Tribunal canadien des droits de la personne

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TRIBUNAL CANADIEN DES DROITS DE LA PERSONNE CANADIAN HUMAN RIGHTS TRIBUNAL

DAN DURRER

le plaignant

- et -

COMMISSION CANADIENNE DES DROITS DE LA PERSONNE

la Commission

- et -

BANQUE CANADIENNE IMPÉRIALE DE COMMERCE

l'intimée

DÉCISION

2007 TCDP 6
2007/03/30

MEMBRE INSTRUCTEUR : Matthew D. Garfield

[TRADUCTION]

I. INTRODUCTION

II. LA PLAINTE DÉPOSÉE PAR M. DURRER

III. LES QUESTIONS EN LITIGE

IV. LES CONCLUSIONS DE FAIT

A. L'historique

B. Restructuration et compressions effectuées dans l'ensemble de l'entreprise

C. La Politique sur le maintien de l'emploi (PME) et le Programme de soutien à la restructuration (PSR)

D. L'introduction du Programme de soutien à la transition (PST)

E. La restructuration du service de la Conformité

(i) Le processus utilisé par M. Young

(ii) Les critères utilisés par M. Young

(iii) Le résultat : abolition de postes et cessation d'emplois

F. L'examen fait par M. Young quant à M. Durrer et quant à son emploi

G. L'âge de M. Durrer en tant qu'élément d'appréciation

H. Le 19 octobre 1999 : l'avis de cessation d'emploi remis à M. Durrer

I. L'emploi de M. Durrer après le 19 octobre 1999 : les trois affectations temporaires

J. La réunion du 4 avril 2002 et la question de ne plus accorder d'affectations temporaires

K. La date de cessation d'emploi et la période qui a suivi la cessation d'emploi

V. LE DROIT

A. La définition de la discrimination

B. L'âge en tant que motif de distinction illicite

C. La disposition législative pertinente

VI. L'ANALYSE

A. La CIBC a-t-elle aboli le poste de M. Durrer en octobre 1999 en raison de son âge?

B. La CIBC a-t-elle décidé de ne pas affecter M. Durrer à un autre poste au sein du même service (Conformité) en raison de son âge?

C. La CIBC a-t-elle fait obstacle aux tentatives de M. Durrer d'obtenir une réaffectation au sein de la CIBC, et ce, en raison de son âge?

(i) Soustraction aux obligations découlant du régime de retraite

VII. CONCLUSION

I. INTRODUCTION

[1] En date du 19 octobre 1999 M. Dan Durrer n'avait travaillé que pour une seule société, la Banque Canadienne Impériale de Commerce (CIBC), et ce, depuis plus de 28 ans. Ce jour-là, il fut avisé que son poste serait aboli et que son emploi pendrait fin. Il était alors âgé de 48 ans. Son emploi comptait parmi les nombreux emplois qui ont été abolis dans l'ensemble de la société dans le cadre d'un programme de compression et de restructuration. Sur une période de deux ans et demi, M. Durrer a occupé trois postes temporaires à la Banque, jusqu'à ce que, finalement, comme il n'avait obtenu aucun autre poste, sa date de cessation d'emploi fut finalement fixée au 12 avril 2002.

[2] Le 23 juillet 2002, M. Durrer a déposé auprès de la Commission canadienne des droits de personne (la Commission) une plainte dans laquelle il prétendait que la CIBC avait fait preuve de discrimination à son égard en raison de son âge, et ce, en contravention de l'article 7 de la Loi canadienne sur les droits de la personne (LCDP). La Commission a renvoyé la plainte au Tribunal canadien des droits de la personne (le Tribunal) le 30 janvier 2006. La Commission a choisi de ne pas participer à l'étape de l'audience de l'instruction, et ce, tout en demeurant partie. L'audition de la preuve a eu lieu en novembre 2006. Voici les motifs de ma décision.

II. LA PLAINTE DÉPOSÉE PAR M. DURRER

[3] Il semble que la nature exacte de la plainte déposée par M. Durrer a changé entre le moment de son dépôt et le moment de son audition. Quel était exactement le fondement de la plainte de M. Durrer? Dans la section intitulée Allégation du formulaire de plainte qu'il a déposé auprès de la Commission, M. Durrer a affirmé ce qui suit : [traduction] Moi, Dan Durrer, prétend que la Banque Canadienne Impériale de Commerce a fait preuve de discrimination à mon égard en cours d'emploi en mettant fin à mon emploi en raison de mon âge (50 ans), et ce, en contravention de l'article 7 de la Loi canadienne sur les droits de la personne. Comme M. Durrer a mentionné l'âge de 50 ans, il est permis de penser que le fondement de sa plainte s'est cristallisé le 12 avril 2002, sa dernière journée de travail. Le reste de la plainte portait principalement sur les événements qui se sont déroulés au cours de cette période et non pas sur la décision initiale par laquelle on a aboli son poste et par laquelle on a décidé de ne pas le réaffecter au nouveau service de la Conformité.

[4] Dans son exposé des précisions, sa plaidoirie en fait, déposé auprès du Tribunal par son avocat, M. Durrer met l'accent sur la discrimination fondée sur l'âge et sur les années de service ouvrant droit à pension. Le plaignant plaide que la [traduction] CIBC a élaboré une politique de congédiement des employés qui approchaient de la retraite, privant ces derniers de leur emploi tout simplement en raison de leur âge. L'exposé des précisions souligne le prétendu refus de la CIBC de permettre à M. Durrer d'occuper un quatrième poste temporaire et d'atteindre l'âge de 53 ans, d'où il aurait pu, grâce à deux années d'indemnité de cessation d'emploi, faire le pont vers une retraite sans pénalité. Il est écrit ce qui suit dans l'exposé des précisions du plaignant : [traduction] La CIBC a mis fin à l'emploi de M. Durrer à l'âge de 50 ans et demi dans le but de faire obstacle à son droit à la pension et dans le but de se soustraire à ses obligations découlant du régime de retraite. Il est de plus écrit ce qui suit :

[traduction]

On a empêché M. Durrer de pouvoir recevoir la pension offerte aux employés qui étaient âgés de 53 ans au moment de la cessation de leur emploi parce que la CIBC ne lui a pas permis de prolonger sa carrière chez elle par le biais d'une nomination pour une période déterminée [poste temporaire]. Par ces actes, la CIBC a défavorisé M. Durrer en cours d'emploi, en contravention de l'alinéa 7b) de la LCDP, en vertu d'une politique qui a privé M. Durrer d'occasions d'emploi, en contravention de l'article 10 de la LCDP.

[5] L'avocat de la CIBC a déposé, entre autres choses, son exposé des précisions - sa plaidoirie en réponse - dans lequel il s'oppose à ce que le plaignant ajoute à sa plainte la question relative à l'article 10 car il affirme qu'elle a été mentionnée pour la première fois dans la plaidoirie du plaignant. Le plaignant n'a déposé aucune réplique. Dans ses remarques préliminaires, l'avocat de la CIBC a soulevé la question relative à l'article 10 et il a affirmé qu'il attendrait pour voir comment la cause de M. Durrer [traduction] se déroulerait. L'avocat du plaignant n'a fait aucune mention de l'article 10 dans ses très brèves remarques préliminaires. À la fin de l'audience, aucune autre mention d'une violation en soi de l'article 10 n'a été faite. L'avocat du plaignant n'a fait aucune observation à propos de cela dans sa plaidoirie finale, à l'exception d'une brève mention. Cette mention avait trait à une déclaration faite dans la plaidoirie de la CIBC qui figurait dans la réponse à titre subsidiaire de la Banque quant au bien-fondé de l'allégation fondée sur l'article 10 figurant dans la plaidoirie du plaignant. Dans ses conclusions finales, l'avocat de la CIBC n'a présenté aucune observation concernant une violation de l'article 10. Dans le recueil des textes de références déposé par le plaignant figurent deux décisions rendues par le Tribunal des droits de la personne de la Colombie-Britannique traitant du pouvoir de modification des plaintes. L'avocat du plaignant n'a toutefois présenté aucune observation à propos de ces décisions. Il est également important de souligner que le plaignant n'a jamais chercher à modifier sa plainte dans le but d'ajouter la question relative à l'article 10. J'interprète ceci comme étant un abandon de l'allégation selon laquelle la CIBC a violé l'article 10 de la LCDP. Subsidiairement, je conclus que, à la fin de l'audience, la CIBC s'attendait raisonnablement à ce que je n'examine la preuve et les arguments que sous l'angle d'une violation de l'article 7. L'examen par moi, à cette étape-ci, d'une question de violation de l'article 10 constituerait un déni d'équité et de justice naturelle. Par conséquent, j'examinerai la preuve et les arguments dans la mesure où ils ont trait à une violation des alinéas 7a) et 7b) de la LCDP.

[6] Bien que dans sa plaidoirie et dans son témoignage M. Durrer ait mis l'accent sur le présumé refus de la CIBC de lui permettre de continuer à travailler dans le cadre d'affectations temporaires jusqu'à l'âge de 53 ans, d'où il pouvait faire le pont vers la retraite, j'ai entendu la preuve quant à savoir si la décision initiale d'éliminer le poste de M. Durrer au service de la Conformité était discriminatoire. Des éléments de preuve et des arguments ont été présentés par l'avocat du plaignant quant à savoir si la décision de M. Young de ne pas réaffecter le plaignant dans le nouveau service réorganisé de la Conformité constituait de la discrimination fondée sur l'âge. Dans ses conclusions finales, l'avocat du plaignant a déclaré brièvement que, en l'espèce, la violation de l'article 7 comportait deux volets : premièrement, l'âge de M. Durrer fut pris en compte par M. Young lorsque celui-ci a décidé de mettre fin à l'emploi de M. Durrer; deuxièmement, en mars et avril 2002, les Ressources humaines ont fait échec à la tentative d'obtention par M. Durrer d'un quatrième emploi temporaire et l'emploi de ce dernier a donc pris fin.

III. LES QUESTIONS EN LITIGE

[7] Je traiterai des questions suivantes :

  1. La CIBC a-t-elle éliminé le poste de M. Durrer en octobre 1999 en raison de l'âge de ce dernier;
  2. La CIBC a-t-elle décidé de ne pas réaffecter M. Durrer à un autre poste au sein du même service (Conformité) en raison de son âge;
  3. La CIBC a-t-elle fait obstacle aux tentatives de réaffectation de M. Durrer au sein de la CIBC en raison de son âge.

IV. LES CONCLUSIONS DE FAIT

[8] Dans la présente partie, je tire mes conclusions de fait, notamment celles qui découlent de l'exposé conjoint des faits qui a été déposé.

A. L'historique

[9] M. Dan Durrer est né le 9 octobre 1951. Il a commencé à travailler pour la CIBC en janvier 1971. Il possédait un diplôme de 12e année. Il a gravi les échelons à la Banque; il a occupé divers postes dans diverses succursales et dans divers bureaux régionaux. Entre 1994 et son dernier jour de travail en 2002, M. Durrer a occupé divers postes au siège social de la Banque à Toronto. Au moment où il a reçu son avis de cessation d'emploi, le 19 octobre 1999, M. Durrer occupait le poste de directeur, service d'experts-conseils en risque d'entreprise, services bancaires de détail, au sein de l'un des trois services de la Conformité de la Banque. Il était âgé de 48 ans.

[10] Selon l'exposé conjoint des faits, [traduction] Au cours de son emploi à la CIBC, M. Durrer fut un employé loyal et dévoué. Il a obtenu de nombreuses promotions et a fait l'objet de nombreuses mentions élogieuses de la part de ses supérieurs. Il a notamment reçu deux prix du président pour rendement exceptionnel. De son propre aveu, M. Durrer était un généraliste qui évoluait dans un milieu de travail de plus en plus spécialisé.

B. Restructuration et compressions effectuées dans l'ensemble de l'entreprise

[11] En 1999, la CIBC a embauché un nouveau président-directeur général; M. John Hunkin. Le nouveau PDG a mis en place un programme de compression et de restructuration dans l'ensemble de l'entreprise, afin de, notamment, rendre la CIBC plus compétitive. Je retiens la preuve selon laquelle la CIBC traversait alors une période difficile sur le plan financier. La restructuration a entraîné l'élimination d'environ 2 500 emplois. L'emploi de M. Durrer figurait parmi ces emplois. Le courriel interne qui a été envoyé aux cadres et aux gestionnaires (ainsi qu'à M. Durrer) le 27 septembre 1999, pour distribution aux membres du personnel, se lit en partie comme suit :

[traduction]

L'engagement de la CIBC à ramener sa base de coûts au même niveau que celui de ses compétiteurs entraînera une restructuration importante au cours des prochains mois [...]

Cette initiative de restructuration de la CIBC entraînera vraisemblablement, dans l'immédiat, pour les membres du personnel, une diminution des occasions de réaffectation. Par conséquent, nous devons accorder plus de flexibilité aux employés dont les emplois ont été abolis, et ce, afin de leur permettre d'examiner d'abord les perspectives de carrière à l'extérieur de la CIBC et de leur fournir un plus grand soutien afin de les aider dans ce qui sera peut-être une recherche d'emploi plus longue à l'extérieur de la Banque.

[12] Le courriel mentionne clairement qu'il y aurait [traduction] moins d'occasions de réaffectation et que les employés seraient encouragés à rechercher des emplois à l'extérieur de la CIBC. Je retiens la preuve présentée par M. Durrer selon laquelle il ne croyait pas qu'il serait touché par la restructuration et que son emploi serait éliminé, bien que dès qu'il eut reçu le courriel susmentionné, il savait que des changements importants se produiraient bientôt.

[13] Je conclus qu'une partie de la restructuration comportait l'élimination d'emplois inutiles et de doubles emplois ainsi qu'une réduction des coûts. Il y a lieu de s'attendre à de telles mesures dans ce genre de processus. Rien dans la preuve n'indique que les travailleurs plus âgés furent ciblés ou que des emplois furent éliminés en fonction de l'âge des employés. Par exemple, dans son témoignage de vive voix ainsi que dans son rapport d'expert, M. Michael Banks, un expert en matière de retraite et de science actuarielle, associé chez Mercer Human Resources Consulting, a donné une vue d'ensemble [traduction] des taux de cessation d'emplois des employés visés par le Programme de soutien à la transition (PST) qui figurent dans [le] rapport sur l'évaluation actuarielle du régime de retraite de la CIBC au 31 octobre 2005. Dans la catégorie d'âge 21 à 30 ans, le taux de cessation d'emploi des employés visés par le PST était de 1 pour 100 pour chacun des âges compris dans cette fourchette. Dans la catégorie d'âge 31 à 52 ans, le taux était 1,5 pour 100 pour chacun des âges compris dans cette fourchette. M. Banks a conclu ce qui suit : [traduction] Le taux de cessation d'emploi des employés visés par le PST est uniforme quant aux employés âgés de 31 à 52 ans. Rien n'indique qu'un tri fut fait en fonction de l'âge dans cette fourchette. Je retiens le témoignage de M. Banks.

C. La Politique sur le maintien de l'emploi (PME) et le Programme de soutien à la restructuration (PSR)

[14] En 1992 et 1993, la CIBC a créé, respectivement, sa Politique sur le maintien de l'emploi (PME) et son Programme de soutien à la restructuration (PSR). La PME et le PSR s'appliquaient en parallèle afin de donner, aux employés qui avaient perdu leur emploi dans le cadre de l'abolition de postes, la possibilité d'être réaffecté dans un autre poste au sein de la Banque ou, si cela n'était pas possible, la possibilité de recevoir une indemnité de départ ainsi que d'autres avantages, notamment du counseling, de la réadaptation professionnelle, des conseils juridiques et financiers, et ce, dans le but de les aider à vivre leur transition vers un emploi à l'extérieur de la CIBC.

[15] L'un des avantages les plus importants offerts aux employés admissibles touchés par la restructuration avait trait au régime de retraite de la Banque. Ces employés, s'ils avaient 55 ans à la date de cessation de leur emploi ou s'ils avaient entre 53 et 55 ans et que leur indemnité de départ (un maximum de deux ans) était suffisante pour qu'il puisse faire le pont jusqu'à l'âge de 55 ans, avaient droit à une dispense de la réduction actuarielle de retraite anticipée prévue en vertu du régime de retraite. En d'autres mots, ils étaient admissibles à recevoir immédiatement, à leur départ de la Banque, une pension non réduite. Dans les circonstances normales, s'ils choisissaient de prendre leur retraite à l'âge de 55 ans, ils pouvaient recevoir immédiatement une pension réduite ou recevoir à l'âge de 65 ans une pension différée non réduite. Cette dispense de la réduction de la pension de retraite anticipée est un avantage important qui fut conféré aux employés dont l'emploi avait pris fin durant cette période. Je retiens le témoignage de l'expert en régime de retraite, M. Michael Banks, qu'il s'agissait là d'un avantage très généreux et très rare en milieu de travail. À la page 3 de son rapport, M. Banks écrit que, au cours de la période de 4 ans se terminant le 31 octobre 2004, 1 795 employés, âgés de 20 à 53 ans, ont perdu leur emploi à la CIBC et 700 employés ont pris leur retraite à l'âge de 55 ans et plus (y compris les personnes âgées de 53 à 55 ans qui ont fait le pont jusqu'à l'âge de 55 ans).

[16] Comme nous en discuterons plus loin, l'élément central de la plainte de M. Durrer est que la CIBC ne lui a pas permis de continuer à travailler jusqu'à l'âge clé de 53 ans. Si elle le lui avait permis, grâce à sa période d'indemnité de départ d'une durée maximum de 24 mois, M. Durrer aurait atteint l'âge cible de 55 ans. Il aurait ensuite eut droit à la dispense de la réduction de pension, bénéficiant ainsi d'une pension immédiate non réduite. Par conséquent, les actes de la CIBC ont empêché M. Durrer de pouvoir bénéficier de cet avantage. La CIBC a répondu en affirmant que M. Durrer n'était tout simplement pas admissible à bénéficier de cet avantage généreux qu'elle n'était pas, au départ, légalement tenue d'accorder à ses employés licenciés. M. Durrer était âgé de 48 ans en octobre 1999 lorsqu'il a été avisé que le poste qu'il occupait au service de la Conformité serait aboli à compter du 7 janvier 2000. Malgré les trois postes temporaires qu'il a par la suite occupés au cours d'une période de deux ans et demi (il était âgé de 50 ans et demi à ce moment-là) et malgré les 2 années d'indemnité de départ ajoutées à cette combinaison, il fut considéré comme ayant 52 ans et demi, soit 2 ans et demi de moins que l'âge clé exigé.

[17] La CIBC a introduit dans son PSR des modifications exceptionnelles qui prenaient effet le 1er septembre 1999. Ces modifications prévoyaient l'attribution d'indemnités de licenciement en lieu de préavis ainsi que l'attribution d'une indemnité de départ améliorée aux employés, au Canada, qui avaient reçu un avis d'abolition de leur emploi en raison de la restructuration. Je retiens la preuve déposée par la Banque selon lequel un certain nombre d'employés ont réussi à obtenir des postes temporaires (p. ex. M. Durrer) qui leur donnaient la possibilité d'acquérir de nouvelles compétences dans le but d'obtenir un nouveau poste permanent ou dans le but de gagner du temps supplémentaire pour pouvoir trouver un emploi à l'extérieur de la CIBC. Comme nous en discuterons plus loin, l'intention ou l'objectif du programme de la CIBC était de ne pas permettre aux employés de se servir de postes ou d'affectations temporaires pour accumuler du temps dans le but d'être admissible à faire le pont vers la retraite. Elle voulait tout simplement que ces postes ou affectations servent comme moyen de trouver un poste permanent au sein de la CIBC ou comme moyen de trouver un emploi à l'extérieur de la CIBC.

D. L'introduction du Programme de soutien à la transition (PST)

[18] En avril 2001, la CIBC a introduit son Programme de soutien à la transition (PST), lequel a remplacé la Politique sur le maintien de l'emploi (PME) ainsi que le Programme de soutien à la restructuration (PSR). Les employés ont eu le choix entre continuer à se prévaloir de la PME et du PSR ou se prévaloir du PST. M. Durrer a choisi de se prévaloir du PST car les avantages prévus dans ce programme étaient plus généreux que ceux qui étaient prévus dans les anciens programmes. Bien qu'il continuerait de recevoir une indemnité de départ de 2 ans, la valeur en argent de l'ensemble des indemnités (y compris les autres formes de soutien) était plus grande que la valeur des avantages prévus dans le PST. La dispense de la réduction de la pension de retraite anticipée existait également dans le PST, mais M. Durrer n'était toujours pas admissible à bénéficier de ce généreux avantage.

[19] Le rôle du gestionnaire de soutien était très différent dans le nouveau programme par rapport aux anciens programmes. Dans le PST, bien que le gestionnaire de soutien aidait l'employé licencié à se trouver un autre emploi, c'était à l'employé qu'incombait la responsabilité de se trouver un emploi. Comme nous le verrons plus loin, peu importe le programme dont bénéficiait M. Durrer à quelque moment que ce soit, il était très proactif et faisait preuve de beaucoup d'initiative dans sa recherche d'un emploi temporaire et d'un emploi permanent au sein de la CIBC. Il n'a pas fait preuve de la même diligence en ce qui a trait à la recherche d'un emploi à l'extérieur de la CIBC. M. Durrer a affirmé ce qui suit : [traduction] Il ne fait donc absolument aucun doute que je concentrais ma recherche d'emploi à l'interne. Plus tard, il a déclaré ce qui suit :

[traduction]

Mais je l'ai dit plus tôt et je le répéterai encore, j'ai beaucoup investi dans la CIBC. C'est là que ma vie, ma vie professionnelle notamment, s'est déroulée. La valeur de mes investissements dans le fond de pension était importante et j'aimais mon travail.

J'imagine que, dans mon esprit, je ne voulais pas m'en aller comme ça, tout simplement, sans me battre, et je crois que je me suis battu pendant le reste du temps que j'ai passé à la CIBC.

E. La restructuration du service de la Conformité

[20] Le nouveau PDG a nommé un nouveau Premier vice-président à la Conformité - l'agent en chef chargé de l'observation des normes de la Banque. C'est au bureau de New York qu'on est allé chercher ce dernier : il s'agissait d'Eric Young. Celui-ci faisait l'aller-retour entre New York et Toronto. Il s'est vu confier la responsabilité de la création d'un nouveau service de la Conformité pour l'ensemble de la Banque. À cette époque, la CIBC était dotée de trois services de la Conformité, un au groupe Personnel et Commercial, un à Marchés mondiaux et un au Centre de service aux entreprises. M. Young a en fin de compte décidé de regrouper les trois services en un seul service, intégré et efficace. Je retiens le témoignage de M. Young selon lequel que bien que la réduction des coûts constituât un facteur ou un élément (quoique non essentiel) dont il devait tenir compte, on ne lui avait donné aucun mandat, ni aucune directive, concernant le montant des coûts à réduire ou concernant la manière de procéder. L'objectif visé, de son point de vue, n'était pas de réduire les coûts mais de [traduction] créer un service de la Conformité efficace. En fait, il a affirmé dans son témoignage que les sommes économisées grâce à cet exercice devaient probablement être réinvesties dans le produit final. Il ne s'est vu imposer aucun plafond budgétaire précis.

[21] Selon M. Young, il y avait beaucoup à faire dans le cadre de sa tâche. Dans son témoignage, il a renvoyé aux notes manuscrites qu'il avait prises à l'époque et qui ont été déposées en preuve. M. Young faisait état dans ses notes de l'ancien monde de la conformité à la Banque par opposition au nouveau monde qu'il envisageait de créer. Lorsqu'il est arrivé, les services de la Conformité étaient marqués par le double emploi, parfois par le triple emploi. Ces emplois étaient des emplois à temps partiel et des emplois non productifs. Il songeait à regrouper les trois services de la Conformité en un seul service qui serait de nature multidisciplinaire (c'est-à-dire qu'il serait composé d'avocats, de comptables, etc.). Les agents chargés de l'observation des normes seraient plus proactifs ([traduction] ils ne seraient pas assis dans leur tour d'ivoire à émettre des avis de politique de conformité [...] ou des avis de modification règlementaire aux utilisateurs de l'entreprise), ils travailleraient à temps plein et possèderaient une formation et des compétences spécialisées. M. Young voulait que ses agents chargés de l'observation des normes soient plus indépendants sur le plan institutionnel, comme le sont les vérificateurs. Le nouveau monde de la conformité devait être très différent de l'ancien monde. La réforme et la restructuration étaient également importantes, selon M. Young, en raison de la nature changeante de la conformité au sein de l'industrie bancaire. La conformité devenait de plus en plus complexe car les lois et les règlements étaient de plus en plus contraignants. La Banque était de plus en plus exposée aux risques. L'objectif primordial de M. Young était de [traduction] protéger la Banque dans son ensemble.

[22] Une partie de la restructuration de la Conformité allait toucher le personnel des trois services de la Conformité. Il a affirmé dans son témoignage qu'il n'avait aucune notion préconçue quant à savoir combien il resterait de postes. Ce qui était certain, c'était qu'il en resterait moins. Cela n'a rien d'étonnant compte tenu de son opinion qu'il y avait du double emploi et parfois du triple emploi au sein des services de la Conformité de la CIBC. Il y avait notamment du double emploi dans les postes de direction des trois services de la Conformité.

(i) Le processus utilisé par M. Young

[23] M. Young devait décider quels postes seraient conservés, quels postes seraient abolis et quels postes seraient modifiés ou restructurés. Et, évidemment, il devait décider ce qu'il fallait faire avec les employés qui occupaient ces postes dans les trois services de la Conformité. Il a interrogé diverses personnes travaillant dans les services de la Conformité, particulièrement des cadres/gestionnaires ainsi que des agents chargés de l'observation des normes. Il a également parlé avec les gens d'affaires (les employés de la CIBC qui assuraient la liaison et communiquaient avec les agents chargés de l'observation des normes) [traduction] afin d'obtenir leurs points de vue sur les activités de la Conformité ainsi que leur point de vue sur divers gestionnaires/directeurs travaillant à la Conformité quant à savoir si ceux-ci ajoutaient de la valeur. De plus, M. Young a consulté des personnes travaillant aux Ressources humaines, notamment Mme Cindy Nicholls, la conseillère principale en ressources humaines qui a traité avec M. Durrer dans les années qui ont suivi.

[24] Il est important de noter que M. Young a rencontré (dans certains cas plus d'une fois) tous les employés dont il envisageait le licenciement ou dont il envisageait d'abolir le poste. Il a également examiné les dossiers de rendement et les dossiers personnels de ces derniers.

(ii) Les critères utilisés par M. Young

[25] La CIBC a déposé en preuve des extraits du cahier de notes de M. Young que celui-ci a rédigé à l'automne 1999 et qu'il a remis à la CIBC lorsqu'il a quitté son emploi. On s'est longuement étendu sur ces extraits en interrogatoire principal et en contre-interrogatoire. Il suffit de dire que les extraits comportaient des notes abrégées sous forme de schémas et de flèches. Les extraits n'étaient pas écrits en prose; ils ne comportaient aucune phrase complète. M. Young avait une bonne mémoire des événements même si ceux-ci s'étaient déroulés plus de sept ans auparavant.

[26] Après avoir examiné attentivement les extraits du cahier de notes de M. Young ainsi que le témoignage de ce dernier quant à ceux-ci, je conclus que M. Young a tenu compte des facteurs importants suivants lorsqu'il a décidé s'il devait garder un employé à la Conformité :

  1. L'employé possédait-il une bonne compréhension de la conformité et de ce qu'elle comportait;
  2. Quelle expérience en matière de réglementation ou de conformité (y compris la formation) l'employé possédait-il;
  3. Quelles furent les opinions des gens d'affaires à propos de l'employé de la Conformité. L'employé ajoutait-il de la valeur au nouveau monde du service de la Conformité?

[27] Après avoir examiné le témoignage de M. Young, je conclus que, à un moindre degré, celui-ci a également tenu compte de la rémunération (salaire et avantages sociaux) des divers employés en décidant s'il devait ou non les garder à l'emploi de la CIBC. L'un des extraits du cahier de notes, à première vue, aurait pu servir de fondement à la décision de M. Young quant à savoir s'il devait garder ces employés à l'emploi de la CIBC et (ou) aurait pu servir comme évaluation du rendement quant à savoir si on devait leur accorder des primes ou des points d'équipe ce qui, selon M. Young, s'est produit au cours de la même période (octobre 1999). Lors du nouvel interrogatoire, M. Young a affirmé que ses notes ont servi à ces deux fins. Je retiens son témoignage sur ce point.

[28] Je conclus également que M. Young ne faisait pas que décider quels employés il devait garder et quels employés il devait licencier dans les trois services de la Conformité. Il examinait également quels postes il devait conserver, quels postes il devait abolir et quels postes il devait diviser et répartir en d'autres postes. Cet exercice comprenait l'examen de la question du double emploi quant aux postes de direction (comme le poste de M. Durrer) au sein des trois services de la Conformité.

(iii) Le résultat : abolition de postes et cessation d'emplois

[29] Je retiens le témoignage de M. Young selon lequel la tâche susmentionnée n'était pas facile. Compte tenu de la preuve, je conclus que les décisions de M. Young ont résulté en la création d'un seul service de la Conformité dont l'effectif est diversifié sur le plan du sexe, de l'âge, des antécédents et de l'expérience.

[30] Deux tableaux créés par la CIBC ainsi qu'une note manuscrite rédigée à l'époque par M. Young ont été déposés en preuve quant à la composition selon l'âge du groupe des employés dont les postes ont été abolis ou qui ont été licenciés et du groupe des employés qui ont été gardés à l'emploi de la CIBC. La preuve donne à penser que les employés figurant dans le tableau fusionné et modifié ci-dessous étaient des cadres/gestionnaires qui travaillaient aux services de la Conformité.

Employés dont les postes ont été abolis2
NOM ÂGE LORS DE LA RESTRUCTURATION ÂGE PAR RAPPORT À CELUI DE M. DURRER1
Dan Durrer 48 --
Employé A 51 plus âgé
Employé B 49 plus âgé
Employé C 44 plus jeune
Employé D 38 plus jeune
Employé E 40 plus jeune
Employés gardés à l'emploi
NOM ÂGE LORS DE LA RESTRUCTURATION ÂGE PAR RAPPORT À CELUI DE M. DURRER1
Employé F 52 plus âgé
Employé G 52 plus âgé
Employé H 59 plus âgé
Employé I 40 plus jeune

1 C'est moi qui ai ajouté cette colonne.

2 L'un des tableaux portait l'en-tête suivant : Employés dont les postes ont été abolis et Employés gardés à l'emploi. L'autre tableau portait l'en-tête suivant : Gardés et Licenciés. Selon moi, après avoir examiné le témoignage de vive voix et la preuve documentaire, les gestionnaires dont les postes ont été abolis ont également perdu leur emploi.

[31] Le tableau ci-dessus indique que les employés qui ont été gardés (sauf l'employé I) étaient les employés les plus âgés, notamment l'employé H qui avait 11 ans de plus que M. Durrer. De plus, trois des employés dont les postes ont été abolis étaient plus jeunes que M. Durrer. Je traiterai de l'importance de ce point plus loin dans les présents motifs. Qu'il suffise de dire qu'il s'agit d'une preuve concluante que M. Young ne ciblait aucunement M. Durrer ou d'autres personnes en raison de leur âge.

F. L'examen fait par M. Young quant à M. Durrer et quant à son emploi

[32] M. Young a pris la décision d'abolir le poste de M. Durrer et de ne pas réaffecter ce dernier au sein du nouveau service de la Conformité. Il a affirmé que le poste de directeur, service d'experts-conseils en risque d'entreprise, services bancaires de détail de M. Durrer était excédentaire et inutile et qu'il avait transféré environ 50 p. 100 des tâches et des responsabilités de ce poste à d'autres employés de la Banque. Quant à sa décision d'abolir le poste de M. Durrer, M. Young a déclaré ce qui suit : [traduction] Je n'avais pas besoin qu'autant de personnes accomplissent ces différentes tâches [comme les tâches de M. Durrer] au sein du service. Il voulait dire par là qu'il n'avait pas besoin d'un gestionnaire à temps plein pour effectuer les tâches de M. Durrer. Le plaignant n'a pas contesté cette preuve.

[33] Le témoignage de M. Durrer n'a pas principalement porté sur le bien-fondé de la décision de M. Young d'éliminer son poste ou sur le fait qu'il ne fut pas réaffecté au sein du service de la Conformité. M. Durrer était plutôt irrité que la CIBC ait mis fin, en avril 2002, à son délai de préavis prolongé de 28 mois, l'empêchant ainsi d'obtenir un quatrième emploi temporaire (et un cinquième au besoin) afin de l'amener jusqu'à l'âge magique de 53 ans, d'où il aurait pu faire le pont jusqu'à l'âge de 55 ans et pouvoir ainsi bénéficier d'une retraite immédiate non réduite. Ironiquement, si M. Durrer avait obtenu un poste permanent au sein de la CIBC (ce que, selon ses dires, il cherchait à obtenir ainsi que des postes temporaires), il n'aurait plus été admissible au PST et, par conséquent, n'aurait plus eu droit à une indemnité de départ ou à l'avantage de l'âge d'où il pouvait faire le pont sur lequel il a mis l'accent tout au long de la présente cause (l'anneau de laiton comme l'avocat de la CIBC l'appelle). Je conclus que M. Young avait des motifs d'affaires légitimes, qui n'avaient pas rapport avec l'âge de M. Durrer, pour arriver à sa décision d'abolir le poste de M. Durrer. Je reconnais l'expertise de M. Young en matière de conformité au sein de l'industrie bancaire. C'est à lui qu'il revenait de prendre cette décision et il était bien placé pour la prendre.

[34] Qu'en est-il de la décision de M. Young de ne pas réaffecter M. Durrer au sein du nouveau service de la Conformité? M. Young a affirmé dans son témoignage que M. Durrer ne répondait pas à ses exigences pour occuper un poste au sein du nouveau modèle de la Conformité à la CIBC. En effet, M. Durrer a passé la plus grande partie de sa vie professionnelle à la CIBC à uvrer dans le domaine des services bancaires de détail. Il travaillait à la Conformité depuis moins de trois ans. M. Young a rencontré M. Durrer à quelques reprises. Il a examiné son dossier personnel et il a discuté avec ses gestionnaires et ses utilisateurs d'entreprise. M. Young a estimé que le plaignant [traduction] ne comprenait pas les questions de conformité. M. Young a déclaré ce qui suit : [traduction] Il était plutôt un gestionnaire de projet et il ne travaillait pas à la Conformité depuis longtemps. M. Young a également affirmé que les utilisateurs d'entreprise avec lesquels il avait discuté estimaient que M. Durrer ne possédait pas les compétences qui ajoutent de la valeur à la Conformité. En termes simples, il ne possédait pas l'expérience en matière de droit, de comptabilité et de réglementation que les autres personnes possédaient et que M. Young recherchait. En ce qui concerne le fait que M. Durrer ne possédait qu'une douzième année d'études, M. Young a affirmé qu'il aurait gardé ce dernier à l'emploi de la CIBC, malgré qu'il ne possédait pas d'études postsecondaires, s'il avait possédé l'expérience et la compréhension exigées quant aux questions de conformité. M. Durrer a lui-même avoué qu'il était plutôt un généraliste uvrant dans une industrie qui devenait de plus en plus spécialisée, comme c'était notamment le cas à la Conformité.

G. L'âge de M. Durrer en tant qu'élément d'appréciation

[35] On a demandé à M. Young s'il savait quel âge avait M. Durrer. Après tout, ce renseignement figurait dans le dossier personnel de M. Durrer qu'il avait examiné. Compte tenu des diverses réponses de M. Durrer aux nombreuses questions posées en interrogatoire principal, en contre-interrogatoire et en réinterrogatoire, je conclus que M. Young aurait pu prendre connaissance de la date de naissance de M. Durrer, mais qu'il est certain qu'il n'a pas cherché à le faire. Qu'il ait oui ou non pris connaissance de la date de naissance de M. Durrer n'est pas une question importante. Après tout, juste en faisant le calcul mathématique (en 1999, M. Durrer travaillait depuis plus de 28 ans à la CIBC et on savait qu'il n'avait pas pu commencer à travailler bien longtemps avant l'âge de 18 ans), il savait que M. Durrer devait être dans la quarantaine avancée, à tout le moins. M. Young savait qu'il n'avait pas affaire à un employé âgé de 25 ou 35 ans.

[36] Fait plus important, l'âge est-il entré en ligne de compte dans la décision de M. Young d'éliminer le poste de M. Durrer et (ou) de ne pas le réaffecter au sein du service de la Conformité? Je ne crois pas. Je retiens le témoignage suivant de M. Young : [traduction] S'il avait possédé l'expérience, alors je l'aurais gardé 1 pour d'autres postes, mais il ne possédait pas l'expérience et je n'avais pas besoin du poste.

[37] M. Young a été interrogé, dans diverses parties de son interrogatoire principal, de son contre-interrogatoire et de son réinterrogatoire, quant à la question de l'âge. Comme il s'agit d'une question cruciale et qu'une certaine partie du témoignage que M. Young a rendu lors du premier interrogatoire était plutôt équivoque ou ambigu, je mentionne ci-dessous divers extraits de la transcription portant sur cette question :

[traduction]

L'interrogatoire principal (page 564 de la transcription)

M. GROSMAN : En évaluant M. Durrer et en prenant la décision d'éliminer son poste, avez-vous tenu compte, si tant soi peu, de son âge?

M. YOUNG : Non.

Le contre-interrogatoire (pages 588, 589, 594)

M. MORIN : [...] Au moment où il a reçu l'avis, M. Durrer venait tout juste d'avoir 48 ans. Vous souvenez-vous de cela monsieur?

M. YOUNG : Dans le contexte de son licenciement, oui.

M. MORIN : D'accord.

M. YOUNG : Sur le plan de l'âge, non, parce que cela n'avait pas vraiment d'importance pour moi. Ce que je veux dire par là, c'est que, comme je viens des États-Unis, l'âge n'était pas vraiment quelque chose dont je devais tenir compte. Mais, vous savez, selon - vous fondez vos décisions sur le rendement et le besoin.

[...] [...]

M. MORIN : En examinant son dossier personnel, vous avez dû regarder sa date de naissance?

M. YOUNG : J'aurais certainement pu.

M. MORIN : D'accord.

M. YOUNG : J'imagine que je veux simplement souligner qu'il ne s'agissait pas d'un facteur crucial.

[...] [...]

M. MORIN : Donc, en examinant son dossier personnel, dans le cadre de l'examen global de ses antécédents, vous saviez quelle était sa date de naissance et vous saviez quel âge il avait?

M. YOUNG : J'aurais certainement pu le savoir. Disons que je ne cherchais pas à le savoir.

Le réinterrogatoire (pages 640 à 642)

M. GROSMAN : [...] Vous souvenez-vous d'avoir vu la date de naissance de M. Durrer?

M. YOUNG : Non, je peux peut-être vous donner quelques explications?

M. MORIN : 2 Bien sûr, pas de problème.

M. YOUNG : Comme je viens des États-Unis, les dates de naissance sont moins pertinentes en ce qui a trait - moins pertinentes en ce qui a trait aux critères. Il s'agit tout simplement d'un environnement différent, donc comme je viens de là, ce n'était pas quelque chose que je cherchais vraiment à savoir.

M. GROSMAN : Que voulez-vous dire par moins pertinentes?

M. YOUNG : C'est - la discrimination fondée sur l'âge est - bon, premièrement, il y a beaucoup de poursuites aux États-Unis. Deuxièmement, en raison de cela, demander l'âge ou tenir compte de l'âge constitue d'une manière générale un signal d'alerte aux États-Unis en ce qui a trait à la gestion des personnes.

C'est quelque chose auquel on doit être sensibilisé. Donc, comme je suis venu au Canada pour restructurer le service et pour tout simplement gérer des personnes et compte tenu de l'expérience que je possédais en gestion même jusqu'à ce moment, je savais que les dates de naissance et l'âge étaient moins pertinentes en ce qui avait trait à la direction du service.

M. GROSMAN : D'accord. Donc, lorsque vous évaluez M. Durrer, l'âge est-il un facteur qui entre un tant soit peu en ligne de compte?

M. YOUNG : Il s'agit d'un facteur, mais pas d'un facteur déterminant. C'est - vous savez, quand on parlait de l'expérience, du rendement, de la valeur ajoutée, etc.

LE PRÉSIDENT : Excusez-moi, l'âge est un facteur, mais pas un facteur déterminant. Un facteur en ce qui a trait à quoi?

M. YOUNG : Il ne s'agit que du rendement, quand il est question d'un agent de conformité ou d'un autre employé, l'âge, -- particulièrement en ce qui a trait à la restructuration, est là, mais ce que je tente d'expliquer, c'est qu'il ne s'agit pas d'un facteur déterminant pour ce qui est de décider si on doit oui ou non garder des employés.

LE PRÉSIDENT : Excusez-moi, une seconde. Il ne s'agit pas d'un facteur déterminant pour ce qui est de savoir si on doit oui ou non garder des employés, mais il s'agit d'un facteur pour ce qui est de savoir si vous allez oui ou non garder des employés, n'est-ce pas?

M. YOUNG : Oui, et la raison pour laquelle je dis cela, comme je viens des États-Unis, en tant que gestionnaire, un gestionnaire devrait voir à ne prendre aucune décision en fonction de l'âge.

[38] De prime abord, on pourrait interpréter certaines des déclarations de M. Young comme équivalant à une admission de responsabilité qu'il a tenu compte de l'âge, même si ce ne fut que dans une faible mesure, pour décider de ne pas garder M. Durrer au service de la Conformité. Toutefois, lorsque l'on examine l'ensemble de son témoignage et de ses actions concernant la réorganisation de la Conformité, c'est un tableau différent qui apparaît. Je conclus que l'âge ne fut pas un facteur utilisé par M. Young au détriment du plaignant. Je tire cette conclusion pour les raisons suivantes :

  1. La preuve objective du tableau sur lequel figuraient les noms des employés, classés selon l'âge, dont les postes avaient été abolis/conservés donne à penser que l'âge de M. Durrer n'a pas été utilisé à son détriment;
  2. Dans les nombreux échanges susmentionnés, M. Young répète les déclarations que la prise en compte de l'âge constitue de la discrimination et que l'on ne doit pas en tenir compte - c'est un signal d'alarme. Il nie également catégoriquement, en interrogatoire principal, qu'il a tenu compte de l'âge dans le cadre de sa décision d'abolir le poste de M. Durrer;
  3. Personne n'a jamais demandé à M. Young comment l'âge fut utilisé comme élément de considération dans le cas de M. Durrer et s'il a été pris en compte, l'a-t-il été à l'avantage ou au détriment de M. Durrer ou l'âge a-t-il été complètement ignoré - un facteur neutre. Hypothétiquement, si M. Young a tenu compte de l'âge de M. Young comme facteur positif (c'est-à-dire qu'on a tenu compte des avantages dont jouissait le participant comme l'expérience, la maturité, la connaissance de la Banque, etc.), mais que les facteurs négatifs non fondés sur l'âge ont eu plus de poids, cela ne constitue pas un traitement défavorable à l'égard de M. Durrer en raison de son âge au sens de l'alinéa 7b) de la LCDP;
  4. J'interprète les commentaires c'est là et il ne s'agit pas d'un facteur déterminant comme signifiant qu'il est impossible de ne pas ne pas tenir compte de l'âge - il figure dans le dossier personnel d'un employé, il est possible de faire le calcul : si un gestionnaire connaît le nombre d'années de service d'un employé et qu'il discute avec lui, il peut dire si l'employé est âgé, par exemple, de 25 ou de 55 ans. L'âge est une caractéristique évidente. Cela n'est pas comme affirmer, par exemple, que l'on s'est servi de l'âge d'un employé au détriment de ce dernier, que l'on a agi en fonction de préjugés défavorables, stéréotypés, fondés sur l'âge et que cela a eu pour conséquence que l'employé s'est vu refuser un emploi;
  5. M. Young, qui occupait à la Conformité un poste supérieur dans le cadre duquel il a eu à traiter des questions juridiques et réglementaires complexes et qui a travaillé dans un environnement litigieux comme celui des États-Unis, est sensibilisé (comme il a déclaré dans son témoignage) à l'interdiction juridique voulant qu'un employeur n'a pas le droit de licencier une personne en raison de son âge.

[39] Je tiens à souligner que M. Young est un témoin crédible. Il a rendu un témoignage sincère.

H. Le 19 octobre 1999 : l'avis de cessation d'emploi remis à M. Durrer

[40] Le 19 octobre 1999, M. Young et Mme Cindy Nicholls, conseillère principale en ressources humaines, ont rencontré M. Durrer. Ils lui ont dit que son poste serait aboli en janvier 2000. Ils lui ont remis une lettre dans laquelle il lui était offert un préavis de cessation d'emploi de 12 semaines, une indemnité de départ comportant le salaire de 24 mois et d'autres mesures de soutien, notamment de la réadaptation professionnelle et du counseling, et ce, en reconnaissance du fait qu'il avait travaillé plus de 28 ans à la CIBC et en conformité avec le PSR et la PME. Le PSR prévoyait que : [traduction] Le délai de préavis, qu'elle soit utilisée comme préavis de licenciement ou considérée comme rémunération en remplacement est accordée en plus des indemnités de départ applicables. Les employés pouvaient utiliser le délai de préavis de licenciement pour trouver une affectation temporaire ou un poste permanent au sein de la CIBC.

[41] Dans le cadre des avantages prévus dans l'indemnité de départ, M. Durrer a rencontré le même jour un agent en replacement afin de se préparer à chercher un autre emploi au sein de la CIBC ou à l'extérieur de la CIBC. La Banque lui a également fourni un soutien de recherche d'emploi à l'interne dispensé par Mme Nicholls qui l'a rencontré et (ou) qui a communiqué avec lui (en personne, par téléphone ou par courriel) à de nombreuses reprises au cours des deux années et demie qui ont suivi afin de discuter de ses projets de réemploi et de l'aider quant à ceux-ci.

I. L'emploi de M. Durrer après le 19 octobre 1999 : les trois affectations temporaires

[42] Pendant les 28 mois qui ont suivi, M. Durrer a prorogé de 12 semaines son délai de préavis de licenciement grâce à des affectations de projet. Je conclus que cela contrevenait à l'objectif de la PME, du PSR ainsi que du PST. Je retiens la preuve présentée par Mme Nicholls qu'aucun autre employé ne s'est prévalu de ces programmes, grâce aux postes temporaires, aussi longtemps que M. Durrer.

[43] Je conclus également que le libellé du PST, bien qu'il ne soit pas tout à fait clair, étaye la conclusion raisonnable que les employés visés par le PST ne pouvait se prévaloir pendant longtemps de ce programme. La section intitulée Affectations temporaires qui figure à la page 12 du Guide à l'intention de l'employé visé par le PST est ainsi libellé :

[traduction]

Les affectations temporaires sont une façon pour les employés d'améliorer leurs capacités et de se positionner pour trouver un autre emploi au sein de la CIBC.

Comment les affectations temporaires fonctionnent-elles?

De façon générale, les affectations temporaires doivent durer moins de 12 mois.

Le délai de préavis continue de courir même si l'employé se voit accorder une affectation temporaire.

Si l'employé est en affectation temporaire lorsque le délai de préavis prend fin, l'emploi occupé par l'employé au sein de la CIBC prend fin et l'indemnité de départ est versée à la fin de l'affectation à moins que l'employé ne se trouve un autre poste avant ce moment.

L'employé aura la possibilité de continuer à chercher un poste permanent au sein de la CIBC pendant qu'il est en affectation temporaire.

COMMENTAIRE

Si l'employé trouve un autre emploi au sein de la CIBC pendant l'affectation temporaire, l'employé n'aura plus droit à l'indemnité de départ prévu au Programme.

[44] Je conclus que la CIBC utilise ci-haut le mot poste en référence à un poste permanent et utilise l'expression affectation temporaire en référence à un poste temporaire. Une interprétation raisonnable est que la Banque utilise également l'expression autre emploi en référence à un poste permanent. Par exemple, si on examine la première phrase ci-dessus (une façon pour les employés [...]), il serait illogique si l'expression autre emploi signifiait affectation temporaire. La phrase serait ainsi libellée : Les affectations temporaires sont une façon pour les employés d'améliorer leurs capacités et de se positionner pour trouver une affectation temporaire au sein de la CIBC. Bien qu'elle ne soit pas tout à fait claire, je suis plutôt enclin à croire que la phrase De façon générale, les affectations temporaires doivent durer moins de 12 mois signifiait que les employés ne devaient pas se prévaloir du PST pendant plus de 12 mois au total. Cela ne voulait pas dire que les employés qui se prévalaient du PST pouvaient prendre autant d'affectations temporaires qu'ils le désiraient, pourvu que chacune des affectations durait moins de 12 mois. Si l'on accepte la même interprétation (c'est-à-dire que la CIBC utilise l'expression poste en référence à un poste permanent), alors la troisième phrase susmentionnée donne à penser que si un employé est en affectation temporaire lorsque son délai de préavis prend fin, son emploi prendra fin sauf s'il trouve un poste permanent avant ce moment.

[45] La CIBC n'a fait part de ses réserves quant à cette pratique en ce qui avait trait à M. Durrer que lorsque celui-ci a soulevé la question pour la première fois auprès de Mme Nicholls, le 21 mars 2002, soit 28 mois après avoir reçu son avis de licenciement. Donc, bien qu'une interprétation plus raisonnable de la politique que celle qui figure dans le Guide à l'intention de l'employé visé par le PST est que les postes temporaires étaient un moyen de trouver un autre emploi permanent, je peux comprendre comment M. Durrer en est venu à croire qu'il avait le droit d'aller de poste temporaire en poste temporaire (bien qu'il cherchât également un poste permanent).

[46] Les trois postes temporaires occupés par M. Durrer furent les suivants :

  1. Leader de la mise en uvre des opérations, Gestion selon le rendement : du 4 janvier 2000 au 13 mai 2001. M. Durrer a été informé de cette possibilité d'emploi par Mme Nicholls et celle-ci l'a aidé à obtenir le poste;
  2. Leader des processus, Projet financier des opérations de base : du 16 mai 2001 au 31 janvier 2002;
  3. Projet de description des processus de centres bancaires : du 1er février 2002 au 29 mars 2002.

[47] La CIBC a accepté de laisser à M. Durrer les deux semaines qui lui restaient en vertu de son avis initial d'abolition de poste en 1999 dans lequel on lui accordait deux autres semaines pour trouver un autre emploi au sein de la CIBC. Sauf si M. Durrer trouvait un autre poste, sa date de licenciement serait finalement fixée au 12 avril 2002, ce qui fut son dernier jour d'emploi à la CIBC.

J. La réunion du 4 avril 2002 et la question de ne plus accorder d'affectations temporaires

[48] Le 4 avril 2002, Mme Nicholls a remis à M. Durrer sa lettre de cessation d'emploi définitive. Je retiens le témoignage de M. Durrer que ce fut là un moment très pénible pour lui. Après 31 années de service, tout indiquait que sa vie professionnelle à la CIBC venait de prendre fin.

[49] Dans son témoignage, M. Durrer a déclaré que c'est lors de cette réunion qu'il a appris pour la première fois que la CIBC ne prorogerait pas son emploi par le biais d'un quatrième poste temporaire, s'il en trouvait un. S'il ne trouvait aucun poste permanent à la CIBC, au plus tard le 12 avril 2002, son emploi prendrait fin. Compte tenu du témoignage de Mme Nicholls ainsi que de la preuve documentaire (c'est-à-dire les courriels), il ressort clairement que Mme Nicholls et ses collègues de Ressources humaines ont fait part, le 21 mars 2002, de leur mécontentement quant au fait que M. Durrer continuait d'aller de poste temporaire en poste temporaire et qu'il obtiendrait une indemnité de départ lorsqu'il n'aurait plus de poste. Mme Nicholls a-t-elle carrément refusé de songer à ce qu'un quatrième poste temporaire soit accordé? Comme nous le verrons plus loin, même si c'était le cas, si on fait abstraction que les actions de Mme Nicholls furent fondées sur l'âge, un refus général constituerait-il une violation de l'article 7 de la LCDP? Les notes que M. Durrer a prises à l'époque quant à la conversation qu'il a eue avec Mme Nicholls le 21 mars 2002 sont ainsi libellées :

[traduction]

3. Si j'obtenais une autre affectation temporaire de court terme, disons de 6 à 8 mois, les Ressources humaines donneraient-elles leur accord?

[Réponse de Mme Nicholls] Je ne sais pas. Je vais examiner cela. Je vais parler à Jackie Stewart. Je voulais parler à Lori Kennedy. On n'a pas voulu me dire quand elle me rappellerait.

[50] En contre-interrogatoire, M. Durrer a reconnu que, au cours de la conversation qu'il a eue le 21 mars avec Mme Nicholls, lorsqu'il a demandé à cette dernière si les Ressources humaines donneraient leur accord quant à une quatrième affectation de court terme s'il en trouvait une, Mme Nicholls a répondu ce qui suit : [traduction] Je vais examiner ça; nous allons y songer, oui. Je souligne que c'est M. Durrer qui a soulevé la question pour la première fois.

[51] La CIBC conteste l'affirmation de M. Durrer selon laquelle elle lui aurait dit, le 4 avril 2002, qu'elle n'envisageait plus proroger une autre fois son délai de préavis grâce à l'attribution d'un quatrième poste temporaire. Mme Nicholls a témoigné qu'elle voulait tout simplement dire que M. Durrer ne pouvait pas continuer à proroger indéfiniment son délai de préavis en prévoyant recevoir également l'indemnité de départ de 24 mois à la fin de ce délai. Elle a affirmé qu'elle ne voulait pas dire qu'il ne pouvait pas obtenir une quatrième affectation temporaire. Elle a déclaré que s'il en avait trouvé une, elle aurait demandé à son supérieur si cela posait un problème.

[52] Le courriel envoyé par Lori Kennedy (de Ressources humaines) à Mme Nicholls le 11 avril 2002 (le jour précédant le dernier jour de travail de M. Durrer à la CIBC) traite de la discussion que Mme Kennedy a eue avec M. Durrer. Il reprend l'opinion que les Ressources humaines ont adopté le point de vue qu'elles ne voyaient pas d'un bon il que M. Durrer obtienne un quatrième poste temporaire. Toutefois, Mme Kennedy mentionnait ce qui suit dans son courriel : [traduction] J'ai également offert de donner suite avec mon client de Risque afin de voir ce qu'il a et s'il ne pourrait pas l'aider présentement [...]. Cela peut donner l'impression que les Ressources humaines auraient consenti à proroger l'emploi de M. Durrer en lui accordant une quatrième affectation temporaire si une telle affectation avait été disponible. Mme Kennedy n'a pas été appelée à témoigner. Je ne sais pas, par exemple, si Mme Kennedy a offert son aide pour tenter de trouver un quatrième poste temporaire auprès de son client de Risque ou de tenter de trouver un poste à contrat.

[53] Après avoir examiné le témoignage de Mme Nicholls et celui de M. Durrer ainsi qu'après avoir examiné les courriels qui ont été échangés au cours de cette période d'un mois, j'arrive à la conclusion que la CIBC a certainement donné l'impression qu'elle ne voyait pas d'un bon il que l'emploi de M. Durrer soit prorogé si celui-ci trouvait un quatrième poste temporaire, mais la CIBC n'a pas complètement refusé d'envisager cette possibilité. Je conclus également que la CIBC n'a pas empêché M. Durrer de chercher un autre poste temporaire ou un poste permanent comme il l'a manifestement fait.

[54] En date du 12 avril 2002, M. Durrer n'avait pas trouvé de quatrième poste temporaire, ni de poste permanent, à la CIBC. Nous ne saurons jamais si la CIBC aurait permis à M. Durrer de demeurer à son emploi dans le cadre d'un quatrième poste temporaire. J'ajouterais également que même si la CIBC lui avait affirmé qu'il était inacceptable qu'il occupe un quatrième poste temporaire, M. Durrer a démontré par ses actes qu'il n'acceptait pas cela. Il a activement continué à chercher un poste temporaire ou permanent, comme il l'avait été depuis deux ans et demi. En contre-interrogatoire, M. Durrer a déclaré ce qui suit : [traduction] Après le 4 avril, j'ai principalement cherché un emploi permanent à temps plein. Je n'ai pas abandonné parce que je me suis dit que si je trouvais une affectation pour une période déterminée, cela serait pris en compte en raison de tout ce que j'avais fait pour la Banque au fil des ans.

K. La date de cessation d'emploi et la période qui a suivi la cessation d'emploi

[55] M. Durrer a reçu sa lettre de confirmation que sa relation avec la CIBC en tant qu'employé prendrait fin le 12 avril 2002. Il était âgé de 50 ans et demi. Le 1er mai 2002, la CIBC l'a réembauché, sur une base contractuelle, à titre d'analyste commercial (ailleurs qu'au service de la Conformité). Il a travaillé sur une base contractuelle du 5 juin 2002 au 21 février 2003.

[56] Le 23 juillet 2002, M. Durrer a déposé auprès de la Commission une plainte dans laquelle il alléguait que la CIBC avait fait preuve de discrimination à son endroit en refusant de continuer à l'employer en raison de son âge, et ce, en contravention de l'article 7 de la Loi canadienne sur les droits de la personne. En date du dernier jour de l'audience, le 22 novembre 2006, M. Durrer n'avait accepté aucune des indemnités de départ que lui avait offert la CIBC. Il a également déposé contre la CIBC, en Cour supérieure de justice, une action qui est le reflet de la présente plainte.

V. LE DROIT

[57] C'est le plaignant ou la Commission qui a la charge initiale d'établir une preuve prima facie de discrimination au sens de la LCDP : Commission ontarienne des droits de la personne c. Simpsons-Sears Ltd., [1985] 2 R.C.S. 536, paragraphe 28 (O'Malley). Une fois que cette preuve a été établie, il incombe à l'intimé de fournir une justification ou des explications quant à la pratique ou quant à l'acte discriminatoire. Une fois que l'intimé a fait cela, il incombe au plaignant ou à la Commission de démontrer que cette justification ou cette explication n'était qu'un prétexte quant à la pratique ou quant à l'acte discriminatoire : Basi c. La Compagnie des chemins de fer nationaux du Canada (no 1)(1988), 9 C.H.R.R. D/5029 (T.C.D.P.), paragraphe 38474.

[58] Le principe juridique suivant est pertinent en l'espèce : pour faire droit à une plainte, il n'est pas nécessaire que les considérations liées à la discrimination soient le seul motif de la conduite reprochée. Il suffit que la discrimination soit un des facteurs [si petit soit-il] qui ont motivé la décision de l'employeur (Morris c. Canada (Forces armées canadiennes)(2001), 42 C.H.R.R. D/443 (T.C.D.P.), paragraphe 69.

A. La définition de la discrimination

[59] Aucune définition du mot discrimination ne figure dans la LCDP. Le juge McIntrye a formulé une définition souvent citée dans une ancienne décision de la Cour suprême du Canada portant sur l'article 15 de la Charte canadienne des droits et libertés; Andrews c. Law Society of British Columbia, [1989] 1 R.C.S. 143, page 175 :

J'affirmerais alors que la discrimination peut se décrire comme une distinction, intentionnelle ou non, mais fondée sur des motifs relatifs à des caractéristiques personnelles d'un individu ou d'un groupe d'individus, qui a pour effet d'imposer à cet individu ou à ce groupe des fardeaux, des obligations ou des désavantages non imposés à d'autres ou d'empêcher ou de restreindre l'accès aux possibilités, aux bénéfices et aux avantages offerts à d'autres membres de la société.

B. L'âge en tant que motif de distinction illicite

[60] L'âge est l'un des motifs de distinction illicite mentionnés au paragraphe 3(1) de la LCDP. La LCDP prévoit diverses défenses, exceptions et justifications quant à ce qui serait autrement des pratiques discriminatoires fondées sur l'âge comme les questions concernant l'adhésion à des organisations syndicales, la retraite obligatoire, les assurances et les régimes de retraite (paragraphe 9(2), alinéas 15(1)b) à d). La LCDP prévoit également une exigence professionnelle justifié/motif justifiable fondé sur l'âge (alinéas 15(1)a) et 15(1)g). Certaines défenses/exceptions sont propres au motif de distinction illicite de l'âge. Ce qui suit sont des exemples d'introduction dans la loi par le législateur de certaines exceptions au principe général voulant que la discrimination fondée sur l'âge est illégale.

C. La disposition législative pertinente

[61] La plainte comporte des allégations selon lesquelles la CIBC aurait violé l'article suivant de la LCDP, lequel porte sur le motif de distinction illicite de l'âge :

7. Constitue un acte discriminatoire, s'il est fondé sur un motif de distinction illicite, le fait, par des moyens directs ou indirects :

a) de refuser d'employer ou de continuer d'employer un individu;

b) de le défavoriser en cours d'emploi.

VI. L'ANALYSE

A. La CIBC a-t-elle aboli le poste de M. Durrer en octobre 1999 en raison de son âge?

[62] Compte tenu des conclusions que j'ai déjà tirées quant à cette question, je conclus que la CIBC n'a pas aboli le poste de M. Durrer en octobre 1999 en raison de son âge. M. Young a aboli le poste de M. Durrer pour des raisons commerciales légitimes : le poste était superflu et n'était d'aucune utilité dans le nouveau modèle de service de la Conformité consolidé et unique. Personne n'a remplacé M. Durrer dans ce poste : il a été aboli dans le cadre de la restructuration. Le tableau figurant dans le présent document montre qu'il n'y avait aucune constante entre l'âge des gestionnaires à la Conformité dont les postes ont été abolis et l'âge de ceux dont les postes n'ont pas été abolis et qui ont été gardés à l'emploi de la CIBC.

[63] Le nouveau PDG de la CIBC a fait appel à M. Young et lui a confié le mandat de créer le service de la Conformité le plus efficace qui soit. M. Young possède les compétences pour s'acquitter de cette tâche. M. Durrer ne conteste pas cela. J'ajouterais que le Tribunal n'a pas comme mandat de mettre en doute le bien-fondé sur le plan commercial des décisions administratives de M. Young. Il doit plutôt déterminer si elles ont été entachées de discrimination.

[64] Le fait que la CIBC ait économisé de l'argent en abolissant le poste de M. Durrer ne rend pas l'acte discriminatoire au sens de la LCDP. Si c'était le cas, alors les employeurs ne pourraient procéder à aucune abolition de poste qui se traduirait par des économies parce qu'un employé qui occupe un poste touché pourrait alléguer la discrimination fondée sur l'âge, peu importe son âge, c'est-à-dire que s'il est âgé de 25 ans, il pourrait prétendre avoir été victime de discrimination parce qu'il est jeune; s'il est âgé de 60 ans, il pourrait prétendre avoir fait l'objet d'un traitement défavorable parce qu'il est âgé. Les concepts de personne jeune et de personne âgée sont relatifs.

B. La CIBC a-t-elle décidé de ne pas affecter M. Durrer à un autre poste au sein du même service (Conformité) en raison de son âge?

[65] Compte tenu de mes conclusions précédentes, je conclus que la décision de M. Young de ne pas offrir un poste à M. Durrer dans le nouveau service de la Conformité n'a pas été prise, en tout ou en partie, parce que le plaignant était âgé de 48 ans. Je retiens son témoignage selon lequel on lui avait confié la difficile tâche de consolider, tout en en réduisant la taille, les trois services de la Conformité en un seul. M. Durrer ne possédait pas l'expérience en matière de conformité, ni les antécédents professionnels, ni la compréhension des questions de conformité que M. Young recherchait. Le tableau reproduit dans le présent document démontre, de façon objective, que des employés plus âgés que M. Durrer ont été gardés à l'emploi de la Banque (notamment un employé 11 ans plus âgé que M. Durrer) et que des employés moins âgés que M. Durrer ont été licenciés. On ne décèle aucune tendance selon laquelle les travailleurs plus âgés (en l'espèce, des employés qui avaient presque l'âge de M. Durer) ont été visés. En fait, l'âge n'a rien eu à voir avec les licenciements. Je retiens le témoignage suivant de M. Banks : [traduction] Le taux de licenciement en vertu du PST est uniforme quant aux employés dont l'âge se situe entre 31 et 52 ans. Rien n'indique qu'il y a eu sélection en fonction de l'âge dans cette fourchette d'âge.

[66] En ce qui concerne les extraits de la transcription du témoignage de M. Young reproduits plus haut dans les présents motifs, je fais les observations et je tire les conclusions suivantes. J'ai examiné attentivement le témoignage intégral de M. Young ainsi que la preuve documentaire présentée. Selon moi, M. Young n'a pas affirmé qu'il avait utilisé l'âge de M. Young au détriment de ce dernier lorsqu'il a décidé s'il continuerait à l'employer au service de la Conformité. En effet, on n'a jamais demandé à M. Young si l'âge avait été un facteur dont il avait tenu compte. M. Young a-t-il utilisé ce facteur à l'avantage de M. Durrer, à son détriment ou l'a-t-il utilisé de façon neutre. Évidemment, soit que M. Young connaissait l'âge exact de M. Durrer ou soit qu'il connaissait son âge approximatif. M. Young a affirmé ce qui suit : [traduction] C'est là. Il savait quel âge avait M. Durrer de la même manière qu'il savait à quel sexe appartenait M. Durrer. Cela ne veut pas dire que, en ne lui accordant pas un poste dans le nouveau service de la Conformité, il a puni M. Durrer parce que celui-ci avait 48 ans. En d'autres mots, M. Young n'a pas défavorisé M. Durrer en raison de son âge lorsqu'il a décidé de ne pas le réaffecter dans le nouveau service de la Conformité. M. Durrer n'a pas été retenu au service de la Banque parce qu'il ne possédait pas les qualifications recherchées par M. Young par rapport aux autres employés qui travaillaient dans les trois services de la Conformité sous examen.

[67] Conclure autrement et juger que la CIBC aurait dû garder M. Durrer à son emploi au sein du nouveau service de la Conformité parce que celui-ci était âgé de 48 ans, et ce, malgré qu'il ne possédât pas les qualifications recherchées, aurait des conséquences inquiétantes. Cela signifierait que l'âge d'un employé (peu importe la fourchette d'âge) est plus important que son expérience, son instruction, sa valeur ajoutée, etc. Essentiellement, c'est l'âge de l'employé qui est le facteur décisif ou le facteur crucial et non pas ses qualifications.

C. La CIBC a-t-elle fait obstacle aux tentatives de M. Durrer d'obtenir une réaffectation au sein de la CIBC, et ce, en raison de son âge?

[68] Il s'agit du point crucial de la cause de M. Durrer : en ne lui accordant pas une quatrième affectation temporaire et en fixant de façon définitive sa date de cessation d'emploi, la CIBC a empêché M. Durrer d'atteindre l'âge de 53 ans, d'où il pouvait faire le pont vers la retraite anticipée. Cela l'a empêché d'atteindre son objectif, c'est-à-dire obtenir une pension immédiate, non réduite. Tout au long du témoignage de M. Durrer ainsi que dans les lettres qu'il a envoyées avant son renvoi à la Commission, cette question a constitué le point central de la préoccupation de M. Durrer quant à la manière selon laquelle la CIBC l'avait traité. Dans son témoignage, M. Durrer a affirmé ce qui suit : [traduction] Pourquoi ne pouvaient-ils pas faire une exception pour moi? Il y avait beaucoup de travail. Il a également tenu des propos semblables dans d'autres parties de son témoignage. Il a même affirmé dans son témoignage que la Banque avait fait faire le pont à d'autres personnes qui ne répondaient pas aux critères de la PME, du PSR et du PST quant à la retraite anticipée (c'est-à-dire que le poste de l'employé était aboli et celui-ci n'avait pas 55 ans, ni entre 53 et 55 ans et ne bénéficiait pas d'une indemnité de départ suffisante pour qu'on lui fasse faire le pont jusqu'à l'âge de 55 ans). À l'audience, la CIBC a nié avoir fait cela. M. Durrer n'a présentée aucune preuve probante selon laquelle la CIBC aurait fait faire le pont à d'autres personnes qui ne rencontraient pas les critères d'admissibilité.

[69] Le plaignant déclare que divers courriels émis en 2002 par Mme Nicholls ainsi que par d'autres personnes travaillant aux Ressources humaines illustrent que la CIBC nuisait à ses tentatives de trouver un autre travail. Selon mes conclusions de fait antérieures, j'estime que ce n'est pas le cas. Au contraire, je conclus que la CIBC a apporté son aide à M. Durrer dès que celui-ci a été avisé, en octobre 1999, que son poste était aboli. La CIBC lui a offert une indemnité de départ très généreuse, laquelle, en date de la dernière journée d'audience, n'avait pas fait l'objet d'une acceptation de sa part. En vertu de la PME, du PSR et du PST les travailleurs âgés de 45 ans et plus recevaient une prime. M. Durrer s'est vu offrir l'indemnité maximum de 24 mois. La CIBC lui a accordé du counseling et de la formation en réadaptation professionnelle. Mme Nicholls a rencontré M. Durrer et lui a parlé dès le début. En effet, c'est à la suite de sa suggestion et de son aide que M. Durrer a obtenu sa première affectation temporaire. Je retiens également le témoignage de Mme Nicholls selon lequel elle a rencontré à plusieurs reprises d'autres membres du personnel des Ressources humaines de la CIBC et qu'ils ont discuté ensemble des filons qu'ils pourraient trouver pour M. Durrer.

[70] De plus, la CIBC a permis à M. Durrer ainsi qu'à d'autres personnes qui se trouvaient dans la même situation que lui de continuer à rechercher un emploi permanent au sein de la CIBC, ou même un emploi temporaire, dans le but de trouver un travail permanent à la CIBC. M. Durrer avait accès au système interne informatisé d'affichage des postes de la CIBC. En effet, en vertu de la PME, du PSR et du PST, les employés déplacés comme M. Durrer ont fait l'objet d'une attention plus grande que celle dont ont fait l'objet les autres employés qui appliquaient pour les mêmes postes, mais qui ne bénéficiaient pas de la PME, du PSR ou du PST. Les employés comme M. Durrer devaient déclarer leur identité dans leur demande et s'ils possédaient les mêmes qualifications que les demandeurs qui ne faisaient pas partie du PST, ce sont eux qui obtenaient le poste. Le journal détaillé de M. Durrer fait état qu'il a appliqué sur de nombreux postes (surtout des postes temporaires). En effet, M. Durrer a occupé trois postes temporaires successifs entre janvier 2000 et avril 2002, soit près de deux ans et demi après qu'il eut reçu son préavis de cessation d'emploi. Durant tout ce temps, M. Durrer a accumulé des prestations de retraite ainsi que d'autres avantages. Il a également été réembauché par la CIBC en juin 2002 en vertu d'un contrat de 9 mois. En termes simples, je conclus que la CIBC a traité M. Durrer avec respect, et ce, durant ce qui, sans aucun doute, fut une période difficile pour lui. En effet, le plaignant, dans certains de ses courriels qui ont été déposés en preuve, remercie les gestionnaires et le personnel de la CIBC de l'avoir aidé.

[71] Selon l'exposé conjoint des faits, M. Durrer a occupé trois postes temporaires sur une période de 28 mois. Il s'agit d'une preuve concluante en soi que la CIBC n'a pas nuit à ses tentatives de trouver un emploi permanent ou temporaire en raison de son âge. En effet, pour autant que nous sachions, l'âge de M. Durrer et tous les avantages qui en découlent (l'expérience, la maturité, etc.) ont pu contribuer au fait qu'il a obtenu un, deux ou trois des postes temporaires.

[72] M. Durrer a utilisé le mot conspiration dans son témoignage ainsi que dans une lettre qu'il a envoyée à la Commission afin de décrire les actes de la CIBC visant à l'empêcher de trouver un autre emploi dans le but de lui permettre d'atteindre l'âge d'où il pouvait faire le pont vers la retraite anticipée. Son avocat a fait preuve de plus de retenue. Il a affirmé que les actes de la CIBC n'avaient pas constitué une conspiration et qu'ils n'avaient pas été posés [traduction] délibérément ou intentionnellement, mais [avaient reflété] une indifférence délibérée, une négligence absolue et [étaient] honteux. Selon moi, les actes de la CIBC ne peuvent être qualifiés de la sorte et n'avaient rien à voir avec l'âge de M. Durrer.

[73] Comme il a été mentionné dans la partie traitant des conclusions de fait, on ne saura jamais si la CIBC aurait, en bout de ligne, permis à M. Durrer de se prévaloir d'une quatrième (ou d'une cinquième ou d'une sixième, si nécessaire) affectation temporaire afin d'atteindre l'âge de 53 ans d'où il aurait pu faire le pont vers la retraite anticipée. Selon ma conclusion antérieure, je crois que la CIBC avait songé à permettre à M. Durrer de se prévaloir d'une quatrième affectation temporaire. La preuve indique clairement que, en date du 12 avril 2002, date d'entrée en vigueur de la cessation d'emploi (et même lors de la réunion du 4 avril au cours de laquelle M. Durrer a affirmé avoir appris pour la première fois que la CIBC ne lui permettrait pas de se prévaloir d'un quatrième poste temporaire), M. Durrer n'avait obtenu, pas même provisoirement, aucun poste temporaire ou permanent à la CIBC.

[74] Même si j'avais conclu que la CIBC avait refusé de songer à accorder un quatrième poste temporaire à M. Durrer, celui-ci ne m'a pas convaincu que ce refus était lié à son âge, en contravention de l'article 7 de la LCDP. Et si M. Durrer avait obtenu un poste permanent à cette époque, il n'aurait plus été admissible au PST et, par conséquent, il n'aurait pas eu droit à l'indemnité de départ ni à la dispense de la réduction de la pension de la retraite anticipée, les deux avantages qu'il voulait obtenir.

(i) Soustraction aux obligations découlant du régime de retraite

[75] Dans son exposé des précisions, le plaignant plaide ce qui suit : [traduction] La CIBC a licencié M. Durrer à l'âge de 50 ans et demi [le 12 avril 2002] dans le but d'enlever à M. Durrer son droit à la pension et, ainsi, pouvoir se soustraire à ses obligations découlant du régime de retraite.

[76] J'estime que cette allégation est non fondée. Premièrement, M. Durrer, en date du 12 avril 2002, n'a perdu aucun droit à la pension, ni aucun avantage prévu dans le régime de retraite de la CIBC. Ces droits et avantages sont demeurés intacts. M. Durrer n'était tout simplement pas admissible à la dispense de la réduction de la pension. En date d'aujourd'hui, à l'âge de 55 ans, il peut commencer à recevoir une pension réduite sur une base actuarielle ou attendre jusqu'à l'âge de 65 ans et recevoir une pleine pension non réduite. Deuxièmement, si son allégation est que la Banque faisait obstacle à son droit à une pension future et tentait de se soustraire à ses obligations découlant du régime de retraite en l'empêchant de travailler pendant encore deux ans et demi de telle sorte qu'il ne puisse pas atteindre l'âge de 53 ans d'où il pouvait faire le pont vers la retraite anticipée, je ne souscris toujours pas à cette allégation. Si la CIBC désirait vraiment se soustraire à d'autres obligations découlant du régime de retraite envers M. Durrer, elle l'aurait congédié sans motif en octobre 1999 et ne lui aurait pas permis de continuer à travailler à la Banque dans le cadre d'affectations temporaires pendant les deux ans et demi qui ont suivi. Durant ce temps, M. Durrer a accumulé des prestations de retraite supplémentaires. Comme l'avocat de la CIBC l'a déclaré, si c'était ce que son client voulait, c'est le contraire qui s'est produit, c'est-à-dire que l'obligation de la Banque envers M. Durrer au titre des prestations de retraite a augmenté. Cela ne fait pas beaucoup de sens sur le plan des affaires si l'objectif de la Banque était de se débarrasser de M. Durrer afin d'économiser de l'argent.

[77] Je retiens également la déclaration suivante faite par M. Banks: [traduction] L'incidence du licenciement d'employés par la CIBC, en vertu du PST, sur ses obligations découlant du régime de retraite, a été négligeable. Par conséquent, l'incidence de la pension d'un seul employé (M. Durrer) sur les obligations de la CIBC découlant du régime de retraite aurait été négligeable.

VII. CONCLUSION

[78] Il ne fait aucun doute que ce fut une période triste et pénible pour M. Dan Durrer. Il a passé toute sa vie professionnelle à la CIBC. Au dire de tous, il était un employé qui travaillait très fort et qui avait du succès. Toutefois, pour les motifs qui précèdent, son âge n'a rien eu à voir avec la cessation de son emploi à la CIBC. Par conséquent, la plainte est rejetée.

Matthew D. Garfield

OTTAWA (Ontario)
Le 30 mars 2007

1 Bien que le mot garder figure dans la transcription, je crois que le témoin a dit songer à le garder.

2 Bien que M. Morin figure dans la transcription, c'est probablement M. Grosman qui a fait le commentaire.

PARTIES AU DOSSIER

DOSSIER DU TRIBUNAL :

T1122/0406

INTITULÉ DE LA CAUSE :

Dan Durrer c. Banque Canadienne Impériale de Commerce

DATE ET LIEU DE L'AUDIENCE :

Les 14 au 17 novembre 2006

Les 20 au 22 novembre 2006

Toronto (Ontario)

DATE DE LA DÉCISION DU TRIBUNAL :

Le 30 mars 2007

ONT COMPARU :

David Morin

Pour le plaignant

Aucun représentant

Pour la Commission canadienne des droits de la personne

Norman Grosman / Mark Fletcher

Pour l'intimée

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