui a répondu qu'elle n'y avait pas droit parce qu'elle ne participait pas au régime le 1er mai 1974.

[69] Elle a été outrée et, selon elle, il s'agissait là d'un cas de discrimination fondée sur l'âge et le sexe. Elle croyait qu'avec le RASBS, elle était, à tout le moins, traitée sur le même pied d'égalité que ses collègues de sexe masculin qui avaient sursis à leur participation au régime en 1974. Maintenant, avec la réouverture de 2001, ses collègues de sexe masculin pouvaient prendre leur retraite avec pension non réduite à l'âge de 56 ans mais, elle, devait attendre jusqu'à l'âge de 61 ans et 10 mois pour pouvoir recevoir les mêmes prestations de retraite.

[70] Mme Sugimoto a été tenace dans ses efforts visant à remédier à ce qui, selon elle, était une autre inégalité de traitement entre les sexes. Elle a écrit de nombreuses lettres et de nombreux courriels à des cadres supérieurs de la BRC. Elle a eu de nombreuses conversations avec des représentants de la BRC, mais cela n'a rien changé.

[71] Mme Sugimoto a écrit pour la première fois au Bureau du surintendant des institutions financières (BSIF) le 4 septembre 2002, trois mois avant de déposer sa plainte à la CCDP. Le BSIF est notamment chargé de superviser les régimes de retraite administrés par le gouvernement fédéral en vertu de la Loi de 1985 sur les normes de prestation de pension (LNPP).

[72] Dans sa lettre, Mme Sugimoto a relaté de façon très détaillée l'ensemble des événements qui se sont déroulés entre 1974 et la réouverture de 2001. Elle a demandé l'aide et les conseils du BSIF concernant les effets du RASBS et plus particulièrement concernant la réouverture de 2001 qui, selon elle, équivalait à de la discrimination fondée sur l'âge et le sexe.

[73] Les prétentions de Mme Sugimoto reflétaient les observations qu'elle avait soumises à la CCDP et le témoignage qu'elle avait présenté lors de l'audience devant le Tribunal. De plus, l'avocat de Mme Sugimoto a soumis un certain nombre d'observations écrites au BSIF et a rencontré des représentants du BSIF. Mme Sugimoto et son avocat ont soulevé les points suivants dans leurs observations : premièrement, ils ont parlé de l'affirmation qui leur avait été faite par le BISF et selon laquelle la question de l'inégalité de traitement entre les sexes était une question de droits de la personne et ne relèvait donc pas de la compétence du BSIF.

[74] Deuxièmement, la BRC a communiqué de façon inadéquate les renseignements car ce n'étaient pas tous les employés de sexe féminin admissibles qui avaient été correctement informés quant au RASBS et certains employés ont reçu des renseignements erronés. De plus, les mots années de service ouvrant droit à pension et participation ont été utilisés indifféremment dans les communications émises par la BRC et cela a soulevé la question de savoir si les participants avaient racheté des années de participation ou des années de service ouvrant droit à pension. Enfin, il y a eu la question du dépôt tardif par la BRC, auprès du BSIF, de la modification du RASBS.

[75] L'examen par le BSIF des questions soulevées par Mme Sugimoto a duré plus de deux ans. Il a tiré ses conclusions, puis il en a fait part dans la lettre du 14 décembre 2004 qu'il a envoyée à Grosman, Grosman & Gale, les avocats de Mme Sugimoto. Il en a également fait part dans la lettre du 20 décembre 2004 qu'il a envoyée à Mme Sugimoto, puis dans la lettre du 21 janvier 2004 qu'il a envoyée à la BRC.

[76] Quant à la question de la communication inadéquate, le BSIF a conclu que la BRC s'était conformée à la LNPP en ce qui avait trait à la communication aux participants concernés de l'offre de RASBS et de la modification du régime.

[77] Le BSIF a critiqué la BRC quant au retard qu'il y a eu entre la résolution du conseil de 1995 et le dépôt de la modification du RASBS de 2003 et il a proposé que la BRC revoit ses procédures afin de voir à ce que la LNPP soit respectée.

[78] Le BSIF a également critiqué la BRC quant à la confusion qu'a causée dans ses communications avec les participants l'utilisation des expressions rachat de trois années de participation au régime et rachat de prestations de retraite ou d'années de service ouvrant droit à pension. Le BSIF a souligné que si la modification apportée au régime de retraite avait suivi de près la résolution de 1995, cette confusion aurait pu être évitée.

[79] Sur la question du RASBS, des années de service ouvrant droit à pension et de la participation au régime, la BSIF a écrit qu'il avait examiné les communications écrites qui avaient été remises aux participants, notamment la lettre d'information Entre Nous, la demande de RASBS, le mémoire du 17 mai 1996 adressé aux participants admissibles et les documents soumis par Mme Sugimoto, notamment ses rapports annuels d'avantages personnels. Le BSIF a conclu ce qui suit :

[traduction]

Nous avons remarqué que les communications adressées aux participants renvoyaient au rachat d'avantages antérieurs comme étant le rachat de trois années de participation au régime de retraite à titre contributif, le rachat de prestations de retraite du régime contributif ainsi que le rachat d'années de service ouvrant droit à pension.

Il nous est impossible de faire quelque commentaire que ce soit quant aux conseils oraux reçus par les participants au régime de retraite de la part de membres du personnel de la Banque. Toutefois, il nous est impossible de conclure que, à partir des documents soumis, il a été promis aux participants que leur rachat de prestations de retraite aurait une incidence sur leur date de début de participation au régime ou qu'ils seraient présumés avoir été participants durant la période de rachat.

Cela est compatible avec le libellé de la résolution de 1995 et la modification applicable déposée auprès du BSIF en octobre 2003.

[80] Mme Sugimoto n'a pas vraiment accepté la conclusion du BSIF. Le 20 juin 2005, elle a écrit au BSIF et a affirmé qu'il lui semblait que ses conclusions étaient fondées sur des renseignements, des éléments de preuve et des documents incomplets et qu'il y avait un certain nombre de questions qu'il avait omis d'examiner. Dans sa lettre de 16 pages, Mme Sugimoto énumère les autres éléments que le BSIF devraient examiner. Elle a également écrit au BSIF le 9 décembre 2005 et a prétendu que celui-ci avait contrevenu à la LNPP, puis elle a donné des détails. Ce qui précède n'a pas rapport avec la plainte en matière de droits de la personne qu'elle a déposée.

[81] Le 22 juin 2006, le BSIF a répondu qu'il était en train d'examiner les questions soulevées par Mme Sugimoto. Il n'a toujours pas répondu.

II. L'ANALYSE

A. Le critère de la preuve prima facie et les questions à trancher

[82] Dans une cause en matière de droits de la personne devant le Tribunal, le plaignant doit d'abord établir une preuve prima facie de discrimination. La preuve prima facie est celle qui porte sur les allégations qui ont été faites et qui, si on leur ajoute foi, c'est-à-dire si elles sont crédibles, est complète et suffisante pour justifier un verdict en faveur de la partie plaignante, en l'absence de réplique de la partie intimée. La réponse de l'intimé ne devrait pas comprendre la question de savoir si le plaignant a établi une preuve prima facie de discrimination (Voir Ontario (Commission ontarienne des droits de la personne et O'Malley c. Simpson Sears Ltd., [1985] 2 R.C.S. 536; Lincoln c. Bay Ferries Ltd., 2004 CAF 2004; Dhanjal c. Air Canada, (1997) 139 F.T.R. 37, paragraphe 6)

[83] Mme Sugimoto soulève trois arguments quant à l'établissement d'une preuve prima facie de discrimination :

  1. par le biais du RASBS, elle a racheté des années de participation au régime antérieures à 1974 et elle a été traitée de façon défavorable par rapport à ses collègues de sexe masculin parce qu'elle s'est vu refuser l'occasion de participer à la réouverture de 2001.
  2. par ailleurs, si elle ne rachetait pas des années de participation au régime antérieures à 1974, le RASBS devenait alors sélectif. Il visait, sans réussir, à lui donner le même statut que celui de ses collègues de sexe masculin. Elle prétend qu'il s'agit là également d'un cas de discrimination défavorable.
  3. la réouverture de 2001était neutre en apparence et était censée s'appliquer à tous les participants qui avaient sursis au régime en 1974. Toutefois, les femmes qui s'étaient prévalues du RASBS et qui s'étaient fait dire qu'on rendait leur traitement égal à celui de leurs collègues de sexe masculin, se sont vu refuser la possibilité de se prévaloir de la réouverture de 2001. Les effets de cette règle apparemment neutre ont été préjudiciables aux femmes qui s'étaient prévalues du RASBS.

B. Mme Sugimoto a-t-elle établi une preuve prima facie de participation au régime de retraite avant mai 1974?

[84] Un certain nombre de faits appuient la preuve prima facie de participation au régime de retraite avant 1974 et de l'existence d'un traitement défavorable. Il y a eu l'annonce faite dans la lettre d'information Entre Nous selon laquelle la BRC [traduction] s'apprêtait à corriger l'iniquité qui existait entre le traitement des hommes et le traitement des femmes quant au régime de retraite. Afin de corriger les iniquités passées figurant dans le régime de retraite, les personnes admissibles se sont vu offrir la possibilité de racheter jusqu'à trois années de participation au régime de retraite contributif.

[85] D'autres documents remis aux employés, comme le bulletin des Ressources humaines du 17 mai 1996, qualifiaient le RASBS de rachat d'années de service ouvrant droit à pension. Dans le formulaire de demande de renseignements, le RASBS a été décrit comme étant le rachat de [traduction] prestations du régime de retraite contributif.

[86] Mme Sugimoto s'est fait dire par Evelyn Murphy lorsqu'elle a appelé la ligne Connections que les expressions participation au régime de retraite/prestations de régime de retraite/années de service ouvrant droit à pension étaient utilisées indifféremment. Cette affirmation fut confirmée par d'autres représentants de la BRC (Gary Dobbie et Marianne Wilson).

[87] Quant à la date présumée du début de participation au régime, Mme Sugimoto s'est fait dire par Carol Ann Clark de la ligne Connections qu'il s'agit d'une expression utilisée par la BRC à des fins administratives afin de démontrer une participation continue au régime de retraite. Cette expression ne se retrouve cependant nulle part dans le libellé du régime de retraite.

[88] Selon Mme Sugimoto, Mme Clark et Mme Murphy lui ont dit qu'elle avait racheté des années de participation au régime de retraite à titre contributif quant à la période comprise entre le 1er octobre 1972 et le 1er mai 1974.

[89] Il y a la lettre du 23 décembre 1996 à Brad Lambert dans laquelle celui-ci parlait du postulat que les employés qui auraient été dans la situation de Mme Sugimoto auraient sursis à leur participation au régime de retraite en 1974. De plus, Mme Sugimoto s'est fait dire par le service des prestations de retraite que la BRC, en élaborant le RASBS, avait conclu que les participants au RASBS auraient vraisemblablement sursis à leur participation et que la BRC avait présumé que Mme Sugimoto et les autres avaient sursis à leur participation en 1974. Si c'est le cas, alors, logiquement, la BRC a dû juger que Mme Sugimoto participait au régime de retraite en 1974.

[90] Enfin, il y a l'imprimé BenPlus qui indique que la période antérieure d'années de service ouvrant droit à pension du régime contributif est la période comprise entre le 1er octobre 1972 et le 1er mai 1974. Ces renseignements proviennent des dossiers de retraite de la BRC et n'ont pas été entrés par elle dans le système.

[91] Il ne fait aucun doute que, immédiatement après qu'elle se fut prévalue du RASBS, Mme Sugimoto était sur un pied d'égalité avec ses collègues de sexe masculin en ce sens qu'elle pouvait prendre sa retraite au même âge qu'eux et recevoir la même pension qu'eux.

[92] Si on accepte que la lettre d'information Entre Nous a informé les employés que la BRC s'apprêtait à corriger la différence de traitement entre les sexes, que Mme Sugimoto s'est fait dire que, en participant au RASBS, elle avait racheté des années de participation au régime contributif pour la période pertinente, que cette dernière expression est interchangeable avec années de service ouvrant droit à pension/prestations de retraite; que la date présumée du début de participation au régime n'est pas une expression utilisée dans le régime de retraite, que la BRC a présumé que les femmes qui avaient participé au RASBS avaient sursis à leur participation au régime de retraite en 1974, laissant entendre par là qu'elles étaient participantes, que l'imprimé BenPlus indiquait que sa période antérieure d'années de service ouvrant droit à pension sous le régime contributif PD était comprise entre le 10 octobre 1972 et le 1er mai 1974, il est raisonnable de conclure que Mme Sugimoto a établi prima facie qu'elle avait acquis le même statut que ses collègues de sexe masculin, c'est-à-dire qu'elle était une personne qui participait au régime de retraite avant 1974 et qui a été présumée avoir sursis à sa participation en 1974.

[93] Il existe également une preuve prima facie que Mme Sugimoto n'était pas admissible à se prévaloir de la réouverture de 2001, que ses collègues de sexe masculin étaient admissibles, que la réouverture de 2001 établissait une distinction entre elle et ses collègues de sexe masculin et que cette distinction lui avait causé un préjudice dans le cours de son emploi.

[94] Par conséquent, j'ai conclu que Mme Sugimoto a établi une preuve prima facie de distinction illicite en rapport avec la réouverture de 2001 à la suite de la distinction faite entre la participation au régime avant 1974 de ses collègues de sexe masculin et sa propre participation avant 1974.

C. L'intimée a-t-elle répondu à la preuve prima facie de discrimination?

[95] De nombreux aspects de la preuve prima facie n'ont pas été réfutés. L'inadmissibilité de Mme Sugimoto à la réouverture de 2001 et l'admissibilité de ses collègues de sexe masculin, le fait que l'initiative du RASBS s'adressait spécifiquement aux femmes, le fait que le RASBS égalisait de façon immédiate les possibilités quant à la retraite. La seule question contestée est celle qui consiste à savoir si, en vertu du RASBS, Mme Sugimoto obtenait le statut de participant au régime de retraite avant 1974.

[96] La BRC souligne que rien dans la demande de Mme Sugimoto ne fait allusion à une quelconque participation au régime avant le 1er mai 1974, ni qu'elle aurait signé une carte d'adhésion qui lui accordait censément une participation rétroactive au régime quant à la période antérieure à 1974. De plus, la demande de Mme Sugimoto établit clairement que le rachat de prestations de retraite n'accordent des années de service additionnelles qu'aux fins du calcul des prestations et qu'aux fins de l'actualisation de la retraite anticipée.

[97] Les états récapitulatifs des avantages personnels de Mme Sugimoto, de 1997 à 2001, indiquaient tous que sa date de début de participation au régime était le 1er mars 1980. Rien dans ces états récapitulatifs n'indiquait que Mme Sugimoto avait participé au régime entre le 1er octobre 1972 et le 1er mai 1974.

[98] Bernard Morency, actuaire chez William Mercer, était l'actuaire du régime et il a participé activement à l'élaboration du RASBS ainsi qu'à la réouverture de 2001. Il a affirmé que toute prestation de retraite qui peut revenir aux participants au régime doit être mentionnée dans le libellé du régime. Bien que la modification du RASBS n'ait été ajoutée au libellé qu'en 2003, les participants au régime et le fiduciaire du régime pouvaient se tourner vers la résolution du conseil de 1995 pour définir les droits des participants en vertu du RASBS.

[99] Selon M. Morency, le RASBS donnait aux employés admissibles la possibilité de faire une contribution afin de se faire créditer les années de service admissibles considérées comme ouvrant droit à pension. Le RASBS, lorsque l'on y souscrivait, comptait pour des années de contribution quant au montant de pension annuelle et comptait également quant aux 35 années de service exigées pour la retraite anticipée. Pour M. Morency, le RASBS n'avait aucune incidence sur la date de début de participation au régime. Il modifiait les années de service ouvrant droit à pension ou ajoutait des années de service ouvrant droit à pension.

[100] Marianne Wilson était la gestionnaire, Administration du régime de retraite, au centre des Ressources humaines, de 1987 à 1998. Elle s'occupait de la gestion quotidienne du régime et voyait à ce que tous les calculs de prestations des employés soient dûment faits. Elle répondait aux questions des employés, elle tenait à jour les feuilles de paye aux fins de pension et elle s'occupait de l'administration des feuilles de paye des retraités. Elle s'est beaucoup occupé de la mise en uvre du RASBS, notamment de l'élaboration des documents exigés pour le RASBS.

[101] Selon Mme Wilson, la date du début de participation au régime des employés n'a jamais changé. L'expression date présumée du début de participation au régime était la méthode que la BRC utilisait pour inscrire les employés qui rachetaient des années de service antérieures. Cette méthode permet de fixer une date à laquelle les années de service antérieures comptent comme années de service décomptées.

[102] Mme Wilson appelait ce qui précède de l'antidatation. Cette formule est semblable à ce qui se faisait dans les libellés antérieurs du régime et la modification du RASBS suivait en principe les versions antérieures, sauf que la structure de la modification du RASBS est quelque peu différente.

[103] Mme Wilson a renvoyé à des libellés antérieurs du régime tels qu'ils étaient alors rédigés afin de démontrer l'analogie historique quant à la date présumée du début de participation au régime prévue à l'article C1.25 des règlements consolidés de la société de gestion de retraite, modifiés en date du 1er mai 1974. Ainsi, un participant au régime qui n'était plus à l'emploi de la BRC et qui était réembauché plus tard, était traité comme un nouvel employé et se voyait attribuer une nouvelle date d'admission au régime. Cette nouvelle date d'admission pouvait être antidatée afin de tenir compte des années de service antérieures de l'employé. Dans le cadre de cette antidatation, l'employé ne se voyait accorder aucune participation présumée à sa date initiale de début d'emploi. Ce traitement est analogue aux mesures administratives prises par la BRC lorsqu'elle a fixé la date présumée du début de la participation de Mme Sugimoto au régime.

[104] Le 1er janvier 1981, les règlements consolidés ont reporté l'article C1.25 et ont ajouté l'article C1.26, lequel permettait que les années de service perdues en raison d'un conflit de travail soient présumées être des années de service ouvrant droit à pension. Soulignons qu'aucune mention de modification de la date d'admission ne figure dans cette disposition.

[105] Les règlements consolidés de 1974 et de 1981 sont révélateurs car ils montrent la relation qui existe dans le régime entre le rachat des années de service et le rachat des années de service ouvrant droit à pension. En vertu de l'alinéa C1.12m) des règlements consolidés de 1974, les années de service ouvrant droit à pension sont les années comprises dans la période commençant à la date d'admission au régime et se terminant à la date de cessation d'emploi ou au 35e anniversaire de l'admission. Le participant est défini comme étant un employé qui a été admis au régime.

[106] Les règlements consolidés de 1981 reportaient cette même définition, sauf que la définition d'années de service ouvrant droit à pension était désormais assujettie à l'application de l'article C1.25 et de l'article C1.26. Par conséquent, aux fins de ces deux dispositions, la notion d'années de service ouvrant droit à pension était dissociée de la notion d'admission à la participation. Elles n'étaient plus interchangeables.

[107] M. Morency a donné un exemple de la façon selon laquelle l'article C1.25 fonctionnait. Un employé qui avait participé au régime entre 1974 et 1978, qui quittait la BRC et retournait y travailler en 1981, se voyait créditer quatre années de service antérieur. Lorsque l'employé retournait travailler à la BRC, sa date de début de participation au régime était 1981. L'article C1.25 permettait cependant que la date d'admission de l'employé soit antidatée à 1977.

[108] M. Dobbie a parlé de l'imprimé d'ordinateur BenPlus. Il a souligné l'existence de la clause d'exonération qui mentionnait que les renseignements n'étaient peut-être pas complets, précis ou justes et qu'ils étaient fournis à différentes fins. Il s'agissait d'un nouveau système; il ne servait qu'à des fins de renseignements et il ne visait pas à fournir des conseils précis parce que le calcul était, dans une certaine mesure, effectué à partir de renseignements fournis par l'employé. Il ne visait pas à remplacer les états récapitulatifs des avantages personnels.

[109] Quant à la partie de l'imprimé intitulée Détails des années de service ouvrant droit à pension, années de service antérieures à la banque Royale ouvrant droit à pension, période de contribution au régime, 1er octobre 1972 au 1er mai 1974, elle ne fait qu'indiquer que Mme Sugimo a racheté des années de service ouvrant droit à pension quant à la période susmentionnée. De ce point de vue, selon M. Dobbie, cela est semblable à la date qui figurerait là dans le cas des employés qui ont un dossier de service interrompu.

[110] Les droits ou avantages que Mme Sugimoto peut avoir acquis par le biais de son RASBS doivent être transmis par la résolution du conseil de 1995 et par la modification du régime du RASBS de 2003 qui entrait en vigueur le 1er janvier 1996. Par conséquent, ce sont là les sources que je dois examiner.

[111] J'inclus la modification du régime parce que le BSIF, l'autorité qui est chargée de réglementer les régimes de pension fédéraux, a conclu que la modification du RASBS de 2003 était compatible avec la résolution du conseil de 1995. L'idée de Mme Sugimoto que le BSIF puisse changer sa position en raison des observations qu'elle a soumises le 20 juin 2005 est purement spéculative.

[112] Ce que Mme Sugimoto s'est fait dire ou promettre par les représentants de la BRC ou ce que Mme Sugimoto a compris à la lecture des divers documents ne peut pas constituer la source de ses droits. La présente affaire dont est saisi le Tribunal n'est pas une affaire de contrat, ni une affaire de préclusion ou de fausse représentation.

[113] Selon ce que je comprends de la modification du RASBS de 2003, c'est qu'elle ajoute la période du RASBS aux années de service ouvrant droit à pension au titre du régime contributif que Mme Sugimoto a commencé à accumuler lorsqu'elle a commencé à participer au régime le 1er mars 1980.

[114] Cela ressort clairement du paragraphe 4.07(2) de la modification de 2003 qui s'applique nonobstant la définition d'années de service ouvrant droit à pension qui figure à l'article 4.04. Tout comme l'alinéa C1.12m) des règlements consolidés de 1981 assujettissait la définition d'années de service ouvrant droit à pension à l'article C1.25 et à l'article C1.26.

[115] De plus, il ressort clairement des derniers mots du paragraphe 4.07(2) que l'acquisition d'années additionnelles de service ouvrant droit à pension en vertu de cette disposition a une incidence sur la date d'admission du participant. Ceci est la conséquence du RASBS et n'a pas conféré à Mme Sugimoto le statut de participant au régime avant 1974 ayant sursis à sa participation. La date d'admission au régime de Mme Sugimoto est demeurée le 1er mars 1980.

[116] Par conséquent, j'ai conclu que l'intimée a répondu à la preuve prima facie et qu'il n'y avait aucune discrimination dans son refus de permettre à Mme Sugimoto de participer à la réouverture de 2001. Comme le RASBS n'accordait pas à Mme Sugimoto le statut de participant avant 1974, on ne pouvait pas comparer cette dernière à ses collègues de sexe masculin.

D. Le RASBS avait-il un caractère sélectif et était-il, par conséquent, discriminatoire?

[117] Hormis l'affirmation que le RASBS avait un caractère sélectif parce qu'il ne lui accordait pas ce qu'il était censé lui accorder, Mme Sugimoto a offert peu d'arguments ou peu de fondements juridiques à l'appui de sa position. Toutefois, comme l'argument a été soulevé, je vais l'examiner.

[118] Dans Brooks c. Canada Safeway Ltd, [1989] 1 R.C.S. 1219, la Cour suprême du Canada a examiné la notion de caractère sélectif et de discrimination en vertu du Code des droits de la personne du Manitoba.

[119] Cette cause portait sur le régime d'assurance collective de Canada Safeway qui comportait dans ses avantages le versement de prestations, sauf pendant une période de 17 semaines, durant la grossesse.

[120] En traitant de la question de savoir si l'exclusion susmentionnée était discriminatoire parce qu'elle avait un caractère sélectif, la Cour suprême a jugé que la couverture sélective constituait peut-être un moyen détourné de permettre la discrimination. Il n'est pas moins discriminatoire de restreindre l'accès d'un groupe à des avantages que de lui imposer une sanction ou un fardeau.

[121] Dans l'arrêt Brooks, Canada Safeway était tenue en vertu du Code des droits de la personne du Manitoba de ne pas refuser, en vertu du régime d'assurance collective, à ses employés de sexe féminin des avantages égaux à ceux de ses employés de sexe masculin.

[122] Le problème que pose l'application du principe de la sélectivité en l'espèce est que, en vertu de celui-ci, on présume que la BRC était tenue par la LCDP de remédier à la discrimination qui a eu lieu avant l'adoption de la LCDP. Ce n'est cependant pas le cas.

[123] Il est contraire à la logique de dire à un employeur qu'il n'est pas tenu par la loi d'éliminer la discrimination qui existait avant l'adoption de la LCDP, mais que, s'il décide de le faire, il doit éliminer la discrimination dans son ensemble ou encourir sa responsabilité en vertu de la LCDP pour la partie de la discrimination à laquelle il n'a pas remédié. Ou, exprimé d'une autre manière, un geste à titre gracieux pour tenir compte de la discrimination qui a eu lieu avant l'adoption de la LCDP n'encourra aucune responsabilité pour sélectivité.

[124] Pour ces motifs, selon moi, Mme Sugimoto n'a pas prouvé prima facie qu'il y avait eu discrimination en raison du présumé caractère sélectif du RASBS.

E. La réouverture de 2001 est-elle discriminatoire au point d'établir une distinction entre les participants et les non participants?

[125] La réouverture de 2001, quoique neutre à première vue (elle n'établit aucune distinction entre les hommes et les femmes - uniquement entre les participants et les non-participants), impose une restriction quant aux femmes qui se trouvent dans la situation de Mme Sugimoto en raison d'une caractéristique particulière qu'elles ont en commun, à savoir, l'inadmissibilité au régime de retraite en 1974 en raison de leur âge et de leur sexe. Cette caractéristique particulière découle de l'application d'une règle en matière de retraite qui était en vigueur avant l'adoption de la LCDP. Des restrictions indirectes fondées sur des caractéristiques de ce genre sont qualifiées de discrimination par suite d'un effet préjudiciable.

[126] La discrimination par suite d'un effet préjudiciable a été reconnue par la Cour suprême dans O'Malley. La difficulté en l'espèce, laquelle n'a pas été rencontrée dans O'Malley, est celle de la rétrospectivité.

[127] Est-il discriminatoire que la réouverture de 2001 établisse une distinction fondée sur la participation antérieure, compte tenu que cette distinction existait avant l'adoption de la LCDP? Selon moi, la Cour d'appel fédérale a répondu à cette question par la négative dans la décision Gell c. Canadian Pacific Ltd., (1987) 10 C.H.R.R. D/5494.

[128] Dans la décision Gell, avant que la LCDP n'entre en vigueur, le régime de retraite de la société comportait une règle relative à l'âge maximum (la règle de l'âge) qui excluait du régime les personnes qui avaient 40 ans ou plus lorsqu'elles avaient commencé à travailler pour la société. Les plaignants, qui avaient tous les deux plus de 40 ans lorsqu'ils avaient été embauchés, ont été exclus du régime de retraite en vertu de la règle de l'âge.

[129] En 1978, la société a modifié le régime de retraite afin de donner aux employés admissibles le droit de participer au régime s'ils avaient antérieurement choisi de ne pas participer ou s'ils avaient cessé de participer. Les plaignants n'étaient pas admissibles en raison de la règle de l'âge.

[130] En 1979, la société a modifié le régime à nouveau afin de donner, à tous les employés qui avaient commencé à participer au régime en vertu de la modification de 1978, la possibilité de racheter jusqu'à 10 années de service antérieures ouvrant droit à pension. Les plaignants n'étaient pas admissibles au rachat de 1979 parce qu'ils n'avaient pas été admissibles à profiter de la modification de 1978.

[131] En 1980, la LCDP est entrée en vigueur en ce qui avait trait à la discrimination fondée sur l'âge en matière de régime de retraite. Cette même année, la société a apporté une autre modification au régime et celle-ci permettait aux employés, qui avaient été antérieurement exclus du régime en raison de la règle de l'âge, de participer au régime. Les plaignants ont alors commencé à participer.

[132] En 1982, une autre modification a été apportée au régime. Celle-ci visait exclusivement les employés qui avaient profité des modifications de 1978 et de 1979. La modification de 1982 permettait aux employés admissibles de racheter les années de service ouvrant droit à pension qu'ils n'avaient pas encore rachetées. Les plaignants n'étaient pas admissibles à profiter de la modification de 1982 en raison de leur inadmissibilité à profiter des modifications de 1978 et de 1979.

[133] Les plaignants ont prétendu que leur exclusion de la modification du rachat de 1982 était discriminatoire parce que les règles d'admissibilité à la modification incorporaient par renvoi une règle discriminatoire en matière d'âge qui existait avant que les dispositions de la LCDP n'entrent en vigueur. Ils ont prétendu que, comme l'offre de rachat (à laquelle la LCDP s'appliquait) tenait compte de considérations discriminatoires antérieures (auxquelles la LCDP ne s'appliquait pas), l'offre de rachat était discriminatoire.

[134] La Cour d'appel fédérale n'a pas souscris à cette opinion. Elle a d'abord souligné que l'offre de rachat était essentiellement neutre à première vue (elle n'établissait une distinction qu'en fonction de la participation au régime à une date précise). Elle a ensuite souligné que l'inadmissibilité des plaignants à l'offre de rachat était imputable uniquement à une règle discriminatoire qui existait avant l'entrée en vigueur de la LCDP.

[135] La Cour a conclu que la règle susmentionnée était parfaitement légale à l'époque et comme la LCDP n'exige pas son abolition rétroactive, il faut donc vivre avec les conséquences de son application. Par conséquent, suivant Gell, un fait ou une transaction neutre n'enclenche pas l'application de la LCDP du seul fait qu'il se fonde sur une situation discriminatoire antérieure à la LCDP.

[136] Mme Sugimoto prétend que la décision Gell doit être distinguée de la présente affaire parce qu'elle ne comportait pas un élément important qui est présent en l'espèce, à savoir le RASBS. À la différence de Gell, la BRC a pris l'initiative, après l'entrée en vigueur de la LCDP, de réduire l'écart qui existait entre le groupe de la plaignante et les groupes de comparaison (le degré de réduction de l'écart fait l'objet d'un litige, mais aucune partie ne nie qu'il a été réduit, du moins en partie).

[137] Mme Sugimoto affirme que l'initiative du RASBS constituait un engagement envers la pleine égalité quant à l'ensemble des femmes qui s'étaient prévalues du RASBS, c'est-à-dire un engagement envers l'élimination de l'écart créé avant que la LCDP n'entre en vigueur. De plus, elle prétend que c'est ainsi que la BRC a présenté le RASBS à ses employés de sexe féminin. En bout de ligne toutefois, selon Mme Sugimoto, la BRC n'a pas respecté son engagement et le RASBS n'a pas eu l'effet escompté par celle-ci.

[138] Mme Sugimoto souligne qu'aucune des circonstances susmentionnées n'étaient présentes dans Gell. Dans cette affaire, il n'était aucunement question d'une initiative visant à réduire l'écart qui existait entre le plaignant et les groupes de comparaison. Il n'était aucunement question d'un engagement envers l'élimination de l'écart qui existait entre les personnes ayant 40 ans et plus et les personnes ayant moins de 40 ans, ni d'aucune prétention voulant que cet écart ait été éliminé. Par conséquent, on ne saurait affirmer que, dans Gell, on n'a pas respecté de tels engagements.

[139] Il est vrai qu'il y a des différences factuelles entre Gell et la présente affaire, notamment l'absence, dans Gell, de quelque chose d'analogue à l'initiative du RASBS. Toutefois, cela ne suffit pas pour que l'on puisse établir une distinction entre cette décision et la présente affaire.

[140] Pour ce faire, il serait nécessaire de démontrer que les différences factuelles en question sont pertinentes au raisonnement de la Cour. Gell énonce le principe qu'un fait ou une transaction neutre n'enclenche pas l'application de la LCDP du seul fait qu'il se fonde sur une situation discriminatoire antérieure à la LCDP. La présence du RASBS dans la présente affaire ne rend pas ce principe moins valable.

[141] J'ai conclu plus tôt que le RASBS n'avait pas modifié le statut de Mme Sugimoto au point de la mettre sur un pied d'égalité avec ses collègues de sexe masculin. Le RASBS a tout simplement réduit l'écart existant dans les années de service ouvrant droit à pension. J'ai également conclu qu'en réduisant l'écart -un écart que la BRC n'était pas tenue d'éliminer au départ-le RASBS ne peut pas être considéré comme ayant un caractère sélectif ou comme établissant une distinction défavorable à Mme Sugimoto.

[142] En fait, le RASBS accordait à Mme Sugimoto une indemnisation partielle pour l'exclusion antérieure à la LCDP. Mais, en ce qui concerne son statut, le RASBS ne l'a pas placée, quant à la réouverture de 2001, dans une meilleure position que celle dans laquelle se trouvaient les plaignants dans Gell au moment de la modification de 1982. Dans chaque affaire les personnes concernées étaient éventuellement devenues participantes au régime, mais elles étaient toujours inadmissibles à l'offre neutre à première vue en matière de retraite en question parce que l'offre était liée à d'anciennes règles de participation discriminatoires qui existaient avant l'entrée en vigueur de la LCDP.

[143] Dans Gell, le rachat contesté était une offre qui avait été faite au groupe de comparaison et qui était fondée sur un certain statut dont jouissait ce groupe avant que la LCDP n'entre en vigueur (ce statut n'avait pas été accordé aux plaignants à l'époque).

[144] En outre, en l'espèce, la réouverture, une offre faite aux membres du groupe de comparaison, était fondée sur un certain statut dont jouissaient les membres de ce groupe avant l'entrée en vigueur de la LCDP (un statut qui n'avait pas été accordé à Mme Sugimoto à l'époque et qu'elle n'a jamais acquis rétroactivement, malgré le RASBS).

[145] Dans Gell, la Cour d'appel fédérale a déclaré que les différences discriminatoires de statut antérieures à la LCDP peuvent toujours être invoquées après que cette loi fut entrée en vigueur, et ce, sans engagement de responsabilité.

[146] En l'espèce, le résultat ne peut pas être différent. L'existence du RASBS ne modifie pas la différence discriminatoire de statut antérieure à la LCDP qui sépare Mme Sugimoto de ses collègues de sexe masculin.

[147] Dans ses observations, Mme Sugimoto s'est fondée, dans une large mesure, sur le jugement dissident rendu par le juge Jackson dans la cause Anderson c. Saskatchewan Teachers Superannuation Commission (1995) 24 C.H.R.R. D/177 (C.A. Sask.).

[148] Dans Anderson, une commission scolaire avait une politique exigeant que les enseignantes démissionnent afin de pouvoir prendre un congé de maternité, puis fassent une nouvelle demande d'emploi. En vertu de cette politique, les enseignantes étaient incapables d'accumuler des années de service ouvrant droit à pension durant leurs absences au travail liées à leur grossesse. À la fin des années 50 et au début des années 60, les enseignantes qui ont déposé une plainte avaient démissionné pour des raisons de grossesse et d'accouchement, puis elles ont été réembauchées après la fin de leur congé de maternité.

[149] À la fin des années 70, la province a adopté des lois qui interdisaient, en milieu de travail, la discrimination fondée sur le sexe.

[150] En 1976, la commission scolaire a commencé à autoriser les congés de maternité officiels plutôt que d'exiger des démissions. De plus, en 1976, une loi sur les pensions fut adoptée et celle-ci permettait essentiellement aux femmes de racheter les années de service ouvrant droit à pension qu'elles avaient perdues pendant qu'elles étaient en congé de maternité autorisé par la commission.

[151] Au début des années 90, les plaignantes ont demandé à racheter les années de service ouvrant droit à pension qu'elles avaient perdues en raison de leurs grossesses. La commission des pensions a refusé car les congés de maternité n'avaient pas été autorisés par la commission; les plaignantes avaient démissionné pour prendre leur congé.

[152] Les plaignantes ont ensuite prétendu que le refus de la commission des pensions de leur permettre de racheter des années de service en rapport avec leurs congés de maternité était discriminatoire.

[153] Les juges majoritaires de la Cour d'appel de la Saskatchewan ont jugé que la règle de rachat d'années de service n'était pas discriminatoire. Compte tenu de leur conclusion, les juges majoritaires n'étaient pas tenus de tenir compte du fait que l'origine du conflit relatif au rachat, à savoir les congés de maternité non autorisés par la commission à la fin des années 50 et au début des années 60, était antérieure à l'entrée en vigueur de la loi antidiscriminatoire applicable.

[154] La juge Jackson, dissidente, a jugé que la règle en matière de rachat d'années de service était discriminatoire. Ce faisant, elle a dû tenir compte du fait que les démissions pour grossesse des plaignantes se sont produites avant l'entrée en vigueur du Code des droits de la personne (le Code) et que celui-ci ne s'appliquait pas aux actes discriminatoires qui s'étaient produits avant son entrée en vigueur.

[155] Toutefois, selon la juge Jackson, l'événement à prendre en considération pour cette analyse n'était pas l'ancienne politique qui obligeait les femmes à démissionner pour prendre leur congé de maternité, mais plutôt la nouvelle loi, c'est-à-dire l'introduction d'une nouvelle règle de rachat de congé de maternité qui excluait les plaignantes (en raison de la discrimination antérieure à l'entrée en vigueur du Code) parce qu'elles n'avaient pas pu prendre des congés autorisés par la commission.

[156] La nouvelle règle en matière de rachat n'était pas une conséquence naturelle de l'ancienne politique antérieure à l'entrée en vigueur du Code. À cet égard, il est à noter que la commission des pensions n'était pas tenue d'offrir des rachats.

[157] Compte tenu qu'elle n'était pas une conséquence naturelle de la règle antérieure à l'entrée en vigueur du Code, la nouvelle règle en matière de rachat ne pouvait pas être protégée par le principe de l'application non rétroactive du Code.

[158] En tirant sa conclusion, la juge Jackson a renvoyé à la décision Gell, laquelle, selon elle, sur le plan des faits, est semblable à l'affaire Anderson. Toutefois, après avoir discuté de la décision Gell, la juge Jackson a conclu que Gell ne devrait pas être suivie. Selon elle, dès que l'intimée dans l'affaire Gell eut décidé d'offrir le rachat, elle ne pouvait plus se livrer à de la discrimination fondée sur l'âge en s'appuyant sur une règle discriminatoire antérieure et donc se livrer, au moment présent, à des actes de discrimination.

[159] Il ne fait aucun doute que, dans la décision Anderson, la juge Jackson a refusé de suivre la décision Gell. Il ne fait également aucun doute que ce n'était pas parce que la décision Gell était différente sur le plan des faits.

[160] La seule conclusion équitable que l'on peut tirer des motifs de la juge Jackson est que, selon elle, la décision Gell, bien qu'elle eut trait à des faits semblables à ceux dont elle était saisie, ne devait pas être suivie parce que, selon elle, elle était erronée.

[161] Toutefois, bien que la juge Jackson, en tant que juge de la Cour d'appel de la Saskatchewan, soit libre de ne pas souscrire à la décision Gell de la Cour d'appel fédérale, le Tribunal, lui, n'a pas cette liberté.

[162] Mme Sugimoto n'a mentionné aucune décision de la Cour d'appel fédérale qui renverse la décision Gell. Compte tenu de l'absence de différences fondamentales entre la décision Gell et la présente affaire, le Tribunal est tenu de suivre la décision Gell.

[163] Même si le Tribunal était libre d'adopter les motifs dissidents figurant dans la décision Anderson, ceux-ci ne seraient d'aucune utilité. D'abord, dans ses motifs, la juge Jackson insiste beaucoup sur le fait que les personnes qui agissent en se fondant sur des pratiques discriminatoires antérieures commettent des agissements qui sont eux-même discriminatoire. Un fort argument milite toutefois contre la qualification de la réouverture de 2001 comme étant une nouvelle étape. Les faits sont que la réouverture de 2001 est une nouvelle interprétation d'une modification qui a été apportée au régime de retraite en 1974 et cette interprétation aurait dû être offerte à l'époque de la modification.

[164] De plus, compte tenu des déclarations de la juge Jackson concernant la similitude sur le plan des faits entre l'affaire Anderson et l'affaire Gell, il ne convient pas que Mme Sugimoto prétende d'une part que la décision Gell est différente sur le plan des faits et prétende d'autre part que la décision Anderson devrait être appliquée en l'espèce. Si la décision Gell est différente sur le plan des faits, alors la décision Anderson l'est également.

[165] La réouverture de 2001 établit une distinction défavorable entre Mme Sugimoto et ses collègues de sexe masculin. La décision Gell nous oblige cependant à envisager la distinction sous l'angle de la participation plutôt que sous l'angle du sexe et, par conséquent, il n'existe aucun lien entre cet effet préjudiciable et un motif de distinction illicite. Mme Sugimoto n'a établi aucune preuve prima facie de discrimination.

III. LA DÉCISION

[166] J'ai conclu que Mme Sugimoto a établi une preuve prima facie de discrimination quant à la question de la participation au régime avant 1974 et de distinction illicite en raison du refus de la faire bénéficier de la réouverture de 2001. J'ai toutefois conclu que la BRC a offert une explication raisonnable quant à la preuve prima facie, donc cette allégation doit être rejetée.

[167] En ce qui concerne l'allégation de discrimination fondée sur le caractère sélectif du RASBS et l'allégation de discrimination fondée sur l'effet préjudiciable de la réouverture de 2001 sur certains employés non-participants, j'ai conclu que Mme Sugimoto n'a établi aucune preuve prima facie de discrimination.

[168] Par conséquent, la plainte de discrimination déposée par Mme Sugimoto contre la BRC en vertu de l'article 7 de la LCDP est rejetée.

[169] Dans sa plainte, Mme Sugimoto a également prétendu que la BRC a contrevenu aux articles 10 et 21de la LCDP. Toutefois, elle n'a présenté aucune preuve, ni aucun argument en rapport avec ces prétentions. Je présume qu'elle les a laissés tomber. Sinon, le bien-fondé de ces prétentions n'a pas été établi et, pour ce motif, elles sont également rejetées.

J. Grant Sinclair

OTTAWA (Ontario)
Le 21 février 2007

PARTIES AU DOSSIER

DOSSIER DU TRIBUNAL :

T1015/13504

INTITULÉ DE LA CAUSE :

Yvonne Sugimoto c. La Banque Royale du Canada

DATE ET LIEU DE L'AUDIENCE :

Les 18 au 22 septembre 2006
Le 18 octobre 2006

Toronto (Ontario)

DATE DE LA DÉCISION DU TRIBUNAL :

Le 21 février 2007

ONT COMPARU :

Norman Grosman
Natalie MacDonald

Pour la plaignante

Daniel Pagowski

Pour la Commission canadienne des droits de la personne

Stephen Shamie, Elizabeth Brown, Sean Sells

Pour l'intimée

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