Tribunal canadien des droits de la personne

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Contenu de la décision

Entre :

Ali Tahmourpour

le plaignant

- et -

Commission canadienne des droits de la personne

la Commission

- et -

La gendarmerie royale du Canada

l'intimée

Décision sur requête

Membre : Wallace G. Craig
Date : Le 13 décembre 2010
Référence : 2010 TCDP 34

Table des matières

I Introduction.

II Résumé des procédures.

III Extraits tirés des procédures antérieures.

IV Extraits de la décision du tribunal

V Réexamen.

I. Introduction

[1] Le 16 avril 2008, le membre du Tribunal Karen A. Jensen a conclu, dans Tahmourpour c. Canada (Gendarmerie royale du Canada), que la plainte de discrimination dont il était question dans cette cause était fondée.

[2] La Cour fédérale a infirmé la décision du membre Jensen, mais celle‑ci a été rétablie par la Cour d’appel fédérale, sauf en ce qui concerne l’ordonnance de réparation no (iv) énoncée ci‑dessous. La Cour d’appel fédérale a demandé au Tribunal de réexaminer cet élément.

[3] Le président du Tribunal a demandé à Mme Jensen de réexaminer l’ordonnance de réparation, mais celle‑ci a respectueusement refusé, et le président du Tribunal m’a confié cette tâche.

II. Résumé des procédures

[4] Le 21 mars 2001, M. Ali Tahmourpour a déposé une plainte auprès de la Commission canadienne des droits de la personne contre la Gendarmerie royale du Canada (GRC). Il prétend que la GRC a agi de façon discriminatoire envers lui, en contravention des articles 7 et 14 de la Loi canadienne sur les droits de la personne, L.R.C. 1985, ch. H-6 (la Loi). La plainte de M. Tahmourpour a été instruite devant le Tribunal canadien des droits de la personne (le TCDP) en août et septembre 2007. Dans une décision datée du 16 avril 2008, le membre Jensen a conclu que la plainte était fondée à plusieurs égards. En vertu du pouvoir que lui confère le paragraphe 53(2) de la Loi, le membre Jensen a rendu les ordonnances de réparation suivantes :

  1. Sauf entente contraire, l'intimée offrira à M. Tahmourpour la chance de s'inscrire au prochain Programme d'instruction des cadets de la GRC au Dépôt ;
  2. Si M. Tahmourpour accepte l'offre de réadmission, l'intimée évaluera équitablement ses habiletés dès le début du programme de formation dans le but de déterminer les domaines dans lesquels il a besoin de formation ;
  3. L'intimée versera à M. Tahmourpour une indemnité pour le salaire et les avantages sociaux qu'il aurait touchés durant les premiers deux ans et douze semaines de travail en tant que policier de la GRC après l'obtention du diplôme au Dépôt. L'indemnité sera diminuée de 8 % ;
  4. L'intimée paiera à M. Tahmourpour la différence entre le salaire moyen pour un travail à temps plein dans l'industrie au Canada pour les personnes de l'âge de M. Tahmourpour et le salaire qu'il aurait touché en tant que policier de la GRC jusqu'à ce que M. Tahmourpour accepte ou rejette l'offre de réadmission au programme de formation au Dépôt. L'intimée versera à M. Tahmourpour le montant moyen payé pour les heures supplémentaires aux autres agents diplômés du Dépôt en 1999, sauf entente contraire entre les parties. L'indemnité sera diminuée de 8 % ;
  5. L’'indemnité doit tenir compte d'une promotion au rang de caporal après 7 ans ;
  6. Les parties tenteront de s'entendre sur les mesures à prendre et le calendrier de mise en oeuvre relativement aux questions présentées dans la section redressement systémique de la présente décision. Si les parties sont incapables de s'entendre sur cette partie de l'adjudication dans les trois mois suivant la date de la présente décision, le Tribunal rendra une décision définitive ;
  7. L’intimée versera 9 000 $ à M. Tahmourpour à titre d'indemnité pour le préjudice moral causé par les actes discriminatoires ;
  8. L’'intimée versera 12 000 $ à M. Tahmourpour en vertu du paragraphe 53(3) de la Loi ;
  9. L’intimée versera 9 500 $ à M. Tahmourpour à titre d'indemnité pour les dépenses qu'il a engagées pour atténuer ses pertes. L'intimée indemnisera également M. Tahmourpour pour les frais juridiques engagés en l'espèce ;
  10. L’intimée paiera les intérêts sur les indemnités accordées en l'espèce, conformément aux modalités susmentionnées.

[5] La GRC a demandé à la Cour fédérale de contrôler judiciairement la décision du Tribunal et, le 6 octobre 2009, la Cour fédérale a annulé la décision et a renvoyé la plainte au Tribunal afin qu’elle soit entendue par un autre membre (2009 CF 1009). M. Tahmourpour a interjeté appel du jugement de la Cour fédérale et, le 19 juillet 2010, la Cour d‘appel fédérale a rétabli la décision du Tribunal à tous égards, sauf en ce qui concerne l’ordonnance de réparation no (iv), laquelle prévoit une indemnité pécuniaire pour pertes de salaire futures :

[L]’appel [est accueilli], exception faite de la question du plafonnement ou de la limite à établir à l’égard de l’indemnité complémentaire accordée dans l’ordonnance de réparation. [...] les paragraphes 2 et 3 du jugement de la Cour fédérale [sont annulés] et [sont remplacés] par les suivants ;

2. La demande de contrôle judiciaire n’est accueillie qu’à l’égard de la première phrase de l’alinéa iv) du paragraphe 267 de la décision du Tribunal canadien des droits de la personne en date du 16 avril 2008, et elle est rejetée à tous autres égards.

3. L’affaire est renvoyée au Tribunal pour qu’il réexamine la première phrase de l’alinéa iv) du paragraphe 267 conformément aux motifs de la décision de la Cour d’appel fédérale rendue dans le dossier A‑453‑09.

III. Extraits tirés des procédures antérieures

[6] Les extraits suivants tirés du jugement de la Cour d’appel fédérale et de la décision rendue par la Cour fédérale en contrôle judiciaire sont pertinents dans le cadre du réexamen de la présente affaire.

La Cour d’appel fédérale

[40] La partie pertinente de l’ordonnance de réparation est ainsi conçue (paragraphe 267 de la décision du Tribunal) :

(iii) l’intimée versera à M. Tahmourpour une indemnité pour le salaire et les avantages sociaux qu’il aurait touchés durant les premiers deux ans et douze semaines de travail en tant que policier de la GRC après l’obtention du diplôme au Dépôt. L’indemnité sera diminuée de 8 %.

(iv) l’intimée paiera à M. Tahmourpour la différence entre le salaire moyen pour un travail à temps plein dans l’industrie au Canada pour les personnes de l’âge de M. Tahmourpour et le salaire qu’il aurait touché en tant que policier de la GRC jusqu’à ce que M. Tahmourpour accepte ou rejette l’offre de réadmission au programme de formation au Dépôt. […]

[41] Telle que je la comprends, cette partie de l’ordonnance établit deux périodes différentes pour ce qui est de l’indemnisation pécuniaire. La première période, que les parties appellent parfois période de grâce, d’une durée de 2 ans et 12 semaines, débute à la date à laquelle M. Tahmourpour aurait obtenu son diplôme du Dépôt si son contrat n’avait pas été résilié. Le Tribunal a estimé qu’à l’égard de cette période, M. Tahmourpour avait droit à un montant équivalent au salaire qu’il aurait touché en tant qu’agent de la GRC, moins 8 %.

[42] La deuxième période commence tout de suite après la période de grâce et se termine à la date de l’acceptation ou du rejet d’une offre de réadmission par M. Tahmourpour. Pour cette période, M. Tahmourpour a droit à une autre indemnité que j’appellerai complémentaire, dont le montant équivaut à la différence entre le salaire moyen versé dans l’industrie au Canada aux personnes de son âge pour un travail à temps plein et le salaire qu’il aurait touché pendant cette période en tant que policier de la GRC, moins 8 %. (L’ordonnance prévoit un ajustement supplémentaire pour tenir compte de l’hypothèse que M. Tahmourpour aurait touché une rémunération pour heures supplémentaires et aurait eu une promotion au cours de la deuxième période, mais il n’est pas nécessaire de s’y arrêter pour les besoins de notre analyse).

[43] Puisque la deuxième période se termine nécessairement après la date de la décision du Tribunal, le 16 avril 2008, il s’ensuit que sa durée serait nécessairement d’au moins six ans (de 2002 jusqu’au 16 avril 2008, au moins).

[44] Le dossier n’indique pas clairement si la deuxième période a pris fin ni à quel moment elle pourrait vraisemblablement se terminer. Si l’on interprète de façon littérale cette partie de la réparation, la deuxième période pourrait durer indéfiniment si M. Tahmourpour s’abstient simplement d’accepter ou de rejeter une offre de réadmission, à moins qu’elle ne soit assortie d’une condition portant qu’elle sera réputée rejetée si elle n’est pas acceptée dans un délai déterminé, comme cela a été proposé lors de l’audition de l’appel.

[45] La Cour fédérale a accepté l’argument de la GRC selon lequel l’octroi de l’indemnité complémentaire contrevient au principe de la nécessité de l’existence d’un lien causal entre l’acte discriminatoire et la perte (voir Chopra (précité), au paragraphe 37). M. Tahmourpour soutient que l’indemnité complémentaire est raisonnable et que le juge a erronément tiré la conclusion contraire).

[46] De toute évidence, le Tribunal connaissait l’arrêt Chopra et les principes qui y étaient formulés concernant les dommages‑intérêts. Voici un résumé des conclusions de fait formulées sur ce point par le Tribunal :

La discrimination dont la GRC a fait preuve à l’endroit de M. Tahmourpour a empêché celui‑ci de terminer sa formation au Dépôt et de gagner sa vie comme agent de la GRC. Il doit être indemnisé pour la perte du salaire qu’il aurait touché. La probabilité de réussite des cadets n’appartenant pas à une minorité visible étant de 93 %, il y a lieu de réduire l’indemnité (ce qui justifie une réduction de 7 %), et une réduction supplémentaire de 1 % s’impose du fait que le taux moyen d’attrition des membres réguliers au cours des 20 premières années d’emploi est de 1 %. Il n’y a pas lieu de prévoir de réduction supplémentaire pour tenir compte du fait que les lacunes démontrées de M. Tahmourpour augmentaient la probabilité qu’il échoue, parce qu’il est impossible de savoir dans quelle mesure elles ont été causées par le traitement discriminatoire. Il s’impose de prendre en compte l’obligation d’atténuation des pertes de M. Tahmourpour. Celui‑ci ne s’est pas suffisamment efforcé d’atténuer ses pertes entre le moment où il a quitté le Dépôt et le début de l’audience. De 2000 à 2002, toutefois, il lui était difficile de travailler à cause des répercussions psychologiques de son expérience au Dépôt et parce qu’il devait nécessairement consacrer du temps à sa plainte. C’est pourquoi la période de grâce a été établie à 2 ans et 12 semaines. Après cette période, toutefois, il aurait pu travailler. [Non souligné dans l’original.)

[47] Suivant ma lecture de la décision du Tribunal, celui‑ci n’a pas tenu compte d’autres faits pour établir le montant de l’indemnité pécuniaire. La décision du Tribunal ne permet pas de déterminer pourquoi il a retenu la date du rejet ou de l’acceptation d’une offre de réadmission comme date de fin de la deuxième période au lieu d’établir une date antérieure. Je souscris à l’opinion du juge que le Tribunal ne s’est pas arrêté à la question du moment auquel la discrimination subie par M. Tahmourpour avait cessé d’agir sur sa capacité d’occuper un emploi rémunérateur, après la fin de la période de grâce. En l’absence d’explication du Tribunal, on ne saurait juger raisonnable la partie de l’ordonnance relative à l’indemnité complémentaire. [Non souligné dans l’original.]

[48] Puisque je partage l’avis du juge de la Cour fédérale à l’égard d’un motif d’appel, se pose la question de savoir si la réparation ordonnée par le juge (le renvoi de l’affaire devant le Tribunal pour qu’il la réentende) doit être maintenue. À mon avis, la question du plafond ou de la limite à établir à l’égard de l’indemnité complémentaire revient au Tribunal. En conséquence, je suis d’avis de lui renvoyer l’affaire afin qu’il examine uniquement la question du plafonnement ou de la limitation de l’indemnité.” [Non souligné dans l’original.]

Le contrôle judiciaire effectué par la Cour fédérale

[84] Le demandeur a également soutenu qu’il devrait y avoir une limite d’environ deux ans quant à l’indemnisation pour perte de salaire. Le demandeur se fonde sur la décision du Tribunal d’appel de la Commission canadienne des droits de la personne et l’arrêt de la Cour d’appel fédérale dans l’affaire Morgan c. Canada (Forces armées canadiennes), [1990] D.C.D.P. no 10 (QL); inf. [1992] 2 C.F. 401 (C.A.F.).

[85] Dans l’affaire Morgan, il a été conclu que l’on avait refusé à M. Morgan un poste au sein des Forces armées canadiennes en raison d’actes discriminatoires exercés par les Forces, par opposition à la simple perte d’une occasion d’emploi. La majorité du Tribunal d’appel a conclu que, lorsqu’une ordonnance de réintégration est prononcée, l’indemnisation doit se poursuivre jusqu’à ce que l’ordonnance soit respectée. La Cour d’appel fédérale n’a pas souscrit à cette conclusion. Elle a estimé que le Tribunal d’appel avait commis une erreur en ne fixant pas une limite à la période d’indemnisation indépendamment de l’ordonnance de réintégration. La Cour d’appel a souscrit à l’observation du membre minoritaire du Tribunal d’appel selon lequel il n’est pas nécessaire que la période d’indemnisation coïncide avec la réintégration, peu importe quand elle a lieu , et elle a conclu que la majorité avait commis une erreur en ne fixant pas une limite. … [Non souligné dans l’original.]

[86] Le membre minoritaire, dont la décision a été acceptée par la Cour d’appel fédérale, a conclu que les Forces armées auraient dû raisonnablement prévoir que les conséquences des actes discriminatoires s’étendraient sur une période d’environ trois ans et demi.

[87] En l’espèce, le Tribunal n’a fait aucune analyse quant à une période limite, et il n’a pas non plus effectué quelque analyse que ce soit quant à savoir si la période pouvait raisonnablement s’étendre jusqu’à la date de sa décision, laquelle a été rendue près de huit ans et demi après la résiliation du contrat de cadet de M Tahmourpour.

[88] Le Tribunal a commis une erreur en n’effectuant pas cette analyse. Les dommages et intérêts prévus par la Loi ne peuvent s’accumuler indéfiniment et, comme la Cour d’appel fédérale l’a mentionné dans l’arrêt Morgan, [le bon sens impose] qu’il y a une limite à la responsabilité de l’auteur du préjudice quant aux conséquences de son acte [discriminatoire].

[91] Je conclus que le Tribunal : […] d) a commis une erreur en accordant une indemnisation pour perte de salaire payable jusqu’à la réintégration dans le programme de formation sans avoir effectué d’analyse quant à savoir si cette période pouvait raisonnablement s’étendre jusqu’à la date de la réintégration.

IV. Extraits de la décision du tribunal

[7] J’ai examiné attentivement la décision du Tribunal, notamment les extraits suivants :

Faut-il indemniser M. Tahmourpour pour la perte de salaire due à l'occasion perdue de terminer la formation en raison de la conduite discriminatoire de la GRC ?

[218] Oui. La conduite discriminatoire de la GRC a privé M. Tahmourpour de l'occasion de terminer la formation et de gagner sa vie comme agent de la GRC. Il doit être indemnisé pour la perte du salaire qu'il aurait gagné.

Comment faut-il calculer la perte de salaire résultant de l'occasion perdue ?

“[219] La Cour d'appel a jugé que l'approche adoptée par le Tribunal dans Chopra, consistant à indemniser la perte de salaire tout en tenant compte de toute incertitude quant à l'obtention du poste, constituait une manière acceptable d'indemniser pour une chance perdue (Chopra, au paragraphe 43). J'adopterai la même approche. …

Pour quelle période M. Tahmourpour doit-il être indemnisé ?

[224] M. Tahmourpour a demandé qu'on lui paye le salaire et les avantages sociaux perdus de manière rétroactive, de 1999 jusqu'à ce qu'à sa nomination comme agent de la GRC ou, à titre subsidiaire, jusqu'à la date de la présente décision si elle est accompagnée d'une autre ordonnance prévoyant la compensation des pertes futures au cas où la nomination ne serait pas ordonnée.

[225] D'abord, pour ce qui est du paiement rétroactif du salaire et des avantages sociaux perdus, la Cour d'appel, dans l'arrêt Chopra, a déclaré que, dans l'exercice qu'il fait du pouvoir discrétionnaire que lui confère l'alinéa 53(2)c) d'indemniser la victime de la totalité ou de la fraction des pertes de salaire entraînées par l'acte discriminatoire, le Tribunal peut bien être d'avis que les principes qui sous-tendent la doctrine de l'atténuation des pertes dans d'autres contextes s'appliquent aussi dans un contexte comme celui-ci. La société a intérêt à encourager l'efficience économique en exigeant que les personnes qui ont subi des pertes prennent des mesures pour minimiser leur perte, puisqu'il n'est pas dans l'intérêt public de permettre que des membres de la société maximisent leur perte au détriment d'autres personnes, même si celles-ci sont responsables de la perte. Aussi un tribunal peut-il, bien qu'il n'y soit pas tenu, appliquer la doctrine de l'atténuation des pertes dans l'exercice de son pouvoir discrétionnaire de fixer l'indemnité qui devra être versée à un plaignant.

[226] J'estime qu'il convient en l'espèce d'examiner si M. Tahmourpour a pris des mesures pour minimiser ses pertes. La preuve de M. Tahmourpour à cet égard était faible. […] [Non souligné dans l’original.]

[231] J'estime que M. Tahmourpour n'a pas fait suffisamment d'efforts pour atténuer ses pertes de la date où il a quitté le Dépôt jusqu'au début de l'audience en août 2007. [Non souligné dans l’original.]

[232] […] Je ne suis pas convaincue que M. Tahmourpour a réellement tenté de se trouver un emploi lucratif qui aurait diminué ses pertes. En fait, il a déclaré qu'il ne pouvait le faire parce que sa plainte relative aux droits de la personne prenait tout son temps. [Non souligné dans l’original.]

[233] Je ne crois pas que travailler à sa plainte relative aux droits de la personne exigeait de M. Tahmourpour un effort à temps plein […] Par conséquent, j'estime qu'il n'est pas raisonnable que M. Tahmourpour n'ait pu travailler du tout (sauf pour vendre une propriété et obtenir un contrat de traduction) de janvier 2002 jusqu'à aujourd'hui. [Non souligné dans l’original.]

[236] La GRC paiera à M. Tahmourpour le salaire à temps plein et les avantages sociaux qu'il aurait reçus pendant deux ans à compter de janvier 2000 […] En plus, la GRC paiera à M. Tahmourpour le salaire et les avantages sociaux qu'il aurait reçus pour 480 autres heures de travail.

[237] Sauf pour la période pendant laquelle M. Tahmourpour ne pouvait travailler pour des raisons de santé et pour des raisons liées à la plainte, j'estime que M. Tahmourpour aurait pu travailler jusqu'à ce jour. Je ne souscris pas à son argument voulant que le travail exigé par sa plainte relative aux droits de la personne l'ait empêché de travailler à temps plein depuis le moment où il s'est senti suffisamment bien pour travailler jusqu'au début de l'audience, en août 2007. Les gens prennent toutes sortes de mesures et de moyens pour exercer des activités importantes même s'ils travaillent à temps plein. M. Tahmourpour aurait pu faire de même. [Non souligné dans l’original.]

[238] La GRC ne devrait payer que la différence entre ce que M. Tahmourpour aurait gagné comme employé à temps plein et ce qu'il aurait gagné en tant que policier de la GRC, de la date à laquelle s'est terminée la période de grâce liée aux questions de santé et au travail sur la plainte jusqu'à la date de la présente décision. Par conséquent, la GRC doit payer la différence entre le salaire moyen pour un travail à temps plein dans l'industrie au Canada pour les personnes de l'âge de M. Tahmourpour et le salaire qu'il aurait reçu en tant que policier de la GRC pour cette période. [Non souligné dans l’original.]

Faut-il rendre une ordonnance pour les pertes de salaire futures ?

[242] Rien ne prouve que l'acte discriminatoire a endommagé de manière permanente la capacité de travailler de M. Tahmourpour. […] [Non souligné dans l’original.]

[243] Par conséquent, jusqu'à ce que M. Tahmourpour reçoive une offre lui permettant de réintégrer le programme de formation, il doit lui être versé la différence entre le salaire moyen pour un travail à temps plein dans l'industrie au Canada pour les personnes de l'âge de M. Tahmourpour et le salaire qu'il aurait reçu en tant que policier de la GRC jusqu'à la date de l'offre de formation. [Non souligné dans l’original.]

[244] Dès qu'elle offre à M. Tahmourpour une place en formation, l'obligation de la GRC d'indemniser M. Tahmourpour pour la chance perdue de terminer la formation en 1999 s'éteint. Aucune autre indemnité ne doit être versée à ce titre.

V. Réexamen

[8] Les motifs du Tribunal concernant la période à l’égard de laquelle M. Tahmourpour devrait être indemnisé comportent un certain nombre de contradictions. Au début, le Tribunal conclut que la GRC devrait verser à M. Tahmourpour une indemnité complémentaire à compter de la date à laquelle s'est terminée la période de grâce jusqu'à la date de sa décision (voir le paragraphe 238). Le Tribunal conclut ensuite que l’ indemnité complémentaire devrait être versée jusqu’à ce que la GRC offre une formation à M. Tahmourpour (voir le paragraphe 243). Enfin, l’ordonnance de réparation no (iv) prévoit que la GRC verse une indemnité complémentaire jusqu’à ce que M. Tahmourpour accepte ou rejette l'offre de réadmission au programme de formation de la GRC.

[9] Compte tenu des décisions rendues par la Cour d’appel fédérale dans Morgan et Chopra, et après avoir examiné le jugement du Tribunal sur cette question, notamment la conclusion du Tribunal selon laquelle M. Tahmourpour aurait pu travailler entre la date de l’expiration de la période de grâce et la date de la décision du Tribunal, compte tenu que rien ne prouve que l'acte discriminatoire a nui de manière permanente à la capacité de travailler de M. Tahmourpour, et compte tenu que M. Tahmourpour ne s’est pas suffisamment efforcé d’atténuer ses pertes, selon moi, aucun fait, aucun motif et aucun lien de causalité ne justifie l’ordonnance de réparation no (iv) et le versement de l’indemnité pour perte de salaire après l’expiration de la période de grâce de deux ans et douze semaines.

Signée par

Wallace G. Craig
Membre du tribunal

Ottawa (Ontario)
Le 13 décembre 2010

TRIBUNAL canadien des droits de la personne

Parties au dossier

Dossier du tribunal : T1151/3306

Intitulé de la cause : Ali Tahmourpour c. Gendarmerie Royale du Canada

Date de la décision sur requête du tribunal : Le 13 décembre 2010

Comparutions :

Paul Champ, pour le plaignant

Giacomo Vigna et Samar Musallam, pour la Commission canadienne des droits de la personne

Kathryn Hucal, pour l'intimée

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