Tribunal canadien des droits de la personne

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Tribunal canadien
des droits de la personne

Tribunal's coat of arms

Canadian Human
Rights Tribunal

Référence : 2022 TCDP 33

Date : le 14 octobre 2022

Numéro du dossier : T2729/10521

[TRADUCTION FRANÇAISE]

Entre :

Katheryne Schulz (au nom de Bernard Schulz)

la plaignante

 

- et -

Commission canadienne des droits de la personne

la Commission

- et -

Emploi et Développement social Canada

l'intimé

Décision sur requête

Membre : Jennifer Khurana

 


I. APERÇU

[1] Le plaignant, Bernard Schulz, n’a pas pu ouvrir un régime enregistré d’épargne-invalidité (REEI) parce qu’il avait dépassé la limite d’âge fixée par la Loi de l’impôt sur le revenu (LIR). De plus, il n’a pas été admissible aux subventions canadiennes pour l’épargne-invalidité ni aux bons canadiens pour l’épargne-invalidité, qui sont conditionnés aux limites d’âge définies dans le Règlement sur l’épargne-invalidité (le « Règlement »). M. Schulz allègue que les conditions d’âge prévues dans la LIR et dans le Règlement constituent une forme de discrimination systémique et créent une atteinte disproportionnée aux aînés et aux personnes handicapées, en raison des difficultés auxquelles ils sont confrontés lorsqu’ils présentent une demande d’avantages.

[2] L’intimé (« EDSC ») soutient que M. Schulz conteste la limite d’âge établie dans la LIR et que seuls les tribunaux judiciaires sont compétents pour entendre la contestation d’une loi.

[3] M. Schulz reconnaît qu’une contestation de la LIR ne relève pas de la compétence du Tribunal. J’avais antérieurement accueilli la demande de M. Schulz de reporter l’instruction de sa plainte pour une période de six mois, le temps qu’il présente une demande de financement pour entreprendre sa contestation judiciaire fondée sur la Charte canadienne des droits et libertés (Schulz (au nom de Bernard Schulz) c. Emploi et Développement social Canada 2022 TCDP 6) [Schulz]. Le Programme de contestation judiciaire (le « Programme ») a depuis rejeté sa demande.

[4] M. Schulz demande maintenant au Tribunal de prolonger le report de l’instruction jusqu’en avril 2023, le temps d’effectuer une recherche de financement pour poursuivre sa démarche de contestation judiciaire. L’EDSC ne s’oppose pas à cette demande. La Commission s’abstient de prendre position pour le moment.

II. QUESTION EN LITIGE

[5] Le Tribunal doit-il accueillir la demande de M. Schulz de reporter l’instruction de sa plainte? Dans l’affirmative, pour quelle durée?

III. MOTIFS

[6] J’accueille la demande de report de l’instruction jusqu’en avril 2023. Je suis d’accord que cette prolongation du report, limitée dans le temps, est conforme à l’intérêt de la justice. Cette prolongation permettra d’éviter la fragmentation de l’affaire de M. Schulz ainsi que le dédoublement des dépenses et des efforts des parties, et réduira le risque de multiplication des procédures sur des questions similaires.

[7] J’avais accueilli la première demande de report dans l’affaire Schulz tout en précisant que la procédure du Tribunal n’est ni une police d’assurance ni une solution de rechange. Je n’étais pas prête à accorder un ajournement illimité ou indéfini et j’avais décidé qu’à la fin de la période d’ajournement, M. Schulz devrait faire un choix au sujet de sa plainte et décider s’il procéderait ou non devant ce Tribunal. À l’époque, M. Schulz n’avait pas encore indiqué ce qu’il ferait en cas d’obtention du financement, ni s’il poursuivrait sa plainte devant le Tribunal dans le cas contraire, ni sur quel fondement il le ferait [voir la décision Schulz aux paragraphes 12 et 13].

[8] M. Schulz a depuis répondu aux préoccupations du Tribunal. Il procédera devant une seule juridiction et soutient que cela sera à la fois plus efficace et plus juste. S’il n’obtient pas le financement pour présenter sa demande devant les tribunaux judiciaires, il a l’intention de revenir devant notre Tribunal pour procéder sur les parties de sa plainte qui, selon lui, relèvent de notre compétence. Si M. Schulz convient que la contestation de la LIR ne peut se faire que devant les tribunaux judiciaires, il soutient que le reste des allégations, y compris la contestation du Règlement ainsi que la façon dont le programme a été administré, peut être présenté devant l’une ou l’autre des juridictions.

[9] Si M. Schulz réussit à obtenir le financement nécessaire pour entreprendre sa contestation constitutionnelle, il retirera sa plainte devant le Tribunal. Il n’a pas les moyens de poursuivre deux procédures distinctes, ce à quoi il serait contraint si je refusais la demande de prolongation du report;

[10] Le fait d’accueillir cette demande signifie que, d’ici le mois d’avril 2023, 15 mois se seront écoulés depuis la première fois où M. Schulz a soulevé la question d’un ajournement, en janvier 2022. Bien que ce délai soit important, je suis convaincue, dans les circonstances, que la demande de M. Schulz est à la fois raisonnable et limitée. Il a confirmé qu’il ne demanderait pas de report de l’instruction pour une durée indéterminée jusqu’à ce qu’une décision finale soit rendue sur sa contestation constitutionnelle, et qu’il retirerait sa plainte devant le Tribunal dans le cas où il obtiendrait le financement nécessaire à cette contestation. Les autres parties ne s’opposent pas à la demande de report et n’ont pas soulevé de préoccupations quant au délai. Au contraire, EDSC soutient que d’autres plaintes pendantes devant le Tribunal soulèvent des questions similaires à celles mises en avant par M. Schulz. Dès lors, selon EDSC, que l’on reporte ou non l’instruction de la plainte, certaines des questions qu’elle soulève pourraient être en partie traitées dans le cadre des autres plaintes pendantes, et il est avantageux d’éviter la multiplicité des procédures.

[11] Je suis également convaincue par les solides arguments de M. Schulz relativement à l’accès à la justice, en particulier à la lumière des allégations et questions qu’il formule quant au caractère systémique de la discrimination. M. Schulz est représenté par un avocat qui peut faire valoir sa contestation et lui fournir des conseils. Toutefois, comme il le souligne, le fait de devoir poursuivre sa plainte devant le Tribunal dès maintenant, avec le risque de devoir procéder plus tard devant les tribunaux judiciaires, conduirait vraisemblablement à priver M. Schulz d’accès à la justice. Il est vrai qu’en voyant sa plainte instruite sans attendre, M. Schulz serait contraint, tout comme les autres parties, de diluer ses ressources, d’autant que de nombreuses plaintes traitant de questions identiques ou similaires sont déjà pendantes devant le Tribunal. Il ne serait bénéfique ni aux parties à la procédure ni aux intérêts de la justice que d’obliger M. Schulz à aller de l’avant dès maintenant avec sa plainte devant le Tribunal.

IV. ORDONNANCE

[12] L’instruction de la plainte est reportée jusqu’au 14 avril 2023 ou jusqu’à toute autre date antérieure à laquelle le plaignant aura eu connaissance du résultat de sa demande de financement aux fins de poursuivre sa contestation judiciaire.

[13] Dès qu’il obtiendra une réponse à sa demande de financement, le plaignant devra en informer immédiatement les parties et le Tribunal.

[14] Les exposés des précisions des parties doivent être déposés aux dates suivantes :

· M. Schulz et la Commission : le 26 mai 2023

· EDSC : le 23 juin 2023

· Répliques : le 30 juin 2023

Signée par

Jennifer Khurana

Membre du Tribunal

Ottawa (Ontario)

14 octobre 2022

 


Tribunal canadien des droits de la personne

Parties au dossier

Dossier du Tribunal : T2729/10521

Intitulé de la cause : Katheryne Schulz (au nom de Bernard Schulz) c. Emploi et Développement social Canada

Date de la décision sur requête du Tribunal : 14 octobre 2022

Requête traitée par écrit sans comparution des parties

Représentations écrites par :

Ashley Wilson , pour le plaignant

Sophia Karantonis, pour la Commission canadienne des droits de la personne

Sean Stynes, pour l'intimé

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