Tribunal canadien des droits de la personne

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Tribunal canadien
des droits de la personne

Les armoiries du Tribunal

Canadian Human
Rights Tribunal

Référence : 2014 TCDP 23

Date : le 18 août 2014

Numéro du dossier : T1852/8212

Entre :

Brian William Carter

le plaignant

- et -

Commission canadienne des droits de la personne

la Commission

- et -

Procureur général du Canada

l'intimé

Décision sur requête

Membre : Olga Luftig

 


Table des matières

I. Le contexte 1

A. L’annexe 2 de l’exposé des précisions du plaignant 1

II. La requête en confidentialité 2

III. La question principale 4

IV. Le droit et les Règles de procédure du Tribunal 4

A. Les Règles de procédure du Tribunal 5

B. Courte analyse des alinéas 6(1)d), e) et f) 6

V. Question : la norme applicable à la divulgation de documents prévue à l’article 6 des Règles du Tribunal 7

A. La position de la Commission 7

B. La position du plaignant 7

C. La position de l’intimé 8

D. Analyse : la norme applicable à la divulgation de documents prévue à l’article 6 des Règles du Tribunal 8

VI. Question : privilège 9

A. Analyse : privilège 10

VII. Question : confidentialité 10

A. Position de la Commission 10

B. Position de l’intimé 11

C. Analyse : confidentialité 12

D. Renseignements médicaux connexes 14

E. Transmission électronique de documents 15

VIII. Question : ordonnance de confidentialité au sens de l’article 52 et la Loi sur la protection des renseignements personnels 16

A. Analyse : l’ordonnance de confidentialité au sens de l’article 52 et la Loi sur la protection des renseignements personnels 17

B. Analyse : l’article 152 des Règles des Cours fédérales 18

C. Analyse : la Charte 18

IX. Analyse : la demande de réparation rétroactive 19

X. La compétence du Tribunal pour contrôler et pour surveiller le processus de recherche pré-divulgation 20

A. La conférence préparatoire téléphonique du 27 février 2014 20

B. La position de l’intimé 21

C. Analyse : la compétence du Tribunal pour contrôler et pour surveiller le processus de recherche pré-divulgation 22

a. Analyse : le processus de recherche pré-divulgation et la Loi sur la protection des renseignements personnels 22

b. Analyse : le processus de recherche pré-divulgation et le privilège relatif au litige 24

XI. Suspension temporaire terminée 26

XII. Décision 26

 


I. Le contexte

[1] Le 31 juillet 2012, en application de l’alinéa 44(3)a) de la Loi canadienne sur les droits de la personne, L.R.C. (1985), ch. H-6, version modifiée (la « Loi » ou la « LCDP »), la Commission canadienne des droits de la personne (la « Commission ») a demandé au président par intérim du Tribunal canadien des droits de la personne de désigner un membre pour instruire la plainte de Brian William Carter (le « plaignant ») déposée contre l’intimé, le ministère des Pêches et Océans Canada (le « MPO »).

[2] Le plaignant porte plainte aux motifs que le MPO aurait fait preuve de discrimination envers lui pour avoir omis ou refusé de prendre des mesures d’adaptation pour tenir compte de sa déficience; que le MPO , l’aurait soumis à un traitement défavorable en adoptant des lignes de conduite discriminatoires et lui refusant en conséquence une occasion d’emploi, en violation de la Loi, au titre des articles 7 et 10.

[3] Le 6 février 2014, le Tribunal a rendu une décision sur requête dans laquelle il ordonnait que le procureur général du Canada soit substitué au MPO à titre d’intimé, et que l’intitulé soit modifié afin que l’intimé soit le « Procureur général du Canada (représentant le ministère des Pêches et Océans Canada et la Commission de la fonction publique du Canada) ».

[4] La Commission participait à l’instruction et a déposé son exposé des précisions. Le 20 juin 2014, la Commission a avisé le Tribunal qu’elle ne participerait plus à l’audience.

[5] Le plaignant a présenté une requête en vue d’obtenir une ordonnance de confidentialité pour certains documents (la « requête en confidentialité » ou la « requête »). L’intimé et la Commission ont déposé des réponses à la requête.

A. L’annexe 2 de l’exposé des précisions du plaignant

[6] L’annexe 2 de l’exposé des précisions du plaignant est intitulée [traduction] « MÉDICAL – CONFIDENTIEL », et sous ce titre se trouve le sous-titre « Annexe 2 –Documents médicaux ». Le sous-titre est suivi d’une liste de documents comptant 24 pages. Le plaignant a revendiqué un privilège pour ces documents qui, soutient-il, sont liés à son état médical (les « documents de l’annexe 2 »).

II. La requête en confidentialité

[7] Dans sa requête en vue d’obtenir une ordonnance de confidentialité, le plaignant demande que soient rendues les ordonnances suivantes :

  1. les documents de l’annexe 2 ne seront divulgués qu’aux avocats et parajuristes des parties;
  2. les documents de l’annexe 2 ne seront pas copiés et ne seront transférés d’aucune manière, y compris par télécopieur et par courriel, par une partie ou un individu à une autre partie ou un autre individu;
  3. si l’avocat d’une partie souhaite que les documents de l’annexe 2 soient divulgués à une autre personne, l’avocat doit d’abord suivre toutes les étapes prescrites aux alinéas a) à f) ci-dessous :
    1. demander l’autorisation préalable du Tribunal;
    2. donner un avis préalable au plaignant;
    3. fournir le nom de la personne à qui la partie souhaite montrer ces documents;
    4. justifier la nécessité pour cette personne de voir le document;
    5. restreindre la divulgation supplémentaire à cette personne afin qu’elle ne puisse que voir le document;
    6. obtenir un engagement signé de la personne à qui l’on propose de montrer le document, dans lequel cette personne reconnaît que l’existence et le contenu du document sont strictement confidentiels et que le document ne doit pas être divulgué ou mentionné à une autre personne sauf si le Tribunal l’autorise expressément;
  4. tous les avocats doivent préserver la confidentialité des documents de l’annexe 2 et les ranger dans un lieu d’entreposage autorisé conformément aux règles en matière de sécurité du gouvernement du Canada;
  5. à la fin de l’instruction, tous les avocats doivent confirmer au Tribunal et au plaignant que les documents de l’annexe 2 ont été détruits conformément aux règles en matière de sécurité du gouvernement du Canada ou encore, les retourner au plaignant;
  6. tous les renseignements concernant le plaignant que l’intimé a déjà obtenus par application de la Loi sur la protection des renseignements personnels, L.R.C. (1985), ch. P-21, sont assujettis aux ordonnances rendues par le Tribunal dans le cadre de la présente requête en confidentialité;
  7. les manquements aux ordonnances rendues par le Tribunal dans le cadre de la présente requête qui ont déjà eu lieu doivent être rapportés au Tribunal et au plaignant afin que les risques découlant de ces manquements puissent être évalués et réglés.

[8] Le plaignant invoque les motifs suivants :

  1. la nature hautement personnelle, sensible et confidentielle des documents de l’annexe 2;
  2. le fait que la divulgation des documents de l’annexe 2 au public serait hautement préjudiciable à la réputation et à la santé du plaignant, c’est pourquoi il revendique un privilège pour ces documents;
  3. l’ordonnance demandée par le plaignant est conforme à l’article 152 des Règles des Cours fédérales du Canada, DORS/98-106 (les « Règles des Cours fédérales »);
  4. Leslie Palm c. International Longshore and Warehouse Union, Local 500, Richard Wilkinson et Cliff Willicome, 2013 TCDP 19, paragraphes 40 et 45 [Palm #3];
  5. les décisions suivantes, qui contiennent une ou plusieurs des dispositions relatives à la confidentialité qu’il souhaite voir ordonner : Harjinder Kaur Rai c. Gendarmerie royale du Canada, 2013 TCDP 6, paragraphe 37 [Rai]; Guay c. Canada (Gendarmerie royale du Canada), 2004 TCDP 34, au paragraphe 48 [Guay]; Montreuil c. Forces canadiennes, 2005 TCDP 45, au paragraphe 12 [Montreuil]; AFPC c. Musée canadien des civilisations, 2004 TCDP 38, aux paragraphes 19, 20 et 21 [Musée canadien]; Day c. MDN et Robert Hortie, 2003 TCDP 3, aux paragraphes 3 et 4 [Day]; Gaucher c. Forces armées canadiennes, 2005 TCDP 42, au paragraphe 35 [Gaucher];
  6. bien que l’intimé soit assujetti à la Loi sur la protection des renseignements personnels, des lacunes dans cette loi affaiblissent les mesures de protection de la confidentialité qu’elle prévoit, ce qui confirme que l’ordonnance de confidentialité que le plaignant demande est nécessaire;
  7. la recherche de documents à divulguer qu’a effectué l’avocat de l’intimé a été si vaste qu’elle constitue une « recherche à l’aveuglette », et elle contrevient à la Charte canadienne des droits et libertés, partie I de la Loi constitutionnelle de 1982, constituant l’annexe B de la Loi de 1982 sur le Canada (R.-U.), 1982, c. 11 (la « Charte ») parce qu’il s’agit d’une recherche déraisonnable.

III. La question principale

[9] Le Tribunal doit en définitive décider s’il convient ou non d’accueillir la requête en confidentialité du plaignant.

[10] Cependant, la présente décision traitera d’autres questions que les parties ont soulevées :

  • les documents de l’annexe 2 jouissent-ils de la protection d’un privilège?
  • les documents de l’annexe 2 sont-ils confidentiels?
  • le Tribunal a-t-il compétence pour contrôler et surveiller le processus de recherche pré-divulgation?
  • quelle est l’incidence de la Loi sur la protection des renseignements personnels dans l’instruction?
  • si le Tribunal rend une ordonnance de confidentialité, quelles doivent en être les modalités?

IV. Le droit et les Règles de procédure du Tribunal

[11] L’article 52 de la LCDP est ainsi libellé :

52(1) L’instruction est publique, mais le membre instructeur peut, sur demande en ce sens, prendre toute mesure ou rendre toute ordonnance pour assurer la confidentialité de l’instruction s’il est convaincu que, selon le cas :

a) il y a un risque sérieux de divulgation de questions touchant la sécurité publique;

b) il y a un risque sérieux d’atteinte au droit à une instruction équitable de sorte que la nécessité d’empêcher la divulgation de renseignements l’emporte sur l’intérêt qu’a la société à ce que l’instruction soit publique;

c) il y a un risque sérieux de divulgation de questions personnelles ou autres de sorte que la nécessité d’empêcher leur divulgation dans l’intérêt des personnes concernées ou dans l’intérêt public l’emporte sur l’intérêt qu’a la société à ce que l’instruction soit publique;

d) il y a une sérieuse possibilité que la vie, la liberté ou la sécurité d’une personne puisse être mise en danger par la publicité des débats.

(2) Le membre instructeur peut, s’il l’estime indiqué, prendre toute mesure ou rendre toute ordonnance qu’il juge nécessaire pour assurer la confidentialité de la demande visée au paragraphe (1).

A. Les Règles de procédure du Tribunal

[12] Le paragraphe 6(1) des Règles de procédure du Tribunal canadien des droits de la personne (03-05-04) (les « Règles du Tribunal ») prévoit que chaque partie à une plainte doit communiquer aux autres parties un exposé des précisions qui comprend, entre autres :

d) les divers documents qu’elle a en sa possession – pour lesquels aucun privilège de non-divulgation n’est invoqué – et qui sont pertinents à un fait, une question ou une forme de redressement demandé en l’occurrence, y compris les faits, les questions et les formes de redressement mentionnés par d’autres parties en vertu de cette règle;

e) les divers documents qu’elle a en sa possession – pour lesquels un privilège de non-divulgation est invoqué – et qui sont pertinents à un fait, une question ou une forme de redressement demandée en l’occurrence, y compris les faits, les questions et les formes de redressement mentionnés par d’autres parties en vertu de cette règle;

f) les noms des divers témoins – autres que les témoins experts – qu’elle a l’intention de citer ainsi qu’un résumé du témoignage prévu de chacun d’eux.

[13] Le paragraphe 6(4) des Règles du Tribunal prévoit que lorsqu’une partie a fait mention d’un document pour lequel aucun privilège de non-divulgation n’est invoqué, elle doit en fournir une copie à toutes les autres parties.

[14] Le paragraphe 6(5) des Règles du Tribunal prévoit essentiellement que la divulgation est une obligation continue et qu’une partie doit rectifier la situation si elle constate qu’elle ne s’est pas conformée correctement ou complètement à l’article 6 des Règles du Tribunal.

B. Courte analyse des alinéas 6(1)d), e) et f)

[15] Pour se conformer aux alinéas 6(1)d), e) et f) des Règles du Tribunal, les parties peuvent être tenues d’effectuer toutes les tâches suivantes, ou une partie de celles-ci :

  • chercher dans tous leurs documents pour trouver ceux qui, à leur avis, pourraient être liés à la plainte;
  • sélectionner et décider quels documents trouvés sont réellement liés à un fait, une question ou une forme de réparation visés par la plainte et mentionnés par d’autres parties (c’est-à-dire décider si un tel document est « potentiellement pertinent » à l’égard de la plainte – cette expression est précisée ci-dessous);
  • décider lesquels de ces documents ne sont pas visés par un privilège et peuvent immédiatement être divulgués à l’autre partie;
  • déterminer quels documents sont visés par un privilège et pourquoi;
  • chercher des témoins, discuter avec eux et décider quels témoins la partie a l’intention de citer, autres que les témoins experts;
  • préparer un résumé des témoignages prévus de chacun des témoins que la partie compte citer (résumé de témoignage anticipé).

[16] Pour se conformer à l’article 6 des Règles du Tribunal, il n’est pas suffisant de simplement chercher des documents et des témoins, mais il faut aussi décider quels documents seront utilisés et les divulguer, quels témoins seront cités et en divulguer le choix, et quels documents et témoins ne seront pas utilisés et, par conséquent, n’auront pas à être divulgués. Cette disposition n’entraîne pas seulement une recherche, mais aussi une prise de décisions et l’établissement d’une stratégie en préparation à l’instruction.

[17] Pour les motifs qui précèdent, dans la présente décision, j’appellerai le processus qui découle de l’article 6 des Règles du Tribunal le « processus de recherche pré-divulgation ».

V. Question : la norme applicable à la divulgation de documents prévue à l’article 6 des Règles du Tribunal

[18] Pour se conformer à l’article 6 des Règles du Tribunal précité, les parties doivent décider, entre autres, quels documents elles doivent divulguer et quels documents doivent être inscrits comme documents visés par un privilège.

A. La position de la Commission

[19] Le plaignant a soulevé la question de l’état de santé qui, à son avis, constitue une déficience au sens de la Loi.

[20] Comme le plaignant a renoncé à son droit de réclamer une indemnisation pour préjudice moral, la divulgation pertinente devrait se limiter aux renseignements médicaux portant sur la déficience nécessitant la prise de mesures d’adaptation dans le cadre du processus d’offre d’emploi mentionné dans la plainte.

B. La position du plaignant

[21] Dans les deuxième et troisième paragraphes de sa requête en confidentialité, le plaignant déclare :

  • reconnaître [traduction] « que toutes les parties et le Tribunal doivent nécessairement avoir accès aux renseignements médicaux personnels suffisamment détaillés du plaignant [...] pour déterminer » s’il avait une déficience au sens de la Loi et quelle incidence cette déficience avait pu avoir sur le déroulement d’un processus d’emploi au MPO et aux mesures d’adaptation connexes;
  • que les renseignements médicaux qu’il possède sont « potentiellement pertinents » à l’égard de la plainte;
  • au dernier paragraphe de la page 1 de la requête en confidentialité, le plaignant déclare aussi qu’il est d’avis que les renseignements médicaux pour lesquels il a revendiqué un privilège (c’est-à-dire les documents de l’annexe 2) sont « potentiellement pertinents ».

C. La position de l’intimé

[22] L’intimé soutient que, pour répondre à la plainte [traduction] « au nom de la CFP [Commission de la fonction publique] et du MPO » il doit « recueillir et examiner tous les documents dont le gouvernement a le contrôle qui peuvent être potentiellement pertinents à l’égard de la plainte. Les documents potentiellement pertinents comprennent ceux qui peuvent contenir des renseignements sur la déficience du plaignant et tout état de santé connexe » (réponse à la requête, paragraphe 30).

D. Analyse : la norme applicable à la divulgation de documents prévue à l’article 6 des Règles du Tribunal

[23] Le paragraphe 50(1) de la Loi exige que toutes les parties à une instruction aient la possibilité pleine et entière de faire valoir leur position.

Par conséquent, pour des raisons d’équité et dans la recherche de la vérité, il est dans l’intérêt public de veiller à ce que tous les éléments de preuve pertinents soient communiqués aux parties qui comparaissent devant le Tribunal (Rai, précitée, paragraphe 28).

[24] Comme il a été établi dans la décision Rai et la décision Gaucher, précitées, la norme acceptée pour la divulgation des éléments preuve, y compris les documents, au sens de l’article 6 des Règles du Tribunal, est celle de la pertinence potentielle des éléments de preuve.

[25] Pour qu’un document soit potentiellement pertinent, il doit exister « un lien rationnel entre un document et les faits, les questions ou les formes de redressement mentionnées par les parties » (Rai, précitée, au paragraphe 28, citant Guay, précitée, au paragraphe 42, et Association des employé(e)s de télécommunication du Manitoba inc. c. Manitoba Telecom Services, 2007 TCDP 28, au paragraphe 4).

Le seuil quant à la pertinence alléguée est peu élevé et la tendance est maintenant orientée vers une plus grande, et non une moins grande, communication. (Gaucher, précitée, paragraphe 11)

[26] Appliquant les principes susmentionnés à la présente plainte, tout d’abord, toutes les parties conviennent que le plaignant a mis en cause son état de santé en déclarant qu’il avait une déficience au sens de la Loi.

[27] Toutes les parties conviennent également que la norme applicable à la divulgation de documents prévue à l’article 6 des Règles du Tribunal est celle de la « pertinence potentielle » du document.

[28] Les parties ne contestent pas que les documents de l’annexe 2 sont pertinents.

[29] Je n’ai pas vu le texte des documents de l’annexe 2. Y sont cependant indiqués, pour chaque document, la date, une brève description du contenu, le nom de l’auteur du document et les noms des personnes à qui le document a été envoyé. Au paragraphe 6 de son exposé des précisions, le plaignant explique ce qu’il croit que les documents de l’annexe 2 établiront concernant l’état de santé qu’il prétend être une déficience.

[30] Je conclus que les documents de l’annexe 2 peuvent être potentiellement pertinents quant aux faits, aux questions et aux formes de redressement mentionnés par le plaignant.

VI. Question : privilège

[31] Le plaignant a revendiqué un privilège pour les documents de l’annexe 2. Ni son exposé des précisions ni ses documents de requête ne précisent le type de privilège qu’il revendique.

[32] Le paragraphe 50(4) de la Loi prévoit :

Restriction – [Le membre instructeur] ne peut admettre en preuve les éléments qui, dans le droit de la preuve, sont confidentiels devant les tribunaux judiciaires.

[33] Par conséquent, le paragraphe 50(4) rend inadmissible devant le Tribunal les renseignements protégés par la loi.

[34] Même si les documents de l’annexe 2 sont potentiellement pertinents, il faut déterminer si le privilège revendiqué par le plaignant à leur égard en empêche la divulgation.

A. Analyse : privilège

[35] Voici mes observations :

  1. Au paragraphe 6 de son exposé des précisions, le plaignant soutient que les documents de l’annexe 2 pour lesquels il revendique un privilège prouvent qu’il est [traduction] « atteint d’une déficience, établissent la gravité de la déficience (au départ, et au moment où des mesures d’adaptation ont été demandées) » et il demande ensuite « que le Tribunal protège ces documents de la divulgation, conformément à la Loi canadienne sur les droits de la personne ». Ce passage est suivi de la note de bas de page 2, qui cite l’article 52 de la Loi, précité;
  2. Dans sa requête en vue d’obtenir une ordonnance de confidentialité, le plaignant déclare qu’il est [traduction] « toujours prêt à divulgu[er] les renseignements médicaux protégés déjà identifiés » [c’est-à-dire, les documents de l’annexe 2 – je note].

[36] En revendiquant le privilège, le plaignant a communiqué sa position selon laquelle les documents de l’annexe 2 devraient rester confidentiels, même s’il reconnaît leur pertinence potentielle.

[37] Le plaignant lui-même a offert de divulguer les documents de l’annexe 2, sous condition que le Tribunal impose une protection de confidentialité à la divulgation de ces documents, conformément à l’article 52 de la Loi.

[38] Par conséquent, je conclus qu’il a renoncé conditionnellement au privilège.

[39] La présente décision porte sur la divulgation avant l’audience et non sur l’admissibilité de la preuve à l’audience. Comme le plaignant a conditionnellement renoncé à sa revendication du privilège, il n’est pas nécessaire, dans le cadre de la présente requête, de déterminer si les documents de l’annexe 2 sont réellement protégés par la loi.

VII. Question : confidentialité

A. Position de la Commission

  • Les renseignements médicaux sont de nature délicate, ce qui justifie qu’une ordonnance de confidentialité soit imposée.
  • Les ordonnances de confidentialité rendues dans les décisions Leslie Palm c. International Longshore and Warehouse Union, Local 500 et al, 2013 TCDP 1 [Palm #2] et Palm #3 peuvent servir de base à une ordonnance qui concilie la nécessité de garantir la confidentialité des documents de l’annexe 2 avec celle de divulguer ces documents à l’intimé pour qu’il puisse préparer sa cause.
  • La Commission propose des modalités précises pour l’ordonnance de confidentialité éventuelle.

B. Position de l’intimé

[40] L’intimé justifie sa position, selon laquelle il n’existe pas de motifs pour que le Tribunal prononce l’ordonnance de confidentialité demandée par le plaignant, par les raisons suivantes.

  • Les documents de l’annexe 2 ne sont pas intrinsèquement confidentiels du seul fait qu’ils contiennent des renseignements médicaux.
  • Le plaignant a « tacitement » renoncé à son droit à la confidentialité des renseignements médicaux lorsqu’il a mis en cause son état de santé.
  • Le critère applicable pour juger de la confidentialité veut que les documents soient confidentiels tant objectivement que subjectivement, tel qu’il a été établi dans les décisions Apotex Inc. c. Wellcome Foundation Ltd. [1993] A.C.F. No 1117 [Apotex] et AB Hassle c. Canada (Ministre de la Santé nationale et du Bien-être social) [1998] A.C.F. N497 [AB Hassle].
  • L’opinion subjective d’un plaignant selon laquelle une telle ordonnance est justifiée n’est pas suffisante. La requête ne révèle pas un besoin objectif de maintenir la confidentialité.
  • Certains des renseignements concernant ce qu’est l’état de santé du plaignant se trouvent déjà dans les dossiers du Tribunal.
  • L’intimé a déjà certains des documents de l’annexe 2, parce que ces documents ont toujours été en possession des ministères fédéraux auxquels le plaignant les avait envoyés.
  • Une partie de l’ordonnance que demande le plaignant empêcherait l’intimé de consulter des employés du gouvernement fédéral au sujet des documents que l’intimé a en sa possession et empêcherait aussi ce dernier d’utiliser ces documents dans le cadre de consultations avec des tiers, tels que des experts ou d’autres témoins possibles.
  • L’intimé soutient que, si le Tribunal rend une ordonnance de confidentialité au sujet des documents de l’annexe 2, l’ordonnance ne devrait s’appliquer à ces documents seulement [traduction] « au moment où ils sont divulgués aux autres parties au cours du processus de divulgation prévu au paragraphe 6(4) des Règles du Tribunal » [souligné par l’intimé].
  • Si le Tribunal conclut que les documents de l’annexe 2 sont confidentiels, l’intimé accepte la majorité des modalités présentées par la Commission.

C. Analyse : confidentialité

[41] Dans les décisions citées par l’intimé à l’appui de son argument selon lequel le critère applicable pour établir si un document est confidentiel est aussi bien subjectif qu’objectif, les intérêts dont il était question étaient des biens commerciaux, tels que des brevets et des droits de propriété intellectuelle exclusifs. Le préjudice éventuellement subi si ces documents étaient divulgués était un préjudice commercial, monétaire.

[42] Il est raisonnable d’affirmer que, dans un recours civil portant sur des droits commerciaux et des droits de propriété, les Cours appliquent des normes pour déterminer si ces droits nécessitent une protection de confidentialité différentes des normes qui sont applicables aux affaires relatives aux droits de la personne. Cela est d’autant plus vrai pour un tribunal administratif dont la loi constitutive – la LCDP – énonce les normes applicables.

[43] Ainsi est-ce la norme de confidentialité prévue à l’article 52 de la LCDP, précité, qui s’applique à la requête en l’espèce.

[44] Même lorsque des renseignements personnels sensibles sont considérés potentiellement pertinents aux fins de divulgation, l’article 52 de la Loi donne au Tribunal le pouvoir de les protéger, tant qu’il est satisfait aux critères des alinéas 52(1)c) ou 52(1)d).

[45] Le plaignant n’a pas, tacitement ou explicitement, renoncé à la confidentialité. Il a renoncé au privilège, comme je l’ai mentionné, mais à condition que les documents de l’annexe 2 restent confidentiels en application de l’article 52 de la Loi.

[46] Même si le plaignant ne travaille plus au MPO, il travaille toujours dans un ministère fédéral. Après avoir évalué les documents de l’annexe 2, comme mentionné ci-dessus, je conclus qu’ils contiennent des renseignements médicaux personnels qui sont de nature privée et sensible. Si ces renseignements se trouvaient dans le domaine public, sans protection de la confidentialité, il est raisonnable de conclure que la situation pourrait causer un préjudice au plaignant à son travail, et avoir des répercussions négatives sur sa vie professionnelle et sa vie personnelle. Aussi le plaignant subirait-il un préjudice indu si les documents de l’annexe 2 se retrouvaient dans le domaine public.

[47] Il n’est pas nécessaire que chaque détail de l’état de santé pertinent du plaignant ainsi que des détails médicaux qui ne sont pas liés à cet état de santé se retrouvent dans le domaine public pour que le déroulement et le résultat de l’instruction reste accessibles et compréhensibles pour le public.

[48] De plus, le fait que l’intimé ou ses clients ou d’autres ministères fédéraux possèdent une partie des documents de l’annexe 2 ne diminue pas la nature personnelle, sensible, privée et confidentielle de ces documents.

[49] Comme le Tribunal l’a déclaré dans l’affaire Rai, précitée, « [d]ans les cas où le Tribunal a ordonné la divulgation de dossiers médicaux, il a généralement imposé des conditions à la divulgation afin de protéger la vie privée et la confidentialité de l’information » (Rai, paragraphe 30).

[50] Je suis convaincue, pour tous les motifs qui précèdent, que si les documents de l’annexe 2 étaient rendus publics dans le cadre de l’instruction ou en raison d’une instruction publique, il y a, au sens de l’alinéa 52(1)c) de la Loi, un risque sérieux de divulgation, dans ces documents, de renseignements médicaux personnels du plaignant, et ainsi de préjudice indu pour lui, de sorte que la nécessité d’empêcher leur divulgation, autrement qu’aux conditions posées dans l’ordonnance ci-après, dans son intérêt l’emporte sur l’intérêt qu’a la société à ce que l’instruction soit publique.

[51] Comme les documents de l’annexe 2 contiennent des renseignements qui peuvent être potentiellement pertinents pour la divulgation, les autres parties ont le droit de les voir afin d’avoir la possibilité pleine et entière de défendre leurs arguments, tel que le prévoit le paragraphe 50(1) de la Loi.

[52] En ce qui a trait à l’exigence imposée au plaignant de divulguer les documents de l’annexe 2 aux autres parties, cette divulgation devra respecter les conditions établies dans la présente décision, qui visent à protéger la confidentialité des renseignements contenus dans les documents en question.

[53] Dans la décision Palm #3, précitée, le Tribunal a élargi l’ordonnance de confidentialité rendue dans la décision Palm #2, précitée, pour permettre au président d’un intimé et à deux particuliers intimés de voir les dossiers médicaux de la plaignante, dans la mesure nécessaire afin que les avocats puissent obtenir des instructions éclairées et puissent fournir des conseils.

[54] Dans la présente instruction, il n’est pas productif à cette étape d’ordonner qu’une partie dépose une requête ou demande des directives supplémentaires au Tribunal pour que les avocats puissent discuter des documents de l’annexe 2 avec leurs clients leur donner des instructions. Il faudra certainement le faire au moment venu et, comme ce fut le cas dans la décision Palm #3, le Tribunal peut traiter de ce processus inévitable dans le cadre de la présente décision. Il en va de même pour les experts médicaux que l’avocat de l’intimé ou le plaignant pourraient consulter. La décision ci-dessous reflète cette conclusion.

D. Renseignements médicaux connexes

[55] Au paragraphe 30 de la réponse de l’intimé à la requête, l’intimé soutient que, pour répondre à la plainte, le procureur général doit [traduction] « recueillir et examiner tous les documents que le gouvernement fédéral a en sa possession et qui sont potentiellement pertinents à l’égard de la plainte. Les documents pertinents comprennent ceux qui pourraient contenir des renseignements au sujet de la déficience du plaignant et de tout état de santé connexe » [non souligné dans l’original].

[56] Dans l’intérêt de protéger la confidentialité des renseignements médicaux du plaignant dans le cadre de l’instruction, conformément à l’alinéa 52(1)c) de la Loi, dans l’éventualité où l’intimé ou une autre partie entend divulguer des renseignements médicaux potentiellement pertinents au sujet de la déficience et de tout état de santé connexe du plaignant qui ne font pas partie des documents de l’annexe 2 (les « renseignements médicaux connexes »), la présente décision sur requête et les ordonnances qu’elle contient s’appliquent, avec les adaptations nécessaires, aux renseignements médicaux connexes.

E. Transmission électronique de documents

[57] La transmission des documents de l’annexe 2 et de tout renseignement médical connexe et les communications au sujet de ces documents entre l’intimé et ses clients et d’autres ministères fédéraux impliqués dans la plainte, et entre la Commission et ces mêmes entités, sont des communications entre des institutions fédérales au sein du gouvernement du Canada. Il s’agit de communications internes du gouvernement du Canada qui sont régies par la Loi sur la protection des renseignements personnels.

[58] Il convient également de respecter les règlements, procédures et protocoles de sécurité gouvernementaux qui régissent les transmissions électroniques, y compris les courriels, aux entités susmentionnés, dont l’intimé et la Commission, et entre elles. Les règlements, procédures et protocoles de sécurité incluent le chiffrement, l’utilisation de mots de passe, la classification d’un document comme étant « Protégé A » et « Protégé B », les désignations de confidentialité et d’autres protocoles.

[59] Il serait déraisonnable d’interdire à l’intimé et à la Commission d’utiliser des transmissions électroniques, dans l’environnement de travail actuel, lorsque leur utilisation est omniprésente et lorsque des protections de sécurité sont disponibles et obligatoires, car cela entraverait la capacité de l’intimé de préparer sa défense et empêcherait la Commission d’effectuer le travail qu’elle juge nécessaire pour aider à l’instruction de la plainte.

[60] Néanmoins, la confidentialité des documents de l’annexe 2 et des renseignements médicaux connexes doit être respectée dans toutes les communications électroniques (et les autres communications) entre les entités susmentionnées, entre l’intimé et la Commission, et entre ces derniers et des tiers autorisés. Pour respecter la confidentialité, les protocoles, règlements et procédures de sécurité requis devront être suivis pour toutes les transmissions électroniques portant sur les documents de l’annexe 2 et les renseignements médicaux connexes.

[61] Cependant, les transmissions par télécopieur des documents de l’annexe 2 et des renseignements médicaux connexes ne sont permises que si :

  1. elles sont effectuées à partir d’une application de télécopie d’un ordinateur à un télécopieur dans un ordinateur;
  2. tous les règlements, procédures et protocoles applicables auxquels l’intimé ou la Commission sont assujettis, selon le cas, sont suivis lors de la transmission par télécopieur;
  3. la page couverture porte la mention que les documents sont régis par la Loi sur la protection des renseignements personnels et font l’objet d’une ordonnance de confidentialité du Tribunal.

[62] Les exigences susmentionnées pour les transmissions par télécopieur tiennent compte du fait que si une transmission par télécopieur est envoyée à un télécopieur autonome, à moins que le destinataire désigné soit sur place pour récupérer la télécopie, cette dernière peut être récupérée par n’importe qui dans le service ou le bureau du destinataire.

VIII. Question : ordonnance de confidentialité au sens de l’article 52 et la Loi sur la protection des renseignements personnels

[63] Dans sa réponse du plaignant aux réponses de l’intimé et de la Commission à la requête, le plaignant soutient qu’il existe une lacune dans la Loi sur la protection des renseignements personnels, plus particulièrement qu’elle [traduction] « comprend peu de mesures ou de processus précis qui doivent être suivis pour assurer la confidentialité » et que le Tribunal devrait tenir compte de ce fait en rendant une ordonnance de confidentialité.

[64] Le plaignant a joint trois documents du Commissariat à la protection de la vie privée du Canada (CPVP) à l’appui de ces observations. Ces documents sont les suivants :

  • Mémoire de l’intervenant, Commissaire à la protection de la vie privée du Canada (le « mémoire ») dans l’arrêt Bernard c. Canada, 2014 CSC 13, Dossier n34819 [Bernard];
  • Document d’orientation – Divulgation de renseignements personnels par voie électronique dans les décisions des tribunaux administratifs, février 2010(le « document d’orientation du CPVP »);
  • Remarques de Chantal Bernier, commissaire adjointe à la protection de la vie privée au Canada (CAPVP), au premier forum sur la technologie judiciaire,22 septembre 2010 (les « remarques de la CAPVP »).

[65] J’ai lu ces pièces jointes. Les lacunes que j’ai décelées à partir des documents sont les suivantes :

  • une personne qui est d’avis qu’une institution fédérale a contrevenu à la Loi sur la protection des renseignements personnels en recueillant, utilisant ou divulguant indûment ses renseignements personnels n’a aucun recours judiciaire;
  • la Loi sur la protection des renseignements personnels ne comprend aucune disposition d’indemnité pécuniaire pour les préjudices découlant d’une telle violation et ne comprend aucune sanction pécuniaire pour une telle violation;
  • la Loi sur la protection des renseignements personnels ne régit pas les syndicats de la fonction publique;
  • certains tribunaux administratifs ont des politiques claires restreignant la divulgation de renseignements personnels dans leurs décisions publiées en ligne, et certains n’en ont pas. Pour les tribunaux qui n’en ont pas, il existe un risque que les renseignements sensibles et personnels d’un particulier, qui pourraient ne pas être pertinents quant à la publication de la décision, deviennent néanmoins facilement accessibles au public.

[66] Les réponses à la requête de l’intimé et de la Commission ne traitaient pas de la Loi sur la protection des renseignements personnels.

A. Analyse : l’ordonnance de confidentialité au sens de l’article 52 et la Loi sur la protection des renseignements personnels

[67] Le Tribunal n’a pas compétence pour corriger les lacunes de la Loi sur la protection des renseignements personnels. L’article 29 de la Loi sur la protection des renseignements personnels prévoit la procédure à suivre pour déposer une plainte en cas de violation.

[68] Le Tribunal rend une ordonnance de confidentialité seulement si les circonstances particulières de la situation satisfont aux exigences de l’article 52 de la LCDP. Même si elle répond à une lacune constatée dans la Loi sur la protection des renseignements personnels, l’ordonnance de confidentialité du Tribunal doit satisfaire aux exigences de l’article 52 en matière de confidentialité.

[69] Les observations du Commissaire à la protection de la vie privée sur le fait que la Loi sur la protection des renseignements personnels ne prévoit aucun recours judiciaire ni indemnité pécuniaire en cas de violation de ses dispositions en matière de collecte, d’utilisation et de divulgation de renseignements personnels, n’ont aucune pertinence au regard des exigences posées par l’article 52 de la LCDP et le Tribunal ne peut ordonner de mesures correctrices.

[70] Aucun syndicat de la fonction publique n’est partie à la présente plainte.

[71] La question de la protection de la vie privée en ce qui concerne la publication en ligne des décisions n’est pas actuellement pertinente à l’égard de la requête. La décision sur requête ne sera pas publiée en ligne tant que la question de l’anonymisation de la plainte ne sera pas tranchée. Cette question a été soulevée auparavant, et il a été décidé que la Commission pourrait la soulever à la fin de l’audience. Bien que la Commission ne comparaisse plus à l’audience, la question de l’anonymisation reste toujours d’actualité.

B. Analyse : l’article 152 des Règles des Cours fédérales

[72] Généralement, les Règles des Cours fédérales ne lient pas le Tribunal, sauf s’il y est fait référence dans les Règles du Tribunal. La seule référence aux Règles des Cours fédérales qui est faite dans les Règles du Tribunal se trouve au paragraphe 9(7). Ce paragraphe incorpore l’article 57 de la Loi sur les Cours fédérales, L.R.C. 1985, ch. F-7 (la « Loi sur les Cours fédérales ») et le formulaire 69 des Règles des Cours fédérales. Par conséquent, l’article 152 des Règles des Cours fédérales ne lie pas le Tribunal.

[73] Cependant, si le Tribunal décide qu’il est raisonnable d’intégrer une partie quelconque de l’article 152 des Règles des Cours fédérales dans la présente décision, selon les circonstances, l’indépendance que lui confère l’article 52 de la LCDP l’y autorisera.

C. Analyse : la Charte

[74] Le plaignant soutient que l’intimé, dans le cadre de son processus de recherche pré-divulgation, s’est lancé dans une « recherche à l’aveuglette » qui constitue aussi une recherche déraisonnable, en violation de l’article 8 de la Charte. Cette disposition est ainsi libellée :

Chacun a droit à la protection contre les fouilles, les perquisitions ou les saisies abusives.

[75] L’intimé est le procureur général du Canada. Je suppose, aux fins de la présente décision, que l’intimé a reçu un avis de l’intention du plaignant d’invoquer la Charte, conformément au paragraphe 9(7) des Règles du Tribunal.

[76] Le plaignant n’a présenté aucun autre argument ni aucune jurisprudence sur cette question. L’intimé et la Commission n’ont pas abordé cette question.

[77] Aucune preuve ne vient étayer l’argument du plaignant fondé sur la Charte. Je ne peux pas conclure que le processus de recherche pré-divulgation enfreint les droits du plaignant enchâssés dans l’article 8 de la Charte.

IX. Analyse : la demande de réparation rétroactive

[78] Le plaignant a demandé, à titre de réparation, que tout manquement à une ordonnance découlant de la présente requête qui aurait déjà eu lieu soit signalé au Tribunal et au plaignant pour évaluation et examen des risques qui en découleraient.

[79] L’avocat de l’intimé a déclaré dans ses documents de requête et lors de la conférence préparatoire téléphonique du 27 février 2014 qu’il avait obtenu une partie des documents de l’annexe 2 dans le cadre de sa recherche pré-divulgation auprès de ses ministères fédéraux clients. Les clients avaient en leur possession de nombreux documents de l’annexe 2, que le plaignant leur avait présentés lors de périodes en apparence pertinentes à l’égard de la plainte.

[80] L’avocat de l’intimé a aussi déclaré dans ses documents de requête et lors de la conférence préparatoire téléphonique susmentionnée que, lorsque le Tribunal avait ordonné le gel temporaire du processus de recherche pré-divulgation, l’avocat de l’intimé s’était conformé à toutes les ordonnances.

[81] Bien que le Tribunal, dans le cadre de la présente requête, doive examiner certaines questions de façon rétroactive, il ne peut pas rendre d’ordonnance en vue d’officiellement examiner ou évaluer, de façon rétrospective, s’il y a eu « manquement » dans le passé à l’ordonnance rendue ci-dessous. Y procéder porterait atteinte au privilège relatif au litige, qui est expliqué ci-dessous. Ce serait s’immiscer dans la « zone de confidentialité » assurée à l’intimé en préparation du litige. L’intimé ne peut pas être forcé à fournir ces renseignements. Par conséquent, le Tribunal ne peut pas se prononcer sur un tel manquement préexistant ou ordonner une réparation.

X. La compétence du Tribunal pour contrôler et pour surveiller le processus de recherche pré-divulgation

[82] La présente décision découle de la requête en confidentialité du plaignant.

[83] De plus, le plaignant craint qu’en suivant son processus de recherche pré-divulgation, l’intimé se soit lancé dans une « recherche à l’aveuglette » incontrôlée des renseignements médicaux du plaignant, y compris les documents de l’annexe 2. Cette démarche compromettrait grandement la confidentialité des documents dès lors que, du fait de l’absence de mécanismes de sécurité adéquats, elle permettrait à un nombre incalculable d’employés non identifiés de ministères fédéraux, y compris des employés non identifiés dans les ministères qui sont les clients de l’intimé dans le cadre de la présente plainte, d’avoir accès, de manipuler, d’utiliser et de diffuser à d’autres les renseignements et de divulguer le fait que l’intimé cherche ces renseignements, sans restriction.

A. La conférence préparatoire téléphonique du 27 février 2014

[84] La conférence préparatoire téléphonique du 27 février 2014 a été tenue afin de discuter des préoccupations continues du plaignant.

[85] Pendant cette conférence préparatoire téléphonique, le plaignant a déclaré qu’il avait su que deux personnes dans le ou les ministères représentés par l’intimé en l’espèce savaient, ou avaient « appris » que des personnes cherchaient à obtenir des renseignements au sujet du plaignant. Il a aussi déclaré qu’il ne serait peut-être pas en mesure de le prouver. Il n’a pas fourni les noms de ces deux personnes. Cette allégation ne se trouve pas dans les documents de requête.

[86] L’intimé et la Commission n’ont pas relevé cette allégation pendant la conférence préparatoire téléphonique.

[87] Je ne dispose pas de preuves suffisantes pour conclure que l’allégation est fondée.

[88] Il a été expliqué au plaignant que la Loi sur la protection des renseignements personnels s’applique à ses renseignements médicaux, y compris les documents de l’annexe 2, et aux ministères fédéraux qui possèdent ces renseignements, y compris dans le cadre du processus de recherche pré-divulgation. Toute personne ayant communiqué les renseignements susmentionnés au plaignant a contrevenu à la Loi sur la protection des renseignements personnels. J’analyserai la Loi sur la protection des renseignements personnels de manière plus approfondie plus loin.

[89] Le plaignant a néanmoins demandé au Tribunal d’ordonner que toute personne avec qui une partie communique durant le processus de recherche pré-divulgation au sujet des documents de l’annexe 2 et de l’état de santé du plaignant soit contrôlée, que son identité soit révélée aux autres parties et qu’elle restreinte dans l’utilisation qu’elle fait des renseignements médicaux afin de protéger les renseignements médicaux du plaignant pendant le processus de recherche pré-divulgation.

B. La position de l’intimé

  • Le Tribunal n’a pas compétence sur les documents dont le gouvernement fédéral a la possession ou le contrôle [traduction] « avant leur divulgation aux autres parties en application du paragraphe 6(4) des Règles de procédure, même si ces documents contiennent des renseignements médicaux ».
  • L’article 52 de la Loi autorise le Tribunal à « rendre toute ordonnance qu’il juge nécessaire pour assurer la confidentialité de l’instruction » [souligné par l’intimé].Les documents dont une partie a le contrôle ne relèvent de l’instruction que lorsqu’ils sont divulgués aux autres parties ou déposés en preuve [traduction] « devant le Tribunal ».Par conséquent, l’article 52 ne donne pas au Tribunal la compétence d’ordonner la confidentialité des documents qui « ne sont pas divulgués aux autres parties ou déposés en preuve ». En particulier, le Tribunal n’a pas compétence pour « restreindre la façon dont le procureur général recueille, examine et/ou utilise les documents qui sont actuellement contrôlés par le gouvernement fédéral ».
  • Une ordonnance restreignant ainsi l’intimé contreviendrait à son privilège relatif au litige.

C. Analyse : la compétence du Tribunal pour contrôler et pour surveiller le processus de recherche pré-divulgation

a. Analyse : le processus de recherche pré-divulgation et la Loi sur la protection des renseignements personnels

[90] L’intimé, le MPO, la CFP, le ministère de la Défense nationale et le ministère des Anciens Combattants (ACC), ainsi que la Commission, sont tous des « institutions fédérales » au sens de l’article 3 de la Loi sur la protection des renseignements personnels [1] , qui s’applique donc à eux.

[91] Au sens de l’article 3 de la Loi sur la protection des renseignements personnels, le plaignant est un « individu identifiable » et les documents de l’annexe 2 constituent des « renseignements personnels » [2] .

[92] Toujours au sens de l’article 3 de la Loi sur la protection des renseignements personnels, la présente instruction est une « décision [...] touchant directement [3] » le plaignant. Par conséquent, les parties souhaitent utiliser les documents de l’annexe 2 pour des « fins administratives » au sens de l’article 3 [4] .

[93] Je conclus que les documents de l’annexe 2 et leur transmission de la part des ministères visés à l’intimé lors du processus de recherche pré-divulgation, et vice-versa, sont gouvernés par la Loi sur la protection des renseignements personnels, tout comme le sont l’intimé et les ministères qu’il représente dans le cadre de la présente instruction, ainsi que la Commission. Je conclus aussi que les documents de l’annexe 2, leur traitement et toute demande d’obtention de ces documents ne peuvent être traités, dans le cadre du processus de recherche pré-divulgation, que conformément à la Loi sur la protection des renseignements personnels.

[94] Par conséquent, aucun employé du gouvernement fédéral ou représentant d’un des ministères fédéraux touchés par le processus de recherche pré-divulgation ne peut divulguer les renseignements personnels d’un individu, y compris le plaignant, sauf conformément à la Loi sur la protection des renseignements personnels, et toute personne qui agit autrement contrevient à cette loi.

[95] Les contraventions à la Loi sur la protection des renseignements personnels peuvent entraîner une responsabilité indépendante et peuvent faire l’objet d’une enquête de la part du Commissaire à la protection de la vie privée, en application de l’article 29 [5] .

[96] Si l’intimé poursuit son processus de recherche pré-divulgation dans l’un des ministères fédéraux régis par la Loi sur la protection des renseignements personnels dans le but d’obtenir des renseignements médicaux ou de rencontrer des témoins au sujet de tels renseignements, j’ordonne à l’avocat et aux parajuristes de l’intimé d’informer chaque individu avec qui l’avocat de l’intimé et ses parajuristes communiquent que :

  1. la Loi sur la protection des renseignements personnels régit les renseignements demandés ainsi que leur divulgation, utilisation, diffusion, entreposage et traitement;
  2. les renseignements demandés sont confidentiels et assujettis à la présente décision;
  3. les personnes en question ne doivent pas discuter des renseignements, ni les communiquer de quelque façon que ce soit, avec d’autres personnes, sauf en conformité avec la Loi sur la protection des renseignements personnels, y compris, notamment, le fait que de tels renseignements ont été demandés;
  4. une responsabilité est imposée par la Loi sur la protection des renseignements personnels aux individus et/ou au ministère fédéral pour toute violation de cette loi, y compris toute violation des articles 7 et 8 [6] .

b. Analyse : le processus de recherche pré-divulgation et le privilège relatif au litige

[97] Le Tribunal n’a pas un pouvoir illimité de surveiller, de contrôler et de réglementer toutes les actions préparatoires entreprises par une partie relativement à l’instruction.

[98] Il en est ainsi parce que l’intimé (c’est-à-dire le procureur général du Canada et les ministères qui sont ses clients dans la présente plainte) et le plaignant ont tous deux le droit d’invoquer le privilège relatif au litige.

[99] Dans l’arrêt Blank c. Canada (Ministre de la Justice), 2006 CSC 39, le litige portait sur la Loi sur l’accès à l’information, L.R.C. 1985, ch. A-1, et le privilège relatif au litige. La Cour suprême du Canada conclu que le privilège relatif au litige constituait une notion distincte.

[100] La Cour suprême a défini le privilège relatif au litige comme étant une branche du secret professionnel de l’avocat (Blank, précité, au paragraphe 28, et répété au paragraphe 40) :

Le privilège relatif au litige est basé sur le besoin d’une zone protégée destinée à faciliter, pour l’avocat, l’enquête et la préparation du dossier en vue de l’instruction contradictoire.

[101] La Cour suprême a déclaré au paragraphe 34 :

L’objet du privilège relatif au litige est, je le répète, de créer une « zone de confidentialité » à l’occasion ou en prévision d’un litige.

[102] Les parties qui agissent pour leur propre compte ont aussi droit au privilège relatif au litige.

[103] Le fait d’exiger d’une partie qu’elle révèle sa préparation et sa stratégie à son adversaire dans un litige, y compris les noms des personnes à qui cette partie parle, la façon dont elle compile ses documents et prend des décisions au sujet de ses documents et de ses témoins contreviendrait au privilège relatif au litige de cette partie.

[104] De plus, toute tentative non régulée de surveiller, de contrôler et de réglementer la préparation avant l’audience d’une partie enfreindrait le paragraphe 50(4) de la LCDP, précité.

[105] En outre, le paragraphe 50(1) de la Loi prévoit que toutes les parties à une instruction doivent avoir « la possibilité pleine et entière de comparaître et de présenter [...] des éléments de preuve ainsi que leurs observations ». Les tentatives intrusives de surveiller, de contrôler et de réglementer la préparation avant l’audience d’une partie ne constituent pas seulement des manquements au privilège relatif au litige, mais aussi des violations du paragraphe 50(1) de la Loi.

[106] Le Tribunal doit mettre en balance le droit d’une partie à la confidentialité de ses renseignements personnels sensibles qui peuvent être pertinents quant à l’affaire et qui sont protégés par le privilège relatif au litige, avec les droits des autres parties de pleinement préparer leur cause, en application du paragraphe 50(1) de la Loi.

[107] Pour tous les motifs qui précèdent, le processus de recherche pré-divulgation est protégé par le privilège relatif au litige et, en application de ce privilège, l’intimé et l’avocat ne sont pas tenus de divulguer l’identité des personnes à qui l’avocat de l’intimé parle pendant le processus de recherche pré-divulgation, ni de divulguer la teneur de la discussion.

XI. Suspension temporaire terminée

[108] La présente décision mettra fin à la suspension temporaire du processus de recherche pré-divulgation qui a été ordonnée lors de la conférence préparatoire téléphonique du 27 février 2014 et qui a été prolongée lors de la conférence préparatoire téléphonique du 3 avril 2014.

[109] Une conférence préparatoire téléphonique est prévue pour le 19 août 2014. Si les parties le souhaitent, toute autre question portant sur la divulgation, les requêtes et les échéanciers supplémentaires qui y sont liés pourra être abordée.

[110] Il convient de noter que la présente décision porte uniquement sur la question de la divulgation des documents de l’annexe 2 et de tout renseignement médical connexe et ne porte pas sur l’admissibilité ou la confidentialité de ces documents à l’audience.

XII. Décision

  1. Sous réserve des modalités de la présente décision et en conformité avec celles-ci, le plaignant divulguera les documents de l’annexe 2 à l’avocat de l’intimé et à la Commission dans les cinq (5) jours ouvrables suivant la communication de la présente décision aux parties.Le plaignant peut donner une (1) copie papier des documents de l’annexe 2 à l’intimé et une copie papier à la Commission, s’il choisit cette méthode de divulgation.
  2. Chaque document inscrit dans la liste des documents de l’annexe 2 portera la mention « Confidentiel ».
  3. Les documents de l’annexe 2 seront déposés et entreposés séparément par les avocats, dans des enveloppes portant la mention « Confidentiel ».
  4. Si l’intimé et la Commission envoient les documents de l’annexe 2 ou en discutent par voie électronique, y compris, notamment, par courriel, à l’autre partie ou avec les personnes autorisées au paragraphe 7 ci-dessous, l’avocat doit s’assurer que :
    1. la confidentialité de ces transmissions est protégée au moyen des règlements, procédures et protocoles prévus par le procureur général, le ministère de la Justice et la Commission;
    2. si le chiffrement et l’accès par mot de passe n’est pas demandé pour de telles transmissions, alors l’avocat devra s’assurer que les transmissions soient chiffrées et verrouillées à l’aide d’un mot de passe;
    3. toutes ces transmissions seront désignées comme confidentielles;
    4. il y aura une note dans la transmission électronique précisant que les documents de l’annexe 2 et toute communication à leur sujet sont régis par la Loi sur la protection des renseignements personnels et par la présente ordonnance de confidentialité;
    5. le destinataire de la transmission électronique ne communique pas les documents de l’annexe 2 à quelqu’un d’autre.
  5. Les transmissions des documents de l’annexe 2 par télécopieur ne sont permises que si :
    1. elles sont transmises à partir d’une application de télécopie d’un ordinateur à un autre ordinateur;
    2. toutes ces transmissions par télécopieur sont protégées aux fins de confidentialité conformément aux alinéas 4a) à e) ci-dessus.
  6. La Commission et l’intimé se porteront garants de la confidentialité des documents et les entreposeront conformément aux règlements et aux directives du gouvernement du Canada applicables en matière de renseignements confidentiels et de documents confidentiels.
  7. Les documents de l’annexe 2 seront utilisés exclusivement aux fins de l’instruction.
  8. Seuls les avocats et les parajuristes de l’intimé et de la Commission pourront voir les documents de l’annexe 2 et ces documents ne seront pas divulgués à d’autres personnes sans que soit obtenue au préalable l’autorisation du Tribunal et qu’un avis préalable ait été donné au plaignant. Le paragraphe 8 ne s’applique pas :
    1. aux personnes donnant des instructions pour les clients des avocats, dans la mesure nécessaire pour que l’avocat puisse obtenir des instructions éclairées et fournir des conseils, pourvu que les avocats avisent chacune de ces personnes qu’elles ne doivent pas discuter des documents de l’annexe 2 avec quelqu’un d’autre que l’avocat et qu’elles ne doivent pas diffuser les documents de l’annexe 2 ou leur contenu à qui que ce soit, et que les avocats s’assurent que ces consignes sont respectées;
    2. le personnel de soutien aux litiges supervisé par les avocats, pourvu que les avocats avisent chaque employé de soutien qu’il ne doit pas discuter des documents de l’annexe 2 avec quelqu’un d’autre que l’avocat et qu’il ne doit pas diffuser les documents de l’annexe 2 ou leur contenu à qui que ce soit, et que les avocats s’assurent que ces consignes sont respectées;
    3. les experts médicaux retenus par les parties pour la présente instruction seulement; ces experts médicaux n’utiliseront pas les documents de l’annexe 2 à des fins autres que pour répondre à la présente instruction; avant que les experts médicaux reçoivent les documents de l’annexe 2, ils devront signer une entente de confidentialité avec la partie qui a retenu leurs services.
  9. Conformément à l’engagement que l’intimé a pris au paragraphe 39 de sa réponse à la requête, si l’intimé compte se fonder sur l’un des documents de l’annexe 2 à titre de pièce à l’audience, l’intimé avisera le plaignant dans un délai raisonnable avant l’audience.
  10. Si l’intimé effectue d’autres recherches pré-divulgation dans tout ministère fédéral régi par la Loi sur la protection des renseignements personnels, dans le but d’obtenir des renseignements médicaux connexes et des témoins à ce sujet, ou au sujet des documents de l’annexe 2, l’avocat ou les parajuristes de l’intimé aviseront, de préférence par écrit, toutes les personnes avec qui l’intimé aura communiqué que :
    1. la Loi sur la protection des renseignements personnels régit les renseignements recherchés, ainsi que leur divulgation, utilisation, diffusion, entreposage et traitement;
    2. les renseignements demandés sont confidentiels et assujettis à la présente décision;
    3. la personne en question ne peut pas discuter de quelque façon que ce soit des renseignements en question avec une autre personne, sauf conformément à la Loi sur la protection des renseignements personnels, y compris, notamment, du fait qu’il y a eu une demande pour obtenir de tels renseignements;
    4. la Loi sur la protection des renseignements personnels impose une responsabilité à la personne ou au ministère fédéral pour tout manquement à cette loi, y compris, notamment, toute contravention aux articles 7 et 8.
  11. Les photocopies des documents de l’annexe 2 sont limitées à une seule copie pour l’avocat et une seule copie pour chaque parajuriste, ainsi qu’une copie pour le personnel de soutien judiciaire, pour un maximum de quatre copies pour l’intimé et quatre copies pour la Commission.Les photocopies doivent être entreposées conformément aux paragraphes 2, 3 et 6 et doivent être détruites à la fin de l’instruction.
  12. La présente décision et les ordonnances qu’elle contient s’appliquent, avec les adaptations nécessaires, à tout renseignement médical connexe.
  13. La suspension temporaire du processus de recherche pré-divulgation imposée le 27 février 2014 et prolongée le 3 avril 2014 est levée. Cette décision s’applique à partir de la date à laquelle le Tribunal communique la présente décision sur requête aux parties.

[111] Si l’une des parties souhaite obtenir plus de précisions au sujet des documents de l’annexe 2 divulgués, elle peut demander des directives au Tribunal.

Signée par

Olga Luftig

Membre du Tribunal

Ottawa, Ontario

Le 18 août 2014



[1] Loi sur la protection des renseignements personnels, L.R.C. (1985), ch. P-21

La partie pertinente de l’article 3 qui définit « institution fédérale » prévoit que cette expression signifie

« [t]out ministère ou département d’État relevant du gouvernement du Canada, ou tout organisme, figurant à l’annexe ».

[2] L’article 3 prévoit aussi, en partie, que les « renseignements personnels » sont des renseignements, quels que soient leur forme et leur support, concernant un individu identifiable, notamment :

b) les renseignements relatifs à son éducation, à son dossier médical, à son casier judiciaire ou à ses antécédents professionnels;

f) toute correspondance de nature, implicitement ou explicitement, privée ou confidentielle envoyée par lui à une institution fédérale, ainsi que les réponses de l’institution dans la mesure où elles révèlent le contenu de la correspondance de l’expéditeur;

g) les idées ou opinions d’autrui sur lui;

i) son nom lorsque celui-ci est mentionné avec d’autres renseignements personnels le concernant ou lorsque la seule divulgation du nom révélerait des renseignements à son sujet;

[3] L’article 3 prévoit que les « fins administratives », en ce qui a trait à l’utilisation de renseignements personnels concernant un individu, signifient l’usage de ces renseignements « dans le cadre d’une décision [...] touchant directement » cet individu.

[4] Ibid.

[5] L’article 29 est le véhicule par lequel un individu demande au Commissaire à la protection de la vie privée de faire enquête sur une plainte selon laquelle « des renseignements personnels [le] concernant et détenus par une institution fédérale ont été utilisés ou communiqués contrairement aux articles 7 ou 8 ».

 

[6] L’article 7, intitulé « Usage des renseignements personnels », prévoit : « À défaut du consentement de l’individu concerné, les renseignements personnels relevant d’une institution fédérale ne peuvent servir à celle-ci : a) qu’aux fins auxquelles ils ont été recueillis ou préparés par l’institution de même que pour les usages qui sont compatibles avec ces fins; b) qu’aux fins auxquelles ils peuvent lui être communiqués en vertu du paragraphe 8(2) ».L’article 8 est intitulé « Communication des renseignements personnels » : « Les renseignements personnels qui relèvent d’une institution fédérale ne peuvent être communiqués, à défaut du consentement de l’individu qu’ils concernent, que conformément au présent article. » Les parties du paragraphe 8(2) qui sont pertinentes quant à la présente décision sur requête sont : (2) « Sous réserve d’autres lois fédérales, la communication des renseignements personnels qui relèvent d’une institution fédérale est autorisée dans les cas suivants :

d) communication au procureur général du Canada pour usage dans des poursuites judiciaires intéressant la Couronne du chef du Canada ou le gouvernement fédéral.

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