Tribunal canadien des droits de la personne

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Tribunal canadien
des droits de la personne

Les armoiries du Tribunal

Canadian Human
Rights Tribunal

Référence : 2025 TCDP 86

Date : Le 2 septembre 2025

Numéro du dossier : T1340/7008

[TRADUCTION FRANÇAISE]

Entre :

Société de soutien à l’enfance et à la famille des Premières Nations du Canada

- et -

Assemblée des Premières Nations

les plaignantes

- et -

Commission canadienne des droits de la personne

la Commission

- et -

Procureur général du Canada

(représentant le ministre des Affaires autochtones et du Nord canadien)

l’intimé

- et -

Chefs de l’Ontario

- et -

Nation Nishnawbe-Aski

- et -

Amnistie Internationale

les parties intéressées

- et -

Première Nation de Neqotkuk (Tobique) de la Nation Wolastoqey et Première Nation d’Ugpi’ganjig (Eel River Bar) et Services à l’enfance et à la famille des Mi’gmaq du Nouveau-Brunswick Inc. et Fédération des nations autochtones souveraines et Assemblée des chefs du Manitoba et Conseil des Premières Nations du Yukon et Our Children, Our Way Society et Confédération des Premières Nations du Traité no 6 et Association des chefs des Premières Nations du Traité no 7 et Premières Nations du Traité no 8 en Alberta

les parties requérantes

Décision sur requête

Membres : Sophie Marchildon

Edward P. Lustig



I. Contexte

[1] En 2016, le Tribunal a rendu la décision Société de soutien à l’enfance et à la famille des Premières Nations du Canada et al. c. Procureur général du Canada (pour le ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien), 2016 TCDP 2 (la « décision sur le bien-fondé »), dans laquelle il a déclaré que l’affaire concernait les enfants, plus précisément les pratiques, actuelles et passées, en matière de protection de l’enfance au sein des Premières Nations vivant dans des réserves du Canada, ainsi que les répercussions que ces pratiques avaient eues et continuaient d’avoir sur les enfants des Premières Nations, leurs familles et leurs collectivités. Le Tribunal a par ailleurs conclu que le Canada avait fait preuve de discrimination raciale systémique à l’égard des enfants des Premières Nations dans les réserves et au Yukon, non seulement en sous-finançant le Programme des services à l’enfance et à la famille des Premières Nations (le « Programme des SEFPN »), mais aussi dans la conception, la gestion et le contrôle de ce programme.

[2] L’un des pires préjudices constatés par le Tribunal était attribuable au fait que le Programme des SEFPN incitait à retirer les enfants des Premières Nations de leur foyer, de leur famille et de leur collectivité. Un autre préjudice important causé aux enfants des Premières Nations était qu’aucun cas n’avait été approuvé au titre du principe de Jordan, en raison de l’interprétation étroite qu’en faisait le Canada et des critères d’admissibilité restrictifs qu’il avait élaborés. Le Tribunal a conclu qu’au‑delà de la simple question du financement, il fallait réorienter le programme de manière à respecter les principes relatifs aux droits de la personne et à tenir compte des saines pratiques en matière de travail social, dans l’intérêt supérieur des enfants.

[3] Il a donc ordonné au Canada de mettre fin aux actes discriminatoires, de prendre des mesures pour y remédier et empêcher qu’ils se reproduisent, et de réformer le Programme des SEFPN et l’Entente de 1965 avec l’Ontario, afin de tenir compte des conclusions tirées dans la décision sur le bien‑fondé. Le Tribunal a également décidé de procéder par étapes (réparations à court, moyen et long terme), afin d’apporter des changements immédiats, puis de faire des ajustements en vue d’arriver un jour à une réparation durable à long terme, fondée sur les données recueillies, les nouvelles études et les pratiques exemplaires retenues par les experts des Premières Nations, les besoins particuliers des collectivités et des organismes des Premières Nations, les conseils du Comité consultatif national sur la réforme des services à l’enfance et à la famille, et les renseignements fournis par les parties.

[4] Le Tribunal a rendu des ordonnances générales définitives pour mettre fin à la discrimination systémique constatée et a rendu une série de décisions sur requête concernant les mesures de réparation immédiates et à moyen terme, ainsi que des ordonnances définitives sur l’indemnisation, et a conservé sa compétence en vue d’arriver à une réparation durable à long terme fondée sur les données recueillies et les nouvelles études. Il s’agissait d’une requête des Premières Nations qui avançaient ne pas disposer de tous les renseignements nécessaires pour demander des mesures de réparation et des réformes à long terme.

[5] Dans la décision 2018 TCDP 4, le Tribunal a conclu qu’il se trouvait à l’étape de la réparation à long terme.

[6] Dans la décision 2022 TCDP 8, le Tribunal a rendu des ordonnances importantes à long terme, sur consentement, concernant les services de prévention et le financement.

[7] Dans la décision 2023 TCDP 44, le Tribunal a prononcé des ordonnances définitives approuvant l’un des plus importants règlements sur l’indemnisation de l’histoire du Canada pour les préjudices causés aux enfants et aux familles des Premières Nations.

[8] Le 11 juillet 2024, les Chefs de l’Ontario (les « COO »), la Nation Nishnawbe-Aski (la « NNA »), l’Assemblée des Premières Nations (l’« APN ») et le Canada ont annoncé un projet d’entente définitive (l’« entente nationale »).

[9] Les 9 et 10 octobre 2024, respectivement, les chefs en assemblée de la NNA et les chefs en assemblée de l’Ontario ont ratifié l’entente nationale lors de leurs assemblées spéciales des chefs.

[10] Le 17 octobre 2024, lors d’une assemblée spéciale des chefs de l’APN tenue à Calgary, l’entente nationale a fait l’objet d’un vote et a été rejetée.

[11] En novembre 2024, lors de l’assemblée générale annuelle des COO, les chefs en assemblée ont chargé ces derniers de poursuivre la négociation d’une entente propre à l’Ontario.

[12] Le 10 février 2025, après cinq semaines de négociations, les COO, la NNA et le Canada ont conclu des accords provisoires sur l’Entente définitive de l’Ontario et sur l’Entente trilatérale.

[13] Les 25 et 26 février 2025, les chefs en assemblée de la NNA et les chefs en assemblée de l’Ontario ont ratifié les accords provisoires.

[14] Le 26 février 2025, les chefs en assemblée de l’Ontario ont adopté la résolution no 25/02S, dans laquelle ils affirmaient avoir exprimé leur volonté de mettre en œuvre les réformes énoncées dans l’Entente définitive de l’Ontario et l’Entente trilatérale. La résolution no 25/02S demandait également aux autres parties à l’instance devant le Tribunal de s’abstenir de faire obstacle à l’approbation ou à la mise en œuvre de l’entente définitive de l’Ontario.

[15] Le 7 mars 2025, les COO et la NNA ont présenté une requête conjointe en vue d’obtenir l’approbation à l’égard de l’Entente définitive sur la réforme à long terme du Programme ontarien de services à l’enfance et à la famille des Premières Nations (l’« Entente définitive de l’Ontario ») et de l’Entente trilatérale en ce qui concerne la réforme de l’Entente de 1965 (l’« Entente trilatérale ») (la « requête conjointe relative à l’Entente définitive de l’Ontario »). Selon les COO et la NNA, l’Entente définitive de l’Ontario et l’Entente trilatérale sont l’expression collective des droits à l’autonomie gouvernementale et à l’autodétermination des 133 Premières Nations de l’Ontario qu’ils représentent. Si elles sont approuvées, ces deux ententes ne s’appliqueront qu’aux Premières Nations et aux organismes de SEFPN de l’Ontario et auront une incidence sur les enfants, les jeunes et les familles des Premières Nations de l’Ontario.

[16] Le Tribunal recevait de multiples avis de la part de Premières Nations et d’organismes des Premières Nations qui indiquaient leur intérêt quant à l’autorisation de déposer des requêtes en vue d’obtenir le statut de partie intéressée dans le cadre de l’instance concernant la requête conjointe relative à l’Entente définitive de l’Ontario, et qui lui demandaient des directives sur la manière de déposer leurs requêtes et les délais applicables.

[17] Dans l’exercice de son pouvoir, en tant que maître de ses propres procédures et afin d’assurer l’avancement rapide du dossier, le Tribunal a fixé le 15 avril 2025 comme date limite pour le dépôt des requêtes en obtention du statut de partie intéressée dans le cadre de la requête conjointe relative à l’Entente définitive de l’Ontario.

[18] Le 11 août 2025, le Canada a déposé une requête conjointe modifiée dans laquelle il s’est ajouté à titre de partie requérante.

[19] Le 15 avril 2025, le Tribunal a reçu des requêtes en obtention du statut de partie intéressée dans le cadre de la requête conjointe relative à l’Entente définitive de l’Ontario de la Première Nation de Neqotkuk (Tobique) de la Nation Wolastoqey, de la Première Nation d’Ugpi’ganjig (Eel River Bar), des Services à l’enfance et à la famille Mi’gmaq du Nouveau-Brunswick Inc., de la Fédération des nations autochtones souveraines (la « FSIN »), de l’Assemblée des chefs du Manitoba (l’« ACM »), du Conseil des Premières Nations du Yukon (le « CPNY »), de l’Our Children, Our Way Society (l’« OCOW »), de la Confédération des Premières Nations du Traité no 6 (la « Confédération »), de l’Association des chefs des Premières Nations du Traité no 7 (l’« Association » et des Premières Nations du Traité no 8 de l’Alberta.

[20] De plus, le Tribunal a reçu trois autres requêtes visant l’obtention du statut de partie intéressée dans le cadre de la requête conjointe relative à l’Entente définitive de l’Ontario, qui feront l’objet d’une instruction distincte.

[21] Dans la décision sur requête 2025 TCDP 80, le Tribunal a récemment décidé de lancer sans plus attendre la phase relative à la réparation à long terme, tant pour l’Ontario que pour la réforme nationale à long terme du Programme des SEFPN, de manière simultanée, mais distincte. En outre, au paragraphe 98 de cette même décision, le Tribunal a été d’accord pour se pencher sur l’Entente définitive de l’Ontario et refusé de reporter la réforme nationale à long terme du Programme des SEFPN jusqu’à ce que la requête sur l’Entente définitive de l’Ontario soit tranchée. Le Tribunal a décidé que l’Entente définitive de l’Ontario ne s’appliquera pas aux autres régions et qu’il ne s’y fiera pas pour statuer sur une mesure de réparation liée à la réforme nationale à long terme du Programme des SEFPN.

[22] Cette nouvelle évolution joue un rôle majeur quant à l’issue des requêtes présentées par les parties requérantes qui se trouvent à l’extérieur de l’Ontario.

[23] À ce stade avancé de l’instance, près de dix ans après sa décision sur le bien-fondé et compte tenu des retards importants qui se sont déjà accumulés pour diverses raisons, le Tribunal adopte une approche plus stricte à l’égard des requêtes afin de limiter les retards supplémentaires qui risquent de nuire au règlement définitif de l’instance et, plus important encore, aux droits des enfants et des familles des Premières Nations.

II. Résumé des observations des parties requérantes

Première Nation de Neqotkuk (Tobique) de la Nation Wolastoqey

[24] La Première Nation de Neqotkuk (Tobique) est l’une des six Nations Wolastoqey situées au Nouveau-Brunswick. Ces nations exercent leur gouvernance sur leurs propres programmes et ont participé à des discussions régionales sur la réforme des services à l’enfance et à la famille. La Première Nation de Neqotkuk (Tobique) demande la qualité de partie intéressée afin de s’assurer que l’Entente définitive de l’Ontario ne porte pas atteinte à sa compétence ou ne limite pas sa capacité à négocier des ententes qui répondent aux besoins de la Nation Wolastoqey. Bien qu’elle ne s’oppose pas à cette entente, la Première Nation de Neqotkuk (Tobique) demande un droit limité de participation, soit la possibilité de surveiller la procédure et de présenter des observations uniquement lorsque les décisions du Tribunal pourraient établir des précédents judiciaires ou en matière de financement ayant une incidence sur les Nations Wolastoqey et Mi’gmaq au Nouveau-Brunswick.

[25] La Première Nation de Neqotkuk (Tobique) soutient que les décisions du Tribunal concernant l’Entente de règlement définitive de l’Ontario pourraient créer des précédents nationaux contraignants ayant une incidence sur la compétence, le financement et les modèles de prestation de services. Elle vise à faire en sorte que les Nations Wolastoqey du Nouveau-Brunswick conservent la capacité de négocier leurs propres ententes avec le Canada sans que les réformes de l’Ontario ne leur soient imposées. La Première Nation de Neqotkuk (Tobique) souligne que sa participation est préventive et limitée, et demeure axée sur la surveillance et l’intervention uniquement lorsqu’il est nécessaire de protéger l’autodétermination régionale.

La Première Nation d’Ugpi’ganjig (Eel River Bar)

[26] La Première Nation d’Ugpi’ganjig (Eel River Bar) fait également partie de la Nation Mi’gmaq du Nouveau-Brunswick et administre ses propres services à l’enfance et à la famille en partenariat avec des fournisseurs régionaux. Elle partage des préoccupations semblables à celles de la Première Nation de Neqotkuk (Tobique) concernant la protection du droit à l’autodétermination en matière de prestation de services et de gouvernance. La Première Nation d’Ugpi’ganjig demande le statut de partie intéressée afin de s’assurer que les décisions du Tribunal concernant l’Entente définitive de l’Ontario ne créent pas involontairement de précédents contraignants qui touchent les Nations Mi’gmaq ou Wolastoqey. Elle demande un rôle limité, cherchant à obtenir l’accès à des documents et le droit de présenter des observations ciblées uniquement lorsqu’il est nécessaire pour protéger ses droits en matière de compétence et de financement.

[27] La Première Nation d’Ugpi’ganjig reprend la position de la Première Nation de Neqotkuk (Tobique), à savoir que les décisions du Tribunal concernant les réformes de l’Ontario pourraient porter involontairement atteinte aux droits des Mi’gmaq et des Wolastoqey en matière de gouvernance au Nouveau-Brunswick. La Première Nation d’Ugpi’ganjig soutient que l’Entente définitive de l’Ontario ne devrait pas servir de modèle national et que chaque région doit avoir la capacité de concevoir ses propres cadres des services à l’enfance et à la famille. Elle demande un statut limité afin de surveiller la procédure et de présenter des observations uniquement en cas de risque d’atteinte aux droits ou aux structures de financement.

Les Services à l’enfance et à la famille des Mi’gmaq du Nouveau-Brunswick Inc.

[28] Il s’agit d’un organisme qui offre des services à l’enfance et à la famille, fondés sur la culture aux Premières Nations Mi’gmaq de la province. Il cherche à obtenir le statut de partie intéressée afin de protéger ses modèles de prestation de services et de s’assurer que l’élaboration future des programmes ne soit pas tenue de se plier aux décisions du Tribunal concernant les réformes de l’Ontario. Bien qu’il adopte une position neutre quant à l’Entente définitive de l’Ontario, l’organisme craint que les ententes de l’Ontario ne deviennent un modèle national sans consultation régionale adéquate. Il demande un rôle de participation limité, axé sur la surveillance de l’instance, et se réserve le droit d’intervenir uniquement lorsque les décisions du Tribunal ont une incidence directe sur les cadres des services aux Mi’gmaq au Nouveau-Brunswick.

[29] L’organisme fait valoir que ses modèles de prestation de services et ses programmes risquent d’être compromis en cas d’application ultérieure à l’échelle nationale des décisions du Tribunal concernant les réformes de l’Ontario. Il souligne que les services à l’enfance et à la famille des Mi’gmaq nécessitent des approches adaptées à la culture que l’imposition du modèle de l’Ontario risque de compromettre. Il demande à participer de façon restreinte, de sorte qu’il intervienne uniquement lorsque les décisions du Tribunal pourraient avoir une incidence sur les cadres des services ou les modèles de financement des Mi’gmaq.

La Fédération des nations autochtones souveraines (la « FSIN »)

[30] La Fédération des nations autochtones souveraines est une organisation politique qui représente 74 Premières Nations de la Saskatchewan et qui défend les droits issus des traités et favorise l’autodétermination des Autochtones. La FSIN demande le statut de personne intéressée afin de s’assurer que l’Entente définitive de l’Ontario ne crée pas de précédents que le Canada pourrait ensuite appliquer à l’échelle nationale d’une manière qui nuirait aux négociations distinctes de la Saskatchewan sur les réformes des services à l’enfance et à la famille. La FSIN ne s’oppose pas à l’Entente définitive de l’Ontario et souhaite plutôt une participation modérée, notamment la possibilité de surveiller le processus, d’avoir accès à des documents et de présenter des observations lorsque les décisions du Tribunal pourraient avoir une incidence sur ses obligations au titre des traités, les cadres de financement ou la compétence, le financement ou les modèles de prestation de services de la Saskatchewan.

[31] La FSIN soutient que les décisions du Tribunal concernant l’Entente définitive de l’Ontario ne doivent pas établir de précédents contraignants que le Canada pourrait appliquer en Saskatchewan. La FSIN insiste sur la nécessité de protéger les droits issus des traités et de maintenir le contrôle sur les négociations distinctes de la Saskatchewan en matière de protection de l’enfance.

L’Assemblée des chefs du Manitoba (l’« ACM »)

[32] L’Assemblée des chefs du Manitoba représente 62 Premières Nations de la province et défend leurs intérêts en matière de gouvernance, de mise en œuvre des traités et de réformes sur la protection de l’enfance. L’ACM cherche à obtenir le statut de partie intéressée afin de protéger la capacité du Manitoba à négocier des ententes propres à la région indépendamment du processus de l’Ontario. L’ACM est neutre quant à l’Entente définitive de l’Ontario, mais souligne que les décisions du Tribunal concernant les réformes de l’Ontario ne devraient pas porter involontairement atteinte aux modèles de financement ou aux cadres de prestation de services du Manitoba. L’ACM demande un droit limité de participation, se réservant la possibilité de présenter des observations uniquement lorsque les décisions du Tribunal pourraient avoir une incidence sur l’autonomie du Manitoba ou les négociations fédérales.

[33] Selon l’ACM, si elles étaient appliquées à l’échelle nationale, les décisions du Tribunal concernant les réformes de l’Ontario pourraient avoir une incidence directe sur les modalités de financement et les structures de gouvernance du Manitoba. L’ACM souligne que les Premières Nations du Manitoba élaborent des solutions propres à leur région et qu’elles doivent conserver leur autonomie dans le cadre de leurs négociations.

Le Conseil des Premières Nations du Yukon (le « CPNY »)

[34] Le CPNY représente les Premières Nations du Yukon autonomes qui exercent leurs activités en vertu d’ententes distinctes avec le Canada leur conférant des pouvoirs uniques en matière de compétence. Il demande le statut de personne intéressée afin de s’assurer que les décisions du Tribunal concernant les réformes de l’Ontario ne l’emportent pas sur les ententes d’autonomie gouvernementale du Yukon et ne limitent pas sa capacité à négocier des cadres de services à l’enfance et à la famille qui lui sont propres. Le CPNY demande un rôle restreint, visant principalement à surveiller la procédure et à intervenir de manière sélective uniquement lorsque les conclusions du Tribunal pourraient avoir une incidence directe sur les structures de gouvernance ou les droits de financement du Yukon.

[35] Le CPNY soutient que les décisions du Tribunal concernant les réformes de l’Ontario ne doivent pas l’emporter sur les ententes existantes du Yukon ni nuire à sa capacité de négocier de futurs accords en matière de services à l’enfance et à la famille. Le CPNY recherche une participation restreinte, axée sur la surveillance de l’instance, se réservant le droit d’intervention uniquement lorsque les conclusions du Tribunal ont une incidence directe sur les droits d’autonomie gouvernementale ou les cadres de financement du Yukon.

Our Children, Our Way Society (l’« OCOW »)

[36] L’OCOW est constituée de plusieurs organismes de services à l’enfance et à la famille des Premières Nations de l’Alberta qui se consacrent à l’élaboration de modèles de prestation de services fondés sur la culture. L’OCOW demande le statut de partie intéressée afin de préserver l’autonomie de l’Alberta sur le plan de la compétence et éviter que les décisions du Tribunal concernant les réformes de l’Ontario n’influencent les cadres de financement ou de gouvernance de l’Alberta, sans consultation. L’OCOW ne s’oppose pas à l’Entente définitive de l’Ontario et souhaite plutôt une participation modérée, notamment le droit d’examiner des documents pertinents, de surveiller la procédure et de présenter des observations lorsque les décisions pourraient avoir une incidence sur les approches distinctes de l’Alberta en matière de services à l’enfance et à la famille.

[37] L’OCOW soutient que les décisions du Tribunal concernant les réformes de l’Ontario pourraient avoir une incidence sur les modèles de financement et de programmes de l’Alberta si le Canada s’en sert comme référence à l’échelle nationale. Elle affirme que les Premières Nations de l’Alberta élaborent des cadres fondés sur la culture qui doivent demeurer indépendants du processus de l’Ontario.

La Confédération des Premières Nations du Traité no 6 (la « Confédération »)

[38] La Confédération représente les Premières Nations du Traité no 6 qui se trouvent dans le centre de l’Alberta et dans certaines parties de la Saskatchewan, et défend les droits garantis par le traité respectif, ainsi que l’autonomie gouvernementale. Elle sollicite le statut de partie intéressée afin de s’assurer que les décisions du Tribunal concernant l’Entente définitive de l’Ontario ne créent pas de précédents juridiques qui pourraient avoir une incidence sur les droits issus des traités ou restreindre sa capacité à négocier avec le Canada des ententes qui répondent aux besoins des Premières Nations concernées. La Confédération recherche une participation limitée, axée sur la surveillance du processus relatif à l’Entente définitive de l’Ontario et la présentation d’observations uniquement lorsque les décisions du Tribunal pourraient porter atteinte à la compétence conférée par le Traité no 6 et les pouvoirs en matière d’élaboration de programmes.

[39] La Confédération soutient que les décisions du Tribunal concernant l’Entente définitive de l’Ontario ne doivent pas porter atteinte aux droits des Premières Nations signataires du Traité no 6 ni limiter leur capacité à négocier des ententes indépendantes conformes aux obligations découlant du Traité. Elle vise à faire en sorte que la compétence en matière de services à l’enfance et à la famille, qui est protégée par le Traité, soit préservée.

L’Association des chefs des Premières Nations du Traité no 7 (l’« Association »)

[40] L’Association représente les Premières Nations du sud de l’Alberta signataires du Traité no 7 et défend l’autonomie en matière de gouvernance et les services aux enfants et aux familles adaptés à la culture. L’Association demande le statut de partie intéressée afin de s’assurer que les décisions du Tribunal concernant l’Entente définitive de l’Ontario ne créent pas involontairement de précédents que le Canada pourrait ensuite appliquer aux cadres de l’Alberta. Bien qu’elle ne s’oppose pas à l’Entente définitive de l’Ontario, l’Association demande un droit limité de participation, soit la possibilité de surveiller la procédure et de présenter des observations uniquement lorsque les décisions du Tribunal pourraient avoir une incidence sur les droits des Premières Nations concernées ou les négociations en cours.

[41] L’Association fait valoir que les décisions du Tribunal concernant les réformes de l’Ontario pourraient établir des précédents à l’échelle nationale qui auraient une incidence sur l’autonomie des Premières Nations signataires du Traité no 7 et sur les négociations en cours en Alberta.

[42] Elle soutient qu’il ne faut pas présumer que le modèle de l’Ontario s’applique ailleurs, sans consultation appropriée.

Les Premières Nations du Traité no 8 de l’Alberta

[43] Il s’agit d’un organisme qui représente de nombreuses communautés dans le nord de l’Alberta et qui protège la gouvernance et la compétence prévues par le traité respectif. L’organisme cherche à obtenir le statut de partie intéressée afin de s’assurer que les décisions du Tribunal relatives aux réformes de l’Ontario ne portent pas involontairement atteinte aux droits, aux modèles de financement ou aux cadres de prestation de services des Premières Nations signataires du Traité no 8. Il ne s’oppose pas à l’Entente définitive de l’Ontario et souhaite plutôt une participation modérée, par précaution, axée sur la surveillance de la procédure et l’intervention uniquement lorsque les décisions du Tribunal ont une incidence directe sur la compétence conférée par le Traité no 8 ou sur les ententes conclues au titre de ce même traité.

[44] L’organisme soutient que les décisions du Tribunal concernant les réformes de l’Ontario ne doivent pas avoir d’incidence sur la compétence des Premières Nations en vertu du Traité no 8 ou sur les droits protégés par ce même traité. Il souligne les préoccupations concernant les répercussions potentielles sur les structures de financement et les modèles de programmes régionaux si les réformes de l’Ontario servent de référence nationale.

Les chefs de l’Ontario (les « COO »)

[45] Selon les COO, la FSIN, le CPNY et l’OCOW affirment que la lettre du Canada au Tribunal datée du 17 mars 2025, constitue la [traduction] « preuve » que l’Entente définitive de l’Ontario sera appliquée à l’extérieur de la province. Cet argument démontre une mauvaise interprétation de la lettre respective.

[46] Les COO soutiennent que la FSIN et le CPNY font valoir que les déclarations contenues dans l’affidavit de Duncan Farthing-Nichol, souscrit le 7 mars 2025, constituent la « preuve » que l’Entente définitive de l’Ontario sera appliquée à l’extérieur de la province. Il s’agit d’une mauvaise interprétation des alinéas 131c) et 149c) de l’affidavit.

[47] Selon les COO, la FSIN et le CPNY affirment que le paragraphe 3 de l’Entente définitive de l’Ontario est la « preuve » de son application ultérieure à l’extérieur de la province. Ces arguments reposent sur une mauvaise interprétation de l’Entente définitive de l’Ontario.

[48] Les COO soutiennent que l’entente respective est semblable à l’entente nationale rejetée. La FSIN, le CPNY, la Confédération et les Premières Nations du Traité no 8 de l’Alberta estiment que les similitudes entre l’entente nationale rejetée et l’Entente définitive de l’Ontario signifient que cette dernière sera appliquée à l’extérieur de la province. Le fait que bon nombre des mécanismes prévus dans l’Entente définitive de l’Ontario soient à l’origine destinés à l’entente nationale ne signifie pas que la requête conjointe vise une réparation devant s’appliquer à l’extérieur de l’Ontario. Il est parfaitement clair que le Tribunal n’est pas saisi de la question de l’entente nationale. Le libellé même de l’Entente définitive de l’Ontario et la réparation demandée dans l’avis de requête permettent de définir pleinement la portée de la requête conjointe en approbation, qui se limite à l’Ontario.

[49] Les COO soutiennent que certaines des éventuelles parties intéressées avancent des points de vue qui ont déjà été relevés par le Tribunal et qui constituent le fondement de sa jurisprudence sur la question, notamment le fait que l’adoption d’une solution universelle ne constitue pas une approche appropriée pour remédier à la discrimination en l’espèce. L’ajout d’une partie intéressée n’est pas nécessaire pour rouvrir le débat sur une question qui a déjà été tranchée par le Tribunal.

La Nation Nishnawbe-Aski (la « NNA »)

[50] La NNA soutient que l’Entente définitive de l’Ontario est propre à la province et soigneusement conçue pour lutter contre la discrimination systémique, au regard de l’Entente de 1965. Pour déterminer si l’Entente définitive de l’Ontario atteint cet objectif et de quelle façon, il faut une expertise propre à l’Ontario, qui est déjà fournie par les parties à la requête en approbation. Les éventuelles parties intéressées, qui représentent des intérêts hors de l’Ontario, ne peuvent pas contribuer de manière significative à l’analyse à cet égard. Elles ne prétendent pas non plus parler au nom des enfants des Premières Nations de l’Ontario et n’ont donc aucun intérêt direct dans la présente requête. Permettre leur participation ne renforcerait pas les positions juridiques déjà présentées au Tribunal ni ne les compléterait. Au contraire, une telle participation introduirait des questions non pertinentes, non connexes et potentiellement perturbatrices, ce qui minerait l’efficacité et l’objet principal de la présente instance.

[51] Selon la NNA, le Tribunal devrait refuser la participation des éventuelles parties intéressées. L’Entente définitive de l’Ontario est un arrangement propre à la province, conçu pour remédier à la discrimination systémique à l’égard des enfants des Premières Nations de la province, au regard de l’Entente de 1965. Les éventuelles parties intéressées, qui représentent des intérêts hors de l’Ontario, ne possèdent pas l’expertise propre à la province nécessaire pour aider le Tribunal et ne sont pas censées parler au nom des enfants des Premières Nations de l’Ontario. Leurs observations ne renforceraient pas les positions des parties existantes, mais introduiraient plutôt de nouvelles questions non connexes, ce qui conférerait une complexité inutile à l’instance.

[52] De plus, l’instance n’aura pas d’incidence directe sur leurs droits ou obligations. Bien que la décision du Tribunal puisse avoir une valeur de précédent, des conjectures sur les effets possibles sur les réformes futures à l’extérieur de l’Ontario ne suffisent pas à établir l’existence d’un intérêt direct et important justifiant l’intervention. L’autorisation de participer à ce stade porterait également préjudice aux communautés des Premières Nations de l’Ontario en retardant la mise en œuvre de réformes urgentes prévues par l’Entente définitive de l’Ontario et en faisant potentiellement dérailler les accords de financement négociés. Les intérêts en matière d’efficacité, d’équité et de résolution rapide militent fortement en faveur du rejet des demandes visant l’obtention du statut de partie intéressée.

L’Assemblée des Premières Nations (l’« APN »)

[53] L’APN ne prend pas position sur les requêtes.

La Société de soutien à l’enfance et à la famille des Premières Nations du Canada (la « Société de soutien »)

[54] La Société de soutien soutient que, dans la mesure où les parties requérantes hors de l’Ontario cherchent à présenter des éléments de preuve qui vont au-delà du contexte ontarien, leurs observations aideront le Tribunal de trois façons importantes.

[55] Premièrement, conformément à l’accent que met le Tribunal sur la reconnaissance des [traduction] « circonstances propres à la communauté » lorsqu’il examine l’égalité réelle, les parties requérantes hors de l’Ontario — qui comprennent de Premières Nations, des organisations régionales des Premières Nations et des organismes des Premières Nations de six provinces et du Yukon — présentent des points de vue uniques et importants. Leurs observations soulèvent des questions importantes qui sont pertinentes à la requête conjointe relative à l’Entente définitive de l’Ontario et qui n’auraient pas été portées à l’attention de la formation ou, à tout le moins, n’auraient pas été présentées avec autant de rigueur et de détails.

[56] Deuxièmement, comme ces parties requérantes qui se trouvent hors Ontario sont elles-mêmes titulaires de droits des Premières Nations ou représentent directement des titulaires de droits des Premières Nations, elles sont en mesure d’expliquer comment la requête conjointe relative à l’Entente définitive de l’Ontario a une incidence sur les obligations du Canada envers les titulaires de droits des Premières Nations, y compris les obligations découlant de l’honneur de la Couronne.

[57] Troisièmement, l’autorisation d’intervenir accordée à ce stade favorise l’efficacité et l’équité procédurale. Elle écarte le risque d’une participation fragmentée ou tardive, qui pourrait autrement entraîner des complications procédurales, notamment des litiges potentiels concernant des doctrines telles que la préclusion, l’abus de procédure ou l’attaque indirecte. Permettre leur participation à ce stade réduit également la probabilité de devoir revenir sur des conclusions antérieures si de nouveaux éléments de preuve ou arguments sont présentés ultérieurement. Il s’agit d’un point particulièrement important étant donné que le Canada a expressément déclaré que l’Entente définitive de l’Ontario guiderait ses approches au-delà de l’Ontario, ce qui témoigne bien de la grande pertinence de ces observations.

La Commission canadienne des droits de la personne du Canada (la « Commission »)

[58] La Commission ne prend pas position sur les requêtes.

Le procureur général du Canada (le « PGC »)

[59] Le PGC soutient que la participation des groupes externes n’aidera pas le Tribunal à trancher les questions en litige. Les parties intéressées cherchent à obtenir une participation large, mais une telle participation compliquerait inutilement et risquerait de perturber le bon déroulement de la présente instance. Dans la mesure où leurs intérêts et leur expertise sont pertinents, l’APN ou la Société de soutien en sont déjà les bons émissaires, ce qui rend leur intervention directe inutile.

[60] De plus, le dépôt tardif des requêtes en obtention du statut de partie intéressée porte intrinsèquement préjudice au règlement rapide de la présente affaire. Permettre l’intervention à ce stade entraînerait des retards supplémentaires et compromettrait le mandat du Tribunal, qui consiste à assurer le déroulement efficace des procédures.

[61] Les groupes externes ont soulevé des questions qui ne sont pas contestées et ne défendront aucune position autre que celles déjà exprimées par les parties existantes. Leur participation n’aiderait aucunement le Tribunal à trancher les questions en litige.

[62] Enfin, le PGC soutient que les groupes externes n’ont pas établi que l’incidence actuelle de la présente instance justifie leur intervention. À moins de démontrer l’existence d’un intérêt direct et important auquel l’issue de l’affaire pourrait porter atteinte, leur demande de participation ne satisfait pas au critère prévu pour obtenir le statut de partie intéressée.

III. Droit applicable

[63] La LCDP prévoit la participation de parties intéressées au paragraphe 50(1) et à l’alinéa 48.9(2)b) et, par conséquent, confirme le pouvoir qu’a le Tribunal de faire droit à une demande de statut de partie intéressée.

[64] Les anciennes règles de procédure ont récemment fait l’objet d’une refonte, qui a mené à l’adoption des Règles de pratique du Tribunal canadien des droits de la personne (2021), DORS/2021-137. Toutefois, comme la présente instance est toujours en cours et qu’elle a été introduite en vertu des anciennes Règles de procédure (03-05-04), ce sont ces dernières qui continueront de régir la requête.

[65] La procédure à suivre pour ajouter des parties intéressées est énoncée à l’article 8 des anciennes Règles de procédure du Tribunal (03-05-04).

[66] Par conséquent, le Tribunal a compétence pour permettre à une personne d’intervenir devant lui à titre de partie intéressée relativement à une plainte. « Il incombe au requérant de démontrer en quoi son expertise aidera à trancher les questions en litige » (L’Association canadienne des Sociétés Elizabeth Fry et Acoby c. Service correctionnel du Canada, 2019 TCDP 30, au par. 34). Lorsqu’il est saisi d’une demande de statut de partie intéressée, le Tribunal peut notamment tenir compte des éléments suivants :

  1. l’expertise de l’éventuelle partie intéressée aiderait le Tribunal;
  2. sa participation ajouterait à la position juridique des parties;
  3. l’instance pourrait avoir des répercussions sur les intérêts de la partie requérante.

[67] Toutefois, bien que les critères énumérés ci-dessus et élaborés dans la décision sur requête Walden soient toujours utiles dans des contextes similaires, dans l’affaire Société de soutien à l’enfance et à la famille des Premières Nations du Canada et autres c. Procureur général du Canada (pour le ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien), 2016 TCDP 11, le Tribunal énonce que l’approche doit être globale et fondée sur l’analyse cas par cas. Cette approche a également été appliquée dans la décision Attaran c. Citoyenneté et Immigration Canada, 2018 TCDP 6 [Attaran], et dans la décision Letnes c. GRC et al., 2021 TCDP 30 [Letnes], au paragraphe 14. Par conséquent, il ressort de la jurisprudence du Tribunal que l’analyse ne doit pas être réalisée de manière stricte et automatique, mais plutôt au cas par cas, en appliquant une approche flexible et globale.

[68] Le statut de partie intéressée ne sera pas accordé s’il ne contribue pas de façon importante aux positions juridiques des parties alléguant un point de vue semblable. Voir, par exemple,la décision Attaran, au paragraphe 10.

[69] Comme il a été mentionné, la formation a examiné le critère applicable aux demandes de statut de partie intéressée dans la décision sur requête 2016 TCDP 11, dans laquelle elle a accordé ce statut à la NNA. Dans cette décision sur requête, le Tribunal a exposé, au paragraphe 3, les facteurs à prendre en considération pour accorder le statut de partie intéressée :

Les demandes visant l’obtention du statut de partie intéressée sont tranchées au cas par cas, en tenant compte des circonstances particulières de l’instance et des questions qui sont en train d’être examinées. Une personne ou une organisation peut se voir accorder le statut de partie intéressée si l’instance a des incidences sur elle et si elle peut aider le Tribunal à trancher les questions dont il est saisi. Cette aide doit apporter un éclairage différent aux thèses défendues par les autres parties et contribuer à la prise de décision par le Tribunal. Par ailleurs, en vertu du paragraphe 48.9(1) de la LCDP, l’un des principes qui doit sous-tendre la décision sur l’étendue de la participation d’une partie intéressée est que le Tribunal doit instruire les plaintes sans formalisme et de façon expéditive dans le respect des principes de justice naturelle et des règles de pratique (voir Nkwazi c. Service correctionnel du Canada, 2000 CanLII 28883 (TCDP), par. 22-23; Schnell c. Machiavelli and Associates Emprize Inc., 2001 CanLII 25862 (TCDP), par. 6; Warman c. Lemire, 2008 CHRT 17, par. 6-8; et Walden et autres c. Procureur général du Canada (représentant le Conseil du Trésor du Canada et Ressources humaines et Développement des compétences Canada), 2011 TCDP 19, par. 22-23).

[70] Par la suite, dans la décision sur requête 2020 TCDP 31, la formation a indiqué ce qui suit :

[28] Quand il a accordé le statut de partie intéressée dans le contexte de la présente affaire, le Tribunal a reconnu qu’il était difficile de déterminer quels organismes ou gouvernements de Premières Nations devraient se voir accorder le statut de partie intéressée, quand la nature des questions soulevées suppose qu’un grand nombre de communautés des Premières Nations sont directement touchées par l’instance :

Le rôle de la formation à ce stade-ci de l’instance est de concevoir une ordonnance qui tienne compte des circonstances particulières de l’affaire et des conclusions déjà tirées dans la décision [sur le bien-fondé]. Les clarifications des mesures de réparation accordées et le processus de mise en œuvre de la décision dont s’occupe le Tribunal ne doivent pas être confondus avec le rôle d’une commission d’enquête ou d’une tribune visant la consultation de l’une ou de l’ensemble des parties. Dans le cas contraire, chaque collectivité ou organisme des Premières Nations pourrait demander d’intervenir dans la présente instance pour partager ses propres connaissances et expériences ainsi que sa culture et son histoire. Le traitement de telles demandes, à plus forte raison l’admission de nouvelles parties dans les procédures en cours, entraverait de façon importante la capacité de la formation de finaliser son ordonnance.

[71] Dans la décision 2022 TCDP 26, le Tribunal répète qu’il convient d’adopter une approche globale et fondée sur l’analyse au cas par cas plutôt que d’appliquer de façon stricte les facteurs énoncés dans la décision Walden. La partie intéressée doit apporter une expertise, un point de vue différent de celui des autres parties, y compris sur le plan juridique, et contribuer à la prise de décision par le Tribunal. De plus, les décisions sur requête Walden et Letnes se distinguent de l’espèce pour une autre raison. Dans ces deux affaires, la partie intéressée était un agent négociateur et les plaignants étaient membres de l’agent négociateur. Comme il est indiqué au paragraphe 19 de la décision sur requête Letnes, « sauf circonstances exceptionnelles, [un] syndicat obtient automatiquement le statut de partie intervenante dans une procédure ayant trait aux droits de la personne en milieu de travail où un de ses membres est plaignant ». La situation est bien différente en l’espèce puisque de nombreux organismes représentent différentes Premières Nations.

[72] De plus, dans la décision sur requête 2022 TCDP 26, le Tribunal a tiré des conclusions importantes qui n’ont pas été contestées à ce jour. Les parties ont, en fait, reconnu que les décisions antérieures du Tribunal sur les requêtes en obtention du statut de partie intéressée doivent se voir accorder un poids plus important dans la présente instance que d’autres décisions du Tribunal sur la même question.

[73] Le Tribunal a examiné en détail la présente instance et a déclaré ce qui suit :

[37] Dans son analyse de l’expression « contribuer à la prise de décision par le Tribunal », le Tribunal tient compte des questions juridiques et factuelles qu’il doit trancher, de la pertinence des éléments de preuve et des points de vue qui lui sont présentés, de l’historique procédural de l’affaire, de l’incidence sur la procédure ainsi que de l’incidence sur les parties et sur ceux qu’elles représentent. La formation tient également compte de la nature de la question et du moment auquel une partie intéressée cherche à intervenir. De plus, elle doit déterminer si l’ajout d’une autre partie intéressée influera négativement ou positivement sur la tâche du Tribunal consistant à trancher correctement l’affaire. Enfin, elle tiendra compte de l’intérêt public dans l’affaire.

[38] La formation souligne l’importance de prendre en considération le contexte et les faits précis de l’affaire dans toutes les instances dont elle est saisie, y compris le statut des parties intéressées. Autrement, la décision pourrait s’avérer technique ou formaliste ou avoir des effets injustes. Par ailleurs, les parties ne peuvent faire fi des décisions sur requête que le Tribunal a déjà rendues dans l’affaire en ce qui concerne les parties intéressées. L’approche adoptée dans ces décisions est particulièrement pertinente et fait autorité dans les circonstances de la requête étant donné qu’il s’agit de la même affaire et du même contexte historique.

[39] À ce stade-ci, la formation est saisie du dossier depuis une dizaine d’années, a instruit l’affaire sur le fond, y compris en ce qui a trait à l’indemnisation, et a rendu ses décisions sur le fond. La formation demeure saisie de l’affaire afin de superviser la mise en œuvre adéquate de ses ordonnances antérieures et de rendre, au besoin, de nouvelles ordonnances dans le but d’éliminer la discrimination systémique et d’empêcher qu’elle se reproduise. Au fil des ans, la formation a, à divers moments et pour diverses raisons, ajouté cinq parties intéressées : deux avant l’audience sur le fond, une au début de l’étape sur les mesures de réparation et deux autres pour des requêtes particulières et pour des raisons particulières résumées ci-dessus. La formation a statué sur la question de l’indemnisation et sur le processus d’indemnisation (décisions sur l’indemnisation) après plus d’un an et après avoir examiné un vaste dossier de preuve et s’être penchée sur de nombreuses questions juridiques et factuelles complexes avec l’aide des parties, notamment les Premières Nations plaignantes. De plus, la Cour fédérale a confirmé les décisions sur l’indemnisation. Par conséquent, la formation sait très bien ce qui peut l’aider ou la gêner dans son examen de l’affaire. On ne saurait faire abstraction de cette analyse. La formation a toujours reconnu qu’il fallait adopter une approche contextuelle et globale, c’est-à-dire une approche qui vient peaufiner et approfondir celle élaborée dans Walden. Les décisions sur requête Attaran et Letnes sont aussi venues enrichir la jurisprudence. Le Tribunal ne peut donc pas refuser de prendre en compte ces décisions subséquentes. Il convient de noter qu’Attaran et Letnes s’appuient toutes les deux sur une décision sur requête rendue par la présente formation. La demande doit être examinée dans son ensemble, en fonction des circonstances qui lui sont propres, au regard de l’utilité de cette démarche pour le Tribunal. La formation précise que les critères énumérés précédemment guident le Tribunal dans sa prise de décision.

[40] De plus, la décision sur requête Letnes a été rendue alors que la plainte venait à peine d’être déposée devant le Tribunal, mais ce dernier a tout de même limité la participation de la partie intéressée.

[41] De plus, dans la présente affaire, qui a une grande portée, et qui touche les collectivités autochtones du Canada, le Tribunal doit tenir compte du fait que chaque collectivité ou organisation des Premières Nations pourrait demander d’intervenir pour partager ses propres connaissances et expériences, ainsi que sa culture et son histoire. Auraient-elles une expertise à offrir? Absolument. Cependant, toutes les Premières Nations ne peuvent se joindre à cette affaire sans interrompre le travail du Tribunal. Grâce à trois grandes organisations représentant des Premières Nations (l’APN, les [COO] et la NNA) et une organisation dotée d’une expertise dans le domaine des services d’aide à l’enfance et d’autres services offerts aux enfants des Premières Nations quel que soit leur lieu de résidence (la Société de soutien), le Tribunal peut consulter les Premières Nations par différents moyens et tenir compte de leur point de vue dans le cadre de la présente instance.

[42] De plus, la formation reconnaît que les titulaires de droits sont les peuples, les collectivités et les gouvernements des Premières Nations. Idéalement, le Tribunal chercherait à entendre une fois de plus le point de vue de toutes les nations, mais il faut bien comprendre que la présente instance ne se veut ni une commission d’enquête, ni une commission de vérité et de réconciliation, ni une tribune visant la consultation. La formation s’appuie sur les éléments de preuve, les parties en cause et le travail qu’elles accomplissent au sein des différents comités, comme le Comité consultatif national sur la protection de l’enfance (le « CCN »), les tables, les forums et les consultations communautaires, pour étayer ses conclusions à moyen et à long terme.

[74] Enfin, le Tribunal continue de s’appuyer sur toutes ses décisions antérieures relatives au statut de partie intéressée, y compris celles qui imposent des limites à la participation de la partie intéressée.

[75] Les paragraphes précédents exposent les facteurs que le Tribunal prend en compte lorsqu’il statue sur les requêtes visant à obtenir le statut de partie intéressée dans le cadre de la présente affaire, particulièrement au stade où nous en sommes, soit près de dix ans après la décision sur le bien-fondé 2016 TCDP 2.

IV. ANALYSE

[76] Le Tribunal a reçu plusieurs requêtes de parties souhaitant obtenir le statut de partie intéressée et participer à la requête relative à l’Entente définitive de l’Ontario, à savoir la Première Nation de Neqotkuk (Tobique) de la Nation Wolastoqey, la Première Nation d’Ugpi’ganjig (Eel River Bar), les Services à l’enfance et à la famille Mi’gmaq du Nouveau-Brunswick Inc., la FSIN, l’ACM, le CPNY, l’OCOW, la Confédération, l’Association et les Premières Nations du Traité no 8 de l’Alberta.

[77] Le Tribunal reconnaît que les enfants des Premières Nations sont au cœur des intérêts et des priorités de chaque Première Nation. Cependant, il est impossible d’entendre directement chacune des Premières Nations sans paralyser l’instance et nuire aux enfants qui sont au cœur de celle-ci.

[78] De plus, présenter des observations dans le cadre de la présente requête sans tenir compte des décisions sur requête que le Tribunal a déjà rendues, ou citer les décisions de manière sélective, ne change rien aux conclusions que le Tribunal a déjà tirées ni aux facteurs qu’il prendra en considération pour statuer sur une telle requête.

[79] Compte tenu des principes énoncés ci-dessus et de l’examen des observations des parties, la formation estime que, bien que la Première Nation de Neqotkuk (Tobique) de la Nation Wolastoqey, la Première Nation d’Ugpi’ganjig (Eel River Bar), les Services à l’enfance et à la famille Mi’gmaq du Nouveau-Brunswick Inc., la FSIN, l’ACM, le CPNY, l’OCOW, la Confédération, l’Association et les Premières Nations du Traité no 8 de l’Alberta, aient de l’expérience, de l’expertise et un point de vue précieux, ils ne devraient pas être autorisés à intervenir dans le cadre de la requête conjointe relative à l’Entente définitive de l’Ontario.

L’expertise des éventuelles parties intéressées n’aidera pas le Tribunal

[80] Il ne fait aucun doute que la Première Nation de Neqotkuk (Tobique) de la Nation Wolastoqey, la Première Nation d’Ugpi’ganjig (Eel River Bar), les Services à l’enfance et à la famille Mi’gmaq du Nouveau-Brunswick Inc., la FSIN, l’AMC, le CPNY, l’OCOW, la Confédération, l’Association et les Premières Nations du Traité no 8 de l’Alberta possèdent tous une expertise importante dans le domaine des services à l’enfance et à la famille. Toutefois, leur expertise n’aiderait pas le Tribunal à trancher l’affaire en Ontario ou à répondre à la question de savoir si l’Entente définitive de l’Ontario met effectivement et durablement fin aux pratiques discriminatoires et permet d’arriver à une réforme relative à l’Entente de 1965 de manière à la rendre conforme aux conclusions de la décision sur le bien-fondé (2016 TCDP 2).

[81] Lors de l’audience sur le fond déroulée en 2013 et 2014, le Tribunal a reçu des éléments de preuve propres à la région de l’Ontario et, à partir de 2016 et jusqu’à ce jour, il a rendu des ordonnances propres à l’Ontario. Comme je l’ai déjà mentionné, le Tribunal a délibérément fait une référence distincte à l’Ontario dans ses ordonnances générales, assimilables à des injonctions, visant à éliminer la discrimination systémique et à mettre en œuvre des réformes. Par conséquent, il est à la fois raisonnable et approprié d’examiner la question de la réforme à long terme en Ontario indépendamment de l’examen de la réforme à long terme à l’échelle nationale.

[82] Le Tribunal bénéficiera de l’aide des COO et des points de vue de la NNA, qui sont des parties requérantes dans la requête conjointe relative à l’Entente définitive de l’Ontario, ainsi que de ceux de deux parties intéressées de l’Ontario nouvellement ajoutées, à savoir la Première Nation de Taykwa Tagamou et les Chippewas de Georgina Island, qui s’opposent à la requête conjointe. Le Tribunal estime que leur expertise en tant que Premières Nations de l’Ontario et organisations des Premières Nations l’aidera à trancher l’affaire en Ontario. En outre, le Tribunal a conclu à l’existence d’une discrimination raciale systémique, y compris en Ontario, et a rendu plusieurs décisions concernant la région de l’Ontario au cours des dix dernières années. Le Tribunal est bien placé, avec l’aide de toutes les parties, pour déterminer si la discrimination raciale systémique qu’il a constatée a maintenant été éliminée de manière durable et si elle se reproduira ou non.

[83] Aucune des parties requérantes n’a démontré que sa participation aiderait le Tribunal à trancher l’affaire en Ontario. Au contraire, l’introduction de points de vue provenant d’autres régions risquerait de compliquer davantage des questions qui sont déjà complexes.

[84] Dans une décision récente, répertoriée sous la référence 2025 CHRT 80, le Tribunal a confirmé que la requête conjointe relative à l’Entente définitive de l’Ontario porterait uniquement sur la région de l’Ontario et non sur la réforme nationale à long terme devant s’appliquer à l’extérieur de l’Ontario, et a prononcé une ordonnance à cet effet :

[traduction]

[122] La décision portant sur la requête relative à l’entente définitive de l’Ontario ne dépendra pas de la conclusion du Tribunal concernant le plan de réforme nationale à long terme du Programme des SEFPN et les mesures de réparation devant s’appliquer à l’extérieur de l’Ontario, mentionnés au paragraphe 120.

[123] La décision concernant le plan de réforme nationale à long terme du Programme des SEFPN et les mesures de réparation devant s’appliquer à l’extérieur de l’Ontario ne dépendra pas non plus de la conclusion du Tribunal à l’égard de la requête sur l’Entente définitive de l’Ontario.

[85] La décision sur requête 2025 CHRT 80, dans son ensemble, et notamment les paragraphes cités ci-dessus répondent pleinement aux préoccupations soulevées par les parties requérantes, à savoir que les réformes de l’Ontario pourraient établir des normes nationales qui prévalent sur les structures de gouvernance propres à chaque région ou que les décisions du Tribunal pourraient indirectement influencer les modèles de financement, les droits de gouvernance et les cadres de prestation de services au-delà des frontières de l’Ontario. Le Tribunal confirme que ce ne sera pas le cas. Cette conclusion informe également l’analyse de la deuxième question ci-dessous.

L’instance n’aura pas de répercussions sur les intérêts des parties requérantes

[86] Dans la présente affaire qui se distingue d’autres affaires du fait qu’elle a trait à une plainte systémique de portée nationale touchant 634 Premières Nations et bon nombre d’ententes territoriales et régionales à l’échelle du Canada, cette partie du critère — à savoir qu’il faut démontrer que l’instance aura des répercussions sur les intérêts des parties requérantes — ne peut, à elle seule, justifier l’octroi du statut de partie intéressée. Conclure autrement pourrait inciter les 634 Premières Nations et les centaines d’organismes de services à l’enfance et à la famille des Premières Nations, tous susceptibles d’être touchés par la présente affaire, à participer à l’instance, ce qui aurait pour effet de freiner le processus décisionnel du Tribunal. Le Tribunal ne serait pas en mesure de s’acquitter de son mandat dans un tel contexte. Le Tribunal en est maintenant à la phase finale de la plainte et doit donc pouvoir régler l’affaire dans un avenir proche, dans l’intérêt supérieur des enfants et des familles des Premières Nations.

[87] Le Tribunal estime que l’instance concernant la requête conjointe relative à l’Entente définitive de l’Ontario n’aura pas de répercussions sur les intérêts de la Première Nation de Neqotkuk (Tobique) de la Nation Wolastoqey, de la Première Nation d’Ugpi’ganjig (Eel River Bar), des Services à l’enfance et à la famille Mi’gmaq du Nouveau-Brunswick Inc., de la FSIN, de l’ACM, du CPNY, de l’OCOW, de la Confédération, de l’Association et des Premières Nations du Traité no 8 de l’Alberta. Étant donné qu’elles ne sont pas situées en Ontario, les Premières Nations et les organisations des Premières Nations ne seront pas directement touchées par toute décision relative à l’Entente définitive de l’Ontario et à l’Entente trilatérale.

[88] Il convient de souligner que le paragraphe 3 de l’Entente définitive de l’Ontario prévoit une application limitée à la province :

À moins que le contexte n’exige une interprétation différente, toutes les dispositions de la présente Entente définitive doivent être interprétées comme s’appliquant uniquement en Ontario et uniquement aux Premières Nations et aux fournisseurs de services des SEFPN en Ontario.

[89] De plus, bon nombre de personnes soutiennent que les cadres de prestation de services et les modèles de financement doivent continuer à être négociés à l’échelle régionale et adaptés à la culture afin de répondre aux besoins uniques des Nations.

[90] Or, le Tribunal a déjà statué qu’il ne convient pas d’appliquer une approche universelle pour remédier à la discrimination raciale systémique en cause dans la présente affaire. Le Tribunal a souligné à maintes reprises que les réformes à long terme doivent être axées sur les Premières Nations et tenir compte des besoins particuliers de leurs enfants et familles, ainsi que des circonstances et des perspectives distinctes des différentes Nations et régions. Les parties en cause dans la présente affaire depuis plus de dix ans sont au courant de ces ordonnances.

[91] De plus, certaines parties requérantes soulignent que leurs pouvoirs qui sont protégés par les traités doivent être pleinement respectés et ne doivent pas subir des répercussions à la suite de la décision du Tribunal sur la requête conjointe relative à l’Entente définitive de l’Ontario. Le Tribunal estime que cette décision n’aura pas de répercussions sur le pouvoir conféré par les traités aux parties requérantes, puisque l’instance vise uniquement la réforme à long terme dans la région de l’Ontario, conformément à sa récente décision sur requête 2025 TCDP 80, dans l’affaire. La décision sur requête du Tribunal appuie cette conclusion et est conforme à l’approche adoptée par le Tribunal dans la présente affaire depuis le début. Par conséquent, l’instance concernant la requête conjointe relative à l’Entente définitive de l’Ontario n’aura aucune répercussion sur les intérêts des parties requérantes.

[92] Le Tribunal estime que la Première Nation de Neqotkuk (Tobique) de la Nation Wolastoqey, la Première Nation d’Ugpi’ganjig (Eel River Bar), les Services à l’enfance et à la famille Mi’gmaq du Nouveau-Brunswick Inc., la FSIN, l’ACM, le CPNY, l’OCOW, la Confédération, l’Association et les Premières Nations du Traité no 8 de l’Alberta, ne seront pas en mesure de l’aider à trancher la requête conjointe relative à l’Entente définitive de l’Ontario et que l’instance relative à cette requête n’aura pas de répercussions sur leurs intérêts.

La participation des parties requérantes n’ajoutera rien à la position juridique des parties

[93] Les positions juridiques de la Première Nation Neqotkuk (Tobique) de la Nation Wolastoqey, de la Première Nation d’Ugpi’ganjig (Eel River Bar), des Services à l’enfance et à la famille des Mi’gmaq du Nouveau-Brunswick Inc., de la FSIN, de l’ACM, du CPNY, de l’OCOW, de la Confédération, de l’Association et des Premières Nations du Traité no 8 de l’Alberta pourraient potentiellement s’ajouter aux positions juridiques des parties si elles s’appliquaient directement à l’Ontario. Or, les parties requérantes n’ont pas réussi à le démontrer. De plus, cette partie du critère n’est pas déterminante dans le contexte particulier de la requête conjointe relative à l’Entente définitive de l’Ontario, compte tenu des motifs que j’ai énoncés et des réponses négatives que j’ai données plus haut aux deux autres questions.

V. Ordonnance

POUR LES MOTIFS QUI PRÉCÈDENT, LE TRIBUNAL CANADIEN DES DROITS DE LA PERSONNE

[94] REJETTE les requêtes de la Première Nation de Neqotkuk (Tobique), de la Première Nation d’Ugpi’ganjig (Eel River Bar), des Services à l’enfance et à la famille des Mi’gmaq du Nouveau-Brunswick Inc., de l’Our Children Our Way Society, de la Fédération des nations autochtones souveraines, du Conseil des Premières Nations du Yukon, de l’Assemblée des chefs du Manitoba, de la Confédération des Premières Nations du Traité no 6 et des Premières Nations du Traité no 8 de l’Alberta.

Maintien de la compétence

[95] La formation conserve sa compétence à l’égard de toutes ses ordonnances antérieures, à l’exception de celles qui portent sur l’indemnisation. Elle réexaminera la question du maintien de sa compétence pour la région de l’Ontario une fois que l’instance concernant la requête conjointe relative à l’Entente définitive de l’Ontario sera terminée, ou quand elle le jugera approprié compte tenu de l’évolution de l’affaire.

Signée par

Sophie Marchildon

Présidente de la formation

Edward P. Lustig

Membre du Tribunal

Ottawa (Ontario)

Le 2 septembre 2025

 


Tribunal canadien des droits de la personne

Parties au dossier

Numéro du dossier du Tribunal : T1340/7008

Intitulé de la cause : Société de soutien à l’enfance et à la famille des Premières Nations du Canada et autres c. Procureur général du Canada (représentant le ministre des Affaires autochtones et du Nord canadien)

Date de la décision sur requête du Tribunal : Le 2 septembre 2025

Requête traitée par écrit sans comparution des parties

Observations écrites par :

David P. Taylor, Sarah Clarke, Kiana Saint-Macary et Robin McLeod, avocats de la Société de soutien à l’enfance et à la famille des Premières Nations du Canada, la plaignante

Jessica Walsh et Ansumala Juyal, avocates de la Commission canadienne des droits de la personne

Paul Vickery, Sarah-Dawn Norris, Meg Jones, Dayna Anderson, Kevin Staska, Sarah Bird, Jon Khan, Alicia Dueck-Read et Aman Owais, avocats du Procureur général du Canada, l’intimé

Maggie Wente, Jessie Stirling, Ashley Ash et Katelyn Johnstone, avocates des Chefs de l’Ontario, la partie intéressée

Julian Falconer, Asha James, Shelby Percival et Meaghan Daniel, avocats de la Nation Nishnawbe-Aski, la partie intéressée

Le chef Ross Perley, pour la Première Nation de Neqotkuk (Tobique) de la Nation Wolastoqey

Daniel Wilband et Sarah Brooke, avocats de la Première Nation d’Ugpi’ganjig (Eel River Bar)

Alexandra L. Strang et Roy T. Stewart, avocats des Services à l’enfance et à la famille des Mi’gmaq du Nouveau-Brunswick Inc.

Aria Laskin, Maya Ollek et Kaelan Unrau, avocats de la Fédération des nations autochtones souveraines

Carly Fox et Jodie Currie, avocates de l’Assemblée des chefs du Manitoba

Aria Laskin, Maya Ollek et Kaelan Unrau, avocats du Conseil des Premières Nations du Yukon

Dan Goudge et Alexandra Heine, avocats de l’Our Children, Our Way Society

Aaron Christoff, avocat de la Confédération des Premières Nations du Traité no 6

Anne Many Heads, avocate de l’Association des chefs des Premières Nations du Traité no 7

Harold Cochrane, c.r., et Alyssa Cloutier, avocats des Premières Nations du Traité no 8 de l’Alberta

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