Tribunal canadien des droits de la personne

Informations sur la décision

Résumé :

La plaignante, K.L., a déposé une plainte contre la Société canadienne des postes. Elle soutient que la discrimination dont elle a été victime est liée au fait qu’elle a subi de la violence conjugale.
Le groupe Safe Home-Safe Work Coalition (la « Coalition ») est constitué d’organismes de défense des droits des femmes, des filles et des personnes de diverses identités de genre ayant vécu de la violence. La Coalition souhaite participer à cette affaire afin d’examiner comment la violence conjugale et la violence entre partenaires intimes s’inscrivent dans le cadre des droits de la personne.
La Coalition et la Société canadienne des postes ne s’entendent pas sur la manière de définir le critère applicable à la demande de participation de la Coalition. Le Tribunal a précisé le critère en fonction des trois points suivants :
A) La participation de l’intervenante serait-elle utile à la décision du Tribunal? Apporte-t-elle un éclairage par rapport aux positions des parties?
B) L’intervenante a-t-elle un véritable intérêt dans le dossier?
C) Est-il dans l’intérêt de la justice de lui permettre de participer?
Le Tribunal a autorisé la participation de la Coalition. Il a estimé qu’elle pourrait contribuer à la prise de décision, qu’elle avait un véritable intérêt dans l’affaire et que sa participation servait l’intérêt de la justice.
Cependant, le Tribunal a limité les modalités de cette participation. Il a noté que la position de la Coalition recoupe celle de la Commission canadienne des droits de la personne, qui représente déjà l’intérêt public. Afin d’éviter de la redondance et d’accélérer la procédure, le Tribunal a donc restreint la participation de la Coalition.

Contenu de la décision

Tribunal canadien
des droits de la personne

Les armoiries du Tribunal

Canadian Human
Rights Tribunal

Référence : 2025 TCDP 28

Date : Le 10 avril 2025

Numéro(s) du/des dossier(s) : T2664/4021

[TRADUCTION FRANÇAISE]

Entre :

K.L.

la plaignante

- et -

Commission canadienne des droits de la personne

la Commission

- et -

Société canadienne des postes

l’intimée

- et -

Safe Home-Safe Work Coalition

l’intervenante

Décision sur requête

Membre : Colleen Harrington



I. APERÇU

[1] La Safe Home-Safe Work Coalition a sollicité la qualité d’intervenant à l’égard de l’instruction de la plainte de K.L. (la plaignante) contre l’intimée, la Société canadienne des postes (Postes Canada), conformément aux articles 26 et 27 des Règles de pratique du Tribunal canadien des droits de la personne (2021), DORS/2021-137 [les « Règles »].

[2] K.L. a été superviseure de relève temporaire dans l’un des établissements de traitement du courrier de Postes Canada pendant environ quatre mois, de décembre 2018 à avril 2019. Elle affirme avoir été victime de discrimination en matière d’emploi fondée sur la situation de famille, le sexe et la déficience, en contravention de l’article 7 de la Loi canadienne sur les droits de la personne, L.R.C. (1985), ch. H-6 (la « LCDP »). Elle affirme plus précisément qu’elle a subi un traitement défavorable en lien avec l’établissement des quarts de travail et en se voyant refuser de la formation, et que Postes Canada a mis fin à son emploi. D’après K.L., ces actes se sont produits après qu’elle eut révélé qu’elle était victime de violence conjugale et qu’elle souffrait probablement d’un trouble de stress post-traumatique, et parce qu’une rumeur circulait dans son milieu de travail comme quoi elle avait un problème de consommation de drogues.

[3] Postes Canada nie avoir fait preuve de discrimination en matière d’emploi à l’égard de K.L. Elle affirme que le contrat de travail de cette dernière a été écourté de deux semaines pour des raisons légitimes liées aux besoins du service, et en conformité avec les modalités énoncées dans ce même contrat.

[4] La Safe Home-Safe Work Coalition (la « Coalition ») est un groupe de travail constitué de deux organismes de défense des droits à l’égalité, la Clinique commémorative Barbra Schlifer (la « Clinique ») et le Réseau des femmes handicapées du Canada (« DAWN »). La Coalition affirme que, si elle se voit accorder la qualité d’intervenant dans la présente instance, elle apportera une aide précieuse au Tribunal concernant la question de savoir si la violence conjugale peut donner lieu à une conclusion de discrimination au titre de la protection prévue par la LCDP contre la discrimination fondée sur des motifs interreliés, à savoir le sexe, une déficience et/ou la situation de famille.

[5] K.L. et la Commission canadienne des droits de la personne (la « Commission »), qui est une partie distincte à la présente instance, appuient toutes deux la requête de la Coalition. Postes Canada s’y oppose.

II. DÉCISION

[6] La présente requête est fondée, car la Coalition a établi que sa participation à l’instruction aidera le Tribunal à trancher la plainte de K.L. et qu’elle a un intérêt véritable dans l’affaire dont le Tribunal est saisi. Il est dans l’intérêt de la justice d’accorder à la Coalition la qualité d’intervenant dans la présente affaire.

[7] La Coalition peut participer à la présente instance conformément aux conditions énoncées dans l’ordonnance ci-dessous.

III. QUESTIONS EN LITIGE

[8] Je dois trancher les questions suivantes :

  1. La Coalition devrait-elle se voir accorder la qualité d’intervenant conformément à l’article 27 des Règles?

  2. Dans l’affirmative, quelle est l’étendue de la participation de la Coalition à l’instruction?

IV. ANALYSE

A. Première question en litige : La Coalition devrait-elle se voir accorder la qualité d’intervenant?

(i) Les positions des parties

(a) La Coalition

[9] À l’appui de sa requête, la Coalition a présenté des observations détaillées faisant état de la vaste expérience de ses organismes constitutifs, la Clinique et DAWN, dans le travail avec et au nom des femmes, des filles et des personnes de diverses identités de genre, dont des personnes handicapées, qui subissent diverses formes de violence ainsi que leurs effets invalidants.

[10] La Clinique, fondée en 1985, est un prestataire de services multidisciplinaires de première ligne destinés aux personnes qui se définissent comme des femmes, des personnes non binaires, des personnes intersexuées ou des personnes bispirituelles qui ont subi de la violence. Cet organisme sans but lucratif fournit gracieusement des services juridiques, dont une représentation, du counseling professionnel et des services d’interprétation multilingues à de nombreuses personnes de divers groupes raciaux, ethnoculturels et socio-économiques. Dans la prestation de ses services, la Clinique adopte une pratique anti-oppressive et intersectionnelle tenant compte des traumatismes. Les personnes qui recourent aux services de la Clinique ont souvent un emploi précaire et davantage de démêlés avec la justice et les autorités, souvent parce qu’elles subissent ou ont subi de la violence conjugale. La Clinique leur offre de l’assistance juridique pour les aider à retrouver de la stabilité dans leur vie après avoir quitté une situation de violence physique, sexuelle et/ou psychologique. En tant qu’organisme non gouvernemental accrédité par le Conseil économique et social des Nations unies et ayant obtenu le statut consultatif, la Clinique a fait des propositions aux Nations Unies et à ses groupes de travail, dont ceux qui ont pour objectif de mettre fin à la violence contre les femmes dans le monde. La Clinique possède de l’expérience dans l’interprétation des obligations juridiques internationales du Canada et dans l’application de ces obligations à des contextes canadiens.

[11] DAWN, également établi en 1985, est une organisation nationale, féministe et plurihandicap sans but lucratif qui offre des occasions d’autodétermination et de développement du leadership aux femmes et aux filles handicapées. Sa mission est de mettre fin à la pauvreté, à l’isolement, à la discrimination et à la violence dont sont victimes les femmes handicapées, dont les femmes sourdes, vivant au Canada. Il a effectué un travail considérable en matière de réforme du droit, de litige, de recherche et de sensibilisation du public sur des questions touchant les femmes et les filles handicapées vivant au Canada, dont des questions d’accessibilité, d’adaptation, d’emploi, de justice et de violence. Il s’efforce de créer un changement à l’échelle systémique en établissant des partenariats stratégiques ainsi que par l’intermédiaire de l’éducation et de changement de politique. Dans ses activités de défense d’intérêts, il comparaît fréquemment devant des comités parlementaires et rend compte, au pays et dans le monde, des engagements pris par le Canada pour favoriser l’égalité des sexes pour les femmes et les filles handicapées.

[12] Dans ses observations, la Coalition fait également état des expériences de la Clinique et de DAWN en tant qu’intervenants dans de nombreuses instances judiciaires au Canada, dont des affaires déterminantes en matière de droits à l’égalité.

[13] La Coalition soutient que ni le présent Tribunal ni aucun autre organisme ayant un pouvoir décisionnel en matière de droits de la personne au Canada n’a encore examiné la pertinence de la violence conjugale pour l’établissement prima facie d’une discrimination. Toutefois, le British Columbia Human Rights Tribunal (le « BCHRT ») a admis que la violence conjugale [traduction] « combine plusieurs motifs de distinction illicite », en plus de faire observer que la question de savoir si une telle violence peut donner lieu à une discrimination en matière d’emploi est unique et qu’il est dans l’intérêt public de l’examiner (Lamoureaux v. Township Dental and another, 2021 BCHRT 110 aux par. 28 et 29).

[14] La Coalition soutient que l’une des principales caractéristiques de la plainte de K.L. est qu’elle porte sur plusieurs motifs de distinction interreliés dans le contexte du travail, lesquels, combinés, ont donné lieu à de la discrimination fondée sur des motifs multiples qui a eu pour effet de défavoriser davantage une survivante de violence conjugale dont l’emploi était précaire.

[15] La Coalition affirme qu’elle a un intérêt particulier à ce que la LCDP soit interprétée de manière téléologique et de façon à garantir que les femmes et les personnes de diverses identités de genre qui sont victimes de violence conjugale puissent exercer leur droit d’occuper un emploi sans subir de discrimination et d’obtenir des mesures d’adaptation répondant à leurs besoins particuliers.

[16] La Coalition fait valoir qu’elle devrait se voir accorder la qualité d’intervenant à l’égard de la présente instance parce qu’elle satisfait aux critères suivants : i) son expertise aiderait le Tribunal; ii) sa participation ajouterait à la position des parties; iii) l’instance pourrait avoir des répercussions sur les intérêts de la Coalition; iv) l’intervention de la Coalition ne causerait ni préjudice ni injustice aux parties (Walden et autres. c. Procureur général du Canada, 2011 TCDP 19 au par. 23 [Walden]; Attaran c. Citoyenneté et Immigration Canada, 2018 TCDP 6 aux par. 12, 22 et 23 [Attaran]; Letnes c. Gendarmerie Royale du Canada, 2021 TCDP 30 aux par. 12 et 13) [Letnes].

[17] À propos du critère i), la Coalition affirme que sa perspective intersectionnelle et son approche des questions en litige sont uniques et qu’elles aideront le Tribunal à comprendre les conséquences disproportionnées de la violence conjugale sur les femmes et les personnes de diverses identités de genre, qui doivent souvent choisir entre le travail et leur sécurité personnelle, leur bien-être et celui de leurs enfants. Elle se dit aussi particulièrement bien placée pour parler des effets invalidants de cette violence sur les personnes qui y ont survécu.

[18] À propos du critère ii), la Coalition affirme que sa participation ne sera pas redondante, qu’au contraire, elle ajoutera aux positions des autres parties qui appuient la plainte. Elle affirme également qu’elle complétera et enrichira la preuve et les observations des autres en démontrant que la violence conjugale donne lieu à une forme de discrimination fondée sur des motifs de distinction illicite multiples. Par exemple, elle affirme qu’elle est particulièrement bien placée pour mettre en évidence certains mythes, stéréotypes et malentendus liés au genre et aux handicaps qui peuvent influencer la prise de décision, en particulier lorsqu’il s’agit de tirer des conclusions en matière de crédibilité, et qu’elle peut aider le Tribunal à les éviter. Elle peut de plus contribuer à garantir que la décision tiendra compte des traumatismes. Selon elle, elle peut également aider le Tribunal en faisant état de l’évolution au pays et à l’étranger de la jurisprudence, du droit, des conventions internationales et des travaux de recherche concernant la violence liée au genre et aux handicaps.

[19] À propos du critère iii), la Coalition affirme que l’issue de la présente instance aura une incidence directe sur son travail. La Clinique et DAWN travaillent tous deux avec des femmes, des filles et des personnes de diverses identités de genre dont l’identité et les expériences de vie varient, notamment en raison d’un handicap, du statut socio-économique, de la race et de l’appartenance ethnique et/ou du statut d’immigrant. La Coalition affirme que de refuser d’admettre que la violence conjugale est visée par plusieurs des motifs énumérés dans la LCDP, dont le sexe, la déficience et la situation de famille, et qu’elle peut constituer le fondement sous-jacent d’une plainte pour discrimination en matière d’emploi, empêchera des femmes vivant au Canada d’occuper un emploi, de bénéficier d’un traitement et de mesures d’adaptation équitables en milieu de travail, et de jouir d’indépendance et de sécurité dans d’autres sphères de leur vie. Elle ajoute que la question transcende les faits propres à la présente affaire et qu’elle a de vastes implications sur les droits de la personne au Canada. Selon elle, la décision du Tribunal pourrait avoir une incidence sur le droit à l’égalité réelle des personnes qui ont survécu à la violence conjugale ainsi que sur leur capacité à obtenir et à conserver un emploi. Pour cette raison, elle soutient que les conclusions du Tribunal à l’égard de la présente plainte auront une incidence considérable sur le travail de défense d’intérêts qu’effectuent la Clinique et DAWN ainsi que sur les populations vulnérables et à risque qu’ils servent.

[20] Enfin, à propos du critère iv), la Coalition affirme que son intervention ne causera ni préjudice ni injustice aux parties, et que sa participation ne retardera ni ne compliquera l’instance. Elle ajoute qu’elle cherchera non pas à amplifier le dossier factuel, mais à compléter la preuve d’expert, seulement s’il y a des lacunes auxquelles elle peut remédier, et qu’elle évitera de reprendre des observations des autres parties.

[21] La Coalition affirme qu’elle désire présenter une preuve et des observations portant en particulier sur la violence conjugale en tant que forme ou manifestation de discrimination, dans une perspective intersectionnelle et à la lumière des obligations juridiques internationales du Canada. Elle expose une série de contributions qu’elle propose d’apporter si la qualité d’intervenant lui est accordée. Elle traitera notamment de l’ampleur et de la forme de la violence conjugale au Canada, de ses répercussions disproportionnées sur les femmes et les personnes de diverses identités de genre, dont des personnes handicapées, et de l’importance d’avoir un emploi pour les personnes qui ont survécu à la violence conjugale pour conserver un revenu qui leur permet d’échapper à cette violence.

(b) La Commission et la plaignante

[22] La Commission et la plaignante appuient toutes deux la requête de la Coalition. La Commission souscrit à ce qu’affirme la Coalition concernant les principes juridiques qui s’appliquent à sa requête et convient que la Coalition satisfait entièrement aux critères d’octroi de la qualité d’intervenant. Selon elle, la Clinique et DAWN ont un intérêt véritable dans les questions dont le Tribunal est saisi, et possèdent une expérience et des connaissances uniques qui aideront le Tribunal dans son examen des questions soulevées par la plainte de K.L.

[23] La Commission admet également que les deux organismes ont apporté des contributions précieuses en tant qu’intervenants expérimentés dans d’autres instances judiciaires.

[24] La Commission déclare que, si la requête de la Coalition est accueillie, elle collaborera avec les parties et la Coalition pour éviter que la preuve et les observations soient redondantes.

(c) Postes Canada

[25] Postes Canada conteste intégralement la requête en obtention de la qualité d’intervenant déposée par la Coalition. Elle n’est pas d’accord pour dire que la Coalition satisfait aux critères d’octroi de la qualité d’intervenant.

[26] À propos du critère i), Postes Canada soutient que l’expertise de la Coalition n’aidera pas le Tribunal. Elle ne conteste pas l’expertise de la Coalition en matière de violence conjugale ni l’importance de son travail à cet égard. Toutefois, elle fait valoir qu’il s’agit d’une plainte de discrimination individuelle, et non pas d’une plainte de discrimination systémique comme celles visées par les décisions qu’invoquent la Coalition et la Commission dans leurs observations. Postes Canada soutient qu’une requête en obtention de la qualité d’intervenant peut être raisonnable et logique dans le contexte d’allégations de discrimination systémique, en particulier dans les affaires concernant un grand nombre de plaignants ou de personnes concernées, mais que la Coalition ne peut pas aider le Tribunal à statuer sur la présente plainte individuelle de discrimination fondée sur des événements propres à K.L.

[27] Concernant les multiples contributions que la Coalition affirme pouvoir apporter dans le cadre de l’instruction du Tribunal, Postes Canada soutient qu’aucune d’elles n’aidera le Tribunal à analyser les expériences propres à K.L. et à décider si cette dernière a été victime de discrimination dans son emploi, comme elle le prétend.

[28] Postes Canada soutient que le véritable objectif de la Coalition est de plaider en faveur de réformes juridiques. Selon elle, quoi que l’on pense de ces réformes, le Tribunal n’est pas le ressort approprié pour les plaider. Elle ajoute que les tribunaux des droits de la personne, dont le TCDP, ont admis que des parties agissant simplement comme lobbyistes ne devraient pas être autorisées à participer à une instance. Elle cite par exemple la décision Attaran, dans laquelle le Tribunal a affirmé ce qui suit : « Le statut de partie intéressée ne devrait pas être accordé à un tiers afin de lui servir de tribune pour faire des déclarations de principe sans lien avec l’affaire dont le Tribunal est saisi. Une telle participation devrait être limitée aux parties qui peuvent contribuer aux délibérations du Tribunal » (au par. 21).

[29] Postes Canada renvoie également à une décision récente par laquelle le Tribunal des droits de la personne de l’Ontario (TDPO) a rejeté une demande visant l’obtention de la qualité d’intervenant déposée par la Clinique, l’un des organismes constitutifs de la Coalition, à l’égard d’une plainte individuelle, car il était évident que l’objectif de la demanderesse était de plaider en faveur de certaines positions (Villanueva v. Toronto Police Services Board, 2023 HRTO 154 [Villanueva]). Postes Canada soutient que, dans le cas de K.L., comme la Coalition a déjà affirmé qu’elle ne chercherait pas à amplifier le dossier factuel et qu’il ressort clairement de ses observations que son objectif est de plaider en faveur de certaines positions, et non pas d’aider le Tribunal, sa requête devrait également être rejetée.

[30] À propos du critère ii), Postes Canada soutient que la participation de la Coalition n’ajoutera rien aux positions juridiques des parties. Elle fait valoir que la Commission a apporté ou pourrait apporter toutes les contributions d’intérêt public que propose d’apporter la Coalition. Selon elle, la Commission, dans le cadre de sa pleine participation à la présente affaire, a appuyé la position factuelle et juridique de K.L., et a présenté des observations exhaustives, notamment en ce qui concerne l’intersectionnalité et les approches internationales en matière de droits de la personne, y compris dans le contexte de la violence conjugale. La Commission a également déposé un rapport rédigé par son témoin expert proposé, Peter Jaffe (le rapport de M. Jaffe) qui porte sur la violence conjugale. Ce rapport contient des renseignements sur les types et les formes de violence conjugale, des statistiques sur sa prévalence chez les femmes (dont les intersections avec d’autres motifs tels que la race ou la déficience), ses répercussions, les mesures prises en réponse, les types de mesures d’adaptation en milieu de travail que les personnes qui y ont survécu pourraient demander, et les pratiques exemplaires que les employeurs peuvent adopter pour répondre à de telles demandes, dont les approches tenant compte des traumatismes.

[31] Postes Canada fait observer que la Commission collabore avec le gouvernement du Canada et des organismes canadiens et internationaux pour assurer la protection des droits de la personne, dont ceux consacrés par les traités auxquels le Canada est partie. Elle ajoute que, suivant son mandat, la Commission doit promouvoir les droits de la personne par la recherche et l’élaboration de politiques, représenter l’intérêt public de manière à faire progresser les droits de la personne de tous les Canadiens, et favoriser l’égalité entre les sexes en veillant à ce que les organisations des secteurs public et privé de compétence fédérale valorisent le travail accompli par les femmes.

[32] Postes Canada fait observer que, même si elle le conteste ou en conteste la pertinence en l’espèce, le rapport de M. Jaffe traite déjà de l’objet de plusieurs des contributions mentionnées par la Coalition, et que la Commission peut traiter elle-même des autres points. Par conséquent, elle soutient que la Coalition n’a pas réussi à démontrer de quelle façon elle contribuerait à régler les questions juridiques qui opposent les parties.

[33] À propos du critère iii), Postes Canada soutient que l’issue de l’instance n’aura pas d’incidence sur les intérêts de la Coalition. Selon elle, si la décision du Tribunal dans la présente affaire peut, au sens large, avoir une incidence sur le travail de la Coalition, il en va de même de toutes les décisions du Tribunal concernant des femmes, des jeunes filles et des personnes de diverses identités de genre. Elle fait valoir qu’il ne suffit pas d’avoir un intérêt général ou stratégique dans l’issue d’une instance pour remplir ce critère. Selon elle, c’est sur un intérêt direct de la partie requérante que l’instance doit avoir une incidence, ce qui n’est pas le cas de la Coalition.

[34] Enfin, à propos du critère iv), Postes Canada soutient que l’octroi de la qualité d’intervenant à la Coalition lui causerait un préjudice injustifié, car elle devrait engager des dépenses supplémentaires pour répondre à des éléments de preuve qui seraient en grande partie redondants ou qui déborderaient le cadre de la plainte. Elle ajoute que la participation de la Coalition allongerait l’instance, qui n’en est pas encore à l’étape de l’audience. Elle soutient également qu’aucune contribution éventuelle de la Coalition ne saurait l’emporter sur ce préjudice.

(ii) Le cadre juridique

[35] Le paragraphe 50(1) de la LCDP confère au Tribunal le pouvoir discrétionnaire d’accorder la qualité d’intervenant (Letnes, au par. 5). Les Règles établissent la procédure à suivre lorsqu’une personne souhaite obtenir la qualité d’intervenant. Selon le paragraphe 27 des Règles, elle doit déposer un avis de requête précisant l’assistance qu’elle désire apporter à l’instruction et l’étendue de sa participation (aux par. 27(1) et (2)).

[36] La Coalition et Postes Canada ne s’entendent pas sur la façon dont le Tribunal devrait appliquer les critères juridiques pertinents lorsqu’il reçoit une demande d’intervention. Postes Canada soutient que, pour obtenir la qualité d’intervenant, la personne qui la demande doit satisfaire aux trois critères suivants, énoncés par le Tribunal dans la décision Walden :

  1. l’expertise de l’éventuel intervenant aiderait le Tribunal;
  2. sa participation ajouterait à la position juridique des parties;
  3. l’instance pourrait avoir des répercussions sur ses intérêts.

[37] À l’opposé, la Coalition soutient que la partie requérante ne doit pas nécessairement satisfaire à ces trois critères, mais qu’il est essentiel qu’elle puisse aider le Tribunal et que ce facteur doit être établi. Elle fait valoir que le Tribunal a rejeté l’idée d’une application stricte des critères énoncés dans la décision Walden au profit d’une plus grande souplesse. Par exemple, dans la décision Letnes, le Tribunal n’a pas accepté l’argument de l’intimée – identique à celui de Postes Canada – selon lequel les trois critères énoncés dans la décision Walden doivent être remplis pour qu’il puisse accorder la qualité d’intervenant. Il a déclaré qu’il n’acceptait pas une interprétation aussi stricte des critères et a fait remarquer que la jurisprudence la plus récente laissait voir que l’analyse du Tribunal « doit se faire non pas de façon stricte et automatique, mais plutôt au cas par cas ainsi que de façon souple et globale » (aux par. 12 et 13).

[38] Outre le différend soulevé par la présente requête à propos de l’application appropriée des critères juridiques de l’octroi de la qualité d’intervenant, dans une autre requête, l’Association canadienne des sociétés Elizabeth Fry (l’« ACSEF ») adopte une position légèrement différente concernant le cadre que le Tribunal devrait appliquer pour trancher les demandes visant l’obtention de cette qualité. L’ACSEF soutient que le Tribunal devrait prendre en compte les deux facteurs suivants : a) celui de savoir si la personne qui désire intervenir est concernée par l’instance; b) celui de savoir si la personne qui désire intervenir peut aider le Tribunal à trancher les questions dont il est saisi et, ce faisant, apporter un éclairage différent aux thèses défendues par les autres parties (renvoyant à Letnes, aux par. 12-18, et à Société de soutien à l’enfance et à la famille des Premières Nations du Canada et al. c. Procureur général du Canada (pour le ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien), 2016 TCDP 11 au par. 3 [Société de soutien 2016]).

[39] Compte tenu des points de vue divergents des parties à la présente requête et de l’ACSEF dans la requête distincte, je suis d’avis que la présente affaire se prête à une reformulation des critères permettant au Tribunal de trancher les demandes d’intervention qui lui sont soumises. Il est d’autant plus approprié de le faire étant donné la formulation claire et récente de l’approche raisonnée utilisée par les Cours fédérales. Dans l’arrêt Le-Vel Brands, LLC c. Canada (Procureur général), 2023 CAF 66 [Le-Vel Brands], la Cour d’appel fédérale a confirmé que trois facteurs doivent être pris en considération (au par. 7) :

1) l’utilité de la participation de l’intervenant par rapport aux questions que la Cour est appelée à trancher;

2) l’intérêt véritable de l’intervenant;

3) l’intérêt de la justice.

[40] Je fais observer que ce critère d’intervention est également utilisé par la Cour fédérale (voir, par exemple, Thompson c. Canada, 2024 CF 215).

[41] Bien que le critère formulé par la Cour d’appel fédérale dans l’arrêt Le-Vel Brands reprenne les concepts clés du critère d’intervention, il reste que les Cours fédérales peuvent le formuler de façon légèrement différente d’un jugement à l’autre. Comme l’a fait remarquer la Cour d’appel fédérale dans l’arrêt Macciacchera (Smoothstreams.tv) c. Bell Media Inc., 2023 CAF 180 [Macciacchera], les critères doivent « demeurer souples, car chaque requête est différente et met en cause des faits différents, des questions de droit différentes et des contextes différents » (au par. 12).

[42] Tout en reconnaissant que chaque cas est unique, la Cour d’appel fédérale a confirmé, dans l’arrêt Le-Vel Brands, que les trois éléments du critère d’intervention – l’utilité, l’intérêt véritable et l’intérêt de la justice – peuvent être pertinents dans une affaire et que les demandeurs doivent traiter des trois éléments (au par. 8). Toutefois, c’est le premier élément – l’utilité – qui doit être établi, car, de même que l’article 27 des Règles, l’article 109 des Règles des Cours fédérales, DORS/98-106 exige que la personne qui désire intervenir démontre en quoi sa « participation aidera à la prise d’une décision sur toute question de fait et de droit se rapportant à l’instance ». En d’autres termes, elle doit démontrer en quoi sa participation sera utile au « débat de la Cour ». Si elle ne le peut pas, la Cour est légalement tenue de rejeter la requête en autorisation d’intervenir (Le-Vel Brands, aux par. 14 et 15). Le paragraphe 27(2) des Règles prévoit qu’une personne qui désire intervenir « précise l’assistance [qu’elle] désire apporter à l’instruction ». Il s’agit également d’une obligation, et si la personne ne démontre pas en quoi sa participation sera utile au Tribunal, sa requête en obtention de la qualité d’intervenant sera rejetée.

[43] Il s’ensuit que la Coalition a raison de dire que la question la plus importante est celle de savoir si la personne qui désire intervenir peut aider le Tribunal. La Coalition soutient que cette aide devrait ajouter un éclairage différent aux thèses défendues par les autres parties et contribuer à la prise de décision par le Tribunal (Société de soutien 2016, au par. 3). Cette position est en accord avec les précisions que donne la Cour d’appel fédérale au sujet du facteur de l’utilité dans l’arrêt Le-Vel Brands (au par. 19) : « La personne qui se propose d’intervenir fournira-t-elle d’autres observations, précisions et perspectives utiles qui aideront la Cour à se prononcer sur les questions juridiques soulevées par les parties à l’instance, et non sur de nouvelles questions? » La Cour d’appel poursuit en proposant des questions qui peuvent être posées pour établir l’utilité de la participation de l’intervenant, notamment les suivantes (au par. 19) : Quelles sont les questions que les parties ont soulevées? Quelle est la position de l’intervenant éventuel sur ces questions? Les observations de l’intervenant éventuel aideront-elles la Cour à trancher les véritables questions en jeu dans l’instance?

[44] La Cour d’appel poursuit en donnant des précisions au sujet des deux autres facteurs du critère d’intervention. Concernant le deuxième facteur, soit celui de l’intérêt véritable, la Cour pose la question suivante (Le-Vel Brands, au par. 19) : la personne qui se propose d’intervenir a-t-elle un intérêt véritable dans l’affaire dont la Cour est saisie, de sorte que la Cour a l’assurance qu’elle possède les connaissances, les compétences et les ressources nécessaires et qu’elle les consacrera à l’affaire?

[45] Concernant le troisième facteur, soit celui de savoir s’il est dans l’intérêt de la justice que l’intervention soit autorisée, la Cour d’appel affirme qu’une approche souple s’impose. Elle recommande de poser des questions telles que les suivantes (Le-Vel Brands, au par. 19) : L’intervention est-elle compatible avec les impératifs de l’article 3 des Règles des Cours fédérales selon lequel l’instance doit être instruite « de façon à permettre d’apporter une solution au litige qui soit juste et la plus expéditive et économique possible »? L’affaire a-t-elle pris une dimension tellement publique, importante et complexe que la Cour doit être exposée à des perspectives autres que celles offertes par les parties qui comparaissent devant elle? L’autorisation de multiples intervenants va-t-elle créer une « inégalité des moyens » ou un déséquilibre en faveur d’un camp ou en donner l’apparence?

[46] Je suis d’avis que le critère d’intervention formulé par les Cours fédérales est également utile en ce qui concerne les requêtes en obtention de la qualité d’intervenant présentées au Tribunal, en ce sens qu’il garantit que le Tribunal procède à un examen raisonné de celles-ci. Ce critère est compatible avec les considérations juridiques générales que le Tribunal a relevées dans sa jurisprudence antérieure. Il intègre les critères énoncés dans la décision Walden ainsi que les considérations énoncées par la suite notamment dans les décisions Letnes, Attaran, Société de soutien 2016 et Société de soutien à l’enfance et à la famille des Premières Nations du Canada et al. c. Procureur général du Canada (représentant le ministre des Affaires autochtones et du Nord canadien), 2022 TCDP 26.

[47] En effet, la façon dont la Cour d’appel formule le critère d’intervention dans l’arrêt Le-Vel Brands est essentiellement analogue à celle que la Coalition a utilisée à l’appui de la présente requête. La Coalition fait valoir que : i) son expertise aidera le Tribunal; ii) sa participation ajoutera à la position des parties, sans redondance; iii) l’instance aura des répercussions sur les intérêts de la Coalition; iv) l’intervention de la Coalition ne causera ni préjudice ni injustice aux parties. À mon avis, les deux premiers critères sur lesquels la Coalition s’appuie, qui sont aussi les deux premiers critères énoncés dans la décision Walden, sont compris dans l’élément de l’utilité qu’utilisent les Cours fédérales.

[48] Même si le critère des Cours fédérales n’indique pas explicitement, comme le deuxième critère énoncé dans la décision Walden, que la participation de l’intervenant ajoutera aux positions des autres parties, la Cour d’appel fédérale a conclu que les interventions proposées qui recoupent les thèses des parties ne sont pas utiles (Le-Vel Brands, au par. 22). En formulant l’élément de l’utilité du critère de la façon suivante dans l’arrêt Le-Vel Brands : « La personne qui se propose d’intervenir [fournira] d’autres observations, précisions et perspectives utiles qui aideront la Cour à se prononcer sur les questions juridiques soulevées par les parties à l’instance, et non sur de nouvelles questions » (au par. 19), la Cour d’appel inclut nécessairement la question de savoir si la participation de la personne qui désire intervenir ajoutera à la position des parties.

[49] Pour les besoins du Tribunal, l’inclusion de la question de savoir si la personne qui désire intervenir fournira d’autres observations, précisions et perspectives utiles qui aideront le Tribunal à se prononcer sur les questions juridiques soulevées par les parties à l’instance, et non sur de nouvelles questions, fait en sorte qu’il continuera de tenir compte du deuxième critère énoncé dans la décision Walden pour décider de l’utilité des contributions que l’éventuel intervenant entend apporter à l’instruction.

[50] Je souligne que tant les critères énoncés dans la décision Walden que le critère des Cours fédérales comprennent l’intérêt de la personne qui désire intervenir ou de la personne intéressée parmi les facteurs à examiner pour trancher une demande. Dans la décision Walden, le troisième critère est celui de savoir si l’instance peut avoir des répercussions sur les intérêts de la personne qui désire intervenir. Dans l’arrêt Le-Vel Brands, la Cour d’appel fédérale a défini le deuxième élément du critère comme la question de savoir si la personne qui désire intervenir a un intérêt véritable dans l’affaire et ajouté que ce facteur exige que la « la personne qui se propose d’intervenir a les connaissances, les compétences et les ressources nécessaires et qu’elle les appliquera à la question devant la Cour » (au par. 19).

[51] Lorsque l’on considère la façon légèrement plus étroite dont le Tribunal formule ce facteur, il est utile de comprendre le contexte de l’affaire Walden. Un syndicat a demandé à intervenir dans cette affaire où des membres de son unité de négociation avaient porté plainte contre l’employeur. Le syndicat avait un intérêt direct dans les circonstances et l’issue de cette affaire. Il est donc compréhensible que le critère utilisé par le Tribunal dans le contexte d’une intervention du syndicat tienne compte du type d’intérêt direct qu’avait le syndicat dans l’affaire, plutôt que de tenir compte de l’intérêt public général qu’un plaideur comme la Coalition cherche à établir dans la présente affaire. En effet, au TDPO, un agent négociateur a le droit d’intervenir à l’égard d’une plainte déposée par un membre contre l’employeur (art. 11.4 des Règles de procédure du TDPO).

[52] À mon avis, l’exigence qu’une personne qui désire intervenir ait un intérêt véritable dans l’affaire soumise au Tribunal concerne à la fois les personnes qui ont un intérêt direct et celles qui ont un intérêt public général dans l’instance.

[53] Bien que le Tribunal puisse décider de préciser les paramètres de ce facteur dans une affaire où la contestation est plus vive qu’en l’espèce, notamment en s’inspirant de la jurisprudence des Cours fédérales, je signale que la considération suivante sur l’intérêt véritable, exprimée par la Cour d’appel fédérale dans l’arrêt Gordillo c. Canada (Procureur général), 2020 CAF 198, est utile pour l’examen de ce facteur :

[12] Pour faire valoir un intérêt véritable, la personne qui souhaite intervenir doit démontrer qu’il existe un lien entre le point en litige et son mandat et ses objectifs. Elle doit préciser l’origine de son intérêt véritable, et l’on doit pouvoir clairement établir à partir de ses observations ce qui justifie son intervention. Parfois, l’intérêt véritable est établi à partir de l’expertise ou de l’expérience que l’intervenant apporte à la question en litige. Parfois, il est établi à partir de la perspective unique de l’intervenant sur les questions.

[54] La différence la plus notable entre la façon dont les Cours fédérales et le Tribunal ont formulé le critère d’intervention est la prise en compte expresse de l’intérêt de la justice par les Cours fédérales. Cependant, un examen minutieux de la jurisprudence existante du Tribunal confirme que celui-ci prend déjà en considération l’intérêt de la justice lorsqu’il statue sur les demandes visant l’obtention de la qualité d’intervenant.

[55] Dans la décision Letnes, le Tribunal souligne que le cadre législatif prévoit que l’octroi du statut de partie intéressée est une décision discrétionnaire (au par. 5, renvoyant au par. 50(1) de la LCDP). Le Tribunal exercera nécessairement son pouvoir discrétionnaire dans l’intérêt de la justice. Il a également été précédemment admis dans la jurisprudence du Tribunal que celui-ci doit examiner les demandes visant l’obtention de la qualité d’intervenante conformément à son obligation, prévue au paragraphe 48.9(1) de la LCDP, d’instruire les plaintes sans formalisme et de façon expéditive dans le respect des principes de justice naturelle et des règles de pratique (Société de soutien 2016, au par. 3). Je fais observer que, dans la décision Attaran, la question des frais et des dépenses supplémentaires pour le plaignant était une préoccupation importante dont le Tribunal a tenu compte pour déterminer dans quelle mesure l’intervenante pouvait participer à l’instruction (au par. 23). Il s’agit d’un exemple qui montre que le Tribunal a précédemment pris en considération l’intérêt de la justice. Cela s’apparente beaucoup à la prise en considération par les cours de justice de l’article 3 des Règles des Cours fédérales.

[56] En outre, dans la décision Woodgate et al. c. Gendarmerie royale du Canada, 2022 TCDP 3 [Woodgate], le Tribunal a expressément pris en considération la question de savoir si la participation de l’intervenant causerait un préjudice aux parties pour décider s’il accordait la qualité d’intervenant (au par. 75). Les décisions du Tribunal fondées sur cette considération ont été confirmées en contrôle judiciaire (A.B. c. C.D., 2022 CF 1500 au par. 35). L’examen de la question du préjudice dans la décision Woodgate est un autre exemple de la prise en considération de l’intérêt de la justice par le Tribunal.

[57] De plus, dans la décision Attaran, l’affirmation selon laquelle la qualité d’intervenant est « [h]abituellement […] [liée] à des affaires qui ont une grande visibilité et qui revêtent un intérêt public important » (au par. 21) peut être interprétée comme l’indication que le Tribunal tient compte de la question de savoir si une affaire a pris une dimension tellement publique, importante et complexe qu’il gagnerait à être exposé à des perspectives autres que celles offertes par chacune des parties. Il est manifeste que le Tribunal a toujours été conscient des considérations liées à l’intérêt de la justice, même s’il n’en a pas fait auparavant un critère clair et distinct.

[58] À la lumière des considérations qui précèdent, le Tribunal procédera à l’analyse des demandes visant l’obtention de la qualité d’intervenant dans la présente affaire en tenant compte des critères suivants :

  1. l’utilité de la participation de la personne qui désire intervenir pour aider le Tribunal à trancher les questions dont il est saisi, dont la question de savoir si cette personne ajoutera aux positions des parties existantes;
  2. l’intérêt véritable de l’intervenant;
  3. l’intérêt de la justice.

[59] Le Tribunal a constamment jugé qu’il incombait au demandeur de démontrer qu’il devrait obtenir la qualité d’intervenant à l’égard de l’instruction.

(iii) Ma décision

[60] J’ai examiné toutes les observations des parties selon ce cadre légèrement révisé afin de statuer sur la présente requête en obtention de la qualité d’intervenant.

(a) La participation de la Coalition aidera le Tribunal à trancher les questions dont il est saisi, et la Coalition ajoutera aux positions des parties existantes

[61] Je suis convaincue que la Coalition a établi que sa participation à l’audience en tant qu’intervenante ajoutera manifestement aux délibérations du Tribunal. La principale question que le Tribunal doit trancher dans la présente affaire est celle de savoir si Postes Canada a fait preuve de discrimination à l’égard de K.L. en lien avec son emploi. Comme la Coalition a l’intention de faire valoir que plusieurs motifs interreliés peuvent donner lieu à une discrimination fondée sur des motifs multiples, je juge que son expertise pourrait aider le Tribunal à trancher cette question. Cette perspective est importante, car la position de Postes Canada, telle qu’elle est présentée dans son exposé des précisions, est que [traduction] « l’expérience de violence familiale qui aurait été vécue [par K.L.] (dont Postes Canada n’a pas une connaissance directe) ne déclenche pas, en soi, l’application de la protection prévue dans la LCDP ».

[62] Postes Canada soutient que K.L. ne peut établir prima facie qu’elle a été victime de discrimination fondée sur l’un ou l’autre des motifs de distinction illicite invoqués dans sa plainte. En ce qui concerne le motif de distinction illicite du sexe, Postes Canada affirme que K.L. n’allègue pas avoir été traitée différemment en raison de son sexe. En ce qui concerne la situation de famille, elle affirme que K.L. n’allègue nulle part que Postes Canada a porté atteinte à une obligation immuable et intégrale découlant de la relation juridique qui existe entre un parent et son enfant. En ce qui concerne la déficience, elle affirme que K.L. n’a fourni aucune preuve médicale objective confirmant l’existence d’une déficience protégée par la LCDP. Elle ajoute que, [traduction] « tout au plus », K.L. allègue qu’elle souffre probablement du trouble de stress post-traumatique.

[63] La Coalition soutient dans sa requête que ni le présent Tribunal ni aucun autre organisme ayant un pouvoir décisionnel en matière de droits de la personne au Canada n’a encore examiné la pertinence de la violence conjugale pour l’établissement prima facie d’une discrimination. La Coalition a relevé certaines questions également soulevées par la Commission, mais je fais observer qu’elle propose en particulier d’aider à expliquer les obligations internationales du Canada en ce qui concerne les droits des femmes et d’aider le Tribunal à comprendre certaines questions, telles que les effets invalidants du traumatisme associé à la violence conjugale sur les personnes qui y ont survécu, le rôle de la violence conjugale dans la hausse de l’insécurité d’emploi, et les interrelations entre la violence conjugale et d’autres formes de marginalisation qui entraînent une discrimination fondée sur des motifs multiples et créent des obstacles supplémentaires à l’emploi, entre autres. Elle a également indiqué qu’elle pouvait contribuer à garantir que la décision tiendra compte des traumatismes.

[64] Je comprends que la Coalition désire soulever des questions semblables à celles de la Commission et j’accepte l’argument de Postes Canada selon lequel la Commission représente l’intérêt public visé par la LCDP, mais je constate que la Coalition a l’intention de présenter une perspective qui ne sera pas identique à la position de la Commission et qui y ajoutera. Le rapport de M. Jaffe déposé par la Commission fait mention de plusieurs des questions que la Coalition dit vouloir traiter ou soumettre à l’instruction, mais les organismes constitutifs de la Coalition ont manifestement des connaissances et des expériences hautement spécialisées que la Commission, en tant qu’entité créée par la loi pour défendre les droits de la personne, ne possède pas, et celle-ci appuie la participation de la Coalition dans la présente affaire.

[65] En tout état de cause, la Coalition a indiqué qu’elle ne présenterait pas les mêmes observations ou éléments de preuve que la Commission ou d’autres parties. Il appartient en fin de compte au Tribunal de veiller à ce que les redondances soient évitées. Par ailleurs, je fixerai ci-dessous les limites nécessaires à la participation de la Coalition à la présente instance.

[66] À mon avis, la Coalition présentera des observations utiles et différentes, et elle offrira des perspectives utiles et différentes de celles de la Commission et de la plaignante, qui aideront le Tribunal à trancher les questions en litige dans la présente instruction.

(b) La Coalition a un intérêt véritable dans l’affaire dont le Tribunal est saisi

[67] Postes Canada soutient que c’est sur un intérêt direct de la partie requérante que l’instance doit avoir une incidence, ce qui, selon elle, n’est pas le cas de la Coalition. En toute déférence, je ne suis pas d’accord. Là encore, le contexte de l’affaire Walden a pu conduire à une formulation selon laquelle l’instance doit avoir une incidence directe sur les intérêts des personnes qui désirent intervenir, mais, en l’espèce, le Tribunal n'est pas saisi d’un cas où un syndicat demande la qualité d’intervenant. En parallèle, la Coalition soutient que les conclusions du Tribunal à l’égard de la présente plainte auront une incidence considérable sur le travail de défense d’intérêts qu’effectuent la Clinique et DAWN ainsi que sur les populations vulnérables et à risque qu’ils servent.

[68] Un examen de la question de savoir si la personne qui désire intervenir a un intérêt véritable dans l’affaire dont le Tribunal est saisi permet de procéder à une analyse raisonnée de la demande. La Coalition expose en détail la nature de son intérêt dans la présente affaire, et il existe un lien clair entre le mandat de ses organismes constitutifs et les objectifs que poursuit la Coalition en demandant à intervenir en l’espèce. Elle dit avoir un intérêt particulier à ce que la LCDP soit interprétée de manière téléologique et de façon à garantir que les femmes et les personnes de diverses identités de genre victimes de violence conjugale puissent exercer leur droit d’occuper un emploi sans subir de discrimination et d’obtenir des mesures d’adaptation répondant à leurs besoins particuliers. À mon avis, la Coalition a démontré qu’elle possède à la fois l’expertise et l’expérience relatives aux questions soulevées dans la présente plainte et qu’elle dispose des ressources qu’il est nécessaire d’y consacrer.

[69] Dans la décision Attaran, le Tribunal a jugé que l’organisme qui désirait intervenir, la Chinese and Southeast Asian Legal Clinic (la « CSALC »), avait des antécédents impressionnants en matière de causes types et de comparution devant des comités parlementaires, ce qui l’a convaincu qu’elle possédait une expertise qui serait utile au Tribunal (au par. 22). Il en va de même pour les deux organismes constitutifs de la Coalition, la Clinique et DAWN, qui ont tous deux une vaste expérience en tant qu’intervenants dans diverses procédures judiciaires au pays et dans l’interprétation des obligations juridiques internationales du Canada en ce qui concerne les personnes qu’elles servent. En formant la Coalition, ces organismes ont efficacement combiné leurs ressources et leur expertise afin d’offrir de l’aide au Tribunal et aux parties dans la présente affaire.

[70] Il est également manifeste que les arguments que la Coalition souhaite faire valoir sont importants pour ses organismes constitutifs, et que l’instance et la décision du Tribunal pourraient avoir une incidence sur les intérêts de la Coalition.

(c) Il est dans l’intérêt de la justice d’accorder à la Coalition la qualité d’intervenant en l’espèce

[71] Postes Canada soutient que la participation de la Coalition n’aiderait pas le Tribunal parce que la présente instance a pour objet une plainte de discrimination individuelle, et non pas systémique. La Coalition souligne que la décision Attaran, dans laquelle le Tribunal a accordé la qualité d’intervenant à la CSALC, porte sur une plainte de discrimination individuelle, et non pas systémique. Je fais observer que rien dans la LCDP, les Règles ou la jurisprudence n’indique qu’une personne qui désire intervenir ne peut participer qu’à une affaire dont l’objet est systémique. La mesure dans laquelle les questions soulevées dans l’affaire transcendent les parties est un facteur qu’il est approprié de prendre en compte pour décider si la participation d’une personne qui désire intervenir est dans l’intérêt de la justice.

[72] Dans la décision Attaran, le Tribunal a fait remarquer qu’il recevait souvent des demandes visant à obtenir la qualité d’intervenant dans des affaires qui ont une grande visibilité et qui revêtent un intérêt public important (au par. 21). Les questions soulevées par la présente affaire ont manifestement de l’importance pour la Coalition et d’autres, car le Tribunal a reçu trois requêtes en obtention de la qualité d’intervenant dans la présente affaire – l’une d’elles a été retirée par la suite.

[73] Une affaire dont l’objet n’est pas systémique, mais qui soulève des questions juridiques importantes peut également attirer l’attention d’organismes ou de personnes qui peuvent considérer ces questions importantes pour eux-mêmes ou, dans le cas d’organismes, pour leurs membres. C’est le cas en l’espèce. Bien que l’objet de la présente affaire soit l’expérience individuelle de K.L. avec son employeur, Postes Canada, la Coalition a également soulevé une importante question d’intérêt public qui, selon elle, devrait être examinée par le Tribunal, à savoir que la violence conjugale donne lieu à une forme de discrimination fondée sur des motifs multiples interreliés. Le BCHRT a affirmé que la question de savoir si une telle violence peut donner lieu à de la discrimination en matière d’emploi est unique et qu’elle a de l’importance pour l’intérêt public. Comme les parties ne s’entendent pas quant à la question de savoir si l’intersectionnalité de motifs de distinction illicite est pertinente pour la présente plainte, la question est soulevée dans la présente instance.

[74] Postes Canada soutient que le véritable objectif de la Coalition est de plaider en faveur de réformes juridiques, ce qui, selon elle, est inapproprié. Toutefois, de nombreuses parties plaident en faveur de l’évolution du droit par la voie de procédures judiciaires. Le Tribunal est conscient qu’il appartient en dernier ressort au législateur de décider de toute modification de fond de la LCDP, mais il est approprié, dans le contexte des droits de la personne, de demander au Tribunal d’examiner une approche intersectionnelle.

[75] Je fais remarquer que la demande visée par la décision du TDPO à laquelle fait référence Postes Canada (la décision Villanueva) est différente de la présente demande visant l’obtention de la qualité d’intervenant. Dans la décision Villanueva, le TDPO a fait observer que la Clinique n’avait pas indiqué qu’elle désirait aider le Tribunal et que la [traduction] « véritable nature de son intervention proposée » était la défense d’intérêts (au par. 20). De plus, dans cette affaire, l’audience devait avoir lieu un mois plus tard et, étant donné la nature générale de l’intervention proposée, le TDPO a jugé que la participation de la clinique retarderait l’instance et pourrait modifier et élargir les questions en litige, ce qui causerait un préjudice aux parties et au processus. En d’autres termes, il a été jugé que les observations générales proposées par la clinique n’étaient pas utiles pour trancher les questions soulevées par les parties et qu’un ajournement de l’audience n’était pas dans l’intérêt de la justice.

[76] Il n’en est pas de même de la participation proposée par la Coalition. Celle-ci a clairement indiqué comment elle désire aider le Tribunal à décider si K.L. a été victime de discrimination de la part de Postes Canada. Par ailleurs, la date de l’audition de la présente plainte n’a pas encore été fixée.

[77] Je comprends les réserves de Postes Canada à l’égard des conséquences de la participation d’un intervenant à l’audition de la présente plainte, mais l’imposition de limites à la participation de la Coalition contribuera à atténuer ces réserves en ce qui concerne les conséquences sur les parties et sur les procédures du Tribunal.

B. Deuxième question en litige : Quelle est l’étendue de la participation de la Coalition à l’instruction?

[78] Si le Tribunal fait droit à la requête, il précise l’étendue de la participation de l’intervenant à l’instruction (par. 27(3) des Règles). Conformément au paragraphe 48.9(1) de la LCDP, l’étendue de la participation d’un intervenant doit tenir compte de l’obligation qu’a le Tribunal de mener les instances de façon aussi informelle et expéditive que le permettent les principes de justice naturelle et les règles de pratique (Letnes, au par. 20).

[79] La Coalition demande au Tribunal une ordonnance lui accordant la qualité d’intervenant ainsi que les droits de participation limités suivants :

a) elle recevra une copie des exposés des précisions, de toutes les communications transmises par les parties, et de toutes les communications écrites futures transmises au Tribunal;

b) elle pourra participer aux conférences de gestion de l’instance;

c) elle pourra répondre à toutes les requêtes;

d) elle aura la permission d’appeler jusqu’à deux témoins experts qui traiteront des domaines liés à sa contribution proposée après consultation de la Commission, de la plaignante et de tout autre intervenant qui appuie la plainte afin d’éviter les redondances;

e) elle pourra contre-interroger les témoins, y compris les experts;

f) elle pourra présenter des observations écrites et orales, et déposer un recueil de textes à l’appui à l’audience.

[80] La Commission et la plaignante consentent à tous les droits procéduraux sollicités figurant dans la liste ci-dessus.

[81] Je fais observer qu’en plus de la liste ci-dessus, la Coalition, dans ses observations initiales relatives à la requête, a demandé au Tribunal d’ordonner qu’elle puisse également [traduction] « participer à tout processus de médiation ou de règlement des différends mené par le Tribunal ». La Commission et la plaignante n’étaient pas d’accord pour que le Tribunal rende une telle ordonnance. Elles ont fait valoir que, comme la participation des parties aux discussions en vue d’un règlement menées par le Tribunal est volontaire, il devrait revenir aux parties de décider qui peut ou ne peut pas y assister et à quelles conditions. Dans ses observations présentées en réponse, la Coalition a souscrit à cette position et a modifié sa demande visant à participer à tout processus de médiation ou de règlement des différends en ajoutant les mots [traduction] « avec le consentement des parties concernées ».

[82] À titre subsidiaire concernant la requête de la Coalition, Postes Canada soutient, sans renoncer à sa position selon laquelle la requête devrait être rejetée, que, si la Coalition obtient la qualité d’intervenant, sa participation devrait être étroite et limitée. Elle conteste l’étendue de la participation demandée par la Coalition, qui, selon elle, serait ainsi pleinement habilitée à participer l’audience : elle pourrait produire une preuve, contre-interroger les témoins et présenter des observations. Elle ajoute qu’accorder à la Coalition des droits permettant une participation aussi entière serait contraire à l’obligation qu’impose la LCDP au Tribunal de mener les instances de façon aussi informelle et expéditive que le permettent les principes de justice naturelle et les règles de pratique.

[83] Postes Canada soutient que les seuls droits de participation qui devraient être accordés à la Coalition sont le droit de faire des recommandations à la Commission, à sa discrétion, en ce qui concerne le dépôt de la preuve, y compris la preuve des experts, et le droit de présenter des observations écrites à la fin de la partie de l’audience consacrée à la présentation de la preuve, d’un maximum de cinq pages et limitées aux questions distinctes, déterminées par le Tribunal, qui aideront celui-ci à statuer sur la plainte.

[84] Je suis d’accord pour dire que la participation de la Coalition devrait être limitée, mais pas tout à fait dans la mesure proposée par Postes Canada. La position de la Coalition étant semblable à celle de la Commission, qui est une partie à l’instance à part entière, il n’y a aucune raison d’accorder à la Coalition les pleins droits de participation. J’accepte d’accorder à la Coalition les droits de participation énoncés dans l’ordonnance ci-dessous, ce qui lui permettra de restreindre sa participation à l’essentiel, d’éviter les redondances et de ne pas retarder davantage l’instance.

V. ORDONNANCE

[85] La Coalition :

  1. peut participer aux conférences de gestion de l’instance, dans la mesure où sa participation n’entraîne aucun retard;
  2. aura la permission d’appeler un seul témoin expert qui traitera des domaines liés à ses contributions proposées après consultation de la Commission, de la plaignante et de tout autre intervenant qui appuie la plainte afin d’éviter les redondances;
  3. peut recevoir les documents communiqués par les parties afin de décider si elle appellera un témoin expert;
  4. peut demander l’autorisation de contre-interroger le ou les témoins experts des parties;
  5. peut demander l’autorisation de déposer des requêtes ou de répondre à une requête déposée en l’espèce;
  6. peut présenter des observations écrites et orales, et déposer un recueil de textes à l’appui à l’audience;
  7. doit respecter la décision sur requête relative à la confidentialité rendue à l’égard de la présente plainte (2023 CHRT 29).

[86] Chacune des parties :

  1. fournira à la Coalition une copie de son exposé des précisions;
  2. fournira à la Coalition une copie de ses documents qui ont été communiqués aux autres parties à la présente instance;
  3. fournira à la Coalition tous les documents relatifs à l’audience, dont la liste des pièces déposée avant l’audience, les cahiers de preuve documentaire et les observations finales écrites;
  4. fournira à la Coalition tous les documents relatifs à la requête déposés en l’espèce à compter de la date de la présente décision.

[87] Chacune des parties, et le Tribunal :

  1. fera parvenir à la Coalition une copie de toute communication transmise à compter de la date de la présente décision, sauf si elle est liée à la médiation.

Signée par

Colleen Harrington

Membre du Tribunal

Ottawa (Ontario)

Le 10 avril 2025

 


Tribunal canadien des droits de la personne

Parties au dossier

Numéro(s) du/des dossier(s) du Tribunal : T2664/4021

Intitulé de la cause : K.L. c. Société canadienne des postes

Date de la décision sur requête du Tribunal : Le 10 avril 2025

Requête traitée par écrit sans comparution des parties

Observations écrites par :

K.L. , pour son propre compte

Brian Smith , pour la Commission canadienne des droits de la personne

Jennifer Hodgins , pour l’intimée

Elizabeth K. P. Grace et Zahra Vaid , pour l’intervenante

 

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