Tribunal canadien des droits de la personne

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Contenu de la décision

Tribunal canadien
des droits de la personne

Les armoiries du Tribunal

Canadian Human
Rights Tribunal

Référence : 2025 TCDP 83

Date : Le 27 août 2025

Numéro(s) du/des dossier(s) : T2218/4017, T2282/3718, T2395/5419, T2647/2321

[TRADUCTION FRANÇAISE]

Entre :

Ryan Richards

le plaignant

- et -

Commission canadienne des droits de la personne

la Commission

- et -

Correctional Service Canada

la partie intimée

Décision sur requête

Membre : Jennifer Khurana


I. APERÇU

[1] Le 18 juin 2025, j’ai conclu que Ryan Richards, le plaignant, avait violé la règle de l’engagement implicite en partageant des documents obtenus au cours du processus de communication qui n’étaient pas encore admis en preuve et qui n’étaient donc pas publics (2025 TCDP 61, aux par. 5 et 25) (la « décision sur requête »). Dans la décision sur requête, j’ai rendu un certain nombre d’ordonnances; M. Richards et tout tiers informé de ces ordonnances devaient confirmer, au plus tard le 23 juin 2025, qu’ils s’y étaient conformés.

[2] Le Service correctionnel du Canada (le « SCC »), l’intimé, a déposé une requête le 24 juin 2025 par laquelle il demandait au Tribunal de rejeter les plaintes pour abus de procédure. Le SCC soutient que M. Richards ne s’est pas conformé aux ordonnances du Tribunal et que, depuis le dépôt de sa requête, les déclarations de conformité déposées par M. Richards ont été inopportunes, incomplètes et insuffisamment fiables. De plus, le SCC affirme que M. Richards continue de défendre l’utilisation à des fins accessoires des documents qu’il a communiqués à tort en violation de la règle de l’engagement implicite. Le SCC soutient que les actes de M. Richards constituent un abus de procédure grave et qu’aucune mesure de réparation, mis à part le rejet des plaintes, ne permettrait raisonnablement de préserver l’intégrité de la procédure du Tribunal et de répondre à la gravité de la violation.

[3] M. Richards et la Commission s’opposent à la requête. M. Richards soutient qu’il s’est déjà conformé aux ordonnances du Tribunal, mais il affirme également qu’il n’a pas eu suffisamment de temps de le faire et que les documents qu’il a partagés en violation de la règle de l’engagement implicite devraient être publics. De plus, M. Richards prétend que le Tribunal n’a pas mené l’instance de façon proportionnée ni juste, et soulève une crainte raisonnable de partialité.

II. DÉCISION

[4] Je rejette la requête du SCC. Cependant, je conclus que le fait que M. Richards ne s’est pas conformé aux ordonnances du Tribunal constitue un abus de procédure. J’énonce un certain nombre de directives auxquelles M. Richards doit se conformer. Si M. Richards fait fi de ces directives, le SCC pourra renouveler sa demande, et j’entendrai les parties quant aux conséquences possibles de tout autre défaut de se conformer aux ordonnances du Tribunal, y compris la possibilité de rejeter ces plaintes. Toutes les parties doivent se conformer aux ordonnances du Tribunal, peu importe l’objet et la portée de leurs plaintes. De plus, les contestations indirectes des décisions du Tribunal ne seront pas tolérées.

III.LA RÈGLE DE L’ENGAGEMENT IMPLICITE ET LES ORDONNANCES DU TRIBUNAL

[5] Après que j’eus conclu que M. Richards avait violé la règle de l’engagement implicite, et afin de limiter tout autre préjudice envers le SCC et l’administration de la justice, j’ai rendu les ordonnances suivantes dans la décision sur requête :

[6] M. Richards devait :

1. informer l’intimé et le Tribunal de tout document couvert par la règle de l’engagement implicite qui aurait été (1) divulgué à quiconque, sauf dans la mesure autorisée par la loi, et/ou (2) publié sur un site web ou une plateforme de médias sociaux (y compris le nom des personnes ayant reçu l’élément et le site web ou la plateforme de médias sociaux et le compte sur lesquels l’élément a été publié);

2. prendre toutes les mesures nécessaires pour que tout document couvert par la règle de l’engagement implicite soit retiré de tout site web ou de toute plateforme de médias sociaux;

3. prendre toutes les mesures nécessaires pour récupérer et détruire toutes les copies, y compris les copies électroniques, des documents confidentiels divulgués en violation de la règle de l’engagement implicite;

4. obtenir de toute personne à qui une copie des documents confidentiels divulgués en violation de la règle de l’engagement implicite a été fournie l’engagement de les restituer et de les retirer sur-le-champ de tout site web ou de toute plateforme de médias sociaux, et de détruire toute copie électronique (décision sur requête, au par. 40).

[7] J’ai également rendu un certain nombre d’ordonnances concernant toute personne informée de la décision sur requête. De plus, j’ai ordonné à M. Richards de transmettre la décision sur requête à toute autre personne à laquelle une copie des documents confidentiels divulgués en violation de la règle de l’engagement implicite aurait pu être fournie et de confirmer au Tribunal et au SCC que cela avait été fait ou qu’il n’avait divulgué les documents à personne d’autre que Carema Mitchell, sa sœur. Le Tribunal a transmis une copie de la décision sur requête à Mme Mitchell pour aider à maintenir l’intégrité de la procédure du Tribunal et pour remédier rapidement à la violation. Enfin, j’ai rendu une ordonnance de confidentialité au titre de l’article 52 de la Loi afin de mettre sous scellés la pièce R-503, telle qu’elle figurait dans l’annexe de la requête du SCC. M. Richards ne devait divulguer aucun document couvert par la règle de l’engagement implicite à qui que ce soit, sauf dans la mesure autorisée par la loi (décision sur requête, aux par. 41 à 46).

IV. NOUVEAU REPRÉSENTANT DE M. RICHARDS

[8] Avant de me prononcer sur la requête en rejet des plaintes présentées par le SCC, je dois aborder les diverses allégations formulées par M. Richards dans les observations qu’il a déposées en réponse, lesquelles portent sur le fait qu’il a récemment retenu les services d’un parajuriste, soit Christopher Karas. M. Richards prétend que le Tribunal n’a pas respecté son droit à un conseil du 9 au 26 juin 2025, qu’il a exclu à tort M. Karas de la portion à huis clos de l’audience du 16 juin 2025, et que M. Karas n’a pas reçu l’intégralité du dossier afférent à la présente instance, ce qui, selon ce que semble soutenir M. Richards, l’aurait empêché de se conformer à la décision sur requête et de répondre à la requête en rejet du SCC.

Les allégations formulées par M. Richards selon lesquelles son droit à un conseil n’a pas été respecté ne sont pas fondées et sont fallacieuses

[9] À l’exception de la période au cours de laquelle il était représenté par une représentante non juridique, soit Beverley Halls, M. Richards s’est représenté lui-même tout au long de la présente instance.

[10] Le 5 juin 2025, j’ai tenu une conférence téléphonique de gestion préparatoire avec les parties en vue de la reprise de l’audience le 16 juin 2025. À ce moment, M. Richards a confirmé que, malgré le fait que sa sœur avait transmis certaines communications au Tribunal en son nom, elle ne le représentait pas. Il n’avait pas d’autre représentant juridique. Au cours de ce même appel, M. Richards et le SCC ont accepté de participer, le 9 juin 2025, à un essai technique de la plateforme de vidéoconférence organisé par le greffe du Tribunal.

[11] Le 9 juin 2025, M. Karas a commencé à écrire au Tribunal. Il affirmait qu’il souhaitait [traduction] « offrir [son] aide à M. Richards » et demandait ses coordonnées « pour pouvoir lui offrir [s]es services et l’aider dans cette affaire ». Il a envoyé un formulaire de comparution en pièce jointe. Deux heures plus tard, il a envoyé un deuxième courriel dans lequel il demandait qu’on lui réponde et réaffirmait qu’il souhaitait aider M. Richards. Le Tribunal a accusé réception de ces communications et confirmé la date à laquelle l’audience de M. Richards devait reprendre. Le Tribunal a également fait savoir qu’il ne pouvait pas transmettre de coordonnées parce qu’il lui incombait de protéger les renseignements personnels des plaideurs. M. Karas a répondu qu’il comprenait et qu’il communiquerait avec l’avocate de la Commission, Mme Warsame, afin d’offrir son aide à M. Richards.

[12] Le jour même, M. Richards et le SCC ont participé à l’essai technique des outils de vidéoconférence prévu par le greffe du Tribunal. Lorsque M. Richards a demandé à parler à l’avocat du SCC, celui-ci lui a répondu qu’il ne pouvait plus lui parler directement étant donné qu’il semblait avoir retenu les services d’un représentant. M. Richards n’avait pas connaissance d’un Christopher Karas et a confirmé qu’il n’avait retenu les services de personne.

[13] Toujours le 9 juin 2025, le Tribunal a informé les parties qu’une personne qui prétendait être le représentant de M. Richards avait communiqué avec lui et qu’elle lui avait envoyé une fiche de comparution, mais que M. Richards n’avait pas confirmé auprès du Tribunal qu’il avait retenu les services d’un représentant. Le Tribunal a fait savoir qu’en l’absence d’indication contraire, les parties devaient continuer à communiquer directement avec M. Richards. Enfin, le Tribunal a fait savoir que la personne qui prétendait être le représentant de M. Richards avait demandé ses coordonnées. Le Tribunal a indiqué qu’il lui incombait de protéger les renseignements personnels des plaideurs et qu’il ne pouvait pas transmettre les coordonnées d’une partie à sa procédure à une personne qui souhaitait la représenter. Le fait qu’une copie de cette correspondance a été imprimée et transmise à M. Richards à l’Établissement de Warkworth a été confirmé.

[14] M. Karas a écrit au Tribunal le 10 juin 2025. Il demandait une copie de l’avis d’audience qui est envoyé aux parties à une instance ainsi qu’à leurs représentants, et affirmait qu’il avait déjà transmis le [traduction] « formulaire de comparution requis ». M. Karas a demandé à Mme Warsame de transférer son courriel à M. Richards, car il n’avait pas encore été en mesure de le joindre malgré le fait que la Commission avait transmis ses coordonnées au plaignant. Il a également demandé les coordonnées de M. Richards à l’avocat du SCC.

[15] Toujours le 10 juin 2025, M. Guimond, avocat du SCC, a écrit que Mme Warsame avait transmis les coordonnées de M. Karas à un membre de la famille de M. Richards pour qu’il lui en fasse part, et que M. Richards savait que M. Karas tentait de le joindre. Il a également indiqué dans son courriel que M. Richards était en mesure de communiquer avec M. Karas s’il souhaitait le faire.

[16] Plus tard le jour même, M. Karas a écrit à M. Guimond et au greffe du Tribunal pour demander, encore une fois, les coordonnées de M. Richards ainsi qu’une copie de l’avis d’audience afin qu’il [traduction] « puisse y assister et aider M. Richards dans cette affaire ».

[17] Le 11 juin 2025, M. Karas a envoyé sept courriels au Tribunal et aux autres parties dans lesquels il affirmait qu’il assisterait à l’audience à titre de « conseil » de M. Richards et continuait à réitérer les demandes qu’il avait déjà formulées, mais indiquait également qu’il n’avait pas encore joint M. Richards.

[18] Une fois de plus, il a demandé l’avis d’audience en soulignant qu’il avait déjà envoyé le formulaire de comparution. Il a indiqué à l’avocate de la Commission, Mme Warsame, qu’il n’avait pas encore été en mesure de joindre M. Richards [traduction] « malgré le fait qu’[elle] lui [avait] transmis ses coordonnées ». Il a également demandé à M. Guimond de le mettre en communication avec M. Richards [traduction] « pour qu’il puisse l’aider à titre de conseil en préparation à l’audience prévue le 16 juin 2025 ».

[19] Quelques minutes plus tard, M. Karas a envoyé un courriel similaire, suivi d’un autre plus tard en matinée.

[20] Le Tribunal a répondu en accusant réception de la demande de M. Karas en vue d’assister à l’audience et en donnant des renseignements sur la façon dont les membres du public peuvent observer le déroulement des instances du Tribunal.

[21] M. Karas a répondu en demandant à nouveau l’avis d’audience [traduction] « comme [il] souhait[ait] y assister à titre de conseil de M. Richards » et en renvoyant la fiche de comparution en pièce jointe.

[22] M. Karas a ensuite envoyé un courriel de suivi dans lequel il affirmait qu’il avait communiqué avec le Bureau du sous-commissaire de l’Ontario dans le but de joindre M. Richards et demandait, encore une fois, que M. Guimond lui transmette ses coordonnées ainsi que l’avis d’audience. Il a souligné qu’en l’absence d’une réponse, il prendrait d’autres mesures pour joindre M. Richards, y compris communiquer avec les avocats [traduction] « d’autres organismes, c’est-à-dire d’organisations non gouvernementales et de la presse (journalistes), afin d’obtenir leur soutien ».

[23] L’avocat du SCC a répondu comme suit :

[traduction]

D’après la chaîne de courriels, vous n’avez pas le mandat de représenter M. Richards. Par conséquent, vous comprendrez que je ne peux pas vous transmettre les renseignements personnels de M. Richards pour des raisons de confidentialité. Cela dit, comme je l’ai mentionné hier, Mme Warsame a donné vos coordonnées à l’un des membres de sa famille afin que celui-ci puisse directement les lui transmettre et communiquer avec vous en son nom, le cas échéant. De plus, Mme Warsame a parlé à M. Richards; il sait que vous tentez de le joindre. S’il souhaite communiquer avec vous, il est en mesure de le faire.

[24] M. Karas a répondu comme suit :

[traduction]

Merci de votre réponse. Cependant, je ne lui ai pas encore parlé, parce qu’on ne m’a pas dit où il se trouvait ni transmis ses coordonnées pour que je sache comment le joindre. J’ai communiqué avec le Bureau du souscommissaire (Ontario) aujourdhui en vue de joindre M. Ryan Richards. Comme vous avez refusé de me transmettre ces renseignements pour que jaide M. Richards. Pouvez-vous me mettre rapidement en rapport avec lui, M. Guimond?

 

De plus, je n’ai pas encore reçu l’avis d’audience pour assister à l’audience du Tribunal prévue du 16 au 27 juin 2025 dans cette affaire. Pouvez-vous, s’il vous plaît, me l’envoyer rapidement, […] monsieur le greffier?

 

En l’absence d’une réponse de votre part, je prendrai d’autres mesures pour joindre M. Richards; je pourrais notamment communiquer avec les avocats d’autres organismes, c’est-à-dire d’organisations non gouvernementales et de la presse (journalistes), afin d’obtenir leur soutien.

[25] Une fois de plus, le Tribunal a fait remarquer que rien au dossier n’indiquait que M. Richards avait retenu les services d’un représentant juridique. Le Tribunal a expliqué qu’en l’absence d’une telle confirmation, M. Karas pouvait présenter une demande en vue d’assister à l’audience à titre de membre du public, ce qu’il lui avait déjà expliqué.

[26] M. Karas a répondu en affirmant que le [traduction] « bureau du greffe ou le greffier du Tribunal ne respect[ait] pas le droit à un conseil de M. Richards » et, encore une fois, en envoyant le formulaire de comparution en pièce jointe en vue « d’agir à titre de conseil de M. Richards dans cette affaire » et en demandant l’avis d’audience qui est envoyé aux parties et à leurs représentants.

[27] Étant donné que M. Karas n’avait pas encore communiqué avec M. Richards, le Tribunal ne pouvait pas accepter ses assertions unilatérales selon lesquelles ses services avaient été retenus sans d’abord obtenir une confirmation de la part de M. Richards.

[28] Le 13 juin 2025, M. Karas a écrit au Tribunal pour l’informer qu’il avait [traduction] « enfin été en mesure de joindre [M. Richards] » par téléphone le 12 juin 2025 :

[traduction]

Quand je l’ai joint, je lui ai offert mon aide à titre de conseil pour l’audience prévue du 16 au 27 juin 2025. Cependant, comme son audience aura lieu la semaine prochaine, il préférerait que mon associé et moi-même y assistions à titre d’observateurs. Par conséquent, Manik Sudan (en c. c.) et moi-même aimerions assister à l’audience publique à titre d’observateurs [non souligné dans l’original] Pouvez-vous nous dire comment nous pouvons y assister?

[29] Le greffe du Tribunal a envoyé à M. Karas le lien pour assister à l’audience à titre d’observateurs; M. Karas en a accusé réception et a remercié le greffe. Dans sa réponse, il n’affirmait plus qu’il était le représentant de M. Richards.

[30] En tout et pour tout, M. Karas a écrit au Tribunal au moins 13 fois, outre de multiples appels, avant la reprise de l’audience le 16 juin 2025. Dans ces communications, M. Karas a demandé les coordonnées de M. Richards en vue de lui offrir ses services, envoyé le formulaire de comparution qu’il avait rempli avant de parler à M. Richards, demandé l’avis d’audience en affirmant qu’il y assisterait à titre de conseil de M. Richards, et prétendu que le Tribunal n’avait pas respecté le droit à un conseil de M. Richards. Après avoir parlé à M. Richards, M. Karas a confirmé que M. Richards souhaitait qu’il observe l’audience. On compte parmi ses multiples communications des courriels adressés au membre Lustig du Tribunal, qui n’est plus le membre assigné à la présente instance depuis qu’il s’est récusé comme arbitre en 2022.

[31] Les prétentions de M. Richards à l’effet d’une atteinte à son droit à un conseil ou d’un non-respect de ce droit, du 6 au 16 juin ainsi que du 16 au 26 juin 2025, sont infondées pour les motifs ci-dessous. M. Richards n’a jamais affirmé qu’il avait retenu les services de M. Karas avant le 16 juin.

[32] M. Karas semble croire à tort que le fait d’affirmer unilatéralement représenter M. Richards et de remplir un formulaire de comparution en l’absence du consentement de celui-ci constitue un mandat de représentation en justice valide. M. Karas invoque le paragraphe 16(1) des Règles de pratique du Tribunal canadien des droits de la personne (2021), DORS/2021-137 (les « Règles »). L’article 16 des Règles prévoit que, lorsqu’une partie dépose ou signifie un document signé par un représentant, ce dernier est le représentant inscrit au dossier de la partie qui étaye ces prétentions. Cela dit, comme je l’ai mentionné plus haut, au moment où M. Karas a commencé à envoyer une fiche de comparution au Tribunal en affirmant représenter M. Richards, il ne lui avait pas encore parlé. Lorsqu’ils se sont finalement parlé le 12 juin 2025, M. Karas a [traduction] « offert [son] aide [à M. Richards] à titre de conseil ». Cependant, comme M. Karas l’a lui-même écrit : [traduction] « [M. Richards préférerait] que mon associé et moi-même y assistions à titre d’observateurs » [non souligné dans l’original]. M. Karas a ensuite écrit au Tribunal pour lui demander les identifiants de connexion nécessaires en vue [traduction] « [d’]assister à l’audience publique à titre d’observateurs » [non souligné dans l’original]. Ces communications de la part de M. Karas permettent de confirmer qu’il prévoyait assister à l’audience à venir à titre de membre du public. Elles sont également très différentes des courriels envoyés par M. Karas avant qu’il ne parle à M. Richards : il n’affirmait plus, dans celles-ci, être le conseil de M. Richards, et n’y a pas joint le formulaire de comparution.

[33] Bref, les prétentions de M. Richards selon lesquelles son droit à un conseil n’a pas été respecté sont infondées. M. Karas n’avait même pas parlé à M. Richards avant le 12 juin 2025, après quoi il a confirmé qu’il avait reçu la directive d’observer l’audience plutôt que d’agir à titre de représentant de M. Richards inscrit au dossier.

M. Karas n’a pas été exclu à tort de la portion de l’audience à huis clos du 16 juin 2025

[34] Au début de l’audience du 16 juin 2025, avant d’entreprendre la portion à huis clos et d’entendre les observations orales relatives à la requête du SCC, qui portait sur la règle de l’engagement implicite, j’ai demandé aux parties si elles avaient des questions à soulever. Ni M. Richards ni la Commission n’ont soulevé de question préliminaire. Après que le SCC eut proposé de procéder à huis clos en raison de la nature confidentielle des documents en cause, j’ai demandé aux parties si elles avaient des préoccupations quant à cette façon de procéder. Elles n’en ont soulevé aucune.

[35] J’ai entendu les observations orales relatives à la requête du SCC, qui portait sur la prétendue violation de la règle de l’engagement implicite, lors d’une audience à huis clos en raison de la nature confidentielle des documents en cause et de la nécessité de trancher promptement la requête. Seules les parties à l’instance et leurs représentants y ont participé. Les observateurs qui se trouvaient dans la tribune du public, y compris M. Karas, n’ont pas été admis à la portion à huis clos. M. Richards n’a jamais affirmé qu’il avait retenu les services d’un représentant, et M. Karas n’a jamais prétendu être le représentant de M. Richards après qu’il lui eut parlé le 12 juin. Comme je l’ai mentionné plus haut, au contraire, M. Karas a demandé, dans son courriel du 13 juin, [traduction] « [d’]assister à l’audience publique à titre d’observateurs » [non souligné dans l’original] avec son associé.

[36] En dépit de ce qui précède, M. Richards prétend maintenant que M. Karas a été exclu à tort de la partie de l’audience à huis clos. Aucune partie n’a soulevé de préoccupation, ni quant à M. Karas ni quant à la façon dont la requête a été entendue, malgré le fait qu’elles ont amplement eu l’occasion d’exprimer leurs préoccupations et leurs questions préliminaires. M. Richards n’a pas demandé à ce que M. Karas soit admis à cette portion de l’audience. Il n’a pas, non plus, mentionné qu’il avait retenu les services d’un représentant, ni qu’il avait l’intention de le faire.

[37] Au cours de la portion de l’audience à huis clos, soit à 10 h 07, M. Karas a envoyé un courriel au Tribunal dans lequel il indiquait : [traduction] « Je suis dans la salle d’attente et j’attends qu’on m’autorise à assister à l’audience à titre d’observateur. » Le Tribunal a informé tous les membres de la tribune du public que la première portion de l’audience allait se dérouler à huis clos. À 10 h 43, M. Karas a donné suite à ce message en écrivant ce qui suit : [traduction] « Voulez-vous informer notre bureau de la raison pour laquelle nous n’avons pas encore été autorisés à assister à l’audience, monsieur le greffier? M. Richards m’a demandé d’assister à toutes les portions de l’audience, y compris la portion à huis clos, pour que je puisse lui offrir mes conseils. »

[38] Comme je l’ai mentionné plus haut, il ressort clairement des observations de M. Karas qu’il n’avait pas le mandat de représenter M. Richards au moment où il a commencé à envoyer des courriels au Tribunal dans lesquels il prétendait être son « conseil », soit le 9 juin 2025. Après qu’il eut enfin parlé à M. Richards, M. Karas a affirmé qu’il assisterait à l’audience publique à titre d’observateur. Il n’a indiqué dans aucun de ses trois courriels envoyés le 13 juin qu’il était le représentant de M. Richards. De plus, dans son courriel envoyé le 16 juin à 10 h 07, M. Karas affirmait être un observateur. Par conséquent, rien ne justifiait que j’admette M. Karas à la portion à huis clos d’une audience réservée aux parties et à leurs représentants.

[39] Dans son courriel envoyé le 16 juin à 10 h 43, M. Karas indiquait pour la première fois (depuis sa discussion avec M. Richards) qu’il participerait à l’audience à titre de conseil.

[40] Lorsque les parties ont fini de discuter de la requête du SCC, l’avocat du SCC m’a informée que M. Karas avait envoyé des courriels aux parties et au Tribunal. Étant donné que M. Karas avait confirmé par écrit qu’il assisterait à l’audience à titre de simple observateur, j’ai demandé à M. Richards de confirmer son rôle. Il m’a répondu ce qui suit : [traduction] « Il sera mon conseil très bientôt, mais j’ai demandé à ce qu’il assiste à l’audience à titre d’observateur. Il sera mon conseil, il est mon conseil, mais pour le moment, je veux qu’il soit un observateur. » Lorsque j’ai demandé des précisions à M. Richards, il a affirmé que [traduction] « c’[était] pas mal complexe », mais qu’après les deux semaines d’audience prévues, M. Karas prendrait le relais et le représenterait. Dans l’intervalle, il souhaitait que M. Karas observe l’audience à ses côtés à titre de « conseil ».

[41] Il s’agissait de la première fois, depuis qu’il lui avait parlé, que M. Richards exprimait le souhait que M. Karas participe à l’instance à un autre titre que celui d’observateur membre du public. Depuis lors, M. Karas est inscrit au dossier du Tribunal et, comme je l’expliquerai ci-dessous, l’intégralité du dossier de l’instance lui a été envoyée, malgré ses prétentions à l’effet du contraire.

Tous les documents pertinents et l’intégralité du dossier ont été envoyés à M. Karas

[42] Le 24 juin 2025, après qu’il eut reçu la requête en rejet du SCC, M. Karas a affirmé qu’il n’avait pas eu le temps d’examiner pleinement le dossier du Tribunal parce qu’il n’avait pas encore reçu une seconde clé USB, envoyée par messagerie, qui contenait des documents antérieurs du SCC en lien avec sa requête relative à la prétendue violation de la règle de l’engagement implicite, ainsi que l’enregistrement de la portion à huis clos de l’audience du 16 juin 2025. M. Richards a confirmé qu’il s’était déjà conformé aux ordonnances du Tribunal, énoncées à partir du paragraphe 40 de la décision sur requête, mais a également demandé une prorogation de délai en vue de se conformer à la décision sur requête jusqu’à ce que M. Karas reçoive tous les documents.

[43] Dans les observations qu’ils ont déposées en réponse le 11 juillet 2025, la Commission et M. Richards ont tous deux continué à affirmer que M. Karas n’avait toujours pas reçu les documents susmentionnés. Cependant, comme je l’expliquerai ci-dessous, si M. Karas n’avait pas reçu les documents, c’était parce qu’il ne les avait pas récupérés et examinés en temps opportun.

[44] Le Tribunal a envoyé une première clé USB chiffrée à M. Karas le 24 juin 2025; cette clé a été livrée le jour même. La deuxième clé USB a été envoyée le 30 juin 2025 et livrée le 2 juillet 2025. Dans les deux cas, le service de messagerie a confirmé que le colis avait bien été livré et que M. Karas pouvait le récupérer.

[45] Comme M. Karas continuait à communiquer avec le greffe en affirmant qu’il n’avait pas reçu les documents, le Tribunal a envoyé, le 25 juillet 2025, un compte rendu détaillé des mesures qu’il avait prises pour lui fournir ces documents. Il a confirmé qu’il avait envoyé les documents en lien avec la requête relative à la règle de l’engagement implicite sur la première clé USB, laquelle avait été livrée le 24 juin 2025 avec le reste du dossier officiel de l’instance, à l’exception de l’enregistrement de la portion à huis clos de l’audience du 16 juin 2025. Cependant, M. Karas n’a pas récupéré la clé USB avant le 30 juin 2025. De plus, près d’un mois plus tard, soit les 23 et 24 juillet, le greffe a eu trois appels téléphoniques avec lui pour l’aider à localiser les documents relatifs à la requête sur la première clé USB. Il n’a pas, non plus, récupéré en temps opportun la seconde clé USB, qui contenait la portion à huis clos de l’audience du 16 juin. Le 24 juillet 2025, M. Karas a appelé le greffe et a affirmé qu’il irait récupérer le colis avant la fin de la semaine, lequel aurait pu être récupéré à partir du 2 juillet 2025,.

[46] M. Karas a répondu à la communication du Tribunal le 25 juin 2025 en s’excusant pour la confusion et en déclarant que [traduction] « [c]e n’[était] pas la faute de M. Richards, mais plutôt la sienne, et qu’il ne devrait pas en être blâmé ». Dans ce même courriel, M. Karas a souligné qu’il demandait une conférence téléphonique de gestion préparatoire en vue d’aborder certaines préoccupations d’ordre procédural en lien avec le déroulement de l’instance jusqu’alors ainsi que des requêtes qu’il avait l’intention de déposer concernant [traduction] « l’équité procédurale et la communication de documents supplémentaires ».

[47] Si M. Karas et la Commission affirment que M. Karas n’a pas reçu l’intégralité du dossier et invoquent des questions relatives à « l’équité procédurale », c’est parce que M. Karas n’a pas récupéré les documents et qu’il n’a pas pris les mesures nécessaires pour effectuer un suivi de la livraison des colis. Comme il l’a expliqué dans sa communication du 25 juillet 2025, le Tribunal n’a pas à pourchasser un représentant inscrit au dossier pour lui rappeler de récupérer et d’examiner les documents relatifs à l’instance à laquelle son client est partie. De plus, le SCC a confirmé qu’il avait également envoyé toutes ses listes de documents à divulguer, tous ses documents divulgués et tous ses cahiers des pièces proposées à M. Karas par voie électronique le 26 juin 2025. Au moment où le SCC a déposé ses observations en réplique, le 18 juillet 2025, M. Karas n’avait pas téléchargé les documents.

V. QUESTIONS EN LITIGE

i. M. Richards s’est-il conformé aux ordonnances du Tribunal à la suite de sa violation de la règle de l’engagement implicite?

ii. Dans la négative, ses actes constituent-ils un abus de procédure?

iii. Dans l’affirmative, le Tribunal devrait-il rejeter la plainte de M. Richards pour abus de procédure? Le Tribunal devrait-il accorder d’autres mesures de réparation?

VI. CADRE LÉGISLATIF

[48] Le Tribunal est maître de sa procédure (Commission canadienne des droits de la personne c. Société canadienne des postes, 2004 CF 81, aux par. 13 à 15). Il tranche les questions de droit et les questions de fait dans les affaires dont il est saisi (par. 50(2) de la Loi canadienne sur les droits de la personne). Si une partie omet de se conformer aux Règles du Tribunal, la formation peut ordonner à la partie de remédier à l’omission, continuer l’instruction de la plainte, rejeter la plainte ou rendre toute autre ordonnance qui respecte le principe énoncé à la règle 5, laquelle prévoit que les Règles sont interprétées et appliquées de façon à permettre de trancher la plainte sur le fond de façon équitable, informelle et rapide (article 9 des Règles). Le Tribunal peut également rendre l’ordonnance qu’il estime nécessaire en cas de comportements vexatoires ou d’abus de procédure (article 10 des Règles).

[49] La doctrine de l’abus de procédure est une doctrine de common law qui vise à protéger les principes du caractère définitif, de l’équité et de l’intégrité de l’administration de la justice (Colombie-Britannique (Workers’ Compensation Board) c. Figliola, 2011 CSC 52, au par. 31 [Figliola], et Law Society of Saskatchewan c. Abrametz, 2022 CSC 29, aux par. 34 à 36 [Abrametz]). Ce vaste concept, qui se caractérise par sa souplesse et qui ne s’encombre pas d’exigences particulières, vise à prévenir l’iniquité en empêchant les recours abusifs (Abrametz, aux par. 34 à 36, et Figliola, au par. 34).

[50] La souplesse de la doctrine est importante en droit administratif, compte tenu de la grande variété des circonstances dans lesquelles des pouvoirs délégués sont exercés (Abrametz, au par. 35). La doctrine met davantage l’accent sur l’intégrité du processus décisionnel judiciaire que sur l’intérêt des parties. La bonne administration de la justice et la protection de l’équité se trouvent au cœur de la doctrine (Abrametz, au par. 36, et Figliola, aux par. 24 à 25 et 31).

[51] Pour déterminer si l’arrêt des procédures est une mesure appropriée pour remédier à un abus de procédure, il faut examiner si le fait de continuer les procédures serait plus préjudiciable à l’intérêt public que les arrêter de façon permanente (Abrametz, au par. 102).

[52] La Commission et le SCC se sont fortement appuyés sur la décision rendue par le Tribunal dans l’affaire Constantinescu c. Service Correctionnel Canada, 2022 TCDP 13, et les critères qu’il a appliqués dans les affaires criminelles dont il a été saisi en vue de trancher la question de savoir si le rejet de l’instance est une mesure de réparation appropriée en cas d’abus de procédure. Je préfère m’aligner sur la jurisprudence précitée, qui prévoit une approche plus souple et globale dans le contexte du droit administratif.

VII. ANALYSE ET MOTIFS

  • (i)M. Richards s’est-il conformé aux ordonnances du Tribunal à la suite de sa violation de la règle de l’engagement implicite?

[53] Non. Les communications de M. Richards concernant sa conformité à la décision sur requête sont contradictoires et incohérentes, et ne sont pas assez fiables pour confirmer qu’il s’est conformé aux ordonnances particulières énoncées dans la décision sur requête.

[54] M. Richards soutient qu’une violation de la règle de l’engagement implicite n’est pas un abus de procédure, qu’il se représentait lui-même au moment des faits et qu’il n’était pas conscient de la signification du partage des documents confidentiels.

[55] La Commission soutient que M. Richards a commis une [traduction] « erreur d’ordre procédural » lorsqu’il a partagé les documents et qu’il a promptement remédié à cette erreur après que le SCC eut découvert la violation, avant que je ne rende la décision sur requête le 18 juin 2025. De plus, elle invoque « l’équité procédurale » et affirme qu’un délai raisonnable aurait dû être donné à M. Richards pour lui permettre de se conformer à la décision sur requête.

[56] M. Richards et la Commission ont tous deux formulé des arguments quant à sa violation de la règle de l’engagement implicite. Cela dit, les observations en réponse à la requête en rejet du SCC n’étaient pas l’occasion de remettre en cause la requête antérieure du SCC. J’ai déjà conclu que M. Richards avait violé la règle et rendu des ordonnances, le 18 juin, en vue d’atténuer ou de prévenir tout autre préjudice causé à SCC ainsi qu’à l’intégrité du processus du Tribunal. La présente requête n’est pas, non plus, l’occasion de contester la décision sur requête. Il est loisible aux parties d’exercer d’autres recours, mais elles ne peuvent pas contester la décision sur requête de façon incidente dans leurs observations déposées en réponse à une requête distincte.

[57] De plus, comme le soutient le SCC, bien qu’il affirme d’une part qu’il s’est conformé à la décision sur requête du Tribunal, M. Richards continue de défendre l’utilisation à des fins accessoires des documents qu’il a partagés à tort; il affirme qu’il voulait partager la pièce R-503 parce qu’il voulait tenir l’employé du SCC [traduction] « personnellement responsable », et non parce qu’il voulait violer la règle de l’engagement implicite de confidentialité. Il soutient qu’il est dans l’intérêt public de savoir qu’un tel rapport existe, et que le fait d’empêcher le public de le voir et de le mettre sous scellés, ce qu’a ordonné le Tribunal, mine l’intégrité du processus judiciaire. M. Richards laisse également entendre qu’il ne savait pas que la pièce R-503 était confidentielle, ce qui est faux : il s’était opposé à la demande antérieure du SCC, qui visait une ordonnance de confidentialité (décision sur requête, au par. 27).

[58] La réponse de M. Richards témoigne d’un mépris flagrant de la décision sur requête. Je suis d’accord avec le SCC pour dire qu’elle jette un doute sur la façon dont la Commission a qualifié la violation initiale [traduction] « d’erreur d’ordre procédural ». Plutôt que de confirmer comment il s’est conformé à la décision sur requête, M. Richards a utilisé les observations qu’il a déposées en réponse pour réaffirmer son utilisation à des fins accessoires des documents échangés au cours du processus de communication et pour contester de façon incidente la décision sur requête. Par conséquent, et en raison d’autres incohérences et déclarations contradictoires formulées par M. Karas (énoncées ci-dessous), je conclus que M. Richards ne s’est pas conformé aux ordonnances rendues par le Tribunal dans la décision sur requête.

Les observations de M. Richards sont contradictoires et incomplètes

[59] Après qu’il eut reçu l’avis de requête du SCC le 24 juin 2025, M. Richards a envoyé de nombreux courriels incohérents par l’entremise de M. Karas concernant sa conformité à l’ordonnance. Dans ces communications, M. Richards a à la fois affirmé qu’il s’était déjà conformé aux ordonnances rendues dans la décision sur requête, qu’il avait l’intention de s’y conformer dès que M. Karas aurait examiné les documents, que M. Karas n’avait pas reçu l’intégralité du dossier de la présente instance, et qu’il avait besoin de plus de temps.

[60] À la suite de la réception de la requête du SCC le 24 juin 2025 et des communications de M. Richards, le Tribunal a établi l’échéancier des observations et des répliques relatives à la requête, et a fait observer qu’il trancherait, en l’absence de toute autre communication ou confirmation de la part de M. Richards conforme à sa décision sur requête, la requête en rejet du SCC. M. Richards et la Commission avaient jusqu’au 11 juillet 2025 pour déposer leurs observations en réponse.

[61] Le 25 juin 2025, après qu’il eut confirmé qu’il avait parlé avec M. Richards, lequel affirmait qu’il s’était conformé aux ordonnances rendues dans la décision sur requête, M. Karas a écrit [traduction] « pour demander une prorogation de délai au cas où le SCC n’[était] pas convaincu que le plaignant s’[était] conformé à la décision sur requête ». Dans ce même courriel, envoyé le 25 juin 2025, et malgré le fait qu’il avait déjà envoyé des courriels dans lesquels il avait confirmé que M. Richards s’était conformé aux ordonnances rendues dans la décision sur requête, M. Karas a écrit pour demander [traduction] « plus de temps » parce qu’il n’avait pas reçu la requête initiale du SCC concernant la violation de la règle de l’engagement implicite.

[62] Le 25 juin 2025, à la suite de la réception de communications incohérentes de la part de M. Richards, le Tribunal a envoyé ce qui suit :

[traduction]

Bonjour,

 

Le Tribunal accuse réception des communications de M. Karas concernant la conformité de M. Richards aux ordonnances rendues par le Tribunal dans la décision 2025 TCDP 61.

 

M. Karas a demandé une prorogation de délai au nom de M. Richards pour lui permettre de se conformer aux ordonnances du Tribunal, mais il semble également affirmer que la requête en rejet du SCC n’est plus nécessaire parce que M. Richards s’est déjà conformé à ces ordonnances.

 

M. Karas est prié d’informer le Tribunal, au plus tard le jeudi 26 juin 2025 à midi, s’il a toujours besoin de présenter une demande de prorogation et, le cas échéant, de la durée de cette prorogation, étant donné qu’il semble également affirmer que M. Richards s’est déjà conformé à toutes les ordonnances du Tribunal.

Le SCC doit confirmer, au plus tard le 27 juin 2025, s’il est d’accord pour dire qu’il n’y a pas de question réelle à trancher quant à sa requête en rejet.

 

À la suite de la réception de ces communications, le Tribunal enverra d’autres directives concernant l’échéancier des réponses à la requête en rejet du SCC, le cas échéant.

[63] Plus tard le jour même, M. Karas a répondu en disant qu’il ne croyait pas qu’il y avait de question réelle à trancher quant à la requête en rejet du SCC, mais qu’il préférait [traduction] « résoudre la question directement avec le SCC ». Il a réitéré que la requête en rejet du SCC était théorique [traduction] « comme le plaignant [avait] déjà pris les mesures appropriées pour se conformer » aux ordonnances du Tribunal malgré le fait qu’il avait également demandé une prorogation de délai jusqu’à la réception de l’ensemble des documents nécessaires pour ce faire. Ce courriel se terminait par la phrase suivante : [traduction] « […] comme je l’ai déjà indiqué, M. Richards a déjà fait savoir qu’il s’y était conformé; il m’a dit la même chose, et je n’ai aucune raison de penser qu’il ne l’a pas fait ».

[64] Le 26 juin 2025, le SCC a écrit qu’il était d’avis que M. Richards n’avait pas encore démontré qu’il s’était conformé à la décision sur requête et que la requête en rejet devait être tranchée par le Tribunal.

[65] Le 27 juin 2025, le Tribunal a confirmé qu’étant donné qu’une question réelle en suspens devait être tranchée, les parties devaient déposer leurs observations conformément à l’échéancier établi le 24 juin 2025. Le Tribunal a également indiqué que si, à la suite de la récupération des colis et de l’examen du dossier et des directives de son client, M. Karas souhaitait présenter une demande visant la prorogation du délai de réponse à la requête au nom de M. Richards, il pourrait le faire.

[66] M. Richards n’a pas présenté de demande de prorogation de délai ni pour se conformer à la décision sur requête ni pour déposer des observations en réponse à la présente requête. Le 3 juillet 2025, M. Karas a plutôt écrit au Tribunal et de nouveau confirmé que M. Richards s’était déjà conformé aux ordonnances du Tribunal. Il a affirmé que la pièce proposée R-503 avait été communiquée à Mme Mitchell et retirée d’Instagram, et que le compte de médias sociaux avait depuis lors été supprimé. Il a écrit que la décision sur requête rendue par le Tribunal avait été partagée avec Mme Mitchell, et que M. Richards avait récupéré et détruit toutes les copies (y compris les copies électroniques) des documents confidentiels partagés en violation de la règle de l’engagement implicite. Il a confirmé que M. Richards avait obtenu l’engagement de tiers, notamment Mme Mitchell, de retourner ou de retirer les documents et d’en détruire les copies électroniques.

[67] Les communications de M. Richards, envoyées par l’entremise de M. Karas, ne peuvent pas être considérées comme une preuve suffisante et fiable de sa conformité aux ordonnances du Tribunal. Bien que M. Karas ait confirmé à de multiples reprises que M. Richards s’est déjà conformé aux ordonnances du Tribunal, ses communications sont incohérentes et M. Richards n’a pas fourni d’affidavit pour ses déclarations. Il ne s’agit pas d’un fondement fiable ou suffisant pour établir sa conformité aux ordonnances du Tribunal.

[68] De plus, les déclarations de M. Richards selon lesquelles il s’est conformé aux ordonnances rendues dans la décision sur requête sont incomplètes. Outre le fait qu’elles sont contradictoires, comme l’affirme le SCC, M. Richards n’a pas confirmé si la pièce R-503 a été publiée sur d’autres médias sociaux. M. Richards n’a également pas confirmé clairement à qui, mis à part Mme Mitchell, il a communiqué les documents, et l’état du compte Instagram n’a pas été confirmé de façon définitive. À certains moments, le compte semblait avoir été supprimé, mais il était ensuite accessible à nouveau.

[69] M. Karas prétend également qu’il a fait une demande de prorogation le 2 juillet 2025 et que cette demande a été rejetée. C’est faux. Il semble que M. Karas ait confondu la présente instance avec une autre à laquelle M. Richards est partie; j’ai rejeté, dans cette instance, les demandes de la Commission et de M. Richards, qui souhaitaient avoir plus de temps pour indiquer leurs disponibilités aux fins d’une conférence téléphonique de gestion préparatoire. Cette demande n’était pas liée aux plaintes ou à la requête en rejet du SCC dont il est question en l’espèce.

  • (ii)Dans la négative, ses actes constituent-ils un abus de procédure?

[70] Oui. M. Richards ne s’est pas conformé aux ordonnances du Tribunal, et ce, sans explication. Ses déclarations et ses observations sont incohérentes et incomplètes; elles contestent également, de façon incidente, les ordonnances du Tribunal. Son mépris de la décision sur requête mine l’intégrité de la fonction juridictionnelle du Tribunal et constitue un abus de procédure.

[71] La Commission soutient que M. Richards est incarcéré et qu’il peut être difficile de communiquer avec lui, mais M. Richards a apparemment été en mesure de partager les documents confidentiels en cause tout en étant incarcéré. Comme le fait valoir la Commission, M. Richards a également répondu très rapidement lorsque la question a été soulevée pour la première fois par le SCC, et le compte Instagram a été défini comme privé dans les jours qui ont suivi. De plus, plusieurs options, qui lui auraient permis de démontrer qu’il s’était conformé aux ordonnances du Tribunal et qu’il avait l’intention de bonne foi de se conformer à celles-ci, s’offraient à lui. Bien que la Commission présente des observations concernant les difficultés auxquelles font face les plaideurs qui se représentent eux-mêmes, M. Richards ne se représentait plus lui-même au moment où la décision sur requête a été rendue. Quoi qu’il en soit, M. Richards s’est représenté lui-même de façon très compétente tout au long de la présente instance. Il n’a jamais affirmé que ses difficultés en matière de communication sont l’une des raisons pour lesquelles il ne s’est pas conformé à la décision sur requête.

[72] Au contraire, M. Karas a communiqué à maintes reprises avec le Tribunal et les autres parties, et a envoyé de nombreux courriels portant sur différents points depuis que j’ai rendu la décision sur requête le 18 juin 2025. Dans ces communications, M. Richards aurait pu confirmer sa conformité conformément aux directives, clairement demander plus de temps en vue de le faire, et expliquer ce qu’il avait fait et ce qu’il lui restait à faire. Il aurait également pu profiter de ses observations pour décrire les mesures qu’il avait prises dans l’intervalle pour se conformer aux ordonnances ou pour étayer ses prétentions selon lesquelles la requête du SCC était théorique. Plus de deux mois se sont écoulés depuis que la décision sur requête a été rendue, et M. Richards n’a pas confirmé sa conformité, sans équivoque et de façon fiable, dans les nombreuses communications de M. Karas. M. Richards a plutôt contesté la décision sur requête de façon incidente, formulé des allégations de partialité et de [traduction] « manquement à l’équité procédurale », et fait valoir des prétentions infondées selon lesquelles son droit à un conseil n’avait pas été respecté. Ce comportement n’est pas celui d’une personne qui a fait preuve de respect envers les directives et les décisions du Tribunal ni celui d’une personne qui a l’intention de s’y conformer.

[73] Le comportement de M. Richards est obstructif et abusif, et témoigne d’un mépris des directives et des décisions du Tribunal. Il n’est pas à la hauteur du comportement auquel on s’attend de la part de toutes les parties, qu’elles soient représentées ou non. Je suis d’accord avec le SCC pour dire que ce comportement perpétue le préjudice causé, comme je l’ai déjà conclu, par la violation de la règle de l’engagement implicite (voir décision sur requête, au par. 31), et nuit à l’intérêt public envers l’administration de la justice.

  • (iii)Dans l’affirmative, le Tribunal devrait-il rejeter la plainte de M. Richards pour abus de procédure? Le Tribunal devrait-il accorder d’autres mesures de réparation?

[74] À mon avis, le rejet des plaintes n’est une mesure ni justifiée ni proportionnée face au comportement de M. Richards. Cependant, j’ai rendu d’autres ordonnances auxquelles M. Richards doit se conformer, et celui-ci a été avisé que la poursuite de tout comportement abusif pourrait entraîner le rejet de ses plaintes.

[75] Selon le SCC, qui invoque les décisions Constantinescu c. Service Correctionnel Canada, 2022 TCDP 13, aux par. 22 et 25 [Constantinescu], et Patterson c. Johnson, 1998 CanLII 28019, aux par. 8, 10 à 11, 20 et 22, le rejet des plaintes est une mesure nécessaire qui peut être justifiée lorsqu’une personne mine l’intégrité du processus judiciaire ou qu’il y a abus de procédure. Il soutient également que l’inaction de M. Richards a entraîné d’importantes dépenses de fonds publics et de ressources judiciaires, et que je dois tenir compte de l’économie des ressources judiciaires, comme beaucoup de témoins n’ont pas encore été entendus dans la présente instance. Selon le SCC, il n’est pas dans l’intérêt de l’administration de la justice que les plaintes déposées par une personne ayant commis un abus de procédure et ignoré les ordonnances du Tribunal soient traitées tandis que les autres plaideurs, qui respectent ces ordonnances et s’y conforment, attendent leur tour pour être entendus. Enfin, le SCC affirme qu’étant donné que le Tribunal n’a le pouvoir de rendre ni d’ordonnance d’adjudication des dépens ni de conclusion d’outrage, aucune autre mesure de réparation ne permettrait d’éliminer le préjudice.

[76] La Commission soutient que le comportement de M. Richards ne constitue pas un abus des procédures du Tribunal et que la poursuite de l’audience ne déconsidérerait pas l’administration de la justice. Elle affirme que le rejet des plaintes pénaliserait M. Richards pour une [traduction] « erreur d’ordre procédural » et qu’il empêcherait le Tribunal de s’acquitter de son mandat, soit d’étudier les allégations de discrimination. Elle affirme également que les présentes circonstances ne justifient pas le rejet des plaintes, une mesure de réparation extraordinaire, et que le Tribunal devrait faire preuve d’une extrême prudence, d’autant plus que le plaignant est incarcéré et qu’il se représentait lui-même jusqu’au 16 juin 2025. Enfin, la Commission soutient que, si le Tribunal conclut que M. Richards ne s’est pas conformé à certains aspects de sa décision sur requête, il peut donner des directives de nature procédurale plutôt que de rejeter les plaintes, ce qui, selon elle, serait une mesure disproportionnée et extrême. Elle n’a pas proposé d’autre mesure de réparation.

[77] Je ne suis pas d’avis que le mépris par M. Richards des ordonnances du Tribunal puisse être qualifié « d’erreur d’ordre procédural » ou « d’omission ». J’ai déjà conclu que M. Richards avait violé la règle de l’engagement implicite. La présente requête concerne son prétendu défaut de se conformer aux ordonnances rendues dans la décision sur requête. Non seulement les actes et les déclarations de M. Richards ne respectent pas les ordonnances du Tribunal, ils témoignent d’un mépris flagrant du fondement de la décision sur requête : M. Richards continue de défendre l’utilisation à des fins accessoires du document qu’il a communiqué en violation de la règle de l’engagement implicite.

[78] Cependant, je suis d’accord avec la Commission pour dire que les présentes circonstances ne justifient pas le rejet de l’instance. Les déclarations faites par l’entremise de M. Karas, bien qu’elles aient été communiquées de façon confuse et incomplète, peuvent traduire une certaine conformité aux ordonnances du Tribunal. Malgré le fait que j’ai conclu qu’elles ne sont ni suffisantes ni fiables, je suis d’accord avec la Commission pour dire que les plaintes ne doivent être rejetées que lorsque l’intérêt du public à ce qu’il existe un processus équitable et exempt d’abus de procédure l’emporte sur l’intérêt du public à ce que les plaintes soient décidées au fond (Abrametz, au par. 84). À mon avis, nous n’en sommes pas à ce stade.

[79] Le droit à une instance de M. Richards n’est pas un droit absolu; cependant, la poursuite de tout comportement abusif ne sera pas tolérée. Étant donné que les actes posés par M. Richards depuis la décision sur requête témoignent d’un mépris du processus et des ordonnances du Tribunal, je lui ordonne de fournir une déclaration signée décrivant en détail la façon dont il s’est conformé à chacune des ordonnances rendues au paragraphe 40 de la décision sur requête. Toute personne informée de ces ordonnances doit également se conformer aux directives énoncées au paragraphe 42.

[80] En temps normal, je demanderais à M. Richards de déposer un affidavit. Je reconnais qu’il peut être difficile de le faire lorsque le plaideur est incarcéré et que le Tribunal peut déroger aux règles officielles en matière de preuve. Cependant, compte tenu des communications de M. Karas, il ne suffit pas que le représentant de M. Richards écrive tout simplement au Tribunal pour faire ces déclarations en son nom. À mon avis, une déclaration signée par M. Richards lui-même remplirait à peu près la même fonction qu’un affidavit, sous réserve de toute préoccupation formulée par les autres parties à l’égard de cette déclaration signée. Le Tribunal peut également convoquer les parties pour que M. Richards puisse présenter cette déclaration signée comme élément de preuve et être contre-interrogé sur son contenu. J’entendrai les parties sur cette possibilité après que j’aurai examiné sa déclaration signée.

[81] Enfin, bien que la Commission affirme que l’importance de ces plaintes systémiques fait en sorte qu’elles doivent être traitées, ce n’est pas nécessairement toujours le cas. Je ne suis pas d’avis que l’importance des allégations individuelles et systémiques dont il est question en l’espèce l’emporte sur la nécessité de se conformer aux ordonnances du Tribunal et de respecter l’intégrité de l’instance et de la fonction juridictionnelle. Si M. Richards continue à faire fi des directives du Tribunal et à se comporter de manière abusive, le rejet des plaintes (et le refus d’accorder une audience sur le bien-fondé de multiples allégations de discrimination) sera le résultat de son propre comportement.

[82] Je suis d’accord avec la Commission pour dire que les lois sur les droits de la personne doivent être interprétées de façon large et libérale, et que de nombreux plaignants demandent des mesures de réparation pour de prétendues violations des droits de la personne à un moment où ils sont vulnérables et font face à d’autres difficultés. Cependant, pour qu’un système juridictionnel fonctionne et pour veiller à ce que le public puisse avoir confiance en nos systèmes judiciaires, toutes les parties doivent respecter les décisions du Tribunal. À mon avis, il est également dans l’intérêt public de favoriser et d’encourager le respect de l’autorité du Tribunal et de ses ordonnances, ainsi que des règles qui régissent les actions en justice.

[83] Les intérêts de M. Richards ne l’emportent pas sur ceux des autres parties. Réaffecter les maigres ressources du Tribunal et du public pour trancher ces questions, qui découlent du manque de respect d’une partie pour les règles et les directives du Tribunal, a également une incidence sur les autres plaideurs qui attendent que leurs plaintes soient entendues. L’intégrité et la durabilité du système des droits de la personne dans son ensemble en seraient minées.

[84] Si M. Richards ne se conforme pas aux ordonnances énoncées ci-dessous, le SCC pourra renouveler sa demande, et j’entendrai les parties quant aux conséquences possibles, y compris le rejet de ces plaintes.

VIII. ALLÉGATIONS DE PARTIALITÉ ET DE MANQUEMENT À L’ÉQUITÉ PROCÉDURALE

[85] La réponse de M. Richards à la requête du SCC, envoyée le 11 juillet 2025, portait sur deux autres questions. En premier lieu, M. Karas y affirmait qu’il prévoyait déposer une [traduction] « requête concernant l’équité procédurale et la divulgation de documents supplémentaires à entendre de concert avec la requête de l’intimé ». En second lieu, M. Richards a fait mention d’une « crainte raisonnable de partialité » suscitée par : [traduction] « le non-respect du droit du plaignant à un conseil, de l’équité procédurale, plutôt que l’urgence, la gravité et l’importance des ordonnances du Tribunal. Comme il n’est pas concevable que le plaignant soit plus susceptible de se conformer à la décision sur requête du Tribunal dans de telles circonstances ».

[86] Les observations de M. Richards se sont poursuivies comme suit :

[traduction]

À notre avis, le fait de ne pas fournir au conseil l’intégralité d’un dossier ainsi qu’un délai suffisant pour y répondre soulève de sérieuses questions d’équité procédurale et est beaucoup plus grave, surtout lorsque la demande de prorogation est rejetée, que le fait de ne pas se conformer à cette décision sur requête en particulier, car ses conséquences seraient pires; les efforts déployés par le Tribunal et les parties en vue de remédier à la violation et à sa portée en seraient minés, ce qui ne se produirait pas autrement.

[87] Le 14 juillet 2025, le Tribunal en a accusé réception et a ordonné à M. Richards de se conformer à l’article 26 des Règles du Tribunal, lequel établit ce que doivent faire les parties si elles souhaitent déposer une requête. Il ne suffit pas de mentionner les requêtes au passage; il incombe à la partie requérante de procéder à la communication complète de l’ordonnance sollicitée et des motifs à l’appui. Bien que M. Karas ait demandé au Tribunal d’établir l’échéancier des observations, le Tribunal a expliqué qu’il déciderait de la marche à suivre après avoir reçu un avis de requête conforme à ses Règles, et non avant.

[88] Depuis lors, M. Karas a écrit à maintes reprises au Tribunal en mentionnant qu’il prévoyait déposer des requêtes. Le Tribunal a réitéré ses directives et l’obligation de déposer une requête conforme à l’article 26 des Règles. M. Richards n’a pas déposé de requête relative à « l’équité procédurale » ni communiqué quoi que ce soit depuis.

[89] En ce qui a trait à l’allégation de partialité formulée par M. Richards, le Tribunal a fait savoir, dans sa communication du 14 juillet 2025, que celle-ci devait être traitée rapidement. Il a fait savoir que les mentions indirectes de partialité ne seraient pas prises en considération en l’absence d’une requête, et que, si M. Richards avait une crainte de partialité et qu’il avait l’intention de donner suite à ces allégations, il devait déposer une requête en récusation sans délai et en informer les autres parties et le Tribunal au plus tard le 21 juillet 2025, après quoi j’établirais les dates de la requête et des réponses. J’ai également fait savoir que, si M. Richards ne déposait pas d’avis de récusation comme je lui avais demandé, je présumerais qu’il aurait renoncé à son droit de s’opposer pour ce motif et que je continuerais à traiter les questions en suspens en l’espèce.

[90] M. Karas a répondu que M. Richards ne souhaitait pas déposer de requête pour crainte raisonnable de partialité [traduction] « à ce moment-ci, en l’espèce ». Il a mentionné, une fois de plus, qu’il avait l’intention de déposer d’autres requêtes, mais aucune requête n’a été déposée depuis lors.

[91] Les allégations de crainte raisonnable de partialité mettent en doute non seulement l’intégrité personnelle du décideur ou du juge, mais l’intégrité de l’administration de la justice dans son ensemble (Murphy c. Canada (Procureur général), 2023 CF 57, au par. 15). Si M. Richards a une crainte de partialité, il lui incombe de déposer une requête en temps opportun, et non de laisser entendre qu’il pourrait le faire plus tard. Il n’est pas libre de laisser cette question en suspens quand bon lui semble (Canada (Commission canadienne des droits de la personne) c. Canada (Procureur général), 2025 CF 18, aux par. 132 et 134 à 136). En l’absence de requête déposée avant la date limite que j’avais établie, j’ai procédé au traitement des plaintes et présumé que M. Richards avait renoncé à son droit de formuler des allégations de partialité.

IX. MÉDIATION-ARBITRAGE

[92] M. Karas a communiqué avec le Tribunal et lui a demandé d’entreprendre une médiation-arbitrage avec moi à titre de médiatrice dans l’autre instance engagée par M. Richards devant le Tribunal. Il a plus tard confirmé que M. Richards espérait régler toutes ses plaintes avec le SCC, y compris les quatre plaintes qui font l’objet de la présente instance.

[93] La médiation présidée par le Tribunal peut être offerte à toute étape de l’instance si les parties y consentent. Lorsque les parties accepteront toutes de participer à une médiation présidée par le Tribunal, je trancherai la question de savoir si un médiateur doit être nommé.

X. ORDONNANCE

[94] La requête du SCC est rejetée.

[95] Au plus tard le 10 septembre 2025, M. Richards doit confirmer qu’il s’est pleinement conformé à la décision sur requête en fournissant une déclaration écrite et signée à cet effet, y compris une réponse détaillée à chaque point énoncé au paragraphe 40 de la décision sur requête. Toute personne informée de la décision sur requête doit également se conformer aux directives énoncées au paragraphe 42. Si M. Richards a besoin de plus de temps pour se conformer à la présente ordonnance, il doit clairement énoncer la prorogation dont il souhaite faire la demande et son motif, et solliciter l’avis des autres parties avant de présenter sa demande au Tribunal.

[96] Après qu’il aura examiné la déclaration de M. Richards ainsi que tout renseignement de toute personne visée par le paragraphe 42 de la décision sur requête, le Tribunal entendra les parties, puis décidera s’il y a lieu de tenir une courte audience aux fins d’un contre-interrogatoire.

[97] Si M. Richards ne se conforme pas à ce qui précède, le SCC pourra renouveler sa requête, et le Tribunal établira un échéancier pour que les parties présentent des observations sur les autres options disponibles afin d’empêcher tout autre abus de procédure, y compris le rejet de ces plaintes.

Signée par

Jennifer Khurana

Membre du Tribunal

Ottawa (Ontario)

Le 27 août 2025

 


Tribunal canadien des droits de la personne

Parties au dossier

Numéro(s) du/des dossier(s) du Tribunal : T2218, T2282, T2395,T2647

Intitulé de la cause : Ryan Richards c. Service correctionnel du Canada

Date de la décision sur requête du Tribunal : Le 27 août 2025

Observations écrites par :

Christopher Karas , pour le plaignant

Ikram Warsame , et Sameha Omer pour la Commission canadienne des droits de la personne

Dominique Guimond, Sonia Bédard et Penelope Karavelas , pour la partie intimée

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