Tribunal canadien des droits de la personne

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TRIBUNAL CANADIEN DES DROITS DE LA PERSONNE CANADIAN HUMAN RIGHTS TRIBUNAL

RICHARD WARMAN

le plaignant

- et -

COMMISSION CANADIENNE DES DROITS DE LA PERSONNE

la Commission

- et -

TERRY TREMAINE

l'intimé

MOTIFS DE DÉCISION

2007 TCDP 2
2007/02/02

MEMBRE INSTRUCTEUR : Michel Doucet

[TRADUCTION]

I. INTRODUCTION

II. QUESTIONS PRÉLIMINAIRES

A. Requête de la Commission en exclusion du représentant de l'intimé

(i) Faits entourant la requête

(ii) Les points soulevés dans la présente requête préliminaire

(iii) Analyse

a) Le Tribunal a-t-il compétence pour interdire à une personne de comparaître devant lui en tant que représentant d'une partie?

b) Le Tribunal devrait-il exercer son pouvoir discrétionnaire et interdire à M. Fromm de comparaître devant lui?

B. La preuve postérieure au renvoi devant le Tribunal

III. LES FAITS SE RAPPORTANT À LA PLAINTE

IV. LA PLAINTE DÉPOSÉE EN VERTU DE L'ARTICLE 13

A. INTRODUCTION : Propagande haineuse et liberté d'expression

B. L'objet général du paragraphe 13(1) de la Loi

C. M. Tremaine a-t-il, de façon répétée, communiqué ou fait communiquer les messages trouvés sur les divers sites Web en cause?

D. Ces messages ont-ils été communiqués, en totalité ou en partie, par l'entremise d'une entreprise de télécommunications relevant de la compétence du Parlement?

E. Le sujet des messages est-il susceptible d'exposer à la haine ou au mépris des personnes appartenant à un groupe identifiable sur la base d'un motif de distinction illicite?

F. Conclusion sur la plainte se rapportant au paragraphe 13(1)

G. Redressements

(i) Ordonnance de cesser et de s'abstenir

(ii) Indemnité selon l'alinéa 54(1)b) de la Loi

(iii) Ordonnance imposant une sanction pécuniaire selon l'alinéa 54(1)c)

V. ORDONNANCE

I. INTRODUCTION

[1] Le 13 octobre 2004, Richard Warman (le plaignant) déposait, en vertu de l'article 13 de la Loi canadienne sur les droits de la personne (la Loi), auprès de la Commission canadienne des droits de la personne (la Commission), une plainte contre Terry Tremaine (l'intimé). Le plaignant allègue que l'intimé s'est livré à un acte discriminatoire fondé sur la religion, l'origine nationale ou ethnique, la race et la couleur, en recourant aux services d'une entreprise de télécommunication.

[2] La Commission a pleinement participé à l'instruction de la plainte et elle était représentée par un avocat. L'intimé a lui aussi participé à l'instruction.

II. QUESTIONS PRÉLIMINAIRES

A. Requête de la Commission en exclusion du représentant de l'intimé

[3] Le premier jour de l'audience, la Commission a déposé une requête en vue d'obtenir une ordonnance interdisant à M. Paul Fromm, pour une période d'au moins trois ans, de comparaître devant le Tribunal en tant que mandataire ou, subsidiairement, une ordonnance interdisant à M. Fromm de comparaître dans la présente instance en tant que mandataire de l'intimé.

[4] La Commission a fait valoir que l'ordonnance devrait être accordée en raison d'observations faites par M. Fromm à l'égard du Tribunal canadien des droits de la personne (le Tribunal) et à l'égard du système judiciaire canadien. Selon la Commission, il s'agissait là d'observations méprisantes. La Commission a également fait valoir que la présence de M. Fromm devant le Tribunal allait compromettre l'intégrité, l'équité et le déroulement de l'audience. La Commission a ajouté que la participation de M. Fromm entraverait la procédure plus qu'elle ne la faciliterait.

(i) Faits entourant la requête

[5] Lors d'une conférence de gestion de cas, tenue le 10 mars 2006, l'intimé a informé le Tribunal qu'il se représenterait lui-même durant l'instance. Puis, le 16 mai 2006, dans ses précisions écrites, il a demandé l'autorisation de se faire représenter par Paul Fromm. Il a aussi demandé qu'ils soient tous deux autorisés à contre-interroger le plaignant ainsi que les témoins de la Commission et du plaignant.

[6] La Commission s'est opposée à cette requête, en alléguant divers motifs. Elle a évoqué le fait que le plaignant et l'intimé sont actuellement parties à un procès civil. Elle a aussi évoqué divers articles affichés sur Internet par M. Fromm, dans lesquels il critiquait sévèrement le Tribunal, ses membres, les membres de la magistrature et la Commission.

[7] Selon la preuve produite par la Commission, laquelle n'a pas été contestée, M. Fromm a tenu des propos méprisants à l'endroit du système judiciaire canadien, du Tribunal canadien des droits de la personne, des membres du Tribunal, ainsi qu'à l'endroit de la Commission. Il a décrit le Tribunal comme étant [traduction] un tribunal bidon à la soviétique et que ses décisions relevaient de la [traduction] démence stalinienne. Il a dit aussi que les décisions rendues par le Tribunal dans les affaires de propagande haineuse mettaient le Canada sur le chemin d'une république bananière du tiers monde.

[8] M. Fromm a déjà représenté d'autres intimés dans d'autres affaires devant le Tribunal.

(ii) Les points soulevés dans la présente requête préliminaire

[9] Les points soulevés dans la présente requête préliminaire sont les suivants :

Le Tribunal a-t-il compétence pour interdire à une personne de comparaître devant lui en tant que représentant d'une partie?

Le Tribunal devrait-il exercer son pouvoir discrétionnaire et interdire à M. Fromm de comparaître devant lui?

Le Tribunal devrait-il exercer son pouvoir discrétionnaire et rendre une ordonnance générale interdisant à M. Fromm, pour une période de trois ans, de comparaître comme mandataire dans toutes les audiences du Tribunal?

(iii) Analyse

a) Le Tribunal a-t-il compétence pour interdire à une personne de comparaître devant lui en tant que représentant d'une partie?

[10] À l'appui de sa position, la Commission s'est référée à deux précédents, d'abord un arrêt de la Cour d'appel du Nouveau-Brunswick, Thomas c. Association des infirmières et infirmiers auxiliaires immatriculés du Nouveau-Brunswick, (2003), 230 D.L.R. (4th) 337, puis la décision rendue par le Tribunal dans l'affaire Filgueira c. Garfield Container Transport Inc., [2005] C.H.R.D. n° 31 (QL).

[11] Dans l'arrêt Thomas, la Cour d'appel du Nouveau-Brunswick écrivait ce qui suit, au paragraphe 10 :

[TRADUCTION]

Comme je l'ai dit au départ, la règle générale veut que les parties qui comparaissent devant des tribunaux d'arbitrage aient le droit d'être représentées par des mandataires de leur choix. Toutefois, les tribunaux gardent le pouvoir discrétionnaire résiduel de déroger à ce droit général, pourvu qu'ils exercent ce pouvoir à bon droit. C'est parce que les tribunaux sont les maîtres de leur procédure qu'ils gardent le droit de veto sur le choix d'un conseiller par une partie. C'est pourquoi une partie à une instance d'un tribunal administratif n'a pas le droit absolu d'être représentée par une personne de son choix, à moins que la loi habilitante ne prévoie le contraire.

[12] Dans la décision Filgueira, le Tribunal a suivi l'arrêt de la Cour d'appel du Nouveau-Brunswick, ajoutant que, dans les cas où des questions juridiques complexes sont soulevées, la participation d'un profane comme représentant ne peut qu'embrouiller davantage les choses.

[13] Le paragraphe 50(1) de la Loi prévoit ce qui suit :

50. (1) Le membre instructeur, après avis conforme à la Commission, aux parties et, à son appréciation, à tout intéressé, instruit la plainte pour laquelle il a été désigné; il donne à ceux ci la possibilité pleine et entière de comparaître et de présenter, en personne ou par l'intermédiaire d'un avocat, des éléments de preuve ainsi que leurs observations.

(Non souligné dans l'original.)

50. (1) After due notice to the Commission, the Complainant, the person against whom the complaint was made and, at the discretion of the member or panel conducting the inquiry, any other interested party, the member or panel shall inquire into the complaint and shall give all parties to whom notice has been given a full and ample opportunity, in person or through counsel, to appear at the inquiry, present evidence and make representations.

(The emphasis is mine.)

[14] L'article 48.9 de la Loi est lui aussi utile. Il prévoit notamment que l'instruction des plaintes se fait sans formalisme et de façon expéditive dans le respect des principes de justice naturelle et des règles de pratique. En règle générale, la représentation par des non-juristes s'accorde avec cet objet, qui est de faciliter l'accès au Tribunal et de limiter le formalisme. Cette disposition doit cependant être lue en même temps que l'article 50, si l'on veut savoir qui peut agir pour une partie dans une instance introduite devant le Tribunal.

[15] L'article 50, qui reconnaît le droit d'une partie d'être représentée par un avocat, élimine tout doute sur la question de savoir si une partie à une instance introduite devant le Tribunal a le droit d'avoir recours à l'assistance d'un avocat. Ce que la disposition ne nous dit pas, c'est si le droit à l'assistance d'un avocat exclut le droit d'être représenté par un non-juriste. La version française emploie, pour counsel, le mot avocat qui réfère sans équivoque à un juriste. Le mot avocat renforce et même restreint le sens ordinaire du mot anglais counsel, employé dans la version anglaise. Si l'on considère le mot employé dans la version française, on peut conclure que le mot counsel, dans la version anglaise, signifie en réalité lawyer.

[16] Cette conclusion ne signifie pas qu'un non-juriste n'est pas apte à comparaître comme représentant devant le Tribunal. Dans le jugement ontarien Re Men's Clothing Manufacturer's Association et al and Arthurs et al (1979), 26 O.R. (2d) 20 (H.C.J.), et encore une fois dans l'arrêt Thomas c. Association des infirmières et infirmiers auxiliaires immatriculés du Nouveau Brunswick, précité, les cours de justice ont reconnu qu'il existe en common law un droit d'être représenté par un mandataire, droit qui est tout à fait distinct du droit statutaire à l'assistance d'un avocat. Le fait que la Loi prévoit expressément la représentation par un avocat ne permet pas d'affirmer que le droit d'être représenté par un non-juriste n'existe pas. L'article 50 de la Loi ne doit pas être interprété comme une disposition restreignant ou empêchant une partie de se présenter à l'audience avec le représentant de son choix. Pour que soit respecté l'objet de l'article 48.9, les parties doivent être autorisées à se faire représenter par un non-juriste, quand bien même n'aurait il aucune formation ou qualification juridique. Je souscris aux propos tenus par le juge Robertson, de la Cour d'appel du Nouveau Brunswick, dans l'arrêt Thomas, lorsqu'il écrit, au paragraphe 19 de sa décision : En conséquence, les tribunaux hésitent généralement à interpréter des directives légales prévoyant la représentation par un conseiller comme excluant des personnes qui ne sont pas avocats.

[17] Tout comme l'article 50 de la Loi n'abolit pas le droit d'une partie d'être représentée par un non-avocat, aucune disposition de la Loi n'abolit non plus le droit du Tribunal d'exercer son pouvoir discrétionnaire et d'exclure les non-juristes. Suivant l'objet énoncé dans l'article 48.9, la participation d'un mandataire ou représentant doit s'accorder avec le bon fonctionnement du Tribunal et non être un obstacle. Il importe aussi de rappeler qu'un mandataire ne comparaît qu'avec l'autorisation du Tribunal.

[18] C'est l'approche qui a été adoptée par le Tribunal dans la décision Beaudet-Fortin c. Société canadienne des postes, 2004 TCDP 23. Dans cette affaire, le Tribunal a permis au plaignant d'être représenté par une personne qui n'était pas avocat. Le Tribunal a dit qu'il répugnait à refuser aux plaignants moins fortunés la possibilité d'être représentés par un non-juriste, dont les services seront généralement plus abordables. Le Tribunal a estimé qu'aucun préjudice ne serait causé à l'intimée s'il autorisait un non-juriste à représenter le plaignant et que cela ne nuirait pas à la bonne administration de la justice.

[19] Dans la décision Fry c. Ministère du Revenu national, une décision intérimaire, transcription, pages 23-25, en date du 9 mars 1993, le Tribunal a autorisé un avocat radié à représenter un plaignant. Le Tribunal a décidé qu'il limiterait la personne concernée à la présentation de la preuve que la Commission canadienne des droits de la personne ne présenterait pas, et au contre-interrogatoire des témoins. L'avocat radié ne fut pas autorisé à présenter des conclusions de fait ou de droit.

[20] Encore une fois, dans la décision Filgueira c. Garfield Container Transport Inc, [2005] C.H.R.D. n° 31, le Tribunal a accepté que le plaignant soit représenté par un mandataire. Il a ajouté que le plaignant avait l'obligation de convaincre le Tribunal, si celui-ci le jugeait nécessaire, que le mandataire était en mesure de faciliter la procédure.

[21] Il y a aussi d'autres exemples où le Tribunal a autorisé des non-juristes à représenter des parties. Dans la récente affaire Warman c. Harrison 2006 TCDP 30, M. Harrison, l'intimé, fut autorisé à être représenté par sa conjointe de fait, qui n'était pas avocate.

[22] En résumé, une personne qui comparaît devant le Tribunal a le droit d'être représentée par le mandataire de son choix. Mais ce droit n'est pas absolu. Le Tribunal conserve le pouvoir discrétionnaire résiduel de n'admettre comme représentants que les personnes qui, selon lui, favoriseront le processus décisionnel et non pas le contraire. Dans l'exercice de ce pouvoir discrétionnaire, le Tribunal est tenu de justifier sa décision. Le Tribunal devrait exclure les non-juristes lorsqu'il est convaincu que leur intervention risque de gêner plutôt que de faciliter le déroulement de l'audience (voir l'arrêt Thomas c. Association des infirmières et infirmiers auxiliaires immatriculés du Nouveau-Brunswick, précité, au paragraphe 25).

[23] La réponse à la première question est donc affirmative. Le Tribunal a compétence pour permettre ou interdire à une personne d'agir comme mandataire d'une partie.

b) Le Tribunal devrait-il exercer son pouvoir discrétionnaire et interdire à M. Fromm de comparaître devant lui?

[24] La Commission a mentionné trois raisons pour lesquelles le Tribunal devrait exercer son pouvoir discrétionnaire et interdire à M. Fromm de comparaître devant lui. D'abord, selon elle, M. Fromm avait manifestement fait preuve d'un manque flagrant de respect envers la loi. Deuxièmement, sa participation entraverait le processus décisionnel au lieu de le faciliter. Finalement, la Commission a évoqué la relation acrimonieuse existant entre M. Fromm et le plaignant, une relation qui crée un conflit d'intérêts et qui nuirait à la procédure du Tribunal.

[25] J'examinerai d'abord la seconde et la troisième raisons invoquées par la Commission. En ce qui concerne la troisième raison, même si je reconnais que la relation existante entre M. Fromm et le plaignant est acrimonieuse, je ne vois pas en quoi ce fait pourrait justifier l'exclusion de M. Fromm en tant que mandataire de l'intimé. Le Tribunal est tout à fait en mesure de composer avec les difficultés pouvant résulter de l'hostilité qui règne entre les parties ou entre leurs mandataires. Le Tribunal relève aussi que ni la Commission, ni le plaignant, n'ont expliqué exactement quel conflit d'intérêts il en résulterait, et pour qui.

[26] Quant au second point, celui de savoir si la participation de M. Fromm entraverait le déroulement de l'audience au lieu de le faciliter, aucune preuve n'a été produite à l'appui de cette affirmation. Le Tribunal ne peut pas rendre une décision en se fondant sur des allusions ou allégations qui ne sont pas étayées par des faits.

[27] Finalement, le dernier moyen invoqué par la Commission à l'appui de sa requête en exclusion de M. Fromm est plus convaincant, encore qu'il ne suffise pas à convaincre le Tribunal d'accorder l'ordonnance sollicitée. Il ne fait aucun doute, après examen de la preuve produite, que, dans bon nombre de ses écrits, M. Fromm a fait preuve d'un manque flagrant de respect pour le Tribunal et pour ses membres. Il a aussi, à maintes occasions, exprimé des opinions irrespectueuses envers la magistrature canadienne. Le Tribunal est d'avis que ce sont là des questions qu'une autre instance serait mieux à même d'étudier et, tant que M. Fromm se soumet à la procédure et à l'autorité du Tribunal et qu'il agit d'une manière respectueuse envers lui, il n'y a aucune raison de l'empêcher d'agir comme représentant dans la présente instance.

[28] La requête par laquelle la Commission a demandé au Tribunal d'exercer son pouvoir discrétionnaire et d'interdire à M. Fromm de comparaître devant lui dans la présente instance est rejetée.

[29] Il n'est donc pas nécessaire de statuer sur le troisième point dans lequel la Commission demande au Tribunal de rendre une ordonnance interdisant à M. Fromm de comparaître devant lui en tant que représentant pendant une période de trois ans. Le Tribunal voudrait faire une observation sur la procédure employée par la Commission pour présenter la présente requête. Elle n'a pas informé M. Fromm personnellement de son intention, alors que l'ordonnance sollicitée le toucherait directement. À elle seule, cette omission aurait suffi à entraîner le rejet de la requête ou l'ajournement de l'audience avec autorisation de faire procéder à la signification requise de la requête.

B. La preuve postérieure au renvoi devant le Tribunal

[30] Au cours de l'instance, l'intimé a protesté contre le fait que la preuve produite à l'audience se référait à des articles dont la plainte ne faisait pas expressément état. Le même point a été soulevé dans l'affaire Warman c. Winnicki, 2006 TCDP 20. Dans cette décision, l'intimé ne s'était pas opposé à ce que la Commission produise durant l'audience une preuve postérieure au renvoi de l'affaire devant le Tribunal, mais avait fait valoir dans ses conclusions finales que le Tribunal ne pouvait pas tenir compte de cette preuve car elle constituait pour l'essentiel le fondement d'une nouvelle plainte.

[31] Dans l'affaire Winnicki, le Tribunal a rejeté cet argument. D'abord, il a précisé qu'une requête en modification de la plainte déposée en vertu du paragraphe 13(1) avait été accordée sur la foi de la preuve produite après le renvoi. En jugeant qu'une modification de la plainte initiale était justifiée, le Tribunal décidait d'une manière concluante la question de savoir si les nouvelles allégations constituaient le fondement d'une nouvelle plainte, et il était donc impossible de prétendre que la preuve postérieure au renvoi et portant sur ces allégations ne pouvait être présentée qu'à l'appui d'une nouvelle plainte. En l'espèce, ni la Commission ni le plaignant n'ont déposé une requête en modification de la plainte.

[32] Même si aucune requête n'a été déposée ou accordée, le Tribunal est d'avis que la preuve postérieure au renvoi présentée en l'espèce pourrait être prise en compte. Cette preuve intéresse directement la question qui est soumise au Tribunal, celle de savoir si l'intimé s'adonnait à une violation continue du paragraphe 13(1) de la Loi. Même si le formulaire de plainte ne renferme pas expressément les mots et par la suite, comme c'était le cas dans l'affaire Warman c. Winnicki, précitée, et dans l'affaire LeBlanc c. Société canadienne des postes (1992), 18 CHRR D/57, il envisageait la possibilité que des preuves additionnelles soient produites. Dans sa plainte, le plaignant précise que les deux articles dont la plainte fait état constituaient des exemples de la preuve qui accompagnerait la plainte. Dans la décision Leblanc, le Tribunal avait à juste titre estimé que, dans un tel cas, la question essentielle était de savoir s'il serait juste d'admettre la preuve. Si la preuve produite n'est pas inopinée et si l'intimé sait que cette preuve se rapporte à des faits tels que celui dont parle la plainte, alors il lui sera difficile de prétendre que l'admission de cette preuve postérieure au renvoi lui causera un préjudice.

[33] En l'espèce, il n'est pas établi que l'intimé a été pris par surprise en raison du dépôt de la preuve. La preuve lui a été communiquée avant l'audience, et il a reconnu être l'auteur des articles. Les articles en question concordent suffisamment avec les allégations figurant dans la plainte pour qu'il soit impossible de les considérer comme devant faire l'objet d'une plainte nouvelle ou distincte. Le Tribunal juge par conséquent que la preuve postérieure au renvoi a été validement admise.

III. LES FAITS SE RAPPORTANT À LA PLAINTE

[34] Depuis de nombreuses années, le plaignant surveille les activités de groupes prônant la suprématie blanche et de groupes néonazis, qui sont actifs au Canada et à l'étranger. Par l'expression groupes prônant la suprématie blanche, il entend les gens ou groupes pour qui les races qui ne font pas partie des races traditionnelles appelées race blanche et race aryenne sont inférieures. Lorsqu'il emploie l'expression groupes néonazis, il veut dire les groupes ou les individus qui partagent des convictions semblables à celles du régime national-socialiste qui fut au pouvoir en Allemagne durant la Deuxième Guerre mondiale.

[35] De 2002 à 2004, le plaignant a travaillé pour la Commission comme agent des droits de la personne. Ses fonctions consistaient à enquêter sur les plaintes de violation des droits de la personne. Il a expliqué que ses fonctions, à la Commission, étaient explicitement séparées de l'enquête qu'il menait alors sur les fichiers Internet prônant la haine. Durant son contre-interrogatoire, il a admis que, puisqu'il avait travaillé pour la Commission à l'époque pertinente de cette plainte, alors sans doute avait-il surveillé les activités de l'intimé au cours de cette période, mais il a ajouté qu'il avait fait cela en dehors du temps qu'il devait consacrer à son travail à la Commission.

[36] Le plaignant a expliqué que, durant plusieurs années, il a surveillé les articles canadiens apparaissant sur un site Web américain appelé stormfront.org, qui, pour lui, est un site prônant la suprématie blanche. Ce site Web offre des tribunes où les internautes peuvent transmettre et échanger des idées sur les questions se rapportant à la suprématie blanche et à l'idéologie néonazie. Ce site Web est facilement accessible au public. Quiconque a accès à l'Internet peut entrer dans ce site et lire les messages affichés, encore que la possibilité d'afficher des messages soit réservée aux membres.

[37] Le site Web Stormfront est organisé sous la forme d'une pyramide. Il y a une tribune où l'usager peut accéder à diverses catégories de sujets. Quand l'usager clique sur l'un des sujets, un fil de discussion apparaît, ce qui lui permet de lire les messages et permet aux membres de participer à la discussion sur le sujet choisi. La nature des articles et leur contenu varient énormément sur ces fils de discussion.

[38] Au cours de sa surveillance de ce site Web, le plaignant a remarqué les écrits d'un individu utilisant le pseudonyme mathdoktor99, et il s'est mis à s'en inquiéter. Il a fait une recherche plus approfondie sur la nature des écrits de cette personne. Il a dit que, après avoir visionné d'autres écrits de cette personne utilisant ce pseudonyme, il était persuadé que ces écrits violaient probablement l'article 13 de la Loi. Il a entrepris de rassembler l'information qui pourrait lui permettre d'identifier l'auteur des articles, pour éventuellement déposer une plainte auprès de la Commission.

[39] Toute personne qui utilise un pseudonyme pour s'exprimer sur le site Stormfront doit remettre un profil à l'administrateur du site Web. Le profil de l'individu se faisant appeler mathdoktor99 comprenait une adresse électronique. Le profil précisait que cette personne vivait à Saskatoon (Saskatchewan) et qu'il s'agissait d'un programmeur analyste travaillant à son compte.

[40] Le plaignant a cherché l'adresse électronique dans le moteur Google. Il a ainsi appris que l'adresse électronique de mathdoktor99 était celle d'un certain Terry Tremaine. L'intimé ne nie pas avoir affiché les articles en question sous le pseudonyme mathdoktor99.

[41] Terry Tremaine détient un baccalauréat en mathématiques et en philosophie ainsi qu'une maîtrise en sciences. Il est également titulaire d'un diplôme de programmation et analyse des systèmes informatiques. Il a occupé pendant un certain temps un poste à temps partiel de chargé de cours au Département de mathématiques de l'Université de la Saskatchewan et, d'après son témoignage, il a poursuivi une carrière en technologie de l'information comme programmeur.

[42] L'intimé a témoigné que c'est lorsqu'il étudiait en vue d'obtenir son diplôme de maîtrise, à Montréal, en 1982, que lui sont venues les idées exposées dans ses articles. Après avoir obtenu sa maîtrise, il a accepté un poste d'enseignant à Red Deer (Alberta). Comme par hasard, le procès de James Keegstra se déroulait alors à Red Deer. M. Keegstra avait été accusé en vertu des lois sur les crimes haineux, qui étaient en vigueur à l'époque. M. Tremaine a dit qu'il avait assisté à l'audience et avait vu M. Keegstra témoigner. Il a ajouté qu'il avait été très impressionné par ce qu'il avait entendu. Il a aussi ajouté que cela l'avait fait réfléchir à ce que l'on pourrait appeler le problème juif.

[43] Après son expérience en Alberta, il a entrepris des études de doctorat dans une université canadienne, études qu'il n'a pas terminées puisqu'il avait accepté un poste d'enseignement aux Bahamas. Il a témoigné que, aux Bahamas, il avait développé des attitudes plutôt négatives à l'endroit des Noirs et de la culture noire. Il est resté aux Bahamas pendant deux ans, puis il est retourné au Canada. Il a produit le témoignage suivant : [traduction] J'étais alors devenu "raciste. Il a aussi dit que ses convictions politiques étaient celles du national-socialisme.

[44] À son retour au Canada, M. Tremaine a travaillé dans les technologies de l'information et a obtenu un diplôme en informatique. Après avoir obtenu ce diplôme, il a créé une société de programmation à Saskatoon (Saskatchewan).

[45] Au cours de cette période, vers 2001, il a commencé à s'intéresser à ce qu'il a appelé le nationalisme blanc. C'est également durant cette période qu'il a découvert le site Web Stormfront. Durant quelque temps, il ne fut qu'un lecteur de ce site, mais, au bout de deux ou trois mois, il a décidé d'en devenir membre et s'est mis à y afficher ses articles. Au cours de l'audience, il a témoigné qu'il avait affiché au moins 1 900 messages sur ce site.

[46] C'est le 8 avril 2005 que la plainte a été signifiée à l'intimé. Le 11 avril 2005, puis de nouveau le 23 juillet 2005, le plaignant a écrit au président de l'Université de la Saskatchewan, l'employeur de l'intimé à l'époque, pour le renseigner sur les activités de l'intimé. Le 4 août 2005, le vice-recteur de l'Université a répondu au plaignant pour l'informer que la Direction des ressources humaines de l'Université avait enquêté sur l'affaire et qu'il avait été mis fin, le 30 avril 2005, aux fonctions exercées par l'intimé à l'Université.

[47] Après son renvoi de l'Université, l'intimé est allé vivre sur la côte Ouest (en Colombie-Britannique). Selon lui, il avait peur et se sentait déprimé. En septembre 2005, il est retourné en Saskatchewan et a demandé à être admis à l'établissement psychiatrique Qu'Appelle de Regina, pour traiter sa dépression. Durant son séjour dans cet établissement, il a écrit, le 30 septembre 2005, une lettre de quatre pages à la Commission. Dans cette lettre, il écrivait que les articles qu'il avait affichés sur le site Stormfront étaient attribuables à ses ennuis de santé mentale. La lettre précisait qu'il [traduction] avait été en proie à un délire et s'était mis à imaginer des complots d'envergure qui se tramaient derrière les événements mondiaux. Mes pensées délirantes comportaient notamment l'idée d'une conspiration mondiale juive. Puis il ajoute : [traduction] Je souligne qu'il s'agissait de pensées délirantes qui me rendent profondément honteux et dont je me sens coupable. Les mots ne sauraient décrire la profondeur de ma honte. J'en suis tourmenté chaque jour. Je méprise et déteste tout ce que j'ai écrit sur Stormfront et j'aimerais n'avoir jamais entendu parler de ce site. La Commission n'a nullement à craindre d'autres activités semblables de ma part sur le site Stormfront ou n'importe où ailleurs.

[48] Il poursuit ainsi : [traduction] Avant mars 2001, j'étais un homme décent et normal, sans aucun penchant au racisme ou à l'intolérance. En 2001, j'ai subi un changement destructif de personnalité qui a fait de moi quelqu'un dont les seuls mots qui pouvaient me qualifier étaient malade et dérangé. Cela m'a finalement conduit à afficher des articles sur Stormfront. Il ajoute aussi : [traduction] Au cours des mois qui ont suivi le dépôt contre moi de la plainte de violation des droits de la personne, la honte et le remords se sont emparés de moi au point que cela m'est devenu insupportable, et je suis retombé dans une dépression nerveuse.

[49] Il exprime ensuite son remords et l'espoir qu'il recouvrera son [TRADUCTION] véritable sens de la morale et de la décence, et il conclut par ces mots : [TRADUCTION] j'exprime mon regret le plus profond, ma honte et mon remords à tous les membres de la communauté juive contre lesquels étaient dirigés bon nombre de mes articles. Je regrette vraiment au plus profond de moi même tout ce que j'ai écrit sur Stormfront, en particulier à propos de la communauté juive.

[50] La Commission n'a jamais répondu à cette lettre et elle n'a pas expliqué pourquoi elle ne l'a pas fait. Le plaignant, pour sa part, a expliqué en contre-interrogatoire qu'il ne se rappelait pas s'il avait effectivement vu la lettre ou si la Commission lui avait remis un résumé de son contenu. Il a ajouté qu'il avait dit à la Commission que, si la lettre de l'intimé était sincère, alors elle était pour lui d'un grand intérêt. Il a dit qu'il souhaitait essentiellement négocier un règlement concernant la plainte, sous réserve que soit rendue au préalable une ordonnance permanente de cesser et de s'abstenir et que soient prononcés les autres recours qui s'imposent. Il n'en a rien résulté et il semble que personne n'a approché l'intimé pour étudier davantage les points soulevés dans la lettre.

[51] Durant son interrogatoire, l'intimé a catégoriquement désavoué le contenu de la lettre susmentionnée et n'a jamais contesté sa recevabilité. Il a évoqué une rétractation qu'il a affichée sur Stormfront le 5 février 2006. Il a déclaré aussi que, sauf quelques modifications mineures, il réitère aujourd'hui tout ce qu'il a écrit sur Stormfront. Au cours de son contre-interrogatoire, l'intimé a confirmé son état d'esprit à propos de ses articles affichés sur Stormfront, ainsi que son point de vue sur les Juifs et les Noirs. Il n'éprouvait certainement aucun remords pour les déclarations qu'il avait faites, et il a dit que, si l'occasion lui en était donnée, il les répéterait sans hésiter.

[52] L'identité de l'auteur des articles à l'origine de la présente plainte, ainsi que des articles postérieurs à la plainte, n'a pas été mise en doute; l'intimé admet que tous ces articles sont de lui. Il était un auteur très prolifique et prolixe, qui, dans la plupart de ses écrits, camouflait ses idées sous l'habit du débat académique, en recourant très souvent à ce qu'il prétendait être des références et des faits historiques pour appuyer ses affirmations. Ses articles entraient pour l'essentiel dans l'une de deux catégories : ceux qui passent pour des articles de nature spécialisée, et ceux qui constituent des communications directes avec d'autres participants. Le ton de certains de ces articles, même s'ils n'observaient en aucune façon les normes rigoureuses des écrits spécialisés, pouvait donner un air de légitimité à leur contenu aux yeux d'un lecteur crédule.

[53] Le premier document produit comme preuve a été affiché le 14 février 2004 sur le site Web Stormfront. L'intimé participait à une discussion sur un fil intitulé [traduction] Un véritable holocauste est-il en vue? Il a ensuite affiché ce qui suit : [traduction] Le Juif ne peut s'empêcher d'être un Juif, tout comme un rat ne peut s'empêcher d'être un rat. Il qualifiait ensuite les Juifs de [traduction] race parasite. Il ajoutait que [traduction] nulle population hôte le moindrement saine ne peut tolérer qu'un parasite se nourrisse d'elle sans éventuellement le rejeter. Finalement, il concluait qu'[traduction] aucune conférence sur l'antisémitisme n'aidera le Juif à se soustraire au destin qui est le sien depuis longtemps.

[54] À nouveau, le 17 février 2004, il affichait sur un fil de discussion un autre article intitulé [traduction] Objet : Une vue de l'intérieur (pour tous les antis). Dans cet écrit, l'intimé parle encore des Juifs comme d'une race parasite qui se repaît [traduction] de paroles cauteleuses, d'opérations financières astucieuses et d'un manque total d'éthique envers les non-Juifs.

[55] Dans un article du 19 février 2004, sur un fil de discussion intitulé [traduction] Votre réveil?, l'intimé explique comment il en est arrivé à adopter les idées de la [traduction] communauté nationaliste blanche. Il raconte que, au début des années quatre-vingt-dix, il avait accepté un poste d'enseignant dans un pays des Caraïbes :

[TRADUCTION]

Je n'étais pas raciste quand je suis arrivé là, mais le suis devenu durant mon séjour. D'abord, j'ai découvert que les Noirs sont intellectuellement inférieurs aux Blancs. Ce constat était évident partout et dans toutes les couches sociales. Je ne veux pas dire qu'ils étaient moins instruits (et ils l'étaient), je veux dire que, à un niveau plus fondamental, ils étaient intellectuellement inférieurs. Dans mon travail, j'ai rencontré des Noirs qui étaient instruits en principe, mais qui semblaient manquer d'une certaine étincelle intellectuelle que possèdent la plupart des Blancs, même ceux qui sont assez peu instruits. J'en suis également arrivé à voir la culture noire comme une culture foncièrement dépravée et choquante. Elle n'est bonne que pour les Noirs et ne ressemble en rien à ce qu'un Blanc qui se respecte devrait côtoyer ou tenter d'imiter.

[56] Plus loin, dans le même écrit, parlant d'un auteur juif qu'il ne nomme pas, il appelle celui-ci [traduction] ce sournois d'auteur juif. Dans sa conclusion, il affirme qu'[traduction] Hitler avait raison à propos des Juifs.

[57] Le 23 mars 2004, sur un fil de discussion censé afficher le testament politique d'Adolf Hitler, l'intimé, parlant encore des Juifs, écrivait : [traduction] La haine envers cette race de vermine parasite grandit partout.

[58] Dans un autre écrit intitulé [traduction] La grandeur d'Adolf Hitler, l'intimé écrivait, le 9 avril 2004 :

[TRADUCTION]

Hitler a résisté à la juiverie internationale et au marxisme. Il voyait le marxisme comme le moyen tout récent d'atteindre le but à long terme de la juiverie internationale - à savoir la destruction des États-nations indépendants. Le marxisme représentait la disparition de toutes les distinctions nationales et ethniques et la mise en place d'un prolétariat mondial abâtardi, sans aucune identité ou loyauté ethnique.

[...]

L'intention initiale d'Hitler à l'égard des Juifs était qu'ils soient expulsés d'Europe, de gré ou de force. La destination initiale mentionnée était Madagascar. [...] Une fois la guerre commencée, cela devint peu réaliste. Les seules solutions étaient soit de les confiner, soit de les laisser aller librement. Cette dernière solution fut jugée inadéquate puisqu'ils étaient considérés comme des ennemis potentiels, tout comme les Japonais en Amérique du Nord, qui furent eux aussi internés. On ne saurait nier que quelques Juifs, et peut être beaucoup, ont été délibérément éliminés. Le nombre exact ne sera sans doute jamais établi, mais il est presque certain qu'il n'atteint pas le chiffre des six millions que tente de nous faire croire depuis plus de soixante ans la propagande anti allemande d'après guerre.

[59] Concernant les camps de concentration mis sur pied durant la Seconde Guerre mondiale par les Nazis et, en particulier, de l'infâme camp d'Auschwitz, il le décrit comme [traduction] un camp de travail, et non pas un camp de la mort, et il ajoute que [traduction] les chambres à gaz servaient à épouiller les vêtements afin d'empêcher la propagation du typhus - et non pas à exterminer des êtres humains. Il conteste les chiffres indiquant le nombre de gens qui périrent dans ces camps : [traduction] Nous n'avons pas encore la preuve objective que six millions de Juifs ont péri. La meilleure preuve existante vient de la Croix-Rouge, pour qui un peu plus de 400 000 Juifs sont morts, pour toutes sortes de raisons, dans les camps d'internement (sic) et de travail (sic) [...]

[60] Sur un autre sujet, dans un fil de discussion intitulé [traduction] Le VIH/sida et les Indiens de Saskatchewan que l'intimé avait amorcé, il écrivait, le 2 mai 2004, à propos de la propagation du sida parmi les Premières nations de cette province : [traduction] Il ne m'importe pas vraiment aujourd'hui que le sida les anéantisse tous. Notre travail en serait facilité.

[61] Le 5 juillet 2004, sur un fil de discussion intitulé [traduction] Questions d'un homme noir, l'intimé écrivait :

[TRADUCTION]

Parlant en mon propre nom uniquement, je voudrais que cette nation blanche comprenne la plus grande partie de ce qui est aujourd'hui le Canada et la plus grande partie de ce qui est aujourd'hui les États Unis. L'immigration non blanche serait bannie. Les non-Blancs vivant à l'intérieur de nos frontières seraient encouragés à partir ou à se soumettre à une stérilisation volontaire. Avec un tel plan, notre nation serait blanche à 100 p. 100 en une génération. Cela pourrait se faire sans réelle effusion de sang si les non-Blancs acceptaient de coopérer à l'entreprise. Les Noirs pourraient être rapatriés en Afrique. L'aide étrangère aujourd'hui versée à Israël servirait plutôt à exécuter ce plan de rapatriement. Les Noirs instruits d'Amérique pourraient aider l'Afrique à se remettre sur pied (si cela est possible). Les Asiatiques seraient renvoyés dans leur pays d'origine. Si cela se révélait impossible, alors le plan de stérilisation serait mis à exécution. En aucun cas un Juif ne serait autorisé à rester sur notre territoire. On les laisserait partir paisiblement, avec tout ce qu'ils pourraient mettre dans une valise.

[62] Répondant à un article intitulé [traduction] Mes impressions sur les Juifs, l'intimé écrivait, le 11 septembre 2004 :

[TRADUCTION]

  1. Vous n'avez pas mentionné leur [se référant aux Juifs] duplicité compulsive. Hitler les appelait les maîtres du mensonge, et il avait parfaitement raison.
  2. Vous n'avez pas mentionné leur nature parasite. Ils méprisent le vrai travail et ne vivent que pour l'argent, sans se soucier de la manière de l'obtenir.
  3. Vous n'avez pas mentionné qu'ils sont attirés par tout ce qui est dégoûtant et dépravé. On peut le voir à leur art.
  4. Vous n'avez pas mentionné leur rôle dans le crime organisé, le trafic de drogue et l'esclavage blanc.
  5. Vous n'avez pas mentionné qu'ils corrompent toutes nos institutions (les médias, les universités, la finance, la politique, la justice, l'application de la loi) pour les rediriger ensuite vers des objectifs juifs.
  6. Vous n'avez pas mentionné le cancer du Sionisme.

Etc.

[63] Sur un fil de discussion de Stormfront intitulé [traduction] Saviez-vous qu'un million d'Allemands ont été assassinés... après la guerre?, l'intimé a affiché l'écrit suivant, le 12 septembre 2004 :

[TRADUCTION]

Plus on explore les événements entourant la Deuxième Guerre mondiale (avant, pendant et après), plus on est amené à constater que le véritable holocauste fut un holocauste commis à l'encontre du peuple allemand, et ce, à l'instigation des Juifs. Ce canular de l'holocauste juif cherche à déformer la réalité et à faire passer les Juifs pour les victimes des méchants Nazis. À mesure que le temps passe, nous en apprenons davantage sur ce qui s'est véritablement passé.

[64] Le 18 septembre 2004, dans un fil qu'il avait amorcé, intitulé [traduction] Le parasite sacré, il qualifiait encore une fois le Juif de parasite. Ce même jour, il engageait aussi un autre fil intitulé [traduction] Hanadi Jaradat. Selon l'article de l'intimé, Hanadi Jaradat était une Palestinienne qui s'était fait exploser dans un restaurant de Haïfa, en Israël, tuant ou blessant plusieurs personnes. L'intimé écrivait à ce propos :

[TRADUCTION]

[...] Son pays est occupé par la même race parasite qui contrôle aujourd'hui nos pays auparavant blancs. Comme le Dr Pierce le disait : ELLE EN AVAIT PLUS QU'ASSEZ!!. Elle a donc décidé d'agir.

Il s'est écoulé près d'un an depuis que Hanadi Jaradat a porté un coup au ZOG (gouvernement sioniste d'occupation). Je sais qu'il y a des nationalistes blancs qui me blâmeront d'honorer de cette façon une musulmane, mais je ne lui rends pas hommage en sa qualité de musulmane ou d'arabe, mais en sa qualité de soldate dévouée luttant contre le ZOG. Je ne suggère pas non plus que nous nous attachions tous des bombes à la ceinture et que nous commencions à faire sauter des Juifs. Je voudrais simplement attirer l'attention sur son courage et sur son sacrifice (littéralement) et j'espère qu'un jour nous aurons un millier de nationalistes blancs tout aussi résolus à détruire notre ennemi.

[65] Le 19 septembre 2004, il écrivait ce qui suit :

[TRADUCTION]

Plus les Juifs tenteront d'éradiquer l'antisémitisme, plus il progressera. C'est garanti. Il progressera jusqu'à ce que les Juifs eux-mêmes se rendent compte qu'ils sont la cause de l'antisémitisme (ce qui n'arrivera jamais). Tout comme un corps sain tente de reconnaître et de repousser les organismes destructeurs étrangers, ainsi toute société saine réagira aux Juifs avec répulsion et dégoût et souhaitera leur expulsion. Les Juifs tentent d'empêcher cette réaction saine de la même manière que le virus du sida empêche le corps de rejeter les organismes étrangers. Mais pour les Juifs cela ne fonctionnera pas. Trop de gens sont conscients de leur nocivité. Nous sommes comme les cellules sanguines blanches de certaines personnes qui sont immunisées contre les effets du virus du sida.

[66] Ce même jour, mais sur un autre fil de discussion, l'intimé affichait ce qui suit : [traduction] Comme quelqu'un l'a déjà dit (je ne me souviens plus qui), quand leur fin arrivera, les Juifs regretteront que les SS ne soient pas là pour les protéger.

[67] L'intimé a aussi participé à un fil intitulé [traduction] Objet : Faut-il un État policier?, qui prétendait discuter les avantages de l'établissement d'une nation blanche. Dans l'un de ses nombreux et longs écrits affichés sur ce fil, le 20 septembre 2004, il s'exprimait ainsi : [traduction] La politique nationale-socialiste envers les Juifs était très mesurée. Hitler était beaucoup plus gentil envers les Juifs qu'ils le méritaient. Son intention initiale était tout simplement de les expulser tous. Cependant, personne n'en voulait (ce n'est pas surprenant). Plus loin, dans un autre article, il écrivait notamment, en réponse à une question dont l'auteur lui demandait s'il serait disposé à payer le prix d'un État policier totalitaire pour une nation entièrement blanche : [traduction] En fait, je ne serais pas en faveur d'un tel État à moins qu'il ne s'emploie résolument à expulser tous les Juifs de notre territoire. Dans un autre article portant sur le même sujet, dans lequel il parlait de la [traduction] fracture de [traduction] nos pays multiraciaux, il écrivait que les nationalistes blancs devraient se préparer [traduction] à saisir le pouvoir par tous les moyens possibles. Puis il ajoutait : [traduction] Notre peuple dirigera alors l'appareil d'État policier existant et entreprendra les travaux de nettoyage (expulsion des Juifs, rapatriement des autres non-Blancs, etc.)

[68] Le 17 janvier 2005, l'intimé affichait l'écrit suivant : [traduction] Les Arabes NE sont PAS les nouveaux Juifs. Les Juifs sont les Juifs!! Comme le disait le Dr Pierce, quand nous aurons disposé des Juifs, tout le reste se réglera automatiquement. Le dernier écrit déposé en preuve par le plaignant et remontant à la période antérieure au 8 avril 2005, date à laquelle la plainte fut signifiée à l'intimé, a été affiché le 23 mars 2005. L'objet de cet écrit est contenu dans un fil de discussion intitulé [traduction] Jeux de hasard à la bibliothèque publique. Dans cet écrit, l'intimé fait des remarques désobligeantes à propos des Autochtones.

[69] L'article suivant déposé en preuve fut affiché au début de février 2006, dix mois après la signification de la plainte à l'intimé et environ cinq mois après la lettre d'excuses évoquée plus haut dans la présente décision. Cet article fut affiché après la décision rendue par le Tribunal le 30 janvier 2006 dans l'affaire Warman c. Kulbashian et autres, 2006 TCDP 11. Dans cet écrit, l'intimé, parlant du membre du Tribunal qui avait rendu la décision, s'exprimait ainsi : [traduction] Remarquez que nous n'avons même pas de décideurs blancs au tribunal, mais quelqu'un sorti de je ne sais quel trou du tiers-monde.

[70] Dans l'article suivant, daté du 27 février 2006, l'intimé écrit : [traduction] Nous ne devons jamais oublier que le communisme était, est et sera toujours juif. C'est le meilleur exemple de ce qui arriverait à notre peuple si les Juifs venaient à s'emparer du contrôle absolu de nos pays, ce contrôle auquel ils aspirent tant. Dans un autre article, daté du 3 mars 2006, l'intimé écrit ce qui suit :

[TRADUCTION]

Les Juifs comptent, pour exécuter leurs plans, sur leurs aides goyim adeptes du sabbat. Les Juifs suivent simplement leur instinct de race parasite, mais leurs aides blancs font le choix de trahir leur race. Les Juifs établissent d'innombrables organisations de façade pour recruter leurs aides goyim adeptes du sabbat, lesquels, au mieux, croient qu'ils travaillent pour quelque noble cause afin de venir en aide à ceci ou à cela. Au pire, ils savent qu'ils ont été recrutés pour la cause judaïque, mais ils s'imaginent que c'est le chemin qu'ils doivent parcourir pour arriver à la richesse et/ou au pouvoir.

[71] Le 8 mai 2006, les attaques de l'intimé deviennent plus malveillantes. Parlant d'un complot mondial ourdi par les Juifs, il écrit ce qui suit :

[TRADUCTION]

Les Juifs sont les empoisonneurs de toutes les nations. L'une des raisons pour lesquelles ils encouragent le multiculturalisme (qui est en réalité le multiracialisme) est leur volonté d'établir un pays peuplé de mulâtres, que les Juifs jugent faciles à maîtriser et qu'ils considèrent comme un ensemble de groupes ethniques querelleurs qu'il leur sera possible de diviser et de conquérir. Dans un pays multiracial, le groupe racial qui présente la solidarité ethnique la plus forte dominera. Les Juifs croient, et ils sont même convaincus, qu'ils présentent entre eux une cohésion interne suffisante pour assurer leur suprématie, compte tenu, notamment, de leur mainmise actuelle sur les institutions financières, politiques, éducatives et culturelles (les médias).

Chaque groupe ethnique doit reconnaître pour vrai ce qui précède. Nous, les nationalistes blancs, pouvons former des alliances stratégiques avec d'autres groupes nationaux, mais nous devons nous garder de chercher à convaincre les autres de mener nos combats à notre place. Dans un tel cas, ces autres groupes détermineront la configuration d'une victoire finale. Nous devons déterminer nous-mêmes cette configuration. En pratique, la configuration finale ne doit pas entraîner la rupture de l'un de nos pays auparavant blancs. Au lieu d'essayer d'établir un petit territoire national uniquement blanc, nous devrions viser un objectif plus large. Flanquons les Juifs dehors et n'ayons plus rien à faire avec eux, où qu'ils aboutissent. Aidons ensuite au rapatriement des autres groupes ethniques. [...] Ils ne partagent pas nos valeurs, ce qui est démontré par leurs tendances claniques et leurs activités criminelles en général. Et, même s'ils partageaient effectivement nos valeurs, nous ne voulons pas d'eux ici parce que nous voulons notre territoire pour faire progresser notre propre race et assurer sa destinée.

Nous pouvons nous entendre avec les autres groupes nationaux pour faire en sorte que les Juifs ne disposent d'aucun abri sûr où ils puissent établir à nouveau une autre base opérationnelle, par exemple en Amérique ou en Grande-Bretagne. [...]

Fondamentalement, nous (ainsi que tous les groupes ethniques et les races) devons considérer les Juifs comme des empoisonneurs étrangers qui voudraient toujours que les autres fassent leur sale travail. De cette façon, ils pourront toujours clamer leur innocence et éviteront de se salir les mains. Ils s'évitent également de dépenser leur or si précieux. Ils ont ouvertement déclaré qu'ils préféreraient détruire le monde que de voir leur propre existence nationale menacée (l'option Samson). Nous devons admettre qu'ils parlent sérieusement. Nous devons changer cela et nous dire qu'il vaut mieux que ce soit les Juifs et Israël qui soient détruits plutôt que le monde.

[72] Puis, le 27 juin 2006, l'intimé propose une constitution nationale-socialiste pour le Canada. Cette constitution serait fondée sur ce qu'il appelle les sept principes du national-socialisme. Le septième principe déclare qu'Adolf Hitler fut un cadeau pour le monde, lequel était au bord d'une catastrophe juive bolchevique. Ce document propose que, dans cet État national-socialiste imaginaire que serait le Canada, les citoyens soient d'extraction européenne blanche pour au moins 75 p. 100. Les Juifs et ceux qui professent la foi juive se verraient refuser la citoyenneté canadienne.

[73] Dans un autre article daté du 8 juillet 2006, l'intimé écrivait ce qui suit à propos du plaignant : [traduction] Je crois que Warman est un Juif du seul fait de son aptitude illimitée à la malveillance. Il ne semble pas avoir une conscience d'homme blanc. Dans un article évoquant son cas devant le Tribunal, l'intimé écrit ce qui suit : [traduction] Hitler a dit que les Juifs sont le bacille de la désintégration sociale. Aujourd'hui, nous pourrions les considérer comme le virus du sida, et l'afflux d'autres populations non blanches dans notre pays comme une infection opportuniste. La maladie est le multiculturalisme, et les Juifs en sont la cause.

[74] Sur le site Internet, http//mathdoktor99.htmlplanet.com, l'intimé parle de ce qu'il appelle le complot mondial juif. Il se réfère à un article censément écrit par Winston Churchill, qui, affirme-t-il, fut publié dans le London Sunday Herald du 8 février 1920, et dont le contenu serait manifestement antisémite. Il parle aussi d'un document, prétendument rédigé par la Croix-Rouge Internationale en 1947, qui chiffre à 271 000 morts le nombre de Juifs ayant péri dans les divers camps tenus par les Allemands durant la Deuxième Guerre mondiale. Il cite ici aussi le gros titre d'un article censément publié dans le Daily Express de Londres, le 24 mars 1933, et il conclut que ce sont les Juifs qui ont déclaré la guerre au Troisième Reich. Il fait aussi référence à l'auteur russe Alexandre Solzhenitsyn, qui aurait déclaré que [traduction] les Bolcheviques juifs ont été les étrangleurs de la Russie et [que] le génocide commis contre des millions de Russes a été planifié par les Juifs en 1919.

[75] Les attaques de l'intimé ne se limitent pas à la communauté juive; il écrit aussi des remarques désobligeantes contre la communauté noire. Dans l'un de ses articles, affiché sur Stormfront en date du 2 août 2006, et intitulé [traduction] Mon histoire, il relate son séjour aux Bahamas, où il a occupé un poste d'enseignant en 1993 :

[TRADUCTION]

Environ 98 p. 100 des habitants de ce pays sont des Nègres. C'était le même pourcentage parmi mes étudiants, dont certains avaient un certain talent naturel pour les mathématiques. Lorsque je suis arrivé dans ce pays, je N'étais PAS raciste. En fait, il y a eu des moments où j'oubliais que j'étais Blanc. On pourrait dire que, dans une certaine mesure, j'étais devenu un Autochtone. Je suis même devenu assez basané au point même d'avoir la peau sombre. Cependant, au bout d'un an passé dans ce pays, je suis arrivé à la conclusion que la plupart des Nègres des Bahamas étaient naturellement stupides. Tous évidemment ne l'étaient pas. Je me souviens de quelques conversations intelligentes parmi les hommes nègres au magasin des alcools, des conversations plus intelligentes que la plupart des propos tenus entre Nègres instruits au collège. Mais, je me suis fait à l'idée que le quotient intellectuel moyen se situait quelque part entre 75 et 85 et, après avoir vécu six mois dans ce pays, cette opinion s'est raffermie. Au cours des trois ans et demi qui ont suivi, mon estimation pouvait augmenter ou diminuer de quelques points, mais finalement la moyenne se situait à environ 80. Je continuais de croire que le camionneur moyen au Canada a davantage de cervelle que 99 p. 100 des Nègres de ce pays. Mon opinion sur les races a donc commencé à changer. Je ne croyais pas qu'un quotient intellectuel de 80 pouvait s'expliquer par des raisons culturelles, même si d'aucuns seraient sans nul doute prêts à l'affirmer. Les Bahamiens ne peuvent pas excuser leur stupidité comme pourraient le faire les Nègres américains. Ils représentent une majorité écrasante dans ce pays et s'occupent de leurs propres affaires depuis 1973. L'esclavage a été aboli aux Bahamas en 1837, mais ils sont encore stupides. Pas tous, mais la plupart.

[76] Puis il ajoute ce qui suit :

[TRADUCTION]

Si les Nègres n'étaient que stupides, collectivement parlant, mais par ailleurs innocents, nous pourrions les considérer comme des enfants. Malheureusement, tel n'est pas le cas. J'ai constaté qu'ils ont une tendance naturelle à recourir tout de suite à la violence et qu'ils sont des voleurs nés. Durant les quatre années que j'ai passées aux Bahamas, j'ai peut-être eu une demi-douzaine de différends avec des hommes nègres sur des questions qui normalement auraient été considérées de peu d'importance. Dans chaque cas, j'ai été menacé de violence physique. Ils sont poltrons également, braves uniquement en meutes, comme des hyènes, puisque, à chaque fois, je ne me dérobais pas et c'est l'autre qui décampait. J'ai trouvé que même ceux qui sont instruits parmi eux sont des voleurs nés. [...] La règle à suivre quand on se trouve parmi les Nègres : si ce n'est pas coulé, collé ou soudé au plancher, cela disparaîtra.

[77] L'un des sujets du document évoque l'idée selon laquelle les Juifs tentent de s'emparer de chacun des aspects de la société et de dominer le monde. Citant Adolf Hitler, l'intimé répartit les races en trois catégories : [traduction] Celles qui peuvent créer et maintenir la civilisation; celles qui peuvent maintenir la civilisation, mais non la créer; et celles qui ne peuvent faire ni l'un ni l'autre, mais qui sont des destructrices de civilisation. Les Aryens (= les Blancs) ont créé la civilisation. Les Asiatiques et certains Sémites sont capables de maintenir une civilisation. Les Juifs et les Nègres sont des destructeurs de civilisation. Les Juifs sont particulièrement dangereux parce que non seulement sont-ils des destructeurs, mais également des destructeurs de la pire espèce, des parasites.

[78] Puis il conclut ainsi : [traduction] Est-ce que je veux vivre dans un monde dont les Juifs sont les propriétaires et les gestionnaires pour leur propre bénéfice? Est-ce que je veux vivre dans un monde tenu par des parasites résolus à le détruire, ou est-ce que je veux agir? Vais-je simplement m'asseoir et assister à la destruction des Blancs comme peuple, sans autre possibilité pour eux que de se fondre - pour éventuellement disparaître - dans le grand marécage nauséabond de la biomasse du tiers-monde? J'ai décidé de réagir.

[79] Finalement, le 27 juillet 2006, l'intimé affichait le message suivant sur Stormfront : [traduction] Warman [c'est-à-dire le plaignant] n'est que l'homme de façade, le singe de service, agissant pour le B'nai Brith et le Congrès juif canadien. Ces gens-là mènent ce pays, lequel sombre dans le trou sans fond de l'enfer juif.

[80] En 2006, l'intimé a aussi créé et géré un site Web appelé nspcanada, où il a affiché ce qu'il disait être le programme politique du Parti national-socialiste du Canada (le NSPC). N'importe qui peut accéder à ce site Web.

[81] La page d'accueil de ce site Web précise que le NSPC est résolu, entre autres choses, à [traduction] stopper et inverser les effets du multiculturalisme, à résister à l'emprise juive/sioniste sur les plus importantes institutions sociales du Canada, à rétablir la souveraineté blanche au Canada, à doter le Canada d'une nouvelle constitution [et] à augmenter le taux de natalité des Blancs pour qu'il atteigne des niveaux de remplacement et pour que les immigrants non blancs ne soient plus nécessaires parmi notre main-d'uvre.

[82] Il écrit que le NSPC est [traduction] résolu à établir au Canada un État raciste blanc, lequel [traduction] rétablirait la souveraineté blanche au sein du Canada, une souveraineté qui a été perdue à cause du multiculturalisme et de la rectitude politique marxiste. Pour atteindre cet objectif, il recommande diverses mesures, notamment [traduction] la contestation, par tous les moyens légaux possibles, de l'influence juive sur nos médias d'information et de divertissement, et cela par le développement de nos propres médias et l'utilisation des médias d'organisations blanches coopérantes. Il appelait aussi à l'établissement de [traduction] sections locales partout au Canada qui puissent rapidement se transformer en cellules de résistance à mesure que le besoin s'en fera sentir.

[83] L'intimé s'attarde ensuite sur les sept points du national-socialisme qui constitueraient le fondement de la [traduction] constitution d'un Canada national-socialiste. Le septième principe est le suivant : [traduction] Adolf Hitler fut le cadeau d'une providence insondable à un monde au bord de la catastrophe juive-bolchevique, et seul l'esprit flamboyant de cet homme héroïque pourra nous donner la force et l'inspiration nécessaires pour donner au monde une nouvelle naissance marquée par un idéalisme rayonnant, une paix véritable, un ordre international et une justice sociale pour tous les hommes.

[84] Pour ce qui est de la propriété d'armes à feu, il écrit que cela sera un droit fondamental des citoyens respectueux de la loi, mais il ajoute : [traduction] plus jamais les Juifs ne commanderont ce pays! Nous DEVONS disposer d'une milice de citoyens bien armés afin qu'on ne nous rebatte plus jamais les oreilles avec le multiculturalisme. Les non-citoyens (c'est-à-dire les non-Blancs) ne seront pas autorisés à détenir ou à posséder des armes à feu. L'unique exception à cette règle concernera les Indiens autochtones vivant dans leurs propres réserves. Ils seront autorisés à posséder des armes à feu, mais uniquement pour chasser. L'intimé parle aussi du multiculturalisme comme d'un [traduction] poison et il se propose de [traduction] nettoyer le gâchis multiculturel.

[85] Dans un Canada national-socialiste, pouvons-nous lire, cette loyauté [traduction] au sionisme et à l'entité sioniste présente en Palestine (l'État terroriste d'Israël) sera considérée comme une [traduction] trahison envers le Canada et [traduction] sera traitée comme telle.

[86] Selon l'intimé, l'homosexualité [traduction] est peut-être déterminée génétiquement. Puis il ajoute que, [traduction] selon les données scientifiques les plus fiables sur le sujet, quelque chose dérape dans la formation du cerveau au cours du développement ftal. Il écrit que l'homosexualité [traduction] est manifestement une pathologie, qu'elle soit ou non reconnue par l'Association psychiatrique. [...] Selon le NSPC, les homosexuels ne doivent pas être autorisés à travailler dans un environnement où seront présents des enfants ou de jeunes adolescents. Ils ne seront pas autorisés à adopter des enfants ni à s'occuper d'enfants placés dans des familles. Ils ne seront pas autorisés à servir dans l'armée et, évidemment, ils ne seront pas autorisés à se marier car, selon l'intimé, le mariage se fait [traduction] entre un homme et une femme.

[87] Dans un Canada gouverné par le NSPC, l'armée servirait [traduction] à aider d'autres nations blanches à se défendre contre toute agression non blanche. À la fin de leur service militaire obligatoire, les citoyens de sexe masculin [traduction] conserveraient la possession de leurs armes d'assaut pour maintenir l'existence d'une milice citoyenne convenablement armée.

[88] La citoyenneté, selon le NSPC, serait réservée aux gens qui sont [traduction] d'extraction européenne blanche pour au moins 75 p. 100. Ils ne pourront pas être juifs, ni de religion juive. Seuls les citoyens auront le droit de vote, le droit de briguer un poste électif ou le droit de devenir juge. Les résidents du Canada qui ne répondront pas aux conditions de citoyenneté seront renvoyés dans leur pays, de gré ou de force. Les Autochtones ne seront pas des citoyens, et ils n'auront pas non plus le droit de vote, mais ils bénéficieront de l'autonomie gouvernementale sur leurs propres territoires.

[89] On peut également lire ce qui suit dans le document :

[TRADUCTION]

Nous sommes résolus à mener un combat révolutionnaire pacifique pour le national-socialisme et pour la souveraineté blanche à l'intérieur du Canada.

Cependant, il faut se rappeler que le Canada n'est pas actuellement un pays libre, mais qu'il est aux mains des Juifs et des Sionistes. Nous sommes des victimes du judéo libéralisme et nous nous dirigeons vers la tyrannie judéo-fasciste.

Nous sommes en faveur du droit à la dissidence politique pour tous les Blancs de tout le pays. Cela suppose une résistance au présent statu quo. Nous devons être prêts à toutes les éventualités, autant que cela est humainement possible. Nous proposons que nos sections locales se structurent en cellules de résistance modelées sur les comités de correspondance qui existaient avant et durant la Révolution américaine.

[90] Puis le site Web donne une liste d'autres groupes pro-blancs, avec leurs adresses électroniques. Il énumère aussi les sociétés et entreprises qui devraient être boycottées en raison de ce que l'intimé appelle les accointances sionistes.

[91] Plusieurs pages du site Web reprennent aussi certaines citations, par exemple les suivantes :

[TRADUCTION]

Renvoi des Nègres en Afrique? Oui!!!;

[TRADUCTION]

Nul programme ou stimulant spécial, quel qu'il soit, ne pourra modifier le caractère génétique fondamental d'une race. L'unique solution à la plaie que représentent les Nègres est leur rapatriement en Afrique;

[TRADUCTION]

La juiverie internationale est l'ennemie de toute l'humanité et l'empoisonneuse de toutes les nations;

[TRADUCTION]

Le multiculturalisme revient à déplacer, à marginaliser et finalement à détruire la population hôte - c'est-à-dire la race blanche!!!

[92] Il y a aussi une série de ce que l'on pourrait décrire comme de brefs commentaires, intitulés, par exemple, [traduction] Le sionisme est une trahison, [traduction] Renvoyer les Nègres en Afrique? Oui!!!, Jew Tube, [traduction] Crime noir. L'intimé prétend aussi y reproduire une série de documents qu'il dit être historiquement exacts.

[93] Il est clair que l'intimé ne veut rien de moins qu'un Canada totalement blanc. Il fait valoir que les Blancs et les non-Blancs, dont les Juifs, ne pourront jamais vivre ensemble en harmonie dans le même pays. Il considère les Noirs méprisables, mais trop faibles d'esprit pour constituer une menace envers les Blancs. Les Juifs, quant à eux, sont jugés plus malins, mais ils sont dangereux, amoraux, nuisibles, et ils complotent pour avoir la mainmise sur le monde. Les thèmes les plus importants qui sont récurrents dans la plupart de ses écrits sont la suprématie de la race blanche et l'antisémitisme.

IV. LA PLAINTE DÉPOSÉE EN VERTU DE L'ARTICLE 13

A. INTRODUCTION : Propagande haineuse et liberté d'expression

[94] La liberté d'expression est jugée particulièrement précieuse dans une société libre et démocratique telle que la nôtre. La Charte canadienne des droits et libertés en fait l'un des droits fondamentaux garantis à tous les Canadiens. C'est le fondement sur lequel a été édifié notre processus démocratique et politique. La liberté d'expression permet à toute personne de façonner son développement personnel et elle garantit ainsi le développement d'une démocratie pleine de vitalité, où la participation de tous, quelle que puisse être son origine ethnique ou sa foi religieuse, est non seulement bienvenue, mais acceptée et encouragée. (Canada (Commission des droits de la personne) c. Taylor, [1990] 3 R.C.S. 892, paragraphe 47.)

[95] C'est en raison de notre attachement à cette valeur fondamentale que des points comme ceux qui sont soulevés dans la présente instance présentent des difficultés. En rendant sa décision, le Tribunal devra prendre en compte deux valeurs fondamentales qui, dans certains cas, sont difficiles à concilier. D'une part, il y a l'intérêt d'une société démocratique à encourager la liberté d'expression et, de l'autre, il y a l'importance pour cette même société de promouvoir les droits de tous ses citoyens à l'égalité, ainsi que la dignité inhérente à tout être humain.

[96] Certaines des idées exprimées par l'intimé dans ses articles peuvent être vues comme des idées faisant partie intégrante d'un discours politique légitime, bien qu'elles semblent totalement contraires aux valeurs de la majorité des Canadiens. C'est la raison pour laquelle nous devons, dans l'examen de questions comme celles-ci, faire en sorte que notre jugement ne soit pas obscurci par la réprobation générale et le caractère offensant des idées politiques prônées par l'intimé. Sans doute n'aimons-nous pas ce qu'il dit et préférerions-nous ne pas l'entendre, mais, dans une société démocratique, chacun est libre d'exprimer ses opinions, si détestables soient-elles, dans la mesure où il n'en résulte pas pour autrui avilissement et humiliation.

[97] La liberté d'expression est une valeur fondamentale importante, mais nous, au Canada, chérissons tout autant les droits de tous à l'égalité. L'égalité signifie le respect de la dignité inhérente à tout être humain, sans égard à sa couleur, à sa race, à sa langue, à son sexe ou à sa religion. La liberté d'exprimer ses idées cesse d'être la liberté d'expression ou d'opinion quand elle est utilisée pour faire obstacle à la promotion de l'égalité. La liberté d'expression cesse d'être une caractéristique fondamentale des valeurs démocratiques quand elle devient un véhicule de promotion de la haine. (Voir le jugement Canada (Commission des droits de la personne) c. Canadian Liberty Net, [1992] 3 C.F. 155, paragraphe 60)

[98] Dans la décision Citron et autres c. Zündel, T.D. 1/02, 18 janvier 2002, le Tribunal écrivait, aux paragraphes 153 et 154 :

Quoi qu'il en soit, même si nous admettons que cette question puisse donner lieu à un débat légitime, nous nous sommes arrêtés à la façon dont l'intimé a exprimé ses vues, et non au simple fait qu'il a décidé de participer à ce débat. Notre conclusion est fondée sur la façon dont ces doutes sont exprimés, plutôt que sur le fait qu'il y ait des remises en question de l'exactitude historique de ces événements. Bien qu'il soit peut-être toujours difficile de soulever ces questions, nous reconnaissons que la norme pour déterminer si on a fomenté la haine ou le mépris doit être appliquée avec circonspection afin de ne pas perdre de vue le droit à la liberté de parole.

Si nous nous trouvions en l'occurrence devant un débat théorique où l'on s'exprime de façon neutre, notre analyse pourrait être fort différente. Toutefois, ces documents se distinguent, en raison du ton utilisé et de l'extrême dénigration des Juifs, de ce qui pourrait être permissible. À notre avis, c'est le lien entre la façon dont l'auteur perçoit les événements et l'extrême diffamation des Juifs qui en découle - leur dénonciation en tant que menteurs, escrocs, extorqueurs et fraudeurs - qui est susceptible de les exposer à la haine et au mépris.

[99] Dans l'arrêt Canada (Commission des droits de la personne) c. Taylor, précité, la Cour suprême du Canada définissait, au paragraphe 2, l'expression propagande haineuse comme une expression destinée à disséminer des sentiments extrêmes d'opprobre et d'inimitié contre un groupe racial ou religieux. La propagande haineuse ou les messages haineux résident aux marges extérieures des valeurs qui forment le cur de la liberté d'expression. La propagande haineuse est foncièrement hostile à la raison d'être de la liberté d'expression. C'est la raison pour laquelle le législateur a adopté le paragraphe 13(1) de la Loi. Lorsqu'il a adopté cette disposition, il a clairement précisé qu'il considérait les activités qui y sont mentionnées comme des activités contraires à la cause de l'égalité. L'objet du paragraphe 13(1) est évidemment un objet d'une importance considérable au point de justifier une limite à la liberté d'expression (arrêt Canada (Commission des droits de la personne) c. Taylor, précité, paragraphe 43).

[100] Dans l'arrêt Taylor, la Cour suprême a conclu que, bien que l'article 13 empiète sur la liberté d'expression, cet empiétement est justifié à la lumière des engagements internationaux visant à éradiquer la propagande haineuse, et à la lumière de l'engagement du Canada envers les valeurs que sont l'égalité et le multiculturalisme.

[101] Dans ses observations finales, le représentant de l'intimé a fondé une partie de son argumentation sur la notion de commentaire loyal et celle de liberté d'expression. Je reconnais que toute personne, y compris l'intimé, a le droit d'exprimer par le moyen de son choix ses idées politiques, mais elle doit le faire d'une manière qui ne contrevienne pas au paragraphe 13(1) de la Loi. Comme le Tribunal l'écrivait dans la décision Warman c. Kyburz, 2003 TCDP 18, au paragraphe 54 : Bien qu'il constitue l'une des pierres angulaires d'une société libre et démocratique, le droit à la liberté d'opinion et d'expression n'est pas un droit illimité. Dans certains cas, la protection de la société restreint ce que peuvent dire les individus. La liberté d'expression ou le droit de faire un commentaire loyal ne saurait autoriser la calomnie contre des citoyens canadiens au motif de leur couleur ou de leur religion, ni autoriser un appel à leur expulsion.

[102] M. Fromm a aussi prié le Tribunal de ne pas tenir compte de l'information apparaissant sur le site Web du Parti national-socialiste du Canada. Il a fait valoir que cette plate-forme politique devrait être traitée dans une arène politique. Je ne partage pas son avis. L'importance, dans notre démocratie, de préserver la liberté d'opinion et d'expression ne donne pas naissance à un droit absolu. Les tribunaux reconnaissent que ces valeurs sont soumises à des limites juridiques, qu'il s'agisse des dispositions du Code criminel, de la common law, de la Charte des droits et libertés ou de la Loi. Le législateur et la société canadienne en général ont décidé d'imposer des limites juridiques à la liberté d'opinion et d'expression. Ils ont décidé que l'on ne pouvait pas encourager la haine et le mépris même si l'on prétend qu'il s'agit d'un discours politique.

B. L'objet général du paragraphe 13(1) de la Loi

[103] Selon la plainte, l'intimé a exercé contre des personnes ou un groupe de personnes une discrimination fondée sur la religion, la race, la couleur et l'origine nationale ou ethnique, en communiquant de façon répétée des messages sur Internet, messages qui étaient susceptibles d'exposer les Noirs, les Asiatiques, les Autochtones, les autres non-Blancs et les Juifs à la haine ou au mépris, contrevenant ainsi au paragraphe 13(1) de la Loi.

[104] Le paragraphe 13(1) est ainsi rédigé

13. (1) Constitue un acte discriminatoire le fait, pour une personne ou un groupe de personnes agissant d'un commun accord, d'utiliser ou de faire utiliser un téléphone de façon répétée en recourant ou en faisant recourir aux services d'une entreprise de télécommunication relevant de la compétence du Parlement pour aborder ou faire aborder des questions susceptibles d'exposer à la haine ou au mépris des personnes appartenant à un groupe identifiable sur la base des critères énoncés à l'article 3.

13. (1) It is a discriminatory practice for a person or a group of persons acting in concert to communicate telephonically or to cause to be so communicated, repeatedly, in whole or in part by means of the facilities of a telecommunication undertaking within the legislative authority of Parliament, any matter that is likely to expose a person or persons to hatred or contempt by reason of the fact that that person or those persons are identifiable on the basis of a prohibited ground of discrimination.

:

[105] Le paragraphe 13(2) étend cette disposition aux communications échangées sur Internet :

(2) Il demeure entendu que le paragraphe (1) s'applique à l'utilisation d'un ordinateur, d'un ensemble d'ordinateurs connectés ou reliés les uns aux autres, notamment d'Internet, ou de tout autre moyen de communication semblable mais qu'il ne s'applique pas dans les cas où les services d'une entreprise de radiodiffusion sont utilisés.

(2) For greater certainty, subsection (1) applies in respect of a matter that is communicated by means of a computer or a group of interconnected or related computers, including the Internet, or any similar means of communication, but does not apply in respect of a matter that is communicated in whole or in part by means of the facilities of a broadcasting undertaking.

[106] L'article 13 de la Loi est expressément conçu pour prévenir la propagation des préjugés et pour encourager la tolérance et l'égalité. En qualifiant d'acte discriminatoire l'activité décrite dans cette disposition, le législateur indique qu'il considère la propagande haineuse ou les messages haineux comme contraires au principe de l'égalité. En 1966, le Comité spécial sur la propagande haineuse au Canada, communément appelé le Comité Cohen, avait identifié le grave préjudice causé par les messages haineux. Il a souligné que les personnes victimes de haine raciale ou religieuse risquent d'en subir une profonde détresse psychologique, les conséquences préjudiciables pouvant comprendre la perte de l'estime de soi, des sentiments de colère et d'indignation et une forte incitation à renoncer aux caractéristiques culturelles qui les distinguent des autres (arrêt Canada (Commission des droits de la personne) c. Taylor, précité, paragraphe 40.)

[107] L'objet de l'article 13 est de supprimer les messages haineux du discours public et d'encourager l'égalité, la tolérance et la dignité de la personne. Les opinions exprimées dans de tels messages conduisent inévitablement aux préjugés et à la discrimination et peuvent aussi entraîner des violences physiques contre les membres des groupes visés.

[108] Les messages haineux peuvent aussi avoir pour effet de convaincre ceux qui les entendent ou qui les lisent que les membres de certains groupes raciaux ou religieux sont inférieurs. Il peut en résulter un accroissement des actes de discrimination, voire un accroissement des violences commises contre ces groupes. Les messages haineux portent atteinte à la dignité et à l'estime de soi des membres du groupe cible, et ils contribuent à semer la discorde entre différents groupes raciaux, culturels et religieux, minant ainsi la tolérance et l'ouverture d'esprit qui doivent fleurir dans une société multiculturelle vouée à la réalisation de l'égalité (arrêt Canada (Commission des droits de la personne) c. Taylor, précité, paragraphe 41).

[109] Selon le paragraphe 13(1), l'intention d'exercer une discrimination n'est pas une condition préalable à un constat de discrimination (Commission des droits de la personne de l'Ontario et Theresa O'Malley c. Simpson Sears Ltd, [1985] 2 R.C.S. 536, aux pages 549 550; Canada (Commission des droits de la personne) c. Taylor, précité, aux pages 931 à 934). Dans la décision Warman c. Kulbashian et autres, 2006 TCDP 11, au paragraphe 59, le Tribunal écrit ce qui suit :

[...] le langage utilisé à l'article 13 est clair; ce sont les effets de la propagande qui ont retenu l'attention du législateur. La question à poser n'est pas celle de savoir si celui qui transmet le message a l'intention de communiquer de la haine ou du mépris, mais celle de savoir si le message lui-même est susceptible d'exposer à la haine ou au mépris des personnes appartenant à un groupe identifiable. Si effectivement le contenu du bulletin d'information était destiné à exprimer une prétendue opinion politique, le message aurait pu être communiqué sans recourir au langage extrémiste et dénigrant qui était répandu dans les diverses publications du bulletin d'information [...]

[110] Dans la décision Nealy c. Johnson (1989), 10 C.H.R.R. D/6450, au paragraphe 45697, le Tribunal écrivait que l'emploi du mot susceptibles, au paragraphe 13(1), signifie qu'il n'est pas nécessaire de produire une preuve montrant qu'un individu ou groupe donné a pris les messages au sérieux et a fait montre de haine ou de mépris envers les autres. Il n'est pas nécessaire non plus de prouver que quiconque a été victimisé. Contrairement aux autres dispositions de la Loi qui traitent de discrimination, le paragraphe 13(1) prévoit une responsabilité même s'il n'y a aucun effet discriminatoire réel non prouvé ou non prouvable. Comme l'écrit le Tribunal dans la décision Warman c. Winnicki, 2006 TCDP 20, aux paragraphes 46 et 49 :

Le Tribunal a mentionné qu'il n'existe aucun moyen facile d'accès pour évaluer le nombre de personnes exposées aux messages ainsi que les répercussions que ces derniers peuvent avoir eues sur ces personnes. Selon le Tribunal, ces considérations justifient l'extension de la responsabilité prévue au paragraphe 13(1) aux cas où il n'y a aucun effet discriminatoire réel non prouvé ou non prouvable. [...] Selon le paragraphe 13(1), constitue un acte discriminatoire le fait de diffuser des messages qui sont susceptibles d'exposer à la haine ou au mépris des personnes appartenant à un groupe identifiable. La disposition ne mentionne pas que constitue un acte discriminatoire le fait de diffuser des messages qui ont pour effet de susciter chez les autres de la haine et du mépris à l'égard du groupe cible.

[111] Encore une fois, dans l'arrêt Taylor, précité, la Cour suprême du Canada ajoutait, au paragraphe 74, que la véracité de la déclaration attaquée ne constituait pas une défense à l'égard de l'acte discriminatoire proscrit par le paragraphe 13(1) : Il faut se rappeler que la vérité peut servir aux fins les plus diverses, et j'ai de la difficulté à accepter qu'il existe des circonstances dans lesquelles des déclarations conformes aux faits puissent être utilisées à la seule fin de fomenter la haine contre un groupe racial ou religieux.

[112] La propagande haineuse porte atteinte à la dignité et à l'estime de soi des membres du groupe cible et elle mine la tolérance et l'ouverture d'esprit qui doivent fleurir dans une société multiculturelle vouée à la réalisation de l'égalité (décision Winnicki, précitée, paragraphe 50). La preuve d'un préjudice n'est donc pas requise. Le point essentiel est qu'il faut s'assurer que seuls sont visés par le paragraphe 13(1) les messages qui sont susceptibles d'exposer les membres du groupe cible à des émotions exceptionnellement fortes et profondes de détestation, se traduisant par des calomnies et de la diffamation (décision Winnicki, précitée, paragraphe 51)

[113] Comme l'écrivait la Cour fédérale dans le jugement Commission canadienne des droits de la personne c. Winnicki, 2005 CF 1493, au paragraphe 30 :

Le préjudice causé aux groupes ciblés par les messages haineux est très souvent difficile à réparer. Il renforce de manière insidieuse les préjugés qu'ont certains envers les minorités identifiées par la race, la couleur et la religion, incitant et justifiant par le fait même le recours aux pratiques discriminatoires, voire à la violence, contre ces groupes. En même temps, ces messages sont très susceptibles d'influencer la perception et l'estime de soi de tous les membres des groupes visés, les empêchant ainsi de participer pleinement à la société canadienne et de réaliser leur plein potentiel comme êtres humains.

[114] Comment établir la probabilité d'une exposition à un préjudice? Dans la décision Citron c. Zundel (n° 4) (2002), 41 C.H.R.R. D/274, le Tribunal écrivait que la preuve la plus convaincante était le langage employé dans les messages eux-mêmes. Il n'est nul besoin d'une preuve d'expert dans cette matière, encore qu'elle puisse être utile dans certains cas.

[115] Il convient d'examiner trois questions pour savoir si la plainte est fondée :

  1. L'intimé a-t-il, de façon répétée, communiqué ou fait communiquer les messages qui sont l'objet de la plainte?
  2. Ces messages ont-ils été communiqués en totalité ou en partie par l'entremise d'une entreprise de télécommunications relevant de la compétence du Parlement?
  3. Le sujet des messages est-il susceptible d'exposer à la haine ou au mépris des personnes appartenant à un groupe identifiable sur la base d'un motif de distinction illicite?

C. M. Tremaine a-t-il, de façon répétée, communiqué ou fait communiquer les messages trouvés sur les divers sites Web en cause?

[116] L'intimé ne nie pas qu'il a communiqué les messages qui sont l'objet de la présente plainte, y compris les messages postérieurs à la plainte. Il a aussi admis que la totalité des messages étaient de lui et qu'il les avait signés sous son nom véritable ou sous son pseudonyme, mathdoktor99.

[117] Son représentant a refusé d'admettre que les messages en cause avaient été communiqués de façon répétée. Il s'est référé à l'arrêt Taylor de la Cour suprême du Canada, affirmant que la raison pour laquelle la Cour avait jugé dans cette affaire que les communications étaient répétées avait trait à l'effort délibéré qui avait été fait pour attirer l'attention du public sur eux. Il a ajouté qu'il n'était pas établi que l'intimé avait tenté d'attirer l'attention sur ses articles ou avait annoncé leur présence sur Internet et que, par conséquent, le Tribunal devrait juger qu'ils n'ont pas été communiqués de façon répétée.

[118] La nécessité d'une répétition des communications est un élément constitutif du paragraphe 13(1), et le Tribunal constate qu'il y a eu, en l'espèce, communication répétée des articles affichés. Dans la décision Schnell c. Machiavelli and Associates Emprize Inc. (2002), 43 C.H.R.R. D/453, le Tribunal a jugé que l'emploi des mots de façon répétée, au paragraphe 13(1), signifie que cette disposition vise non pas les communications privées échangées avec des amis, mais plutôt une série de messages constituant un dispositif public et à grande échelle pour la diffusion de certaines idées ou opinions, en vue de gagner des adeptes dans le public.

[119] En l'espèce, les articles ont été affichés sur Internet, lequel est conçu pour faciliter les transmissions répétées d'écrits affichés sur un site donné. Internet offre un moyen peu coûteux de distribution massive. L'un des objets visés par l'insertion de messages sur un site Web est de rendre accessible le message pour transmission et affichage par un utilisateur qui le demande. Cette caractéristique d'Internet remplit la condition de répétition dont parle le paragraphe 13(1). Il n'était pas nécessaire pour l'intimé d'appeler l'attention du public sur ses articles, le simple fait de les afficher sur Internet, lequel est accessible à presque tout le monde, suffisait pour que cet objectif soit atteint.

D. Ces messages ont-ils été communiqués, en totalité ou en partie, par l'entremise d'une entreprise de télécommunications relevant de la compétence du Parlement?

[120] La preuve tangible produite contre l'intimé consiste principalement en copies d'articles affichés sur Internet.

[121] La Loi canadienne sur les droits de la personne, dans sa version originale, ne traitait pas expressément des communications faites au moyen d'Internet. À la suite des modifications apportées au droit canadien par l'entrée en vigueur de la Loi antiterroriste, L.C. 2001, ch. 41, article 88, le 24 décembre 2001, la Loi canadienne sur les droits de la personne fut modifiée par l'ajout du paragraphe 13(2), qui traite expressément des communications réalisées au moyen d'Internet.

[122] Puisque tous les messages qui constituent le fondement de la présente plainte ont été affichés après l'entrée en vigueur du paragraphe 13(2), il ne fait aucun doute qu'ils ont été communiqués, en totalité ou en partie, grâce aux services d'une entreprise de télécommunications relevant de la compétence du Parlement.

[123] Dans sa plaidoirie, M. Fromm a affirmé que le Tribunal devrait assimiler à une communication privée les articles affichés sur un site Internet qui sont destinés aux personnes partageant la même idéologie de base. Selon lui, les articles affichés sur le site Stormfront constituaient une conversation interne. Le Tribunal n'accepte pas cet argument. Dans un article rédigé par L. B. Lidsky, Silencing John Doe: Defamation and Discourse in Cyberspace (2000), 49 Duke L. J. 855, cité avec approbation au paragraphe 31 d'un arrêt de la Cour d'appel de l'Ontario, Barrick Gold Corporation v. Lopehandia, [2004] O.J. N° 2329, l'auteur écrit ce qui suit :

[TRADUCTION]

Les communications par Internet présentent sans doute les qualités éphémères d'un bavardage pour ce qui concerne l'exactitude, mais elles sont transmises au moyen d'un support plus envahissant que les imprimés, et pour cette raison elles présentent un pouvoir considérable de destruction des réputations. Dès qu'un message pénètre dans le cyberespace, des millions de gens de par le monde peuvent en prendre connaissance. Même si le message est affiché dans un forum de discussion fréquenté par une poignée seulement de personnes, n'importe laquelle d'entre elles peut republier le message en l'imprimant ou, ce qui est plus probable, en le transmettant instantanément à un autre forum de discussion. Et, si le message est suffisamment apte à provoquer des réactions, il peut être republié encore et encore. La capacité extraordinaire d'Internet de reproduire presque indéfiniment tout message diffamatoire donne crédit à l'idée selon laquelle la vérité rattrape rarement un mensonge.

[124] Internet a eu de profondes répercussions sur la société moderne. Il a rendu accessible à tous l'information qui naguère ne l'était qu'à quelques-uns. Il a aussi permis aux individus d'échanger des idées et de débattre des questions importantes, mais il a aussi suscité de sérieuses inquiétudes sur le contenu de nombreux sites. Des questions se posent concernant d'une part la préservation de la liberté légitime d'expression, et d'autre part la nécessité d'enrayer la prolifération des sites haineux. Le cyberespace ne peut pas, et ne doit pas, être vu comme une société hors limite où tout est permis et où les contraintes qui restreignent le discours dans le monde réel n'auraient pas leur place. Le fait que l'utilisateur emploie un pseudonyme ne signifie pas que tout est permis. Le fait aussi qu'il imprime ses messages sur un site qui est pour l'essentiel utilisé par des personnes ayant les mêmes idées que lui ne fait pas du message une communication privée. Dès lors que le message est entré dans le cyberespace, il peut être lu par des millions de gens, et il fait partie du domaine public.

[125] En l'espèce, la preuve montre clairement que le site Web utilisé par l'intimé était facilement accessible au public. Le plaignant a témoigné que, pour avoir accès aux messages affichés sur ces sites, une personne n'avait pas à en être membre - encore que, sur le site Stormfront, il était impossible d'afficher un message sans être membre du site. N'importe qui pouvait facilement accéder aux sites Web Stormfront et nspcanada, aucun mot de passe n'était requis.

[126] Le Tribunal ne voit donc nul bien-fondé dans l'argument de l'intimé sur ce point.

[127] Le représentant de l'intimé a aussi exprimé l'avis que le bon sens donnerait à penser que, puisque les articles étaient affichés sur un site Web où des gens aux idées semblables communiquaient entre eux, alors les articles en question n'exposaient pas à la haine ou au mépris les groupes visés. Il a aussi fait valoir que les messages n'étaient pas susceptibles d'exposer à la haine ou au mépris les membres des groupes visés puisque quiconque naviguant sur Internet aura été honnêtement averti du contenu des messages en voyant la nature des bannières de la page d'accueil des sites. Par conséquent, les gens avaient le choix de lire ou non les messages.

[128] Encore une fois, le Tribunal ne saurait accepter cet argument. Sans doute pourrait-on admettre que celui qui affiche l'article sur un tel site, ou qui lit l'article, soit considéré comme un défenseur de l'opinion qu'ils soutiennent, et par conséquent éprouve déjà des sentiments de haine et de mépris pour tel ou tel groupe minoritaire, mais il est concevable que de tels sentiments puissent être attisés encore davantage par lesdits messages. Quoi qu'il en soit, il faut se rappeler que les sentiments préconçus de celui qui affiche ou lit un tel article ne sont pas en cause dans l'interprétation de l'article 13. La question est de savoir si ce qui est communiqué est susceptible d'exposer une personne ou un groupe de personnes à la haine ou au mépris. Le fait que les bannières aient donné une vague indication du contenu des sites Web ne met pas les messages hors de l'atteinte du paragraphe 13(1).

E. Le sujet des messages est-il susceptible d'exposer à la haine ou au mépris des personnes appartenant à un groupe identifiable sur la base d'un motif de distinction illicite?

[129] Il s'agit ici de savoir si les messages sont effectivement susceptibles d'exposer à la haine ou au mépris des personnes appartenant à un groupe identifiable sur la base d'un motif de distinction illicite, ou s'ils sont simplement, comme les a qualifiés M. Fromm, de [TRADUCTION] fermes convictions exprimées par l'intimé.

[130] Pour définir les mots haine ou mépris, le Tribunal a appliqué, dans la décision Nealy c. Johnson (1989), 10 C.H.R.D. n° 10, au paragraphe 45653, la définition que donne le Oxford English Dictionary (édition 1971). Le mot haine est défini ainsi : aversion active, détestation, inimitié, malice, malveillance. Le mot mépris est défini ainsi : le fait d'être méprisé ou dédaigné, déshonneur, disgrâce.

[131] Dans cette même décision, le Tribunal ajoutait ce qui suit, au paragraphe 45654 :

Comme la [Loi canadienne sur les droits de la personne] ne contient aucune définition des termes hatred ou contempt, il faut s'appuyer sur leur sens ordinaire. De toute évidence, ils peuvent être chargés émotivement, et la façon dont ils sont utilisés par rapport à des situations de fait particulières par différents individus ne sera pas toujours la même. Néanmoins, il existe un tronc commun important aux deux que les définitions du dictionnaire reflètent. Le terme hatred connote un ensemble d'émotions et de sentiments comportant une malice extrême envers une autre personne ou un autre groupe de personnes. Quand on dit qu'on hait quelqu'un, c'est que l'on ne trouve aucune qualité qui rachète ses défauts. Toutefois, il s'agit d'un terme qui ne fait pas appel nécessairement au processus mental de regarder quelqu'un de haut. Il est fort possible de haïr quelqu'un que l'on estime supérieur à soi en intelligence, en richesse ou en pouvoir. Aucun des synonymes utilisés dans le dictionnaire pour le terme hatred ne donne d'indice sur les motifs de la malice. Par contraste, contempt est un terme qui suggère le processus mental consistant à regarder quelqu'un de haut ou à le traiter comme inférieur. La définition du dictionnaire invoquée dans l'affaire Taylor rend bien cette idée, car on y trouve les mots despised (dédaigné), dishonour (déshonneur) ou disgrace (disgrâce). Même si la personne peut être haïe (c'est-à-dire faire l'objet d'une aversion active) et traitée avec mépris (c'est-à-dire regardée de haut), les termes ne se chevauchent pas complètement, car la haine est, en certains cas, le résultat de l'envie de qualités supérieures, ce que le mépris ne peut être par définition [arrêt Canada (Commission des droits de la personne) c. Taylor, précité, paragraphe 60]

[132] Le mot haine s'entend donc d'une malice extrême et d'un sentiment qui n'admet, chez la personne qui en est l'objet, aucune qualité susceptible de racheter ses défauts. Le mépris, quant à lui, s'entend du processus mental consistant à regarder quelqu'un de haut.

[133] Comment détermine-t-on si un sujet est susceptible d'exposer quelqu'un à la haine ou au mépris? Suffit-il au Tribunal de considérer les seuls messages, puis de tirer une conclusion, en se fondant sur le contenu, le ton et la présentation des messages pour savoir s'ils sont susceptibles d'exposer à la haine ou au mépris les membres des groupes visés? Ou doit-il exister d'autres éléments propres à aider le Tribunal à déterminer si les messages sont susceptibles d'exposer à la haine ou au mépris les membres des groupes visés? Dans sa plaidoirie, le représentant de l'intimé a affirmé qu'il n'était pas établi devant le Tribunal que les messages étaient susceptibles d'exposer à la haine ou au mépris les groupes visés, puisque le plaignant n'avait produit aucune preuve d'expert pouvant aider le Tribunal à répondre à ces questions.

[134] Dans la décision Citron c. Zundel, précitée, au paragraphe 141, le Tribunal écrivait que, bien qu'une preuve d'expert puisse être utile, ce sont les mots employés dans les messages eux-mêmes qui lui permettront de dire si le texte est contraire ou non au paragraphe 13(1). Pareillement, dans la décision Warman c. Kyburz, 2003 TCDP 18, le Tribunal, tout en prenant note de la preuve d'expert, a estimé qu'il était évident, à la lecture des messages eux-mêmes, qu'ils étaient contraires au paragraphe 13(1). Le fait qu'une preuve d'expert n'a pas été produite ne rend pas de ce fait irrecevable l'allégation du plaignant.

[135] Les messages produits comme preuve visent principalement deux groupes, les Noirs et les Juifs. Les membres de la communauté noire sont décrits comme intellectuellement inférieurs, violents, criminels et stupides - en bref, ils sont représentés comme des personnes dépourvues de toute qualité pouvant racheter leurs défauts.

[136] Les messages dirigés contre les Juifs disent qu'ils sont les ennemis de l'humanité, une race parasite, un mal à l'état pur, des parasites hideux, une maladie, une vermine, des fourbes, des menteurs, des dépravés, des criminels impliqués dans le crime organisé, la drogue et l'esclavage blanc. L'intimé dit que l'holocauste est un canular, qu'il décrit comme une tentative de faire passer les Juifs pour les victimes des Nazis, ce qui selon lui est un travestissement de la vérité. Il recommande que les Juifs soient privés de leur citoyenneté canadienne, voire expulsés de ce pays. Le sujet fondamental des écrits est l'idée que les Juifs n'ont aucune qualité pouvant racheter leurs défauts et qu'ils détruisent la race blanche. Les messages renforcent les mythes antisémites classiques selon lesquels les Juifs disposent d'un pouvoir disproportionné et qu'ils constituent une menace pour le monde civilisé. Ils ont imposé le multiculturalisme à la société blanche et sont responsables des dommages qui en ont résulté. En outre, ils sont de dangereux marxistes communistes. Le ton et l'extrême dénigrement des Juifs, dans ces messages, ne font pas partie intégrante d'un débat politique légitime, parce que cela les rend incompatibles avec les principes fondamentaux de l'égalité, qui sont inscrits dans la Loi.

[137] Les messages donnent même à penser que la violence contre les minorités canadiennes et en particulier contre les Juifs est acceptable. On y décèle très souvent un accent d'agressivité.

[138] Dans le site Web du NSPC, l'intimé affirme clairement que les Juifs, les Noirs et autres non-Blancs détruisent le pays, qu'on devrait leur refuser la citoyenneté, qu'ils devraient être stérilisés, et même expulsés. Ces messages soulignent que les non-Blancs introduisent la pauvreté, la criminalité et la corruption dans notre société. Ils offrent aussi aux lecteurs des raisons de les haïr et de s'en méfier.

[139] Les messages exposent manifestement les Juifs, les Noirs et autres minorités non blanches à la haine et au mépris, en violation de l'article 13 de la Loi.

F. Conclusion sur la plainte se rapportant au paragraphe 13(1)

[140] Après examen de ces messages dans leur contexte, je ne doute aucunement qu'ils sont susceptibles d'exposer à la haine ou au mépris les gens qui professent la foi juive, les Noirs et autres minorités non blanches. Le thème sous-jacent des messages de l'intimé est que les Juifs, les Noirs et autres non-Blancs détruisent le pays et qu'ils devraient être soit expulsés, soit isolés. Les messages évoquent aussi la menace qu'ils représentent pour la civilisation blanche. Les membres des groupes visés sont qualifiés de vermine, de maladie, de parasites, de criminels, de fripouilles, d'escrocs et de menteurs. Ils sont décrits comme dangereux et, dans certains cas, comme des êtres d'intelligence inférieure.

[141] Ces messages traduisent une malice extrême qui va jusqu'à la violence envers les groupes visés. Ils ne reconnaissent aux membres de ces groupes aucune qualité pouvant les racheter. Les membres des groupes en question sont totalement déshumanisés. Ils sont donc susceptibles d'être exposés à la haine ou au mépris.

[142] Le Tribunal arrive donc à la conclusion que ces messages sont susceptibles d'exposer à la haine ou au mépris des personnes appartenant à un groupe identifiable en raison de leur race, de leur origine nationale ou ethnique, de leur couleur ou de leur religion, selon ce que prévoit le paragraphe 13(1) de la Loi, et il est d'avis que l'existence d'un acte discriminatoire a été établie.

G. Redressements

[143] La plainte déposée par M. Warman en vertu de l'article 13 étant jugée fondée, il reste à déterminer le redressement qui s'impose. Les redressements sollicités par le plaignant sont les suivants :

  1. la délivrance d'une ordonnance enjoignant à l'intimé de cesser l'acte discriminatoire, conformément à l'alinéa 54(1)a) de la Loi;
  2. la délivrance d'une ordonnance enjoignant à l'intimé de payer une indemnité conformément à l'alinéa 54(1)b) de la Loi;
  3. la délivrance d'une ordonnance condamnant l'intimé à une sanction pécuniaire conformément à l'alinéa 54(1)c) de la Loi.

(i) Ordonnance de cesser et de s'abstenir

[144] Lorsqu'une plainte déposée en vertu de l'article 13 est jugée fondée, l'alinéa 54(1)a) de la Loi habilite le Tribunal à ordonner à l'intimé de cesser l'acte discriminatoire. La procédure consistant à instruire une plainte et, si la plainte est jugée fondée, à rendre une ordonnance de cesser et de s'abstenir a pour objet de rappeler aux Canadiens notre engagement fondamental envers l'égalité des chances et l'éradication de l'intolérance raciale et religieuse. (Voir l'arrêt Taylor, précité, paragraphe 53, et la décision Winnicki, précitée, au paragraphe 192.)

[145] Une ordonnance de cesser et de s'abstenir porte à l'attention d'un intimé le fait que ses messages sont susceptibles d'avoir des conséquences nuisibles. L'incertitude ou l'erreur sur l'effet probable de tels messages est ainsi dissipée, et, si l'intimé continue de disséminer les messages, ce sera en sachant que les personnes appartenant à tel ou tel groupe sont susceptibles d'être exposées à la haine ou au mépris en raison de leur race ou de leur religion.

[146] Les messages affichés sur Internet rendent particulièrement difficile pour le Tribunal la tâche de prononcer un redressement tangible. Comme l'écrivait le Tribunal dans la décision Warman c. Kyburz, précitée, au paragraphe 81 : La nature unique de la technologie Internet, y compris les difficultés liées à l'existence de multiples juridictions du fait que le cyberespace n'a pas de frontières, ainsi que la mobilité des cibles en raison du recours à des sites miroirs, soulève des préoccupations légitimes quant à l'efficacité des ordonnances de cesser et de s'abstenir de diffuser des messages haineux par Internet. Nonobstant cette observation, le Tribunal a néanmoins rendu, dans cette affaire, une ordonnance de cesser et de s'abstenir. La difficulté de concevoir un redressement tangible ne devrait nullement empêcher le Tribunal de rendre une telle ordonnance s'il le juge à propos.

[147] Dans la décision Zündel, précitée, le Tribunal écrivait ce qui suit, au paragraphe 300 :

Toute mesure de redressement prise par ce Tribunal ou tout autre tribunal servira immanquablement plusieurs buts; la prévention et l'élimination d'actes discriminatoires ne sont qu'un des résultats qui découleront d'une ordonnance rendue par suite de cette instance. La dénonciation publique des actes reprochés en l'espèce revêt par ailleurs une importante valeur symbolique. De plus, il y a un avantage possible sur le plan éducatif et, en fin de compte, du point de vue de l'effet préventif qui peut découler d'un débat ouvert sur les principes énoncés dans cette décision et toute autre décision du Tribunal.

[148] Une ordonnance de cesser et de s'abstenir peut avoir un effet à la fois pratique et symbolique. Sur le plan pratique, elle empêchera l'intimé de continuer de communiquer, sur Internet, des messages de la nature décrite dans la présente décision. Sur le plan symbolique, il y a certainement avantage à dénoncer publiquement les actes à l'origine de la présente plainte, et une telle ordonnance comporte également une importante valeur éducative.

[149] Eu égard aux articles affichés par l'intimé, le Tribunal est d'avis que la délivrance d'une ordonnance de cesser et de s'abstenir est tout à fait légitime. Il est donc ordonné à l'intimé, Terry Tremaine, de cesser l'acte discriminatoire consistant à communiquer ou à faire communiquer, de la manière décrite dans l'article 13 de la Loi, à savoir Internet, des articles du genre de ceux qui ont été jugés contraires au paragraphe 13(1) dans la présente affaire, ou tout autre document au contenu sensiblement analogue qui est susceptible d'exposer à la haine ou au mépris des personnes appartenant à un groupe identifiable sur la base d'un motif de distinction illicite.

(ii) Indemnité selon l'alinéa 54(1)b) de la Loi

[150] L'alinéa 54(1)b) de la Loi prévoit que le Tribunal peut ordonner le paiement à la victime d'une indemnité spéciale ne dépassant pas 20 000 $ si la victime est expressément identifiée dans la communication qui a constitué l'acte discriminatoire, et si le Tribunal est d'avis que l'intimé s'est livré à l'acte discriminatoire d'une manière délibérée ou inconsidérée. Le plaignant veut obtenir de l'intimé une indemnité spéciale de 10 000 $.

[151] Le plaignant fait valoir que, pour que le paiement d'une indemnité soit ordonné en vertu de cet article, il suffit que le Tribunal soit convaincu que la victime est expressément identifiée dans les messages discriminatoires et que l'intimé a commis l'acte discriminatoire d'une manière délibérée ou inconsidérée. Il fait valoir qu'aucun autre facteur ne doit être pris en compte.

[152] Le paragraphe 54(1) donne au Tribunal le pouvoir discrétionnaire d'ordonner un ou plusieurs des redressements qu'il énumère. Il dispose que le membre instructeur... peut rendre/ The member or panel may make only one or more of the following orders. (L'italique est de moi.) Le paragraphe 53(3), auquel se réfère l'alinéa 54(1)b), emploie lui aussi le mot peut/may.

[153] Lorsque le mot peut est employé dans une loi, un doute subsiste rarement sur le sens de ce mot (voir la Loi d'interprétation, L.R.C. 1985, ch. I-21, article 11). Ce mot signifie que le législateur autorise une personne à faire quelque chose qu'elle n'aurait pas autrement le pouvoir de faire, ou à faire quelque chose qui serait autrement sans effet juridique. En l'espèce, le Parlement a habilité le membre instructeur à ordonner certains redressements, y compris le versement d'une indemnité spéciale à la victime. Lorsqu'un pouvoir est conféré par une loi avec le mot peut, il s'ensuit que le pouvoir conféré est discrétionnaire et que la personne autorisée à l'exercer est libre légalement de l'exercer ou de ne pas l'exercer. Ce pouvoir discrétionnaire doit toutefois être exercé avec discernement et à la lumière de la preuve produite devant le Tribunal (voir le jugement Commission canadienne des droits de la personne c. Dumont, 2002 CFPI 1280, aux paragraphes 12 à 15).

[154] En l'espèce, l'alinéa 54(1)b) prévoit que le paiement d'une indemnité peut être ordonné lorsque :

  1. une victime;
  2. est expressément identifiée dans la communication qui constituait l'acte discriminatoire; et
  3. l'intimé s'est livré à l'acte discriminatoire d'une manière délibérée ou inconsidérée.

[155] La première condition est que c'est à une victime que l'indemnité doit être versée. Le Tribunal doit décider si le plaignant, dans le cas présent, est une victime de l'acte discriminatoire.

[156] Dans sa plaidoirie, l'avocate de la Commission a examiné cet aspect. Elle s'est référée au paragraphe 40(1) de la Loi, ainsi rédigé

40. (1) Sous réserve des paragraphes (5) et (7), un individu ou un groupe d'individus ayant des motifs raisonnables de croire qu'une personne a commis un acte discriminatoire peut déposer une plainte devant la Commission en la forme acceptable pour cette dernière.

40. (1) Subject to subsections (5) and (7), any individual or group of individuals having reasonable grounds for believing that a person is engaging or has engaged in a discriminatory practice may file with the Commission a complaint in a form acceptable to the Commission.

:

[157] Point intéressant à noter, l'alinéa 40(5)b) de la Loi prévoit expressément un cas tel que celui en l'espèce :

40(5) - Pour l'application de la présente partie, la Commission n'est validement saisie d'une plainte que si l'acte discriminatoire:

b) a eu lieu au Canada sans qu'il soit possible d'en identifier la victime, mais tombe sous le coup des articles 5, 8, 10, 12, ou 13.

(Non souligné dans l'originale.)

40(5) - No complaint in relation to a discriminatory practice may be dealt with by the Commission under this Part unless the act or omission that constitutes the practice

(b) occurred in Canada and was a discriminatory practice within the meaning of section 5, 8, 10, 12 or 13 in respect of which no particular individual is identifiable as the victim.

(The emphasis is mine.)

[158] Dans sa plaidoirie, la Commission a ajouté à juste titre que, eu égard à ce paragraphe, il n'est pas nécessaire qu'il y ait une victime pour qu'une plainte puisse être déposée en vertu de l'article 13 de la Loi. Elle s'est aussi référée à la décision Warman c. Winnicki, précitée, dans laquelle, au paragraphe 46, le Tribunal écrivait que, selon l'article 13, il n'était pas nécessaire de prouver qu'une personne avait en réalité été victime de la haine ou du mépris dirigé vers le groupe cible. La Commission a conclu en affirmant que la jurisprudence, et en particulier la Loi, autorise manifestement une personne ou un groupe de personne à déposer, en vertu de cet article, une plainte de violation des droits de la personne, qu'elles soient ou non les victimes de l'acte discriminatoire allégué. D'après la Commission, il n'était pas nécessaire de se demander en l'espèce si le plaignant était ou non une victime.

[159] Pour sa part, le plaignant n'a produit durant l'audience aucune preuve susceptible d'établir qu'il a été victime de l'acte discriminatoire commis par l'intimé. Il n'avait pas à le prouver pour déposer sa plainte. Dans sa plainte initiale, le plaignant avait sollicité un redressement au titre de l'article 14.1 de la Loi, pour représailles. Au début de l'audience, il a décidé de se désister de cette prétention. Il ne peut pas maintenant faire volte-face en demandant le versement d'une indemnité spéciale au titre de l'alinéa 54(1)b). Le Tribunal arrive donc à la conclusion, pour le motif susmentionné, que le plaignant n'a pas produit la preuve requise par cet alinéa.

[160] Le Tribunal arrive donc à la conclusion que la demande d'indemnité présentée par le plaignant en vertu de l'alinéa 54(1)b) n'est pas fondée.

(iii) Ordonnance imposant une sanction pécuniaire selon l'alinéa 54(1)c)

[161] L'alinéa 54(1)c) prévoit que le Tribunal peut rendre une ordonnance imposant à l'intimé une sanction pécuniaire d'au plus 10 000 $. Lorsqu'il décide s'il convient ou non de rendre une telle ordonnance, le Tribunal doit, selon le paragraphe 54(1.1), prendre en compte :

  1. la nature et la gravité de l'acte discriminatoire, ainsi que les circonstances qui l'entouraient;
  2. la nature délibérée de l'acte;
  3. les antécédents discriminatoires de son auteur;
  4. la capacité de payer de son auteur.

[162] Les nombreux messages haineux affichés par l'intimé étaient très méprisants et très blessants. Ils qualifiaient de mauvais et de criminels les membres des groupes visés. Ils qualifiaient les Juifs de parasites et de vermines. Ils prétendaient que les Noirs avaient une intelligence inférieure à celle des Blancs. Ils appelaient à l'expulsion des Juifs, des Noirs et des autres non-Blancs du Canada. Ces messages sont malicieux, malveillants et extrêmes dans le caractère violent de leur résonance.

[163] La promotion active, par l'intimé, de la haine et du mépris à l'endroit des membres des groupes visés va foncièrement à contre-courant de l'objet de la Loi canadienne sur les droits de la personne, qui est de favoriser une société dont tous les membres sont à l'abri de la discrimination et dont tous peuvent bénéficier des mêmes possibilités, sans égard à leurs caractéristiques personnelles, telles que la race, l'origine nationale ou ethnique, la couleur ou l'orientation sexuelle.

[164] Il faut dire, au crédit de l'intimé, que rien ne donnait à penser qu'il s'était déjà livré à des actes discriminatoires avant de commencer à afficher des articles sur le site Web Stormfront en 2004. Dans l'établissement de la sanction pécuniaire à imposer, il convient aussi de prendre en compte le fait que, durant une période d'environ dix mois, après que la plainte lui fut signifiée, l'intimé s'est abstenu d'afficher des messages et il a même, à un certain moment, désavoué et répudié tous ses messages.

[165] Quant à l'étendue des messages haineux, la preuve montre que l'intimé avait, au 28 juillet 2006, affiché près de 1 900 messages sur le site Stormfront. Comme le Tribunal n'a pas vu ni lu tous ces messages, il ne saurait, en toute justice pour l'intimé, conclure que tous renferment des messages haineux de la nature de ceux qui ont été produits comme preuve dans la présente affaire. Par conséquent, le Tribunal ne saurait arriver à la conclusion que le nombre de messages affichés milite en faveur d'une sanction pécuniaire à l'extrémité la plus élevée du registre.

[166] La volonté délibérée de l'intimé de commettre les actes discriminatoires est évidente, vu le ton malveillant des messages eux-mêmes. Il a réaffirmé à l'audience qu'il s'en tenait à tout ce qu'il avait écrit dans ses articles, il a refusé d'exprimer le moindre remords et il n'a montré aucun signe d'une quelconque intention de mettre fin à ses activités.

[167] L'intimé a exposé sa situation financière. Il a témoigné qu'il n'avait ni voiture ni maison. Il a perdu son emploi à l'Université de la Saskatchewan. Il a témoigné qu'il travaille actuellement 20 heures par semaine au salaire minimum, pour un revenu net d'environ 600 $ par mois. Cette preuve n'a pas été contestée, et l'intimé n'a pas été contre-interrogé sur cet aspect, ni par la Commission, ni par le plaignant.

[168] Eu égard à la nature, aux circonstances, à la gravité et au caractère intentionnel des communications, et compte tenu de tous les autres facteurs, je suis d'avis qu'une sanction pécuniaire de 4 000 $ serait raisonnable dans les présentes circonstances.

V. ORDONNANCE

[169] Pour les motifs susmentionnés, le Tribunal affirme que la plainte déposée contre Terry Tremaine est fondée et il ordonne ce qui suit :

  1. que Terry Tremaine, et les autres personnes qui agissent en concertation avec lui, mettent fin à l'acte discriminatoire consistant à utiliser ou à faire utiliser un téléphone en recourant ou en faisant recourir aux services d'une entreprise de télécommunications relevant de la compétence du Parlement, pour communiquer des messages du genre de ceux qui ont ici été déclarés contraires au paragraphe 13(1), ou tout autre message présentant un contenu sensiblement analogue, qui sont susceptibles d'exposer à la haine ou au mépris des personnes appartenant à un groupe identifiable en raison d'un motif de distinction illicite, contrevenant ainsi au paragraphe 13(1) de la Loi canadienne sur les droits de la personne;
  2. que Terry Tremaine soit condamné à une sanction pécuniaire de 4 000 $. Cette somme sera payée par chèque visé ou mandat, à l'ordre du Receveur général du Canada, et devra être reçue par le Tribunal dans les 120 jours qui suivront la notification de la présente décision à M. Tremaine.

Michel Doucet

OTTAWA (Ontario)
Le 2 février 2007

PARTIES AU DOSSIER

DOSSIER DU TRIBUNAL :

T1104/8505

INTITULÉ DE LA CAUSE :

Richard Warman c. Terry Tremaine

DATE ET LIEU DE L'AUDIENCE :

Les 8 au 11 août 2006
Ottawa (Ontario)

DATE DE LA DÉCISION DU TRIBUNAL :

Le 2 février 2007

ONT COMPARU :

Richard Warman

Pour lui-même

Ikram Warsame
Giacomo Vigna

Pour la Commission canadienne des droits de la personne

Terry Tremaine
Paul Fromm

Pour l'intimé

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