Tribunal canadien des droits de la personne
Informations sur la décision
Le plaignant, Nicholas Fitz-Allan Cox, qui se décrit comme un homme noir originaire de la Barbade, affirme avoir été victime de discrimination, de harcèlement et de congédiement injuste en raison de sa race, de sa couleur et de son statut d’immigrant. Les événements auraient eu lieu lorsqu’il travaillait comme chauffeur de camion pour les intimés, à savoir Northwest Truck Lines Inc, Kirpal Mangat et Peter Sanghera. Le Tribunal devait trancher deux questions.
Pour la première question, les intimés ont soutenu que le plaignant n’avait pas fourni suffisamment de documents pour prouver sa perte de salaire. Cependant, le Tribunal a précisé que le plaignant ne devait fournir que les documents essentiels directement liés à ses allégations.
Pour la deuxième question, les intimés ont demandé que le plaignant retire de son exposé des précisions l’allégation d’abus en matière d’immigration, qu’ils considéraient comme une nouvelle allégation. Le Tribunal a toutefois jugé que cette allégation fournissait des informations contextuelles importantes sur la plainte initiale. En effet, le plaignant peut ajouter des détails à ses allégations si ces ajouts sont liés à la plainte initiale et ne nuisent pas à l’autre partie.
En conclusion, le Tribunal a ordonné au plaignant et aux intimés de transmettre les documents requis dans des délais déterminés afin de faire avancer le dossier.
Contenu de la décision
Tribunal canadien |
|
Canadian Human |
Référence : 2024 TCDP
Date : Le
Numéros des dossiers : HR-DP-3014-24, HR-DP-3015-24 et HR-DP-3016-24
[TRADUCTION FRANÇAISE]
Entre :
le plaignant
- et -
Commission canadienne des droits de la personne
la Commission
- et -
les intimés
Décision sur requête
Membre :
Table des matières
III. PREMIÈRE QUESTION EN LITIGE : PRÉCISIONS ET DOCUMENTS SUPPLÉMENTAIRES
IV. DEUXIÈME QUESTION EN LITIGE : ALLÉGATION RELATIVE À UNE NOUVELLE PLAINTE
I. CONTEXTE
[1] Le plaignant, Nicholas Fitz-Allan Cox, a déposé des plaintes pour atteinte aux droits de la personne contre Northwest Truck Lines Inc., Kirpal Mangat et Peter Sanghera (collectivement, les « intimés »). Il allègue avoir été victime, de la part de ces derniers, de discrimination et de harcèlement en matière d’emploi en raison de sa couleur, de sa race et de son origine nationale ou ethnique. M. Cox, qui est un homme noir originaire de la Barbade, affirme avoir commencé à travailler comme conducteur de grand routier pour l’entreprise Northwest Truck Lines Inc. (« Northwest ») le 5 janvier 2021 dans le cadre du programme des travailleurs étrangers temporaires. Il dit qu’il était titulaire d’un permis de travail lui permettant de travailler uniquement pour Northwest et que ce permis était valide jusqu’au 24 septembre 2022.
[2] M. Cox allègue avoir fait l’objet de remarques racistes et dégradantes et avoir subi un traitement défavorable, en plus d’avoir été renvoyé ou d’avoir été victime d’un congédiement déguisé en juillet 2021 parce qu’il était un homme noir et un travailleur étranger temporaire. M. Cox a déposé ses plaintes pour atteinte aux droits de la personne auprès de la Commission canadienne des droits de la personne (la « Commission ») en 2021, et la Commission a demandé au Tribunal de les instruire en avril 2024.
[3] La présente affaire est actuellement à l’étape de gestion de l’instance. À ce stade, les parties communiquent entre elles leur exposé des précisions et les documents pertinents qu’elles ont en leur possession, et elles peuvent soulever des questions préliminaires à trancher par le Tribunal avant la tenue de l’audience. Jusqu’à maintenant, le Tribunal a ordonné que les plaintes distinctes déposées par M. Cox contre chacun des trois intimés soient jointes aux fins d’une instruction commune.
[4] Dans l’exposé des précisions qu’il a déposé le 29 juillet 2024, M. Cox a inclus un exposé des faits comprenant les sous-titres suivants : [traduction] « Aperçu », « Résumé de la maltraitance financière »
, « Résumé de la maltraitance physique »
, « Résumé de la maltraitance psychologique et du racisme flagrant »
, « Renvoi », « Préjudice en matière d’immigration »
et « Conséquences sur M. Cox »
. L’exposé des faits est suivi des questions de droit que M. Cox a soulevées et des mesures de réparation qu’il sollicite, ainsi que d’une liste des documents qu’il a en sa possession et d’une liste des témoins qu’il a l’intention de citer.
[5] La Commission, qui est une partie distincte à la présente instance, a déposé son propre exposé des précisions.
II. REQUÊTE DES INTIMÉS
[6] Dans une lettre du 14 août 2024, soit avant l’expiration du délai qui leur était accordé pour déposer leur propre exposé des précisions, les intimés ont soulevé des questions relativement à l’exposé des précisions de M. Cox. La première question est liée à la position des intimés selon laquelle les précisions fournies par M. Cox et la communication des documents potentiellement pertinents seraient insuffisantes à certains égards. La deuxième question a trait à l’allégation des intimés selon laquelle M. Cox aurait présenté une nouvelle plainte dans son exposé des précisions, plainte que la Commission n’aurait pas eu l’occasion d’examiner dans le cadre de son enquête. Les intimés ont demandé que l’échéance fixée pour le dépôt de leur exposé des précisions soit reportée jusqu’à ce que ces questions aient été tranchées, et le Tribunal a accueilli la demande. J’ai fourni aux parties un échéancier pour permettre à M. Cox de déposer un exposé des précisions modifié et de répondre aux questions soulevées par les intimés.
[7] La présente décision sur requête traite des deux questions soulevées par les intimés et établit les prochaines étapes à suivre en vue de la tenue de l’audience.
III. PREMIÈRE QUESTION EN LITIGE : PRÉCISIONS ET DOCUMENTS SUPPLÉMENTAIRES
A. Positions des parties
[8] Les intimés soutiennent que les renseignements et les documents communiqués par M. Cox concernant l’une des mesures de réparation sollicitées sont insuffisants.
[9] M. Cox demande au Tribunal d’ordonner aux intimés de lui payer le salaire qui lui est dû et de l’indemniser pour la perte de salaire qu’il a subie. Les intimés font remarquer que, dans son exposé des précisions, M. Cox [traduction] « ne présente aucune observation concernant la période pendant laquelle il était sans emploi »
. Ils affirment également que M. Cox n’a fourni aucun document ni aucune preuve ayant trait à la durée de sa période de chômage, aux efforts qu’il a déployés pour limiter sa perte de salaire ou aux prestations gouvernementales qu’il a reçues, éléments qui sont tous essentiels à la détermination de la perte de salaire subie par ce dernier.
[10] Dans la lettre de réponse du 27 août 2024 qu’il a jointe à son exposé des précisions modifié, M. Cox dit qu’il ne souscrit pas à la position des intimés. Il fait observer qu’il avait bien indiqué, dans son exposé des précisions initial, que sa demande de permis de travail ouvert pour travailleurs vulnérables avait été approuvée le 17 août 2021. Il a également modifié son exposé des précisions pour mentionner qu’il avait recommencé à travailler le 31 août 2021, soit quelques jours après avoir reçu son permis de travail ouvert. Toujours dans sa lettre de réponse, M. Cox affirme qu’étant donné son statut de travailleur étranger titulaire d’un permis de travail fermé délivré dans le cadre du programme des travailleurs étrangers temporaires, il ne pouvait pas recommencer à travailler après son renvoi avant d’avoir reçu un permis de travail ouvert. Il affirme que le fait qu’il [traduction] « a présenté une demande de permis de travail ouvert et [qu’]il est retourné travailler très peu de temps après avoir reçu le permis montre qu’il s’est manifestement efforcé de limiter sa perte de salaire »
.
[11] M. Cox a aussi modifié son exposé des précisions pour souligner qu’il avait présenté une demande d’assurance-emploi et qu’il avait reçu environ 2 500 $ à ce titre pendant qu’il était au chômage.
[12] Dans leur réponse du 6 septembre 2024, les intimés font remarquer que, même si M. Cox a modifié son exposé des précisions pour indiquer la date exacte à laquelle il a commencé son nouvel emploi, ce qui a permis d’établir plus précisément la période pendant laquelle il a été au chômage, il n’a fourni aucun document à l’appui de son affirmation.
[13] Les intimés sollicitent les documents suivants, qui sont, selon eux, faciles à obtenir pour le plaignant et [traduction] « manifestement pertinents dans le cadre de la plainte »
:
- Tous les documents relatifs à l’emploi qu’il a occupé après avoir travaillé pour les intimés, notamment :
la demande d’emploi;
la description du poste;
les lettres d’offres;
le contrat de travail;
le salaire;
la durée de l’emploi, s’il y a lieu;
- Tous les documents relatifs aux autres emplois qu’il a occupés après celui indiqué ci-dessus, le cas échéant;
- Toutes les déclarations fiscales de 2020 à aujourd’hui;
- Tous les documents relatifs aux prestations d’assurance-emploi qu’il a reçues pendant qu’il était au chômage et au montant des prestations;
- L’ensemble des documents relatifs à toute autre prestation gouvernementale ou indemnité d’assurance qu’il a reçue pendant qu’il était au chômage;
- Tous les documents relatifs à sa demande de permis de travail ouvert pour travailleurs vulnérables.
[14] Les intimés font valoir que ces documents permettront d’évaluer la perte de salaire du plaignant s’il prouve qu’il a été victime de discrimination.
B. Analyse
[15] Le traitement équitable des parties tout au long de l’instance est une exigence consacrée dans la Loi canadienne sur les droits de la personne, L.R.C. (1985), ch. H-6 (la « LCDP »). Ainsi, selon le paragraphe 50(1) de la LCDP, le Tribunal doit donner aux parties la « possibilité pleine et entière »
de « présenter […] des éléments de preuve ainsi que leurs observations »
. Chaque partie a droit à ce que les éléments de preuve des autres parties lui soient communiqués avant l’audience.
[16] Les Règles de pratique du Tribunal canadien des droits de la personne (2021), DORS/2021-137 (les « Règles »), prévoient l’obligation, pour les parties, de communiquer tous les documents qu’elles ont en leur possession « relativement à un fait ou à une question soulevée dans la plainte, ou à une ordonnance sollicitée par une partie »
, et ne faisant l’objet d’aucun privilège de non-divulgation (voir al. 18(1)f), 19(1)e) et 20(1)e), et par. 23(1)). L’obligation de communication de la preuve est continue (par. 24(1)).
[17] Pour trancher la question de savoir s’il y a lieu d’ordonner à une partie de communiquer des documents, le Tribunal doit déterminer la pertinence potentielle des éléments d’information demandés en lien avec la plainte dont il est saisi (Brickner c. Gendarmerie royale du Canada, 2017 TCDP 28 [Brickner], au par. 5). Une partie qui demande la production d’un document doit donc démontrer qu’il existe un lien rationnel entre ce document et le fait, la question en litige ou la mesure de réparation qui est en jeu dans l’instruction. L’exposé des précisions des parties sert de guide pour déterminer la pertinence potentielle d’un document (Casler c. La Compagnie des chemins de fer nationaux du Canada, 2017 TCDP 6 [Castler], au par. 9).
[18] La communication de tous les documents potentiellement pertinents permet au Tribunal de veiller à ce que les parties connaissent la preuve à réfuter et puissent se préparer adéquatement pour l’audience (Egan c. Agence du revenu du Canada, 2019 TCDP 8, au par. 4).
[19] Le seuil de la pertinence potentielle n’est pas très élevé, mais le Tribunal doit tout de même tenir compte du principe de la proportionnalité lorsqu’il examine des demandes de communication de documents. L’instruction des plaintes « se fait sans formalisme et de façon expéditive dans le respect des principes de justice naturelle et des règles de pratique »
(par. 48.9(1) de la LCDP). La demande de production de documents ne doit pas être spéculative ni équivaloir à une « partie de pêche »
, et ne doit non plus pas obliger une partie à se soumettre à une recherche onéreuse et fort étendue de documentation (Nwabuikwu c. Gendarmerie royale du Canada, 2020 TCDP 9, au par. 16).
[20] Le fait que le Tribunal ordonne la production de documents avant l’audience ne signifie pas nécessairement que ceux-ci seront admis en preuve à l’audience ou, s’ils le sont, que le Tribunal leur accordera un poids important.
[21] En l’espèce, les intimés sollicitent une grande quantité de documents portant non seulement sur l’emploi que M. Cox a occupé immédiatement après avoir travaillé pour eux, mais aussi sur tous les emplois qu’il a eus par la suite. Ils demandent également à obtenir ses déclarations fiscales de 2020 à aujourd’hui. L’étendue des documents demandés par les intimés semble disproportionnée comparativement à la mesure de réparation sollicitée par M. Cox.
[22] Dans son exposé des précisions, M. Cox affirme avoir été renvoyé ou avoir été victime d’un congédiement déguisé le 8 juillet 2021 ou aux alentours de cette date, avoir reçu un permis de travail ouvert lui ayant permis de chercher un autre emploi un peu plus d’un mois plus tard, soit le 17 août 2021, et avoir commencé un nouvel emploi le 31 août 2021.
[23] M. Cox demande au Tribunal de rendre une ordonnance enjoignant aux intimés de [traduction] « lui payer la totalité du salaire qui lui est dû »
et « de l’indemniser pour la perte de salaire qu’il a subie pendant qu’il était sans emploi »
. Je comprends que, par l’expression [traduction] « salaire qui lui est dû »
, M. Cox fait référence au salaire qui ne lui a pas été payé pendant qu’il travaillait pour les intimés, étant donné qu’il indique, dans son exposé des précisions, qu’il « n’a pas été payé pour toutes les heures travaillées »
. La période de chômage ayant entraîné la [traduction] « perte de salaire »
pour laquelle il cherche à être indemnisé semble correspondre à la période comprise entre le 8 juillet 2021, date approximative à laquelle il aurait été renvoyé, et le 31 août 2021, date approximative à laquelle il aurait commencé son nouvel emploi. Il s’agit d’une période d’un peu plus d’un mois.
[24] À la lecture de l’exposé des précisions de M. Cox, il ne me semble pas que ce dernier cherche à être indemnisé pour la différence entre le salaire qu’il gagnait en travaillant pour les intimés et celui qu’il touchait dans le cadre de son emploi subséquent. Par conséquent, je ne vois pas la pertinence potentielle des renseignements demandés par les intimés en lien avec tous les emplois que M. Cox a occupés après avoir travaillé pour eux, notamment le salaire touché, à l’exception de la date exacte à laquelle il a commencé l’emploi ayant immédiatement suivi celui chez Northwest (en août 2021) et de ses déclarations fiscales pour l’année 2021 seulement.
[25] En ce qui a trait aux efforts déployés par M. Cox pour limiter sa perte de salaire entre la fin de son emploi chez Northwest et le début de son emploi subséquent, je conviens que les documents suivants sont potentiellement pertinents : les documents relatifs à sa demande de permis de travail ouvert pour travailleurs vulnérables et à la réception de celui-ci, de même que toutes les demandes d’emploi qu’il a présentées pendant qu’il était au chômage et les documents traitant des prestations d’assurance-emploi ou des autres prestations gouvernementales qu’il a reçues.
[26] Je dresserai la liste des documents précis que M. Cox devra communiquer aux intimés et à la Commission dans la section « Ordonnance » ci-après. Je fais remarquer que les Règles prévoient l’obligation pour les parties de communiquer tous les documents potentiellement pertinents qu’elles ont « en [leur] possession »
. Par conséquent, M. Cox doit faire tout son possible pour obtenir ces documents et les fournir aux intimés et à la Commission. Bien entendu, il pourra aussi témoigner sur les mesures de réparation qu’il sollicite et pourra être interrogé à ce sujet par les autres parties à l’audience, que des éléments de preuve documentaire puissent être produits ou non.
[27] Je fais observer qu’outre avoir demandé des documents pour étayer la perte de salaire du plaignant, les intimés cherchaient également à obtenir des précisions supplémentaires sur les allégations que le plaignant avait exposées à la section [traduction] « Résumé de la maltraitance psychologique et du racisme flagrant »
, dans l’exposé des faits de son exposé des précisions. Il semble toutefois que la question ait été réglée dans la réponse du plaignant et son exposé des précisions modifié. Si M. Cox a connaissance de l’existence de renseignements ou de documents supplémentaires concernant ces allégations, il doit les communiquer aux intimés dès que possible afin que ceux-ci puissent y répondre en temps opportun et de manière éclairée.
IV. DEUXIÈME QUESTION EN LITIGE : ALLÉGATION RELATIVE À UNE NOUVELLE PLAINTE
A. Positions des parties
[28] Les intimés soutiennent que M. Cox ne devrait pas avoir la possibilité de présenter ce qui, selon eux, constituerait [traduction] « de nouvelles plaintes formulées par le plaignant dans [son] exposé des précisions »
. Ils font valoir que M. Cox n’a pas inclus les paragraphes de la section [traduction] « Préjudice en matière d’immigration »
dans la plainte qu’il a déposée auprès de la Commission et que cette dernière n’a donc pas pu en tenir compte dans son rapport de décision.
[29] M. Cox allègue qu’il a subi un préjudice en matière d’immigration du fait que les actes qu’ont posés les intimés au moment où il aurait été congédié de manière déguisée ou renvoyé l’auraient empêché de demander le statut de résident permanent dans le cadre d’un programme d’immigration particulier, à savoir la voie d’accès de la résidence temporaire à la résidence permanente (la « voie d’accès »). M. Cox affirme que, pour cette raison, il n’a toujours pas pu obtenir le statut de résident permanent au Canada. Il sollicite des mesures de réparation en lien avec ces allégations de préjudice en matière d’immigration.
[30] Pour leur part, les intimés soutiennent que M. Cox avait déjà connaissance du préjudice qu’il prétend avoir subi en matière d’immigration au moment où il a déposé les autres plaintes auprès de la Commission et qu’il était donc en mesure de présenter ses allégations à ce moment-là. Ils soutiennent, par conséquent, que M. Cox ne devrait pas pouvoir présenter ces allégations à cette étape de l’instance étant donné que le délai pour déposer une plainte est écoulé depuis longtemps.
[31] M. Cox n’est pas d’accord pour dire qu’il aurait pu déposer une plainte pour le préjudice qu’il aurait subi en matière d’immigration en même temps que ses plaintes initiales. Il affirme qu’il a déposé ses plaintes initiales auprès de la Commission le 21 juillet 2021 ou aux alentours de cette date, et que le nombre maximal de demandes pouvant être acceptées dans le cadre du volet de la voie d’accès pour lequel il comptait présenter sa demande avait été atteint seulement quelques jours avant. Selon M. Cox, au moment où il a déposé ses plaintes pour atteinte aux droits de la personne, il n’avait pas conscience de l’ampleur de la situation ni de la façon dont elle était susceptible d’influer sur les occasions qu’il aurait d’obtenir la résidence permanente. Il ajoute cependant qu’il a informé la Commission de la situation lorsque celle-ci s’est précisée pour lui. Il souligne qu’il a déclaré, dans des observations présentées à la Commission le 1er septembre 2022, que les intimés avaient porté plainte à la police contre lui et avaient [traduction] « nui à son processus d’immigration, de sorte qu’il a raté l’occasion de présenter une demande de résidence permanente »
.
[32] M. Cox indique également qu’il avait inclus, dans la liste des éléments de preuve fournie à la Commission et à l’avocat des intimés, des communications avec le consultant en immigration avec qui il faisait affaire. Il soutient donc que les intimés avaient connaissance de cet aspect de la plainte bien avant qu’il dépose son exposé des précisions du mois d’août 2024. M. Cox fait aussi observer que c’est dans leur lettre du 14 août 2024 que les intimés se sont opposés pour la première fois à ce qu’il présente ces allégations.
[33] M. Cox fait valoir que, même si le Tribunal jugeait que le préjudice en matière d’immigration était un nouvel argument qu’il ne pouvait invoquer, les conséquences des actes des intimés sur son processus d’immigration sont tout de même pertinentes quant à la mesure de réparation qu’il sollicite. Il affirme que son renvoi l’a empêché de présenter une demande de résidence permanente dans le cadre de la voie d’accès, ce qui a entraîné des [traduction] « conséquences à long terme sur sa capacité à obtenir la résidence permanente au Canada »
et un préjudice moral immense. Selon M. Cox, il devrait, pour cette raison, avoir droit à l’indemnité maximale de 20 000 $ prévue à l’alinéa 53(2)e) de la LCDP.
[34] La Commission a également présenté des observations sur la question. Elle fait remarquer que les intimés demandent essentiellement au Tribunal de radier les allégations de préjudice en matière d’immigration de l’exposé des précisions de M. Cox. La Commission soutient toutefois que ces allégations ne constituent pas une nouvelle plainte, mais qu’elles fournissent plutôt du contexte et des éléments de preuve à l’appui de la plainte de M. Cox pour discrimination et harcèlement en matière d’emploi.
[35] La Commission fait valoir que les allégations de M. Cox selon lesquelles il aurait subi un préjudice en matière d’immigration sont liées aux allégations de ce dernier portant que les intimés Kirpal Mangat et Peter Sanghera et d’autres employés de Northwest auraient tenu des propos dégradants à caractère racial à son égard et l’auraient traité défavorablement parce qu’il était un homme noir et un travailleur étranger temporaire.
[36] La Commission confirme avoir été informée, durant son enquête, du préjudice en matière d’immigration que M. Cox aurait subi dans la réplique qu’il a déposée le 1er septembre 2022 pour faire suite à la réponse des intimés à la plainte. La Commission fait cependant valoir que, même si M. Cox n’avait pas informé la Commission de ces allégations, le Tribunal pourrait tout de même les accepter à titre de précisions pour évaluer le sérieux de sa plainte pour atteinte aux droits de la personne.
[37] La Commission s’appuie sur la jurisprudence du Tribunal pour affirmer que la demande des intimés visant à radier les allégations de préjudice en matière d’immigration de l’exposé des précisions de M. Cox devrait être rejetée. Elle fait remarquer que M. Cox allègue avoir été victime de discrimination fondée sur des caractéristiques protégées, dont son statut de travailleur étranger temporaire, lequel est directement lié à un motif de distinction illicite, soit l’origine nationale ou ethnique. Par conséquent, la Commission soutient que les allégations de préjudice en matière d’immigration ont un lien suffisant et raisonnable avec la plainte initiale (Levasseur c. Société canadienne des postes, 2021 TCDP 32, au par. 16). La Commission fait valoir que le fait d’interdire à M. Cox de présenter des observations sur le traitement défavorable qu’il aurait subi de la part des intimés en lien avec son statut d’immigration l’empêcherait d’exposer pleinement sa version des événements et ce que les intimés lui ont fait vivre.
[38] La Commission soutient que des précisions peuvent être apportées dans les actes de procédures en matière de droits de la personne lorsque de nouveaux faits ou de nouvelles circonstances sont révélés (Letnes c. Gendarmerie royale du Canada, 2019 TCDP 41, au par. 5; Casler, aux par. 8 et 9. Bien qu’en l’espèce, aucune demande visant à modifier un exposé des précisions n’ait été présentée au Tribunal, la Commission fait remarquer que le Tribunal pourrait faire droit à de telles demandes pour veiller à ce que l’exposé d’une partie reflète de façon correcte et juste les questions en litige.
[39] En réponse, les intimés soutiennent que le simple fait que M. Cox ait mentionné les allégations de préjudice en matière d’immigration durant l’enquête de la Commission ne signifie pas qu’ils ont ainsi été avisés que ces allégations faisaient dorénavant partie de la plainte et des mesures de réparation étaient sollicités en lien avec celles-ci. Ils affirment que, dans son exposé des précisions, le plaignant demande pour la première fois des mesures de réparation en lien avec un préjudice en matière d’immigration.
[40] Les intimés ne sont pas d’accord pour dire que les allégations de préjudice en matière d’immigration sont liées au fond de la plainte initiale ou qu’elles viennent préciser des allégations soulevées dans celle-ci. Selon eux, même si certaines parties de l’exposé des précisions peuvent fournir un contexte utile à la compréhension des principales allégations formulées dans la plainte initiale, ces parties ne devraient pas permettre au plaignant de solliciter des mesures de réparation qui ne faisaient pas l’objet de cette dernière. Ils font valoir que le plaignant peut témoigner sur sa vulnérabilité accrue découlant de son statut d’immigration, mais sans solliciter de nouvelles mesures de réparation fondées sur un préjudice qu’il aurait subi à cet égard.
[41] Les intimés demandent au Tribunal de [traduction] « radier les allégations de “préjudice en matière d’immigration” et les mesures de réparation sollicitées pour ce motif »
. Ils ajoutent que, si le Tribunal permet au plaignant de présenter les allégations de préjudice en matière d’immigration, ils chercheront alors à obtenir des documents et des renseignements supplémentaires à ce sujet, notamment :
- Toutes les communications que le plaignant a eues avec son consultant en immigration, Mayfair Immigration Services Ltd., avant et après celles qu’il a déjà produites, si de telles communications existent;
- Tous les renseignements et documents concernant les démarches effectuées par le plaignant en vue d’obtenir la résidence permanente dans le cadre :
de la voie d’accès;
du Programme des candidats des provinces de la Colombie-Britannique en 2022, 2023 et 2024;
- Tous les documents permettant d’établir le coût des demandes de résidence permanente et les frais connexes.
B. Analyse
[42] La jurisprudence sur laquelle s’est appuyée la Commission est utile au Tribunal pour examiner la demande de radiation des allégations de préjudice en matière d’immigration de l’exposé des précisions du plaignant présentée par les intimées.
[43] Les intimés fondent leur requête sur le fait que les allégations formulées par le plaignant dans la partie [traduction] « Préjudice en matière d’immigration »
de son exposé des précisions ne figuraient pas dans la plainte initiale qu’il avait déposée auprès de la Commission. Les intimés ne contestent pas le fait que M. Cox a soulevé la question du préjudice en matière d’immigration durant l’enquête de la Commission, dans ses observations en réplique. Ils font plutôt valoir que le plaignant sollicite pour la première fois, dans son exposé des précisions, des mesures de réparation en lien avec le préjudice en matière d’immigration qu’il aurait subi. Je fais cependant remarquer que le formulaire que M. Cox a rempli pour déposer sa plainte pour atteinte aux droits de la personne en juillet 2021 indique expressément que le contenu doit avoir un maximum de trois pages et qu’il ne précise pas que le plaignant doit inscrire les mesures de réparation sollicitées. C’est dans l’exposé des précisions à déposer auprès du Tribunal que les parties ont la possibilité, pour la première fois, de présenter leur position à l’égard des mesures de réparation qu’elles sollicitent.
[44] Il est bien établi que, lorsque les plaignants font valoir leurs arguments devant le Tribunal, ils ne sont pas strictement limités aux allégations qu’ils ont initialement présentées dans le formulaire de plainte déposé auprès de la Commission. Le Tribunal a déjà déclaré que la plainte initiale ne déterminait pas, à elle seule, la portée des arguments présentés à l’audience; en effet, le Tribunal a décrit le formulaire de plainte comme étant « approximatif en soi »
(Gaucher c. Forces armées canadiennes, 2005 TCDP 1, au par. 10). Le dépôt d’une plainte auprès de la Commission n’est que la première étape du processus de règlement des plaintes établi dans la LCDP, après quoi de nouveaux faits et de nouvelles circonstances sont souvent révélés (Lafrenière c. Via Rail Canada Inc., 2017 TCDP 9, aux par. 18 et 34).
[45] Les exposés des précisions établissent les modalités précises de l’audience du Tribunal et permettent aux parties de préciser les allégations soulevées dans la plainte initiale, à la condition que le fond de celle-ci soit respecté (Casler, aux par. 8 et 9).
[46] Le Tribunal a compétence pour modifier, clarifier et déterminer la portée d’une plainte, pourvu que les autres parties ne subissent aucun préjudice (Mohamed c. Banque Royale du Canada, 2023 TCDP 20, au par. 7). Le Tribunal a le pouvoir de radier des parties d’un exposé des précisions lorsqu’elles dépassent la portée de la plainte, mais il doit procéder avec prudence et seulement dans les « cas les plus clairs »
(Richards c. Service correctionnel Canada, 2020 TCDP 27, au par. 86).
[47] Je suis d’accord avec la Commission pour dire que les allégations de préjudice en matière d’immigration ne constituent pas une toute nouvelle plainte pour atteinte aux droits de la personne. Au contraire, elles sont liées au fond de la plainte initiale déposée par M. Cox et sont complémentaires aux allégations formulées dans celle-ci, puisqu’elles portent sur des actes que les intimés auraient posés en lien avec l’emploi du plaignant au moment de son renvoi.
[48] Je suis d’avis que la plainte initiale de M. Cox est fondée sur des faits qui établissent un lien raisonnable avec les allégations de préjudice en matière d’immigration qu’il a formulées dans son exposé des précisions. Dans le formulaire qu’il a rempli pour déposer sa plainte initiale, M. Cox expose les événements qui, selon lui, se sont produits entre le 8 et le 17 juillet 2021. Il y allègue notamment que les intimés Kirpal Mangat et Peter Sanghera l’ont faussement accusé d’avoir frappé l’un d’eux après qu’il a cherché à savoir si un employé de Northwest avait modifié son registre électronique. M. Cox affirme que les intimés ont porté plainte à la police contre lui et lui ont dit de retirer ses affaires de son camion, de remettre ses clés et de ne pas communiquer avec eux jusqu’à ce qu’ils communiquent avec lui, ce qu’ils ont fait le 9 juillet. Il mentionne qu’après avoir demandé des conseils juridiques, il a écrit aux intimés le 17 juillet 2021 pour leur dire que les actes qu’ils avaient posés le 8 juillet constituaient un renvoi ou, à tout le moins, que leur comportement répréhensible constituait un congédiement déguisé.
[49] M. Cox a inclus ces mêmes allégations dans son exposé des précisions et les a fait suivre d’une partie intitulée [traduction] « Préjudice en matière d’immigration »
, dans laquelle il est énoncé ce qui suit : [traduction] « Au moment de son renvoi, M. Cox était en train de préparer une demande de résidence permanente dans le cadre de la voie d’accès de la résidence temporaire à la résidence permanente et faisait affaire avec un consultant en immigration, Mayfair Immigration Services Ltd. Les intimés ont communiqué avec le consultant, qui n’était pas leur représentant, et lui ont dit de ne pas remettre leur lettre d’offre d’emploi à M. Cox »
. Selon M. Cox, il a finalement pu obtenir une copie de la lettre d’offre d’emploi après avoir demandé des conseils juridiques, lettre qu’il prévoyait joindre à sa demande de résidence permanente avec une explication concernant son récent renvoi. Toutefois, aux alentours de la date à laquelle il a reçu les documents, le nombre maximal de demandes pouvant être acceptées dans le volet « Travailleurs au Canada : travailleurs essentiels qui n’appartiennent pas au secteur des soins de santé »
de la voie d’accès avait été atteint et M. Cox ne pouvait plus présenter sa demande. Le programme de la voie d’accès a pris fin par la suite.
[50] Dans sa plainte pour atteinte aux droits de la personne, M. Cox a indiqué qu’il avait commencé à travailler pour Northwest à titre de conducteur de grand routier le 5 janvier 2021 dans le cadre du programme des travailleurs étrangers temporaires et que son permis de travail était valide jusqu’au 24 septembre 2022. Dans son exposé des précisions, il explique qu’il était titulaire d’un permis de travail l’autorisant à travailler pour un employeur déterminé, ce qui signifiait qu’il ne pouvait travailler que pour Northwest. Il semble évident que le statut de M. Cox au Canada était lié à son emploi pour les intimés durant la période visée par la plainte.
[51] M. Cox devrait avoir le droit de présenter des éléments de preuve au Tribunal pour démontrer que les intimés, Northwest Truck Lines Inc., le seul employeur pour qui il pouvait travailler selon son permis, ainsi que Kirpal Mangat et Peter Sanghera, ont posé des actes qui ont eu des conséquences sur son statut d’immigration aux alentours de la date où il aurait été renvoyé pour des motifs de distinction illicites (et où il dit avoir fait l’objet d’un congédiement déguisé). Le plaignant peut faire valoir qu’il y a un lien entre ces allégations et les allégations générales de discrimination et de harcèlement en matière d’emploi dont il aurait été victime [traduction] « dès qu’il a commencé à travailler [pour les intimés] »
.
[52] Il incombe, de manière générale, à M. Cox de prouver que les événements décrits dans son exposé des précisions se sont produits et qu’il existe un lien entre un motif de distinction illicite prévu dans la LCDP et le harcèlement et le traitement défavorable dont il aurait fait l’objet, notamment en lien avec sa demande de résidence permanente. Il doit également démontrer le lien de causalité entre les actes discriminatoires dont il aurait été victime et les pertes qu’il aurait subies, le Tribunal ne pouvant ordonner des mesures de réparation que pour un préjudice découlant d’un acte discriminatoire (Chopra c. Canada (Procureur général) (C.A.F.), 2007 CAF 268, aux par. 32 et 37).
[53] Selon moi, permettre à M. Cox de conserver les allégations de préjudice en matière d’immigration dans son exposé des précisions ne causerait pas de préjudice aux intimés. Ces derniers peuvent ne pas être d’accord avec le plaignant sur ce point, mais ils auront l’occasion de répondre à ces allégations dans leur propre exposé des précisions et de demander au plaignant de communiquer des renseignements supplémentaires à ce sujet. Bien entendu, ils peuvent également contester les allégations à l’audience.
[54] La requête des intimés visant à radier des parties de l’exposé des précisions du plaignant sera rejetée.
[55] Puisque je n’ordonnerai pas la radiation des allégations de préjudice en matière d’immigration de l’exposé des précisions du plaignant, je me suis penchée sur la question de savoir si M. Cox devait communiquer aux intimés d’autres documents potentiellement pertinents. Je fais remarquer que les intimés demandent à obtenir [traduction] « [t]outes les communications que le plaignant a eues avec son consultant en immigration, Mayfair Immigration Services Ltd., avant et après celles qu’il a déjà produites, si de telles communications existent »
. Le Tribunal ne connaît pas les dates de pareilles communications qui ont déjà été produites. Il semble toutefois que les communications que le plaignant a eues avec Mayfair Immigration Services, de 2021 à aujourd’hui, concernant sa demande de résidence permanente soient pertinentes.
[56] Je fais observer que les intimés devront eux aussi communiquer les échanges qu’ils ont eus avec Mayfair Immigration Services, de 2021 à aujourd’hui, à propos de M. Cox.
[57] Les intimés demandent également à obtenir les documents ci-dessous, dont j’ordonnerai la communication, puisque je suis d’avis qu’ils sont potentiellement pertinents dans le cadre de la plainte de M. Cox :
- Tous les renseignements et documents concernant les démarches effectuées par le plaignant en vue d’obtenir la résidence permanente dans le cadre :
de la voie d’accès;
du Programme des candidats des provinces de la Colombie-Britannique en 2022, 2023 et 2024;
- Tous les documents permettant d’établir le coût des demandes de résidence permanente et les frais connexes.
V. ORDONNANCE
[58] La requête des intimés visant à radier des parties de l’exposé des précisions du plaignant est rejetée.
[59] J’ordonne à M. Cox de communiquer aux autres parties les documents ci-dessous (s’il les a en sa possession ou s’il y a accès, et si ceux-ci ne font l’objet d’aucun privilège de non-divulgation) dans les 45 jours suivant la date de la présente décision sur requête :
- Les demandes d’emploi qu’il a présentées pendant qu’il était au chômage en juillet et en août 2021;
- Le ou les documents confirmant la date à laquelle il a commencé à travailler pour l’employeur qui l’a embauché après avoir travaillé pour Northwest en août 2021;
- Ses déclarations fiscales pour l’année 2021;
- Les documents relatifs à sa demande de permis de travail ouvert pour travailleurs vulnérables et à l’obtention de celui-ci;
- Les documents relatifs aux prestations d’assurance-emploi ou autres prestations gouvernementales qu’il a reçues pendant qu’il était au chômage;
- Les communications qu’il a eues avec Mayfair Immigration Services, de 2021 à aujourd’hui, concernant sa demande de résidence permanente;
- Tous les renseignements et documents concernant les démarches qu’il a effectuées en vue d’obtenir la résidence permanente dans le cadre :
de la voie d’accès;
du Programme des candidats des provinces de la Colombie-Britannique en 2022, 2023 et 2024;
- Tous les documents permettant d’établir le coût des demandes de résidence permanente et les frais connexes.
[60] J’ordonne aux intimés de communiquer les échanges qu’ils ont eus avec Mayfair Immigration Services, de 2021 à aujourd’hui, à propos de M. Cox.
[61] Les intimés doivent déposer leur exposé des précisions et communiquer les documents supplémentaires aux autres parties d’ici le 7 février 2025.
[62] Le plaignant et la Commission doivent déposer leur réplique à l’exposé des précisions des intimés d’ici le 25 février 2025.
Signée par
Membre du Tribunal
Ottawa (Ontario)
Tribunal canadien des droits de la personne
Parties au dossier
Numéros des dossiers du Tribunal : HR-DP-3014-24, HR-DP-3015-24 et HR-DP-3016-24
Intitulé de la cause :
Date de la
Requête traitée par écrit sans comparution des parties
Observations écrites par :