Tribunal canadien des droits de la personne

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Tribunal canadien
des droits de la personne

Les armoiries du Tribunal

Canadian Human
Rights Tribunal

Référence : 2018 TCDP 2

Date : le 5 janvier 2018

Numéro du dossier : T2125/4115

[TRADUCTION FRANÇAISE]

Entre :

Kayreen Brickner

la plaignante

‑ et ‑

Commission canadienne des droits de la personne

la Commission

‑ et ‑

Gendarmerie royale du Canada

l'intimée

Décision sur requête

Membre instructeur : David L. Thomas

 



I.  La plainte et les requêtes aux fins de la modification de l’exposé des précisions

[1]  La caporale Kayreen Brickner (la plaignante ou la cpl Brickner) est une femme membre de la Gendarmerie royale du Canada (la GRC), l’intimée en l’espèce. La caporale est mariée à un autre membre de la GRC, et le couple a quatre enfants mineurs. La plaignante et son époux, le caporal Marinis (le cpl Marinis), avaient été déployés ensemble par la GRC à la Division E, à Squamish, en Colombie‑Britannique. En avril 2012, le cpl Marinis a posé sa candidature à un poste de la GRC à Whitehorse, au Yukon, ce qui exigeait que son épouse et ses enfants déménagent de la Colombie‑Britannique pour s’installer au Yukon. Le cpl Marinis a commencé à travailler à Whitehorse en janvier 2013, mais sa famille est restée à Squamish.

[2]  Dans son exposé des précisions (EDP) daté du 9 mai 2016, la plaignante affirme que la GRC a accepté de faire de son mieux pour l’aider en lui trouvant un nouveau poste à Whitehorse. Toutefois, la plaignante soutient également que, en juin 2012, la GRC du Yukon (Division M) lui a seulement offert un poste qui ne lui permettait pas de s’acquitter de ses responsabilités parentales. Après avoir donné naissance à un quatrième enfant en octobre 2013, et à la fin de son congé de maternité et d’autres congés, la cpl Brickner est retournée au travail à Squamish le 13 octobre 2014. Elle a commencé à travailler à Whitehorse en janvier 2015.

[3]  La cpl Brickner soutient qu’à la suite de son refus de l’offre d’emploi qui lui avait été présentée en juin 2012, la Division M a omis de l’informer des autres possibilités d’emploi et, en contradiction avec les pratiques de la GRC, a pourvu des postes en y nommant d’autres candidats plutôt que la plaignante. Elle prétend que cela constituait de la discrimination fondée sur le sexe et la situation de famille. Elle fait également part de deux actes de représailles dans son exposé des précisions initial.

[4]  Dans une décision précédente du Tribunal canadien des droits de la personne (le Tribunal), (Brickner c Gendarmerie royale du Canada, 2017 TCDP 28 (Brickner)), un volet de la requête en divulgation visant certains documents présentée par la cpl Brickner a été rejeté, parce qu’il n’existait aucun lien entre les documents demandés et les allégations avancées dans l’EDP de la plaignante. Les documents dont la divulgation a été refusée par cette décision avaient trait à deux actes de représailles très spécifiques touchant des évaluations du rendement et des nominations intérimaires dont la cpl Brickner n’avait pas parlé dans son EDP. Le Tribunal a déterminé que le fait d’accueillir ce qui équivaut à de nouvelles allégations de représailles sans donner l’occasion à la GRC d’y répondre dans son EDP porterait préjudice à l’intimée.

[5]  En réaction aux conclusions défavorables exposées par le Tribunal dans cette décision antérieure, la cpl Brickner présente maintenant une requête distincte visant à modifier son EDP et à y ajouter plusieurs allégations de représailles. La nouvelle requête vise également la divulgation de certains documents en cas d’approbation.

[6]  Je tiens compte du fait que la cpl Brickner se représente elle‑même dans cette affaire. Au fil de la procédure, elle a prouvé qu’elle était intelligente et savait s’exprimer. Dans la mesure où le permet l’impartialité qui m’est imposée, j’ai tenté de guider la cpl Brickner pendant nos conférences téléphoniques de gestion d’instance (CTGI).

[7]  J’ai tenu une CTGI peu après avoir reçu la première version de cette requête, le 1er septembre 2017. Je voulais discuter de ses répercussions potentielles sur les prochaines dates d’audience, déjà confirmées, et discuter de certaines lacunes évidentes dans la requête de la cpl Brickner. Pendant la téléconférence, il est devenu évident que la cpl Brickner était convaincue qu’elle pouvait taire certaines informations dans sa requête et les présenter plus tard pendant l’audience. Toutefois, je lui ai expliqué le plus clairement possible qu’il était nécessaire de produire un EDP détaillé  afin que l’autre partie ne soit pas prise au dépourvu par une question formulée pendant une audience. Conformément à l’esprit et à l’intention de la Loi canadienne sur les droits de la personne, LRC (1985), ch H‑6 (la Loi) et des Règles de procédure du Tribunal canadien des droits de la personne (03‑05‑04) (les Règles), il convient de s’assurer que les parties ont la possibilité de présenter intégralement leur preuve et leurs arguments relativement aux questions en litige. Ainsi, les allégations présentées dans les EDP doivent comprendre suffisamment de détails pour que la partie intimée puisse préparer adéquatement sa réponse. Compte tenu de la discussion qui s’est déroulée pendant la CTGI, la cpl Brickner a été invitée à modifier sa requête et à y ajouter des détails, ce qu’elle a fait quelques jours plus tard.

[8]  La requête, dans sa forme actuelle, a exigé davantage qu’une correction des lacunes soulignées dans la précédente décision Brickner (précitée). En plus d’y adjoindre les deux allégations de représailles qui y étaient mentionnées, la cpl Brickner a ajouté de nombreuses allégations de représailles classées dans deux nouvelles catégories. Malheureusement, ces nouvelles allégations ne sont pas toutes suffisamment détaillées. Selon les Règles, chaque partie doit indiquer « les faits pertinents que la partie cherche à établir à l’appui de sa cause […] » (alinéa 6(1)a) des Règles).

[9]  Selon l’article 48.9(1) de la Loi, le Tribunal est tenu de procéder « sans formalisme et de façon expéditive », comme les principes de justice naturelle l’exigent et comme les Règles le permettent. En même temps, aux termes de l’article 50(1) de la Loi, les parties doivent avoir « la possibilité pleine et entière » de présenter leur cause pendant une audience. Par conséquent, il faut trouver le juste équilibre entre le droit d’une partie d’avoir cette possibilité pleine et entière, et le droit de chaque partie de voir son instruction se dérouler de manière expéditive. Afin d’y parvenir, pour les motifs énoncés ci‑dessous, je n’accepterai pas toutes les nouvelles allégations avancées par la cpl Brickner. En particulier, à la lumière des instructions précises que j’ai données à la cpl Brickner pendant notre CTGI, je dois conclure que cette dernière, lorsqu’elle a persisté à présenter des allégations vagues, doit l’avoir fait délibérément, de façon à pouvoir présenter pendant l’audience des éléments de preuve auxquels l’intimée pourrait ne pas être prête à répondre.

II.  La modification des plaintes et des exposés des précisions

[10]  Comme il est indiqué plus haut, en vertu de l’article 50(1) de la Loi, les parties comparaissant devant le Tribunal doivent se voir donner la possibilité pleine et entière de présenter leur cause.

[11]  Le critère juridique qui s’applique à la modification d’un EDP est bien établi, et il a récemment été exposé par le Tribunal dans la décision Tabor c La Première Nation Millbrook, 2013 TCDP 9 (Tabor). Mme Tabor, la plaignante, voulait elle aussi modifier son EDP pour y ajouter des allégations de représailles. La décision Tabor décrivait ainsi les exigences juridiques :

[4] Il est bien établi que le Tribunal a le pouvoir de modifier une plainte « aux fins de déterminer les véritables questions litigieuses entre les parties » (Canderel Ltd. c. Canada, [1994] 1 CF 3 (CAF); cité dans Canada (Procureur général) c. Parent, 2006 CF 1313, au paragraphe 30). Pour décider s’il doit autoriser la modification, le Tribunal n’examine pas en détail le fond de la modification proposée. En règle générale, on devrait autoriser une modification, à moins qu’il soit manifeste et évident que les allégations faisant l’objet de la demande de modification ne sauraient être jugées fondées (voir Bressette c. Conseil de bande de la première nation de Kettle et Stony Point, 2004 TCDP 2, au paragraphe 6 [Bressette]; et Virk c. Bell Canada, 2004 TCDP 10, au paragraphe 7 [Virk]).

[5] Cela dit, une modification ne peut pas servir à introduire fondamentalement une nouvelle plainte, étant donné que cela contournerait le processus de renvoi prévu par la Loi (voir Gaucher c. Forces armées canadiennes, 2005 TCDP 1, aux paragraphes 7 à 9; et, Cook c. Première nation d’Onion Lake, 2002 CanLII 45929 (TCDP), aux paragraphes 11). La modification proposée doit être liée, du moins par le plaignant, aux allégations qui ont donné lieu à la plainte initiale (voir Virk, au paragraphe 7; Tran, Cam‑Linh (Holly) c. Agence du revenu du Canada, 2010 TCDP 31, aux paragraphes 17 et 18; et Société du soutien à l’enfance et à la famille des Premières Nations du Canada et al. c. Procureur général du Canada (pour le ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien), 2012 TCDP 24, au paragraphe 16 [SSEFPN et al.]).

[6] De plus, il faut examiner s’il pourrait y avoir préjudice lorsqu’une modification est proposée. Une modification ne doit pas être autorisée « [si elle] cause un préjudice à l’intimé » (Parent, au paragraphe 40).

[12]  Le plaignant qui désire établir une preuve prima facie de représailles doit démontrer qu’il a auparavant déposé une plainte pour atteinte aux droits de la personne, au titre de la Loi, qu’il a subi un effet défavorable du fait d’avoir déposé cette plainte et que la plainte pour atteinte aux droits de la personne était un facteur de cet effet défavorable (voir Société de soutien à l’enfance et à la famille des Premières Nations du Canada et al c Procureur général du Canada (pour le ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien), 2015 TCDP 14, au paragraphe 5). En outre, pour prouver que la plainte pour atteinte aux droits de la personne était un facteur du traitement préjudiciable prétendu, le plaignant doit à tout le moins présenter au Tribunal des éléments de preuve complets et suffisants prouvant qu’il est raisonnablement possible de percevoir qu’il y a eu des représailles (Première Nation Millbrook c Tabor, 2016 CF 894, aux paragraphes 62 à 64).

[13]  La décision Tabor expliquait les critères s’appliquant à une modification pour représailles aux paragraphes 12 et 13, ainsi :

[12]   Dans le contexte d’une requête en modification d’une plainte pour y ajouter des allégations de représailles, le Tribunal a déjà déclaré : « [i]l ne devrait pas être nécessaire que des allégations voulant que des représailles aient été exercées à la suite d’une plainte donnent lieu à une instance distincte » (Bressette, au paragraphe 6). Comme la Commission d’enquête de l’Ontario l’a déclaré dans Entrop v. Imperial Oil Ltd. (No. 3), (1994) 23 C.H.R.R. D/186, au paragraphe 9 :

[traduction]

Il serait irréaliste, inefficace et injuste d’exiger qu’une personne ne soulève des allégations de représailles que dans le cadre d’une instance distincte. Cela l’obligerait à retourner au bout de la file pour qu’il y ait enquête, conciliation et traitement de questions qui sont fondamentalement liées à une instance déjà en cours. Dans la mesure où les représailles visent à intimider ou à forcer un plaignant à renoncer au respect de ses droits prévus par le Code, cela entraverait l’intégrité de la procédure initiale et dévaloriserait l’objet évident du Code de protéger les plaignants des conséquences négatives qui peuvent survenir parce qu’ils ont demandé la protection prévue par le Code.

[13]   Par conséquent, « il est logique que la preuve relative à des actes commis en représailles du dépôt d’une plainte en matière de droits de la personne soit entendue dans le contexte de l’audience de cette même plainte » (Karen Schuyler c. Oneida Nation of the Thames, 2005 TCDP 10, au paragraphe 8, voir aussi SSEFPN et al., au paragraphe 16).

[14]  Le Tribunal rappelle aux parties que, en ce qui a trait aux mesures de redressement, l’objectif de l’article 53 de la Loi est non pas de punir la personne qui recourt à des pratiques discriminatoires, mais plutôt d’éliminer et de prévenir la discrimination (voir Robichaud c Canada (Conseil du Trésor), [1987] 2 RCS 84, au paragraphe 13; CN c Canada (Commission canadienne des droits de la personne), [1987] 1 RCS 1114, à la page 1134). De plus, au titre de l’article 52(2)e) de la Loi (préjudice moral), le Tribunal ne peut accorder une indemnisation de plus de 20 000 $. Le montant maximal de l’indemnisation que le Tribunal peut accorder au titre de l’article 53(3) de la Loi (acte délibéré ou inconsidéré) est également de 20 000 $ (voir Tanner c Première Nation Gambler, 2015 TCDP 19, aux paragraphes 166 à 172). Autrement dit, le montant maximal de l’indemnisation que le Tribunal peut ordonner au titre de ces deux préjudices à un seul plaignant est de 40 000 $, et le cas se présente uniquement dans des circonstances rares et exceptionnelles, lorsque le préjudice moral et le caractère délibéré ou inconsidéré de la conduite de l’intimé sont particulièrement flagrants. Bien qu’un acte de représailles soit une pratique discriminatoire indépendante (Première Nation Millbrook c Tabor, 2016 CF 894, au paragraphe 60), le Tribunal n'a jamais encore ordonné un redressement distinct et supplémentaire au titre des articles 52(2)e) et 53(3) lorsque les représailles ont été prouvées. Il s’agit là d’une question juridique dont les parties devraient peut‑être traiter pendant l’audience, étant donné que la cpl Brickner semble vouloir réclamer dans son EDP initial le montant maximal de l’indemnisation possible au titre des articles 52(2)e) et 53(3) de la Loi pour chacune des allégations de discrimination et de représailles, ce qui représente au total une indemnisation potentielle de plus de 200 000 $. Ce n’est pas parce que d’autres allégations de représailles sont accueillies que la limite s’appliquant aux préjudices est automatiquement relevée.

III.  Les questions préliminaires

[15]  Aux paragraphes 11 à 23 de sa réponse, l’intimée soutient que les modifications que propose la cpl Brickner dans sa requête constituent un abus de procédure et qu’elle menacerait la tenue en temps opportun et l’instruction efficace de la plainte.

[16]  L’intimée soutient que, exception faite de l’allégation concernant le défaut de présenter à la cpl Brickner ses évaluations du rendement, toutes les nouvelles allégations de représailles ont trait à des faits survenus en 2015 et étaient connues de la cpl Brickner au moment où elle a présenté son EDP initial, en mai 2016. L’intimée soutient que ces omissions étaient délibérées et que le fait de les ajouter aujourd'hui constituerait un abus de procédure.

[17]  L’intimée soutient en outre que le fait d’accueillir la requête en modification entraînerait des retards et nuirait à l’instruction efficace de la plainte. La GRC fait valoir que la requête a été présentée au Tribunal quelques semaines seulement avant la date prévue de l’audience, en octobre 2017. Les dates d’audience fixées au départ au mois de septembre 2017 avaient été déterminées plus de sept mois plus tôt, compte tenu des horaires difficilement compatibles des parties et de leurs avocats respectifs. Au bout du compte, les parties ont réservé neuf semaines pour cette audience qui devait au départ durer quatre semaines en tout. Après la présentation de la première requête par la cpl Brickner, les audiences qui avaient été fixées provisoirement en septembre ont été annulées. Toutes les dates qui avaient été jusque‑là réservées pour l’audience ont été annulées en raison de cette requête.

[18]  L’intimée fait valoir que l’approbation de la requête en modification entraînerait d’autres retards, puisque la Commission et l’intimé devraient modifier leurs EDP respectifs, chercher et présenter des documents supplémentaires jugés pertinents et prendre le temps de se préparer à l’audience.

[19]  En ce qui a trait à l’argument touchant l’abus de procédure, l’intimée reconnaît que les représailles alléguées ne se sont pas nécessairement toutes produites en 2015. J’ai examiné le dossier sans trouver un élément de preuve quelconque selon lequel la cpl Brickner avait délibérément omis une partie de ces allégations dans son EDP initial. En outre, je tiens compte du fait que la cpl Brickner se représente elle‑même et ne savait peut‑être pas à ce moment‑là comment présenter un compte rendu plus précis des représailles alléguées.

[20]  Je dois maintenant apprécier si le fait de permettre une modification quelconque porterait préjudice à l’intimée. Sans aucun doute, le fait de permettre à la cpl Brickner de modifier son EDP entraînerait un retard supplémentaire dans la préparation en vue du premier jour de l’audience. Je porte attention aux retards injustifiés et, de manière générale, j’aimerais que la procédure se déroule plus rapidement. Toutefois, comme il a déjà été mentionné, l’article 50(1) de la Loi veut que nous donnions à toutes les parties la possibilité pleine et entière de nous présenter leur cause. La cpl Brickner a déposé sa plainte le 9 avril 2013. Celle-ci n'a été transmise au Tribunal que le 25 novembre 2015 et, comme cela a été expliqué plus haut, aucune date d’audience n'a pu être fixée avant 2017 en raison de l’incompatibilité des horaires. Jusqu’ici, la cpl Brickner a fait preuve d’une grande patience quant au temps qui s’est écoulé entre le dépôt de sa plainte et la tenue d’une audience. L’intimée est un organisme de la Couronne et est représentée par les avocats du ministère de la Justice. Ces derniers aimeraient bien sûr que les choses avancent plus rapidement, mais je ne suis pas convaincu que le fait de donner à la cpl Brickner davantage de temps pour préparer son dossier comme il le faut constituerait une contrainte excessive pour l’intimée ou pour ses avocats.

[21]  Comme l’intimée l’a elle‑même reconnu, il n'aurait pas été raisonnable de s’attendre à ce que la cpl Brickner ait inclus dans ses allégations de représailles le défaut de l’intimée de lui remettre ses évaluations du rendement au moment où elle a présenté son EDP. Pour les motifs énoncés ci‑dessous, je conclus que cette modification doit lui être accordée. Compte tenu de l’ajout de cette allégation, j’estime que l’intimée ne subira aucune contrainte excessive du fait d’autoriser la cpl Brickner à ajouter certaines des autres allégations de représailles antérieures.

[22]  L’intimée soutient également que le fait de permettre une modification quelconque aurait pour conséquence probable de prolonger la durée de l’audience et d’exiger la comparution de témoins supplémentaires. C’est peut‑être vrai, mais le Tribunal estime que cela ne suffit pas pour conclure à un préjudice en l’espèce, compte tenu en particulier de l’importance des lois touchant les droits de la personne (voir CN c Canada (Commission canadienne des droits de la personne), [1987] 1 RCS 1114, aux pages 1133 et 1134).

[23]  Aux paragraphes 48 à 50 de ses observations, l’intimée fait valoir que certaines personnes n’étaient pas personnellement au courant de la plainte pour atteinte aux droits de la personne déposée par la cpl Brickner et que, par conséquent, l’inconduite supposée de ces personnes ne peut être associée à des actes de représailles au sens où l’entend l’article 14.1 de la Loi. Les événements décrits par la cpl Brickner, s’ils se sont produits de la manière dont elle le prétend, constitueraient de simples conflits de travail qu’il ne serait pas justifié de soumettre au Tribunal.

[24]  L’intimée a raison de dire qu’il convient de soumettre des éléments de preuve selon lesquels toute personne agissant au nom de l’intimée et qui aurait exercé des représailles était personnellement au courant de l’existence de la plainte pour atteinte aux droits de la personne déposée par la plaignante. Toutefois, il s’agit d’éléments de preuve que la cpl Brickner devra présenter pendant l’audience pour justifier ses allégations. Ces éléments de preuve ne sont pas nécessaires à ce stade.

IV.  La requête en modification de l’EDP présentée par la plaignante

[25]  Dans sa requête, la plaignante expose en détail plusieurs allégations de représailles, sous les titres suivants :

[traduction]

1.  L’exclusion et la différence de traitement en tant que chef de service à la Section des enquêtes générales (la SEG);

2.  L’exclusion et la différence de traitement par le Groupe des crimes graves (le GCG);

3.  Les nominations intérimaires — pas d’égalité de chances;

4.  L’évaluation annuelle et l’évaluation semestrielle (de janvier 2015 à août 2017).

[26]  La présente décision s’attachera séparément à chacune des allégations de représailles.

1.  L’exclusion et la différence de traitement en tant que chef de service à la SEG

[27]  La cpl Brickner décrit cette allégation de représailles aux paragraphes 3 à 8 de sa requête. Malheureusement, ce n’est que dans le paragraphe 6, qui concerne la cpl Lindsay Ellis, que la plaignante fournit des détails sur les dates, les heures, les noms ou d’autres éléments importants. Dans le paragraphe 8, elle explique avoir été exclue d’un comité de sélection créé en vue de l’embauche de nouveaux membres de la SEG en 2015 et 2016, sans donner de détails. Les autres paragraphes sont de nature générale et ne fournissent aucun détail précis.

[28]  La cpl Brickner soutient d’abord que lorsqu’elle était chef de service à la SEG, les membres de la direction et d’autres personnes minaient son autorité touchant des décisions et l’utilisation des ressources relevant de son commandement. La cpl Brickner soutient que des membres de la haute direction ainsi que des gestionnaires intermédiaires la tenaient à l’écart de décisions qui avaient une incidence sur son secteur, y compris des décisions concernant des dossiers d’enquête, l’affectation des ressources de la SEG, les heures supplémentaires des employés, les affectations au sein de son secteur, les finances et la sélection des candidats. La plaignante soutient également qu’il arrivait régulièrement que des dossiers soient affectés à des membres de son secteur sans qu'elle soit mise au courant.

[29]  Au paragraphe 6 de sa requête, la plaignante donne un exemple précis de ce genre de représailles, parlant d’un événement survenu le 25 août 2015. La plaignante affirme que le sgt Ian Fraser était venu la voir au sujet d’un courriel signé par la cpl Ellis (sous‑officier intérimaire du Groupe des enquêtes fédérales). Le sgt Fraser a demandé à la cpl Brickner si elle savait que la cpl Ellis avait affecté un de ses membres à la SEG, pour un quart de 30 jours par rotation (dépenses inscrites sur le centre de coûts de la SEG); il avait en effet remarqué que le nom de la cpl Brickner ne figurait pas dans la chaîne de courriel. La cpl Brickner affirme que, pendant ces 30 jours, elle a été tenue à l’écart par les gendarmes et ses subordonnés, même si elle était chef de service, et exclue du dossier d’enquête. La cpl Brickner soutient qu’on l’a mise au courant plus tard seulement du fait que des sommes avaient été prises du budget de la SEG et versées au Groupe des enquêtes fédérales à cause du membre qui travaillait pour la SEG à son insu.

[30]  Dans le paragraphe 8 de sa requête, la cpl Brickner soutient qu’elle a été exclue du comité de sélection de nouveaux membres de la SEG qui travailleraient en [traduction] « 2015 ou 2016 ». Elle ne précise pas de période définie elle écrit [traduction] « 2015 ou 2016 » , mais il semble qu’elle n’a pas exercé son rôle de supervision dans la SEG pendant toute cette période. En outre, la cpl Brickner ne précise pas de quel processus d’embauche exactement elle aurait été exclue.

[31]  L’intimée rejette ces allégations en disant qu’elles sont trop générales et trop larges et que, exception faite des allégations concernant la cpl Ellis, elles ne sont pas précises. De plus, l’intimée soutient que la requête ne fournit aucun fondement à une plainte de représailles défendable et ne contient aucune allégation selon laquelle les événements qui se seraient produits supposent la connaissance de l’existence de la plainte pour atteinte aux droits de la personne présentée par la cpl Brickner ou que les événements en question se sont produits en réaction à cette plainte.

[32]  Malheureusement, dans ses observations, la Commission ne traite pas les nouvelles allégations séparément. De manière générale, la Commission est d’avis que le Tribunal devrait accueillir la requête de la plaignante, qui désire ajouter toutes les allégations à son EDP. La Commission soutient que la requête de la cpl Brickner respecte les critères juridiques établis, pour les raisons qui suivent :

A)  Il n’est ni clair ni évident que les allégations que la plaignante voulait ajouter ne seraient pas [traduction] « jugées fondées »;

B)  L’ajout de nouvelles allégations ne mène pas à une plainte différente, puisqu’elles se résument à des exemples supplémentaires de représailles. Les nouvelles allégations n’altèrent pas l’essence de la plainte, laquelle comprenait au départ deux exemples de représailles;

C)  Les autres actes de représailles allégués ont trait à exactement la même matrice factuelle que celle qui avait donné lieu à la plainte initiale;

D)  L’intimée ne subira aucun préjudice si elle doit répondre aux nouvelles allégations, puisqu’elle était au courant depuis un certain temps des préoccupations de la cpl Brickner et qu’un certain nombre des personnes dont le nom figure dans la requête font déjà partie des témoins devant comparaître à l’audience.

[33]  En outre, la Commission soutient que la cpl Brickner subirait un préjudice si elle était forcée de présenter une nouvelle plainte relativement aux nouvelles allégations de représailles, puisque ces allégations sont liées à la même matrice factuelle que la plainte dont il est ici question.

(i)  Décision du Tribunal

[34]  Selon les principes de la justice naturelle, toute partie à une affaire doit être au courant de la preuve à laquelle elle doit répondre lors de l’audience. L’intimé qui se présente devant le Tribunal doit avoir une possibilité raisonnable de répondre, lorsque sa conduite est attaquée. Si les parties doivent préparer un EDP, c’est dans le but de donner à l’autre partie une description suffisante et détaillée de leurs allégations et des faits qu’elles ont l’intention de prouver à l’audience. Si un intimé ne trouve pas dans l’EDP des détails suffisants, il lui est impossible d’interroger les témoins potentiels ou de réunir les documents potentiellement pertinents. Le fait de procéder de cette manière porterait évidemment préjudice à l’intimée.

[35]  Comme il est indiqué plus haut, le Tribunal n’a pas à apprécier le bien‑fondé des allégations pour rendre sa décision. Toutefois, les allégations doivent en elles‑mêmes fournir suffisamment de détails pour que l’intimée ait une possibilité adéquate de se préparer à répondre aux éléments de preuve et aux arguments que la plaignante présentera pendant l’audience (Warman c Lemire, 2006 TCDP 32, au paragraphe 5, qui s’appuie sur Public Service Alliance of Canada v Northwest Territories (Minister of Personnel), [1999] CHRD No 8 (TCDP) (QL)).

[36]  Bien que la cpl Brickner ait été avisée, pendant la dernière CTGI, qu’il était important qu’elle fournisse des détails précis, les allégations exposées aux paragraphes 3, 4, 5 et 7 manquent toujours du niveau de détail qui permettrait à l’intimée de connaître la preuve et de se préparer à y répondre.

[37]  Le Tribunal sait que s’il permet encore une fois à la cpl Brickner de modifier sa requête ou l’autorise à déposer une autre requête dans laquelle elle pourrait fournir des détails supplémentaires concernant les allégations, il lui serait possible d’exposer ces nouvelles allégations en fournissant le niveau de détail requis. Toutefois, comme il a déjà été souligné, le Tribunal doit chercher l’équilibre entre, d’une part, permettre à une partie de présenter une défense pleine et entière et, d’autre part, procéder de manière expéditive. Ainsi, le Tribunal conclut que la cpl Brickner a eu la possibilité pleine et entière de modifier son EDP. En outre, étant donné ma conclusion précédente, énoncée au paragraphe 9 ci‑dessus, le Tribunal ne croit pas que la cpl Brickner, si elle se voyait donner une autre chance, arriverait à améliorer ses allégations.

[38]  En outre, il ne faut pas oublier que, s’il est permis aux parties de modifier leurs plaintes, c’est dans le but de pouvoir déterminer « les véritables questions litigieuses » (Canderel, précité). Les allégations de représailles supplémentaires, énoncées aux paragraphes 3, 4, 5 et 7, ne sont pas les principales questions litigieuses. Elles sont accessoires aux allégations principales de discrimination et de représailles.

[39]  Ainsi, les allégations décrites à grands traits aux paragraphes 3, 4, 5 et 7 ne seront pas acceptées. Les allégations décrites aux paragraphes 6 et 8, qui ont trait à la cpl Ellis et à l’exclusion de la plaignante du processus de sélection de la SEG, en 2015 ou 2016, pourront être ajoutées dans cette catégorie. Bien que les allégations exposées au paragraphe 8 de la requête ne fournissent pas tous les détails clés, les événements sont décrits suffisamment bien pour que l’intimée puisse savoir de quels processus de sélection la plaignante a été écartée. Par conséquent, le Tribunal acceptera cet ajout.

2.  L’exclusion et la différence de traitement par le Groupe des crimes graves (GCG)

[40]  La cpl Brickner décrit cette allégation de représailles aux paragraphes 9 à 14 de sa requête. Elle affirme que le GCG ne la traitait pas de la même façon qu’elle traitait le précédent caporal de la SEG et d’autres membres. La cpl Brickner affirme que le sgt Mark London était chef de service au GCG, en janvier 2015, et qu’il [traduction] « était au courant de l’existence de la procédure de plainte et de grief pour atteinte aux droits de la personne ». Dans cette catégorie, la cpl Brickner décrit dans sa requête quatre événements distincts qui équivalent, selon elle, à des actes de représailles.

[41]  Selon la cpl Brickner, tout le monde sait que lorsqu’une enquête est urgente, le GCG communique avec tous les membres disponibles pour leur demander leur aide. Malgré les qualifications qu’elle possède, la cpl Brickner soutient qu’elle était tenue à l’écart de ces dossiers et enquêtes.

[42]  Le premier événement de cette catégorie a eu lieu en juin 2015; la cpl Brickner affirme que des membres de l’unité de la SEG qu’elle supervisait avaient été intégrés à une enquête du GCG à son insu. Elle soutient que la pratique ordinaire consiste à demander l’approbation de la personne responsable avant d’affecter des membres à d’autres tâches que leurs tâches régulières.

[43]  Le deuxième événement de représailles allégué tient au fait que la cpl Brickner a été chargée de tâches habituellement confiées à des membres de rang inférieur ou nouvellement arrivés. La cpl Brickner avait fait part de ses préoccupations quant au fait qu’elle était exclue des enquêtes du GCG, après quoi le s.é.‑m. Jason Flynn l’a affectée à une enquête sur une noyade. La cpl Brickner devait travailler sous les ordres d’un de ses gendarmes de la SEG et, pour cette enquête, faire du porte‑à‑porte. Elle affirme que cette tâche est considérée comme une tâche élémentaire qui est généralement confiée aux nouveaux membres ou aux membres de rang inférieur de la GRC.

[44]  Le troisième événement décrit dans cette catégorie a eu lieu en septembre 2015. La cpl Brickner a été convoquée à une réunion concernant un homicide. Après la réunion, le cpl Caswell, chef de service au GCG, et le sgt Fraser, chef de veille, ont pris à part la cpl Brickner pour lui dire qu’elle ne pourrait pas participer à cette enquête parce que celle‑ci pouvait impliquer de la violence et que les qualifications de la cpl Brickner n’étaient pas à jour. Même si ce n’était pas dit explicitement, la requête donne à penser qu’il s’agissait d’un acte de représailles, étant donné que la cpl Brickner a été chargée de recueillir les vidéos de surveillance tandis que, selon elle, l’enquêteur en chef qui devait à ce moment‑là respecter des restrictions médicales, a été vu en train de circuler dans le bureau et à l’extérieur en portant une veste pare‑balles et une arme.

[45]  Le quatrième événement présenté dans cette catégorie a trait à l’affectation de la cpl Brickner en juin 2015 à l’enquête sur les femmes et les filles autochtones assassinées et disparues. Selon la cpl Brickner, la personne qui occupait ce poste avant elle, la cpl Macleod, pouvait compter sur l’aide et l’orientation du sgt Mark London, commandant du GCG. La cpl Macleod travaillait régulièrement avec des membres de l’équipe du GCG, entre autres sur les enquêtes concernant des crimes graves. La cpl Macleod a également pu suivre des cours de formation, en particulier sur la gestion des cas graves, formation qui a été refusée à la cpl Brickner.

[46]  Selon la cpl Brickner, dès qu’elle a accepté le poste au sein de l’enquête sur les femmes et les filles autochtones assassinées et disparues, le surintendant Paul McConnell lui a dit qu’elle ne pourrait pas travailler avec l’équipe du GCG ni au sein de celle‑ci. Contrairement à la cpl Macleod, qui avait un poste de travail dans les bureaux du GCG, la cpl Brickner a été installée dans un bureau du deuxième étage, où elle travaillait seule, et placée sous les ordres directs de l’officier responsable des enquêtes criminelles. En janvier 2016, lorsque le surintendant Brian Jones a été nommé au poste d’officier responsable des enquêtes criminelles, la cpl Brickner lui a parlé de l’importance d’établir une relation de travail avec le GCG, qui menait des enquêtes sur des dossiers liés à son propre travail. Néanmoins, la cpl Brickner est restée à l’écart du GCG tout le temps qu’elle travaillait dans la Division M.

[47]  L’intimée s’oppose à l’inclusion de ces allégations dans l’EPD de la cpl Brickner. La GRC décrit les allégations comme étant [traduction] « ouvertes » et trop larges pour lui permettre d’y répondre de façon appropriée et de se défendre. Elle soutient également que la troisième allégation de représailles, dans cette catégorie, ne pourra pas être prouvée, puisque la requête en modification ne contient rien qui pourrait confirmer que les personnes concernées étaient au courant de la plainte pour atteinte aux droits de la personne.

(i)  Décision du Tribunal

[48]  Avant d’examiner les allégations présentées dans cette catégorie, le Tribunal fait remarquer que, au paragraphe 9 de sa requête, la cpl Brickner affirme que le sgt Mark London, chef de service au GCG en janvier 2015, [traduction] « était au courant de la procédure de plainte et de grief pour atteinte aux droits de la personne ». Malheureusement, dans ce paragraphe et, en fait, à plusieurs autres endroits dans sa requête et dans la réponse à sa requête, la cpl Brickner mentionne ensemble [traduction] « la plainte et le grief pour atteinte aux droits de la personne ». Le vocabulaire que la cpl Brickner utilise ne précise pas clairement si, à son avis, les autres membres étaient au courant de l’une ou de l’autre procédure ou des deux. Le Tribunal a donc de la difficulté à déterminer avec certitude si les actes de représailles allégués tiennent à la plainte pour atteinte aux droits de la personne ou au grief qui a été déposé. Le grief relatif au milieu de travail déposé par la cpl Brickner est une affaire distincte de la plainte qu’elle a déposée devant la Commission et le Tribunal. La cpl Brickner devra être plus précise pendant l’audience, car pour avoir gain de cause elle doit établir un lien entre la conduite reprochée et la connaissance de l’existence d’une plainte pour atteinte aux droits de la personne.

[49]  L’événement décrit au paragraphe 11 de la requête – l’exclusion de la cpl Brickner d’une enquête sur un homicide, menée en juin 2015 – pourra être ajouté à l’EDP en tant que motif de plainte de représailles.

[50]  Le deuxième événement allégué, qui a trait aux tâches d’enquête par porte‑à‑porte habituellement confiées à des membres d’un rang inférieur et qui est décrit au paragraphe 12 de la requête, pourra être ajouté à l’EDP en tant que motif de plainte de représailles. La requête ne dit pas clairement qui a affecté la plaignante à ces tâches, mais je crois que cette dernière fournit des détails suffisants, qui permettront à l’intimée de répondre à ces allégations.

[51]  Le troisième événement allégué, qui a trait à l’exclusion de la cpl Brickner d’une enquête sur un homicide du fait que ses qualifications n’étaient pas à jour, ne pourra pas être inclus, la cpl Brickner n’ayant pas prétendu que ce traitement était défavorable (voir le paragraphe 13 de la requête de la plaignante). Elle affirme qu'on lui a refusé ce rôle parce que ses qualifications n’étaient pas à jour. Elle ne dit pas que cela contrevenait à une politique de la GRC et n’affirme pas non plus que ses qualifications étaient à jour. Il est clair et évident, étant donné les seuls faits présentés, que cette allégation de représailles n’a aucune chance d’être prouvée. En outre, la cpl Brickner fait observer que l’enquêteur en chef portait une veste pare‑balles et une arme dans le bureau et à l’extérieur malgré son [traduction] « problème de santé », mais on ne peut pas tirer une conclusion quelconque de cette observation. La plaignante ne prétend pas que les qualifications de l’enquêteur en chef n’étaient pas à jour. Elle ne donne aucune information sur le problème de santé et ne précise pas que ce problème aurait dû empêcher l’enquêteur en chef de participer à l’enquête. Il n’est pas précisé si l’enquêteur travaillait à cette enquête lorsqu’il portait sa veste pare‑balles et son arme. Pour discerner un acte de représailles dans ce paragraphe de la requête, il faudrait formuler des hypothèses et s’appuyer sur des insinuations. Je suis donc amené à conclure que, si les réponses à ces questions évidentes étaient utiles à cette allégation, la cpl Brickner les y aurait incluses.

[52]  Le quatrième événement allégué, décrit au début du paragraphe 14 de la requête, est accepté. La cpl Brickner soutient qu’elle a été traitée différemment de sa prédécesseure, la cpl Macleod, parce qu’elle n’a pas pu travailler avec le GCG ou occuper un bureau au sein de ce groupe lorsqu’elle travaillait sur l’enquête sur les femmes et les filles autochtones assassinées et disparues. La cpl Brickner est autorisée à ajouter ces allégations de représailles dans son EDP.

[53]  L’autre allégation présentée dans le paragraphe 14 de la requête a trait au fait que la cpl Brickner n'a pas pu suivre une formation, en particulier le cours sur la gestion des cas graves, qui aurait par contre été offerte à la cpl Macleod. Malheureusement, aucun autre détail n’est fourni. La cpl Brickner ne précise donc pas pourquoi on lui aurait refusé de participer au cours sur la gestion des cas graves. Nous ne savons pas non plus qui a décidé qu’elle ne pourrait pas suivre ce cours. Étant donné que la requête ne fournit aucun autre détail, je suis obligé de conclure que la cpl Brickner, encore une fois, est restée délibérément vague. Il ne serait pas raisonnable de demander à l’intimée de se défendre contre ces allégations, puisque ces dernières ne sont pas suffisamment détaillées.

[54]  En permettant à la plaignante d’ajouter les nouvelles allégations de représailles susmentionnées à son EDP, j’ai déterminé qu’elles présentaient des liens suffisants avec la matrice factuelle établie dans la plainte initiale. Les allégations ont trait à des événements qui se sont produits lorsque la cpl Brickner a commencé à travailler à la Division M. Ils se sont produits après qu’elle a présenté une plainte pour atteinte aux droits de la personne à la Commission. Les allégations acceptées sont suffisamment détaillées. Étant donné qu’aucune date d’audience n'est actuellement fixée, les autres parties pourront maintenant répondre à ces allégations sans subir de préjudice.  

3.  Les nominations intérimaires — pas d’égalité de chances 

[55]  La cpl Brickner décrit cette allégation de représailles au paragraphe 15 de sa requête. Elle affirme que lorsqu’elle travaillait à la SEG avec le grade de caporal, de janvier à octobre 2015, elle n’a jamais reçu d’offres de nomination intérimaire à un poste de sergent. Elle soutient que les autres caporaux et sa prédécesseure ont reçu de telles offres et que des caporaux des services spécialisés ont été nommés à long terme et par intérim à des postes de sergent ou de sergent d’état‑major.

[56]  L’intimée soutient que ces allégations ne contiennent aucun détail précisant de quelles nominations intérimaires la cpl Brickner aurait selon elle été écartée, même si elle aurait dû se les voir offrir, en raison de sa plainte pour atteinte aux droits de la personne. La GRC soutient que, pour répondre à des allégations si générales, il lui faudrait procéder à un examen de toutes les nominations intérimaires de ce type, faites en 2015, et déterminer pour quelle raison les postes ont été offerts à d’autres membres.

[57]  La GRC soutient également que ces allégations pourraient être réglées dans le cadre de la procédure de grief prévue dans la Loi sur la Gendarmerie royale du Canada, LRC (1985), ch R‑10 (la Loi sur la GRC), procédure selon laquelle la Commission peut, comme elle en a le pouvoir discrétionnaire, décider de ne pas pousser son enquête, en vertu de l’article 41(1)a) de la Loi. Le Tribunal ne devrait donc pas autoriser l’intégration de ces allégations à la plainte.

(i)  Décision du Tribunal

[58]  Le Tribunal permet à la cpl Brickner d’intégrer cette modification à son EDP. En dépit des objections de la GRC, la cpl Brickner a précisé dans cette allégation qu’il s’agissait uniquement des [traduction] « postes intérimaires de sergent » qui avaient été accordés à d’autres entre janvier et octobre 2015. En outre, il existe un lien clair entre la modification demandée et la matrice factuelle présentée par la cpl Brickner dans son EDP initial. La modification proposée n’est pas trop large, à mon avis. De plus, en s’y opposant, la GRC ne montre pas qu’elle subirait un préjudice si la modification était accordée, puisqu’elle ne précise pas l’étendue de l’examen qu’elle devrait mener et ne dit pas non plus que cet examen serait trop contraignant.

[59]  Je ne suis pas convaincu par l’argument de l’intimée, selon lequel l’article 41(1)a) de la Loi devrait empêcher l’inclusion de ces allégations.

[60]  Voici le libellé de l’article 41(1)a) de la Loi :

41(1) Sous réserve de l’article 40, la Commission statue sur toute plainte dont elle est saisie à moins qu’elle estime celle‑ci irrecevable pour un des motifs suivants :

a) la victime présumée de l’acte discriminatoire devrait épuiser d’abord les recours internes ou les procédures d’appel ou de règlement des griefs qui lui sont normalement ouverts;

[61]  En intégrant l’article 41(1)a) à la Loi, le législateur reconnaissait que des procédures parallèles pouvaient exister en même temps (voir Coulter c Purolator Courier Ltd, 2004 TCDP 1, au paragraphe 32, reprise dans Wisdom c Air Canada, 2017 CF 440, au paragraphe 22).

[62]  L’article 41(1) de la Loi oblige la Commission à statuer sur toute plainte dont elle est saisie à moins qu’elle estime, dans un certain nombre de circonstances dont la liste est fournie, comme à l’alinéa 41(1)a), que « la victime présumée de l’acte discriminatoire devrait épuiser d’abord les recours internes ou les procédures d’appel ou de règlement des griefs qui lui sont normalement ouverts ».

[63]  Le législateur a donc spécifiquement conféré à la Commission le pouvoir et la responsabilité d’exercer son pouvoir discrétionnaire au moment de déterminer si elle doit « statuer sur toute plainte dont elle est saisie », en tenant compte des motifs énumérés à l’alinéa 41(1) a) et dans les alinéas suivants.

[64]  Par contre, le législateur n'a pas accordé au Tribunal le pouvoir d’être essentiellement un deuxième organisme d’examen au titre de l’article 41(1) (voir Harkin c Canada (Procureur général), 2009 TCDP 6, au paragraphe 21).

[65]  Dans le premier cas, si une partie n’est pas satisfaite de la façon dont la Commission a exercé son pouvoir discrétionnaire, aux termes de l’article 41(1)a), cette partie peut se prévaloir d’un recours sous la forme d’une requête en révision judiciaire de la décision de la Commission, portée devant la Cour fédérale. Malheureusement, la Commission n’a pas été saisie de cette question, puisque la cpl Brickner soutient que les actes de représailles allégués ont eu lieu après le dépôt de sa plainte.

[66]  Quoi qu’il en soit, le Tribunal n'a pas à mon avis le pouvoir d’examiner les allégations de représailles en vertu de l’article 41(1)a) de la Loi. La compétence du Tribunal se limite en quelque sorte à l’instruction de la plainte dont il est saisi par la Commission, en se fondant sur les pouvoirs que lui confère l’article 50(1) de la Loi (voir Wall c Conseil d’éducation de Kitigan Zibi, 1997 CanLII 1251 (TCDP); voir aussi Warman c Lemire, 2014 CAF 18, au paragraphe 49).

[67]  Par ailleurs, bien que la Loi sur la GRC prévoie certains recours spécifiques associés à la procédure de grief, la cpl Brickner a le droit d’affirmer que les allégations concernent des représailles dans le contexte de sa plainte pour atteinte aux droits de la personne. C’est ce qu’elle a choisi de faire, et je ne vois aucune raison impérieuse de lui refuser cette possibilité. De plus, le Tribunal ne voit aucune raison pour laquelle les principes énoncés dans la décision Tabor et cités au paragraphe 13 ci‑dessus ne pourraient pas s’appliquer en l’espèce.

4.  L’évaluation annuelle et l’évaluation semestrielle (de janvier 2015 à août 2017)

[68]  La cpl Brickner soutient que, contrairement aux politiques de la GRC, elle n’a fait l’objet d’aucune évaluation annuelle ou semestrielle pendant le temps qu’elle a travaillé à la Division M. Elle soutient que, en mars 2015, elle a préparé son rapport annuel d’auto-évaluation et l’a transmis à son superviseur aux fins de révision. Elle soutient que cette évaluation a été communiquée à deux superviseurs différents, pour deux périodes d’évaluation différentes : au sgt Dave Wallace, le 20 avril 2015, et au surintendant Brian Jones, le 18 février 2016.

[69]  La cpl Brickner soutient que, au cours de l’année, elle a dit au surintendant Brian Jones qu’elle se demandait pourquoi elle n’avait pas été évaluée. Elle affirme avoir également parlé avec le surintendant principal Scott Sheppard, en janvier 2017, à propos de l’absence d’évaluations pour elle‑même et également pour son époux, le cpl Marinis, qui n’avait pas reçu d’évaluations jusque‑là à la Division M. La cpl Brickner précise que par la suite, en juin 2017, le cpl Marinis a reçu ses évaluations annuelles pour 2015 et 2016. Toutefois en août 2017, elle n’avait elle‑même reçu aucune évaluation obligatoire ou évaluation semestrielle de la Division M.

[70]  La GRC est d’avis que ces allégations devraient être réglées dans le cadre du processus des griefs prévu dans la Loi sur la GRC et que, par conséquent, la Commission a le pouvoir discrétionnaire de ne pas mener d’enquête en vertu de l’article 41(1)a) de la Loi. Le Tribunal ne devrait donc pas autoriser l’intégration de ces allégations à la plainte. La GRC soutient également que la modification ne devrait pas être permise, puisque la cpl Brickner n’a pas affirmé que le sgt Dave Wallace avait personnellement connaissance de la plainte en matière de droits de la personne ou avait agi en réaction à cette plainte (voir la réponse de l’intimée, au paragraphe 46).

(i)  Décision du Tribunal

[71]   Le Tribunal autorise la cpl Brickner à ajouter ces allégations de représailles à sa plainte. Les allégations sont bien définies et décrites avec tous les détails nécessaires. Toutefois, la cpl Brickner devra clarifier si, lorsqu’elle parle des évaluations [traduction] « semestrielles », elle veut bien dire les évaluations faites deux fois par année. Aux fins de la présente décision, je suppose qu’elle parle des évaluations faites deux fois par année.

[72]   L’intimée a reconnu qu’une partie des événements allégués se seraient produits après que la cpl Brickner a présenté son EDP initial. Les évaluations du rendement sont un jalon important du cheminement professionnel d’un officier et, si la cpl Brickner avait bel et bien été écartée et s’était vu refuser ces évaluations du rendement après le dépôt de sa plainte pour atteinte aux droits de la personne, le lien avec la matrice factuelle originale dans le contexte de son emploi à Whitehorse est suffisant. Les allégations sont présentées avec suffisamment de détails et, même s’il faudra à l’intimée un certain temps pour y répondre, elle aura amplement le temps de le faire avant le début des audiences. Par conséquent, le Tribunal estime que le fait de permettre l’inclusion de ces allégations de représailles n’entraînera aucun préjudice pour l’intimée.

[73]  De plus, le Tribunal n’admet pas l’argument de l’intimée selon lequel le Tribunal ne devrait pas accepter les modifications, étant donné que la procédure de grief prévue dans la Loi sur la GRC pourrait s’appliquer, et les raisons en ont été données ci‑dessus, aux paragraphes 61 à 66.

5.  Les demandes de divulgation de documents

[74]  Les principes généraux s’appliquant à la divulgation, élaborés par le Tribunal, ont été résumés dans Brickner aux paragraphes 4 à 10, et il n’est pas nécessaire de les exposer de nouveau ici. Pour décider si les renseignements devraient être divulgués, le Tribunal doit simplement se demander si les renseignements en cause pourraient être pertinents (voir Warman c Bahr, 2006 TCDP 18, au paragraphe 6).

[75]  Au paragraphe 20 de sa requête, la cpl Brickner demande la divulgation des documents suivants :

[traduction]

a)  Je demande à l’intimée de produire une liste des caporaux qui ont obtenu des postes par intérim de sergent et de sergent d’état‑major à Whitehorse, y compris dans un détachement, dans la police fédérale ou dans un territoire, en précisant la durée du poste intérimaire, de janvier 2015 à août 2016.

b)  J’ai remplacé le cpl J. WALDNER en tant que responsable de la SEG. J’ai appris que, pendant qu’il occupait ce poste, il avait reçu depuis 2013 des offres de nomination intérimaire (officielles ou non) dans le détachement de Whitehorse. Je demande donc une liste indiquant le nombre et la durée de ces nominations intérimaires. Il est facile de trouver cette liste et de l’imprimer à partir des bases de données du SIGRH/TEAM.

[76]  Au paragraphe 23 de sa requête, la cpl Brickner demande la divulgation des documents suivants :

[traduction]

Je demande à l’intimée de produire les documents montrant le taux de conformité de la Division M au regard des évaluations annuelles et semestrielles. Je demande une liste des membres (les noms peuvent être caviardés), avec leur grade, qui ont fait l’objet ou non d’une évaluation annuelle ou semestrielle entre janvier 2015 et août 2017.

[77]  L’intimée soutient que la requête en divulgation est prématurée et que la GRC subirait un préjudice si elle était obligée d’y répondre avant d'avoir eu l’occasion d’examiner les modifications autorisées par le Tribunal en ce qui concerne la plainte. L’intimée soutient également que le Tribunal ne peut ordonner que la production de documents existants et qu’il n’a pas le pouvoir d’ordonner à une partie de créer un document (voir Brickner, au paragraphe 10).

[78]  La GRC s’oppose à la divulgation de l’historique des nominations intérimaires du cpl Waldner, au motif que cette divulgation ne serait pas pertinente. Elle laisse également entendre que cette requête soulève inutilement des préoccupations touchant la protection des renseignements personnels d’une personne qui n’est pas partie à l’enquête. De plus, il n’y a pas d’allégation selon laquelle le cpl Waldner aurait été nommé à un poste intérimaire qui aurait dû à son avis lui être offert à elle. La GRC soutient que l’historique du cpl Waldner n’a aucune pertinence potentielle outre le fait qu’il était le prédécesseur de la cpl Brickner à ce poste; il n’y a donc aucune raison de présenter ledit historique pas plus qu’il ne serait approprié de fournir l’historique des nominations intérimaires de tout autre caporal travaillant à Whitehorse.

[79]  Malgré ses objections, la GRC reconnaît dans les documents qui accompagnent sa requête qu’elle serait prête à présenter certains documents si le Tribunal autorisait la cpl Brickner à ajouter certaines allégations de représailles dans sa plainte.

(i)  Décision du Tribunal

[80]  Malgré les préoccupations de l’intimée selon lesquelles les demandes de divulgation présentées par la cpl Brickner dans sa requête sont prématurées, je vais régler ces questions maintenant. Je suis préoccupé par le fait qu’il a fallu tout ce temps pour traiter des questions préliminaires avant le début de l’audience. Dans la mesure du possible, j'aimerais éviter tout retard supplémentaire en réglant dans la présente décision la demande de divulgation. Si cette demande soulève ultérieurement d’autres préoccupations, il en sera question à une prochaine CTGI, et une décision sera alors prise en conséquence.

[81]  La raison pour laquelle la cpl Brickner demande des documents concernant la période de janvier 2015 à août 2016 n’est pas clarifiée, et l’allégation qu’elle expose au paragraphe 15 de sa requête indique clairement que la période en cause s’étend de janvier à octobre 2015. C’est pourquoi, en ce qui concerne les postes intérimaires, toute ordonnance de production de documents sera limitée à la période la plus courte précisée dans la requête de la cpl Brickner.

[82]  La demande de divulgation touchant les nominations intérimaires accordées au cpl Waldner porte sur une période commençant en 2013, antérieure au début de la période d’emploi de la cpl Brickner pour la Division M. C’est pourquoi je ne suis pas convaincu que l’information pourrait être pertinente au regard de l’allégation spécifique selon laquelle la cpl Brickner était victime de représailles du fait qu’elle n’avait pas reçu de nominations par intérim entre janvier et octobre 2015. Par conséquent, la demande relative au document concernant le cpl Waldner est rejetée.

[83]  Malgré ma décision précédente relative à la divulgation dans la présente enquête, la cpl Brickner a encore une fois demandé à l’intimée de [traduction] « produire une liste ». Il en avait été expressément question dans notre précédente CTGI. Toutefois, dans la nouvelle version de sa requête, la cpl Brickner demande encore à l’intimée de créer des documents pour les divulguer.  

[84]  En dépit du fait que le Tribunal n'a pas le pouvoir d’ordonner la création de documents aux fins de divulgation (voir Brickner, précitée, au paragraphe 10, et Gaucher c Forces armées canadiennes, 2005 TCDP 42, au paragraphe 17), la GRC, dans sa réponse à la requête au sujet de son refus des allégations relatives aux postes intérimaires, a offert les solutions suivantes :

A)  Mener une recherche pour établir une liste des postes intérimaires offerts entre janvier et octobre 2015 (la période définie par la plaignante au paragraphe 15 de sa requête) et produire cette liste si elle existe;

B)  Si la liste n’existe pas, l’intimée déploiera des efforts raisonnables pour en établir une, en la caviardant pour protéger les renseignements personnels des tiers, dans la mesure où le personnel des Ressources humaines de la Division M peut rapidement la produire à partir du logiciel du SIGRH existant.

[85]  Par conséquent, en ce qui concerne la première demande de divulgation de la cpl Brickner, le Tribunal demande à l’intimée de faire ce qui suit :

A)  Rechercher la liste des caporaux qui ont occupé par intérim un poste de sergent ou de sergent d’état‑major à Whitehorse (dans un détachement, dans la police fédérale ou dans un territoire) de janvier à octobre 2015, cette liste devant préciser la durée de chaque nomination;

B)  Si cette liste n’existe pas, déployer des efforts raisonnables pour en établir une, qui pourra être caviardée de manière à protéger les renseignements personnels de tiers;

C)  Si le personnel des Ressources humaines de la Division M ne peut pas rapidement établir cette liste, indiquer aux autres parties et au Tribunal quelles mesures elle a prises pour s’acquitter de cette tâche le 15 février 2018 au plus tard.

[86]  Si la liste n’est pas communiquée, le Tribunal ordonne à l’intimée de fournir tous les documents en sa possession qu’elle juge pertinents et qui concernent de telles nominations intérimaires faites pendant cette période; la liste devra être établie d’ici le 28 février 2018.

[87]  En ce qui concerne les allégations relatives à l’absence d’évaluations annuelles ou semestrielles, dans la réponse à la requête la GRC a proposé de faire ce qui suit :

A)  Rechercher une liste de membres désignés par leur grade, qui ont fait ou non l’objet d’une évaluation annuelle ou semestrielle entre janvier 2015 et août 2017 et communiquer cette liste si elle existe;

B)  Si la liste n’existe pas, l’intimée déploiera des efforts raisonnables pour en établir une, en la caviardant pour protéger les renseignements personnels des tiers, dans la mesure où le personnel des Ressources humaines de la Division M peut rapidement la produire à partir du logiciel du SIGRH existant.

[88]  Le Tribunal demande à l’intimée de faire ce qui suit :

A)  Rechercher la liste des membres de la Division M (montrant le grade, mais non le nom) qui ont fait l’objet ou non d’une évaluation annuelle ou semestrielle entre janvier 2015 et août 2017;

B)  Si cette liste n’existe pas, déployer des efforts raisonnables pour en établir une;

C)  Si le personnel des Ressources humaines de la Division M ne peut pas rapidement établir cette liste, indiquer aux autres parties et au Tribunal quelles mesures elle a prises pour s’acquitter de cette tâche le 15 février 2018 au plus tard.

[89]  Si cette liste n’est pas fournie, le Tribunal ordonne à l’intimée de produire tous les documents potentiellement pertinents en sa possession et qui ont trait à de telles évaluations au cours de cette période d’ici le 28 février 2018.

Signé par

David L. Thomas

Membre du Tribunal

Ottawa, Canada

Le 14 novembre 2017


Tribunal canadien des droits de la personne

Parties au dossier

Dossier du tribunal : T2125/4115

Intitulé de la cause : Kayreen Brickner c Gendarmerie royale du Canada

Date de la décision du tribunal : Le 5 janvier 2018

Requête jugée sur dossier sans comparutions des parties

Représentations écrites par :

Kayreen Brickner, pour elle‑même

John Unrau, pour la Commission canadienne des droits de la personne

Edith Campbell, pour l’intimée

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