Tribunal canadien des droits de la personne

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Tribunal canadien
des droits de la personne

Tribunal's coat of arms

Canadian Human
Rights Tribunal

Référence : 2018 TCDP 30

Date : le 9 novembre 2018

Numéro du dossier : T2242/6417

 

 

[TRADUCTION FRANÇAISE]

Entre :

Billie Mortimer

la plaignante

- et –

 

 

Commission canadienne des droits de la personne

la Commission

- et -

Air Canada

l'intimée

Décision sur requête

Membre : Colleen Harrington

 

 



I.  Introduction

[1]  Le 27 juin 2018, l’intimée a déposé un avis de requête visant à obtenir une ordonnance obligeant la plaignante à produire certains documents. La plaignante s’est opposée à la requête. En conséquence, l’enquête dans la présente affaire, qui devait avoir lieu en août 2018, a été ajournée pour permettre aux parties de déposer des observations.

[2]  Dans les requêtes en divulgation, le Tribunal doit établir si les documents demandés sont « potentiellement pertinents » à un fait, à une question ou à une forme de redressement mentionnés par une partie. Afin de mettre en contexte ma décision concernant cette requête, je vais commencer par résumer les positions des parties concernant la plainte.

II.  Allégations contenues dans la plainte et exposé des précisions des parties

[3]  Selon sa plainte déposée auprès de la Commission canadienne des droits de la personne (la Commission) en mai 2015, Mme Billie Mortimer (la plaignante) a commencé à travailler pour Air Canada (l’intimée) en 1981 et est en congé d’invalidité de longue durée (ILD) depuis le mois de septembre 2007. Elle a déposé sa plainte pour violation des droits de la personne au sujet de modifications apportées à la Reduced Rate Travel Privilege Policy [politique sur les privilèges de voyage à tarif réduit] (la politique) de l’intimée, affirmant qu’elle était discriminatoire envers elle en tant qu’employée atteinte d’une déficience, en violation des articles 7 et 10 de la Loi canadienne sur les droits de la personne (la Loi).

A.  La Politique

[4]  La politique de l’intimée offre aux employés et aux membres de la famille admissibles un accès à des vols pour des voyages personnels selon la disponibilité à un coût considérablement réduit. Dans son exposé des précisions (EDP) déposé auprès du Tribunal, la plaignante a déclaré que la politique entrée en vigueur le 15 mai 2015 était discriminatoire à l’égard de certains employés atteints d’une déficience, en particulier de ceux en situation d’ILD. Selon l’EDP de la Commission, la politique de mai 2015 prévoyait les privilèges de voyage des employés de la façon suivante :

[traduction]

a)  Les employés en congé de 365 jours ou moins approuvé par l’intimée étaient admissibles à un nombre illimité de voyages à tarif réduit;

b)  À partir de 366 jours, les employés en congé approuvé par l’intimée, quelle qu’en soit la raison, avaient accès à trois laissez-passer à tarif réduit par année;

c)  Les employés en congé pour cause de blessure ou de maladie doivent également, avant leur voyage, obtenir une attestation médicale en faisant remplir une Fiche de santé pour voyage aérien (FSVA) par leur médecin traitant et la soumettre pour examen et approbation aux Services de santé au travail de l’intimée avant leur voyage.

[5]  L’intimée a modifié la politique de mai 2015 le 17 novembre 2017, apparemment en réaction à une décision d’arbitrage en matière de travail. Selon l’EDP de l’intimée, la politique de novembre 2017 prévoit les privilèges de voyage suivants :

[traduction]

a)  Les employés en congé approuvé, peu importe la durée ou le motif de l’absence, sont admissibles à l’utilisation illimitée des privilèges de voyage à tarif réduit;

b)  Un employé qui révèle à l’intimée qu’il est atteint d’un trouble médical grave doit remplir et soumettre une FSVA;

c)  Après examen de la FSVA, le médecin spécialiste de l’aviation de l’intimée peut approuver le voyage ou exiger des mesures ou aménagements spécifiques visant à garantir la sécurité du transport aérien. La décision du médecin spécialiste de l’aviation peut être valable pour des périodes allant jusqu’à un an.

B.  La Commission et la plaignante

[6]  Dans son EDP, la Commission indique que les privilèges de voyage offerts par l’intimée dans le cadre de la politique constituent un avantage en matière d’emploi, qui doit être offert à tous les employés de manière substantiellement égale et non discriminatoire. La plaignante a déclaré avoir rencontré des obstacles pour accéder à cet avantage en raison de sa situation d’ILD, ce qui lui a valu de bénéficier de moins de laissez-passer de voyage à tarif réduit que d’autres employés n’étant pas en situation d’ILD, tout en l’empêchant de réserver des voyages à tarif réduit avec une autre compagnie aérienne en utilisant le système de réservation de l’intimée. Elle est également tenue de notifier à l’avance son intention de prendre l’avion et d’obtenir une autorisation médicale avant de voyager au titre de la politique, ce qui n’est pas exigé des employés qui ne sont pas en situation d’ILD.

[7]  La plaignante prétend que la politique de l’intimée de novembre 2017 continue d’imposer aux employés en situation d’ILD des restrictions qui ne sont pas imposées aux clients de l’intimée qui peuvent avoir une déficience similaire à la sienne. Plus précisément, la plaignante dit dans son EDP que les clients payants ayant une déficience identique à la sienne ne sont pas tenus de signaler leur invalidité à l’intimée ou de fournir une FSVA avant leur voyage.

[8]  La plaignante affirme que le processus d’obtention de la FSVA exigée des employés en situation d’ILD est coûteux et laborieux, et qu’il exige la divulgation de renseignements médicaux privés qui ne sont même pas pertinents à l’objectif déclaré de la politique.

[9]  La plaignante, qui réside à Campbell River, dit que la politique la touche en tant qu’employée atteinte d’une déficience, du fait qu’elle ne peut pas voyager de façon urgente, car elle ne peut pas avoir tous les formulaires remplis et respecter les exigences en matière de délai de la politique. Ainsi, elle s’est vue privée de sa capacité de voyager. Elle affirme que ces exigences l’ont empêchée de rendre visite à sa mère avant son décès et qu’elle a perdu la possibilité de se faire soigner à Vancouver, a perdu contact avec sa famille et ses amis et a dû vendre sa maison à Vancouver.

[10]  Bien que la politique ait été modifiée en novembre 2017, la plaignante affirme que les allégations relatives à la politique de mai 2015 ne sont pas théoriques, car elle a subi un préjudice en raison de cette politique antérieure. Elle dit que cela est pertinent pour les redressements qu’elle demande à l’audience, qui comprennent des dommages-intérêts pour douleur et souffrance, et [traduction] « une indemnité financière pour la perte des avantages imposée à la plaignante par l’intimée à la suite de la perte d’avantages liés au voyage avec l’intimée ainsi que la perte de capacité de la plaignante d’obtenir d’autres avantages liés aux voyages à tarif réduit auprès d’autres compagnies aériennes ».

C.  L’intimée

[11]  La position de l’intimée concernant la plainte, telle qu’elle est présentée dans l’EDP, est que ni la politique de mai 2015 ni celle de novembre 2017 ne sont discriminatoires.

[12]  L’intimée a déclaré que tous les passagers, qu’ils soient employés ou non, doivent remplir une FSVA s’ils ont déclaré qu’ils présentaient un [traduction] « trouble médical important ou grave » et que les FSVA recueillent des renseignements médicaux identiques auprès des passagers employés et clients. Des renseignements médicaux sont demandés à certains passagers, parce que [traduction] « les besoins médicaux imprévus ainsi que les urgences médicales posent des difficultés uniques et importantes pendant le transport aérien ». L’intimée affirme que, s’il est établi que la FSVA est discriminatoire à première vue, elle peut prouver que la sécurité des voyages aériens est une justification légitime et raisonnable pour exiger qu’une FSVA soit remplie avant qu’une personne puisse prendre l’avion dans ces circonstances.

[13]  L’intimée soutient que les employés dont le congé d’invalidité de longue durée est approuvé lui ont déclaré qu’ils présentaient un [traduction] « trouble de santé grave » pour les besoins de la politique de novembre 2017 et qu’ils devaient donc remplir et soumettre une FSVA qui fait l’objet d’un examen et d’une approbation par son médecin spécialiste de l’aviation (le médecin spécialiste) avant le voyage.

[14]  L’intimée affirme que les FSVA doivent être évaluées par son médecin spécialiste, qui possède une expertise spécifique en médecine aéronautique, [traduction] « et par une équipe de professionnels de la santé ». L’intimée soutient qu’elle serait soumise à une contrainte excessive si elle devait s’appuyer sur les évaluations subjectives des employés concernant la sécurité des voyages aériens ou sur l’avis du médecin de l’employé uniquement. L’intimée déclare que seul le médecin spécialiste [traduction] « possédant des connaissances spécialisées peut prendre cette décision. Les médecins généralistes n’ont pas l’expertise requise pour donner des conseils sur les rigueurs du transport aérien. »

[15]  Après avoir examiné la FSVA, le médecin spécialiste détermine si :

a)  le passager est apte à prendre l’avion;

b)  le passager a besoin de mesures d’adaptation, de préparation ou autres pour permettre un transport en toute sécurité;

c)  le passager est inapte à prendre l’avion du fait que son état de santé ne permet pas d’adaptation possible.

[16]  Si le médecin spécialiste établit que l’état de santé grave d’un passager est permanent et stable, il peut donner à celui-ci l’autorisation de prendre l’avion pendant une période maximale d’un an sans devoir remplir une FSVA à chaque fois.

D.  Réplique de la plaignante

[17]  Dans sa réplique à l’EDP de l’intimée, la plaignante remet en cause l’affirmation de l’intimée selon laquelle l’objectif de la politique qui exige une FSVA de la part des employés présentant une ILD est la sécurité du transport aérien. La plaignante fait remarquer que, à moins qu’un client payant ne déclare volontairement avoir un trouble de santé grave (y compris, vraisemblablement, un trouble identique à celui de la plaignante), l’intimée n’a aucun moyen de s’apercevoir, voire d’établir de manière concluante, qu’un passager autre qu’un employé en ILD présente un « trouble médical grave», sans parler d’un trouble qui pourrait poser un problème de sécurité pour les opérations aériennes de l’intimée.

[18]  La plaignante laisse entendre que, si elle achetait simplement un billet auprès de l’intimée, sans préciser qu’elle était une employée en ILD, elle serait presque certainement autorisée à monter à bord de l’avion sans que des questions soient posées concernant son état de santé, puisque cela n’est pas visible, [traduction] « ni pertinent pour la sécurité d’un vol ». Selon la plaignante, le critère de discrimination de l’intimée est fondé non pas sur un trouble médical particulier, mais simplement sur la situation d’ILD de l’employée. En conséquence, la politique impose un fardeau aux employés qui reçoivent des prestations d’assurance invalidité de longue durée en raison de leur déficience.

III.  Requête en divulgation

[19]  L’intimée a déposé un avis de requête visant à obtenir une ordonnance obligeant la plaignante à produire certains documents, notamment :

(i)  les documents indiqués dans l’EDP de la plaignante, et en particulier la documentation « confirmant la déficience »;

(ii)  le dossier du Régime collectif d’assurance revenu en cas d’invalidité (le RCRI) de la plaignante;

(iii)  les documents relatifs aux rendez-vous médicaux qui auraient été prévus dans la région du Grand Vancouver, tels qu’ils sont décrits dans l’EDP de la plaignante (« documents de rendez-vous médicaux »);

(iv)  les documents relatifs aux efforts déployés par la plaignante pour obtenir un traitement ou des rendez-vous à Campbell River ou aux alentours, à tout moment pertinent relativement à la plainte (« documents de rendez-vous à Campbell River »);

(v)  les documents relatifs à une vente alléguée d’une propriété résidentielle située dans la région du Grand Vancouver, tels qu’ils sont décrits dans l’EDP de la plaignante (« documents de vente de propriété »).

[20]  L’intimée s’appuie sur l’alinéa 6(1)d) des Règles de procédure du Tribunal (les Règles), qui oblige toutes les parties à déposer un EDP, lequel doit inclure :

les divers documents qu’elle a en sa possession – pour lesquels aucun privilège de non-divulgation n’est invoqué – et qui sont pertinents à un fait, une question ou une forme de redressement demandée en l’occurrence, y compris les faits, les questions et les formes de redressement mentionnés par d’autres parties en vertu de cette règle;

[21]  Le paragraphe 6(4) des Règles exige des parties qu’elles fournissent aux autres parties une copie de chaque document indiqué dans cette liste.

[22]  La plaignante ne s’oppose pas à la requête visant la plupart de ces documents, y compris une preuve des documents de vente de la propriété et des rendez-vous médicaux à Vancouver, ainsi que des documents relatifs aux rendez-vous médicaux pris à Campbell River. Cependant, la plaignante refuse de fournir son dossier du RCRI ainsi que d’autres renseignements et dossiers médicaux relatifs à sa déficience, au-delà de ce qu’elle a déjà divulgué.

IV.  Positions des parties concernant la requête en divulgation

A.  L’intimée

[23]  Dans son avis de motion, l’intimée demande des documents supplémentaires confirmant la déficience de la plaignante. L’intimée fait valoir que la plaignante doit produire des documents qui décrivent les [traduction] « caractéristiques spécifiques de sa déficience », car, pour prouver la discrimination illicite fondée sur le motif de la déficience, il lui incombe d’établir l’existence de [traduction] « la déficience alléguée » en fournissant une preuve médicale de son existence. L’intimée déclare que [traduction] « les rares renseignements médicaux divulgués à ce jour » ne fournissent pas suffisamment d’information pour établir l’existence d’une déficience.

[24]  L’intimée note que la plaignante a refusé de fournir des renseignements médicaux au-delà de deux documents déjà produits, à savoir : (i) une FSVA de 2012 remplie par le Dr Rabin qui indique que sa dépression est en rémission et qu’elle souffre d’une légère anxiété occasionnelle et d’humeurs dépressives; (ii) une note datée du 9 février 2018 de la Dre Fourie affirmant que la déficience de la plaignante n’affectait pas sa capacité de voyager en avion et qu’il n’y avait aucune raison d’ordre médical de lui refuser l’accès à un quelconque moyen de transport.

[25]  Dans ses observations à l’appui de la requête, l’intimée élargit la portée des documents demandés afin d’inclure [traduction] « tous les documents en possession ou sous le contrôle de la plaignante afférents à un autre trouble ou problème médical pertinent pour la Fiche de santé pour voyage aérien de l’intimée, que le trouble de santé soit ou non lié à la » déficience de la plaignante. L’intimée fait valoir que cette catégorie plus large de documents médicaux est pertinente pour la présente procédure [traduction] « et pour le différend entre les parties concernant l’obligation de remplir » une FSVA.

[26]  L’intimée affirme que les dossiers médicaux demandés sont pertinents pour la présente procédure parce que la plaignante a mis en cause les détails de son état de santé en alléguant que l’intimée la traitait différemment des autres personnes susceptibles de souffrir d’une incapacité [traduction] « semblable » ou [traduction] « identique ». Dans sa réplique à l’EDP de l’intimée, la plaignante déclare que [traduction] « son trouble médical n’est pas manifestement visible ni pertinent à l’égard de la sécurité d’un vol ». Elle affirme que la FSVA exige [traduction] « des renseignements beaucoup plus privés et confidentiels » à son sujet que ceux requis de la part de passagers non employés atteints de la même déficience, mais qui sont apparemment requis pour les besoins de la politique.

[27]  L’intimée soutient qu’elle a besoin de documents détaillant les particularités de la déficience de la plaignante afin de pouvoir répondre aux allégations de celle-ci, y compris celles concernant des passagers hypothétiques possédant des caractéristiques identiques. L’intimée soutient qu’elle est en droit de vérifier les propositions de la plaignante au sujet de son état de santé en ce qui concerne la sécurité des vols.

[28]  L’intimée demande le dossier du RCRI de la plaignante en possession de la Société Financière Manuvie, car il contient des renseignements que la plaignante est tenue de fournir à Manuvie tous les trois à six mois pour confirmer qu’elle est toujours admissible aux prestations d’invalidité de longue durée, auxquelles les employés ne sont admissibles que si leur cas correspond à la définition d’une [traduction] « invalidité totale ». L’intimée soutient que cette information est pertinente pour la question du désagrément et du préjudice que la plaignante dit subir du fait qu’elle doit remplir la FSVA afin de pouvoir prendre l’avion au titre de la politique, ainsi que pour la fiabilité des renseignements médicaux que la plaignante a soumis à l’intimée, y compris la FSVA de 2012. L’intimée soutient également que le dossier du RCRI est nécessaire afin que l’on puisse établir si le fait de se fier aux auto-évaluations des employés ou à l’opinion de leur médecin entraînerait une contrainte excessive pour l’intimée.

[29]  En ce qui concerne les documents relatifs aux rendez-vous médicaux et à la vente de la propriété à Vancouver, l’intimée affirme que la plaignante doit divulguer ces documents, car ils se rapportent à des questions énoncées dans son EDP, notamment du fait que, en raison des exigences prétendument lourdes de sa politique, elle n’a pas pu recevoir de traitement médical de la part de spécialistes à Vancouver et a été forcée de vendre sa maison à Vancouver.

[30]  L’intimée soutient que les documents relatifs aux rendez-vous à Campbell River sont pertinents pour établir si la plaignante était obligée de recevoir un traitement médical à Vancouver plutôt que dans la collectivité dans laquelle elle réside, ainsi que pour les [traduction] « dommages personnels » qu’elle aurait subis en raison de la perte alléguée d’accès à ce traitement médical, comme il est décrit dans son EDP.

[31]  L’intimée a ajouté que les documents relatifs aux rendez-vous à Campbell River et à la vente de la propriété à Vancouver sont pertinents pour la question de l’atténuation des dommages pouvant être soulevée par l’intimée.

[32]  L’intimée fait remarquer que, bien que la plaignante puisse ne pas s’opposer à la production de ces documents relatifs à la vente de la propriété et à des rendez-vous médicaux, elle demande néanmoins une ordonnance obligeant leur production.

B.  La plaignante

[33]  La plaignante dit qu’elle est en congé d’invalidité de longue durée depuis 11 ans, conformément aux exigences de l’assureur de l’intimée, et que le fait qu’elle soit atteinte d’une déficience n’est pas un problème entre les parties.

[34]  Elle refuse de fournir des renseignements supplémentaires sur son état de santé ou ses dossiers médicaux, y compris son dossier du RCRI, autres que ceux qu’elle a déjà divulgués dans le cadre de la présente procédure. Elle fait valoir que, puisque c’est la politique de l’intimée qui est en cause dans sa plainte, et non sa déficience spécifique, les documents médicaux et du RCRI demandés par l’intimée ne sont pas pertinents pour l’audience de la plainte. Elle affirme que la discrimination dont elle a été victime découle non pas de la nature spécifique de son invalidité liée à la dépression, mais de la politique de l’intimée, qui exige la divulgation complète des renseignements médicaux confidentiels de tous les employés en invalidité, indépendamment de la nature de leur déficience et peu importe la mesure dans laquelle leur déficience peut être éloignée de l’objectif déclaré de la politique. La plaignante affirme que, puisqu’elle a déjà fourni à l’intimée une note de son médecin indiquant que sa déficience ne l’empêchait pas de voyager en avion, elle n’a aucun motif rationnel de devoir divulguer d’autres renseignements médicaux.

[35]  La plaignante ajoute que l’exigence selon laquelle elle doit fournir la divulgation demandée, même de façon extrêmement restreinte, équivaudrait à rejeter la plainte, car elle entérinerait et confirmerait la politique discriminatoire de l’intimée tout en la privant du droit d’être protégée contre l’intrusion injustifiée de son employeur dans ses affaires médicales privées.

C.  La Commission

[36]  La Commission note que l’intimée doit clairement démontrer que les documents demandés sont potentiellement pertinents aux questions soumises au Tribunal. La Commission affirme que le fait que la plaignante soit atteinte d’une déficience ne fait pas en sorte que ses antécédents médicaux complets sont potentiellement pertinents et que, comme l’intimée n’a jamais contesté sa déficience par le passé, rien ne justifie que les dossiers médicaux soient maintenant pertinents.

[37]  La Commission soutient que la [traduction] « demande de divulgation de l’intimée est trop large et entraînera la punition de la plaignante pour le dépôt d’une plainte en mettant à la disposition de l’intimée l’ensemble de ses renseignements médicaux ». Selon la Commission, la question de savoir si un trouble ou un problème médical serait pertinent en ce qui concerne la FSVA n’est finalement pas pertinente pour l’affaire dont le Tribunal est saisi si elle ne porte pas sur des allégations formulées dans la plainte.

[38]  La Commission soutient également que la relation médecin-patient et les dossiers médicaux qui en résultent sont protégés par un privilège de common law, qui garantit la confidentialité des renseignements nécessaires au bon fonctionnement de certaines relations et la protection de certains intérêts reconnus en matière de vie privée. La Commission soutient que les quatre critères tirés de l’ouvrage Wigmore’s Evidence in Trials at Common Law (les critères Wigmore) [1] s’appliquent dans les circonstances de la présente demande de divulgation, de sorte qu’un privilège au cas par cas en ce qui concerne les relations médecin-patient ou les dossiers médicaux produits dans le cadre de cette relation s’applique aux documents demandés.

[39]  La Commission fait également remarquer que les communications entre les patients et leur médecin sont confidentielles. La Commission laisse entendre que, si le Tribunal décide d’ordonner la divulgation de certains documents, des limites ou des conditions doivent être fixées pour déterminer qui peut recevoir, examiner ou copier les documents. Il devrait également y avoir des limites ou des conditions quant à l’utilisation des renseignements.

D.  Réplique de l’intimée

[40]  L’intimée a répliqué aux observations de la Commission en déclarant que [traduction] « le respect des obligations de divulgation dans une procédure devant le Tribunal ne constitue pas une forme de sanction, pas plus que la participation à une audience équitable ». L’intimée rejette également le fait que la Commission se fonde sur les facteurs Wigmore en faisant observer que les documents du RCRI sont créés dans le but d’être divulgués par la plaignante à l’administrateur du régime d’avantages sociaux de l’intimée. L’intimée nie avoir demandé la divulgation des antécédents médicaux complets de la plaignante.

[41]  L’intimée souligne que la question qui se pose à ce stade préliminaire est de savoir si les documents demandés dans la requête sont pertinents aux questions en litige, y compris les moyens de défense qui ont été légitimement invoqués, et que bon nombre des déclarations faites dans les observations de la plaignante sont remises en cause et doivent être tranchées dans le cadre d’une audience complète.

V.  Principes juridiques applicables

[42]  Le Tribunal a examiné plusieurs requêtes en divulgation, qui ont soulevé certains principes sur lesquels il s’appuie maintenant pour établir les obligations en matière de divulgation préalable à l’audience des parties. Ces principes peuvent être résumés de la façon suivante :

·  Toutes les parties ont droit à une audition équitable, qui exige que « l’intéressé soit informé des allégations formulées contre lui et ait la possibilité d’y répondre [2]  »;

·  Conformément au paragraphe 50(1) de la Loi, chacune des parties a droit à une audience complète, et on doit leur donner « la possibilité pleine et entière de comparaître et de présenter, en personne ou par l’intermédiaire d’un avocat, des éléments de preuve ainsi que leurs observations »;

·  Chaque partie a droit à la divulgation des éléments de preuve pertinents en la possession ou sous le contrôle de la partie adverse [3] ;

·  En cas de désaccord sur la question de savoir si un document doit être divulgué, le principe de la « pertinence potentielle » est appliqué. Pour qu’ils soient potentiellement pertinents, il doit exister un lien rationnel entre les documents demandés et les faits, questions ou formes de redressement mentionnés par les parties [4] ;

·  La question de la pertinence potentielle des documents doit être tranchée au cas par cas, compte tenu des questions soulevées dans chaque affaire [5] ;

·  Il incombe à la partie requérante de prouver le lien rationnel, mais le seuil quant à la pertinence est peu élevé, et la jurisprudence a reconnu que la tendance favorise une communication de documents plus étendue que moins étendue [6] ;

·  La demande ne doit pas être spéculative ou équivaloir à une partie de pêche [7] ;

·  Les documents demandés doivent être décrits de manière suffisamment précise, et la demande ne doit pas être trop large ou générale [8] ;

  • En ce qui concerne les documents médicaux, le Tribunal a conclu que le droit de l’intimée de connaître la portée de la plainte dont il fait l’objet l’emporte sur les droits à la confidentialité et à la vie privée, puisque « [l]a justice, dans des procédures en matière de droits de la personne, exige que l’on permette à la partie intimée de présenter une défense pleine et entière à l’argumentation de la partie plaignante. Si la plaignante plaide sa cause en se fondant sur son état de santé, l’intimée a le droit d’obtenir les renseignements de santé pertinents qui peuvent avoir trait à la réclamation [9]  »;

  • Dans la recherche de la vérité, et malgré la pertinence probable des éléments de preuve, le Tribunal peut rejeter une requête en divulgation lorsque la valeur probante de ces éléments de preuve ne l’emporte pas sur leur effet préjudiciable sur l’instance, surtout « lorsque le fait d’ordonner la divulgation risquerait d’entraîner un retard important dans l’instruction de la plainte ou lorsque les documents ne se rapportent qu’à une question secondaire plutôt qu’aux principales questions en litige [10]  ». Dans la mesure où les exigences de la justice naturelle et les Règles sont respectées, afin d’assurer l’instruction informelle et expéditive de la plainte, le Tribunal peut exercer son pouvoir discrétionnaire de rejeter une demande de divulgation [11] ;

  • Le simple fait d’ordonner la divulgation d’un document à ce stade de l’instance ne veut pas dire qu’il sera admis en preuve lors de l’audience ou que le Tribunal lui accordera une importance significative [12] .

VI.  Question en litige

[43]  Les documents demandés par l’intimée sont-ils potentiellement pertinents au regard de la présente procédure, et le Tribunal devrait-il ordonner à la plaignante de les divulguer?

VII.  Analyse

[44]  Dans l’affaire Turner c. ASFC [13] , le Tribunal a conclu qu’une analyse des allégations contenues dans l’EDP d’une partie est d’une grande utilité pour cerner les questions à trancher et, en conséquence, établir quels documents potentiellement pertinents doivent être produits.

[45]  Selon l’EDP de la Commission (qui a été adopté par la plaignante et qui correspond à l’énoncé des questions en litige de l’intimée dans son EDP), voici ce qui est spécifiquement en jeu dans la présente affaire :

a)  si l’invalidité de la plaignante était un facteur dans le refus allégué de privilèges de voyage, en violation des articles 7 et 10 de la Loi;

b)  si la politique de l’intimée est discriminatoire à l’égard des employés atteints d’une déficience, aux termes de l’article 10 de la Loi;

c)  si l’intimée peut fournir une justification qui est non discriminatoire, et non pas un prétexte;

d)  en cas de pratique discriminatoire au sens de la Loi, quels redressements devraient être prévus?

[46]  Pour prouver de telles allégations, la plaignante devra établir, selon la prépondérance des probabilités, ce qui suit :

a)  elle est atteinte d’une déficience;

b)  elle a été défavorisée dans le cadre de son emploi;

c)  sa déficience constituait un facteur, mais pas nécessairement l’unique facteur, du traitement défavorable [14] .

[47]  En outre, en ce qui concerne l’article 10 de la Loi, la plaignante devra prouver que son employeur a établi ou appliqué une politique ou une pratique, fondée sur un motif de distinction illicite, qui la prive ou tend à la priver de possibilités d’emploi.

[48]  S’il y a conclusion de discrimination, la plaignante demandera au Tribunal d’ordonner des redressements, notamment l’adjudication de dommages-intérêts pour préjudice moral et une indemnité pour les pertes qu’aurait subies la plaignante du fait de l’impossibilité de voyager au titre de la politique sur les privilèges de voyage de l’intimée ou à un tarif réduit avec d’autres compagnies aériennes.

[49]  L’intimée conteste le fait que la plaignante se soit vu refuser des privilèges de voyage au titre de la politique en raison de sa déficience. L’intimée a indiqué que, s’il est établi que la FSVA est discriminatoire à première vue, elle peut prouver que la sécurité des voyages aériens est une justification légitime et raisonnable pour exiger qu’une FSVA soit remplie avant qu’une personne puisse prendre l’avion dans ces circonstances [15] .

A.  Documents confirmant la déficience

[50]  L’intimée fait remarquer que, dans son EDP, la plaignante s’est engagée à divulguer des documents confirmant sa déficience dans le cadre de la présente procédure. L’intimée n’est pas satisfaite de la documentation limitée fournie par la plaignante à cet égard. Comme il a été indiqué précédemment, l’intimée a ensuite élargi la portée des documents médicaux demandés afin d’inclure tous les documents médicaux en possession ou sous le contrôle de la plaignante concernant : a) les caractéristiques spécifiques de sa déficience et b) tout autre trouble ou problème médical décrit dans la FSVA de l’intimée, qu’il soit ou non lié à sa déficience.

[51]  L’intimée soutient que, pour établir un cas de discrimination à première vue, la plaignante doit prouver, selon la prépondérance des probabilités, qu’elle est atteinte d’une déficience, car cet élément est au cœur de sa plainte. La plaignante et la Commission font remarquer que l’existence de la déficience de la plaignante n’a jamais été mise en cause. En effet, c’est son statut d’employée qui reçoit des prestations d’invalidité de longue durée qui l’a amenée à subir, de la part de l’intimée, le traitement discriminatoire allégué, en raison de sa politique.

[52]  Dans son avis de requête, l’intimée a déclaré que [traduction] « les employés [étaient] admissibles aux prestations du RCRI si leur cas correspond[ait] à une invalidité totale, définie dans le régime comme un état médical empêchant l’employé “d’exercer toute occupation lucrative pour laquelle [il est] raisonnablement qualifié en raison de [son] instruction, de [sa] formation ou de [son] expérience” ». En reconnaissant qu’elle reçoit des prestations du RCRI, l’intimée semble reconnaître qu’elle est atteinte d’une déficience pour les besoins de la présente plainte.

[53]  Bien entendu, c’est le Tribunal qui décide si la plaignante est atteinte d’une déficience pour les besoins de la Loi. La Cour d’appel fédérale a défini la déficience au sens juridique comme étant un handicap physique ou mental, qui occasionne une limitation fonctionnelle ou qui est associé à la perception d’un handicap [16] . La preuve requise pour prouver qu’un plaignant est atteint d’une déficience varie d’un cas à l’autre. Cependant, la jurisprudence donne à penser qu’un plaignant n’est pas tenu d’établir la preuve d’une déficience au moyen d’un diagnostic médical [17] .

[54]  Je suis d’avis que l’argument le plus convaincant de l’intimée est que les documents relatifs à la déficience de la plaignante sont potentiellement pertinents au regard de la présente procédure, car elle a elle-même mis en cause les détails de sa déficience. Elle affirme que la FSVA exige [traduction] « des renseignements beaucoup plus privés et confidentiels » à son sujet que ceux requis de la part de passagers non employés atteints d’une déficience identique ou semblable, et en plus grande quantité que ce qui est apparemment requis pour les besoins de la politique. Dans sa réplique à l’EDP de l’intimée, la plaignante déclare que [traduction] « son trouble médical n’est pas manifestement visible ni pertinent en ce qui concerne la sécurité d’un vol ». Dans les observations écrites de l’intimée à l’appui de sa requête, elle a inclus une lettre de l’avocat de la plaignante indiquant que la raison pour laquelle la plaignante refusait de divulguer les documents médicaux demandés était liée à [traduction] « la question fondamentale dont le Tribunal [était] saisi, à savoir : “La politique de l’intimée en matière de divulgation de ces renseignements personnels est-elle discriminatoire?” La position de la plaignante est qu’une confirmation de la part de son médecin selon laquelle elle n’est atteinte d’aucune déficience qui aurait une incidence sur sa capacité de voyager est tout à fait suffisante pour les besoins des opérations de l’intimée ».

[55]  L’intimée a raison de dire que le bien-fondé de la plainte et les positions respectives des parties ne sont pas en cause à ce stade préliminaire et qu’un tel énoncé définitif de la plaignante reste à prouver à l’audience. La présente requête porte sur la question de savoir si les documents demandés par l’intimée respectent le seuil minimal de pertinence potentielle au regard des questions soulevées dans la présente instance. Cela comprend la position de l’intimée à l’égard du dossier de la plaignante et sa propre défense. Dans la décision Egan, précitée, le Tribunal a déclaré, au paragraphe 34 :

En ce qui concerne les documents médicaux, le Tribunal a conclu que le droit de l’intimée de « connaître les motifs et la portée de la plainte dont il fait l’objet » l’emporte sur les droits à la confidentialité et à la vie privée (Guay, au paragraphe 45). Comme il est énoncé dans Guay, « [l]a justice, dans des procédures en matière de droits de la personne, exige que l’on permette à la partie intimée de présenter une défense pleine et entière à l’argumentation de la partie plaignante. Si la plaignante plaide sa cause en se fondant sur son état de santé, l’intimée a le droit d’obtenir les renseignements de santé pertinents qui peuvent avoir trait à la réclamation » (voir Guay, au paragraphe 45; voir aussi Palm, au paragraphe 11).

[56]  L’intimée affirme qu’elle a besoin des dossiers médicaux de la plaignante pour se défendre contre l’allégation de discrimination. Elle dit qu’elle a besoin de documents détaillant les particularités de la déficience de la plaignante afin de pouvoir répondre à ses allégations, y compris celles concernant des passagers hypothétiques possédant des caractéristiques identiques. L’intimée fait valoir que, pour plaider en faveur d’une contrainte excessive dans le cadre de sa défense, elle doit être en mesure de répondre aux allégations de la plaignante concernant la nature de sa déficience alléguée et d’en établir la pertinence pour les besoins de la politique, notamment en ce qui a trait à la sécurité des vols.

[57]  Dans ses observations relatives à la requête, la plaignante affirme que, si le Tribunal ordonne la divulgation de tout document médical, il rejettera essentiellement sa plainte, car cela entérinerait et confirmerait la politique discriminatoire de l’intimée tout en la privant du droit d’être protégée contre l’intrusion injustifiée de son employeur dans ses affaires médicales privées. Je ne peux pas accepter cette affirmation. La plainte ne sera rejetée que si la plaignante ne prouve pas qu’elle a été défavorisée dans le cadre de son emploi et que sa déficience était un facteur de ce traitement défavorable, ou si l’intimée prouve qu’elle a un motif justifiable pour imposer les exigences de sa politique. Ordonner à la plaignante de divulguer d’autres documents dans le processus de gestion de l’instance ne constitue pas un rejet de la plainte.

[58]  Je conviens que la plaignante a mis en cause les détails de sa déficience dans sa plainte. Ainsi, l’équité procédurale et l’alinéa 6(1)d) des Règles du Tribunal autorisent l’intimée à répondre à ces allégations en ayant une connaissance suffisante de la déficience de la plaignante.

[59]  L’intimée a demandé que j’ordonne la divulgation de [traduction] « tous les documents médicaux en possession ou sous le contrôle de la plaignante concernant : a) les caractéristiques spécifiques de sa déficience ». L’intimée convient que le dossier du RCRI de la plaignante contiendra ces documents. La demande relative à [traduction] « tous les documents médicaux » afférents à sa déficience semble être trop large, tandis que l’intimée convient que les documents faisant partie du dossier du RCRI contiendront les renseignements qu’elle recherche. Par conséquent, je refuse d’ordonner à la plaignante de divulguer tous les documents médicaux en sa possession ou sous son contrôle concernant les caractéristiques spécifiques de sa déficience.

[60]  En l’espèce, la déficience de la plaignante lui a permis de recevoir des prestations d’assurance invalidité de longue durée par l’intermédiaire de l’administrateur du régime d’assurance de l’intimée. Afin de rester admissible à ces prestations, la plaignante doit continuer à prouver qu’elle est atteinte d’une déficience pour l’application du régime d’assurance en fournissant régulièrement des documents médicaux. Il est donc juste de supposer que son dossier du RCRI contiendrait une documentation confirmant la déficience de la plaignante et fournissant suffisamment de renseignements sur les détails de la déficience. De ce fait, j’accepte d’ordonner à la plaignante de divulguer certains documents de son dossier du RCRI, comme il est décrit dans la prochaine section de la présente décision (« B. Dossier du RCRI »).

[61]  En ce qui concerne la deuxième partie de la demande élargie de l’intimée, soit [traduction] « tous les documents médicaux en possession ou sous le contrôle de la plaignante concernant : […] b) tout autre trouble ou problème médical décrit dans la FSVA de l’intimée, qu’il soit ou non lié à sa déficience », je refuse d’ordonner la divulgation de cette catégorie de documents.

[62]  L’intimée laisse entendre que cette demande supplémentaire satisfait plus efficacement au critère selon lequel la description des documents « devrait être identifiée de façon minutieuse », décrit dans l’affaire Guay, que les documents énumérés dans l’EDP de la plaignante. Avec respect, je ne peux accepter cette affirmation.

[63]  L’intimée a déclaré que tous les documents médicaux en possession ou sous le contrôle de la plaignante qui sont directement pertinents pour la FSVA sont pertinents au regard de la présente procédure et du différend entre les parties concernant l’obligation de la remplir. Bien que la plaignante s’oppose à l’étendue des renseignements médicaux confidentiels requis par la FSVA, sa plainte est fondée sur l’exigence de l’intimée selon laquelle, pour pouvoir utiliser les privilèges de déplacement accordés aux employés au titre de la politique, elle doit d’abord remplir la FSVA, tout simplement parce qu’elle est atteinte d’une déficience pour laquelle elle reçoit des prestations d’invalidité de longue durée.

[64]  Bien que la déficience incapacitante pour laquelle la plaignante reçoit des prestations d’ILD soit estimée pertinente au regard de la plainte, les observations de l’intimée ne permettent pas de comprendre en quoi les documents relatifs à tout autre trouble médical décrit dans la FSVA sont pertinents au regard de la présente plainte, y compris la défense de l’intimée. Je ne suis pas convaincue que l’intimée a établi la pertinence potentielle de cette large catégorie supplémentaire de documents médicaux demandés. De ce fait, je refuse d’ordonner leur divulgation.

B.  Dossier du RCRI

[65]  L’intimée fait valoir qu’elle exige la divulgation de l’ensemble du dossier du RCRI de la plaignante. Dans son avis de requête, l’intimée décrit les documents du RCRI de la façon suivante : [traduction] « documents et correspondance, y compris des documents contenant des renseignements médicaux, soumis par la plaignante à l’administrateur et/ou au souscripteur d’un régime d’assurance invalidité par l’intermédiaire duquel la plaignante reçoit des prestations d’assurance-salaire dans le cadre de son emploi avec l’intimée ». L’intimée fait remarquer que l’administrateur est la société Canadian Benefits Consulting Ltd. et que le souscripteur est la Société Financière Manuvie (désignée par l’intimée comme les [traduction] « organisations du RCRI »). Bien qu’elle ne connaisse pas la nature exacte de tous les documents au dossier, l’intimée sait que le dossier du RCRI contient des renseignements que la plaignante est tenue de fournir à Manuvie tous les trois à six mois afin de continuer à être admissible aux prestations d’ILD, comme il est indiqué dans la plainte en matière de droits de la personne déposée par la plaignante en date du 15 mai 2015. Toutes les parties reconnaissent que la plaignante est en situation d’ILD depuis 2007.

[66]  L’intimée affirme que le dossier du RCRI est pertinent au regard des questions suivantes :

  (i)  la nature spécifique de la déficience de la plaignante;

  (ii)  le désagrément et le préjudice que la plaignante a subis du fait qu’elle a dû remplir la FSVA, comme elle l’allègue dans son EDP;

  (iii)  si les renseignements médicaux que la plaignante a soumis précédemment à l’intimée sont dignes de foi, y compris une FSVA remplie en 2012;

  (iv)  si le fait de se fier aux auto-évaluations des employés ou à l’opinion de leur médecin entraînerait une contrainte excessive pour l’intimée, comme elle l’allègue dans son EDP;

  (v)  si l’obligation pour la plaignante de remplir une FSVA pendant qu’elle reçoit des prestations au titre du RCRI constitue un cas de discrimination à première vue.

[67]  J’ai déjà abordé la question de la nature spécifique de l’invalidité de la plaignante et les raisons pour lesquelles je crois que certains documents du dossier du RCRI de la plaignante sont potentiellement pertinents à cet égard.

[68]  En ce qui concerne l’argument de l’intimée selon lequel le dossier du RCRI est pertinent quant à la question du traitement défavorable allégué ainsi que du désagrément et du préjudice que la plaignante a subis en raison de la politique, je remarque que la plaignante décrit l’exigence d’avoir à remplir une FSVA avant de pouvoir réserver un voyage au titre de la politique comme étant lourde, pénible et coûteuse, car elle doit prendre rendez-vous avec son médecin pour remplir la FSVA.

[69]  L’intimée conteste le fait qu’une FSVA doit être remplie pour chaque demande de voyage, car les autorisations de voyager et la durée des approbations sont fondées sur des évaluations individualisées de l’état de santé des passagers par le spécialiste. L’intimée laisse entendre que, en tout état de cause, l’obligation de remplir une FSVA pour pouvoir voyager ne constitue pas une discrimination à première vue ni ne cause de désagrément ou de préjudice à la plaignante, puisqu’elle est tenue d’obtenir et de transmettre régulièrement des renseignements médicaux similaires à un médecin afin de continuer à recevoir des prestations d’ILD. L’intimée a déclaré que le dossier du RCRI indiquera la nature et la fréquence des formulaires à soumettre pour pouvoir rester en statut d’invalidité de longue durée.

[70]  Je constate la pertinence potentielle de certains documents du dossier du RCRI concernant la question de savoir si l’obligation pour la plaignante de remplir une FSVA tout en recevant des prestations au titre du RCRI constitue un cas de discrimination à première vue et concernant les dommages-intérêts demandés par la plaignante. Cependant, je ne suis pas convaincue que la divulgation de l’ensemble du dossier du RCRI de la plaignante soit nécessaire.

[71]  L’intimée demande également le dossier du RCRI en raison de deux documents divulgués par la plaignante au cours de la présente procédure qui concernent son état de santé. Une FSVA datant de février 2012 indique que la plaignante présente des [traduction] « antécédents de dépression actuellement en rémission » et [traduction] « une anxiété occasionnelle et des humeurs dépressives, bien que celles-ci soient légères ». Le deuxième document est une brève lettre du 9 février 2018 de la Dre H. Fourie affirmant que [traduction] « l’invalidité de Billie n’affecte pas sa capacité de voyager en voiture, en autobus, en train ou en avion. Il n’existe aucune raison d’ordre médical de lui refuser l’accès à un quelconque moyen de transport [18] . »

[72]  L’intimée affirme que les documents du RCRI sont potentiellement pertinents pour déterminer si les opinions et les renseignements médicaux de tiers soumis par la plaignante dans la présente procédure [traduction] « sont fiables et/ou compatibles avec les renseignements médicaux soumis aux organisations du RCRI dans le but d’obtenir des prestations d’assurance-salaire ». Elle souligne qu’il est important de s’en remettre à son spécialiste pour évaluer les renseignements médicaux eu égard à ses exigences de sécurité. L’intimée dit qu’elle fera valoir qu’elle subirait une contrainte excessive si elle devait s’appuyer soit sur les évaluations subjectives des employés concernant la sécurité des voyages aériens, soit sur l’opinion du médecin de famille de l’employé uniquement, car seul son spécialiste possède les connaissances requises pour prendre cette décision. L’intimée affirme que les médecins généralistes n’ont pas l’expertise requise pour donner des conseils sur les rigueurs du transport aérien. Je constate la pertinence potentielle de certains documents médicaux du dossier du RCRI par rapport aux questions de fiabilité des éléments de preuve et de la défense de contrainte excessive de l’intimée.

[73]  En ce qui concerne l’argument de la Commission selon lequel les dossiers médicaux de la plaignante sont assujettis à un privilège de common law, je souligne que l’alinéa 6(1)d) des Règles du Tribunal oblige les parties à divulguer tous les documents qu’elles ont en leur possession « pour lesquels aucun privilège de non-divulgation n’est invoqué » et qui sont pertinents à un fait, une question ou une forme de redressement demandée en l’occurrence. Bien que la plaignante mentionne brièvement dans ses observations que les renseignements requis dans la FSVA sont [traduction] « confidentiels », elle ne prétend pas précisément que les renseignements médicaux demandés par l’intimée sont confidentiels et ne doivent donc pas faire l’objet d’une ordonnance de divulgation.

[74]  Quoi qu’il en soit, puisque j’ai décidé d’ordonner uniquement la divulgation de certains documents du dossier du RCRI de la plaignante, et non de ses dossiers médicaux provenant directement de ses médecins, je ne suis pas d’avis qu’un privilège de common law s’applique. Comme le souligne l’intimée, il est difficile d’affirmer que les documents du RCRI devraient rester confidentiels, car ils ont été créés, vraisemblablement par les médecins de la plaignante, dans le but d’être divulgués à l’assureur de l’intimée, afin de prouver l’admissibilité de la plaignante à des prestations d’invalidité de longue durée. De ce fait, il n’est pas satisfait au premier critère Wigmore (énoncé dans la note en bas de page 1).

[75]  À mon avis, il n’est pas non plus satisfait au quatrième critère Wigmore, puisque je ne suis pas convaincue que le « préjudice que subirait la relation [médecin-patient] par la divulgation des communications » est « plus considérable que l’avantage à retirer d’une juste décision ». En ce qui concerne les documents médicaux, le Tribunal a déjà conclu que le droit de l’intimée de connaître la portée de la plainte dont elle fait l’objet l’emporte sur les droits à la confidentialité et à la vie privée, puisque « [l]a justice, dans des procédures en matière de droits de la personne, exige que l’on permette à la partie intimée de présenter une défense pleine et entière à l’argumentation de la partie plaignante. Si la plaignante plaide sa cause en se fondant sur son état de santé, l’intimée a le droit d’obtenir les renseignements de santé pertinents qui peuvent avoir trait à la réclamation [19]  ».

[76]  L’intimée a mis en évidence la pertinence potentielle de certains des documents médicaux demandés eu égard à sa réponse à la plainte. De ce fait, je conviens que le droit de la plaignante à la vie privée au sujet des documents du RCRI visés par l’ordonnance est éclipsé par le droit de l’intimée de présenter une défense complète pour « une juste décision » en l’espèce.

[77]  La Commission fait également valoir que, si j’accepte d’ordonner la divulgation de l’un des documents médicaux de la plaignante, je devrais imposer des limites ou des conditions en ce qui concerne les personnes qui peuvent recevoir, examiner ou copier les documents, et qu’il devrait y avoir des limites ou des conditions quant à l’utilisation des renseignements. J’y reviendrai dans mon ordonnance ci-dessous.

[78]  Comme je l’ai déjà mentionné, je conviens que certains des documents contenus dans le dossier du RCRI sont potentiellement pertinents au regard de certaines des questions indiquées par l’intimée, mais je ne suis pas convaincue que la plaignante doive divulguer l’intégralité de son dossier du RCRI qui contient des documents couvrant onze années.

[79]  Bien que la plaignante ait déposé sa plainte en matière de droits de la personne auprès de la Commission le 15 mai 2015, apparemment en réponse à la mise en place de la version révisée de la politique de l’intimée, sa plainte indique que la discrimination alléguée qui a fait l’objet de la plainte a débuté en décembre 2012 et qu’elle [traduction] « se poursuit et s’aggrave ». Dans sa plainte et dans son EDP, elle fait référence à des événements qui se sont manifestement produits avant mai 2015, notamment l’impossibilité de se rendre à l’anniversaire de sa mère et les problèmes qu’elle a rencontrés pour se rendre à Vancouver à partir de Campbell River depuis qu’elle y a déménagé en 2011. Je remarque qu’elle a également déjà divulgué une FSVA datée du 22 février 2012. Je constate la pertinence potentielle de consulter les documents médicaux que la plaignante a été tenue de présenter tous les trois à six mois afin de conserver ses prestations d’invalidité de longue durée pendant la période pertinente à la plainte. De ce fait, j’ordonnerai à la plaignante de fournir, à partir de son dossier du RCRI, les documents qu’elle est tenue de soumettre tous les trois à six mois à l’assureur afin de pouvoir continuer à être admissible à des prestations d’invalidité de longue durée, de février 2012 à novembre 2018.

C.  Documents relatifs à des rendez-vous médicaux à Vancouver

[80]  Comme la plaignante a fait valoir dans son EDP qu’elle avait subi des dommages personnels du fait d’avoir perdu accès aux [traduction] « professionnels de la santé compétents dans le traitement de son trouble spécifique en raison de son incapacité de voyager à tarif économique pour se rendre à leur cabinet dans la région du Grand Vancouver », les documents relatifs à la planification des rendez-vous médicaux dans la région du Grand Vancouver, s’ils existent, sont potentiellement pertinents à la question de la réparation. De ce fait, j’ordonne qu’ils soient produits.

D.  Documents relatifs à des rendez-vous médicaux à Campbell River

[81]  L’intimée a demandé des documents relatifs aux efforts déployés par la plaignante, le cas échéant, pour obtenir un traitement ou des rendez-vous à Campbell River ou aux alentours, à tout moment pertinent relativement à la plainte. Je conviens que de tels documents, s’ils existent, sont potentiellement pertinents pour qui veut déterminer si la plaignante était obligée de se rendre à Vancouver afin de se faire soigner et si elle avait subi des [traduction] « dommages personnels » en raison de la perte alléguée de son accès à ce traitement, comme il est décrit dans son EDP. Ces documents peuvent également être pertinents à la question de l’atténuation des dommages que l’intimée peut soulever. De ce fait, j’ordonne qu’ils soient produits.

E.  Documents de vente de la propriété à Vancouver

[82]  Comme la plaignante a fait valoir qu’elle avait subi des dommages personnels en raison de [traduction] « la détresse émotionnelle importante résultant de l’obligation de vendre son bien immobilier situé à Vancouver une fois que les avantages liés aux voyages à tarif réduit ont été refusés », ces documents sont potentiellement pertinents en ce qui concerne la réparation et au regard de la question de l’atténuation des dommages allégués, si l’intimée soulève la question. De ce fait, j’ordonne qu’ils soient produits.

[83]  Pour les motifs énoncés ci-dessus, la requête est accueillie en partie.

VIII.  Ordonnance

[84]  Il est ordonné que la plaignante produise immédiatement tous les documents suivants demandés par l’intimée, à savoir :

  • (i) Les documents médicaux de son dossier du RCRI qu’elle est tenue de déposer auprès de l’assureur tous les trois à six mois (ou toute autre période prescrite par les organisations du RCRI) afin de conserver son admissibilité aux prestations d’invalidité de longue durée, de février 2012 à novembre 2018. Ces documents ne peuvent être invoqués que dans le cadre de la présente audience relative aux droits de la personne, et non à d’autres fins ni dans le cadre d’une procédure judiciaire. En outre, la divulgation de ces documents ne signifie pas qu’ils seront admissibles en tant qu’éléments de preuve à l’audience, et toute question à cet égard devra être traitée lors de l’audience. Si la plaignante souhaite s’opposer à ce que des renseignements contenus dans ces documents fassent partie du dossier public, elle devrait également en faire part lors de l’audience.

 

  • (ii) Tous les documents concernant ses efforts pour obtenir des soins médicaux à Campbell River, ainsi que des documents relatifs aux rendez-vous médicaux à Vancouver et à la vente de sa propriété à Vancouver, à tout moment pertinent relativement à la plainte. Si aucun autre document n’est disponible, la plaignante doit notifier par écrit l’intimée que, à la suite d’une recherche diligente, aucun autre document relevant de ces catégories n’a été trouvé.

 

Signée par

Colleen Harrington

Membre du Tribunal

Ottawa (Ontario)

Le 9 novembre 2018

 


Tribunal canadien des droits de la personne

Parties au dossier

Dossier du tribunal : T2242/6417

 

Intitulé de la cause : Billie Mortimer c. Air Canada

 

Date de la décision sur requête du tribunal : Le 9 novembre 2018

Requête traitée par écrit sans comparutions des parties

 

Représentations écrites par :

 

Raymond Hall, pour la plaignante

 

Daniel Poulin , pour la Commission canadienne des droits de la personne

 

Andrew Woodhouse, pour l'intimée



[1] En common law, les critères Wigmore sont appliqués pour établir l’existence d’un privilège relatif aux communications :

  • 1) Les communications doivent avoir été transmises confidentiellement avec l’assurance qu’elles ne seront pas divulguées;

  • 2) Le caractère confidentiel doit être un élément essentiel au maintien complet et satisfaisant de la relation entre les parties;

  • 3) La relation doit être de la nature de celles qui, selon l’opinion de la collectivité, doivent être entretenues assidûment;

  • 4) Le préjudice que subirait la relation par la divulgation des communications doit être plus considérable que l’avantage à retirer d’une juste décision.

[2] Voir Charkaoui c. Canada (Citoyenneté et Immigration), 2007 CSC 9, au paragraphe 53; Leslie Palm c. International Longshore and Warehouse Union et al., 2012 TCDP 11, au paragraphe 9; Egan c. Agence du revenu du Canada, 2017 TCDP 33, au paragraphe 29.

[3] Alinéas 6(1)d) et e) des Règles de procédure du Tribunal; Guay c. Canada (Gendarmerie royale), 2004 TCDP 34, au paragraphe 40; Malenfant c. Vidéotron s.e.n.c., 2017 TCDP 11, au paragraphe 26.

[4] Guay, précitée, au paragraphe 42; Warman c. Bahr, 2006 TCDP 18, au paragraphe 6; Egan, précitée, au paragraphe 31; Turner c. Agence des services frontaliers du Canada, 2018 TCDP 1, au paragraphe 30.

[5] Warman, précitée, au paragraphe 9.

[6] Warman, précitée, au paragraphe 6; Egan, précitée, au paragraphe 31.

[7] Guay, précitée, au paragraphe 43; Egan, précitée, au paragraphe 32.

[8] Guay, précitée, au paragraphe 43; Turner c. Agence des services frontaliers du Canada, 2018 TCDP 9, au paragraphe 25.

[9] Guay, précitée, au paragraphe 45; voir également Egan, précitée, au paragraphe 34.

[10] Voir Brickner c.la Gendarmerie royale du Canada, 2017 TCDP 28, au paragraphe 8; voir également Yaffa c. Air Canada, 2014 TCDP 22, au paragraphe 4; Seeley c. Compagnie des chemins de fer nationaux du Canada, 2013 TCDP 18, au paragraphe 7.

[11] Brickner, précitée, au paragraphe 7; voir également le paragraphe 48.9(1) de la Loi.

[12] Guay, précitée, au paragraphe 53; Brickner, précitée, au paragraphe 9; voir également Association des employé(e)s de télécommunication du Manitoba inc. c. Manitoba Telecom Services, 2007 TCDP 28, au paragraphe 4.

[13] 2018 TCDP 1, au paragraphe 43.

[14] Voir Stewart c. Elk Valley Coal Corp., 2017 CSC 30 (CanLII), au paragraphe 69, citant Moore c. Colombie‑Britannique (Éducation), 2012 CSC 61, au paragraphe 33 et Québec (Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse) c. Bombardier Inc. (Bombardier Aéronautique Centre de formation), 2015 CSC 39, au paragraphe 35.

[15] Pour établir qu’une norme ou une exigence est justifiée, un intimé doit généralement prouver : (i) qu’il a adopté la norme dans un but ou objectif rationnellement lié aux fonctions exercées; (ii) qu’il a adopté la norme de bonne foi, en croyant qu’elle était nécessaire pour réaliser ce but ou cet objectif; (iii) que la norme est raisonnablement nécessaire à la réalisation de son but ou objectif, en ce sens que l’intimé ne peut pas composer avec les personnes qui ont les mêmes caractéristiques que le plaignant sans que cela lui impose une contrainte excessive, compte tenu de la santé, de la sécurité et du coût (Colombie-Britannique (Superintendent of Motor Vehicles) c. Colombie-Britannique (Council of Human Rights) [1999] 3 R.C.S. 868 (Grismer), au paragraphe 20, ainsi que l’alinéa 15(1)a) et le paragraphe 15(2) de la Loi).

[16] Desormeaux c. Ottawa (Ville), 2005 CAF 311, au paragraphe 15.

[17] Voir Nova Scotia Liquor Corporation, 2016 CA N.‑É. 28, aux paragraphes 63 à 76.

[18] Bien que le Tribunal ne reçoive pas de copies des documents des parties au cours du processus de gestion de l’instance, il reçoit les listes de documents échangés entre les parties, comme l’exige l’alinéa 6(1)d) des Règles. Dans la liste des documents de l’intimée, je note qu’il est fait référence à des Fiches de santé pour voyage aérien datées des 7 septembre 2012, 30 septembre 2013 et 1er septembre 2017.

 

[19] Guay, précitée, au paragraphe 45; voir également Egan, précitée, au paragraphe 34.

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