Tribunal canadien des droits de la personne

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Tribunal canadien
des droits de la personne

Titre : Les armoiries du Tribunal - Description : Les armoiries du Tribunal

Canadian Human
Rights Tribunal

Référence : 2016 TCDP 16

Date : le 14 septembre 2016

Numéro du dossier : T1340/7008

[TRADUCTION FRANÇAISE]

Entre :

Société de soutien à l’enfance et à la famille des Premières Nations du Canada

‑ et ‑

Assemblée des Premières Nations

les plaignantes

- et -

Commission canadienne des droits de la personne

la Commission

- et -

Procureur général du Canada

(représentant le ministre des Affaires autochtones et du Nord canadien)

l'intimé

- et -

Chiefs of Ontario

‑ et ‑

Amnistie internationale

les parties interessées

Décision sur requête

Membres : Sophie Marchildon et Edward Lustig


Table des matières

I. Mise à jour de la mesure de redressement  1

II. Remarques préliminaires  2

III. Le Programme des SEFPN  5

A. Rectifications du modèle de financement – lacunes et hypothèses  6

B. Le financement pour les frais juridiques, les immobilisations, les services adaptés à la culture, le montant versé pour l’achat de services à l’enfance et les rapports sur la réception, l’évaluation et les enquêtes en lien avec la protection des enfants. 16

C. Rajustement pour contrer l’inflation  19

D. Dépassements de coûts et réaffectation de fonds provenant d’autres programmes d’AANC  20

E. Demandes de renseignements supplémentaires  22

IV. L’Entente de 1965 conclue avec l’Ontario  24

A. Mise à jour de l’Entente de 1965  25

B. Quotient d’éloignement  27

C. Allocation des fonds de secours immédiat  29

D. Élargissement de la définition de « services de prévention »  31

E. Rétablir le partage des coûts des dépenses en capital  33

F. Admissibilité  34

G. Étude spéciale  35

H. Fonds de prévoyance unique  36

V. Le principe de Jordan  36

VI. Autres ordonnances demandées  43

A. Aucune réduction de financement  43

B. L’adoption du principe selon lequel les enfants et les jeunes vivant en établissements de soins doivent habiter le plus près possible de leurs communautés natales  43

C. Comité consultatif national  44

D. L’Étude canadienne sur l’incidence des cas de violence et de négligence envers les enfants  44

E. Mise à jour des politiques, des procédures et des ententes  45

F. Formation et paramètres de rendement des fonctionnaires fédéraux  46

G. Financement du Réseau de télévision des peuples autochtones  47

H. Examen des décisions relatives au financement de nouveaux  

organismes  48

I. Financement de la recherche, de bourses d’étude et de conférences  48

J. Nomination de la Commission pour rallier l’ensemble des parties et créer une ébauche d’ordonnance  49

VII. Ordonnance  50

A. Mesures immédiates supplémentaires à prendre  51

B. Rapports  52

C. Renseignements supplémentaires à fournir  54

D. Maintien de la compétence  55

VIII. Conférence de gestion des cas en personne  55

 


I.  Mise à jour de la mesure de redressement

[1]  La formation continue de superviser la mise en œuvre et les actions du ministère des Affaires autochtones et du Nord Canada (AANC) en réponse aux conclusions révélant que les enfants et les familles des Premières Nations des réserves et ceux du Yukon se voient refuser les services à l’enfance et à la famille (dont bénéficient les autres Canadiens) et/ou sont traités défavorablement dans la fourniture de services à l’enfance et à la famille, au sens de l’article 5 de la Loi canadienne sur les droits de la personne (la LCDP) [voir Société de soutien à l’enfance et à la famille des Premières Nations du Canada et autres c. le Procureur général du Canada (pour le ministre des Affaires autochtones et du Nord Canada), 2016 TCDP 2 (la décision)].

[2]  L’AANC a été ordonné de cesser ses pratiques discriminatoires et de réformer le Programme des services à l’enfance et à la famille des Premières Nations (SEFPN) et le Protocole d’entente sur les programmes d’aide sociale pour les Indiens] (l’Entente de 1965, afin de refléter les conclusions de la formation dans la décision. Il a aussi été ordonné à AANC de cesser d’appliquer une définition étroite du principe de Jordan et de prendre des mesures pour appliquer immédiatement la pleine signification et la portée du principe. L’ordonnance et les conclusions de la décision sont les points de référence principaux sur lesquels se base la formation pour toutes les autres ordonnances à venir. 

[3]  Suite à l’ordonnance générale de la décision, dans Société de soutien à l’enfance et à la famille des Premières Nations du Canada et autres c. le Procureur général du Canada (pour le ministre des Affaires autochtones et du Nord Canada), 2016 TCDP 10, la formation a réitéré et a souligné certains résultats et effets négatifs de la décision et a ordonné à AANC de prendre les mesures pour s’y attaquer immédiatement. Pour aider la formation à évaluer la mise en œuvre de la décision et l’ordonnance ultérieure, AANC a reçu la directive de fournir un rapport détaillé indiquant comment les conclusions de la décision ont été traitées afin de fournir une aide immédiate aux enfants des Premières Nations.

[4]  En réponse aux exigences en matière de reddition de compte qui ont été imposées à AANC et à la suite d’autres soumissions des parties à ce sujet, la présente décision sur requête actualise l’ordonnance de la formation pour donner suite aux conclusions de la décision à court terme. D’autres réformes à court, moyen et long terme du Programme des SEFPN et de l’Entente de 1965, ainsi que d’autres demandes d’indemnisation en vertu des articles 53(2)(e) et 53(3) de la LCDP, seront traitées à un stade ultérieur.

[5]  En général, les plaignantes, la Société de soutien à l’enfance et à la famille des Premières Nations du Canada (la Société de soutien) et l’Assemblée des Premières Nations (l’APN), ainsi que la Commission et les parties intéressées participant à ce stade de la procédure, l’organisme Chiefs of Ontario (COO) et la Nation Nishnawbe Aski (NNA), s’entendent au sujet des ordonnances demandées à la formation pour répondre, à court terme, aux conclusions de la décision. Leurs observations et les ordonnances demandées sont collectivement désignées comme celles des plaignantes, de la Commission et des parties intéressées  ou (PCPI) dans la présente décision sur requête. Lorsque certaines observations des plaignantes, de la Commission ou des parties intéressées diffèrent, ces observations sont précisément décrites.

II.  Remarques préliminaires

[6]  La formation remercie les parties et les parties intéressées pour leurs observations les plus récentes. Il les a examinées attentivement et les a trouvées très utiles. La formation reconnaît le temps, les efforts et les ressources consacrés par les parties à leur préparation. En règle générale, la formation appuie la majorité des ordonnances demandées par les PCPI.

[7]  La formation est heureux d’apprendre que le gouvernement fédéral a accepté de faire un certain nombre de choses importantes en réponse à la décision et qu’il a fait quelque progrès dans l’application des conclusions et ordonnances de la décision. Dans l’ensemble, la formation estime que le gouvernement fédéral s’efforce de réformer son approche des services  à l’enfance et à la famille des Premières Nations et de mettre en place des changements significatifs en ce sens.

[8]  Cela dit, et comme en fait état cette décision sur requête, il reste encore beaucoup de progrès à accomplir dans l’immédiat et à long terme pour garantir la fin de la discrimination mise en lumière dans la décision. À cet égard, comme la formation l’a souligné dans sa dernière décision (2016 TCDP 10), il estime que la diffusion d’une information pertinente et rapide continue d’être de la plus haute importance pour rebâtir la confiance entre les parties et éviter les conflits et les retards à l’avenir.

[9]  En règle générale, la formation ne parvient pas à comprendre pourquoi une grande partie de l’information fournie dans les plus récentes observations d’AANC n’aurait pas pu être fournie plus tôt, surtout si cette information faisait partie du raisonnement permettant d’établir le budget du Programme des SEFPN de mars 2016. AANC aurait dû savoir que cette information était et demeure importante pour répondre aux demandes et aux ordonnances de la formation en matière d’information et de production de rapports. En fait, la formation et les PCPI réclament ce type d’information depuis des mois. Il incombe à AANC et au gouvernement fédéral de mettre en œuvre les conclusions et les ordonnances de la formation, de communiquer clairement leur façon d’y parvenir, notamment en fournissant le raisonnement derrière leurs actions, ainsi que des données et/ou des documents à l’appui, afin d’assurer à la formation et aux parties que la mise en œuvre est en cours.

[10]  AANC a également reconnu les PCPI en tant que partenaires dans le processus de réforme et reconnu la nécessité de consulter les peuples autochtones partout au Canada afin d’obtenir leur avis sur les réformes. Bien que cela soit nécessaire et en conformité avec l’obligation du gouvernement fédéral de consulter les peuples autochtones, encore une fois, une amélioration de la communication entourant les initiatives aiderait grandement la formation à comprendre la stratégie d’AANC pour donner suite à la décision et contribuerait à établir la confiance nécessaire à l’établissement d’un partenariat entre les parties. Il est aussi difficile d’établir qui a été consulté dans la communauté autochtone à ce stade, notamment les travailleurs sociaux et autres experts dans le domaine de la protection de l’enfance, le cas échéant. Sur ce dernier point, AANC a déjà reconnu n’avoir aucune expertise en matière de services à l’enfance et aux familles des Premières Nations. Par conséquent, la nécessité de consulter des experts dans le domaine, y compris la Société de soutien, devrait être une priorité.

[11]  Également, la formation a émis un certain nombre de remarques depuis la décision sur l’importance des rencontres entre les parties pour discuter de la réforme du Programme des SEFPN et de l’Entente de 1965, dans l’immédiat et à long terme. À cet égard, la formation note que la Société de soutien, l’APN et AANC n’ont même pas mentionné, jusqu’à leurs plus récentes observations, qu’ils s’étaient rencontrés à plusieurs reprises pour discuter des réformes et du rétablissement du Comité consultatif national (CCN). Cette information est importante parce que la capacité des parties à travailler ensemble à cette étape d’aide immédiate est un bon moyen de tester si le rétablissement du CCN entraînera le succès de la réforme de la prestation de services d’aide à l’enfance et à la famille des Premières Nations à long terme. AANC a besoin d’améliorer ses aptitudes en communication et en échange d’information avec les autres parties et la formation, tout en continuant à construire le partenariat qu’il a reconnu. En outre, la formation demande d’être tenu informé de tout protocole d’entente et/ou accord pertinent conclu entre les parties et/ou des réunions importantes tenues pour discuter du sujet de l’affaire en l’espèce.

[12]  Comme toujours, la formation continue d’encourager les parties à communiquer efficacement et à travailler ensemble. Il reste également disposé à aider les parties à atteindre cet objectif. Alors que la formation s’est engagé à éliminer la discrimination et à s’assurer de la réforme de la prestation des services  à l’enfance et à la famille des Premières Nations, et qu’il continuera à superviser l’exécution de ses ordonnances à cet égard, il croit aussi fermement que la collaboration entre les parties en dehors des quatre murs du Tribunal est le meilleur moyen d’assurer une réconciliation et des réformes efficaces maintenant et dans l’avenir. Toutes les parties sont clairement dédiées à la réconciliation et devraient continuer à tenter de travailler ensemble pour atteindre cet objectif.

[13]  Cela dit, la formation formulera de nouvelles ordonnances au besoin afin de s’assurer que la discrimination est éliminée. Dans cet ordre d’idées, la formation se prononcera sur certaines mesures d’aide immédiates dans la présente décision sur requête et discutera d’autres mesures lors d’une prochaine conférence de gestion des cas en personne. La formation comprend que certaines parties souhaitent que ce processus correctif progresse plus rapidement. Même si la formation partage ce sentiment, remédier à la discrimination mentionnée dans la décision est une question complexe et dépend beaucoup de la manière par laquelle les renseignements lui sont fournis. En fait, certains PCPI ont mis en garde la formation en lui conseillant la prudence dans sa manière de formuler ses ordonnances en ce qui concerne la justesse et les répercussions. En conséquence, la formation souhaite que toutes les parties aient la possibilité pleine et entière de faire valoir leurs points de vue et qu’il ait, lui, toute l’information nécessaire pour rendre des ordonnances éclairées. La formation espère néanmoins voir des changements se concrétiser dans les meilleurs délais. Il croit que certains de ces changements peuvent être immédiats puisque les organismes de protection de la jeunesse des Premières Nations sont en cours de réforme par la voie de consultations avec les peuples autochtones et les parties en cause. La formation rend la décision sur requête suivante à cet égard. 

III.  Le Programme des SEFPN

[14]  Le rapport d’AANC, en réponse à la décision sur requête rendue par la formation 2016 TCDP 10, a fourni des renseignements sur les mesures prises pour remédier immédiatement aux lacunes du Programme des SEFPN mis en lumière dans la décision. AANC soutient qu’il s’emploie à corriger ces lacunes grâce à de nouveaux investissements financiers dans le Programme des SEFPN et en modifiant ses modèles de financement existants, et ce, jusqu’à ce qu’une réforme complète du Programme des SEFPN puisse être complétée. AANC est donc d’avis que beaucoup des mesures d’aide immédiates proposées par les PCPI doivent être abordées dans le cadre d’une réforme, à moyen et à long terme, du Programme des SEFPN après une consultation poussée avec les partenaires clés.

[15]  Dans son plus récent rapport, AANC souligne les nouveaux investissements financiers dans le Programme des SEFPN alloués par le gouvernement fédéral dans son budget 2016 pour les cinq prochaines années, ainsi que les crédits budgétaires de chaque organisme fournissant des SEFPN pour l’exercice en cours et les modèles de financement utilisés pour générer ces budgets.

[16]  En règle générale, les PCPI soutiennent qu’AANC n’a pas démontré comment, le cas échéant, les nouveaux investissements dans le Programme des SEFPN seront suffisants pour répondre aux conclusions de la décision, surtout à court terme.  

[17]  Pour les motifs suivants, la formation est d’avis que les autres ordonnances, y compris les renseignements et la production de rapports supplémentaires d’AANC, doivent garantir que les conclusions de la décision, en ce qui concerne le Programme des SEFPN, ont été ou seront abordées à court terme.

A.  Rectifications du modèle de financement – lacunes et hypothèses 

[18]  Une des principales conclusions de la décision est que le Programme des SEFPN d’AANC, d’où provient le financement par le biais de formules, Directive 20-1 et l’Approche améliorée axée sur la prévention (AAAP), offre un financement fondé sur des hypothèses erronées au sujet du nombre d’enfants placés, du nombre de familles qui ont besoin de services et des niveaux de population qui ne reflètent pas avec exactitude les besoins réels en matière de service de nombreuses communautés dans les réserves. Il en résulte un financement fixe insuffisant pour les coûts d’exploitation (dépenses en immobilisation, bureaux multiples, ajustement au coût de la vie, salaires et avantages sociaux du personnel, formation, frais juridiques, frais liés à l’éloignement et aux voyages) et les coûts de prévention (services primaires, secondaires et tertiaires pour maintenir les enfants en toute sécurité dans leur milieu familial), ce qui entrave la capacité des organismes fournissant des SEFPN d’offrir des services provinciaux/territoriaux mandatées de protection sociale aux enfants, sans parler des services adaptés à la culture. Plus important encore, le manque de financement pour les coûts d’exploitation et de prévention constitue une incitation à placer les enfants parce que les frais d’entretien admissibles pour prendre soin d’un enfant pris en charge sont remboursables au coût (voir la décision aux paragraphes 384‑389 et 458).

[19]  Dans la décision 2016 TCDP 10, la formation a ordonné à AANC de prendre immédiatement des mesures pour remédier aux hypothèses et aux lacunes dans ses modèles de financement, y compris tous les éléments soulignés aux paragraphes 20 et 23 de cette décision sur requête. AANC devait produire un rapport détaillé expliquant comment ces lacunes et hypothèses sont abordées dans l’immédiat pour fournir un soulagement immédiat aux Premières Nations dans les réserves. L’ordonnance de la formation a également exigé qu’AANC fournisse des informations détaillées sur les crédits budgétaires pour chaque organisme fournissant le Programme des SEFPN et un calendrier de remise de ces allocations, y compris les calculs détaillés des montants reçus par chaque organisme en 2015-2016; les données fiables pour effectuer ces calculs; et, les montants reçus ou à recevoir en 2016-2017 pour chacun, avec un calcul détaillé des rajustements faits à la suite des mesures immédiates prises pour répondre aux conclusions de la décision (voir 2016 TCDP 10, aux paragraphes 20-25).

[20]  Depuis la décision 2016 TCDP 10, AANC soutient que les investissements liés aux mesures d’aide immédiates du Canada aideront à remédier à la discrimination identifiée par le Tribunal et amélioreront les résultats pour les familles et les enfants des Premières Nations. Les investissements offriront des services de prévention plus importants aux familles et soutiendront la stabilité du Programmes des SEFPN dont elles ont cruellement besoin, tout en assurant qu’aucune perturbation des services ne se produise durant les travaux de réforme du Programme des SEFPN.

[21]  Grâce à un investissement accru dans le Programme des SEFPN, AANC soutient qu’il élimine le recours à la Directive 20-1. Lorsque la Directive 20-1 s’applique, les organismes fournissant des SEFPN recevront leur financement par le biais de mécanismes existants durant le présent exercice, mais avec une augmentation des niveaux de financement déterminée à l’aide du modèle de prévision des coûts de l’AAAP le plus à jour. En 2016-2017, AANC investit 17,5 M$ dans les services et programmes de prévention comme aide immédiate pour les organismes fournissant des SEFPN encore sous le régime de la Directive 20-1.

[22]  Pour les compétences sous le modèle de financement AAAP, AANC indique que les mises à jour incluent : des fonds supplémentaires pour tenir compte des augmentations de population; des rajustements à la hausse pour 26 organismes dont plus de 6 % des enfants sont pris en charge; des rajustements de la rémunération du personnel pour assurer la comparabilité avec les taux provinciaux; mise à jour pour refléter les changements dans les normes provinciales (p. ex. les ratios de charge de travail pour les travailleurs sociaux ou d’autres intervenants de première ligne) et pour appuyer les services d’accueil et d’enquête; des mises à jour des normes de prestation des services, telles que l’augmentation du pourcentage utilisé pour calculer les services d’urgence en dehors des heures de travail et un financement accru pour les voyages du personnel; un financement accru pour les services d’audit, les services d’assurance et les services juridiques des organismes; et une augmentation des sommes allouées pour l’achat de services par enfant (c.‑à‑d. que les fournisseurs recevront 175 $ par enfant de 0 à 18 ans servi, quelle que soit la compétence).

[23]  AANC soumet que les montants du budget 2016 alloués pour combler les lacunes dans la Directive 20-1 et l’AAAP sont plus élevés que ce qui a été ciblé par AANC dans sa communication de 2012 The Way Forward (voir la décision aux paragraphes 295‑298). Sur cinq ans, la communication The Way Forward a estimé à 108 M$ le coût pour, entre autres choses, élargir la portée de l’AAAP aux compétences toujours sous la Directive 20‑1, alors que les compétences AAAP existantes ont reçu un complément. Tandis que les PCPI se concentrent sur la première année d’investissement du budget 2016, affirmant que le nouveau financement est en deçà des totaux estimés pour cinq ans dans la communication The Way Forward, AANC soutient, lui, que le point de comparaison approprié est plutôt la cinquième année d’investissement du budget 2016. C’est que le budget 2016 propose 176,8 M$ la cinquième année pour, entre autres choses, élargir la portée des services axés sur la prévention aux compétences sous la Directive 20‑1 et offrir un complément de financement dans celles opérant sous l’AAAP. 

[24]  En ce qui concerne les petits organismes de SEFPN, AANC indique que les organismes avec moins de 800 enfants placés seront toujours assujettis à la mise à l’échelle en ce qui concerne leur financement de base (frais généraux pour le conseil d’administration, salaires, avantages, formation et voyage, financement pour les évaluations de l’organisme, les vérifications, les frais juridiques, les frais d’assurance et d’administration). Toutefois, cela ne diminue pas le financement accordé à un organisme pour les services de protection ou de prévention. Selon AANC, les futures approches de financement de petits organismes feront partie de l’engagement à plus long terme avec les partenaires provinciaux et les Premières Nations.

[25]  Les PCPI soutiennent que la véritable évaluation de l’impact des mesures d’aide immédiates d’AANC est le degré auquel l’incitation à retirer de leurs foyers les enfants des Premières Nations a été réduite. Ils font valoir que le rapport de conformité d’AANC est dépourvu de garanties que les incitations à placer les enfants, qui ont été identifiées dans la décision, seront réduites par ses investissements dans les mesures d’aide immédiates et par les changements à ses modèles de financement; ils soutiennent également qu’AANC n’a pas démontré que les programmes d’investissements supplémentaires permettront aux organismes fournissant des SEFPN d’offrir des services comparables à ceux fournis par les provinces.

[26]  Alors que des réajustements vers le haut sont faits pour les organismes desservant plus de 6 % des enfants placés, les PCPI sont incertains quant à l’étendue à laquelle le pourcentage réel d’enfants placés est financé. En outre, il ne semble pas y avoir de rajustements vers le haut pour les organismes desservant plus de 20 % des familles dans le besoin. Pour les petits organismes, les PCPI soutiennent qu’AANC n’a pas eu l’option de reporter les problèmes causés par la mise à l’échelle du financement de base selon les niveaux de population.

[27]  Les PCPI demandent une ordonnance en vertu de laquelle AANC réajuste immédiatement ses modèles de financement pour s’assurer que les budgets d’exploitation des organismes fournissant des SEFPN se rapprochent des coûts réels. Ils proposent diverses modifications aux modèles de financement d’AANC, notamment :

·  une augmentation des montants de base dans le modèle, y compris le montant des achats pour les enfants;

·  que les organismes fournissant des SEFPN, au service d’une population où le pourcentage d’enfants pris en charge et le pourcentage de familles qui reçoivent des services dépassent 6 % et 20 % respectivement, bénéficient d’un rajustement à la hausse pour leurs budgets d’exploitation et de prévention au prorata des pourcentages excédentaires;

·  qu’aucun rajustement à la baisse ne soit appliqué aux organismes fournissant des SEFPN avec moins de 6 % des enfants placés et/ou servant moins de 20 % des familles;

·  que les rajustements du montant fixe dans le modèle de financement pour les niveaux de population soient augmentés; et

·  que le montant fixe dans le modèle de financement pour tous les organismes fournissant des SEFPN servant moins de 251 enfants autochtones inscrits soit le même que celui versé aux organismes qui en servent 251 et plus.

[28]  La formation reconnaît les efforts déployés jusqu’à présent par AANC et son désir d’améliorer la vie des enfants des Premières Nations au moyen de négociations avec les partenaires clés. La formation estime aussi que l’explication d’AANC, décrite au paragraphe 23 ci-dessus, est raisonnable, le montant du financement étant plus élevé que celui mentionné dans la communication The Way Forward en 2012. Mis à part le montant global des fonds supplémentaires investis dans le Programme des SEFPN, la formation a appris avec plaisir qu’un nouveau financement (environ 28,4 M$) avait été accordé aux organismes fournissant des SEFPN le 1er juillet 2016, et que d’autres fonds supplémentaires seraient accordés avant la fin du présent exercice, en partie pour corriger certaines des hypothèses erronées contenues dans les modèles de financement d’AANC.

[29]  Toutefois, comme la formation a indiqué dans la décision au paragraphe 482, « Au-delà du simple financement, il est nécessaire de réorienter le programme de manière à respecter les principes des droits de la personne et à tenir compte des saines pratiques en matière de travail social. » La formation s’inquiète de lire dans les observations d’AANC le même type de déclarations et de raisonnement déjà livrés par l’organisation dans le passé. Par exemple, qu’il appartient à chaque organisme fournissant des SEFPN de déterminer comment il affecte le financement à la prévention et aux services de programmation culturelle (voir la décision aux paragraphes 187 à 189, 311, 313 et 314). Ceci soulève la même question qu’au moment de l’audience : que se passe-t-il si le financement n’est pas suffisant pour permettre cette flexibilité? Comment AANC a-t-il déterminé que chaque organisme dispose d’un financement suffisant pour se conformer aux normes provinciales de bien-être des enfants et être encore en mesure de faire de la prévention et d’offrir des services adaptés à la culture? Le fait que des éléments clés, tel que déterminer le financement des petits organismes en région éloignée, ont été remis à plus tard est le reflet de la vieille mentalité qui règne à AANC et qui est à l’origine de la plainte. Cela peut supposer qu’AANC est toujours alimenté par de l’information et des politiques qui relèvent de cette mentalité rétrograde et qui mènent à la discrimination. En effet, la formation a ciblé les défis auxquels font face les organismes et communautés de petite taille ou éloignés partout au Canada, et ce, à de nombreuses reprises dans la décision (voir p. ex. les paragraphes 153, 277, 284, 287, 291, 313 et 314). AANC a étudié ces questions et en est conscient depuis un certain temps; pourtant, il n’a toujours pas montré qu’il avait élaboré une stratégie pour y remédier.

[30]  L’accent sur les discussions avec des partenaires clés à des tables tripartites est aussi quelque chose que cette formation a vu dans la preuve et entendu plusieurs fois de la part d’AANC tout au long de ces procédures (voir la décision aux paragraphes 138, 139, 191 à 197, 201 et 213 à 215). Les situations au Québec et en Colombie-Britannique en constituent l’un des principaux exemples dans la preuve. Malgré de nombreuses consultations, discussions et études conjointes dans le passé, et même avec des partenaires disposés et bien préparés à la transition des provinces assujetties à la Directive 20-1 vers l’AAAP, cette transition est toujours à faire ou a été considérablement retardée (voir la décision aux paragraphes 73 à 77 et 314).

[31]  Bien que la formation comprenne que les changements ainsi qu’une réforme significative à long terme se feront en consultation avec des partenaires clés, tels que les peuples autochtones partout au Canada et dans les provinces, le but de l’aide immédiate a été, et est toujours, d’éliminer le plus d’effets préjudiciables possibles en ce moment en fonction des renseignements dont nous disposons, des conclusions de la décision et de l’aide d’experts, des organismes fournissant des SEFPN et des parties. L’aide immédiate est une mesure temporaire visant à supprimer le plus grand nombre possible d’effets préjudiciables tout en sachant que la collecte de données, les études et consultations se traduiront par un changement plus global et efficace du Programme des SEFPN.

[32]  Une réforme complète prendra un certain temps. La formation le comprend et croit qu’une réforme complète arrivera. Cependant, l’aide immédiate devrait être traitée comme tel et non comme une solution à long terme. Bien que des fonds supplémentaires puissent résoudre les aspects les plus discriminatoires des modèles de financement à court terme d’AANC, la formation n’est pas en mesure de déterminer si c’est le cas actuellement. La formation reconnaît et apprécie une large part de l’information supplémentaire que fournit AANC en réponse à la décision 2016 TCDP 10; cependant, même avec ces renseignements additionnels, la justification ou la méthodologie d’attribution du financement supplémentaire n’est pas totalement expliquée et les données et les documents, y compris l’étude des facteurs de coûts et l’analyse des tendances à partir desquels les revendications d’investissements du budget 2016 dans le Programme des SEFPN ont été développées, sont incomplets.

[33]  Autrement dit, dans son analyse, la formation ne se préoccupe pas du montant précis du financement en soi, mais plutôt de la façon dont il est établi. C’est la façon dont le Programme des SEFPN est exécuté et dont le financement est établi qui entraîne des effets discriminatoires pour les enfants et les familles des Premières Nations. L’accent de la formation est mis de vérifier si le financement est déterminé à partir d’une évaluation des circonstances et des besoins distincts des enfants, des familles et des communautés des Premières Nations. Même si d’autres facteurs entrent en jeu pour déterminer si le montant du financement accordé aux organismes qui fournissent des SEFPN est adapté pour répondre aux besoins des communautés qu’ils servent, tels que l’éloignement et l’ampleur des déplacements pour rencontrer des enfants et des familles (des sujets traités plus loin dans cette décision sur requête), les hypothèses sur le nombre d’enfants pris en charge, le nombre de familles qui ont besoin de services et les niveaux de population constituent le point de départ pour aborder les effets discriminatoires des modèles de financement d’AANC.

[34]  Par conséquent, le fait de laisser quelques hypothèses et lacunes dans les modèles de financement d’une réforme à long terme pour s’assurer que tout le monde soit consulté peut être problématique. Comme il est mentionné dans la décision, une approche fragmentaire de la réforme n’est pas une façon efficace de procéder (voir la décision aux paragraphes 185 et 331). La formation comprend qu’AANC est déterminé à réformer l’ensemble du Programme des SEFPN et croit qu’il entend le faire, mais il craint que le report d’une action immédiate en faveur de la réforme et de la consultation à une date ultérieure perpétue la discrimination que le Programme des SEFPN a favorisée pendant les 15 dernières années. Pendant cette période, malgré les problèmes bien documentés sur le programme, les consultations avec ses partenaires et la participation à des tables tripartites, le système d’AANC n’a pas réussi à s’adapter aux besoins des enfants et des familles des Premières Nations (p. ex. voir la décision aux paragraphes 134,138 à 141, 203, 311, 314 à 315, 383 à 394 et 456 à 467). La formation comprend que ce n’est pas une tâche facile et que le Programme des SEFPN ne peut pas être réformé instantanément. Toutefois, cela ne signifie pas que des mesures efficaces ne peuvent pas être appliquées dans l’intervalle. La formation partage également l’avis des parties qu’une approche uniformisée ne doit pas être utilisée; cela a également été abordé dans la décision (voir paragraphe 315).

[35]  Tout au long de la décision, la formation a souligné la dichotomie entre les objectifs du Programme des SEFPN et les méthodes inefficaces d’AANC pour la réalisation de ces objectifs (voir p. ex. paragraphe 312). Un bon nombre de ces lacunes peuvent être corrigées en ce moment, sans la nécessité de nouvelles études et consultations à grande échelle. Encore une fois, l’objectif est d’éliminer autant que possible les effets préjudiciables durant l’examen et la réforme du système. Comme l’ont indiqué les PCPI, reporter la résolution des hypothèses et des lacunes dans ses modèles de financement pour y faire face seulement à long terme n’était pas une option offerte à AANC. À titre de fournisseur de services, bailleur de fonds et gestionnaire du Programme des SEFPN, AANC bénéficie d’une certaine souplesse dans la manière d’aborder les conclusions de la décision. Cependant, dans la décision 2016 TCDP 10, la formation a exprimé clairement que les mesures immédiates soulignées et définies dans cette décision sur requête devaient être entreprises maintenant alors qu’une autre réforme à plus long terme était envisagée. 

 

[36]  La formation réitère ses ordonnances sur les mesures d’aide immédiates afin que tous les éléments énumérés au paragraphe 20 de la décision 2016 TCDP 10, sans se limiter aux éléments qui ont été soulignés, soient corrigés immédiatement, y compris les effets préjudiciables liés :

·  aux hypothèses concernant les enfants placés, les familles qui ont besoin de services et les niveaux de population;

·  aux organismes en région éloignée et/ou aux petits organismes;

·  à l’inflation/au coût de la vie et aux coûts pour changer les normes de service;

·  aux salaires et avantages, à la formation, aux frais juridiques, aux primes d’assurance, aux frais de déplacement, aux bureaux multiples, aux immobilisations, aux programmes et services culturellement adaptés et aux mesures moins perturbatrices.

[37]  En ce qui a trait plus précisément aux organismes en région éloignée, la formation s’attend à ce qu’AANC élabore une stratégie qui tient compte d’éléments tels que les coûts supplémentaires associés aux distances à parcourir entre les centres de service en termes de similarité avec les temps réglementaires de réponse provinciale et la gestion des répercussions sur les fournisseurs de services et sur les enfants et les familles qu’ils servent; la disponibilité des services à proximité ou leur absence; et, les frais en général et le coût de la vie plus élevés dans les régions nordiques ou isolées. L’éloignement peut affecter chaque élément dans le budget d’un organisme fournissant des SEFPN. La formation traitera de la question de l’éloignement ci-dessous.

[38]  Encore une fois, les objectifs du Programme des SEFPN peuvent être satisfaits uniquement si la méthode de financement d’AANC est axée sur les niveaux de service et les besoins réels des enfants et des familles des Premières Nations qui peuvent varier d’un enfant, d’une famille ou d’une nation à l’autre. Mettre l’accent sur le montant global du financement, en l’appliquant sur des modèles de financement imparfaits, a peu d’effet, si ce n’est pas du tout, pour éliminer la discrimination reconnue dans la décision. Par conséquent, le Tribunal ordonne à AANC d’établir immédiatement les hypothèses de financement de 6 % des enfants placés et 20 % des familles dans le besoin de services à titre de normes minimales seulement. AANC a indiqué qu’il ne réduira pas le montant de financement des organismes dont le nombre d’enfants placés est inférieur à 6 %. AANC a reçu l’ordre d’appliquer les mêmes normes pour l’hypothèse de 20 % des familles qui ont besoin de services. Autrement dit, le montant de financement ne sera pas réduit pour les organismes fournissant des SEFPN qui desservent moins de 20 % des familles qui ont besoin de services.

[39]  Pour les organismes qui ont plus de 6 % des enfants placés ou qui servent plus de 20 % des familles, AANC doit calculer leur financement en se basant sur une évaluation des niveaux réels d’enfants placés et de familles nécessitant des services. Bien qu’AANC a indiqué qu’il accordera des rajustements à la hausse à 26 organismes fournissant des SEFPN dont plus de 6 % des enfants sont placés, il n’y a pas suffisamment de renseignements attestant que ces rajustements sont fondés sur une évaluation du nombre réel d’enfants pris en charge. En outre, AANC n’a pas indiqué le traitement réservé aux organismes servant plus de 20 % des familles. Comme il est expliqué dans l’ordonnance à la fin de la présente décision sur requête, AANC devra se rapporter au Tribunal pour confirmer l’exécution de cette ordonnance et démontrer clairement comment cela a été fait. Encore une fois, cette ordonnance vise seulement à procurer une aide à court terme étant donné qu’une réforme complète du Programme des SEFPN se produira à long terme après d’autres consultations avec les peuples autochtones, les partenaires et des experts de partout au Canada.

[40]  Pour les hypothèses dans les modèles de financement fondées sur les niveaux de population, AANC a reçu l’ordre d’arrêter immédiatement de réduire de façon stéréotypée le financement en se fondant sur des seuils de population arbitraires. Encore une fois, le financement doit être accordé en fonction d’une évaluation des besoins réels de niveau de service des organismes qui fournissent des SEFPN. Comme la formation l’a expliqué ci-dessus, AANC devra se rapporter au Tribunal pour confirmer l’exécution de cette ordonnance et démontrer clairement comment cela a été fait.

[41]  À ce propos, et comme il est abordé plus en détail ci-dessous, la formation a besoin de plus de renseignements sur la façon dont AANC a établi son plan quinquennal d’investissement dans le Programme des SEFPN et a déterminé les budgets pour chaque organisme SEFPN. La formation note qu’il existe déjà certains documents de modèle de coûts déposés en preuve auprès du Tribunal et dans les plus récentes observations d’AANC qui fournissent certains de ces renseignements supplémentaires. Toutefois, ces renseignements doivent être encore plus détaillés pour expliquer clairement comment les besoins des enfants et des familles sont pris en considération en réponse aux ordonnances et des conclusions de la formation.

[42]  Par ailleurs, compte tenu de l’accent mis sur la consultation par AANC en réponse à plusieurs éléments de cette décision sur requête, il serait utile à la formation et aux autres parties qu’AANC puisse fournir une liste des Premières Nations, des organismes fournissant des SEFPN, des autorités provinciales et territoriales, des partenaires, des experts ou de toute autre personne consultée jusqu’à présent en réponse aux conclusions contenues dans la décision, ainsi que son plan de consultation pour l’avenir. La liste de toutes les consultations lancées de janvier à septembre 2016 doit comprendre l’ordre du jour et un résumé des discussions.

B.  Le financement pour les frais juridiques, les immobilisations, les services adaptés à la culture, le montant versé pour l’achat de services à l’enfance et les rapports sur la réception, l’évaluation et les enquêtes en lien avec la protection des enfants.

[43]  Selon AANC, la question du financement des frais juridiques, de l’immobilisation et des programmes et services adaptés seront abordés dans le cadre des discussions de la réforme à venir. La réponse à certaines de ces questions peut nécessiter de la participation des Premières Nations et des discussions avec ces dernières, les organismes qui fournissent des SEFPN et les gouvernements provinciaux et territoriaux. Du point de vue d’AANC, une action unilatérale pour traiter ces questions importantes serait contraire à l’engagement du gouvernement fédéral en vue de renouveler la relation entre le Canada et les peuples autochtones. AANC ajoute que des investissements de secours immédiats pourraient être utilisés par les organismes qui fournissent des SEFPN pour répondre aux besoins individuels de chaque collectivité en matière de programmes et d’activités adaptés à leur culture.

[44]  En ce qui concerne le montant versé pour l’achat de services à l’enfance, AANC indique une augmentation de 100 $ à 175 $ par enfant. Dans ses rapports sur la réception des plaintes, les évaluations et les enquêtes en lien avec la protection des enfants, AANC soutient que les investissements du budget 2016 fourniront environ 45 M$ sur les cinq prochaines années en fonds supplémentaires en soutien aux services d’accueil et d’enquête qui comprennent des activités telles que les rapports de réception, d’évaluation et d’enquête sur la protection des enfants.

[45]  Pour leur part, les PCPI ne comprennent pas pourquoi la question du financement des frais juridiques, de l’immobilisation et des programmes et services adaptés à la culture ne peut être traitée à ce stade. Des actions peuvent être prises maintenant pour atténuer la discrimination qui relèvent entièrement de la compétence fédérale et ne dépendent pas d’une action provinciale correspondante, notamment l’adoption de normes provinciales/territoriales applicables relatives à ces questions et leur financement adéquat. Plus précisément, les PCPI demandent :

·  que chaque organisme qui fournit des SEFPN reçoive 75 000 $ pour l’exercice 2016-2017 pour développer ou mettre à jour une vision adaptée à la culture pour la santé et la sécurité des enfants et des familles et pour commencer à développer ou mettre à jour des normes de service, des programmes et des mécanismes d’évaluation fondés sur la culture des enfants et des familles;

·  que les frais juridiques relatifs aux enfants placés et aux enquêtes sur le bien‑être des enfants soient entièrement remboursés au même tarif que celui utilisé par le gouvernement fédéral pour la rémunération des avocats externes;

·  que les coûts de réparation soient entièrement remboursables lorsqu’un organisme qui fournit des SEFPN a reçu un avis selon lequel des réparations doivent être exécutées pour se conformer aux règlements et codes de sécurité applicables au bâtiment et à la prévention des incendies, ou lorsqu’il existe d’autres preuves de non-conformité avec ces mêmes règlements et codes.

[46]  Les PCPI demandent que le montant versé pour l’achat de services à l’enfance soit porté à 200 $ par enfant. Pour ce qui est des rapports de réception, d’évaluation et d’enquête en lien avec la protection des enfants, les PCPI soutiennent qu’ils devraient être entièrement remboursables.

[47]  Comme il est mentionné dans la section précédente de cette décision sur requête, la formation n’est pas préoccupée par le montant précis en soi du financement, mais bien par la façon de l’établir : c’est-à-dire qu’il soit fondé sur une évaluation des circonstances et besoins distincts de chaque organisme qui fournit des SEFPN. En vertu de ce raisonnement, la formation n’a pas assez d’information en ce moment pour rendre une ordonnance à l’égard d’une demande d’un montant de financement précis pour développer ou mettre à jour des normes de service, des programmes et des mécanismes d’évaluation adaptés à la culture des enfants et des familles. La formation reconnaît que de laisser aux organismes qui fournissent des SEFPN le soin d’utiliser les investissements de secours immédiats pour résoudre ce point ne garantit pas que ce besoin soit satisfait, surtout dans le cas d’un petit organisme ou d’une collectivité éloignée. Cela étant, le Tribunal présentera cette demande à la prochaine conférence de gestion des cas en personne.

[48]  Comme il est expliqué dans la décision 2016 TCDP 10 et réitéré au paragraphe 36 ci‑dessus, le Tribunal s’attend à ce qu’AANC traite de la question des frais juridiques dans le cadre des mesures de secours immédiat alors qu’une solution à plus long terme est en cours d’élaboration. Bien que la formation comprenne l’avantage d’avoir des discussions sur le financement des frais juridiques à long terme, cette question devrait aussi être traitée immédiatement. La formation ordonne AANC de fournir des renseignements détaillés dans son rapport de conformité afin de démontrer clairement comment il aborde cette question. Cela fera partie de la prochaine conférence de gestion des cas en personne.

[49]  À propos des rénovations des bâtiments, la formation ne comprend pas pourquoi AANC ne peut pas agir maintenant, surtout lorsqu’un organisme qui fournit des SEFPN reçoit un avis selon lequel des réparations doivent être exécutées pour se conformer aux règlements et codes de sécurité applicables au bâtiment et à la prévention des incendies, ou lorsqu’il existe d’autres preuves de non-conformité avec ces mêmes règlements et codes. Une fois de plus, la formation comprend l’avantage d’avoir des discussions sur les immobilisations à long terme, mais ce problème urgent devrait être résolu immédiatement. La formation ordonne  AANC de fournir des renseignements détaillés dans son rapport de conformité afin de démontrer clairement comment il aborde cette question. Cela fera partie de la prochaine rencontre conférence de gestion des cas en personne.

[50]  Finalement, en ce qui concerne les questions du montant versé pour l’achat de services à l’enfance et des coûts associés aux rapports de réception, d’évaluation et d’enquête en lien avec la protection des enfants, encore une fois, la formation exige davantage de renseignements sur la façon dont AANC compte s’y prendre pour que son mode d’affectation de financement de ces éléments réponde aux besoins de chacun des organismes fournissant des SEFPN. La formation ordonne AANC de fournir des renseignements détaillés dans son rapport de conformité afin de démontrer clairement comment il a déterminé le financement de tels coûts. Cela fera partie de la prochaine conférence de gestion des cas en personne.

C.  Rajustement pour contrer l’inflation

[51]  Une autre conclusion importante de la décision portait sur le défaut d’AANC d’ajuster les niveaux de financement du Directive 20-1 depuis 1995, ainsi que les niveaux de financement prévus par l’AAAP depuis sa mise en œuvre, pour tenir compte de l’inflation et du coût de la vie.

[52]  AANC indique que les investissements du budget 2016 comprennent un rajustement annuel pour répondre aux futurs facteurs de coûts et de croissance. Les inducteurs de coûts qui tiennent compte du taux de croissance annuel moyen comprennent : la croissance du maintien, les charges d’exploitation des organismes (p. ex. loyer, transport, fournitures et équipement), les salaires et les augmentations de ratios d’enfants placés. Selon AANC, le montant annuel pour la croissance et les facteurs de coûts a été calculé à environ 3 % des investissements du programme et il injecte 159 M$ en fonds supplémentaires pour les cinq prochaines années pour régler ces questions.

[53]  Les PCPI soutiennent qu’AANC n’a pas réussi à fournir les détails sur les montants qu’il compte verser séparément pour [traduction] « la croissance et les futurs facteurs de coûts » et n’explique pas clairement comment il est arrivé aux montants correspondants. Par ailleurs, les futurs facteurs de coûts déterminés ne sont pas tous liés à l’inflation. En effet, les PCPI font valoir que certains de ces facteurs de coûts sont liés à la discrimination héritée du Programme des SEFPN (par exemple, les dépenses d’entretien liées aux enfants). En outre, elles soutiennent que le rajustement annuel pour la croissance et les futurs facteurs de coûts ne fait rien pour régler le désavantage systémique perpétué par un manque de rajustements liés à l’inflation au cours des deux dernières décennies.

[54]  Les PCPI réclament un financement accru pour restaurer le pouvoir d’achat perdu en raison de l’omission de fournir un rajustement composé pour contrer l’inflation annuelle en vertu de l’indice des prix à la consommation. Pour les exercices 2016-2017 et les suivants, ils demandent des rajustements annuels au financement des organismes qui fournissent des SEFPN selon l’augmentation de l’indice des prix à la consommation.

[55]  AANC est ordonné de fournir les détails sur les montants qu’il compte verser séparément pour « la croissance et les futurs facteurs de coûts » et d’expliquer de façon détaillée comment il est arrivé aux montants correspondants. Étant donné que la formation a des questions à poser à AANC, la demande d’un financement accru pour restaurer la perte de pouvoir d’achat sera abordée pendant la prochaine conférence de gestion des cas en personne.

D.  Dépassements de coûts et réaffectation de fonds provenant d’autres programmes d’AANC

[56]  La décision a également abordé la preuve à l’effet que là où il y avait des dépassements de coûts pour les frais d’entretien, et avant de fournir les ressources financières supplémentaires, AANC exige que les organismes qui fournissent des SEFPN recouvrent d’abord ces dépassements en puisant dans le financement attribué aux volets de la prévention et de l’exploitation. À ce propos, dans le cas où les coûts d’entretien dépassaient le budget du Programme des SEFPN, des fonds d’autres programmes d’AANC étaient réaffectés, tels que le logement et les infrastructures, pour couvrir ces coûts d’entretien. Le vérificateur général du Canada a dénoncé cette situation qu’il qualifie d’intolérable et de néfaste pour les autres programmes sociaux importants destinés aux Premières Nations dans les réserves.

[57]  Encore une fois, AANC allègue que les investissements du budget 2016 ont tenu compte des facteurs de coûts et des facteurs de croissance, y compris ceux ayant une incidence sur les dépenses inhérentes au maintien. S’il y a une forte pression sur le budget alloué, des ressources supplémentaires peuvent être fixées. Les fonds seront alloués selon le besoin des organismes pour répondre aux augmentations des frais de maintien, aux changements de salaire au provincial et à toute augmentation du ratio des enfants placés.

[58]  En outre, AANC affirme que les investissements du budget 2016 contribueront à instaurer un environnement de financement plus stable et plus prévisible au sein du ministère, réduisant ainsi le besoin de réaffectations provenant d’autres programmes essentiels tels que les infrastructures et le logement. Cependant, AANC fait remarquer que tout engagement concernant le financement de programmes autres que celui des SEFPN déborde du cadre de la présente plainte.

[59]  Les PCPI affirment que seulement 51 830 765,38 $ seront accordés aux organismes fournissant des SEFPN pour couvrir les dépassements de coûts en 2016‑2017. Par conséquent, ils demandent que la formation ordonne à AANC de cesser d’exiger que les organismes qui fournissent des SEFPN recouvrent les dépassements de coûts liés à l’entretien dans le financement attribué aux volets de la prévention et de l’exploitation. De plus, les PCPI demandent une ordonnance pour qu’AANC mette fin à sa pratique de réaffecter des fonds provenant d’autres programmes destinés aux Premières Nations pour remédier aux insuffisances des SEFPN.

[60]  La formation ordonne à AANC de cesser d’exiger que les organismes qui fournissent des SEFPN recouvrent les dépassements de coûts liés à l’entretien dans le financement attribué aux volets de la prévention et de l’exploitation. À nouveau, ceci assure que les budgets des SEFPN permettent de mieux répondre aux besoins réels des enfants et des familles qu’ils servent.

[61]  Bien que la réaffectation du financement provenant d’autres programmes des Premières Nations pour pallier l’insuffisance des SEFPN puisse sortir du cadre de la présente plainte, la formation a formulé des conclusions dans la décision sur les effets néfastes de cette pratique (voir par exemple, para 373 et 390). Par conséquent, la formation presse AANC pour qu’il élimine cette pratique.

E.  Demandes de renseignements supplémentaires

[62]  Les PCPI réclament davantage de détails sur les affectations budgétaires pour le Programme des SEFPN et les organismes qui fournissent des SEFPN. Plus précisément, ils font remarquer que le rapport de conformité d’AANC stipule qu’une grande partie du financement supplémentaire sera versée après la [traduction] « mise en œuvre intégrale » du programme et [traduction] « au cours des cinq prochaines années ». Du point de vue des PCPI, AANC n’a pas fourni d’explication quant à la raison du délai de cinq ans pour entreprendre les actions; ils demandent qu’AANC soit ordonné de mettre fin à son approche progressive pour remédier à la discrimination. Les PCPI sont également incertains du moment exact où la « mise en œuvre intégrale » sera atteinte, ou du moment « au cours des cinq prochaines années » où bon nombre des mesures proposées par AANC entreront en vigueur.

[63]  En outre, même si AANC a fourni les modèles de financement qui ont généré ses budgets, les PCPI demandent aussi qu’il produise les données brutes sur lesquelles il s’est fié pour fixer toute augmentation de financement, y compris sa façon de calculer les projections financières au-delà de l’exercice 2016-2017, toutes les mesures prises pour assurer la comparabilité des salaires et avantages sociaux du personnel aux taux provinciaux, les renseignements utilisés pour déterminer les ratios du nombre de cas au Québec et au Manitoba et, en général, les moyens utilisés pour déterminer les valeurs pour les services d’urgence en dehors des heures de travail, les frais de déplacement du personnel, les vérifications des organismes, les services juridiques et les assurances.

[64]  Selon AANC, la « mise en œuvre intégrale » du budget 2016 sera atteinte la 4e année et encore la 5année de son plan quinquennal. Les projections financières pour 2017-2018 à 2020-2021 ont été calculées en pondérant l’investissement annuel total des années 4 et 5. Le financement sera versé progressivement aux organismes parce que, selon AANC, l’expérience passée et des discussions avec les bénéficiaires du financement ont montré que les fonds graduels donnent aux organismes suffisamment de temps pour embaucher, former et retenir son personnel, selon la disponibilité des travailleurs sociaux qualifiés et autres main-d’œuvre, et d’élargir leurs programmes de prévention. AANC soutient que cette approche ne signifie nullement que le Canada suppose que les organismes n’ont pas la capacité d’appliquer des mesures d’aide immédiates, mais il reconnaît qu’il faut du temps pour faire croître n’importe quelle organisation, et qu’il s’agit d’un mécanisme pour s’assurer que le financement ne vienne pas à manquer.

[65]  AANC ajoute que les modèles de financement révisés utilisés pour soutenir les investissements du budget 2016 ont été mis à jour au moyen d’un processus qui a pris plusieurs années et qui comprend une étude des facteurs de coûts et une analyse des tendances exhaustives basées sur les données les plus récentes disponibles par province/territoire. En ce qui concerne plus particulièrement les avantages sociaux du personnel, AANC déclare que le montant a été établi en calculant 20,45 % du total des salaires. C’est la méthodologie convenue lors de la création de l’AAAP. Dans le cadre de la réforme à long terme du Programme des SEFPN, AANC est ouvert à poursuivre les discussions sur la modification du calcul des futures allocations des avantages sociaux du personnel.

[66]  Une grande partie de l’information contenue dans les plus récentes communications d’AANC, y compris les renseignements sur ses méthodes pour déterminer le montant du nouveau financement ainsi que la logique de son déroulement progressif, aurait dû être fournie il y a des mois, d’autant plus qu’AANC affirme que son étude des coûts et son analyse des tendances ont été développées sur plusieurs années. Cette information aurait été utile pour faire avancer plus rapidement la prise des mesures de secours immédiat. Même si l’approche de financement progressif peut suivre le même mode de mise en œuvre déjà utilisée pour l’AAAP, la formation demande à AANC de lui fournir l’information ci-dessus plutôt que de se retrouver avec des hypothèses. AANC a reçu la directive de divulguer à la formation et aux PCPI la documentation de l’étude des coûts et de l’analyse des tendances sur lesquels il a basé ses calculs pour l’affectation du financement du budget 2016. De plus, AANC doit fournir sa justification, ses données et toute autre information pertinente pour aider la formation à comprendre les investissements de son budget 2016 et les mesures adoptées pour répondre aux conclusions de la décision, notamment : sa façon de calculer les projections financières au-delà de l’exercice 2016‑2017; toutes les mesures prises pour assurer la comparabilité des salaires et avantages sociaux du personnel aux taux provinciaux; les renseignements utilisés pour déterminer les ratios du nombre de cas au Québec et au Manitoba; et, en général, les moyens utilisés pour déterminer les valeurs pour les services d’urgence en dehors des heures de travail, les frais de déplacement du personnel, les vérifications des organismes, les services juridiques et d’assurance.

IV.  L’Entente de 1965 conclue avec l’Ontario

[67]  En ce qui concerne l’Entente de 1965 en Ontario, la décision a constaté que, alors qu’il s’agissait apparemment d’une amélioration par rapport à la Directive 20-1 et que l’Entente de 1965 paraissait plus avantageuse que l’AAAP, son application se traduit également par des dénis de services et des effets néfastes pour les enfants et les familles des Premières Nations. L’Entente n’a pas été mise à jour depuis un certain temps et ne tient pas compte des modifications effectuées au cours des années à la Loi sur les services à l’enfance et à la famille de l’Ontario sur des points comme la santé mentale et autres services de prévention. Ceci est aggravé par un manque de coordination entre les programmes fédéraux sur la santé et les services sociaux qui touchent les enfants et les familles dans le besoin, en dépit de ces types de programmes en cours de synchronisation en vertu de la Loi sur les services à l’enfance et à la famille de l’Ontario. La décision souligne également le manque de services de proximité pour appuyer la prestation des services aux enfants et aux familles des réserves, notamment dans les collectivités éloignées et isolées, exacerbant encore plus l’écart. Enfin, il est expliqué dans la décision qu’il y a discordance entre la législation de l’Ontario et les normes de prestation des services adaptés à la culture des enfants et des familles des Premières Nations, par exemple, par la nomination d’un représentant de bande et l’absence de fonds d’AANC pour le faire (voir les décisions, aux paragraphes 223 à 246).

[68]  Encore une fois, pour les raisons qui suivent, la formation est d’avis que les autres ordonnances, y compris les renseignements et les rapports supplémentaires que doit produire AANC, doivent garantir que les conclusions de la décision, en ce qui concerne l’Entente de 1965, sont prises en compte ou le seront à court terme.

A.  Mise à jour de l’Entente de 1965

[69]  Les PCPI réclament la mise à jour des annexes de l’Entente de 1965 afin qu’elles reflètent la version actuelle de la Loi sur les services à l’enfance et à la famille de l’Ontario. Ils demandent également une ordonnance garantissant le financement pour la gamme complète des services juridiques, y compris la nomination des représentants de bande et les services de santé mentale pour enfants, prévus par la législation sur le bien-être de l’enfance de l’Ontario.

[70]  À ce sujet, AANC a précisé qu’il travaillera activement avec la province de l’Ontario et les intervenants, comme les organisations, la direction et les collectivités des Premières Nations, les organismes et les fournisseurs de services de première ligne, pour réaliser les réformes nécessaires à l’Entente de 1965. Une rencontre a eu lieu entre les fonctionnaires d’AANC et le ministère des Affaires autochtones de l’Ontario pour discuter de différentes questions, dont le bien-être de l’enfance en Ontario. Subséquemment, le 11 mars 2016, la ministre d’AANC a rencontré le ministre ontarien des Affaires autochtones pour discuter des grands dossiers prioritaires, notamment des SEFPN en Ontario et de la nécessité de réviser l’Entente de 1965 de l’Ontario. Selon le Canada, ces rencontres ont ouvert la voie à d’autres débats de fond avec les Premières Nations, y compris l’organisme COO et autres parties intéressées.

[71]  En outre, le 10 mai 2016, le bureau régional d’AANC de l’Ontario a envoyé une lettre au chef régional de l’Ontario, Isadore Day, et à la sous-ministre provinciale, Deborah Richardson, pour les informer de l’octroi d’investissements en aide immédiate dans les services à l’enfance et aux familles de l’Ontario. Cette lettre indique que les fonds destinés aux représentants de bande seront considérés comme faisant partie de la réforme du Programme des SEFPN.

[72]  En ce qui concerne les services en santé mentale, AANC soutient que 69 M$ seront investis sur les trois prochaines années en soutien immédiat au bien‑être mental des autochtones partout au Canada. Ce financement s’ajoute à près de 300 M$ investis annuellement dans les programmes communautaires de traitement des toxicomanies et de santé mentale dans les réserves et les territoires. Selon AANC, ce nouveau financement appuiera diverses mesures dont certaines sont propres à l’Ontario.

[73]  La formation se réjouit des nouveaux et importants investissements mentionnés ci‑dessus. Bien que cela corrige certains des impacts négatifs mis en évidence dans la décision, encore une fois, la formation n’est pas en mesure d’en évaluer la portée que ce soit à court ou à long terme. AANC est ordonné de fournir sa justification, ses données et toute autre information pertinente afin d’aider la formation à comprendre les investissements de son budget 2016 et dans quelle mesure ils répondent à court terme aux besoins des enfants des Premières Nations ainsi qu’aux conclusions de la décision, en particulier en ce qui concerne les services de santé mentale et les représentants de bande.

[74]  À cet égard, la formation est consciente que, contrairement à la prestation des services provinciaux et la Loi sur les services à l’enfance et à la famille de l’Ontario, les services sociaux et les services de santé fédéraux destinés aux enfants des Premières Nations sont offerts par l’intermédiaire de différents ministères. Néanmoins, la formation a tiré ses conclusions à partir de la preuve présentée en ce qui concerne les lacunes et les effets néfastes causés par la participation du gouvernement fédéral dans les services de santé et les services sociaux destinés aux enfants des Premières Nations de l’Ontario (par exemple, voir la décision, aux paragraphes 364 à 373 et 391 à 392). Dans l’ensemble, la formation a jugé la situation en Ontario en deçà de l’objectif de l’Entente de 1965 de « [...] mettre à la disposition des Indiens de la province, la gamme complète des programmes d’aide sociale provinciaux » (voir la décision, au paragraphe 246). Encore une fois, la formation veut savoir comment ces conclusions sont abordées à court terme alors que l’Entente est en cours de réforme.

B.  Quotient d’éloignement

[75]  La NNA avance qu’un nouveau quotient d’éloignement doit être développé afin de s’assurer que le financement aux collectivités éloignées du Nord reflète le coût élevé de la vie et les frais exceptionnels de prestation des services dans ces collectivités. Le nouveau quotient d’éloignement devrait prendre en compte le coût de la vie, les données démographiques des collectivités du Nord où les enfants et les jeunes forment un pourcentage largement plus élevé de la population que dans le reste du Canada, les taux élevés de mortalité infantile, et les taux élevés de suicide chez les jeunes.

[76]  Selon la NNA, le Rapport Barnes (pièce HR-11, onglet 219 : David Barnes et Vijay Shankar, [[traduction] Éloignement dans le Nord : Étude et analyse des considérations relatives au modèle de financement de la protection de l’enfance pour deux organismes des Premières Nations : Tikinagan Child and Family Services et Payukotayno : James Bay and Hudson Bay Family Services] (Barnes Management Group Inc., 2006) fournit un bon exemple de ce à quoi sa proposition de quotient d’éloignement pourrait ressembler et de ce qu’un tel quotient pourrait accomplir. Toutefois, le Rapport Barnes est propre à l’Ontario, définit plusieurs lacunes dans les données et a été rédigé en 2006. La NNA demande donc qu’une mise à jour du Rapport Barnes soit financée par le gouvernement fédéral. La NNA propose de demander à des experts de développer un nouveau quotient d’éloignement basé sur le Rapport Barnes et propose que la sélection des experts se fasse d’un commun accord entre la NNA et le gouvernement fédéral. Si aucun accord n’intervient dans un délai raisonnable et relativement court, elle demande à la formation de sélectionner les experts appropriés.

[77]  Alors que l’élaboration d’un solide quotient d’éloignement fondé sur des données empiriques est en cours, la NNA suggère que des ajustements reflétant les réalités de l’éloignement nordique peuvent être apportés dans l’immédiat et montre son intérêt à travailler en collaboration avec les parties sur la mécanique de ces ajustements.

[78]  Considérant que les observations de la NNA ont porté principalement sur l’application d’un solide quotient d’éloignement pour déterminer le financement de ses propres communautés en Ontario, l’APN fait valoir que l’application des facteurs d’éloignement doit être mise en pratique partout au Canada. De même, la Société de soutien avance que les questions d’éloignement ne devraient pas être traitées avec une « mise à jour » du Rapport Barnes, mais plutôt dans le cadre d’une étude approfondie et propre à l’Ontario qui s’intègre dans le travail du CCN. COO s’attend également que le travail du CCN et l’étude propre à l’Ontario procurent des données pour servir de base à un quotient d’éloignement qui, à son tour, inspirera des modèles pour les programmes et le financement.

[79]  Pour sa part, AANC affirme qu’il s’engage à entreprendre et soutenir des recherches sur ce sujet, en s’appuyant sur les études contenues dans le Rapport Barnes, afin d’examiner un possible quotient d’éloignement.

[80]  La formation convient avec la NNA qu’un quotient d’éloignement doit être élaboré dans le cadre de l’aide à moyen et à long terme et que les données doivent être recueillies de façon appropriée. La formation se réjouit d’apprendre qu’AANC s’engage à entreprendre et soutenir la recherche sur ce sujet et à ouvrir la discussion sur un possible quotient d’éloignement. La Société de soutien et COO ont fourni des suggestions intéressantes sur la façon d’établir un quotient d’éloignement. Ce sujet fera partie de la prochaine conférence de gestion des cas en personne.

[81]  La formation convient avec la NNA que des ajustements reflétant les réalités de l’éloignement nordique peuvent être apportés dans l’immédiat, parallèlement à l’élaboration d’un solide quotient d’éloignement fondé sur des données empiriques. La formation est également d’accord avec l’APN que cela ne devrait pas seulement s’appliquer à l’Ontario, mais, au contraire, l’application des facteurs d’éloignement doit s’étendre au Canada entier. Comme il a été mentionné plus tôt au paragraphe 36, dans la décision 2016 TCDP 10, la formation a ordonné AANC de se pencher immédiatement sur les moyens de déterminer le financement des organismes qui fournissent des SEFPN en région éloignée. Cet exercice devrait tenir compte de certains points, notamment : les frais de déplacement pour fournir ou avoir accès aux services; le coût de la vie et de la prestation des services plus élevés dans les collectivités éloignées; la capacité des organismes qui fournissent des SEFPN en région éloignée à recruter et conserver du personnel; et, l’effet composé de la réduction du financement de base pour les organismes en région éloignée qui peuvent aussi être de petites organismes (par exemple, voir la décision, aux paragraphes 213 à 233 et 291). Une approche standardisée, de type « uniformisée », pour déterminer le financement des organismes en région éloignée affecte leur capacité globale à fournir des services et entraîne des effets néfastes pour de nombreux enfants et leur famille des Premières Nations. La formation ordonne AANC de fournir des renseignements détaillés dans son rapport de conformité afin de démontrer clairement comment AANC détermine le financement des organismes fournissant des SEFPN en région éloignée pour leur permettre de répondre aux besoins réels des communautés servies. Cela fera partie de la prochaine conférence de  gestion des cas en personne.

C.  Allocation des fonds de secours immédiat

[82]  AANC a précisé que le budget 2016 prévoit de nouveaux investissements d’environ 5,8 M$ en Ontario en 2016-2017. Par 2019-2020, l’allocation annuelle totale pour les services de prévention chez les Premières Nations de l’Ontario sera d’environ 1 160 $ par enfant : une augmentation d’environ 560 $ par enfant par rapport au financement actuel.

[83]  Afin de fournir l’aide immédiate aux enfants en Ontario, les PCPI suggèrent que les fonds soient distribués aux Premières Nations de l’Ontario indépendamment du consentement du gouvernement provincial. Les PCPI demandent aussi qu’une date butoir soit fixée pour la distribution de ces fonds. Selon COO, l’organisme prévoit actuellement des rencontres avec AANC et la province de l’Ontario pour discuter de la façon dont le montant du financement inscrit au budget pour l’Ontario a été déterminé et comment il peut être distribué. Par conséquent, il demande qu’AANC fournisse de plus amples informations afin d’évaluer la suffisance des fonds et des rapports en cours pour s’assurer du respect de ses engagements.

[84]  Les PCPI soutiennent également que les investissements du budget 2016 ne tiennent pas compte de l’inflation. Par conséquent, ils demandent qu’AANC verse une somme de 5 M$, ajustée au taux composé de l’inflation aux valeurs de 2012 conformément à l’indice des prix à la consommation, à être divisée entre les organismes qui fournissent des SEFPN en Ontario.

[85]  AANC soutient qu’il ne peut pas verser des fonds en Ontario par la voie de l’Entente de 1965 sans le consentement de la province. En ce moment, l’Ontario n’a pas accepté de permettre le versement de fonds d’aide immédiate par la voie de l’Entente de 1965. Au contraire, selon AANC, l’Ontario a proposé que l’on trouve une approche différente pour créer une entente provisoire en dehors de l’Entente de 1965 pour le versement des fonds d’aide immédiate. AANC précise qu’il travaille activement avec la province pour trouver un moyen de financer dès que possible l’aide immédiate et qu’il est prêt à lancer immédiatement le financement pour les services de prévention dans les réserves prévu dans les engagements budgétaires de 2016. Toutefois, avant que toute option ne soit finalisée, AANC cherchera l’appui des dirigeants des Premières Nations. Pendant que les travaux sur l’allocation du financement des mesures d’aide immédiates en Ontario sont en cours, AANC demande au Tribunal de ne pas imposer de date butoir, mais de plutôt permettre aux parties de travailler en collaboration pour résoudre ce problème.

[86]  En ce qui concerne le montant additionnel pour l’inflation, AANC soutient que ses investissements du budget 2016 rendent compte des facteurs de coûts et de la croissance annuelle, pour un investissement de 70,5 M$ sur cinq ans en financement de programmes supplémentaires pour les fournisseurs de service en Ontario.

[87]  La formation reconnaît les investissements et l’explication d’AANC. Pendant que les travaux sur l’allocation du financement des mesures d’aide immédiates en Ontario sont en cours, le Tribunal n’imposera pas de date butoir; il permettra plutôt aux parties de travailler en collaboration pour résoudre ce problème. Cela étant dit, ce problème devra être abordé immédiatement et non retardé davantage. Toutefois, la formation s’attend à une mise à jour sur cette question de la part d’AANC dans le cadre de son rapport de conformité et demande qu’il divulgue la correspondance avec la province de l’Ontario qu’il a mentionnée dans ses observations. Ce sujet sera également traité lors de la prochaine conférence de gestion des cas en personne. 

[88]  Pour les mêmes raisons mentionnées au paragraphe 55 ci-dessus, la formation a besoin de plus d’information sur la demande de fonds supplémentaires pour contrer l’inflation. Il ne fait aucun doute que l’inflation est un facteur clé qui a des répercussions sur l’ensemble des prestations de services et la capacité des organismes à fournir ces mêmes services. Cela a été abordé dans la décision aux paragraphes 311, 387 et 458. Toutefois, compte tenu du manque de renseignements détaillés sur la détermination du financement pour les futurs « facteurs de coûts et croissance annuelle », la formation est incapable d’évaluer si les investissements d’AANC sont vraiment adaptés aux besoins des organismes SEFPN de l’Ontario. La formation ordonne  AANC de fournir des renseignements détaillés dans son rapport de conformité afin de démontrer clairement comment il a établi le financement en tenant compte des futurs « facteurs de coûts et croissance annuelle »; il examinera cette question lors de la prochaine conférence de gestion des cas en personne.

D.  Élargissement de la définition de « services de prévention »

[89]  Les PCPI demandent une ordonnance pour que la définition de « services de prévention » de l’Entente de 1965 soit élargie pour inclure les services de soutien et de réadaptation pour besoins particuliers et les soins de répit. Les PCPI soutiennent que, si le soutien pour besoins particuliers et les soins de répit étaient offerts comme services de prévention, une réduction du nombre des enfants pris en charge pourrait en résulter. Les familles n’auront plus à choisir entre garder leur famille unie et avoir un enfant dont les besoins particuliers n’ont pas été évalués et qui ne reçoit aucun soutien, ou disloquer la famille en plaçant un enfant pour qu’il ait plus de chances d’avoir accès à des services de soutien.

[90]  À ce propos, les PCPI soutiennent que les enfants ayant des besoins particuliers courent un risque nettement supérieur à la normale d’être retirés de leur milieu familial en raison de leur incapacité à se déplacer pour avoir accès aux soins et aux services dont ils ont besoin. Autrement dit, les enfants perçus comme étant dans un cadre familial où on ne leur prodigue pas les soins requis peuvent être considérés comme enfants ayant besoin de protection. Les déplacements effectués en vue d’accéder aux services pour besoins particuliers et aux évaluations ne sont pas financés en vertu de l’Entente de 1965. Par conséquent, les PCPI demandent que la définition des « services de prévention », en vertu de l’Entente de 1965, inclue le financement des déplacements effectués pour accéder à tous les services de santé prescrits par un médecin, y compris l’évaluation des besoins particuliers et les services que ceux-ci nécessitent.

[91]  Enfin, les PCPI demandent que la définition des « services de prévention », en vertu de l’Entente de 1965, soit élargie pour inclure l’aide aux familles en situation de crise définie dans le Programme de bien-être familial de l’Ontario récemment annoncé; et que l’engagement financier du Canada corresponde à celui du gouvernement ontarien de 80 M$ sur trois ans, afin de servir les familles en situation de crise en vertu du Programme de bien-être familial.

[92]  En réponse, AANC indique qu’il se réjouit de participer à des discussions sur la définition des « services de prévention » de la province de l’Ontario et s’engage à collaborer avec les autres partenaires fédéraux, de même qu’avec l’Ontario et les Premières Nations afin d’examiner les mesures de soutien nécessaires pour réduire ou prévenir le placement des enfants des Premières Nations. Cependant, il affirme que la demande pour une ordonnance unilatérale visant à élargir la définition de « services de prévention » aux termes de l’Entente de 1965 n’est pas appropriée. C’est-à-dire, l’Entente de 1965 a été conclue entre le gouvernement fédéral et la province de l’Ontario; toute modification à cette Entente devra donc être entreprise conjointement par les deux paliers de gouvernement.

[93]  COO propose que toute ordonnance pour une définition élargie de « services de prévention » soit considérée à moyen et à long terme durant la phase d’aide immédiate afin de permettre la planification et la consultation avec les Premières Nations, les organismes chargés du bien-être des enfants ou les autres fournisseurs de services proposés; et pour s’assurer que le fournisseur de services approprié puisse être trouvé, qu’il ait le mandat nécessaire, le désir et la capacité de fournir ces services.

[94]  La formation a fait des constatations dans la décision à l’égard des services visés par l’Entente de 1965 et des difficultés rencontrées par certains enfants et certaines familles des Premières Nations dans l’accès aux services dans les collectivités éloignées de l’Ontario (voir les paragraphes 223 à 244). Toutefois, le P approuve la suggestion de COO, mentionnée ci-dessus, que l’élargissement de la définition des « services de prévention » dans l’Entente de 1965 soit étudié à moyen ou à long terme. Cela dit, dans le cadre des investissements d’aide immédiate d’AANC, lesquels sont provisoirement coordonnés en dehors de l’Entente de 1965, et jusqu’à ce qu’une définition élargie des « services de prévention » puisse être considérée, AANC devrait envisager de rembourser les frais relatifs aux déplacements pour accéder aux services et aux évaluations pour les besoins particuliers prescrits par un médecin, les services de soutien et de réadaptation pour les besoins particuliers, les soins de répit et le soutien aux familles en situation de crise. La formation s’attend à une réponse détaillée d’AANC sur cette question et en discutera avec toutes les parties lors de la prochaine conférence de gestion des cas en personne. 

E.  Rétablir le partage des coûts des dépenses en capital

[95]  Les PCPI demandent une ordonnance pour qu’AANC rétablisse le partage des coûts des dépenses en capital en vertu de l’Entente de 1965 à la même affectation de 90 %, conformément à l’article 4 de l’Entente.

[96]  En réponse, AANC affirme qu’il abordera la question plus large des besoins en infrastructures pour le Programme des SEFPN dans le cadre des efforts de réforme à long terme.

[97]  Comme l’a souligné la décision, l’Entente de 1965 n’a pas prévu de partage des dépenses en capital depuis 1975 et, en conséquence, de nombreux organismes de SEFPN en Ontario n’ont pas le financement pour établir l’infrastructure nécessaire à la prestation des services obligatoires de protection à l’enfance (voir paragraphes 244 à 245). Par conséquent, dans le cadre des investissements d’aide immédiate d’AANC, provisoirement coordonnés en dehors de l’Entente de 1965, et jusqu’à ce que la question plus générale des besoins en infrastructure en vertu de l’Entente de 1965 puisse être entièrement examinée, AANC devrait élaborer une stratégie provisoire pour répondre aux besoins en infrastructure des organismes SEFPN. La formation s’attend à une réponse détaillée d’AANC sur cette question et en débattra avec toutes les parties lors de la prochaine conférence sur la gestion des cas en personne.

F.  Admissibilité

[98]  Selon les PCPI, pour être admissibles à un financement fédéral en vertu de la formule de partage des coûts de l’Entente de 1965, les enfants et les jeunes doivent: 1) être des Indiens inscrits; et, 2) résider sur une réserve, sur des terres de la Couronne, ou hors réserve pendant moins de 12 mois. Ils font valoir que cette exigence de résidence et de statut de l’Entente de 1965 a un impact négatif important sur les enfants et les jeunes qui ont le droit d’être inscrits, mais qui, pour diverses raisons, ne le sont pas. À cet égard, les PCPI expliquent que les exigences en matière de documentation pour l’inscription d’un enfant à la naissance ou encore jeune présentent un défi de taille. Par conséquent, ils demandent que les exigences en matière de résidence et de statut de l’Entente de 1965 soient modifiées afin d’assurer que non seulement les enfants et les jeunes qui sont inscrits soient admissibles aux services, mais aussi les enfants et les jeunes qui ont le droit d’être inscrits.

[99]  Selon AANC, le lieu de résidence et le statut d’Indien inscrit constituent un enjeu national qui nécessitera l’élaboration d’une approche globale en collaboration avec des partenaires clés. AANC affirme qu’il poursuivra les discussions sur cette question dans le cadre des efforts de réforme à long terme.

[100]  Bien que l’admissibilité en vertu de l’Entente de 1965 n’est pas abordée en soi dans la décision, la nécessité d’un examen et d’une mise à jour de l’Entente a été discutée en détail (voir les exemples aux paragraphes 223 à 228). La formation convient qu’une approche globale de l’admissibilité doit être développée en collaboration avec des partenaires clés, et qu’il vaut mieux aborder la question à long terme, lorsque l’Entente de 1965 aura été réformée. Toutefois, dans le cadre des investissements d’aide immédiate d’AANC, provisoirement coordonnés en dehors de l’Entente de 1965, AANC devrait aussi envisager d’aborder l’accès aux services pour les enfants des Premières Nations qui ont « le droit d’être inscrits ». La formation s’attend à une réponse détaillée d’AANC sur cette question et en débattra avec toutes les parties lors de la prochaine conférence de gestion des cas en personne.

G.  Étude spéciale

[101]  Les PCPI demandent qu’une étude spéciale sur l’application de l’Entente de 1965 en Ontario soit menée d’ici un an. L’étude serait menée par des experts au moyen d’un mécanisme développé avec l’accord des parties et l’apport d’un financement permettant une participation importante des organismes fournissant des SEFPN, des gouvernements des Premières Nations, d’AANC et de la province de l’Ontario. Selon les PCPI, l’étude déterminerait la pertinence de l’Entente de 1965 dans l’atteinte des objectifs suivants : la comparabilité des services; l’adaptation culturelle des services qui tiennent compte des désavantages historiques; et, l’assurance que l’intérêt de l’enfant est primordial. À terme, les résultats de l’étude contribueraient à moyen et à long terme aux réformes de l’Entente de 1965.

[102]  La NNA est d’accord avec l’étude proposée, mais fait valoir qu’elle devrait expressément inclure un volet pour examiner et traiter de façon rigoureuse l’effet de l’Entente de 1965 sur les collectivités éloignées du Nord. En outre, elle soutient que l’étude devrait aussi inclure une importante collecte de données, et que ces données soient mises à la disposition du public.

[103]  Comme la formation l’a noté dans la décision, l’Entente de 1965 n’a jamais fait l’objet d’un examen officiel d’AANC. La formation convient avec les PCPI qu’une telle étude déterminerait la pertinence de l’Entente de 1965 dans l’atteinte des objectifs suivants : la comparabilité des services offerts; la prestation de services adaptés à la culture qui tiennent compte des désavantages historiques; et, l’assurance que l’intérêt de l’enfant est primordial (voir la décision, aux paragraphes 223 à 227). Une étude contribuerait également à la réforme à long terme de l’Entente de 1965 en définissant les mesures concrètes qu’AANC peut prendre pour remédier à la discrimination soulignée dans la décision à l’égard de l’Entente de 1965. Alors que, de façon générale, AANC a indiqué qu’il est ouvert à l’examen de l’Entente de 1965, ses observations n’ont pas particulièrement traité de la demande des PCPI que soit tenue une étude spéciale.

[104]  Par conséquent, la formation ne prescrira aucune ordonnance à l’égard de l’étude spéciale en Ontario, tant qu’AANC ne se sera pas prononcé de façon précise sur la question. La formation s’attend à une réponse détaillée d’AANC sur cette question avant la prochaine conférence de gestion des cas en personne où il poursuivra la discussion avec les parties.

H.  Fonds de prévoyance unique

[105]  La NNA demande une ordonnance pour un fonds de prévoyance unique afin d’atténuer les manques de fonds des organismes fournissant des services aux collectivités éloignées et du Nord. Selon la NNA, atténuer les effets des dettes et déficits existants donnera davantage de souplesse à ces organismes pour répondre aux besoins directs, urgents et complexes des enfants et des familles dans leurs prestations de services d’aide à l’enfance dans les régions éloignées et du Nord.

[106]  Cette demande a été présentée dans la réplique de la NNA; elle n’a donc pas été commentée par les autres parties. Cette demande fera partie des discussions de la prochaine rencontre en personne sur la gestion de dossiers.

V.  Le principe de Jordan

[107]  Dans la décision, la formation a jugé que la définition et la mise en œuvre du Canada du principe de Jordan étaient restreintes et inadéquates, entraînant des lacunes en matière de services, des retards et des refus pour les enfants des Premières Nations. En fait, les retards étaient inhérents au processus de traitement du gouvernement fédéral des cas potentiels visés par le principe de Jordan. On ignore pourquoi l’approche du gouvernement pour les cas visés par le principe de Jordan était axée sur des conflits entre gouvernements concernant des enfants atteints de multiples déficiences, plutôt que sur des conflits de compétence (y compris entre ministères du gouvernement fédéral) impliquant tous les enfants des Premières Nations (voir la décision, aux paragraphes 379 à 382 et 458).

[108]  Dans la décision 2016 TCDP 10, la formation a demandé à AANC de considérer immédiatement que le principe de Jordan concerne comme intégrants tous les conflits de compétence (y compris les conflits entre les ministères fédéraux) et impliquant tous les enfants des Premières Nations (pas seulement les enfants atteints de multiples déficiences). Il a ajouté que, conformément à l'esprit et à l'objet du principe de Jordan, l'organisme gouvernemental qui est contacté en premier devrait payer le service sans devoir procéder à un examen au regard des politiques ni tenir des conférences sur le cas avant qu'un financement soit fourni.

[109]  En réponse à cette décision sur requête, AANC a indiqué avoir pris les mesures suivantes afin d’exécuter l’ordonnance de la formation :

A.  AANC a étendu le principe de Jordan pour qu’il ne se limite plus aux enfants des Premières Nations vivant dans les réserves qui ont des déficiences multiples nécessitant les soins de multiples fournisseurs de services;

B.  AANC a étendu le principe de Jordan pour qu’il s’applique à tous les conflits de compétence, y compris les conflits entre les ministères fédéraux;

C.  Les services pour tout cas visé par le principe de Jordan ne devront pas être retardés en raison de conférences sur le cas ou d’examens des politiques;

D.  Des comités de travail comprenant des fonctionnaires, des directeurs généraux et des sous-ministres adjoints de Santé Canada et d’AANC assureront la supervision et guideront la mise en œuvre de la nouvelle application du principe de Jordan et offriront une fonction d’appel.

[110]  Afin de mettre en œuvre cette nouvelle approche au principe de Jordan, le Canada a précisé qu’il investirait jusqu’à 382 millions de dollars en nouveaux fonds sur trois ans. Il s’engagera également avec les Premières Nations, les provinces et le Yukon dans une stratégie à long terme pendant cette période. Par ailleurs, le Canada a expliqué qu’il présenterait un rapport annuel sur le principe de Jordan, comprenant le nombre de cas signalés et le montant du financement accordé pour résoudre des cas précis. AANC a également mis son site Web à jour pour refléter les changements ci‑dessus, y compris l’affichage de coordonnées pour les personnes confrontées à un cas visé par le principe de Jordan. En outre, il examine si des mécanismes hors des heures d’ouverture doivent être mis en place.

[111]  Pour aller de l’avant, AANC soutient que la mobilisation sera un élément clé de sa nouvelle approche à l’égard du principe de Jordan. AANC ajoute que Santé Canada et AANC ont communiqué conjointement par écrit avec les provinces et les territoires en vue d’entamer des discussions relativement au principe de Jordan. Les dirigeants des Premières Nations participeront également à la conception, à la gestion et à l’application de la nouvelle approche du principe de Jordan de même qu’à une réforme à long terme des politiques et du programme. En outre, les hauts fonctionnaires de Santé Canada et AANC s’entretiendront avec l’APN afin de discuter des prochaines étapes et d’établir les détails précis de la mise en œuvre de l’approche de « l’enfant d’abord ». Parallèlement, les cadres des régions et de l’administration centrale mobiliseront leurs partenaires des Premières Nations pour l’approche proposée.

[112]  Les PCPI ont demandé à AANC de fournir des renseignements et des rapports supplémentaires sur la mise en œuvre de l’ordonnance et des engagements ci‑dessus. Ils ont spécifiquement demandé ce qui suit :

·  Des détails sur la façon dont le Canada prévoit consulter les parties, les Premières Nations et les organismes qui fournissent des SEFPN concernant l’ensemble des questions relatives au principe de Jordan;

·  Des détails sur les mesures prises par AANC pour se conformer à la disposition de « l’organisme qui est contacté en premier » de l’ordonnance;

·  La confirmation qu’AANC applique le principe de Jordan à tous les conflits de compétence;

·  La confirmation qu’AANC applique le principe de Jordan à tous les enfants des Premières Nations;

·  Des précisions concernant le processus qui sera suivi pour gérer les cas visés par le principe de Jordan, l’urgence des cas à traiter et les mesures de reddition de compte et de transparence qui ont été intégrées au processus pour assurer l’exécution de l’ordonnance;

·  Des précisions sur la façon dont le Canada compte s’assurer que les Premières Nations et les organismes qui fournissent des SEFPN fassent partie du processus de consultation avec les provinces et les territoires et qu’ils soient impliqués dans les autres éléments de la mise en œuvre du principe de Jordan.

[113]  Les PCPI ont également demandé qu’AANC publie et tienne à jour les renseignements concernant la mise en œuvre du principe de Jordan, notamment sa définition, son processus et ses critères d’évaluation, ainsi que ses mécanismes de recours et d’appel. En outre, les PCPI demandent qu’AANC affiche annuellement des données non identificatoires sur le nombre de références au principe de Jordan effectuées, le règlement de ces cas, le délai de règlement, de même que le résultat des appels indépendants. Enfin, les PCPI ont demandé qu’AANC fournisse à toutes les Premières Nations et aux organismes qui fournissent des SEFPN les noms et les coordonnées des responsables de chaque région et qu’il informe les Premières Nations et les organismes qui fournissent des SEFPN de toute modification à cet égard.

[114]  La formation est heureux des changements et des investissements rapportés par le Canada pour concrétiser toute la signification et la portée du principe de Jordan, mais partage plusieurs des préoccupations des PCPI concernant la consultation et la mise en œuvre du principe. D’abord, il serait utile pour la formation et pour les autres parties qu’AANC fournisse une liste des Premières Nations, des organismes qui fournissent des SEFPN, des autorités provinciales et territoriales, des partenaires, des experts ou de toute autre personne qu’elle a consultées jusqu’à maintenant au sujet du principe de Jordan, ainsi que son plan de consultation pour le futur. La liste de toute consultation antérieure de janvier à septembre 2016 devrait comprendre un ordre du jour et un compte rendu des discussions.

[115]  AANC a également indiqué qu’un document d’orientation provisoire a été remis aux points de contact régionaux pour le principe de Jordan afin d’orienter le personnel régional de façon à [traduction] « assurer que les services essentiels aux enfants ne soient pas retardés en raison de conférences sur le cas ou d’examens de politiques ». Toutefois, les observations du Canada sont imprécises en ce qui concerne le processus de suivi pour les cas visés par le principe de Jordan. Les observations du Canada sont les suivantes :

·  Santé Canada et AANC fourniront des directives supplémentaires à leur personnel pour initier la mise en œuvre de cette approche et appuieront le règlement des différends ou des lacunes en matière de services au cours des trois prochaines années en se basant sur des normes normatives provinciales;

·  Les hauts fonctionnaires collaboreront avec les Premières Nations à l’échelle nationale et régionale pour planifier l’élaboration et la mise en œuvre de la fonction de coordination des services et pour mettre au point une approche efficace pour l’organisation des services offerts aux enfants des Premières Nations ayant des problèmes de santé qui vivent dans des réserves.

·  Une gestion supplémentaire de ces cas sera effectuée de façon à assurer que la mise en œuvre du service  ou de la gamme de services appropriés soit faite en temps opportun;

·  Des formations et des orientations supplémentaires sur la nouvelle définition et la portée étendue du principe de Jordan commenceront immédiatement pour les points de contact;

·  Une structure de gouvernance sera établie pour traiter les cas visés par le principe de Jordan lorsqu’ils surviennent;

·  Les appels seront entendus rapidement pour assurer que les enfants ayant des problèmes de santé obtiennent des services en temps opportun.

[116]  Pour ce qui est des observations d’AANC susmentionnées, la formation n’est pas sûr de comprendre quel est le processus actuel de suivi des cas visés par le principe de Jordan et qui sont les gens impliqués dans le traitement de ces cas (personnel de l’AANC, travailleurs sociaux, professionnels de la santé, etc.). La formation demande à AANC:

·  De fournir des détails au sujet des mesures entreprises par AANC pour se conformer à la disposition de l’ordonnance de « l'organisme gouvernemental qui est contacté en premier».

·  De fournir des précisions en ce qui concerne le processus qui sera suivi pour les cas visés par le principe de Jordan, comment les cas urgents recevront l’attention voulue, et quelles mesures de responsabilité et de transparence ont été intégrées à ce processus pour assurer sa conformité à l’ordonnance;

·  De fournir des précisions sur la façon dont le Canada s’assurera que les Premières Nations, les organismes qui fournissent des SEFPN et les PCPI fassent partie du processus de consultation avec les provinces et les territoires et qu’ils soient impliqués dans les autres éléments de la mise en œuvre du principe de Jordan;

·  De fournir à toutes les Premières Nations et aux organismes qui fournissent des SEFPN les noms et les coordonnées des points de contact de chaque région pour le principe de Jordan et informer les Premières Nations et les organismes qui fournissent des SEFPN en question de toute modification à cet égard.

[117]  En ce qui concerne la portée de la nouvelle formulation du principe de Jordan d’AANC, la formation mentionne que la motion adoptée unanimement par la Chambre des communes ne limitait pas l’application du principe aux enfants des Premières Nations vivant dans les réserves, mais à tous les enfants des Premières Nations : « le gouvernement devrait immédiatement adopter le principe de l’enfant d’abord, d’après le principe de Jordan, afin de résoudre les conflits de compétence en matière de services aux enfants des Premières Nations » (voir décision, au paragraphe 353, non souligné dans l’original). La formulation du principe de Jordan d’AANC n’est pas conforme aux exigences d’admissibilité de son propre Programme des SEFPN, qui s’applique aux Premières Nations « des enfants et des familles des Premières Nations vivant ordinairement dans une réserve » (voir les articles 1.3.2 et 1.3.7 du Manuel national des programmes sociaux du SEFPN 2015 et l’article 1.1 du Manuel national des programmes sociaux 2012 aux para 52-53 de la décision). Ainsi, l’application du principe de Jordan uniquement aux enfants des Premières Nations vivant dans les réserves est plus limitée que la définition du Programme des SEFPN d’AANC. Ce type de restriction entraînera des lacunes en matière de services aux enfants des Premières Nations et ne correspond pas avec la décision (voir paragraphes 362, 364 à 382 et 391).

[118]  La formation souligne que, en réponse aux conclusions de la décision sur le principe de Jordan, la justification d’AANC pour sa nouvelle formulation du principe faisait référence à deux paragraphes de la décision (voir « Respondent’s Further Reply Submissions Re Immediate Relief », Justice Canada, 6 juillet 2016, aux p. 22-23), qui en faisaient une interprétation étroite en indiquant que le principe de Jordan ne devrait s’appliquer qu’aux enfants des Premières Nations vivant dans des réserves. Cette sorte d’analyse étroite est déconseillée puisqu’elle peut entraîner de la discrimination, telle qu’énoncée dans la décision. Conformément à la motion adoptée unanimement par la Chambre des communes, la formation ordonne à AANC d’appliquer immédiatement le principe de Jordan à tous les enfants des Premières Nations, pas seulement à ceux vivant dans des réserves.

[119]  La nouvelle formulation du principe de Jordan d’AANC semble également limiter son application aux enfants des Premières Nations [traduction] « atteints de problème de santé et ceux qui présentent un problème spécifique à court terme qui nécessite une aide sociale et médicale. » Sans renseignements supplémentaires, cette formulation du principe de Jordan semble encore une fois être plus restrictive que celle formulée par la Chambre des communes. La formation exige qu’AANC fournisse, dans son rapport de conformité, l’explication de sa formulation de la définition du principe de Jordan de façon à évaluer pleinement son impact. Cela fera aussi partie des discussions lors de la prochaine conférence de gestion des cas en personne.

[120]  Finalement, la formation conclut qu’AANC a confirmé que le principe de Jordan est appliqué à tous les conflits de compétence. La formation évaluera cette application au moyen de rapports de suivi.

VI.  Autres ordonnances demandées

A.  Aucune réduction de financement

[121]  Les PCPI demandent qu’on ordonne à AANC de ne pas réduire ni limiter davantage le financement des services à l’enfance et à la famille ou des services à l’enfance des Premières Nations couverts par le principe de Jordan.

[122]  AANC a accepté de ne pas réduire ni limiter davantage le financement des services à l’enfance et à la famille des Premières Nations ou des services à l’enfance couverts par le principe de Jordan.

[123]  La formation reconnaît l’engagement d’AANC susmentionné et l’intégrera dans son ordonnance ci-dessous.

B.  L’adoption du principe selon lequel les enfants et les jeunes vivant en établissements de soins doivent habiter le plus près possible de leurs communautés natales

[124]  Les PCPI ont demandé une ordonnance pour que le Canada adopte le principe selon lequel les enfants et les jeunes vivant en établissement de soins doivent habiter le plus près possible de leurs communautés natales et que le financement et les ressources nécessaires soient fournis pour assurer le respect de ce principe fondamental.

[125]  AANC estime que la décision de confier un enfant à un service de santé est à la discrétion du fournisseur du service. Toutefois, dans le cadre de la réforme du Programme des SEFPN, AANC affirme vouloir solliciter la participation des fournisseurs de services, des provinces et des territoires et tout autre partenaire utile, y compris les dirigeants et les organismes des Premières Nations, pour permettre aux enfants placés pour des soins en dehors de leur communauté de maintenir un lien avec leur communauté et leur culture.

[126]  Cette demande fera partie de la prochaine conférence de gestion de cas en personne.

C.  Comité consultatif national

[127]  AANC s’est engagé à rétablir le CCN, et des discussions avec l’APN et la Société de soutien sur la formation du comité sont en cours.

[128]  La NNA a demandé une ordonnance pour qu’elle soit représentée au CCN et aux tables rondes régionales. De plus, la NNA a demandé que le CCN intègre un sous-comité des régions éloignées du nord dans lequel la NNA serait représentée. Par ailleurs, si la formation conclut que la proposition de la NNA est prématurée, elle demande qu’une date limite ou un échéancier soit établi, que les sous-comités, le CCN et les tables rondes régionales devront respecter.

[129]  AANC appuie la proposition de la NNA qu’un sous-comité des régions éloignées du Nord collabore avec le CCN et a déclaré qu’il aborderait la question avec le comité.

[130]  L’APN soutient qu’il serait prématuré d’intégrer le CCN ou sa composition à une ordonnance. Les parties voient le CCN comme étant un mécanisme visant les réformes du Programme des SEFPN à moyen et à long terme, et les parties s’emploient actuellement à apporter une aide immédiate.

[131]  La formation se penchera sur cette question lors de la prochaine conférence de gestion des cas en personne.

D.  L’Étude canadienne sur l’incidence des cas de violence et de négligence envers les enfants

[132]  Les PCPI ont demandé qu’AANC soit tenu de financer immédiatement une nouvelle version de l’Étude canadienne sur l’incidence des cas de violence et de négligence envers les enfants, y compris une collecte de données spécifiques sur les communautés autochtones éloignées.

[133]  Selon AANC, un processus auquel participe l’Agence de la santé publique du Canada est en cours pour financer le volet autochtone de l’Étude canadienne sur l’incidence.

[134]  La formation est d’avis qu’une nouvelle version de l’Étude canadienne sur l’incidence serait un outil utile pour étayer davantage la réforme du Programme des SEFPN et l’Entente de 1965. La formation a aussi reconnu la volonté d’AANC de financer le volet autochtone de l’étude, tel que mentionné ci-dessus. Le Tribunal s’attend à ce qu’AANC indique dans son rapport si un financement pour le volet autochtone de l’Étude canadienne sur l’incidence sera octroyé, et si ce volet de l’étude inclura la collecte de données spécifiques aux communautés autochtones éloignées du Nord.

E.  Mise à jour des politiques, des procédures et des ententes

[135]  Les PCPI ont demandé qu’AANC soit tenu de mettre à jour ses politiques, ses procédures (y compris les procédures de compte rendu des organismes qui fournissent des SEFPN) et les ententes de contribution pour se conformer avec l’ordonnance de la formation et communiquer en détail et par écrit ces réformes aux Premières Nations, aux organismes qui fournissent des SEFPN et au public.

[136]  Selon AANC, la réforme du Programme des SEFPN comprendra une refonte de ses modèles de financement, de ses politiques et de ses procédures. Toutefois, ce genre de travail nécessite une analyse en profondeur et une collaboration avec tous les partenaires clés pertinents, il s’agit donc d’un processus de longue haleine. Entre-temps, AANC a soutenu qu’utiliser les mécanismes de financement et les procédures actuels permettra d’assurer que les enfants et les familles reçoivent toujours leurs services et préviendra leur interruption. AANC affirme vouloir collaborer avec ses partenaires pour mettre à jour et ajuster au besoin les processus pour le prochain exercice financier.

[137]  Selon la formation, la demande de mise à jour des politiques, des procédures et des ententes est visée par son ordonnance générale d’effectuer une réforme du Programme des SEFPN et de l’Entente de 1965, conformément aux conclusions de la décision. Par souci de clarté, la formation ordonne à AANC de mettre à jour ses politiques, ses procédures et ses ententes pour se conformer aux conclusions du Tribunal dans la décision. La formation est conscient que cette réforme sera menée à plus long terme, et que certaines mesures provisoires seront mises en place entre-temps, tel qu’indiqué dans la cette décision sur requête. Étant donné l’importance centrale de cette question et la nécessité de mettre en place un processus et des mesures provisoires, cette demande fera également partie de la conférence de gestion des cas en personne.

F.  Formation et paramètres de rendement des fonctionnaires fédéraux

[138]  Les PCPI ont demandé qu’AANC soit tenu d’assurer que ses fonctionnaires et son personnel reçoivent une formation obligatoire de 15 heures sur : le rapport final de la Commission de vérité et de réconciliation (décembre 2015); le Programme des SEFPN (y compris l’élaboration de modèles, les hypothèses et la revue des programmes); la décision et la pleine signification et portée du principe de Jordan. La formation devrait se tenir avant le 31 août 2016 et d’une manière approuvée par la Commission et les plaignantes.

[139]  Dans un même ordre d’idées, les PCPI ont également demandé que les évaluations de rendement annuelles des fonctionnaires fédéraux qui fournissent des services aux peuples autochtones, ou qui attribuent des tâches connexes, comprennent des paramètres conçus pour démontrer comment chaque personne a contribué à refermer l’écart socio-économique avec les peuples autochtones. Elles demandent également au Canada d’élaborer un programme obligatoire de compétences transculturelles pour ces employés.

[140]  En réponse, AANC a indiqué attendre avec intérêt les discussions supplémentaires sur l’amélioration de la sensibilité culturelle de ses employés. Toutefois, AANC affirme que la demande voulant que le personnel suive une formation spécifique va au‑delà de la portée de la plainte et que l’exigence que tous les employés soient formés constitue une mesure trop large. En fait, AANC soutient que les évaluations de rendement de fonctionnaires fédéraux spécifiques n’étaient pas visées par la plainte, qui ne comptait pas non plus d’allégations portées contre des employés en particulier. Selon AANC, la demande d’établissement de paramètres de rendement va au-delà de la portée de la plainte, y compris l’établissement de programmes obligatoires qui y seraient liés.

[141]  Étant donné qu’AANC est disposé à poursuivre les discussions sur la question, la formation abordera cet enjeu à la prochaine conférence de gestion des cas en personne.

G.  Financement du Réseau de télévision des peuples autochtones

[142]  Les audiences sur la question ont été enregistrées et diffusées par l’Aboriginal Peoples Television Network (APTN) (le Réseau de télévision des peuples autochtones) conformément aux directives d’exécution pour la couverture approuvées par la formation (voir Société de soutien à l’enfance et à la famille des Premières Nations du Canada c. Procureur général du Canada (Représentant le ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien), 2012 TCDP 18; et Société de soutien à l’enfance et à la famille des Premières Nations du Canada c. Procureur général du Canada (Représentant le ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien), 2012 TCDP 23). Une de ces directives exigeait qu’APTN conserve les enregistrements de l’audience pendant trois ans.

[143]  Puisque la période de trois ans tire bientôt à sa fin, et étant donné l’importance juridique, sociale, morale et politique de ce cas, les PCPI demandent qu’AANC verse 30 000 $ à APTN pour transférer les enregistrements des audiences du Tribunal en un format accessible au public et fournisse le financement nécessaire au Centre national pour la vérité et la réconciliation pour entreposer les enregistrements et gérer leur accès au public.

[144]  En réponse, AANC soutient qu’APTN n’était pas partie à la plainte et, ainsi, le Tribunal ne devrait pas lui accorder de mesure de redressement. Toutefois, AANC se dit disposé à prendre cette proposition en considération.

[145]   La formation appuie le travail et la mission d’APTN. Il était ravi de constater sa participation à l’enregistrement des audiences dans ce cas. Toutefois, la formation ne rendra pas l’ordonnance demandée. Le pouvoir discrétionnaire d’accorder une mesure de redressement du Tribunal doit être exercé en fonction des principes, considérant le lien entre les pratiques discriminatoires et le préjudice invoqué. (voir Chopra c. Canada (Procureur général), 2007 CAF 268 (CanLII), au paragraphe 37). APTN n’est ni une partie à la plainte ni une victime des pratiques discriminatoires en question. Bien qu’il n’y ait aucun doute sur l’importance juridique, sociale, morale et politique que revêt la diffusion publique, l’intérêt du public n’est pas lié aux conclusions de discrimination.

[146]  Bien que la formation ne rende pas l’ordonnance demandée, il souligne qu’AANC est favorable au financement du transfert des enregistrements. Étant donné la grande importance des enregistrements et l’intérêt du public, la formation encourage AANC à le faire.

H.  Examen des décisions relatives au financement de nouveaux organismes

[147]  Les PCPI ont demandé qu’AANC soit tenu d’examiner les décisions de refuser le financement pour appuyer le développement et l’exploitation des organismes qui fournissent des SEFPN, notamment en ce qui concerne les demandes pour de nouveaux organismes par l’Alliance de la Nation Okanagan et la Première Nation de Carcross.

[148]  AANC estime qu’il s’agit d’un sujet important à régler avec la participation des partenaires sur la réforme du Programme des SEFPN. Étant donné les autorités législatives des provinces et territoires, cela nécessitera l’établissement d’une entente avec les gouvernements provinciaux et territoriaux, ainsi qu’avec les partenaires de Premières Nations, et une participation de leur part.

[149]  Avant d’envisager une ordonnance, la formation estime que cette demande pourrait bénéficier des discussions supplémentaires dans le cadre de la prochaine conférence de gestion des cas en personne.

I.  Financement de la recherche, de bourses d’étude et de conférences

[150]  Les PCPI ont demandé qu’AANC soit tenu, pendant au moins 10 ans, de financer pleinement la recherche et les bourses d’études portant sur l’évaluation de la prestation des services d’aide sociale à l’enfance pour les enfants des Premières Nations, de même que sur les questions comme le contrôle et l’accès à l’éducation, la revitalisation des ordonnances juridiques autochtones, l’accès à l’économie et le contrôle des terres et des ressources. De plus, elles soutiennent qu’un tel financement pour la recherche et les bourses d’études devrait être administré par un organisme universitaire de surveillance indépendant. Les PCPI ont également demandé à AANC de financer des conférences annuelles pour la présentation des conclusions des recherches susmentionnées et que les fonctionnaires fédéraux impliqués dans la prestation de services aux peuples autochtones soient tenus d’y assister.

[151]  Bien qu’AANC soit ouvert à discuter davantage de l’appui à la recherche, il affirme que cette demande précise dépasse le cadre du Programme des SEFPN.

[152]  Étant donné qu’AANC est disposé à en discuter davantage, cette demande sera intégrée à la prochaine conférence de gestion des cas en personne.

J.  Nomination de la Commission pour rallier l’ensemble des parties et créer une ébauche d’ordonnance

[153]  L’APN a demandé qu’AANC soit tenu de participer à des consultations avec la Commission sur les mesures immédiates pour remédier à la discrimination soulignée dans la décision. L'Assemblée demande que la Commission soit désignée pour rallier toutes les parties dans une discussion sur l’aide immédiate et par la suite créer une ébauche d’ordonnance comprenant les dates précises de mise en œuvre de tous les éléments d’aide immédiate d’AANC. La Commission serait alors tenue de soumettre l’ébauche d’ordonnance, approuvée par toutes les parties, dans les 60 jours suivant la date de la décision en l’espèce.

[154]  Par ailleurs, l’APN affirme que la formation devrait ordonner à AANC, ou presser la Commission, de se pencher sur la question d’affectation des ressources aux parties pour assurer leur participation significative au processus.

[155]  L’AANC affirme avoir déjà prévu plusieurs mesures d’aide immédiate, notamment en fournissant un financement accru aux organismes qui fournissent des SEFPN grâce à un modèle de financement mis à jour et amélioré. AANC souhaite progresser en s’attaquant aux réformes à moyen et à long terme avec la participation des partenaires clés. Selon AANC, l’ensemble du travail à effectuer pour réformer le Programme des SEFPN nécessitera la participation de partenaires clés tels que les organismes qui fournissent des SEFPN, les communautés et les dirigeants des Premières Nations, les provinces, le territoire du Yukon et les parties à la plainte.

[156]  La demande d’APN ci-dessus a été soumise en réplique et les PCPI n’avaient pas la possibilité d’y répondre. Par conséquent, la demande pourrait s’inscrire dans les discussions de la prochaine conférence de gestion des cas en personne. AANC a également indiqué pouvoir fournir les fonds pour la participation des PCPI aux réunions. Par conséquent, la formation aimerait savoir si AANC consent à accorder les fonds pour la participation des PCPI à la prochaine conférence de gestion des cas en personne et à toutes les conférences subséquentes.

VII.  Ordonnance

[157]  Dans la décision, la formation a ordonné à AANC de cesser ses pratiques discriminatoires et de procéder à la réforme du Programme des SEFPN et de l’Entente de 1965 pour refléter les conclusions de la formation, de même que de cesser d’appliquer sa définition étroite du principe de Jordan et de prendre immédiatement des mesures pour pleinement mettre en œuvre le sens et la portée de ce principe (voir paragraphe 481). Tel que mentionné ci‑dessus, la demande des PCPI de mettre à jour les politiques, les procédures et les ententes est représentée par cette ordonnance générale de procéder à une réforme du Programme des SEFPN et de l’Entente de 1965, conformément aux conclusions de la formation dans la décision. Autrement dit, la formation ordonne à AANC de mettre à jour ses politiques, ses procédures et ses ententes pour se conformer aux conclusions de la décision.

[158]  En outre, pour répondre à cette ordonnance générale à court terme, la formation a ensuite ordonné à AANC de prendre des mesures immédiates pour régler plusieurs points. Comme il est indiqué dans la décision 2016 TCDP 10 et réitéré dans la décision en l’espèce, ces points devaient être traités immédiatement. Encore une fois, ces points comprennent : le traitement des conséquences néfastes liées aux hypothèses sur le nombre d’enfants placés, les familles nécessitant des services et les niveaux de population; les petits organismes qui fournissent des SEFPN ou ceux qui sont éloignés; le coût de la vie et l’inflation; l’évolution des normes sur les services; les salaires et les avantages; la formation; les frais juridiques; les primes d’assurance; les déplacements; les établissements multiples; les immobilisations; les programmes et les services adaptés à la culture et les mesures moins perturbatrices. AANC a reçu l’ordre de faire rapport à la formation pour expliquer de quelle façon ces points seront traités à court terme pour apporter une aide immédiate aux enfants des Premières Nations vivant dans les réserves (voir 2016 TCDP 10, aux paragraphes 20 et 23).

[159]  AANC a également été enjointe de considérer immédiatement le principe de Jordan comme intégrant tous les conflits de compétence (y compris les conflits entre les ministères fédéraux) et tous les enfants des Premières Nations (pas seulement les enfants qui ont de multiples déficiences). Conformément à l’objectif et à l’intention du principe de Jordan, la formation a également indiqué que l'organisme gouvernemental qui est contacté en premier devrait payer le service sans devoir procéder à un examen au regard des politiques ni tenir des conférences sur le cas avant qu'un financement soit fourni (voir 2016 TCDP 10, au paragraphe 33).

[160]  Outre les ordonnances dans la décision et dans la décision 2016 TCDP 10, et conformément à la décision sur requête ci-dessus, la formation ordonne ce qui suit :

A.  Mesures immédiates supplémentaires à prendre

1.  AANC ne peut diminuer ni limiter davantage le financement accordé aux Services à l’enfance et à la famille des Premières Nations ou aux services à l’enfance couverts par le principe de Jordan. (voir les paragraphes 121 à 123 ci-dessus).

2.  AANC déterminera le budget de chaque organisme qui fournissent des SEFPN en fonction de l’évaluation de ses circonstances et de ses besoins particuliers, notamment une évaluation appropriée sur la façon dont l’éloignement peut affecter la capacité des organismes qui fournissent des SEFPN à offrir des services (voir les paragraphes 33, 37, 40 et 47 ci-dessus);

3.  Pour déterminer le financement pour les organismes qui fournissent des SEFPN, AANC doit établir les hypothèses, seulement en tant que norme minimale, voulant que 6 % des enfants soient pris en charge et que 20 % des familles aient besoin de services. AANC ne réduira pas le financement accordé aux organismes qui fournissent des SEFPN si le nombre d’enfants pris en charge est de moins de 6 % ou si le nombre de familles ayant besoin de services est de moins de 20 % (voir paragraphe 38 ci-dessus);

4.  Pour déterminer le financement à accorder aux organismes qui fournissent des SEFPN ayant plus de 6 % d’enfants pris en charge ou plus de 20 % de familles, AANC est tenu d’établir le financement pour ces organismes selon l’évaluation du nombre actuel d’enfants pris en charge et de familles ayant besoin de services (voir paragraphe 39 ci-dessus);

5.  Pour déterminer le financement accordé aux organismes qui fournissent des SEFPN, AANC doit cesser de réduire le financement aux organismes qui desservent moins d’enfants que les 251 admissibles. Le financement devrait plutôt être établi selon une évaluation du niveau de besoin actuel de services pour chaque organisme qui fournit des SEFPN, indépendamment du niveau de la population (voir paragraphe 40 ci-dessus);

6.  AANC cessera la pratique obligeant les organismes qui fournissent des SEFPN à couvrir les dépassements de coûts liés à l’entretien en puisant dans le financement des volets de l’exploitation et de la prévention (voir paragraphes 56 à 61 ci-dessus);

7.  AANC doit appliquer immédiatement le principe de Jordan à tous les enfants des Premières Nations (pas seulement ceux qui vivent dans les réserves) (voir paragraphes 117 à 118 ci-dessus). 

B.  Rapports

1.  AANC fournira un rapport de conformité détaillé d’ici le 31 octobre 2016 dans lequel il précisera :

a.  La façon dont il s’est conformé aux mesures immédiates ordonnées ci‑dessus dans la section A de la présente ordonnance;

b.  La façon dont il compte s’attaquer dès maintenant à la question du financement des frais juridiques (voir paragraphe 48 ci-dessus);

c.  La façon dont il compte s’attaquer dès maintenant à la question des frais de réparation des bâtiments, lorsque l’organisme qui fournit des SEFPN a reçu un avis à l’effet que les réparations doivent être effectuées conformément aux codes et règlements sur la construction, les incendies et la sécurité applicables, ou lorsqu’il existe d’autres preuves de non‑conformité aux codes et règlements sur la construction, les incendies et la sécurité applicables (voir paragraphe 49 ci-dessus);

d.  La façon dont il a déterminé le financement accordé à chaque organisme qui fournit des SEFPN pour le rachat de services antérieurs aux enfants et la réception, l’évaluation et l’enquête sur les rapports de la protection de l’enfance (voir paragraphe 50 ci-dessus);

e.  Le montant de fonds qu’il accorde à chaque « facteur de coûts futurs et croissants » et la façon dont il est parvenu aux allocations correspondantes pour chaque organisme qui fournit des SEFPN, y compris pour l’Ontario (voir paragraphes 51 à 55 ci-dessus);

f.  La façon dont le nouveau financement s’attaque dès maintenant aux effets négatifs soulevés de l’Entente de 1965, plus particulièrement en ce qui a trait aux services de santé mentale et aux représentants de bandes (voir paragraphes 69 à 74 ci-dessus);

g.  La façon dont il a déterminé le financement accordé à chaque organisme fournissant des SEFPN en région éloignée pour leur permettre de répondre aux besoins actuels des communautés qu’ils desservent, en prenant en considération des facteurs comme les déplacements pour donner accès à des services, le coût élevé de la vie, la prestation de services dans les communautés éloignées et la capacité des organismes qui fournissent des SEFPN en région éloignée d’embaucher et de conserver leur personnel (voir paragraphes 75 à 81 ci-dessus);

h.  La façon dont les fonds d’aide immédiate sont distribués en Ontario (voir paragraphes 82 à 88 ci-dessus);

i.  La façon dont il s’est conformé aux mesures immédiates ordonnées pour mettre en œuvre la pleine portée et signification du principe de Jordan (voir paragraphes 107 à 120 ci-dessus), notamment :

  i.  la confirmation qu’il applique le principe à tous les enfants des Premières Nations (pas seulement à ceux qui vivent sur les réserves);

  ii.  une explication de la raison pour laquelle la nouvelle formulation du principe de Jordan s’applique aux enfants [traduction] « atteints de problème de santé et ceux qui présentent un problème spécifique à court terme qui nécessite une aide sociale et médicale. »

  iii.  des détails sur les mesures qu’il a prises pour se conformer à la disposition de l’ordonnance à l’égard du  « ministère contacté en premier »;

  iv.  des précisions concernant le processus qui sera suivi pour administrer les cas visés par le principe de Jordan, l’urgence des cas à traiter et les mesures d’imputabilité et de transparence qui ont été intégrées au processus pour assurer l’exécution de l’ordonnance;

  v.  des précisions sur la façon dont elle il compte s’assurer que les Premières Nations, les PCPI et les organismes fournissant des SEFPN fassent partie du processus de consultation avec les provinces et les territoires et qu’ils soient impliqués dans les autres éléments de la mise en œuvre du principe de Jordan;

  vi.  fournir à l’ensemble des Premières Nations et aux organismes fournissant des SEFPN les noms et les coordonnées des points de contact de chaque région et les informer de toute modification à cet égard;

j.  S’il fournit un financement pour le volet autochtone de l’étude canadienne sur l’incidence, et si ce volet de l’étude comprend la collecte de données spécifiques aux communautés autochtones éloignées du nord (voir paragraphes 132 à 134 ci-dessus).

C.  Renseignements supplémentaires à fournir

1.  D’ici le 30 septembre 2016, AANC doit avoir signifié et déposé :

  1. La justification, les données et autres renseignements pertinents qu’il a utilisés pour établir son plan de cinq ans d’investissement dans le Programme des SEFPN et pour déterminer les budgets pour chaque organisme qui fournit des SEFPN, y compris son étude sur les facteurs de coûts et la documentation sur l’analyse des tendances, la façon dont il est arrivé à des prévisions financières au-delà de l’exercice 2016‑2017, des mesures prises pour assurer la comparabilité des salaires du personnel et les avantages sociaux aux taux provinciaux, les renseignements utilisés pour déterminer le ratio du nombre de cas au Québec et au Manitoba et, de façon générale, la façon dont elle a déterminé la valeur des services d’urgence hors des heures d’ouverture, le déplacement du personnel, les organismes de vérification, les services juridiques et les assurances;

  2. La correspondance avec l’Ontario visée dans ses observations (voir paragraphes 85 à 87).

2.  D’ici le 31 octobre 2016, AANC doit avoir signifié et déposé :

a.  Une liste des Premières Nations, des organismes qui fournissent des SEFPN, des autorités provinciales et territoriales, des partenaires, des experts ou de toute autre personne qu’il a consultés jusqu’à maintenant au sujet du principe de Jordan, ainsi que son plan de consultation pour le futur. La liste des consultations antérieures de janvier à septembre 2016 devrait comprendre un ordre du jour et un compte rendu des discussions (voir paragraphes 42 et 114 ci-dessus);

b.  Une réponse indiquant son avis sur la demande de remboursement des frais de déplacement pour l’accès à des services et des évaluations répondant à des besoins spécifiques prescrits par un médecin, à des services de soutien et de réadaptation spécifiques et des soins de répit, ainsi qu’à des services de soutien aux familles en crise dans le cadre des investissements d’aide immédiate en Ontario (voir paragraphe 94 ci-dessus);

c.  Une réponse indiquant son avis sur la gestion des besoins en infrastructures des organismes qui fournissent des SEFPN dans le cadre des investissements d’aide immédiate en Ontario (voir paragraphe 97 ci-dessus);

d.  Une réponse donnant son avis sur la demande d’élargir les exigences d’admissibilité de l’Entente de 1965 dans le cadre des investissements d’aide immédiate en Ontario (voir paragraphe 100 ci‑dessus);

e.  Une réponse donnant son avis sur la demande de mener une étude spéciale sur l’application de l’Entente de 1965 en Ontario (voir paragraphes 103 et 104 ci-dessus);

f.  Une réponse à savoir s’il accepte de fournir des fonds pour la participation des PCPI à la prochaine conférence de gestion des cas en personne et aux conférences suivantes (voir paragraphe 156 ci-dessus).

D.  Maintien de la compétence

[161]  Étant donné la nature permanente des ordonnances de la formation, et étant donné qu’il doit toujours administrer les mesures de redressement en suspens (voir paragraphe 4 ci‑dessus), la formation maintiendra sa compétence en la matière. Tout autre maintien de compétence sera réévalué suivant la présentation du rapport d’AANC à la prochaine conférence de gestion des cas en personne, de même que toute décision sur requête concernant les autres mesures de redressement en suspens.

VIII.  Conférence de gestion des cas en personne

[162]  Le Tribunal communiquera bientôt avec les parties pour prévoir une conférence de gestion des cas en personne entre les membres de la formation et les parties. Sous réserve de la disponibilité des personnes impliquées, l’intention est de tenir la rencontre dès que possible. Tel qu’indiqué dans cette décision sur requête, il y aura plusieurs sujets à discuter. Toute autre question exceptionnelle peut également être abordée durant la rencontre.

[163]  Grâce aux renseignements supplémentaires et aux demandes de rapports de cette décision sur requête, la formation espère que les demandes exceptionnelles de réparation à court terme puissent être réglées avant la fin de la rencontre afin d’éviter de retarder davantage les mesures immédiates. La formation espère également que la rencontre pourra faire en sorte de lancer des débats sur les ordonnances à mi et long terme, y compris les indemnisations en vertu de l’alinéa 53(2)e) et du paragraphe 53(3) de la LCDP. Par conséquent, les parties devraient prévoir une rencontre de plusieurs jours.

Signée par

Sophie Marchildon

Présidente de la formation

 

Edward P. Lustig

Membre du Tribunal

Ottawa, Ontario

Le 14 septembre 2016

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