Tribunal canadien des droits de la personne

Informations sur la décision

Contenu de la décision

Canadian Human Rights Tribunal

Entre :

Leslie Hicks

le plaignant

- et -

La Commission canadienne des droits de la personne

la Commission

- et -

Ressources humaines et Développement des compétences Canada

l’intimé

Décision

Membre instructeur : Réjean Bélanger

Date :  Le 18 septembre 2013

Référence : 2013 TCDP 20

 



I.                   La plainte

[1]               Dans le cadre de son emploi, le plaignant a dû déménager de Sydney (Nouvelle‑Écosse) à Ottawa (Ontario). L’épouse du plaignant n’a pas déménagé à Ottawa avec le plaignant, en partie en raison de la maladie de sa mère. Par conséquent, le plaignant et son épouse occupaient deux résidences. Compte tenu de cette situation, le plaignant a présenté une demande d’indemnité pour occupation temporaire de deux résidences en vertu de la Directive sur la réinstallation de l’intimé. Cette demande a été rejetée.

[2]               La plainte en l’espèce porte sur l’interprétation et l’application de l’intimé de sa directive sur la réinstallation. Le plaignant soutient que, dans son interprétation et son application de la Directive sur la réinstallation, l’intimé a commis un acte discriminatoire au sens des articles 7 et 10 de la Loi canadienne sur les droits de la personne, L.R.C., 1985, ch. H-6 [la Loi], fondé sur la situation de famille et la déficience.

II.                Le contexte

[3]               Le Tribunal a tenu une audience pour cette affaire du 15 au 17 avril et le 7 mai 2013, à Ottawa (Ontario).

[4]               Le premier jour de l’audience, les parties se sont entendues sur un énoncé partiel des faits importants. Les faits convenus sont les suivants.

[5]               Le plaignant travaillait à Sydney (Nouvelle‑Écosse) pour le gouvernement dans l’industrie des mines de charbon souterraines sous réglementation fédérale au Cap‑Breton (Nouvelle‑Écosse). Il était conseiller principal, EN-ENG-05, pour la Commission de la sécurité dans les mines de charbon.

[6]               En 1999, l’employeur du plaignant, l’intimé, l’a avisé que son poste deviendrait excédentaire.

[7]               Le 21 janvier 2002, le plaignant a reçu une lettre officielle d’emploi et de réaffectation à Ottawa, datée du 14 janvier 2002, de Micheline Bélanger‑Brûlé, gestionnaire des ressources humaines pour l’intimé. La lettre expliquait que [traduction] « Vos dépenses de réinstallation seront remboursées aux frais de l’État conformément à la Directive sur la réinstallation du Conseil du Trésor ».

[8]               Le 18 février 2002, une lettre de Warren Edmondson a été envoyée au plaignant pour l’aviser des conditions de sa réaffectation. Cette lettre était accompagnée d’une lettre modifiée de réaffectation (la lettre du 18 février 2002).

[9]               Par courriel envoyé le 21 février 2002, le plaignant a accepté l’offre modifiée de réaffectation. Le 27 février 2002, Mme Bélanger‑Brûlé a envoyé une lettre au plaignant pour confirmer son acceptation des conditions énoncées dans la lettre du 18 février 2002 et pour l’aviser qu’il serait réaffecté à son nouveau poste en date du 4 mars 2002.

[10]           Le plaignant a été affecté à titre d’ingénieur en sécurité industrielle, EN-ENG-05, à temps plein pour une période indéterminée dans la Direction générale du travail, Division de santé et sécurité au travail et indemnisation, de l’intimé, située à l’administration centrale à Hull (Québec) (l’AC).

[11]           Le plaignant est entré en fonctions à l’AC le 16 septembre 2002. Il a officiellement déménagé à Ottawa le 17 octobre 2002.

[12]           La famille du plaignant, y compris son épouse, n’a pas déménagé avec lui en octobre 2002, en partie en raison des problèmes de santé graves de sa belle-mère.

[13]           La belle-mère du plaignant a déménagé dans un logement avec assistance vers mai 2002 et elle habitait dans ce logement lorsque le plaignant s’est réinstallé à l’AC en octobre 2002. Elle a emménagé dans un centre de soins de longue durée le 9 octobre 2003.

[14]           Le 22 septembre 2004, le plaignant a présenté une demande d’indemnisation (IOTDR) en vertu de la Directive du Conseil du Trésor sur l’Indemnité pour occupation temporaire de deux résidences (la Directive sur l’IOTDR). Entre autres, il a justifié sa demande d’indemnisation par le fait que son épouse devait rester à Sydney (Nouvelle‑Écosse) pour s’occuper de sa mère. En ce qui a trait à sa belle‑mère, l’indemnité demandée était de 21 247 $ et couvrait les douze premiers mois de la réinstallation, soit du 1er octobre 2002 au 20 septembre 2003.

[15]           La Directive sur la réinstallation en vigueur au début de la réinstallation du plaignant était la « Directive sur la réinstallation – En vigueur jusqu’au 31 mars 2003 (Archivée) », qui est entrée en vigueur en mars 1993 (la Directive sur la réinstallation de 1993). La Directive sur la réinstallation, y compris la Directive sur l’IOTDR, est réputée faire partie de la convention collective qui régit les conditions d’emploi du plaignant.

[16]           Pour la plainte en l’espèce, les parties pertinentes de la Directive sur la réinstallation de 1993 sont les suivantes :

Objet et portée

 

La politique du gouvernement est la suivante. Dans toute réinstallation, il faut viser à réinstaller l’employé de la façon la plus efficace, c.-à-d. au coût le plus raisonnable pour l’État tout en causant le moins d’ennuis possible à l’employé muté et à sa famille.

 

[...]

 

Champ d’application

           

La présente directive s’applique aux ministères, organismes et sociétés suivants énumérés dans la Loi sur la gestion des finances publiques :

 

-          tous les ministères de l’annexe I, I.1,

 

-          tous les établissements publics de l’annexe II,

 

-          les sociétés de l’annexe C énumérées à la partie I de l’annexe I de la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique, et

 

-          les directions du gouvernement désignées comme ministères aux fins de la Loi sur la gestion des finances publiques à l’exception des commissions royales d’enquête.

 

Sauf indication contraire, les dispositions relatives à la réinstallation s’appliquent à toutes les réinstallations au Canada par suite d’une mutation ou d’une nomination provenant d’un ministère quelconque ou d’un autre élément de la fonction publique du Canada tel que le définit l’article 11(1) de la Loi sur la gestion des finances publiques. Ces dispositions ne s’appliquent pas aux membres de la Gendarmerie royale du Canada (GRC) ni à ceux des Forces armées canadiennes.

 

[...]

 

Sauf indication contraire, les normes, les taux ou les indemnités et le remboursement des frais engagés, tels qu’autorisés par le présent chapitre, s’appliquent à toutes les personnes admissibles, sans considération d’âge, de sexe, d’état civil ou de situation familiale, ou de déficience.

 

[...]

 

Définitions

 

Personne à charge (dependant) - désigne toute personne qui habite avec l’employé ou la personne nommée et qui est, soit son conjoint soit la personne à l’égard de laquelle l’employé peut réclamer une exemption personnelle aux termes de la Loi de l’impôt sur le revenu, soit un enfant célibataire, un enfant né d’un mariage antérieur, un enfant adoptif ou sous la tutelle légale de l’employé (ou de son conjoint) qui ne fait pas l’objet d’une déduction d’impôt et qui fréquente une école à plein temps. Un membre de la famille qui réside en permanence avec l’employé mais auquel cette définition ne s’applique pas aux termes de la Loi de l’impôt sur le revenu parce qu’il reçoit une pension est aussi considéré comme une personne à charge en vertu de la présente directive;

 

[...]

 

1.2 Responsabilités

 

1.2.1 Dans tous les cas, les conditions du remboursement doivent être étudiées avec la personne qui doit se réinstaller, au moment où la réinstallation est autorisée.

 

1.2.2 Une fois que la réinstallation est autorisée :

 

[...]

 

c) on s’assurera que les dates fixées pour la réinstallation et le voyage relié à cette dernière conviennent à l’employeur comme à l’employé. La réinstallation devrait être planifiée de manière à minimiser tant les bouleversements de la vie familiale que les frais de l’employeur; à cette fin, les gestionnaires veilleront à ce qu’on donne aux employés mutés des conseils pertinents et à ce qu’on fournisse rapidement et correctement les renseignements qu’ils demandent au sujet de la présente directive.

 

Indemnité pour l’occupation temporaire de deux résidences (IOTDR)

 

2.11 Critères

 

2.11.1 L’aide financière accordée vise à compenser les frais rattachés à la deuxième résidence. L’employé continuera d’assumer les frais rattachés à une résidence.

 

2.11.2 L’employé peut obtenir une aide financière à l’égard des frais de subsistance lorsqu’il doit occuper temporairement deux résidences au début de la période de réinstallation, c.-à-d. :

 

a) si l’un des logements est occupé par une ou plusieurs personnes à sa charge, ce qui comprend le conjoint :

 

- à cause d’une maladie temporaire, ou

 

[...]

[17]           L’aide financière accordée en vertu de la Directive sur l’IOTDR ne peut être demandée que pour une personne à charge, et seulement une personne « qui réside en permanence avec l’employé [avant la réinstallation] » peut être qualifiée de « personne à charge » au sens de la Directive sur la réinstallation de 1993.

[18]           Le 1er avril 2009, la définition de « personne à charge » au sens de la Directive sur la réinstallation a été élargie afin d’inclure « [une personne] qui n’habite pas à la résidence du ou de la fonctionnaire mais pour qui le ou la fonctionnaire a officiellement déclaré une responsabilité d’assistance et/ou de soutien ».

[19]           Le 23 novembre 2004, l’intimé a rejeté la demande d’aide financière du plaignant présentée en vertu de la Directive sur l’IOTDR.

[20]           Le plaignant a déposé un grief contestant le rejet de sa demande d’indemnité, qui a été reçu le 2 décembre 2004.

[21]           Le grief du plaignant a été entendu au premier palier en janvier 2005. Il a reçu la décision de l’intimé rejetant son grief le 10 février 2005. Le rejet était fondé sur le fait que le plaignant n’avait [traduction] « pas droit à l’indemnité pour occupation temporaire de deux résidences parce qu’il était locataire et non propriétaire d’une maison à Sydney ».

[22]           Le grief du plaignant a été entendu au deuxième palier, et une décision rejetant ce grief a été rendue le 17 juin 2005. Le motif du rejet était que [traduction] « votre demande pour votre belle‑mère ne peut pas être approuvée parce qu’elle n’habitait pas avec vous à la résidence principale et que, par conséquent, elle n’est pas une personne à charge au sens de la Directive sur la réinstallation de 1993 ».

[23]           Le grief du plaignant a été entendu au troisième palier le 15 mars 2006 devant le Comité exécutif du Conseil national mixte (le CNM). Le grief a été rejeté pour le même motif qu’au deuxième palier.

[24]           Le grief du plaignant a ensuite été renvoyé pour arbitrage devant la Commission des relations de travail dans la fonction publique (la CRTFP) le 18 juillet 2006.

[25]           Le 19 juillet 2006, le plaignant a déposé la plainte en l’espèce à la Commission canadienne des droits de la personne (la Commission).

[26]           Entre-temps, la belle-mère du plaignant est décédée le 13 janvier 2007, alors qu’elle habitait au centre de soins de longue durée.

[27]           Les parties au grief, le plaignant et l’intimé, ont présenté à l’arbitre un « exposé conjoint des faits » signé par les représentants des deux parties et daté du 26 janvier 2007.

[28]           Le grief a été entendu en arbitrage accéléré le 26 janvier 2007. La CRTFP a rendu sa décision rejetant le grief du plaignant le 2 février 2007. Le grief a été rejeté pour les mêmes motifs qu’au troisième palier (voir Hicks c. Conseil du Trésor (Ministère des Ressources humaines et du Développement des compétences), 2007 CRTFP 16.

[29]           Le 26 octobre 2007, la Commission a avisé le plaignant qu’elle ne ferait pas enquête sur sa plainte, conformément à l’alinéa 41(1)c) de la Loi. Le plaignant a demandé le contrôle judiciaire de la décision de la Commission, et la Cour fédérale a accueilli la demande (voir Hicks c. Canada (Procureur général), 2008 CF 1059).

[30]           La Commission a amorcé l’enquête sur la plainte du plaignant et a finalement recommandé la conciliation dans son rapport d’enquête rendu le 12 juillet 2010. La conciliation a eu lieu, mais a été infructueuse, et l’affaire a été renvoyée à la Commission.

[31]           La Commission a renvoyé l’affaire au Tribunal le 9 novembre 2011.

III.             Les arguments du plaignant

[32]           Le plaignant soutient qu’il y a eu violation des articles 7 et 10 de la Loi, fondée sur les motifs de distinction illicites de la situation de famille et de la déficience. À ce sujet, les dispositions applicables de la Loi sont ainsi libellées :

3(1) Pour l’application de la présente loi, les motifs de distinction illicite sont ceux qui sont fondés sur la race, l’origine nationale ou ethnique, la couleur, la religion, l’âge, le sexe, l’orientation sexuelle, l’état matrimonial, la situation de famille, l’état de personne graciée ou la déficience.

 

 

7. Constitue un acte discriminatoire, s’il est fondé sur un motif de distinction illicite, le fait, par des moyens directs ou indirects :

 

a) de refuser d’employer ou de continuer d’employer un individu;

 

b) de le défavoriser en cours d’emploi.

 

 

10. Constitue un acte discriminatoire, s’il est fondé sur un motif de distinction illicite et s’il est susceptible d’annihiler les chances d’emploi ou d’avancement d’un individu ou d’une catégorie d’individus, le fait, pour l’employeur, l’association patronale ou l’organisation syndicale :

 

a) de fixer ou d’appliquer des lignes de conduite;

 

b) de conclure des ententes touchant le recrutement, les mises en rapport, l’engagement, les promotions, la formation, l’apprentissage, les mutations ou tout autre aspect d’un emploi présent ou éventuel.

 

 

[33]           Dans une instance engagée devant le Tribunal, la partie plaignante doit établir l’existence d’une preuve prima facie de discrimination. Une preuve prima facie « […] porte sur les allégations qui ont été faites et qui, si on leur ajoute foi, est complète et suffisante pour justifier un verdict en faveur de la plaignante, en l’absence de réplique de l’employeur intimé » (Ontario (Commission des droits de la personne) c. Simpsons Sears Ltd., [1985] 2 RCS 536, au paragraphe 28).

[34]           Malgré l’allégation de l’intimé que la plainte en l’espèce se limite à la question de savoir si la définition de « personne à charge » dans la Directive sur la réinstallation de 1993 est discriminatoire, le plaignant soutient que la nature de la plainte est la suivante : la décision de l’intimé de refuser de payer une indemnité au sens de la Directive sur l’IOTDR était discriminatoire. Le formulaire de plainte du plaignant et son énoncé des précisions sont conformes à cette position et je ne vois aucune raison de limiter la portée de la plainte comme l’intimé le propose.

[35]           Cela étant dit, le plaignant n’a pas soutenu que l’intimé avait refusé de l’employer ou de continuer à l’employer, au sens de l’alinéa 7a) de la Loi, ou que l’interprétation et l’application de l’intimé de la Directive sur la réinstallation de 1993 ont privé le plaignant d’occasions d’emploi, au sens de l’article 10 de la Loi. Par conséquent, à mon avis, la plainte est limitée à une analyse au sens de l’alinéa 7b) de la Loi.

[36]           Dans un même ordre d’idées, je ne suis pas d’avis que le motif de la déficience soit applicable aux circonstances en l’espèce. La victime présumée en l’espèce, le plaignant, n’est pas atteinte d’une déficience. C’est plutôt sa belle‑mère qui était atteinte d’une déficience. Bien que la déficience de la belle‑mère ait pu être un facteur qui a défini la situation de famille du plaignant dans les circonstances entraînant la plainte en l’espèce, le plaignant n’a pas subi de différence de traitement défavorable en raison de sa propre déficience, et il ne soutient pas non plus que sa belle-mère a été victime de discrimination du fait de sa déficience.

[37]           Par conséquent, en analysant la plainte du plaignant, je n’examinerai que la question de savoir si, dans le cadre de son emploi, le plaignant a subi une différence de traitement défavorable fondée sur sa situation de famille, au sens de l’alinéa 7b) de la Loi.

[38]           La « différence de traitement » signifie la distinction dans la façon d’agir à l’égard de personnes (voir Tahmourpour c. Canada (Gendarmerie royale du Canada), 2009 CF 1009, au paragraphe 44 [Tahmourpour]; décision modifiée pour d’autres motifs dans Tahmourpour c. Canada (Gendarmerie royale du Canada), 2010 CAF 192 [Tahmourpour (CAF)]; et Canada (Commission canadienne des droits de la personne) c. Canada (Procureur général), 2012 CF 445, au paragraphe 254, conf. par 2013 CAF 75). Cependant, toute distinction n’est pas discriminatoire, parce que la Loi précise la différence de traitement à l’aide du terme « défavorable ». Selon la Cour fédérale, « défavorable » est un adjectif dont le sens ordinaire signifie nuisible, blessant ou hostile (voir Tahmourpour, au paragraphe 44; voir aussi Tahmourpour (CAF), au paragraphe 12). Enfin, la différence de traitement défavorable doit être fondée sur un motif de distinction illicite.

[39]           La Directive sur la réinstallation de 1993 et le critère pour obtenir l’IOTDR créent une différence de traitement entre les personnes « qui résident en permanence avec l’employé » et celles qui résident ailleurs. L’intimé soutient aussi que le plaignant n’avait pas non plus droit à l’IOTDR parce que sa belle-mère n’était pas une personne qui souffrait d’une « maladie temporaire » au sens de l’alinéa 2.11.2(a) de la Directive sur la réinstallation de 1993, parce qu’elle souffrait d’une maladie chronique.

[40]           Ces différences ont été nuisibles au plaignant parce qu’elles ont entraîné le rejet de sa demande d’IOTDR. Le rejet de sa demande lui a aussi été nuisible parce qu’il a interprété la décision de l’intimé comme signifiant que sa belle-mère n’était pas un membre de sa famille. Le plaignant a aussi témoigné que le rejet de sa demande d’IOTDR et les griefs subséquents lui ont causé du stress et de la frustration envers son employeur. Ce stress a entraîné des problèmes physiques : incapacité à dormir, problèmes de digestion et souffles cardiaques. Le plaignant soutient qu’il a finalement dû prendre un congé de 40 jours lié au stress.

[41]           La prochaine question est celle de savoir si les différences de traitement créées par la Directive sur la réinstallation de 1993 envers le plaignant étaient fondées sur sa situation de famille. La Loi ne définit pas l’expression « situation de famille ». Cependant, la jurisprudence a reconnu que le motif protège l’état au sens absolu d’être ou non dans une relation de famille, l’état au sens relatif de qui sont les membres de la famille, les circonstances ou les caractéristiques particulières de la famille et les devoirs et obligations qui peuvent être imposés dans une famille (voir B. c. Ontario (Commission des droits de la personne), 2002 CSC 66, aux paragraphes 39 à 41 et 57; Canada (Procureur général) c. Johnstone, 2013 CF 113, aux paragraphes 104 à 113 [Johnstone]).

[42]           Il n’est pas contesté que l’épouse et la belle-mère du plaignant font partie de sa famille. L’intimé ne conteste pas non plus que les soins aux aînés peuvent être protégés en vertu du motif de la situation de famille. Bien que je ne connaisse pas de décision du Tribunal portant sur la question des services aux aînés, je conclus que le raisonnement du Tribunal des droits de la personne de l’Ontario dans la décision Devaney v. ZRV Holdings Limited, 2012 HRTO 1590 [Devaney] est pertinent.

[43]           Dans cette affaire, M. Devaney était un architecte qui a été congédié parce qu’il devait s’absenter du travail et qu’une grande partie de ces absences étaient nécessaires en raison de sa situation de famille : il devait prendre soin de sa mère qui était très malade. Aucun autre membre de sa famille ne pouvait prendre soin d’elle. Le nom de sa mère figurait sur une liste d’attente d’urgence pour un centre de soins de longue durée, mais tant qu’elle ne pouvait pas y déménager, son fils était le principal fournisseur de soins de santé. L’employeur était au courant de la situation de famille de M. Devaney, mais l’a congédié en raison de ses absences. Pour cette raison, le Tribunal de l’Ontario a conclu que M. Devaney avait établi qu’il y avait eu acte discriminatoire fondé sur sa situation de famille.

[44]           À mon avis, le raisonnement dans l’affaire Devaney est le suivant : comme la jurisprudence reconnaît que la situation de famille protège les obligations en matière de soins aux enfants d’un parent envers un enfant, réciproquement, les responsabilités en matière de soins aux aînés d’un enfant envers ses parents devraient aussi être reconnues de la même façon. Je souscris à ce raisonnement.

[45]           À l’audience en l’espèce, le plaignant et son épouse ont témoigné au sujet des soins aux aînés dont ils se sentaient responsables envers leur mère/belle-mère et ils ont déclaré qu’ils n’auraient pas pu immédiatement déménager à Ottawa sans abandonner ces responsabilités. Ils ont expliqué que leur mère/belle-mère n’habitait pas avec eux en raison de son état de santé, qui nécessitait une aide qu’elle ne pouvait pas obtenir à leur maison. De plus, en raison de sa santé fragile, les médecins ne lui avaient pas permis d’être transportée par ambulance ou avion à Ottawa. Le plaignant et son épouse étaient aussi d’avis que les soins ne pouvaient pas être adéquatement et raisonnablement fournis uniquement par des fournisseurs de soins étrangers. C’est la conclusion à laquelle ils étaient arrivés après des années à observer et à soigner leur mère/belle-mère alors que sa santé se détériorait graduellement.

[46]           À ce sujet, le plaignant et son épouse ont témoigné au sujet du fait que la santé de la belle-mère du plaignant avait commencé à se détériorer vers 2001 et au sujet des responsabilités liées à cet état de santé que l’épouse du plaignant avait prises pour s’occuper de sa mère. À l’époque de la réinstallation du plaignant, sa belle-mère habitait dans un logement avec assistance et dépendait beaucoup de sa fille. La belle-mère du plaignant avait beaucoup de difficulté à s’exprimer et à faire part de ses besoins, et peu de gens pouvaient communiquer avec elle. Cependant, l’épouse du plaignant en était capable.

[47]           L’épouse du plaignant a témoigné que, lorsque sa mère habitait dans la résidence pour personnes âgées (le logement avec assistance), elle était responsable de fournir les soins suivants à sa mère : elle allait la voir plusieurs fois par jour, elle faisait son lavage, elle s’occupait de ses tâches externes comme faire l’épicerie et payer les factures, elle préparait ses repas ou organisait la livraison de repas préparés, elle organisait les soins à domicile (repas, nettoyage, bain, etc.) et les soins infirmiers réguliers à domicile, elle prenait les rendez-vous avec le médecin et accompagnait sa mère à ces rendez-vous et elle s’occupait de toutes ses interactions sociales en organisant des visites régulières et des excursions supervisées.

[48]           Selon le plaignant, la présence de son épouse était très bénéfique au bien-être émotionnel de sa belle-mère. Son épouse communiquait fréquemment avec les employés du logement avec assistance et elle surveillait constamment la santé de sa mère.

[49]           Comme le témoignage du plaignant le montre, si ce n’était de sa situation de famille, c’est‑à‑dire l’engagement du plaignant et de son épouse à prendre soin de leur mère/belle-mère âgée et malade, il n’aurait pas été nécessaire de garder deux résidences après la réinstallation du plaignant et ce dernier n’aurait pas demandé d’IOTDR.

[50]           Cependant, l’intimé soutient que le rejet de la demande d’IOTDR du plaignant n’a pas causé de conflit entre ses obligations envers sa famille et les exigences de son travail. Selon l’intimé, le plaignant a admis que son épouse avait pris soin de sa belle-mère malgré le rejet de la demande d’IOTDR.

[51]           Je conviens que les circonstances de la plainte ne visent pas un « […] règlement ou une condition de travail [qui] entrave la capacité de l’employé de s’acquitter d’une importante obligation parentale de façon réaliste […] » (voir Johnstone, au paragraphe 125). La nature de la plainte en l’espèce n’est pas un conflit entre le travail du plaignant et ses obligations familiales, mais elle porte sur le rejet d’une indemnité.

[52]           Le plaignant soutient que la discrimination découle de la fourniture sélective des avantages de la Directive sur l’IOTDR. À ce sujet, la Cour suprême a déclaré :

La couverture sélective constitue peut‑être simplement un moyen détourné de permettre la discrimination. Les avantages sociaux sont de plus en plus souvent intégrés dans les conditions de travail. Dès qu’un employeur décide de fournir un régime d’avantages sociaux, il ne peut pas faire d’exclusions de façon discriminatoire. [...] Les avantages fournis dans le cadre de l’emploi doivent être fournis sans discrimination.

 

            Brooks c. Canada Safeway ltd., [1989] 1 RCS 1219, à la page 1240

[53]           Pour établir si un régime d’avantages sociaux est discriminatoire à première vue, la première étape vise à déterminer l’objet du plan d’avantages sociaux. Si les prestations « sont attribuées conformément au même objet, mais sont néanmoins différentes en raison de caractéristiques non pertinentes relativement à cet objet, il se peut bien qu’il y ait discrimination » (Battlefords and District Co-operative Ltd. c. Gibbs, [1996] 3 RCS 566, au paragraphe 33).

[54]           Comme nous l’avons vu plutôt, l’objet de la Directive sur la réinstallation de 1993 était de « [...] réinstaller l’employé de la façon la plus efficace, c.-à-d. au coût le plus raisonnable pour l’État tout en causant le moins d’ennuis possible à l’employé muté et à sa famille ». La clause 1.2.2(c) de la Directive sur la réinstallation de 1993 prévoyait aussi que « La réinstallation devrait être planifiée de manière à minimiser tant les bouleversements de la vie familiale que les frais de l’employeur [...] ».

[55]           Ces énoncés montrent clairement que la Directive sur la réinstallation de 1993 visait à aider les employés mutés à se réinstaller, de la façon la plus efficace, tout en reconnaissant que l’efficacité devait être tempérée par tout ennui que pourrait subir l’employé muté ou sa famille. La Directive sur la réinstallation de 1993 devait aussi s’appliquer « […] à toutes les personnes admissibles sans considération […] de situation de famille ».

[56]           Malgré l’objet et l’application large de la Directive sur la réinstallation de 1993, on a refusé l’IOTDR au plaignant en raison des caractéristiques de sa famille : le fait que son épouse et lui prenaient soin de sa belle-mère âgée qui, en raison d’une déficience permanente, ne pouvait pas habiter avec eux dans la maison familiale.

[57]           Comme j’ai conclu que les devoirs en matière de soins aux aînés relèvent de la protection contre la discrimination fondée sur la situation de famille au sens de la Loi, que les caractéristiques de la famille du plaignant étaient définies par les responsabilités du plaignant et de son épouse envers leur belle-mère/leur mère, et qu’on a refusé au plaignant l’IOTDR en raison des caractéristiques de sa famille, par conséquent, le refus de l’intimé d’accorder au plaignant l’indemnité demandée en application de la Directive sur l’IOTDR constitue un acte discriminatoire à première vue, au sens de l’alinéa 7b) de la Loi. La preuve du plaignant est complète et suffisante pour justifier un verdict en sa faveur en l’absence d’une réponse de l’intimé.

IV.             Les arguments de l’intimé

[58]           Comme je suis convaincu que le plaignant a établi une preuve prima facie de discrimination fondée sur la situation de famille, le fardeau revient donc à l’intimé de démontrer que la discrimination n’a pas eu lieu telle qu’elle a été alléguée ou que l’acte est justifiable au sens de la Loi (voir les articles 15 à 24 de la Loi).

[59]           L’intimé soutient que la Directive sur la réinstallation de 1993 et les critères utilisés pour déterminer si un employé a droit à l’IOTDR est une exigence professionnelle justifiée. À ce sujet, la Loi prévoit :

15. (1) Ne constituent pas des actes discriminatoires :

 

a) les refus, exclusions, expulsions, suspensions, restrictions, conditions ou préférences de l’employeur qui démontre qu’ils découlent d’exigences professionnelles justifiées;

 

[...]

 

(2) Les faits prévus à l’alinéa (1)a) sont des exigences professionnelles justifiées ou un motif justifiable, au sens de l’alinéa (1)g), s’il est démontré que les mesures destinées à répondre aux besoins d’une personne ou d’une catégorie de personnes visées constituent, pour la personne qui doit les prendre, une contrainte excessive en matière de coûts, de santé et de sécurité.

[60]           Selon l’intimé, une justification raisonnable existe pour le fait qu’il a limité le soutien financier au sens de l’IOTDR aux membres de la famille qui habitent avec les employés et qui sont qualifiés à titre de personnes à charge : un employé n’a pas à maintenir une deuxième résidence pour faciliter la réinstallation, à moins qu’il y ait des personnes à charge qui habitent avec lui dans cette résidence et qui sont incapables de se réinstaller au même moment que l’employé. L’intimé est d’avis que les membres de la famille qui habitent dans leur propre résidence n’ont pas besoin qu’un employé maintienne leur ancienne résidence pour eux. C’est en fonction de cette conclusion que, selon l’intimé, la Couronne et les autres parties qui ont établi la Directive sur la réinstallation de 1993 ont défini qui était une personne à charge.

[61]           L’intimé soutient que les membres de la famille qui ont d’autres besoins, liés à leurs soins médicaux ou à leurs soins quotidiens, et qui demandent de l’aide financière en raison de ces besoins, ne relèvent pas de l’indemnité prévue par la Directive sur l’IOTDR. Selon l’intimé, de l’aide n’est pas fournie pour la séparation volontaire de la famille pour des raisons personnelles. L’intimé fait valoir que la Directive sur l’IOTDR ne vise pas à faciliter les arrangements médicaux ou les autres arrangements de soins pour les membres de la famille, mais qu’elle vise plutôt à leur permettre de continuer d’habiter dans l’ancienne résidence de l’employé jusqu’à ce qu’ils soient en mesure de se réinstaller avec l’employé.

[62]           M. Daniel Gauthier, chef, Compte créditeur et réception et dépôt, pour Ressources humaines et Développement des compétences Canada, a témoigné pour l’intimé. La majeure partie de son témoignage portait sur la Directive sur la réinstallation de 1993 et sa connaissance de la demande d’IOTDR du plaignant.

[63]            M. Gauthier a expliqué que la demande d’IOTDR du plaignant ne pouvait pas être acceptée parce que : (1) la belle-mère du plaignant ne pouvait pas être qualifiée de « personne à charge » au sens de la Directive sur la réinstallation de 1993, parce qu’elle n’habitait pas à la résidence du plaignant au moment où le plaignant s’est réinstallé et (2) la belle-mère du plaignant était une personne ayant une incapacité permanente et n’était pas une personne atteinte d’une maladie temporaire, au sens de la clause 2.11.2 de la Directive sur la réinstallation de 1993.

[64]           M. Gauthier a aussi déclaré que l’attribution des avantages en application de la Directive sur l’IOTDR est différente si l’employé qui fait la demande est propriétaire ou s’il est locataire. En l’espèce, l’intimé a conclu que le plaignant louait sa maison en Nouvelle-Écosse et que, par conséquent, il n’avait pas droit aux avantages de l’IOTDR prévus aux clauses 2.11 à 2.18 de la Directive sur la réinstallation de 1993. M. Gauthier a reconnu que le plaignant avait cependant droit à l’indemnité prévue à la clause 3.2.1, qui aurait permis au plaignant d’obtenir un paiement mensuel de 420 $.

[65]           Lorsqu’on lui a demandé de relever une référence précise dans la Directive sur la réinstallation de 1993 qui appuyait son interprétation de la différence entre les propriétaires et les locataires, M. Gauthier a été incapable de le faire. Par conséquent, il semble que son interprétation de la Directive sur la réinstallation de 1993 n’est pas soutenue par le libellé de la Directive.

[66]           Plus d’une fois, M. Gauthier a souligné aussi dans son témoignage le fait que la Directive sur la réinstallation de 1993 accordait la priorité à l’utilisation efficiente des ressources publiques. Cependant, il n’a pas parlé de l’autre objectif de la Directive sur la réinstallation de 1993, soit celui de causer le moins d’ennuis possible à l’employé muté et à sa famille.

[67]           Dans l’ensemble, je n’ai pas trouvé le témoignage de M. Gauthier particulièrement persuasif ou utile pour comprendre l’allégation de l’intimé selon laquelle son interprétation et son application de la Directive sur la réinstallation de 1993 à la situation du plaignant découlaient d’une exigence professionnelle justifiée.

[68]           De plus, l’intimé n’a présenté aucune explication, par l’entremise de son témoin ou autrement, sur la raison pour laquelle une interprétation de la Directive sur la réinstallation de 1993, qui comprenait la situation de famille du plaignant en ce qui a trait à son besoin de maintenir deux résidences, aurait causé à l’intimé une contrainte excessive. En fait, compte tenu de la Directive sur la réinstallation en vigueur actuellement, qui élargit la définition de personnes à charge pour inclure les personnes qui n’habitent pas avec l’employé, il aurait pu être difficile pour l’intimé de s’expliquer.

[69]           À mon avis, l’argument selon lequel la Directive sur la réinstallation de 1993 était une politique négociée entre le Conseil national mixte et l’intimé, et qu’elle fait partie de la convention collective du plaignant, n’est pas non plus pertinent. La Loi n’est pas négociable et elle doit être respectée, peu importe les dispositions d’une convention collective.

[70]           Le Tribunal a résumé la norme pour établir une exigence professionnelle justifiée et une contrainte excessive dans la décision Johnstone c. Agence des services frontaliers du Canada, 2010 TCDP 20 :

[348] Dans l’arrêt Meiorin, la Cour suprême du Canada a affirmé que l’obligation des employeurs en matière d’accommodement est une obligation juridique fondamentale. Un employeur doit démontrer que la discrimination est nécessaire pour respecter un objectif légitime de travail et doit présenter une preuve directe qu’il a atteint une contrainte excessive dans ses efforts pour accommoder les besoins de l’employé.

 

[349] Aussi dans l’arrêt Meiorin, la Cour suprême du Canada a déclaré qu’« [à] moins qu’aucun accommodement ne soit possible sans imposer une contrainte excessive, la norme telle qu’elle existe n’est pas une EPJ, et la preuve prima facie de l’existence de discrimination n’est pas réfutée ».

 

[350] Dans l’arrêt Conseil des Canadiens avec déficiences c. Via Rail Canada Inc., [2007] A.C.S. no 15 (Via Rail), la Cour suprême du Canada a déclaré qu’« [i]l y a contrainte excessive lorsque les moyens raisonnables d’accommoder ont été épuisés et qu’il ne reste que des options d’accommodement déraisonnables ou irréalistes ».

 

[351] Ces arrêts établissent de façon très évidente une obligation de la part de l’ASFC de faire de réels efforts pour accommoder, efforts qui sont tangibles et mesurables et qui évaluent la capacité de l’employeur de répondre aux demandes d’accommodement. L’ASFC ne doit pas fonder son évaluation sur la question de savoir si l’employé a besoin d’accommodement ou si elle peut prendre des mesures d’accommodement, sur des [traduction] « hypothèses relevant de l’impression ».

[71]           L’intimé n’a présenté aucun objectif lié au travail ou preuve affirmative de l’existence d’une contrainte excessive légitime pour justifier la preuve prima facie de discrimination en l’espèce. La supposition de l’intimé justifiant sa politique en l’espèce, soit que les membres de la famille qui habitent dans leur propre résidence n’ont pas besoin qu’un employé maintienne leur ancienne résidence pour eux, ne tenait évidemment pas compte de situations de famille comme celle du plaignant. De plus, l’argument de l’intimé selon lequel la situation de famille du plaignant existait en raison d’une [traduction] « séparation volontaire de la famille pour des raisons personnelles » et que [traduction] « la Directive sur l’IOTDR ne vise pas à faciliter les arrangements médicaux ou les autres arrangements de soins pour les membres de la famille » ne tient pas compte des devoirs et des obligations au sein de la famille du plaignant qui sont protégés par le motif de la situation de famille au sens de la Loi. La position de l’intimé contredit aussi l’objet de la Directive sur la réinstallation de 1993 de causer le moins d’ennuis à l’employé muté et à sa famille.

[72]           Par conséquent, en fonction de la preuve présentée et de mon analyse ci‑dessus, je conclus que l’intimé n’a pas établi d’exigence professionnelle justifiée pour répondre à la preuve prima facie de discrimination envers le plaignant. Je conclus donc que l’intimé a commis un acte discriminatoire au sens de l’alinéa 7b) de la Loi, fondé sur la situation de famille du plaignant.

V.                Conclusion

[73]           Pour les motifs qui précèdent, le Tribunal conclut que la plainte en l’espèce est justifiée :

(1)               le plaignant a établi une preuve prima facie de discrimination au sens de l’alinéa 7b) de la Loi, fondée sur sa situation de famille;

(2)               l’intimé n’a pas établi une exigence professionnelle justifiée, n’a pas présenté d’explication raisonnable ou d’autre justification à l’encontre de la preuve prima facie de discrimination établie contre lui.

 

VI.             Les mesures de redressement

[74]           Conformément au paragraphe 53(2) de la Loi, si, à la fin d’une instruction, le Tribunal conclue qu’une plainte est justifiée, il peut rendre une ordonnance contre la personne qui a commis l’acte discriminatoire. En l’espèce, le plaignant demande une ordonnance imposant les mesures de redressement suivantes : le paiement de l’indemnité en application de la Directive sur l’IOTDR, une indemnité pour préjudice moral, une indemnité pour la perpétration d’un acte discriminatoire délibéré et inconsidéré, et les intérêts applicables.

[75]           L’objectif du Tribunal, lorsqu’il rend une ordonnance au sens du paragraphe 53(2), n’est pas de punir la personne qui a commis l’acte discriminatoire, mais d’éliminer – le plus possible – les effets discriminatoires de l’acte (voir Robichaud c. Canada (Conseil du Trésor), [1987] 2 R.C.S. 84, au paragraphe 13). Il faut pour cela que le Tribunal exerce son pouvoir discrétionnaire de redressement en obéissant à des principes, en tenant compte du lien qui existe entre l’acte discriminatoire commis et la perte alléguée (voir l’arrêt Chopra c. Canada (Procureur général), 2007 CAF 268, au paragraphe 37). Autrement dit, le Tribunal doit exercer son pouvoir discrétionnaire en matière de redressement de manière raisonnable, eu égard aux circonstances particulières de l’affaire ainsi qu’aux éléments de preuve présentés (Hughes c. Élections Canada, 2010 TCDP 4, au paragraphe 50).

A.                L’indemnité au sens de la Directive sur l’IOTDR

(i)                 Requête en préclusion pour question déjà tranchée

[76]           Avant le début de l’audition de la plainte, le plaignant a présenté une requête en ordonnance déclarant que le principe de la question déjà tranchée s’applique au montant de l’IOTDR demandée et que le montant de l’IOTDR en question en l’espèce est de 21 427 $.

[77]           Dans le cadre de l’arbitrage de son grief à la CRTFP, les deux parties ont présenté un exposé conjoint des faits, dans lequel il était écrit :

[traduction]

« […] M. Hicks a expliqué sur sa demande que la raison pour laquelle il demandait une IOTDR était que son épouse devait rester à Sydney (N.‑É.) pour prendre soin de sa belle‑mère qui ne pouvait pas être déplacée au moment de la réinstallation […] Pour sa belle-mère, il demande 12 mois (21 247 $) d’IOTDR […] »

[78]           Selon le plaignant, bien que la CRTFP ait rejeté son grief, l’intimé et l’arbitre n’ont jamais soulevé, dans le cadre de l’arbitrage, de préoccupation au sujet du montant demandé pour l’IOTDR. En fait, le plaignant soutient que l’intimé a explicitement reconnu que le montant de l’IOTDR en question était de 21 247 $, tel qu’il est inscrit dans l’exposé conjoint des faits.

[79]           Le plaignant fait valoir que le principe de la question déjà tranchée devrait s’appliquer en l’espèce parce qu’il y a déjà eu décision entre les mêmes parties sur la question de savoir si l’IOTDR devrait être accordée. Le plaignant soutient que le principe de la question déjà tranchée s’applique aux faits importants qui ont nécessairement (même si ce n’était pas explicite) été tranchés dans une procédure précédente. Il ajoute que le litige au sujet de sa demande d’IOTDR a fait l’objet de procédures entre les mêmes parties depuis des années, mais que ce n’est que maintenant, devant le Tribunal, que l’intimé conteste la question du montant dans sa cause. Le plaignant soutient que, si l’intimé avait l’intention de contester le montant de la demande d’IOTDR, il aurait dû le faire lorsque le plaignant a présenté sa demande, ou lors du processus de règlement de grief.

[80]           En réponse, l’intimé soutient que le principe de la question déjà tranchée ne s’applique que dans les circonstances où les faits montrent clairement que la question de droit ou de fait en litige entre les mêmes parties a déjà été tranchée. Selon l’intimé, la nature et le montant des dépenses demandées par le plaignant en IOTDR n’ont jamais été abordés ou tranchés dans les litiges précédents entre les parties. Dans l’exposé conjoint des faits présenté à la CRTFP, bien qu’il ait reconnu que le plaignant avait présenté une demande d’IOTDR de 21 247 $, l’intimé soutient qu’il n’a rien reconnu autrement. Comme la CRTFP a rejeté la demande d’IOTDR au motif que la belle‑mère du plaignant n’était pas une personne à charge, l’intimé soutient que la CRTFP n’a pas tranché la question de savoir si les dépenses alléguées ont bien été engagées et, le cas échéant, si elles pouvaient être remboursées en application de la Directive sur l’IOTDR.

[81]           Les deux parties s’entendent sur le raisonnement du principe de la question déjà tranchée, expliqué clairement dans l’arrêt Danyluk c. Ainsworth Technologies Inc., 2001 CSC 44 [Danyluk] :

Autrement dit, un plaideur n’a droit qu’à une seule tentative [...] Une fois tranché, un différend ne devrait généralement pas être soumis à nouveau aux tribunaux au bénéfice de la partie déboutée et au détriment de la partie qui a eu gain de cause. Une personne ne devrait être tracassée qu’une seule fois à l’égard d’une même cause d’action.

 

(Danyluk, au paragraphe 18)

[82]           Les deux parties s’entendent aussi sur les trois conditions préalables du fonctionnement du principe de la question déjà tranchée, telles qu’elles sont établies dans l’arrêt Danyluk :

1.         que la même question ait été décidée;

 

2.         que la décision judiciaire invoquée comme créant la [préclusion] soit finale;

 

3.         que les parties dans la décision judiciaire invoquée, ou leurs ayants droit, soient les mêmes que les parties engagées dans l’affaire où la préclusion est soulevée, ou leurs ayants droit.

 

(Danyluk, au paragraphe 25)

[83]           Le seul litige précédent entre les parties sur la question des droits du plaignant en vertu de la Directive sur l’IOTDR s’est soldé par une décision de la CRTFP.

[84]           Cependant, dans sa décision, la CRTFP n’a pas traité la question du montant de la demande d’IOTDR du plaignant.

[85]           En fait, comme la CRTFP a conclu qu’elle n’avait pas compétence pour entendre les arguments fondés sur les droits de la personne du plaignant, elle a rendu sa décision en fonction de la définition de « personne à charge » dans la Directive sur la réinstallation de 1993. En se fondant sur cette définition, la CRTFP a conclu que le plaignant n’avait pas du tout droit à l’IOTDR.

[86]           La décision de la CRTFP est compatible avec la position de l’intimé au sujet de la demande d’IOTDR du plaignant. Dans tout le processus de grief, l’intimé a maintenu la position que le plaignant n’avait pas droit à l’IOTDR. Par conséquent, il a même refusé de régler la question par la médiation parce qu’il soutenait qu’il n’avait rien à donner au plaignant. Le témoignage de M. Gauthier montre aussi clairement que, même si la belle‑mère du plaignant était une personne à charge, l’intimé avait son propre point de vue et sa propre interprétation au sujet des dépenses que le plaignant pouvait réclamer.

[87]           Pour ces motifs, à mon avis, la question du montant de la demande d’IOTDR du plaignant n’a pas été tranchée par la CRTFP. L’argument du plaignant au sujet du principe de la question déjà tranchée est donc rejeté suivant la première condition préalable du fonctionnement du principe de la question déjà tranchée, établie dans l’arrêt Danyluk. Il serait injuste si l’intimé ne pouvait pas se défendre contre les dépenses que le plaignant réclame en application de la Directive sur l’IOTDR. L’intimé a le droit de questionner le plaignant sur chacun des éléments de sa demande et d’en vérifier la validité.

[88]            Par conséquent, la requête du plaignant en ordonnance déclarant que le principe de la question déjà tranchée s’applique au montant de l’IOTDR qu’il demandait et que le montant de l’IOTDR en question en l’espèce était de 21 247 $ est rejetée.

(ii)               Indemnité

[89]           Au sens de l’alinéa 53(2)c) de la Loi, une victime de discrimination a droit à une indemnité pour toute dépense encourue en raison de l’acte discriminatoire. Si ce n’était de l’acte discriminatoire, le plaignant aurait eu un remboursement d’une partie de ses dépenses en application de la Directive sur l’IOTDR.

[90]           Cependant, les parties ne s’entendent pas sur l’interprétation de la Directive sur l’IOTDR et, en particulier, sur les dépenses que le plaignant peut réclamer. L’intimé soutient qu’il y a une différence entre les montants qui peuvent être réclamés par les locataires par opposition aux propriétaires. Bien que je n’aie rien relevé à l’appui de cet argument dans le libellé de la Directive sur la réinstallation de 1993, je ne crois pas que je possède suffisamment de renseignements pour pouvoir prendre une décision informée sur l’interprétation et l’application de la Directive sur l’IOTDR et pour déterminer le montant réel de la demande d’IOTDR du plaignant.

[91]           Compte tenu de ce manque de renseignements, de ma décision ci‑dessus au sujet du principe de la question déjà tranchée, et du fait que l’intimé a auparavant refusé d’offrir au plaignant quoi que ce soit en ce qui a trait à sa demande d’IOTDR, je laisserai d’abord les parties discuter des détails du montant de la demande d’IOTDR du plaignant. Je demeurerai saisi de l’affaire au cas où les parties ne parviendraient pas à s’entendre à cet égard.


 

B.                 L’indemnité pour préjudice moral

[92]           Le plaignant demande 20 000 $ en compensation pour préjudice moral, au sens de l’alinéa 53(2)e) de la Loi. Il s’agit du montant maximal d’indemnité que le Tribunal peut accorder pour préjudice moral. Le Tribunal n’accorde le montant maximal que dans les cas les plus flagrants : lorsque la portée et la durée de la souffrance du plaignant découlant de l’acte discriminatoire justifient le montant complet.

[93]           Le plaignant a expliqué qu’il avait subi du stress et de la frustration envers son employeur au sujet de sa réinstallation de Sydney à Ottawa pendant une longue période. Il a soutenu qu’il avait commencé à souffrir de problèmes physiques : incapacité à dormir, problèmes de digestion et souffles cardiaques. Son médecin croyait que ces problèmes étaient causés par le stress. Il a dû subir des examens médicaux, et on lui a conseillé de prendre congé. Il a déclaré qu’il est arrivé à Ottawa à l’automne 2002 et que ses problèmes médicaux ont commencé à ce moment et ont augmenté au cours de l’été 2003. Il a alors dû prendre un congé de maladie d’environ 40 jours qui s’est terminé le 1er septembre 2003.

[94]           Le plaignant soutient que son stress a été causé par le fait que son problème avec son employeur n’était pas réglé et par la bataille constante qu’il avait dû livrer pour résoudre ce problème, y compris le dépôt d’une série de griefs auprès de son employeur.

[95]            Le plaignant a déploré le fait que, pendant son épreuve, il n’a jamais senti que son employeur tentait de l’aider; ce dernier n’a jamais montré de volonté à discuter avec lui de la façon dont il pouvait gérer ses obligations familiales et, par conséquent, le plaignant s’est senti abandonné par l’intimé, son employeur.

[96]           Cela dit, aucun rapport médical n’a été déposé au Tribunal. Cependant, le plaignant a précisé que l’intimé avait autorisé son congé médical, ce que l’intimé n’a pas nié. Pendant l’audience, l’intimé n’a pas non plus soulevé d’objection ni présenté d’observation au sujet de la santé du plaignant.

[97]           L’intimé note cependant que le plaignant avait beaucoup d’autres litiges avec son employeur au sujet de sa réinstallation, en plus du rejet de sa demande d’aide financière au sens de la Directive sur l’IOTDR. Selon l’intimé, bien que le plaignant ait témoigné qu’il avait été déçu, frustré et stressé en raison de ses divers litiges avec l’intimé au sujet de sa réinstallation, il a été incapable de décrire en quelle proportion ses sentiments étaient attribuables au rejet de sa demande d’aide financière par l’intimé.

[98]           Compte tenu des observations des parties ci-dessus et des circonstances en l’espèce, j’accorde au plaignant 15 000 $ pour le préjudice moral qu’il a subi en raison de l’acte discriminatoire.

C.                L’indemnité pour la perpétration d’un acte discriminatoire de manière délibérée ou inconsidérée

[99]           Le plaignant demande 20 000 $ d’indemnité de la part de l’intimé parce que ce dernier a commis un acte discriminatoire de manière délibérée et inconsidérée, au sens du paragraphe 53(3) de la Loi.

[100]       Dans Johnstone, la Cour fédérale a déclaré, au sujet du paragraphe 53(3) de la Loi :

Il s’agit d’une disposition punitive visant à dissuader ou à décourager ceux qui se livrent de façon délibérée à des actes discriminatoires. Pour conclure que l’acte était délibéré, il faut que l’acte discriminatoire et l’atteinte aux droits de la personne aient été intentionnels. On entend par « acte inconsidéré » celui qui témoigne d’un mépris ou d’une indifférence quant aux conséquences et d’une manière d’agir téméraire ou insouciante.

 

(Johnstone, au paragraphe 154).

[101]       Comme le montant maximal qui peut être accordé en application du paragraphe 53(3) de la Loi est de 20 000 $, ce montant devrait être réservé aux cas les plus graves.

[102]       Selon le plaignant, l’intimé n’a pas accordé à sa demande l’importance qu’elle méritait. Le plaignant a discuté de sa réinstallation et de sa demande d’IOTDR plusieurs fois avec des représentants de l’intimé et les a avisés des raisons pour lesquelles sa belle-mère était incapable d’habiter avec sa famille. Le plaignant soutient que l’intimé n’a jamais posé de questions au sujet de ses besoins en ce qui avait trait à sa belle-mère, compte tenu de ses problèmes de santé importants et de sa déficience, lorsque l’intimé a appliqué la Directive sur la réinstallation de 1993 à sa demande d’IOTDR.

[103]       Le plaignant soutient qu’il a été rigoureux et diligent dans ses efforts pour que sa belle‑mère soit reconnue à titre de personne à charge et qu’il a fondé ses arguments sur des principes en matière de droits de la personne, et, pourtant, l’intimé n’a pas tenu compte de sa position et a simplement mécaniquement appliqué une définition rigide qui était discriminatoire. À ce sujet, le plaignant soutient que l’intimé a agi de manière inconsidérée en n’examinant pas si sa politique d’indemnisation constituait de la discrimination et s’il devait examiner la possibilité d’offrir une mesure d’accommodement.

[104]       L’intimé note que son rejet de la demande d’aide financière du plaignant au sens de la Directive sur l’IOTDR a été maintenu à chaque palier de grief, y compris par la CRTFP, qui a aussi noté que le rejet était approprié pour d’autres motifs que ceux présentés par le plaignant dans son grief. Selon l’intimé, le fait qu’il n’était pas d’accord avec le plaignant au sujet de la question de savoir si le rejet de la demande d’IOTDR soulevait une question de droits de la personne ne constitue pas un fondement pour accorder une indemnité spéciale.

[105]       La preuve montre que l’intimé a suivi une application stricte du libellé de la Directive sur la réinstallation de 1993. Pendant l’audience, j’ai eu l’impression que, pour l’intimé, tout écart au texte de la Directive sur la réinstallation de 1993 était inimaginable. De plus, aucune preuve ne m’a été présentée qui me permet de croire que l’intimé a tenu compte de la Loi lorsqu’il a suivi une application aussi rigide de la Directive sur la réinstallation de 1993. Lorsqu’il a été confronté à une situation de famille difficile et à une demande de compassion, rien ne montre que l’intimé a tenu compte de son devoir de prendre des mesures d’accommodement jusqu’à contrainte excessive. En général, l’intimé a fait preuve de mépris et d’indifférence envers la situation de famille du plaignant et envers les conséquences que sa décision de rejeter la demande d’IOTDR entraînerait pour le plaignant et sa famille.

[106]       Pour tous ces motifs, conformément au paragraphe 53(3) de la Loi, le Tribunal accorde au plaignant 20 000 $ en indemnité pour l’acte discriminatoire inconsidéré de l’intimé.

D.                Les intérêts

[107]       Conformément au paragraphe 53(3) de la Loi, une ordonnance visant le paiement d’indemnités peut comprendre les intérêts à un taux et pour une période que le membre instructeur estime appropriés. Le paragraphe 9(12) des Règles de procédure (03-05-04) du Tribunal prévoit qu’à moins d’ordonnance contraire de la part du membre instructeur, tous les intérêts accordés doivent être calculés à taux simple sur une base annuelle en se fondant sur le taux officiel d’escompte fixé par la Banque du Canada (données de fréquence mensuelle) et courir de la date où l’acte discriminatoire s’est produit jusqu’à la date du versement de l’indemnité.

[108]       Le plaignant demande le paiement des intérêts composés pour tous les montants accordés. À son avis, comme de nombreuses années se sont écoulées depuis que la plainte en matière de droits de la personne a été déposée, le défaut d’accorder des intérêts composés récompenserait l’intimé pour les retards occasionnés.

[109]       Se fondant sur la décision du Tribunal Chopra c. Canada (Ministère de la Santé nationale et du Bien-être social), 2004 TCDP 27, l’intimé soutient que les intérêts composés ne sont justifiés que si l’on peut déduire de la preuve ou des circonstances de l’espèce que ce type d’intérêts est nécessaire pour compenser la perte en question. Sauf pour la longue période entre le moment où le plaignant a déposé sa plainte à la Commission (septembre 2006) et la date où sa plainte a été instruite par le Tribunal (avril 2013), l’intimé soutient qu’il n’y a pas de circonstances en l’espèce qui distinguent l’affaire d’autres plaintes dont le Tribunal est généralement saisi. Selon l’intimé, si l’on ne peut pas lui attribuer la responsabilité des retards, ce qu’il soutient, il n’existe aucune circonstance spéciale qui ferait en sorte que le plaignant ne serait pas complètement indemnisé par le paiement d’intérêts simples.

[110]       Bien que le plaignant demande des intérêts composés pour le délai entre le moment où il a déposé sa plainte et le moment où elle a été instruite, rien ne donne à penser que ce délai est attribuable à l’intimé. Par conséquent, je ne vois aucune raison de ne pas appliquer l’article 9(12) des Règles de procédure (03-05-04).

[111]       Par conséquent, j’accorde des intérêts pour les indemnités accordées ci‑dessus au sens de l’alinéa 53(2)e) et du paragraphe 53(3). Il s’agit d’intérêts calculés à taux simple sur une base annuelle en se fondant sur le taux officiel d’escompte fixé par la Banque du Canada (données de fréquence mensuelle). Les intérêts courreront du 23 novembre 2004, soit la date à laquelle la demande d’IOTDR du plaignant a été rejetée, jusqu’à la date du paiement des indemnités.

[112]       Lorsqu’elles s’entendront sur les détails du montant de la demande d’IOTDR du plaignant, selon mon ordonnance ci-dessus, les parties devront aussi tenir compte des intérêts accordés, en fonction du paragraphe 111 ci-dessus.

E.                 Le maintien de la compétence

[113]       Comme j’ai laissé le soin aux parties de tenter de s’entendre sur les détails du montant de la demande d’IOTDR du plaignant, je resterai saisi de l’affaire pendant trois (3) mois à partir de la date de la présente décision, au cas où les parties n’arriveraient pas à s’entendre. Le cas échéant, je demanderai au plaignant de présenter des observations écrites au Tribunal dans lesquelles il expliquera la nature du différend et présentera sa position à ce sujet, documents à l’appui. Dans les deux (2) semaines suivant la réception des observations écrites du plaignant, l’intimé pourra présenter une réponse. Dans la semaine suivant la réception des observations écrites de l’intimé, le plaignant pourra présenter une réplique.

 

Signé par

Réjean Bélanger

Membre du Tribunal

Ottawa (Ontario)

Le 18 septembre 2013


Tribunal canadien des droits de la personne

Parties inscrites au dossier

Dossier du Tribunal : T1751/10611

Intitulé : Leslie Hicks c. Ressources humaines et Développement social Canada

Date de la décision du Tribunal : Le 18 septembre 2013

Date et lieu de l’audience :    15 au 17 avril 2013

7 mai 2013

Ottawa (Ontario)

Comparutions :

Linelle S. Mogado et Steven Welchner, pour le plaignant

 

Aucune comparution, pour la Commission canadienne des droits de la personne

 

Patrick Bendin, pour l’intimé

 

 

 

 

 Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.