Tribunal canadien des droits de la personne

Informations sur la décision

Contenu de la décision

Tribunal canadien
des droits de la personne

Tribunal's coat of arms

Canadian Human
Rights Tribunal

Référence : 2021 TCDP 5

Date : le 10 février 2021

Numéros des dossiers : T2458/1520; T2394/5319

[TRADUCTION FRANÇAISE]

Entre :

Frank Thomas Halcrow

le plaignant

- et –

Johnny Awasis

le plaignant

- et –

Commission canadienne des droits de la personne

la Commission

- et -

Service correctionnel du Canada

l'intimé

Décision sur requête

Membre : Jennifer Khurana


I. APERÇU

[1] La présente décision fait droit à la requête du Service correctionnel du Canada (le « SCC ») visant à ce que les plaintes déposées par Frank Halcrow et Johnny Awasis soient jointes et instruites ensemble. Elle fait également droit à la requête du SCC en vue d’obtenir une ordonnance exigeant que Frank Halcrow fournisse des précisions supplémentaires

II. CONTEXTE

[2] Johnny Awasis et Frank Halcrow s’identifient comme Autochtones. Ils purgent tous deux une peine d’une durée indéterminée dans un établissement fédéral et sont qualifiés de délinquants dangereux. Le SCC est l’organisme du gouvernement fédéral chargé d’administrer les peines d’emprisonnement de deux ans ou plus. M. Awasis et M. Halcrow prétendent que le SCC utilise des outils d’évaluation psychologique et actuarielle du risque qui sont empreints d’un préjugé culturel pour prendre des décisions à l’égard des détenus autochtones. Ils soutiennent que l’utilisation continue de ces outils pour évaluer le risque que présentent les détenus autochtones prive ces derniers de possibilités de libération et restreint leur capacité à accéder à des programmes de réadaptation appropriés.

[3] Les parties acceptent que les deux plaintes soient jointes. Les deux plaignants sont représentés par la même avocate. M. Halcrow a déposé un exposé des précisions, mais M. Awasis ne l’a pas encore fait. Le SCC a déposé une requête dans laquelle il demande au Tribunal d’ordonner à M. Halcrow de présenter un exposé des précisions modifié contenant des précisions supplémentaires, faute de quoi le SCC ne sera pas en mesure de répondre utilement à la plainte. Le SCC demande également au Tribunal d’ordonner que certains paragraphes, ainsi que les mots [traduction] « outils », « évaluations » et « renseignements » soient radiés de l’exposé des précisions de M. Halcrow.

[4] Les parties me demandent d’étudier d’abord leur requête visant la jonction des deux plaintes avant de statuer sur la requête du SCC.

QUESTIONS EN LITIGE

[5] Je dois trancher les deux questions suivantes dans le cadre de la présente décision :

1. Y a‑t‑il lieu de joindre les plaintes de M. Halcrow et de M. Awasis?

2. Est‑ce que M. Halcrow a énoncé avec suffisamment de détails les faits pertinents qu’il entend prouver pour appuyer sa plainte ou le Tribunal devrait‑il lui ordonner de fournir des précisions supplémentaires? De façon connexe, M. Halcrow devrait‑il radier certaines parties de son exposé des précisions comme le demande le SCC?

MOTIFS

Question 1 : La jonction des plaintes

[6] L’instruction des plaintes se fait de façon expéditive dans le respect des principes de justice naturelle (par. 48.9(1) de la Loi canadienne sur les droits de la personne (la « LCDP ») et al. 1(1)c) des Règles de procédure du Tribunal).

[7] Le Tribunal peut procéder à l’instruction commune des plaintes s’il le juge à propos au regard des faits et du droit (Lattey c. Compagnie de Chemin de fer canadien Pacifique, 2002 CanLII 45928, aux par. 11 et 12 [Lattey]).

[8] Pour décider s’il convient d’instruire des plaintes conjointement, le Tribunal doit tenir compte des éléments suivants :

  • 1) L’intérêt public qu’il y a à éviter la multiplicité des procédures, y compris la réduction des coûts, des délais, des inconvénients pour les témoins, du besoin de répéter la preuve et du risque de parvenir à des résultats contradictoires;

  • 2) Le préjudice que pourrait causer aux intimés une instruction commune, notamment en raison du prolongement de la durée de l’audience pour chaque intimé, étant donné la nécessité d’examiner des questions propres à l’autre intimé, ainsi que du risque de confusion que pourrait engendrer la présentation d’éléments de preuve n’ayant peut‑être pas rapport aux allégations mettant en cause particulièrement l’un ou l’autre intimé; et

  • 3) L’existence de questions de fait ou de droit communes.

Lattey, précitée, au par. 13.

[9] Ces facteurs n’étant pas exhaustifs, le Tribunal examinera au cas par cas s’il convient d’instruire les plaintes ensemble (Karas c. Société canadienne du sang et Santé Canada, 2020 TCDP 12 (CanLII), au par. 17 [Karas]). Le préjudice qui pourrait être causé ne doit pas uniquement être évalué sous l’angle des intimés (Karas, précitée, au par. 96). L’incidence de la jonction des plaintes doit être évaluée sous l’angle de toutes les parties.

[10] La jonction des plaintes ne requiert pas qu’elles soient tout à fait identiques (voir Andrews c. Affaires autochtones et Développement du Nord Canada, 2011 TCDP 22, au par. 10).

[11] À ce stade‑ci, je suis disposée à procéder à une instruction commune des plaintes, sur consentement des parties. Je pourrais toutefois revenir sur ma décision s’il appert que l’instance est indûment retardée ou si un préjudice est causé à l’une ou plusieurs des parties par le fait d’être ainsi liée l’une à l’autre. Les parties peuvent également déposer une requête visant à scinder ces plaintes.

[12] Compte tenu des renseignements dont je dispose, je n’ai qu’une compréhension limitée de la portée de chacune des plaintes, mais j’estime que l’application des facteurs énoncés dans la décision Lattey favorise leur jonction à ce stade‑ci.

[13] Il est dans l’intérêt public d’éviter les répétitions inutiles à tous les stades de la procédure, y compris à l’égard d’un processus de divulgation susceptible d’exiger un temps considérable et beaucoup de ressources alors que le même avocat agit dans les deux dossiers. Il n’est pas encore clair si M. Halcrow et M. Awasis contesteront le même sous‑ensemble d’outils d’évaluation du risque utilisés par le SCC, mais il y aura invariablement des chevauchements quant aux questions de fait et de droit compte tenu de la similarité du cadre général de leurs plaintes, y compris en ce qui concerne les réparations demandées. La jonction de leurs plaintes écartera le risque d’éléments de preuve et de conclusions contradictoires sur le même, ou essentiellement le même, comportement présumé. Elle pourrait également éviter aux témoins de répéter leur témoignage dans le cadre de deux audiences distinctes.

[14] Je suis d’avis qu’aucun préjudice ne sera causé aux parties par la jonction des plaintes à ce stade très précoce de la procédure. Seul M. Halcrow a déposé un exposé des précisions, qui, comme je le mentionnerai ci‑après, doit être modifié de manière à y inclure d’autres renseignements. Tout au long des étapes initiales de l’instruction, une partie pourra demander la modification de la présente ordonnance si elle estime que la jonction des plaintes la ralentit indûment. Si, par exemple, il s’avère que l’une des plaintes porte sur un nombre beaucoup plus élevé d’outils que l’autre ou si le dossier de M. Halcrow se complique d’un débat sur la portée de sa plainte, je demanderai aux parties comment elles entendent concilier ces différences. L’un des plaignants ne devrait pas subir un préjudice en raison de la portée et de l’ampleur de la plainte de l’autre plaignant.

[15] Tout dépendra de la manière dont les parties procéderont pour la suite des choses. Les parties doivent être prêtes à travailler ensemble pour que l’instance progresse de façon expéditive, notamment en coopérant durant le processus de gestion de l’instance et le processus de divulgation.

[16] Je présente ci‑après les prochaines étapes que devront suivre les parties, y compris les dates pour le dépôt des exposés des précisions.

Question 2 : La requête du SCC concernant la présentation de précisions supplémentaires

[17] Le SCC soutient que M. Halcrow n’a pas indiqué les outils qu’il juge discriminatoires, si bien que le SCC doit avancer des hypothèses sur la preuve à laquelle il doit répondre. D’après le SCC, les précisions fournies ne respectent pas les dispositions des Règles de procédure du Tribunal, qui exigent que les parties énoncent les faits pertinents qu’elles cherchent à établir à l’appui de leur cause et qu’elles indiquent leur position au sujet des questions de droit que soulève la cause ainsi que le redressement recherché (al. 6(1)). Le SCC affirme en outre que l’exposé des précisions de M. Halcrow est si vague et général qu’il pourrait englober tous les aspects de son processus d’administration des diverses peines d’emprisonnement de ressort fédéral qui ont été infligées à M. Halcrow depuis environ 1989.

[18] Monsieur Halcrow fait valoir que, dans son exposé des précisions, il conteste clairement [traduction] « toutes les évaluations psychologiques qui font appel ou ont fait appel à des outils actuariels pour l’évaluer et qui ont été utilisées pour évaluer le risque qu’il présente ». Il explique qu’il a intentionnellement employé des termes généraux pour refléter la façon dont le SCC recueille, compile et utilise les renseignements contenus dans ses dossiers, qui comprennent les évaluations du risque effectuées à l’aide d’outils actuariels.

[19] De plus, M. Halcrow prétend qu’il lui était impossible de fournir une liste préliminaire d’outils actuariels précis. Il doute que la liste d’outils figurant dans le rapport d’enquête de la Commission soit exhaustive. Autrement dit, il a besoin du processus de divulgation pour être en mesure d’identifier les outils sur lesquels le SCC s’est appuyé pour décider comment il serait traité comme détenu. M. Halcrow conteste l’affirmation du SCC selon laquelle il ne connaît pas la preuve à laquelle il doit répondre, car le SCC sait quels outils il a utilisés pour l’évaluer. Qui plus est, M. Halcrow soutient que c’est à l’audience que les parties débattront de tous les outils actuariels sur lesquels le SCC s’est appuyé pour évaluer son cas.

[20] La Commission a déposé une réponse à la requête du SCC dans laquelle elle indique qu’elle ne prend pas position sur la requête ou sur les ordonnances demandées. Cependant, la Commission convient qu’il serait approprié que M. Halcrow précise les outils d’évaluation psychologique et actuarielle qu’il conteste, dans la mesure où il est capable de le faire avant que le SCC divulgue les renseignements demandés. Par exemple, M. Halcrow pourrait contester : i) la totalité ou une partie des outils d’évaluation psychologique et actuarielle du risque utilisés par le SCC à son endroit; ii) la totalité ou une partie des outils d’évaluation psychologique et actuarielle du risque qui étaient en cause dans l’affaire Ewert c. Canada, 2018 CSC 30; et iii) la totalité ou une partie des autres outils d’évaluation psychologique et actuarielle du risque qu’utilise habituellement le SCC auprès des détenus autochtones. Dans son exposé des précisions, la Commission a également indiqué qu’elle s’attend à ce que M. Halcrow précise s’il conteste la totalité des outils d’évaluation actuarielle du risque utilisés par le SCC ou seulement les outils qui ont été utilisés à son endroit.

[21] La Commission soutient qu’il est loisible à M. Halcrow de préciser les outils qui, selon lui, seraient en cause – peu importe s’ils ont été identifiés ou non par le personnel de la Commission lors de la rédaction du rapport d’enquête. La Commission affirme que la portée de l’instruction du Tribunal est fonction de la plainte, de sa lettre de renvoi au Tribunal et de l’exposé des précisions, et non pas d’un rapport d’enquête rédigé par son personnel.

[22] Le SCC a répondu que M. Halcrow a mal compris le processus entourant l’exposé des précisions et l’a dénaturé. Le SCC soutient que M. Halcrow ne peut pas attendre l’étape de la divulgation et se livrer alors à une recherche à l’aveuglette pour tenter de définir ses allégations. En réalité, M. Halcrow pourra demander à modifier son exposé des précisions pour y inclure d’autres allégations s’il découvre de nouveaux éléments dans le cadre du processus de divulgation. Le SCC affirme que M. Halcrow a exacerbé le caractère ambigu de son exposé des précisions en répondant que les [traduction] « renseignements » pourraient inclure d’autres éléments que les outils actuariels, tels que « les observations cliniques, les facteurs socio‑économiques, les antécédents autochtones et les autres outils utilisés pour évaluer le risque ».

[23] Je suis d’accord. C’est dans son exposé des précisions que M. Halcrow doit préciser et expliquer ses allégations. Pour que la procédure soit équitable, le SCC doit être au courant de la preuve à laquelle il doit répondre (Brickner c. Gendarmerie royale du Canada, 2018 TCDP 2, au par. 34 [Brickner]). « Les détails sont donnés pour rendre clair ce qui ne l’est pas » et « [u]n défendeur n’est nullement tenu de deviner où veut en venir le demandeur » (Chen c. Canada, 2006 CF 389 (CanLII), aux par. 8 et 11).

[24] L’énoncé des précisions permet également d’esquisser les grandes lignes des éléments de preuve pertinents, y compris les documents devant être divulgués, les témoins potentiels des parties, ainsi que la portée de la preuve que les parties entendent présenter. Si l’énoncé des précisions ne contient pas des détails suffisants, il sera impossible pour l’intimé d’interroger les témoins potentiels ou de réunir les renseignements potentiellement pertinents, ce qui pourrait lui causer un préjudice (Brickner, précitée).

[25] Je n’accepte pas non plus l’argument de M. Halcrow selon lequel le SCC est au courant de la preuve à laquelle il doit répondre parce qu’il a accès à tous les dossiers de M. Halcrow. Cet argument suppose que les plaignants ne sont pas tenus de circonscrire ou de préciser leurs allégations dès lors que les organismes mis en cause ont déjà accès à l’entièreté de leur dossier. Je suis d’accord avec le SCC pour dire que compte tenu de l’énoncé des précisions et de la réponse du plaignant à la requête du SCC, la portée des « outils », des « renseignements » ou des « évaluations » potentiels pourrait être très vaste et dépasser l’utilisation d’instruments ou d’évaluations précis qui entrent dans la catégorie de « renseignements ». Le SCC n’a pas à préparer une réponse en devinant le sous‑ensemble de renseignements qui sont contestés, ou une réponse qui englobe tous les « renseignements » ou outils susceptibles d’avoir été litigieux pendant une incarcération qui dure depuis 1989.

[26] De plus, ce type d’approche ouverte nuit à l’efficacité de l’instruction. Les plaignants sont déjà préoccupés par la progression expéditive de l’instruction. Comme le mentionne le SCC, si M. Halcrow soutient que tous les aspects de son incarcération en établissement fédéral peuvent être pertinents pour identifier les outils ou les renseignements qui ont été utilisés pour prendre des décisions à l’égard de son niveau de risque ou de sa classification, il pourrait alors être nécessaire de divulguer plus de 27 000 pages de documents et peut‑être même plus. Je partage la préoccupation exprimée par le SCC : il ne sert à rien d’ouvrir grand la porte à l’étape de la divulgation pour s’évertuer à la refermer plus tard. Une telle approche pourrait entraîner des retards supplémentaires et des problèmes à l’étape de la production ou aux étapes ultérieures, y compris la nécessité de présenter des exposés des précisions modifiés.

[27] Je reconnais qu’il se peut que M. Halcrow ne connaisse pas ou ne soit pas capable de nommer tous les outils qui ont eu une incidence sur sa situation ou qu’il ne soit pas en mesure de fournir des détails sur toutes les décisions qui ont été prises à son égard par le système correctionnel. Toutefois, j’ai du mal à comprendre pourquoi après les quatre années du processus de plainte, et après l’enquête menée par la Commission, M. Halcrow ne peut pas faire de son mieux pour identifier certains des outils qu’il juge discriminatoires au regard de l’un ou de plusieurs des motifs qu’il a invoqués ou du moins pour formuler son exposé des précisions de manière à éviter un processus débridé. Comme le mentionne la Commission dans sa réponse, l’ajout d’autres précisions en plus des détails concernant la plainte serait approprié pour autant qu’il existe un lien suffisant entre ces précisions et la plainte.

[28] Je suis d’accord avec M. Halcrow pour dire qu’il n’est pas lié par le contenu d’un rapport d’enquête ou même par ce qu’il a initialement inclus dans son formulaire de plainte, qui ne tient pas lieu de plaidoirie. Ce sont les exposés des précisions qui énoncent les conditions plus précises de l’audience, dans la mesure où le fond de la plainte originale est respecté (voir Gaucher c. Forces armées canadiennes, 2005 TCDP 1, au par. 10; Casler c. La Compagnie des chemins de fer nationaux du Canada, 2017 TCDP 6 (CanLII), au par. 9).

[29] Cependant, je souscris également à l’argument du SCC selon lequel le mécanisme procédural approprié serait que M. Halcrow essaie de modifier son exposé des précisions s’il prend connaissance de renseignements dont il ne disposait pas lorsqu’il a présenté son exposé. Toutefois, pour que le processus de divulgation se déroule bien, le SCC devra coopérer sur ce front.

[30] Je n’accueille cependant pas la requête du SCC, qui demande au Tribunal d’ordonner à M. Halcrow de radier les mots [traduction] « évaluations », « outils » et « renseignements » de son exposé des précisions pour répondre aux exigences des Règles de procédure du Tribunal. Je conviens que des précisions supplémentaires sont nécessaires et que M. Halcrow doit modifier son exposé des précisions afin de décrire du mieux qu’il peut ses allégations ainsi que les réparations qu’il demande. M. Halcrow peut toutefois satisfaire à cette exigence sans qu’on l’empêche d’utiliser certains mots. C’est le fait de ne pas préciser ses allégations qui pose problème et non pas l’utilisation de certains mots. Je ne suis pas non plus disposée à ordonner à ce stade tout à fait préliminaire que certains paragraphes de l’exposé des précisions soient radiés au motif qu’ils sont trop généraux, car j’ordonne déjà à M. Halcrow de fournir des précisions supplémentaires. M. Halcrow peut utiliser les mots de son choix, à condition que les parties, et le Tribunal, sachent clairement sur quoi porte le présent dossier et connaissent les faits pertinents sur lesquels M. Halcrow s’appuie.

[31] En l’espèce, les questions de droit consistent à déterminer si M. Halcrow a établi, selon la prépondérance des probabilités, que les outils d’évaluation psychologique et actuarielle du risque qu’il conteste ne conviennent pas aux détenus autochtones et que l’utilisation de ces outils a des répercussions négatives sur les détenus autochtones. Pour trancher les questions en litige, je dois savoir quels sont les outils contestés et quelles répercussions ils auraient eues sur M. Halcrow. Le SCC doit d’abord savoir quels outils sont contestés pour avoir une possibilité raisonnable de répondre à la plainte, et les parties doivent pouvoir circonscrire et gérer efficacement les documents qu’elles divulguent et se préparer à produire leur preuve. Les parties n’avanceront pas plus rapidement si elles ne présentent pas clairement leurs arguments. Il vaut mieux qu’elles établissent clairement leurs arguments le plus rapidement possible.

[32] J’encourage les parties à travailler ensemble dans l’espoir de gagner du temps à long terme. Cet encouragement vaut également pour le processus de divulgation, au vu de la difficulté que M. Halcrow pourrait avoir à identifier les outils. Les parties pourraient, en adoptant une telle approche à ce stade‑ci, éviter d’avoir à présenter d’autres requêtes pour demander la modification des exposés des précisions, à demander au Tribunal de définir la portée de la plainte ou à demander une ordonnance de production. Il en va de même pour le dépôt de la plainte de M. Awasis. Nous ne voulons pas suivre la même voie dans son dossier, d’autant plus que les plaintes ont été jointes avec l’accord des parties.

Prochaines étapes

[33] Monsieur Halcrow présentera un exposé des précisions modifié dans lequel il identifiera précisément les outils d’évaluation psychologique et actuarielle du risque qui font l’objet de sa plainte et énoncera les faits pertinents qu’il entend établir à l’égard des répercussions négatives qu’il aurait subies. La date limite pour la présentation de l’exposé des précisions modifié de M. Halcrow est indiquée ci‑dessous, tout comme les dates pour le dépôt de l’exposé des précisions modifié de la Commission et le dépôt de l’exposé des précisions et des réponses du SCC.

[34] M. Awasis doit également présenter un énoncé des précisions dans le présent dossier. À la demande des parties, il présentera le sien propre, mais à la même date que l’exposé des précisions modifié de M. Halcrow.

[35] Après la réception des réponses et des répliques, le Tribunal convoquera une conférence préparatoire téléphonique. Les parties devraient être prêtes à proposer un plan pour gérer efficacement le processus de divulgation à l’égard des plaintes qui ont été jointes.

III. ORDONNANCE

[36] Les plaintes de M. Awasis et de M. Halcrow sont jointes. Une seule audience sera tenue. La présente décision sur requête peut être révisée, et la requête rouverte en cas de préoccupations liées à des retards dus au fait que les plaintes ont été jointes de la façon indiquée ci‑dessus. Les parties peuvent demander de revenir à des instructions séparées pour ce motif.

[37] La requête du SCC est accueillie en partie. M. Halcrow doit présenter un exposé des précisions modifié contenant des précisions supplémentaires, comme il est mentionné au paragraphe 33 ci‑dessus, au plus tard le 5 mars 2021. Plus précisément, il doit énoncer concrètement les outils d’évaluation psychologique et actuarielle du risque qu’il juge discriminatoires et qui auraient eu des répercussions sur lui, ainsi que les faits pertinents sur lesquels il entend s’appuyer pour faire valoir sa cause. La requête du SCC en vue d’obtenir une ordonnance exigeant que M. Halcrow radie certains mots et paragraphes de son exposé des précisions est rejetée.

[38] Monsieur Awasis doit également communiquer et déposer son exposé des précisions au plus tard le 5 mars 2021.

[39] Le SCC doit déposer ses exposés des précisions dans le cadre des deux plaintes au plus tard le 5 avril 2021. La Commission peut déposer un exposé des précisions modifié dans le cadre de la plainte de M. Halcrow à cette même date.

[40] La Commission, M. Halcrow et M. Awasis doivent déposer leurs réponses, le cas échéant, au plus tard le 12 avril 2021.

[41] Le Tribunal communiquera avec les parties afin d’organiser une conférence préparatoire téléphonique après la réception des réponses.

Signée par

Jennifer Khurana

Membre du Tribunal

Ottawa (Ontario)

Le 10 février 2021

 


Tribunal canadien des droits de la personne

Parties au dossier

Dossiers du tribunal : T2458/1520; T2394/5319

Intitulé de la cause : Frank Thomas Halcrow et Johnny Awasis c. Service correctionnel du Canada

Date de la décision du tribunal : Le 10 février 2021

Requête traitée par écrit sans comparutions des parties

Représentations écrites par :

Sarah Rauch, pour le plaignant

Sasha Hart et Simone Akyianu, pour la Commission canadienne des droits de la personne

Banafsheh Sokhansanj, Malcom Palmer et Lysandra Bumstead, pour l'intimé

 

 Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.