Tribunal canadien des droits de la personne

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Tribunal canadien
des droits de la personne

Titre : Tribunal's coat of arms - Description : Tribunal's coat of arms

Canadian Human
Rights Tribunal

 

Référence : 2019 TCDP  12

Date : le 2 mars 2019

Numéro de dossier : T2163/3716

 

[TRADUCTION FRANÇAISE]

Entre :

Amir Attaran

le plaignant

- et -

Commission canadienne des droits de la personne

la Commission

- et -

Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada (anciennement Citoyenneté et Immigration Canada)

l’intimé

- et -

Chinese and Southeast Asian Legal Clinic

partie intéressée

Décision sur requête

Membre instructeur : David L. Thomas

 



I.  Introduction

[1]  La présente décision porte sur une requête datée du 28 novembre 2018, présentée par l’intimé, Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada (IRCC), visant à modifier son exposé des précisions afin d’y ajouter un argument juridique qu’il compte faire valoir devant le Tribunal canadien des droits de la personne (le Tribunal) lors de l’audience de la présente affaire.

[2]  Le plaignant, monsieur Attaran, s’oppose à cette requête. La Commission canadienne des droits de la personne (la Commission) a avisé le Tribunal qu’elle ne prenait pas position à l’égard de cette requête, mais elle a demandé à pouvoir modifier son propre exposé des précisions si la requête devait être accueillie. La partie intéressée en l’espèce, la Chinese and Southeast Asian Legal Clinic (la CSALC), conformément à la décision sur requête antérieure du Tribunal (voir 2018 TCDP 6), n’est pas autorisée à présenter d’observations à l’égard de requêtes provisoires.

[3]   La plainte de M. Attaran à l’encontre d’IRCC a été déposée devant la Commission le 28 juillet 2010. Dans cette plainte, M. Attaran a allégué que les retards importants dans le traitement des demandes de parrainage de parents et de grands-parents, comparativement à d’autres catégories du regroupement familial (au sens du règlement d’application de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés (la LIPR), L.C. 2001, ch. 27), étaient discriminatoires et allaient à l’encontre de l’article 5 de la Loi canadienne sur les droits de la personne, L.R.C. 1985, ch. H‑6 (la Loi).

[4]  Le 22 février 2012, la Commission a décidé que l’instruction de la plainte n’était pas justifiée. M. Attaran a ensuite présenté une demande de contrôle judiciaire auprès de la Cour fédérale afin que celle-ci examine le refus de la Commission de renvoyer la plainte au Tribunal. La Cour fédérale a rejeté sa demande; M. Attaran a alors interjeté appel de cette décision auprès de la Cour d’appel fédérale (la CAF).

[5]  Le 3 février 2015, la CAF a accueilli l’appel et renvoyé la plainte à la Commission après avoir conclu que celle-ci n’avait pas examiné adéquatement la question du motif justifiable invoqué par IRCC (Attaran c. Canada (Procureur général), 2015 CAF 37).

[6]  Le 6 septembre 2016, conformément à l’alinéa 44(3)a) de la Loi, la Commission a demandé au président du Tribunal d’instruire la plainte présentée par M. Attaran.

[7]  Dans le cadre du processus de gestion de l’instance, le Tribunal a déjà rendu trois décisions sur de précédentes requêtes. Il en ressort que la CSALC a été désignée comme partie intéressée et M. Attaran a été autorisé à modifier sa plainte pour y ajouter des motifs de discrimination (voir 2017 TCDP 21 et 2017 TCDP 16).

[8]  Les parties en l’espèce ont présenté leur exposé des précisions à la fin de 2016 et au début de 2017. Depuis lors, l’intimé s’affaire à fournir un volume important de documents à M. Attaran, en réponse à ses demandes.

[9]  Avant la cinquième conférence téléphonique de gestion de l’instance, qui s’est tenue le 14 novembre 2018, IRCC a présenté pour examen aux autres parties et au Tribunal une version modifiée de son exposé des précisions. Celui-ci comportait trois changements : 1) l’intimé a identifié un autre de ses témoins; 2) la portion de l’exposé des précisions portant sur les représailles a été supprimée, selon la décision sur requête 2017 TCDP 21 rendue par le Tribunal; 3) l’intimé a ajouté l’argument juridique selon lequel la plainte ne concerne pas un « service » au sens de l’article 5 de la Loi.

[10]  M. Attaran a indiqué qu’il ne s’opposait pas aux deux premiers changements précités. Toutefois, il s’est fermement opposé à ce que l’intimé soit autorisé à modifier son exposé des précisions afin d’y inclure un nouvel argument juridique qui n’avait jamais été soulevé.

[11]  En l’absence d’un consensus entre les parties concernant l’autorisation de la modification de l’exposé des précisions de l’intimé, le Tribunal a demandé aux parties de présenter leur position par écrit, ce à quoi fait suite la présente décision sur requête.

[12]  Lors de la conférence téléphonique de gestion de l’instance du 14 novembre 2018, les parties et le Tribunal ont réservé, de façon provisoire, une période de trois semaines commençant le 3 juin 2019 en vue de l’audience de la plainte.

II.  Le droit

[13]  Le paragraphe 50(1) de la Loi prévoit que le membre instructeur du Tribunal doit donner à toutes les parties « la possibilité pleine et entière de comparaître et de présenter […] des éléments de preuve ainsi que leurs observations ».

[14]  Le paragraphe 1(1) des Règles de procédure du Tribunal précise que les règles ont pour objet de permettre « que toutes les parties à une instruction aient la possibilité pleine et entière de se faire entendre ».

[15]  Une décision sur requête antérieure, rendue dans la présente affaire, portait sur la question de savoir si le plaignant devait être autorisé à modifier son exposé des précisions. Dans la décision Attaran c. Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada, 2017 TCDP 21, le Tribunal a déclaré ce qui suit aux paragraphes 15 et 16 :

[15] Le Tribunal s’inspire en outre d’un jugement de la Cour fédérale dans Commission canadienne des droits de la personne c. Association canadienne des employés de téléphone, 2002 CFPI 776, aux paragraphes 30 et 31 :

[30] La jurisprudence dit clairement que le Tribunal a la compétence de modifier les plaintes de discrimination. Le juge Sopinka, dans l’arrêt Central Okanagan School District No. 23 c. Renaud, [1992] 2 R.S.C. 970, aux pages 978 et 996, au nom de la Cour suprême du Canada, a reconnu que la Commission des droits de la personne pouvait modifier une plainte non conforme pour la rendre conforme à la nature de l’audience devant le Tribunal. Cela peut se faire à n’importe quel moment pendant l’audience.

[31] Cette jurisprudence est reprise dans les décisions de la Cour fédérale quant aux modifications de plaidoirie selon la règle 75 des Règles de la Cour fédérale, 1998. Je fais référence à l’arrêt Rolls Royce plc c. Fitzwilliam 2000 CanLII 16748 (CF), (2000), 10 C.P.R. (4e) 1 (C.F. 1er inst.), dans lequel le juge Blanchard a établi, en tant que règle générale, que les modifications proposées soient autorisées lorsque la partie adverse ne subit aucun préjudice :

10 Bien que la Cour exerce à cet égard un pouvoir discrétionnaire, elle devrait, en règle générale, autoriser les modifications lorsque la partie adverse n’en subit aucun préjudice. Le juge Décary, s’exprimant au nom de la Cour d’appel fédérale, dans l’affaire Canderel Ltd. c. Canada1993 CanLII 2990 (CAF), [1994] 1 C.F. 3 (C.A.F.) à la page 9] :

... la règle générale est qu’une modification devrait être autorisée à tout stade de l’action aux fins de déterminer les véritables questions litigieuses entre les parties, pourvu, notamment, que cette autorisation ne cause pas d’injustice à l’autre partie que des dépens ne pourraient réparer, et qu’elle serve les intérêts de la justice.

[16] Il peut aussi s’inspirer du jugement rendu dans Société du musée canadien des civilisations c. Alliance de la fonction publique du Canada (section locale 70396), 2006 CF 704. La Cour a reconnu que, lorsqu’une plainte est déposée devant le Tribunal, une modification proposée pourrait altérer les allégations exposées dans la plainte initiale de façon à ce que celle‑ci porte sur une nouvelle question qui n’a pas été renvoyée au Tribunal par la Commission (paragraphe 30). Toutefois, l’extension, l’élaboration ou la clarification d’une plainte est autorisée dans la mesure où elle ne fait pas en sorte que la plainte excède le cadre du renvoi et cause un préjudice aux parties (paragraphes 40 et 50). Les plaintes sont susceptibles d’être précisées. Dans la mesure où le fond de la plainte originale est respecté, le plaignant et la Commission devraient être autorisés à clarifier et à expliquer les allégations initiales avant la tenue d’une audience à l’égard de l’affaire (paragraphe 52).

[16]  Bien que je reconnaisse que la jurisprudence précitée, à laquelle j’ai fait référence dans ma décision antérieure, traite de modifications apportées à la plainte elle-même, en me fondant sur le même raisonnement, j’ai jugé que l’exposé des précisions, qui précise la plainte, devrait relever de la même procédure souple de modification, dans les limites raisonnables (voir aussi Waddle c. Chemin de fer Canadien Pacifique et Conférence ferroviaire de Teamsters Canada, 2016 TCDP 8, au paragraphe 17).

[17]  La présente requête visant à modifier l’exposé des précisions est plutôt inhabituelle du fait qu’elle est présentée par l’intimé. Par conséquent, les préjudices possibles sont quelque peu différents de ceux qui pourraient découler de la modification par un plaignant de son exposé des précisions. Lorsqu’un plaignant cherche à modifier son exposé des précisions, un intimé peut soutenir qu’il subit un préjudice du fait que la question est soulevée devant le Tribunal et n’a jamais été soulevée quand la plainte était encore devant la Commission. Ce ne serait toutefois pas le cas en l’espèce.

III.  La position de l’intimé

[18]  Dans la présente requête contestée, l’intimé demande l’autorisation de modifier son exposé des précisions pour y ajouter le paragraphe suivant :

[traduction]

59.  Les délais de traitement visés par la présente plainte sont le fait du plan annuel des niveaux d’immigration et du nombre de demandes de parrainage reçues annuellement. Puisque la source de l’acte discriminatoire présumé est le plan des niveaux d’immigration, la présente plainte ne concerne pas un « service » au sens de l’article 5 de la LCDP. Lorsque le Cabinet établit le plan des niveaux d’immigration, qui est ensuite déposé devant le Parlement conformément à l’article 94 de la LIPR, il ne fournit pas un « service » au sens de l’article 5 de la LCDP.

[19]  L’intimé affirme qu’il propose cette modification dans le but d’aviser M. Attaran qu’il compte soutenir, lors de l’audience, que la plainte ne concerne pas un « service » au sens de l’article 5 de la Loi.

[20]  Si la modification était rejetée, l’intimé soutient que le Tribunal se verrait forcé de trancher une question fondamentale sans arguments ni éléments de preuve sur lesquels se fonder, ce qui ne serait pas dans l’intérêt de la justice. De plus, l’intimé souhaiterait invoquer la décision rendue récemment par la Cour suprême du Canada dans l’arrêt Canada (Commission canadienne des droits de la personne) c. Canada (Procureur général), 2018 CSC 31 (l’affaire Matson), laquelle, selon son argument, donnera au Tribunal des indications sur la portée du terme « services » utilisé à l’article 5 de la Loi.

[21]  IRCC est d’avis que cette modification ne causera aucun préjudice à M. Attaran et qu’elle ne rendra pas l’instruction injuste ou oppressive au point de constituer un abus de procédure. De plus, il fait valoir qu’un préjudice est un dommage qui ne peut être compensé par des dépens ou un ajournement. En l’espèce, les dates retenues pour l’audience ne sont que provisoires, et il reste trois mois ou presque. Par conséquent, IRCC prétend que le fait d’accueillir la requête à ce stade-ci ne retarderait en rien l’instance.

IV.  La position du plaignant

[22]  M. Attaran présente huit arguments distincts à l’encontre de la requête de l’intimé.

[23]  Tout d’abord, M. Attaran prétend qu’il a déjà été déterminé par les tribunaux que l’immigration au titre de la catégorie du regroupement familial constitue un « service » au sens de l’article 5 de la Loi. Dans l’arrêt Singh (Re) (C.A.), [1989] 1 C.F. 430, [1988] A.C.F. no 414, une décision de la Cour d’appel fédérale à laquelle la Commission renvoie, la Cour a affirmé que la Commission avait compétence pour enquêter sur de nombreuses plaintes pour discrimination concernant l’immigration au titre de la catégorie du regroupement familial. M. Attaran fait également référence à la décision Canada (Secrétaire d’État aux Affaires extérieures) c. Menghani, [1994] 2 CF 102, 1993 CanLII 3018 (CF), portant sur une demande de contrôle judiciaire d’une décision du Tribunal, dans laquelle la Cour fédérale a confirmé la conclusion du Tribunal voulant que les agissements de l’intimée dans le cadre du programme de la catégorie famille aient constitué un « service » discriminatoire au sens de l’article 5 de la Loi. Étant donné cette jurisprudence, M. Attaran soutient que le fait de remettre cette question en litige constituerait un abus de procédure.

[24]  Le deuxième argument avancé par M. Attaran est que la requête devrait être rejetée puisqu’elle n’a aucune chance raisonnable d’être accueillie lors de l’audience sur le fond. Il traite de la LIPR, du « plan des niveaux d’immigration » et des « instructions ministérielles », ainsi que de la façon dont ces éléments sont liés aux délais de traitement. Essentiellement, M. Attaran affirme que les délais de traitement dépendent plus du pouvoir discrétionnaire du ministre que du plan des niveaux d’immigration et que, de ce fait, l’argument invoqué par l’intimé pour justifier la modification proposée ne devrait pas être retenu à l’audience sur le fond.

[25]  Troisièmement, M. Attaran soulève des préoccupations quant aux dates qui ont été retenues pour l’audience lors de la conférence téléphonique de gestion de l’instance qui a eu lieu le 14 novembre 2018. L’intimé a déclaré, dans ses observations, que les dates n’avaient pas encore été fixées. Cependant, M. Attaran souligne que les parties se sont entendues pour réserver trois semaines à compter du 3 juin 2019 en vue de l’audience. Si la modification de l’exposé des précisions est autorisée, M. Attaran ne voit pas comment ces dates pourraient être maintenues.

[26]  Quatrièmement, M. Attaran allègue que la présente requête constitue un [traduction] « piège », puisqu’elle traite d’une [traduction] « question de droit fondamentale ». Il ajoute qu’en soulevant cette question à ce stade-ci, l’intimé tente de [traduction] « présenter l’affaire sous un jour nouveau ».

[27]  Le cinquième argument avancé est que la modification proposée est tardive. L’intimé a présenté son exposé des précisions initial le 7 février 2017 et il a choisi de ne pas invoquer l’argument du « service » à ce moment-là. M. Attaran allègue que l’intimé demande à modifier son exposé des précisions sans expliquer pourquoi il a choisi de ne pas invoquer cet argument plus tôt.

[28]  Le sixième argument du plaignant est un prolongement du cinquième. Comme l’intimé est une partie avertie et expérimentée, il ne devrait pas être autorisé à modifier son exposé des précisions deux ans après l’avoir présenté sans fournir d’explication convenable pour justifier ce délai.

[29]  Le septième argument avancé par M. Attaran est que la modification de l’exposé des précisions à ce stade-ci lui causera préjudice puisqu’il a déjà examiné environ 20 000 documents qui lui ont été fournis par l’intimé, ce qui lui a pris environ 200 heures jusqu’à maintenant. Si la modification est autorisée, M. Attaran affirme qu’il devra de nouveau examiner les documents en tenant compte du nouvel argument juridique avancé. M. Attaran décrit la requête comme un [traduction] « piège » qui lui occasionnera un préjudice [traduction] « énorme ». Il ajoute qu’il trouve [traduction] « désagréable et inconvenant de la part de l’intimé de qualifier la situation de simple “désagrément” ».

[30]  Le dernier argument du plaignant est que, puisqu’il devra reprendre l’examen des 20 000 documents déjà examinés, l’audience devra être reportée, probablement jusqu’en 2020. Le dépôt initial de sa plainte remontant à 2010, le délai sera beaucoup trop long si le Tribunal autorise l’intimé à apporter la modification proposée.

V.  Analyse et décision

[31]  Bien que les observations de M. Attaran fassent état de huit arguments distincts, ces derniers appartiennent essentiellement à deux catégories. Les deux premiers arguments concernent principalement l’abus de procédure : la jurisprudence antérieure ayant déjà tranché cette question, l’argument n’a aucune chance raisonnable d’être retenu. Les autres arguments du plaignant se concentrent essentiellement sur le fait qu’autoriser la modification lui causera un préjudice. J’examinerai ces deux catégories d’arguments cidessous.

[32]  La Loi oblige le Tribunal à donner à toutes les parties la possibilité pleine et entière de comparaître et de présenter des éléments de preuve ainsi que leurs observations (paragraphe 50(1)). Il serait contraire à ces obligations prévues par la loi que le Tribunal empêche une partie de présenter un argument juridique.

[33]  Les exposés des précisions présentés au Tribunal ne constituent essentiellement que des feuilles de route visant à informer le Tribunal et les autres parties de ce à quoi ils peuvent s’attendre lors de l’audience. Le Tribunal devrait éviter de tirer des conclusions sur le bien-fondé d’un argument avant qu’il ne lui ait été présenté. Il serait inapproprié de ne pas autoriser la modification à ce stade-ci au motif qu’elle ne serait pas accueillie à l’audience.

[34]  Aucun autre fait n’est allégué ou contesté dans la requête. Le fait d’autoriser la modification n’aurait aucune incidence sur la portée de la plainte qui a été renvoyée au Tribunal. L’intimé cherche à apporter la modification dans le but d’aviser les parties de son intention de soulever un argument juridique qui n’a pas déjà été soulevé.

[35]  Il est sans contredit dans l’intérêt de la justice que le Tribunal demeure disposé à entendre tous les arguments qu’une partie souhaite présenter. Seul un examen du préjudice que pourraient subir les autres parties dans certaines circonstances devrait avoir une incidence sur l’application de ce principe. Voilà qui nous mène à la deuxième catégorie d’arguments de M. Attaran.

[36]  Je ne souscris pas aux affirmations de M. Attaran selon lesquelles la modification proposée à l’exposé des précisions est un [traduction] « piège » ou qu’elle est [traduction] « extrêmement tardive ». Lors de la conférence téléphonique de gestion de l’instance du 14 novembre 2018, il s’était déjà écoulé plus de deux ans depuis que M. Attaran avait déposé sa plainte devant le Tribunal. Cependant, il importe principalement de savoir si une partie dispose de suffisamment de temps pour examiner une nouvelle allégation ou un nouvel argument avant le début de l’audience.

[37]  Lors de la même conférence téléphonique, les parties ont convenu de réserver, de façon provisoire, une période de trois semaines commençant le 3 juin 2019 en vue de l’audience. Il est vrai que, souvent, les parties doivent se projeter loin dans l’avenir pour trouver des dates qui conviennent à tous en vue d’une audience, surtout s’il est prévu que celle‑ci dure plus d’une semaine. C’est pour cette raison que nous nous sommes penchés sur nos calendriers respectifs à ce moment-là.

[38]  Il peut y avoir eu une certaine confusion après la conférence téléphonique. Le résumé écrit de la conférence téléphonique de gestion de l’instance du 14 novembre 2018 confirmait que les parties avaient convenu de réserver ces dates pour le moment. Le résumé précisait que M. Attaran devait confirmer l’état d’avancement de son examen des documents à la mi‑janvier et qu’il serait alors plus en mesure de déterminer s’il serait prêt au moment convenu. Cependant, avant qu’une confirmation ait été obtenue de la part de M. Attaran, le greffe du Tribunal a envoyé aux parties un avis qui semblait confirmer que les dates retenues étaient les dates définitives. En fait, ces dates ne sont pas définitives. Les parties, plus particulièrement M. Attaran, doivent d’abord confirmer qu’elles disposeront de suffisamment de temps pour se préparer en vue de l’instruction compte tenu des questions en jeu et de la quantité importante de documents communiqués.

[39]  Si M. Attaran ou une autre partie ne croit pas être en mesure de se préparer à temps pour l’instruction en juin, une nouvelle conférence téléphonique de gestion de l’instance sera organisée et les parties chercheront de nouvelles dates qui pourraient convenir à tous.

[40]  Pour les motifs qui précèdent, le Tribunal accueille la requête de l’intimé datée du 28 novembre 2018 et l’autorise ainsi à modifier son exposé des précisions en y ajoutant le paragraphe suivant :

[traduction]

59.  Les délais de traitement visés par la présente plainte sont le fait du plan annuel des niveaux d’immigration et du nombre de demandes de parrainage reçues annuellement. Puisque la source de l’acte discriminatoire présumé est le plan des niveaux d’immigration, la présente plainte ne concerne pas un « service » au sens de l’article 5 de la LCDP. Lorsque le Cabinet établit le plan des niveaux d’immigration, qui est ensuite déposé devant le Parlement conformément à l’article 94 de la LIPR, il ne fournit pas un « service » au sens de l’article 5 de la LCDP.

[41]  Le plaignant et la Commission sont autorisés à modifier leur exposé des précisions respectif en réponse à la modification autorisée de l’exposé des précisions de l’intimé. Les exposés modifiés devront ensuite être transmis au Tribunal et aux autres parties au plus tard le 29 mars 2019.

[42]  Pour éviter de retarder indûment la procédure, le Tribunal a rendu, avant le prononcé des présents motifs, une ordonnance datée du 6 mars 2019 énonçant les décisions exposées aux présentes.

[43]  En ce qui concerne la demande de dépens présentée par M. Attaran dans les documents liés à sa requête, celle-ci est rejetée. La Cour suprême du Canada a statué que le Tribunal n’a pas compétence pour adjuger des dépens au titre de la Loi (voir Canada (Commission canadienne des droits de la personne) c. Canada (Procureur général), 2011 CSC 53).

Signée par

 

David L. Thomas

Membre du Tribunal

Ottawa (Ontario)

Le 22 mars 2019

 

 

 

 


 

 

Tribunal canadien des droits de la personne

Parties au dossier

Dossier du Tribunal :   T2163/3716

Intitulé de la cause :  Amir Attaran c. Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada (anciennement Citoyenneté et Immigration Canada)

Date de la décision sur requête du Tribunal : Le 22 mars 2019

Requête traitée par écrit sans comparution des parties

Représentations écrites par :

Amir Attaran , le plaignant, pour lui-même

Sean Stynes / Kelly Keenan, pour l’intimé

 

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