Tribunal canadien des droits de la personne

Informations sur la décision

Contenu de la décision

CENTRE DE RECHERCHE-ACTION SUR LES RELATIONS RACIALES

le plaignant

- et -

COMMISSION CANADIENNE DES DROITS DE LA PERSONNE

la Commission

- et -

www.bcwhitepride.com

- et -

JOHN BECK

les intimés

DÉCISION

MEMBRE INSTRUCTEUR : Athanasios D. Hadjis 2008 TCDP 1
2008/01/09

Canadian Human
Rights Tribunal

Tribunal canadien
des droits de la personne

I. QUESTIONS PRÉLIMINAIRES

II. DÉCISION

III. L'ARTICLE 13 DE LA LOI

IV. QUELLE EST LA PROPAGANDE ALLÉGUÉE EN L'ESPÈCE?

(i) Le lien [traduction] L'immigration

(ii) Le lien [traduction] Les médias

(iii) Le lien [traduction] Les Juifs

(iv) Le lien [traduction] La politique au Canada

(v) Le lien [traduction] La lutte en un coup d'il

(vi) Le lien [traduction] La santé raciale

(vii) Le lien [traduction] Les solutions

V. ANALYSE

A. Les articles soulèvent-ils des questions susceptibles d'exposer à la haine ou au mépris les membres des groupes identifiables sur la base d'un motif énoncé à l'article 3, au sens du paragraphe 13(1)?

(i) De quelle façon les articles exposent-ils les personnes non blanches à la haine ou au mépris?

(ii) De quelle façon les articles exposent-ils les Juifs à la haine ou au mépris?

(iii) De quelle façon les articles exposent-ils les personnes handicapées à la haine ou au mépris?

(iv) Conclusion : Les articles soulèvent des questions susceptibles d'exposer des groupes identifiables à la haine ou au mépris.

B. Les messages ont-ils été communiqués de façon répétée, au sens de l'article 13 de la Loi?

C. Qui a communiqué les messages en cause?

(i) John Beck a-t-il communiqué les messages en cause?

(ii) Le site bcwhitepride.com a-t-il communiqué les articles en cause?

VI. RÉPARATIONS

A. Ordonnance de mettre fin à l'acte (alinéa 54(1)a)

B. Sanction pécuniaire (alinéa 54(1)c))

C. Indemnité de témoin

[1] Le Centre de recherche-action sur les relations raciales (CRARR) a déposé la présente plainte, dans laquelle il est soutenu qu'il y a violation de l'article 13 de la Loi canadienne sur les droits de la personne. La plainte a été déposée contre [traduction] la ou les personnes directement responsables du site Web www.members/odinrage.com/bcwhitepride.com/immigration.htm, également connu sous le nom BCWhitePride.com . Le CRARR prétend que ce site Web incite, [traduction] entre autres , à la discrimination, à la haine et à d'autres violations du droit à l'égalité et à la dignité des personnes en raison de leur race, de leur origine nationale ou ethnique, de leur religion, de leur déficience et de leur statut d'immigrant.

I. QUESTIONS PRÉLIMINAIRES

[2] Le 24 janvier 2006, la Commission canadienne des droits de la personne (la Commission) a renvoyé la plainte au Tribunal. Avant le début de l'audience, la Commission a déposé une requête pour que soit modifié l'intitulé de la cause afin d'y ajouter en tant que parties défenderesses John Beck, www.bcwhitepride.org, ainsi que deux groupes connus sous les noms de BC White Pride et White Renegade .

[3] Le 18 mai 2007, le membre du Tribunal Pierre Deschamps a rendu une décision préliminaire relativement à la requête de la Commission, dans laquelle décision il autorisait l'adjonction de John Beck en tant que partie à la procédure (Centre de recherche-action sur les relations raciales c. www.bcwhitepride.com, 2007 TCDP 20). Cependant, le membre Deschamps n'a pas autorisé que soit ajouté le groupe White Renegade en tant que partie. Pour ce qui est du groupe BC White Pride et de www.bcwhitepride.org, il a ordonné que la décision leur soit signifiée pour qu'ils puissent, en temps utile, présenter des observations sur la requête de la Commission visant à les faire ajouter en tant que parties. Au début de l'audience sur la plainte, j'ai appris que la Commission n'avait pas signifié la décision à ces deux parties potentielles. Par conséquent, j'ai jugé que la plainte ne serait pas modifiée pour les inclure.

[4] En conséquence, les seuls intimés à l'audience sur le fond de la plainte ont été www.bcwhitepride.com et John Beck. La Commission était la seule partie représentée par un avocat à l'audience. Le directeur exécutif du CRARR, Fo Niemi, a comparu au nom du plaignant. M. Beck était présent à l'audience et était aidé de Paul Fromm, qui n'est pas avocat. M. Fromm agissait à titre d'agent de M. Beck. Il a fait une déclaration préliminaire, interrogé les témoins et présenté des conclusions finales au nom de M. Beck. Personne n'a comparu au nom de www.bcwhitepride.com.

II. DÉCISION

[5] Pour les motifs exposés ci-dessous, j'ai conclu que la plainte visant M. Beck était fondée. Par contre, pour ce qui est de www.bcwhitepride.com, j'ai conclu qu'il s'agit simplement de l'adresse Internet d'un site Web et non d'une personne ou d'un groupe de personnes au sens de l'article 13 de la Loi. Par conséquent, la plainte visant www.bcwhitepride.com n'a pas été étayée.

III. L'ARTICLE 13 DE LA LOI

[6] Pour qu'une plainte déposée en vertu du paragraphe 13(1) soit fondée, il faut prouver que:

une personne ou un groupe de personnes agissant d'un commun accord

a utilisé ou fait utiliser un téléphone de façon répétée en recourant ou en faisant recourir aux services d'une entreprise de télécommunication relevant de la compétence du Parlement

pour aborder des questions susceptibles d'exposer à la haine ou au mépris des personnes appartenant à un groupe identifiable sur la base des critères énoncés à l'article 3.

[7] Les critères énoncés à l'article 3 de la Loi comprennent la race, l'origine nationale ou ethnique, la couleur, la religion et la déficience.

IV. QUELLE EST LA PROPAGANDE ALLÉGUÉE EN L'ESPÈCE?

[8] M. Niemi a affirmé dans son témoignage que le CRARR est un organisme à but non lucratif indépendant dont le siège se trouve à Montréal et qui a le mandat de promouvoir l'harmonie et l'égalité entre les races au sein de la société canadienne. Entre autres activités, le CRARR mène des recherches, organise des conférences et des séminaires et offre de la formation sur la gestion de la diversité ou la façon de s'attaquer à la discrimination. Le CRARR fournit également de l'aide individuelle et représente des personnes qui croient avoir été victime de discrimination fondée sur leur race, leur religion, leur ethnicité ou un autre motif semblable.

[9] Le CRARR reçoit fréquemment des lettres de gens du public qui portent à son attention des question présentant un intérêt. En mai 2003, une lettre a été envoyée au CRARR pour lui suggérer de visiter un site appelé bcwhitepride.com . M. Niemi et ses collègues du CRARR ont regardé le site et ont été d'avis qu'il contrevenait à l'article 13 de la Loi. Ils ont alors pris des mesures pour informer la Commission de l'existence du site Web et ont déposé la présente plainte concernant les droits de la personne.

[10] M. Niemi a témoigné que, au moment où la plainte a été déposée (le 23 mars 2004), les documents avaient été vus sur un site Web dont la page d'accueil avait une adresse plutôt complexe : http://members.odinrage.com/bcwhitepride. M. Niemi appelle ce site Web bcwhitepride.com . En date de septembre 2004, plusieurs mois après le dépôt de la plainte, les documents qui avaient été trouvés à cette adresse Web avaient été transférés sur un autre site Web dont l'adresse était http://www.bcwhitepride.org. Le texte des pages que M. Niemi avait vues sur le site original avait été transféré tel quel sur le nouveau site, seules quelques modifications avaient été apportées à l'apparence des pages (comme la police de caractères et la mise en page des tableaux). La Commission et le CRARR soutiennent que le site Web .com est simplement devenu le site Web .org et que M. Beck a utilisé d'abord le site bcwhitepride.com puis le site bcwhitepride.org pour communiquer la propagande en cause.

[11] Le site Web (aux deux adresses Internet) affichait un mot de bienvenue aux visiteurs sur la page d'accueil. Il présentait certain des thèmes abordés dans les autres pages du site en énonçant ce qui suit (tous les extraits tirés du site Web que j'ai inclus dans la présente décision sont reproduits tels quels, sans correction des erreurs typographiques, grammaticales ou autres) :

[traduction]

Bienvenue chez BC White Pride!

La Colombie-Britannique est l'hôte d'un nouveau mouvement audacieux se consacrant principalement à l'éducation des Blancs sur des questions d'actualité comme l'immigration, le contrôle des médias, la démographie, l'éducation supérieure et la dégradation de la culture. Les hommes et les femmes fiers qui font partie de BC White Pride ont pris la décision, en toute connaissance de cause, et après mûre réflexion de s'unir pour combattre le déclin prémédité de notre peuple.

Nous sommes des hommes et des femmes d'origine européenne qui luttons pour préserver notre race, notre patrimoine et notre culture pour les générations futures. Nous sommes grandement préoccupés par la vague actuelle d'immigration en provenance de pays qui ne sont pas blancs, tant au Canada que dans nos patries européennes bien-aimées.

Nous avons comme objectif d'exposer le monopole évident des médias que détiennent les Juifs, qui complotent pour faire avancer le libéralisme, la rectitude politique, le multiculturalisme et le mélange des races, ce qui mènera à l'écroulement de la moralité et des valeurs familiales de notre fière culture. De plus, nous en avons assez des politiques gouvernementales qui ne servent plus les meilleurs intérêts des Blancs, qui ont jadis fondé notre grande nation et tant d'autres dans le monde.

Nous espérons vous apprendre les faits que les médias juifs vous cachent et demander votre aide pour protéger l'existence de notre peuple et assurer un avenir aux enfants blancs.

Cette introduction était suivie du passage suivant :

[traduction]

Le saviez-vous?

Les personnes d'origine européenne qui n'ont pas de sang mêlé ne constituent plus que 8 % de la population mondiale!

À peine 2 % de la population mondiale est constituée de femmes blanches en âge de procréer ou plus jeunes!

Les taux d'avortement et l'usage répandu de la contraception chez les Blancs conjugués au fait que moins de familles blanches ont des enfants a fait descendre le taux de natalité sous le seuil de renouvellement des générations dans le monde!

Le métissage (le croisement des races) atteint de nouveaux sommets dans toutes les cultures blanches et il est agressivement favorisé par les médias juifs comme si leur vie en dépendait, au sens propre!

L'immigration en provenance du tiers monde, si elle n'est pas restreinte, fera de l'Amérique du Nord, de l'Europe et de l'Australie des régions majoritairement non blanches d'ici le début du prochain siècle!

Répondez à l'appel de votre peuple qui a déjà été fier! Aidez-nous à faire de notre pays un meilleur endroit pour les familles blanches...

[12] À la gauche de la page se trouvait une colonne énumérant un certain nombre de sujets, lesquels sont en fait des liens menant aux autres pages du site Web. En cliquant sur le sujet, le lecteur voyait apparaître la page associée. La colonne demeurait visible sur chacune des pages du site Web, ce qui permettait au visiteur de consulter les autres pages en cliquant sur le lien à n'importe quel moment, sans avoir à revenir à la page d'accueil. La colonne contenait les liens suivants :

[traduction]

L'immigration

Les médias

Les Juifs

La politique au Canada

La lutte en un coup d'il

La santé raciale

Les solutions

(i) Le lien [traduction] L'immigration

[13] Le lien [traduction] L'immigration amenait le lecteur vers une page comportant un commentaire intitulé [traduction] L'échec de la politique d'immigration canadienne . La prémisse de ce commentaire était que, bien que la politique d'immigration du Canada ait traditionnellement favorisé [traduction] les personnes de souche européenne travaillant fort , les années 1960 ont vu naître [traduction] une génération tumultueuse voulant à tout prix affaiblir les valeurs traditionnelles du Canada.

[14] Pour étayer ses conclusions, le texte s'appuie sur des chiffres publiés par Statistique Canada. Par exemple, il est soutenu que la politique canadienne d'immigration favorise maintenant les immigrants originaires d'Asie plus que de tous les autres lieux de naissance combinés à partir du chiffre de Statistique Canada selon lequel 53,2 % de toutes les personnes ayant immigré au Canada en 2000 provenaient de la région Asie et Pacifique . Le commentaire postulait ensuite que la raison de cette [traduction] calamité était que les immigrants de la catégorie du regroupement familial constituaient 60 % de tous les immigrants, ce qui ferait que [traduction] les Asiatiques déplacent la race fondatrice de ce pays à un rythme alarmant, particulièrement lorsqu'on leur permet d'amener les membres de leur famille provenant de nations du tiers monde . À l'opposé, [traduction] les travailleurs hautement qualifiés d'Europe sont obligés de subir les rigueurs d'un système de pointage qui évalue la compétence dans les langues officielles et qui compare l'expérience de travail du demandeur par rapport à une liste de métiers en demande au Canada.

[15] D'autres chiffres sont cités ailleurs dans le commentaire, lesquels chiffres visent à démontrer que près de 22 % des immigrants arrivés en Colombie-Britannique entre 1961 et 1996 provenaient soit de la République populaire de Chine, de Taïwan ou de Hong Kong. Cette statistique a incité l'auteur du texte à déclarer ceci : [traduction] Peut-être serait-il temps de rebaptiser la province Colombie-Chinoise. L'auteur de l'article poursuit ensuite en racontant les efforts déployés par la Colombie-Britannique au début du 20e siècle pour empêcher l'entrée d'immigrants d'Asie. L'article reproduit les paroles d'une chanson qui aurait été chantée en 1907 par des opposants à l'entrée d'Asiatiques :

[traduction]

Unissons-nous et gardons la tête haute, et soyons aussi forts que nos pères qui ont gagné le foyer qui est le nôtre, pour la terre des hommes blancs nous combattons! À la tyrannie et à l'avarice orientale nous ne nous soumettrons jamais, non jamais! Un Canada blanc à jamais!

Dans l'article, cet extrait est suivi de ce commentaire : [traduction] Si seulement nous possédions le courage collectif de nos ancêtres fondateurs.

[16] L'article se conclut en affirmant que [traduction] l'extinction préméditée des Européens dans notre grand pays est en cours et que les immigrants qui sont arrivés au Canada continueront de récolter les fruits de notre labeur jusqu'à ce que notre peuple devienne une minorité dans son propre pays . La page Web se termine par la phrase suivante : [traduction] Nous devons protéger l'existence de notre peuple et assurer un avenir pour les enfants blancs!

(ii) Le lien [traduction] Les médias

[17] M. Niemi a témoigné que, lorsqu'il a visité pour la première fois le site Web bcwhitepride.com en 2003, il n'a pas été redirigé vers une autre page quand il a cliqué sur ce lien. Cependant, quand il a visité le site Web après que son contenu eut été déménagé à la nouvelle adresse (bcwhitepride.org), il a été redirigé vers une page intitulée [traduction] Le contrôle des médias en Amérique du Nord quand il a cliqué sur le lien [traduction] Les médias .

[18] L'article sur cette page Web soutient que la télévision, le cinéma et d'autres domaines des médias de masse en Amérique du Nord sont [traduction] en réalité [...] complètement dominés par un groupe de personnes qui, de toute évidence, a des objectifs qui ne sont pas représentatifs de l'intérêt supérieur de la population majoritaire blanche . Le commentaire explique ensuite que [traduction] ces maîtres tout puissant des médias sont les Juifs [traduction] dans une très grande proportion et que [traduction] la prépondérance des Juifs dans les médias de masse est si écrasante que [traduction] nous sommes obligés de conclure qu'elle n'est pas uniquement due à un simple hasard .

[19] Cet article décrit ensuite les organes d'information que possède la famille Asper au Canada et fournit une liste où figure les noms d'une douzaine de [traduction] Juifs américains magnats de l'information . Il défend le point de vue selon lequel la mainmise des Juifs sur les médias façonne la politique étrangère américaine et permet aux intérêts juifs plutôt qu'aux intérêts américains de décider des questions de guerre et de paix. L'article se conclut comme suit :

[traduction]

Il serait intolérable que de tels pouvoirs soient laissés aux mains d'une quelconque minorité étrangère, dont les valeurs et les intérêts sont différents des nôtres, mais de permettre aux Juifs, qui nous ont toujours méprisés par le passé, de détenir de tels pouvoirs sur nous équivaudrait à un suicide de la race. En effet, le fait que tant de personnes blanches ressentent aujourd'hui de la culpabilité raciale et de la haine envers elles-mêmes au point de rechercher activement la mort de leur propre race est une conséquence délibérée de la mainmise des Juifs sur les médias. Une fois que nous avons accepté et compris le fait que les médias sont dominés par les Juifs, nous avons inévitablement la responsabilité de faire tout ce qu'il faudra pour mettre fin à cette domination. Nous ne devons reculer devant rien pour accomplir notre mission de renverser ce pouvoir imbuvable auquel nous avons permis sans nous en rendre compte de réduire nos esprits à l'esclavage. Si nous ne parvenons pas à détruire cette bête détestable, elle ébranlera les fondations mêmes de notre race et nous détruira de l'intérieur.

(iii) Le lien [traduction] Les Juifs

[20] Comme dans le cas de la page [traduction] Les médias , M. Niemi a été incapable de voir la page [traduction] Les Juifs en 2003, mais quand le site Web a été déménagé à l'adresse Internet bcwhitepride.org, le lien est devenu fonctionnel. En fait, l'adresse de la page à laquelle M. Niemi a été redirigé quand il a cliqué sur [traduction] Les Juifs était http://bcwhitepride.org/juden.htm . L'article qui s'y trouvait s'intitulait [traduction] Une brève histoire des Juifs .

[21] Le texte conteste [traduction] le consensus général au sein du public voulant que [traduction] des siècles de persécution contre les Juifs leur donne droit au statut de victimes et propose que [traduction] pour vraiment comprendre pourquoi les Juifs ont été persécutés, nous devons brièvement examiner leur histoire en résumé . L'article présente ensuite en détail des déclarations prononcées au sujet des Juifs et des actions prises à leur égard au cours de l'histoire. L'article comporte une analyse du rôle qu'ont joué les Juifs relativement à [traduction] l'art du prêt usuraire , la fondation du communisme et l'établissement d'une [traduction] domination financière internationale menée par des familles juives [traduction] ultrariches qui ont acheté les entreprises et les banques des [traduction] Gentils par [traduction] des moyens légaux, mais peu scrupuleux .

[22] Dans ses conclusions, l'article fait part de préoccupations sur la façon dont les Juifs [traduction] emploient les vastes pouvoirs et le contrôle sans limites qu'ils détiennent dans presque tous les domaines de la vie . Il est affirmé que [traduction] les nations blanches sont manipulées par les Juifs et sont sous leur emprise et qu'il est [traduction] dans le meilleur intérêt [des Juifs] de se protéger de ceux qui comprennent leur rôle dans l'histoire et dans la société contemporaine en introduisant la notion de culpabilité des Blancs pour leur persécution [traduction] en se servant des médias et des institutions d'enseignement qui sont sous leur emprise . À la fin, il est avancé que [traduction] au fond, il s'agit de la destruction de l'identité et du nationalisme des Blancs .

(iv) Le lien [traduction] La politique au Canada

[23] Cette page Web consiste en un commentaire concernant le Parti libéral du Canada et l'Alliance canadienne/le Parti réformiste. Cet article qualifie de [traduction] tendance inquiétante le fait que le Parti libéral [traduction] fasse des pieds et des mains pour faire plaisir aux minorités raciales aux dépens de la majorité blanche , tendance qui s'est traduite par la nomination d'Adrienne Clarkson ([traduction] une immigrante de Hong Kong ) au poste de gouverneur général. Son époux, John Ralston Saul, est décrit comme un [traduction] traître à la race . Le premier ministre Jean Chrétien est critiqué pour avoir nommé ministres Rey Pagtakhan ([traduction] un immigrant récent des Philippines ) et Hedy Fry ([traduction] une immigrante non blanche de Trinité ). Les efforts déployés par le gouvernement libéral de l'époque visant à durcir les peines pour les crimes haineux, à lancer chez les jeunes des programmes nationaux de lutte au racisme et à établir une stratégie nationale de lutte contre la haine et les préjugés sont critiqués comme étant une [traduction] campagne [orchestrée par les Libéraux] pour nuire à la société blanche .

[24] Les efforts déployés par l'Alliance canadienne pour devenir [traduction] plus inclusive politiquement sont également critiqués. Le parti est accusé d'être [traduction] infiltré par des multiculturalistes aux plus hauts échelons . Il est souligné que le fils de l'ancien chef du parti, Stockwell Day, [traduction] a épousé une femme des Philippines . M. Day est critiqué pour avoir [traduction] même utilisé ses petits-enfants de race mélangée dans ses publicités de campagne électorale . L'article conclut que les positions libérales adoptées par l'Alliance canadienne sur de nombreuses questions ont [traduction] attiré de nombreux représentants de l'Asie du sud, de l'Asie de l'Est et juifs . Par conséquent, [traduction] les Canadiens blancs qui se soucient de la race n'ont pas de véritable choix sur leur bulletin de vote et ils doivent donc adopter [traduction] une position tierce révolutionnaire et passer outre le système politique conventionnel pour résoudre leurs problèmes.

(v) Le lien [traduction] La lutte en un coup d'il

[25] Cette page Web prétend contenir une liste de courtes descriptions des [traduction] factions les plus importantes et les plus influentes qui ont émergé depuis [traduction] le renversement idéologique des organisations racialistes traditionnelles comme le Parti nazi américain et le Ku Klux Klan (KKK). L'article explique que ces factions sont nées après [traduction] l'âge d'or du Ku Klux Klan . Le lecteur est averti que [traduction] les hommes et les femmes de BC White Pride ont choisi de ne s'affilier à aucun des groupes énumérés et que ces groupes [traduction] ne représentent pas nécessairement les intérêts ou les objectifs de BC White Pride .

[26] La liste inclut des références aux sites Web exploités par ces groupes et l'article décrit l'un de ces sites comme étant [traduction] utiles [...] pour les nouveaux venus au mouvement qui souhaitent se créer un réseau et qui veulent s'instruire sur les principaux Canadiens participant à la lutte racialiste . Un autre de ces sites Web est présenté comme un [traduction] grand lieu électronique de rencontre pour les Blancs qui se préoccupent de la race de partout sur le globe .

(vi) Le lien [traduction] La santé raciale

[27] L'objectif de cette page, selon son paragraphe d'introduction, est de [traduction] présenter des enjeux importants concernant la mort tragique de la santé raciale des blancs à l'échelle mondiale . Cet article est divisé en trois segments intitulés respectivement [traduction] Le QI et la race , [traduction] L'avortement et la race et [traduction] L'euthanasie et la race .

[28] Dans la première section, sur le QI et la race, il est soutenu que [traduction] les fléaux sociaux , comme le chômage chronique, la dépendance prolongée à l'aide sociale, la criminalité, les mères seules et la pauvreté diminueraient si l'intelligence de la population pouvait être augmentée. Il est peu probable que cela se produise, comme il est prétendu, car [traduction] la composante génétique de l'intelligence se serait détériorée par un processus appelé [traduction] dysgénésie , qui résulte de la [traduction] tendance qu'ont les classes les plus intelligentes à avoir moins d'enfants , et par [traduction] l'immigration de masse de gens de faible intelligence .

[29] Ce processus serait plus rapide dans les sociétés multiethniques, où certains groupes minoritaires qui ont [traduction] un niveau plus faible d'intelligence ont des taux de [traduction] fécondité plus élevés que les Blancs. Il est soutenu que les Noirs ont [traduction] un niveau d'intelligence considérablement plus faible que les Blancs et les Asiatiques et que cela [traduction] contribue à la surreprésentation des Noirs dans les pathologies sociales que sont la faible réussite scolaire, les mères célibataires, la criminalité, etc. Par conséquent, comme le conclut cette section de l'article, parce que [traduction] la sous-classe cognitive continue de [traduction] se reproduire plus rapidement que l'élite intellectuelle dans les nations blanches sur toute la planète, le QI moyen des sociétés blanches continuera de chuter . Ce fait précipitera le déclin des [traduction] grandes civilisations que [traduction] nos ancêtres ont construit en luttant si ardemment . Seule une société qui contrôle agressivement l'immigration et encourage l'adoption de [traduction] politiques de fécondité visant à améliorer son stock génétique peut faire échec à la dysgénie.

[30] La section sur l'avortement et la race de cet article conteste les politiques qui permettent l'avortement sur demande. Il est soutenu que, plus souvent qu'autrement, c'est un [traduction] bébé blanc potentiellement en santé et productif qui est avorté. Par conséquent, selon le texte, [traduction] l'avortement sur demande est contreproductif dans les nations blanches, particulièrement parce que nos taux de natalité ont chuté sous le niveau de renouvellement des générations . En conséquence, les nations blanches sont incapables de maintenir une base de population [traduction] stable .

[31] Cependant, cet article ne favorise pas l'interdiction absolue de l'avortement. Les critères pour l'avortement d'un ftus devraient dépendre [traduction] principalement de considérations relatives au profit net potentiel que ce futur individu apporterait à notre société dans son ensemble . Il est suggéré que l'avortement soit disponible pour les ftus non blancs, étant donné [traduction] l'écart bien documenté des niveaux de QI entre les races et étant donné que [traduction] dans l'ensemble , les ftus non blancs ont [traduction] un impact génétique total négatif sur notre société . Cet article promeut également l'avortement quand le ftus est [traduction] difforme et quand il naîtra avec une déficience mentale ou physique grave.

[32] Cela mène à la théorie présentée dans la troisième section de l'article, sur l'euthanasie et la race, où il est affirmé que les personnes [traduction] gravement retardées ou handicapées du cerveau ne constituent pas [traduction] des contributeurs nets de la société, mais [sont] un poids tragique pour leur famille et la société dans l'ensemble. Les défenseurs des citoyens handicapés font l'objet de critiques pour juger équivalents les droits [traduction] même des personnes les plus gravement retardées et ceux de l'élite cognitive . Il est soutenu que ces personnes handicapées devraient être euthanasiées et que cela aura un impact sur [traduction] la question raciale parce qu'il y a peu de chances que les couples blancs [traduction] réduits à l'esclavage par des enfants gravement handicapés aient plus d'enfants blancs. L'article condamne le fait que [traduction] les lois actuelles sur l'avortement autorisent le meurtre prémédité [de] ftus blancs potentiellement en santé et productifs , alors qu'il est illégal de [traduction] tuer une personne gravement retardée ou handicapée du cerveau qui aura constamment besoin de soins aux frais des contribuables pour la durée de sa vie inutile et que l'acte est passible d'une peine de prison à perpétuité. En outre, l'article prétend que si les fonds présentement [traduction] mal attribués consacrés au soin des personnes gravement handicapées étaient dépensés pour [traduction] diminuer les impôts des familles nombreuses , les Blancs seraient incités à avoir plus d'enfants en santé. En présentant ses arguments à ce sujet, l'article désigne les personnes [traduction] gravement handicapées comme étant des [traduction] parasites , des [traduction] primates ignorants et des [traduction] régressions génétiques .

[33] Bref, comme le conclut l'article, les politiques visant à réduire les inégalités naturelles entre les individus et les peuples ne sont pas seulement contreproductives, mais elles constituent du gaspillage compte tenu [traduction] de la courbe en forme de cloche des attributs se produisant naturellement dans toute population biologique . Il est soutenu que l'égalité est [traduction] un mythe avancé par ceux qui veulent nous dissuader d'exercer notre prérogative instinctive d'éliminer du troupeau les bêtes les plus faibles .

(vii) Le lien [traduction] Les solutions

[34] Cet article prétend offrir des réponses aux lecteurs qui auraient pu se demander ce qu'ils pouvaient faire pour [traduction] aider leur [traduction] race en péril . Une des suggestions était de cesser de s'appuyer sur la télévision et les journaux comme sources d'information. Il était plutôt recommandé de faire sa propre recherche sur Internet. Il est déclaré qu'on peut trouver plus de vérité en faisant une enquête indépendante sur l'Internet qu'en regardant la télévision ou en lisant [traduction] votre quotidien juif .

[35] Une autre solution proposée est de répandre [traduction] notre message d'espoir et de nous aider à rééduquer les Blancs qui ont succombé aux idéologies propagées par les médias non indépendants . Il est suggéré que cela peut se faire en s'adressant à des amis [traduction] dont l'état d'esprit peut être compatible avec les objectifs de notre cause . Le lecteur est également incité à imprimer plusieurs pamphlets, qui pouvaient être consultés et lus sur le site Web, pour qu'ils soient [traduction] légalement distribués [traduction] dans les bibliothèques, les institutions d'enseignement et les parcs de stationnement .

[36] La Commission a produit deux de ces pamphlets en preuve. Le premier prend la forme d'un avis de personne disparue. Il comporte la photo d'une jeune fille blanche. Le texte accompagnant la photo est rédigé ainsi :

[traduction]

DISPARU

Un avenir pour les enfants blancs!

Description : Cheveux blonds, roux ou bruns, peau pâle, innocente, curieuse, intelligente, fait confiance aux gens. Les politiciens ultralibéraux et les groupes d'intérêts spéciaux minoritaires ont kidnappé son avenir. Elle n'aura aucun avenir dans le Canada multiculturel que notre gouvernement a planifié. Reprenons possession de notre pays pour qu'il redevienne formidable, propre, décent et beau, pour le bien de nos enfants. Les hommes et les femmes de BC White Pride veulent que vous vous joigniez à ce grand effort patriotique.

Joignez-vous dès aujourd'hui à BC White Pride!

Aidez-nous à faire de notre pays un meilleur endroit pour les familles blanches.

www.bcwhitepride.com

[37] Le second pamphlet contenait une photo d'une mère blanche avec trois enfants blancs. La page était couronnée du titre BC WHITE PRIDE . Le texte encadrant la photo était celui-ci : [traduction] Nous devons protéger l'existence de notre peuple et assurer un avenir pour les enfants blancs. Au bas du pamphlet apparaissait le texte suivant :

[traduction]

Ne croyez-vous pas que notre patrimoine et notre mode de vie valent la peine d'être préservés?

Joignez-vous dès aujourd'hui à BC White Pride!

Aidez-nous à faire de notre pays un meilleur endroit pour les familles blanches.

www.bcwhitepride.com

[38] Dans les marges gauche et droite du pamphlet, on peut voir huit courts messages. Seule une portion de ces messages est visible sur la version imprimée produite en preuve. Un de ces messages semble dire que [traduction] les taux de natalité des Blancs sont bien en dessous du niveau de renouvellement des générations, alors que les taux de natalité des non-Blancs atteignent de nouveaux sommets . Un autre affirme que [traduction] au début du prochain siècle, la plupart des pays blancs auront une minorité blanche , tandis qu'un autre dit que [traduction] nos médias sont presque entièrement sous l'emprise d'un petit groupe de personnes qui n'a pas l'intérêt supérieur de la population blanche en tête .

V. ANALYSE

A. Les articles soulèvent-ils des questions susceptibles d'exposer à la haine ou au mépris les membres des groupes identifiables sur la base d'un motif énoncé à l'article 3, au sens du paragraphe 13(1)?

[39] Dans la décision Nealy c. Johnston (1989), 10 C.H.R.R. D/6450, le Tribunal canadien des droits de la personne a conclu que le terme haine connote des sentiments comportant une malice extrême envers une autre personne ou un autre groupe de personnes. Quand on dit qu'on hait quelqu'un, c'est qu'on ne lui trouve aucune qualité qui rachète ses défauts. Le Tribunal a ajouté que mépris suggère que l'on regarde quelqu'un de haut ou qu'on le traite comme s'il était inférieur. Les deux termes ne sont pas nécessairement de la même nature. La haine dans certains cas peut être le résultat de l'envie de qualités supérieures comme l'intelligence, la richesse et le pouvoir, ce que le mépris ne peut être par définition.

[40] Le Tribunal dans l'affaire Nealy a aussi mentionné que l'utilisation du terme susceptible au paragraphe 13(1) signifie qu'il n'est pas nécessaire de prouver que l'effet sera que les personnes qui entendent la propagande dirigeront leur haine ou leur mépris contre d'autres. Il n'est pas non plus nécessaire de prouver que, en fait, une personne a ainsi été victime.

[41] Ces conclusions ont par la suite été confirmées par la Cour suprême du Canada dans l'arrêt Canada (Commission des droits de la personne) c. Taylor, [1990] 3 R.C.S. 892. La Cour suprême a ajouté que les termes haine et mépris utilisés au paragraphe 13(1) font référence à des émotions extrêmement fortes et profondes de détestation, de calomnie et de diffamation.

[42] J'estime que les articles affichés sur les sites Web bcwhitepride.com et bcwhitepride.org soulèvent des questions susceptibles d'exposer à la haine et au mépris les membres de groupes identifiables, au sens du paragraphe 13(1) tel que la jurisprudence l'interprète.

[43] Les articles prétendent représenter le point de vue de ceux qui [traduction] défendent la cause des [traduction] hommes et femmes fiers qui sont regroupés pour [traduction] lutter contre le déclin prémédité des peuples [traduction] d'origine européenne . Mais en présentant ce point de vue, les personnes qui ne sont pas blanches et les personnes handicapées sont traitées comme des personnes dont la valeur et la contribution à la société sont moindres que celles des personnes blanches. En même temps, les Juifs sont représentés comme une puissante menace à la société, responsable de beaucoup de ses fléaux. Bref, toute personne n'appartenant pas au nous dont les intérêts seraient défendus par le site Web est traitée avec de la haine ou du mépris extrême.

(i) De quelle façon les articles exposent-ils les personnes non blanches à la haine ou au mépris?

[44] Comme la Commission l'a soutenu de façon convaincante à l'audience, les commentaires qui exposent les personnes non blanches à la haine ou au mépris dans les articles sont à la fois précis et généraux. Il est précisément affirmé dans l'article sur la santé raciale que les Noirs ont [traduction] un niveau d'intelligence considérablement plus faible que les Blancs et les Asiatiques et que cela [traduction] contribue à la surreprésentation des Noirs dans les pathologies sociales que sont la faible réussite scolaire, les mères seules, la criminalité, etc. Les Noirs sont désignés comme étant une [traduction] sous-classe cognitive . Dans ces déclarations, les Noirs sont méprisés et sont traités en inférieurs. En outre, les commentaires lient le prétendu manque d'intelligence des Noirs avec des [traduction] pathologies sociales comme la criminalité. Comme l'a fait observer le Tribunal dans Warman c. Kouba, 2006 TCDP 50 (Kouba), aux paragraphes 45 et 46, tenir un groupe identifiable responsable des problèmes actuels de la société est un thème distinctif de la propagande haineuse.

[45] D'une manière plus générale, les Blancs sont présentés comme des personnes supérieures aux autres [traduction] races et de plus grande valeurs. Par conséquent, l'avortement de ftus blancs est considéré comme indésirable alors qu'il est acceptable pour les autres. Il est affirmé que les ftus non blancs ont [traduction] un impact génétique total négatif sur notre société et qu'il faudrait donc faire des efforts pour favoriser leur avortement. Cette affirmation laisse fortement entendre que la vie des personnes noires ne vaut essentiellement rien et les Noirs y sont donc traités avec mépris.

[46] Cette question de l'infériorité des non-Blancs est réitérée dans les nombreux passages où il est question de l'immigration au Canada. Les non-Blancs sont décrits comme des personnes indésirables dont l'entrée au pays est une [traduction] calamité qu'il faut restreindre. Dans l'article sur l'immigration, il est évoqué avec tendresse une époque de l'histoire du Canada où les immigrants asiatiques étaient traités comme des êtres de seconde classe et où étaient lancés des appels à la lutte pour libérer [traduction] la terre des hommes blancs de [traduction] la tyrannie et [de] l'avarice orientale . Ce thème de la lutte raciale ou de la guerre contre les attaques des non-Blancs est renforcée par des allusions au fait que les Blancs seraient [traduction] assiégés et craindraient [traduction] l'extinction des Européens. Ceux qui encouragent l'immigration non blanche au sein de la société canadienne sont critiqués et ceux qui s'associent à eux sont appelés des [traduction] traîtres à la race . Les déclarations incitant [traduction] un peuple qui a déjà été fier à se soulever et, comme le dit le pamphlet intitulé [traduction] Disparu , à reprendre [traduction] possession de notre pays ressemble à un appel aux armes. Comme l'a fait observer le Tribunal dans la décision Kouba, précitée, aux paragraphes 76 et 77, les appels à la violence contre un groupe identifiable constituent un autre thème distinctif de la propagande haineuse.

[47] Le message dans le pamphlet intitulé [traduction] Disparu veut qu'une société qui accepte le multiculturalisme cesse d'être [traduction] formidable, propre, décent[e] et be[lle] et devienne une société dans laquelle l'avenir des enfants blancs est menacé. Cette inquiétude par rapport à l'avenir des enfants blancs renforce l'idée que la présence de personnes non blanches met en danger le bien-être des enfants blancs. Il est ainsi suggéré que les Blancs devraient éprouver des sentiments profonds de détestation envers ceux qui nuiraient et attaqueraient le bien-être des enfants blancs, c'est-à-dire les non-Blancs. Décrire un groupe identifiable comme s'attaquant aux enfants ou à d'autres personnes vulnérables est considéré par la jurisprudence relative à l'article 13 comme un autre signe révélateur de la propagande haineuse (voir la décision Kouba, précitée, aux paragraphes 40 et 41).

(ii) De quelle façon les articles exposent-ils les Juifs à la haine ou au mépris?

[48] Le Tribunal, dans la décision Kouba, précitée, aux paragraphes 24 et 25, a souligné qu'un des thème distinctifs de la propagande haineuse, tels que relevés dans la jurisprudence relative à l'article 13 de plus en plus abondante, est de décrire un groupe identifiable comme constituant une menace qui prend le contrôle des principales institutions de la société et qui prive les autres de leur gagne-pain, de leur sécurité, de leur liberté de parole et de leur bien-être général. C'est précisément de cette façon que les Juifs sont présentés sur le site Web.

[49] Dans l'article sur les Juifs, par exemple, il est soutenu que les Juifs utilisent [traduction] les vastes pouvoirs et le contrôle sans limite qu'ils détiennent dans presque tous les domaines de la vie pour manipuler [traduction] les nations blanches , ce qui entraîne la destruction [traduction] de l'identité et du nationalisme des Blancs . La présumée mainmise des Juifs sur les médias est mentionnée de nombreuses fois dans l'article en utilisant des expressions forgées comme [traduction] médias juifs (Jewsmedia en anglais) et [traduction] quotidien juif (Jewspaper en anglais ). Selon l'article sur les médias, [traduction] permettre aux Juifs de [traduction] détenir de tels pouvoirs sur nous équivaudrait à un suicide de la race . Les Juifs sont donc décrits comme constituant une menace réelle et dangereuse pour les Blancs. Fait encore plus déconcertant, l'article semble lancer un appel à l'action concrète, et même à la violence, dans le but de [traduction] renverser ce pouvoir imbuvable et de [traduction] détruire cette bête détestable , qui ébranle les [traduction] fondations mêmes de notre race et qui nous détruira de l'intérieur .

[50] Ces déclarations révèlent nettement des forts sentiments de détestation et constituent de la diffamation envers les Juifs. Elles créent des conditions propices à la haine et au mépris envers les Juifs en incitant le public à détester les Juifs parce qu'ils sont manipulateurs et menacent les intérêts des autres et en ne leur attribuant en général aucune qualité qui peut racheter leurs défauts (voir Smith c. Western Guard Party, 1979 CanLII 1 (T.C.D.P.); Citron c. Zundel (2002), 41 C.H.R.R. D/27, aux paragraphes 139 et 140).

[51] On peut également constater que, dans les articles en question, des faits présentés comme étant authentiques, tels que ceux visant à associer les Juifs au développement d'activités douteuses comme le prêt usuraire et le communisme, sont utilisés pour faire des généralisations négatives, une pratique qui, selon la jurisprudence, expose les membres d'un groupe identifiable à la haine ou au mépris (voir Kouba, précitée, aux paragraphes 30 à 32).

[52] En outre, il est fait montre de mépris envers les Juifs quand est déshumanisée la façon dont ils ont été persécutés. Les Juifs sont représentés comme étant à l'origine de l'antisémitisme. Les victimes sont en fait tenues responsables de la discrimination dont elles ont fait l'objet et, ce faisant, les conséquences de la discrimination sont atténuées. Il a été conclu que la banalisation des persécutions ou tragédies passées crée un climat de dérision et de mépris susceptible d'exposer les membres du groupe visé à ces émotions (voir Kouba, précitée, aux paragraphes 72 à 75).

(iii) De quelle façon les articles exposent-ils les personnes handicapées à la haine ou au mépris?

[53] Il ne fait aucun doute que les questions soulevées dans l'article sur l'euthanasie et la race exposent les personnes handicapées à la haine et au mépris. D'abord, les personnes ayant une grave déficience mentale ou physique sont traitées avec mépris extrême au moyen de propos incendiaires et désobligeants qui les présentent comme des personnes grandement inférieures à [traduction] l'élite cognitive (voir Kouba, précitée, au paragraphe 67). Elles sont qualifiées de [traduction] parasites , de [traduction] primates ignorants , de [traduction] régressions génétiques , d'êtres [traduction] génétiquement inférieurs et de [traduction] bêtes les plus faibles qu'il faut [traduction] éliminer du troupeau .

[54] L'article présente le point de vue selon lequel les personnes [traduction] gravement retardées ou handicapées du cerveau ne constituent pas [traduction] des contributeurs nets de la société , mais sont plutôt un [traduction] poids tragique pour leurs familles et la société. Les lois autorisant l'avortement de [traduction] ftus blancs en santé et productifs , mais criminalisant le meurtre de personnes gravement retardées ou handicapées du cerveau qui auront constamment besoin de soins pour le reste de leur vie [traduction] inutile sont critiquées. Il est évident que le message véhiculé par ces remarques est que les personnes handicapées valent moins que les personnes blanches et qu'elles ne méritent donc pas de bénéficier des mêmes droits fondamentaux, notamment le droit à la vie. Les personnes handicapées, de par leur existence même, sont présentées comme causant un dommage au reste de la société, car elles constituent un poids [traduction] parasitique . Il est difficile d'imaginer que des commentaires puissent être plus susceptibles d'exposer les personnes handicapées à la haine ou au mépris.

(iv) Conclusion : Les articles soulèvent des questions susceptibles d'exposer des groupes identifiables à la haine ou au mépris.

[55] Par conséquent, pour résumer, je conclus que les articles trouvés sur les sites Web bcwhitepride.com et bcwhitepride.org soulèvent des questions susceptibles d'exposer à la haine ou au mépris des personnes appartenant à un groupe identifiable sur la base des critères énoncés à l'article 3 (soit la race, la couleur, la religion, l'origine nationale ou ethnique et la déficience).

B. Les messages ont-ils été communiqués de façon répétée, au sens de l'article 13 de la Loi?

[56] Le Tribunal a conclu par le passé que les documents affichés sur Internet sont, de par les caractéristiques intrinsèques du médium, communiqués de façon répétée, particulièrement quand aucun obstacle n'est mis en place pour empêcher quiconque se branchant à l'Internet de naviguer jusqu'à un site Web et de consulter les documents (voir Warman c. Beaumont, 2007 TCDP 49, aux paragraphes 51 à 57; Warman c. Harrison, 2006 TCDP 30, au paragraphe 44;Warman c. Kulbashian, 2006 TCDP 11, au paragraphe 62;Warman c. Tremaine, 2007 TCDP 2, aux paragraphes 116 à 119). M. Niemi a affirmé dans son témoignage qu'il a été capable de consulter les documents simplement en tapant l'adresse Internet des sites Web. En cliquant sur les liens du site Web, il a pu lire les différents articles qui constituent la propagande en cause.

[57] Par conséquent, je conclus que les articles ont été communiqués de façon répétée.

C. Qui a communiqué les messages en cause?

(i) John Beck a-t-il communiqué les messages en cause?

[58] Les sites Web sont identifiés par des noms de domaine (p. ex. : bcwhitepride.org) qui sont enregistrés auprès d'un service d'enregistrement des noms de domaine (voir la décision Kulbashian, précitée, au paragraphe 66). Le public peut obtenir des renseignements concernant l'identité des personnes ayant inscrit le site au moyen de sites Web comme whois.net . La personne ayant inscrit le site bcwhitepride.com, en date d'août 2004, était NOLDC Inc. , dont l'adresse était située à la Nouvelle-Orléans, en Louisiane. Aucun nom d'individu n'apparaissait dans les documents fournis. Pour ce qui est de bcwhitepride.org, la personne ayant inscrit ce site en date de mai 2005 était Domains by Proxy Inc. , dont l'adresse était située à Scottsdale, en Arizona.

[59] Des preuves concernant les recherches sur le site whois ont été produites lors de l'audition de la requête préliminaire. Les parties m'ont demandé d'examiner la transcription de cette audience et de prendre en considération cette preuve dans mon examen du fond de la plainte. À l'audience préliminaire, des témoignages ont porté sur la facilité avec laquelle une personne enregistrant un site Web peut inscrire de faux renseignements quant à son nom et à son adresse lors de l'enregistrement.

[60] Par conséquent, la Commission prétend que les renseignements d'enregistrement concernant bcwhitepride.com et bcwhitepride.org sont trompeurs et que M. Beck est en fait la personne qui a réellement affiché les articles en question sur Internet, sur ces sites Web. Afin d'établir le lien entre M. Beck et les articles, la Commission a produit une série de courriers électroniques échangés en mars 2004, entre un individu nommé Shane Martinez et quelqu'un utilisant l'adresse de courrier électronique renegade1488ca@yahoo.com . La Commission a appelé M. Martinez à comparaître à l'audience. Ce dernier a témoigné qu'il était impliqué dans [traduction] une étude sur les droits de la personne et [traduction] l'activisme pour la justice sociale depuis plus d'une décennie. Dans le cadre de son travail, il mène des recherches sur les activités des [traduction] mouvements militant pour la suprématie blanche sur Internet.

[61] M. Martinez a déclaré que, au début de 2004, il a découvert un site Web appelé whiterenegade.com au cours de ses recherches. Il a voulu connaître l'identité de la personne ou des personnes responsables de ce site Web, alors il a envoyé un courrier électronique à l'adresse de contact fournie par le site Web en prétendant être une femme nommée Rachel qui affirmait s'intéresser au contenu du site. M. Martinez a reçu une réponse de quelqu'un utilisant l'adresse de courrier électronique renegade1488ca@yahoo.com, laquelle personne précisait que son véritable nom était John . L'échange de courriers électroniques entre John et Rachel (c'est-à-dire M. Martinez) a été plus tard suivi d'une série de discussions par messagerie instantanée (clavardage) entre ces deux personnes. Dans un des courriers électroniques échangés, John a écrit qu'il affichait régulièrement des messages sous le pseudonyme (nom d'utilisateur) Renegade sur un babillard électronique exploité par un site Web appelé stormfront.org.

[62] À l'ouverture de l'audience sur le fond de la plainte, M. Fromm, au nom de M. Beck, a admis que ce dernier était bel et bien la personne qui avait communiqué avec M. Martinez dans ces courriers électroniques et discussions en ligne en utilisant l'adresse de courrier électronique renegade1488ca@yahoo.com. M. Beck a également reconnu que les copies des courriers électroniques et des discussions en ligne imprimées par M. Martinez étaient authentiques et n'avaient pas été modifiées. Ces déclarations concordent avec les conclusions tirées par le membre du Tribunal Deschamps dans sa décision sur la requête préliminaire en l'espèce. Cependant, M. Beck n'a pas admis que les déclarations qu'il avait exprimées dans ces échanges étaient en fait vraies.

[63] La Commission prétend que, compte tenu de ce qu'a écrit M. Beck dans ces courriers électroniques et ces discussions en ligne, il est évident qu'il est l'auteur et le communicateur des articles en cause en l'espèce. Par exemple, dans un courrier électronique envoyé le 8 mars 2004, M. Martinez a louangé le travail fait sur le site Web whiterenegade.com et a demandé si whiterenegade était également le nom d'un groupe. M. Beck a répondu :

[traduction]

Le site whiterenegade.com est mon propre manifeste personnel en ligne. Ce n'est pas un groupe. Par contre, j'ai cofondé un groupe appelé BC White Pride. J'ai contribué à la rédaction d'une bonne partie du contenu du site www.bcwhitepride.com.

[Non souligné dans l'original.]

[64] M. Fromm a soutenu qu'il ne faut pas faire grand cas de cette affirmation de M. Beck. D'abord, la signification de [traduction] une bonne partie du contenu n'est pas claire. M. Beck était-il l'auteur des articles? Et s'il l'était, dans quelle proportion? En déclarant qu'il avait [traduction] contribué à la rédaction du contenu, M. Beck voulait-il dire qu'il a apporté des corrections au texte ou qu'il l'a nettoyé en tant qu'éditeur? Ou peut-être a-t-il fourni à l'auteur des documents de recherche? Cependant, M. Beck n'a pas témoigné et n'a produit aucune preuve pour expliquer quelles pouvaient avoir été les limites de sa participation.

[65] Au contraire, la Commission soutient que la preuve circonstancielle établit que M. Beck est l'auteur des documents. La Commission a relevé un certain nombre de similitudes assez frappantes et de thèmes communs entre d'une part les messages en cause et d'autre part les déclarations de M. Beck dans ses courriers électroniques et ses discussions en ligne ainsi que dans les articles qu'il a affichés sur le babillard électronique de stormfront.org. La Commission soutient que cette preuve supplémentaire fait en sorte qu'il est plus probable que M. Beck ait écrit et affiché les messages en cause que M. Beck ne l'ait pas fait. Les similitudes alléguées sont les suivantes :

Dans les échanges avec M. Martinez, M. Beck utilise un certain nombre de termes peu communs, qui apparaissent également dans les articles en cause, notamment dans les exemples suivants :

° Dans une discussion en ligne, M. Beck a expliqué qu'il est fâché que son église ait permis à une mère autochtone et à ses enfants, dont le père est blanc, d'assister à la messe. M. Beck considère que cette situation est dangereuse parce que sa présence dans l'église favoriserait une attitude de [traduction] tolérance fanatique . La même expression est utilisée dans les articles en cause, sous le lien [traduction] La santé raciale , dans la partie consacrée à l'euthanasie, où il est écrit :

[traduction]

Encore plus précisément, les défenseurs des droits des handicapés savent bien quelles sont les répercussions psychologiques du fait de conditionner les gens pour qu'ils acceptent et subventionnent leurs homologues génétiquement inférieurs et les intègrent à la société. [...] L'état d'esprit propagé par ces libéraux pathologiques favorise une philosophie de tolérance fanatique.

[Non souligné dans l'original.]

° Dans la partie [traduction] La politique au Canada des articles en cause, l'ancienne gouverneure générale Adrienne Clarkson est décrite comme une immigrante de Hong Kong qui a épousé le [traduction] traître à la race John Ralston Saul. De même, dans un courrier électronique envoyé à M. Martinez, M. Beck a écrit : [traduction] Si un homme blanc épouse une Juive au nez crochu et se convertit au judaïsme, il est un traître à la race. La même expression a été utilisée dans un article affiché en 2007 par Renegade sur stormfront.org, dans lequel les personnes voulant adopter [traduction] dans une autre race sont désignés comme des [traduction] traîtres potentiels à la race . Comme je l'ai noté précédemment, M. Beck avait déclaré à M. Martinez qu'il affichait des articles sur le babillard électronique de stormfront.org en utilisant le pseudonyme Renegade.

La préoccupation exprimée dans la partie [traduction] La santé raciale des articles en cause au sujet de la supériorité génétique de certaines [traduction] classes et de la détérioration de leur [traduction] stock génétique est un thème que M. Beck aborde également dans les courriers électroniques qu'il a envoyés à M. Martinez. Ainsi, M. Beck a écrit dans un message :

[traduction]

Nous pouvons faire preuve de respect envers les races non blanches en ne nous approchant pas de leurs femmes, même si EXCEPTIONNELLEMENT L'UNE d'entre elles est très belle. Ainsi, nous aidons notre race en n'introduisant pas d'ADN étranger à notre patrimoine génétique et en plus nous commettons un acte de bonne volonté envers elles.

De manière semblable, M. Beck a écrit sous le pseudonyme Renegade, dans un article affiché en 2007 sur stormfront.org, qu'il désapprouvait le fait que les non-Blancs épousent des Blancs dans le but [traduction] d'améliorer leur stock génétique , ce qui constitue selon lui une exploitation de la race blanche [traduction] pour leur propre avantage .

Le document se trouvant sous le lien [traduction] Les solutions des articles en cause portait principalement sur [traduction] l'avenir des nos enfants blancs . Les pamphlets pouvant être téléchargés comportaient des photos d'enfants blancs et le message selon lequel les [traduction] ultralibéraux et les groupes d'intérêts spéciaux minoritaires ont kidnappé [leur] avenir . M. Beck, dans ses discussions en ligne avec M. Martinez, a montré qu'il portait lui aussi un intérêt particulier à l'avenir des enfants blancs. M. Beck souligne que son pasteur avait quatre adolescents [traduction] blancs et parfaits et que lui-même avait été un [traduction] mentor pour ces [traduction] jeunes Blancs à l'église . Il prétend les avoir subtilement instruits et conseillés sur les questions de race en démontrant beaucoup d'affection aux enfants blancs, mais en n'accordant aucune attention aux [traduction] bâtards de la mère autochtone. M. Beck affirme espérer que les adolescents blancs [traduction] impressionnables aient constaté ce favoritisme et qu'ils suivront son exemple.

Dans la partie [traduction] La santé raciale des articles en cause, il est soutenu que les personnes [traduction] gravement retardées et handicapées du cerveau devraient être euthanasiées. De façon semblable, M. Beck a écrit dans un article affiché sur le babillard électronique de stormfront.org, sous le pseudonyme Renegade, qu'il appuyait l'idée de rendre obligatoire l'euthanasie dans les cas où [traduction] un être humain vibrant, productif et en santé devient un [traduction] légume gravement handicapé .

[66] La Commission soutient que l'on peut de plus identifier M. Beck comme l'auteur et le communicateur des articles en question à partir du contenu du site Web whiterenegade.com. Comme je l'ai expliqué plus tôt, M. Beck s'est vanté du fait que whiterenegade.com était son propre [traduction] manifeste personnel en ligne . La Commission soutient que ce site Web contient des documents qui sont presque identiques à ceux en cause en l'espèce. Par exemple :

Sur whiterenegade.com, dans l'article portant sur l'avortement et [traduction] le problème des pro-choix , il était écrit ceci :

[traduction]

De nombreuses études montrent que 90 % des avortements ont lieu pour ce qui peut être qualifié de raisons de commodité. Nous estimons que c'est répugnant parce que, plus souvent qu'autrement, c'est un bébé blanc, potentiellement en santé et productif, qui est avorté. La liste d'attente pour l'adoption de bébés blancs en santé est d'environ sept ans. C'est bien trop long. Ce temps d'attente pourrait être spectaculairement réduit si plus de restrictions étaient imposées à l'avortement.

Un texte presque identique apparaît dans les articles en cause trouvés sur bcwhitepride.com, dans la section [traduction] L'avortement et la race de l'article [traduction] La santé raciale . J'ai souligné les parties du texte qui sont identiques à celui trouvé sur whiterenegade.com :

[traduction]

De nombreuses études montrent que la plupart des avortements ont lieu pour ce qui peut être qualifié de raisons de commodité. Plus souvent qu'autrement, c'est un bébé blanc, potentiellement en santé et productif, qui est avorté. Inversement, la liste d'attente pour l'adoption de bébés blancs en santé est d'environ sept ans. Ce temps d'attente pourrait être spectaculairement réduit si plus de restrictions étaient imposées à l'avortement.

Ailleurs sur le site whiterenegade.com, il est soutenu qu'il existe un lien entre les questions raciales et les points de vue exprimés sur le site Web au sujet de l'euthanasie :

[traduction]

Comment tout cela se rattache-t-il à la race? Il est moins probable que les couples blancs réduits à l'esclavage par un enfant gravement handicapé aient plus d'enfants blancs.

Un texte presque identique (voir les parties soulignées) apparaît dans les articles en cause sur bcwhitepride.com :

Comment tout cela se rapporte-t-il à la question raciale? Précisément, il est moins probable que les couples blancs réduits à l'esclavage par des enfants gravement handicapés aient plus d'enfants blancs.

[67] Ce ne sont que quelques exemples. J'estime qu'en d'autres endroits aussi les deux sites Web présentaient des textes quasi identiques. En outre, les articles affichés sur les deux sites Web abordent des thèmes communs. Dans une section intitulée [traduction] L'amour et la haine sur whiterenegade.com, une liste d'[traduction] exemples d'amour d'un point de vue du militantisme blanc inclut l'amour des [traduction] adorables enfants blancs , ce qui concorde avec la tendresse envers les enfants blancs démontrée sur les sites bcwhitepride.com et bcwhitepride.org. La liste de chose détestées sur Whiterenegade.com comprenait [traduction] le fait que les Juifs dominent nos médias, l'industrie du divertissement, le gouvernement et le système scolaire et que cette domination était utilisée pour [traduction] affaiblir et détruire la race blanche . Un autre fait abhorré est celui que [traduction] la vie humaine est profanée en branchant des victimes d'une blessure au cerveau pour les maintenir en vie , ce qui transforme [traduction] des êtres humains vibrants et en santé en légumes gravement handicapés . Ce sont des thèmes qui se retrouvent également dans les articles en cause affichés sur bcwhitepride.com et bcwhitepride.org.

[68] La Commission souligne également que, dans les courriers électroniques et les discussions en ligne, M. Beck affirme faire partie d'un groupe appelé BC White Pride et fait allusion à [traduction] nous, les membres de bcwp et à [traduction] mon ami de bcwp . Il se décrit comme le cofondateur du groupe un certain nombre de fois.

[69] À mon avis, il peut en fait être conclu, à partir de l'affirmation de M. Beck selon laquelle il a rédigé [traduction] une bonne partie du contenu de bcwhitepride.com ainsi qu'à partir des liens et similarités mentionnés ci-dessus avec les autres articles de M. Beck, qu'il est l'auteur et la personne qui a utilisé ou fait utiliser l'Internet pour communiquer les articles en cause. Compte tenu de ma conclusion précédente selon laquelle les articles en cause constituent de la propagande haineuse visée par l'article 13 de la Loi, cette conclusion, si on lui ajoute foi, est complète et suffisante pour justifier un verdict en faveur de la partie plaignante en l'absence de réplique de M. Beck (Ontario (Commission des droits de la personne) c. Simpsons Sears Ltd., [1985] 2 R.C.S. 536, à la p. 558 (O'Malley). Il incombe à M. Beck de fournir une explication raisonnable démontrant qu'il n'y a pas eu discrimination tel qu'alléguée (par exemple, qu'il n'est pas celui qui a commis les actes discriminatoires) ou que l'acte n'était pas d'une façon ou d'une autre discriminatoire.

[70] Comme je l'ai affirmé plus tôt, M. Beck a choisi de ne pas témoigner à l'audience et il n'a appelé aucun témoin à comparaître. Nulle part dans la preuve dont je dispose M. Beck nie être celui qui a affiché les articles en cause ou être celui qui les a écrit et je ne dispose d'aucune preuve précisant quel rôle moindre M. Beck aurait pu jouer tout en ayant [traduction] contribué à la rédaction des articles, comme l'a laissé entendre M. Fromm dans ses observations. Le dernier argument, de toute façon, constituerait une explication douteuse, étant donné que même un groupe de personnes agissant d'un commun accord peut être déclaré coupable de violation de l'article 13 pour avoir utilisé ou fait utiliser l'Internet pour communiquer de la propagande haineuse.

[71] M. Fromm a également soutenu que les opinions exprimées sur le site whiterenegade.com sont d'une certaine façon plus nuancées que les articles affichés sur bcwhitepride.com et ne contreviennent pas à l'article 13. Il prétend que, par conséquent, je devrais conclure que M. Beck n'était pas l'auteur des articles en cause qui se trouvaient sur le site Web bcwhitepride.com. Je rejette cet argument. D'abord, la question de savoir si les articles se trouvant sur whiterenegade.com contrevenaient à l'article 13 n'est pas une question que je dois trancher en l'espèce. Fait encore plus important, je ne vois aucune raison de conclure que, simplement parce que le deuxième texte ne contient qu'une partie du premier, quelqu'un d'autre doit nécessairement avoir écrit le reste du premier texte. Il ne s'agit que d'une hypothèse. Il n'y a simplement aucune preuve étayant cette affirmation.

[72] En outre, M. Fromm soutient que M. Martinez a recueilli sa preuve d'une manière contraire à l'éthique et qu'il est répréhensible pour la Commission de s'appuyer sur des documents obtenus à la suite d'une enquête aussi [traduction] sordide . M. Fromm a particulièrement contesté le fait que M. Martinez ait adopté une fausse identité et envoyé à M. Beck plusieurs photographies d'une femme qu'il avait téléchargées d'Internet sans le consentement de la femme. M. Martinez a envoyé ces photos à M. Beck en prétendant qu'elles étaient le véritable portrait de la Rachel fictive afin d'être plus convaincant dans le personnage féminin qu'il avait adopté dans ses communications.

[73] Je ne vois pas comment les méthodes utilisées par M. Martinez peuvent servir de réponse ou d'explication raisonnable à la preuve prima facie qui a été établie contre M. Beck. Peu importe les méthodes de M. Martinez, le fait demeure que c'est M. Beck qui a écrit les messages dans ces courriers électroniques et ces discussions en ligne, en utilisant l'adresse de courrier électronique renegade1488ca@yahoo.com, et qui a déclaré avoir affiché des articles sur stormfront.org, sous le pseudonyme Renegade .

[74] M. Fromm prétend également que M. Martinez n'est pas un témoin fiable, étant donné ses activités au sein de mouvements [traduction] antiracistes et sa participation à des manifestations contre certains individus, dont M. Fromm. Cependant, la question de la crédibilité de M. Martinez concernant la preuve qu'il a produite quant au contenu des courriers électroniques et des discussions en ligne a déjà fait l'objet d'une décision préliminaire rendue dans le cadre de la présente affaire. Le Tribunal a conclu que la transcription des courriers électroniques et des discussions en ligne n'avait pas été modifiée et qu'elle était authentique et fiable , un fait que M. Fromm, au nom de M. Beck, a également reconnu à l'audience. Étant donné que l'authenticité des documents a été admise, la crédibilité de M. Martinez est essentiellement sans importance.

[75] Je conviens avec M. Fromm que de nombreux messages de M. Beck dans les courriers électroniques échangés démontrent qu'il croyait sincèrement discuter avec une jeune femme qui semblait intéressée à développer une relation personnelle avec lui. M. Fromm soutient que M. Beck pourrait avoir embelli ses commentaires pour cette raison, particulièrement lorsqu'il se décrivait et lorsqu'il décrivait ses activités, juste pour impressionner Rachel . Cependant, M. Beck n'a pas témoigné ni produit aucune preuve pour expliquer quelles auraient été ces fausses déclarations, ni si elles comprennent les passages que j'ai mis en évidence. Je ne dispose d'aucune preuve contredisant les aveux exprès de M. Beck dans ses courriers électroniques et ses discussions en lignes. De plus, beaucoup de ces discussions, qui ont eu lieu en 2004, comportent des messages semblables à ceux que M. Beck a affichés sur le site stormfront.org en 2007, après que la plainte eut été déposée et bien après que ses conversations avec la Rachel fictive eurent cessé. Rien devant moi ne laisse entendre que M. Beck tentait d'impressionner quiconque avec les articles qu'il a récemment affichés sur stormfront.org.

[76] Je rejette également l'observation de M. Fromm selon laquelle M. Beck aurait subi un certain préjudice du fait que la Commission n'avait pas précisé avant l'audience quelles parties des articles affichés sur bcwhitepride.com elle avait l'intention d'utiliser comme preuve de violation de l'article 13. Je soulignerais que les articles trouvés sur bcwhitepride.com, qui ont par la suite été déménagés sur bcwhitepride.org, semblaient compter au total moins de 30 pages imprimées, ce qui ne constitue pas une preuve particulièrement volumineuse, à mon avis. M. Beck n'a pas soutenu que la Commission ou le CRARR ont omis de lui communiquer ces pages avant l'audience.

[77] En outre, la plupart des documents que j'ai cités dans la présente décision, qui ont été mis en évidence par M. Niemi dans son témoignage, avaient également été cités, ou il y avait été fait allusion, dans la plainte déposée par le CRARR en 2004 et dans l'exposé des précisions modifié de la Commission et du CRARR, daté du 14 novembre 2006. L'audience sur le fond de la plainte a commencé le 18 juin 2007. M. Beck peut difficilement prétendre avoir été pris par surprise à cet égard. De toute façon, étant donné la taille relativement petite du site Web bcwhitepride.com (moins de 30 pages, comme je l'ai mentionné), je ne crois pas que M. Beck ait subi un quelconque préjudice du fait que M. Niemi ait également relevé un certain nombre de passages qui n'étaient pas expressément mentionnés dans le formulaire de la plainte ou dans l'énoncé de précisions modifié, mais qui étaient de nature semblable. M. Beck savait que la Commission contestait le contenu du site Web dans son ensemble. Je suis convaincu que cette information suffisait pour que M. Beck sache quelle preuve il devait réfuter. Rien ne prouve que M. Beck a subi un préjudice à l'audience.

[78] Par conséquent, j'estime qu'aucune explication raisonnable n'a été fournie en réponse à la preuve prima facie établie contre M. Beck. Je conclus que M. Beck a utilisé l'Internet pour communiquer de façon répétée les articles qui ont été considérés comme étant de la propagande haineuse au sens de l'article 13 de la Loi. La plainte contre M. Beck est donc fondée.

(ii) Le site bcwhitepride.com a-t-il communiqué les articles en cause?

[79] M. Niemi a lu pour la première fois les articles en cause sur un site Web dont la page d'accueil avait l'adresse Internet suivante, telle qu'elle apparaît au bas des pages imprimées produites en preuve : http://members.odinarage/bcwhitepride. Le CRARR a déposé sa plainte contre la personne ou les personnes directement responsables du site Web, bien que l'adresse inscrite sur le formulaire de la plainte était un peu plus complexe (members.odinarage/bcwhitepride/immigrations.htm). Le CRAAR a précisé dans sa plainte que le site Web était [traduction] également connu sous le nom de BCWhitepride.com . Dans un formulaire tapé intitulé Résumé de la plainte que la Commission a par la suite rempli, les nom et adresse du/de la mis(e) en cause donnés ne sont que www.bcwhitepride.com . Comme je l'ai mentionné plus tôt, personne n'a comparu devant le Tribunal au nom de bcwhitepride.com.

[80] Fait plus important, je ne dispose d'aucune preuve établissant l'existence même de bcwhitepride.com en tant que personne ou groupe de personnes agissant d'un commun accord, au sens de l'article 13 de la Loi. La preuve établit seulement que, en 2003, il était possible de consulter un site Web dont l'adresse Internet (members.odinarage/bcwhitepride/immigrations.htm) comprenait le terme bcwhitepride . Dans sa décision préliminaire, le membre du Tribunal Deschamps a conclu qu'un groupe s'appelant BC White Pride existait bel et bien. Cependant, comme je l'ai mentionné précédemment dans la présente décision, j'ai rejeté la requête de la Commission visant à faire ajouter ce groupe en tant que partie.

[81] À mon avis, il apparaît clairement que le nom bcwhitepride.com mentionné dans la plainte visait un site Web, une version simplifiée d'une adresse Internet plutôt complexe, et que le CRARR voulait déposer une plainte contre les personnes responsables du site, et non contre le site Web comme tel. En outre, même si on acceptait la désignation de www.bcwhitepride.com en tant que partie intimée comme l'a fait la Commission dans son résumé de la plainte, il n'a pas été établi que bcwhitepride.com existe en tant que personne ou groupe de personnes, au sens de l'article 13 de la Loi, capable de commettre l'acte discriminatoire dont il est question en l'espèce. La plainte contre bcwhitepride.com n'est donc pas été fondée.

[82] Je noterais également en passant que, dans ses observations finales, la Commission a informé le tribunal qu'elle ne réclamait aucune réparation de www.bcwhitepride.com.

VI. RÉPARATIONS

A. Ordonnance de mettre fin à l'acte (alinéa 54(1)a)

[83] La Commission et le CRARR demandent une ordonnance enjoignant à M. Beck de mettre fin à l'acte discriminatoire, en vertu de l'alinéa 54(1)a) de la Loi. Compte tenu de ma conclusion selon laquelle M. Beck a communiqué de la propagande haineuse en violation de l'article 13 de la Loi, une telle ordonnance est justifiée.

[84] Par conséquent, j'ordonne à John Beck de cesser d'aborder, de la façon décrite à l'article 13 de la Loi, soit au moyen de l'Internet, toute question du type que contenaient les articles qui, selon ce que j'ai conclu dans la présente décision, sont susceptibles d'exposer une personne ou un groupe de personne à la haine ou au mépris du fait que cette personne ou ce groupe de personne est identifiable sur la base d'un des motifs de discrimination prohibés.

[85] M. Niemi a affirmé dans son témoignage qu'il avait pu consulter les articles sur le site Web bcwhitepride.org aussi récemment qu'en novembre 2006. Si les articles sont encore accessibles, il est ordonné à M. Beck de retirer les documents contrevenant à l'article 13 du site Web bcwhitepride.org ou de tout autre site Internet où M. Beck a affiché ces articles.

B. Sanction pécuniaire (alinéa 54(1)c))

[86] Le Tribunal peut imposer à la partie intimée qui a commis un acte discriminatoire en violation de l'article 13 de la Loi une sanction pécuniaire d'au plus 10 000 $, en application de l'alinéa 54(1)c). Le paragraphe 54(1.1) énumère plusieurs facteurs dont le Tribunal doit tenir compte lorsqu'il décide de rendre une telle ordonnance :

la nature et la gravité de l'acte discriminatoire ainsi que les circonstances l'entourant;

la nature délibérée de l'acte, les antécédents discriminatoires de la partie intimée et sa capacité de payer.

La Commission soutient que ces facteurs favorisent fortement la [traduction] sanction pécuniaire maximale autorisée .

[87] Pour ce qui est du premier ensemble de critères, j'estime que l'acte discriminatoire en l'espèce constitue une violation grave et importante de l'article 13 de la Loi. De toute évidence, les articles en cause sont discriminatoires à l'endroit d'une grande variété de personnes et comportent des commentaires qui sont dépravés et déshumanisants, surtout ceux à l'égard des personnes handicapées, un groupe particulièrement vulnérable de notre société. Des stéréotypes négatifs et destructeurs visant les Juifs sont mis de l'avant. Les remarques concernant les personnes non blanches portent atteinte à la dignité et à l'estime de soi et contribuent à semer la discorde entre différents groupes raciaux et culturels, ce qui, comme l'a statué la Cour suprême dans l'arrêt Taylor, précité au paragraphe 42, mine la tolérance et l'ouverture d'esprit qui doivent fleurir dans une société multiculturelle vouée à la réalisation de l'égalité. Je soulignerais également que les articles ont été affichés sur un site Web qui semblait consacré à l'affichage des articles en question, ce qui différencie la présente affaire d'autres cas où la propagande est constituée d'un certain nombre de messages relativement courts affichés sur des babillards électroniques (voir, par exemple, Warman c. Beaumont, précité au paragraphe 98).

[88] De plus, je suis convaincu que M. Beck a affiché intentionnellement ces articles sur Internet en sachant que la communication de ces documents était susceptible d'exposer les personnes de groupes identifiables à la haine ou au mépris et qu'il contreviendrait ainsi à la Loi. Par exemple, sur le site whiterenegade.org, que M. Beck a qualifié de [traduction] manifeste personnel en ligne , il a fait part de sa [traduction] sainte haine passionnée des lois interdisant la propagande haineuse. Dans ses échanges avec M. Martinez, M. Beck a parlé de son mépris envers ceux qui souhaitent mettre fin au genre de déclarations qui se trouvent sur les sites Web bcwhitepride.com et bcwhitepride.org. À mon sens, il est raisonnable de conclure à partir de ces affirmations que M. Beck connaissait les dispositions de la Loi concernant la propagande haineuse, mais qu'il a néanmoins choisi en toute conscience d'y contrevenir.

[89] Rien ne prouve que M. Beck ait déjà été déclaré coupable d'actes discriminatoires. Les propos affichés sur les sites bcwhiterenegade.org et stormfront.org, bien qu'ils aient servi à établir la participation de M. Beck aux sites bcwhitpride.com et bcwhitepride.org, ne font pas l'objet de la plainte concernant l'article 13 déposée par le CRARR et les parties intimées n'ont jamais été avisée que ces documents allaient être présentés dans le but de prouver l'existence d'autres messages discriminatoires. Ce serait manquer à l'équité procédurale due à M. Beck que d'examiner si ces autres documents constituent un acte discriminatoire selon la Loi. En outre, je n'ai aucune façon de savoir si les documents affichés sur bcwhiterenegade.org ont été affichés avant les articles en cause en l'espèce. De toute évidence, tous les articles affichés sur stormfront.org en 2007 ont été communiqués bien après.

[90] Certaines preuves portent sur la capacité de M. Beck à payer la sanction pécuniaire. Au cours de l'audition de la requête préliminaire visant à modifier la plainte, la Commission a produit des copies des déclarations de revenus alors les plus récentes de M. Beck, soit pour les années 2004 et 2005. Il n'est pas nécessaire que je révèle les montants exacts qui y figurent, mais il suffit de dire que le revenu total qu'il a déclaré était très modeste. En outre, M. Martinez a affirmé à l'audience que, selon les renseignements qu'il avait recueillis au cours de son enquête, M. Beck habitait dans un [traduction] garage , un fait qui a été [traduction] entièrement corroboré par une recherche faite dans un annuaire en ligne, le 411.ca . Cela dit, je ne dispose d'aucune preuve quant à l'actif et au passif de M. Beck ni quant à son revenu en 2007.

[91] Compte tenu de tous ces facteurs, j'ordonne à M. Beck de payer une sanction pécuniaire de 6 000 $. Cette sanction doit être payée par chèque certifié ou par mandat à l'ordre du Receveur général du Canada et le Tribunal doit le recevoir dans les 120 jours suivant la date à laquelle la présente décision est signifiée à M. Beck.

C. Indemnité de témoin

[92] M. Beck a demandé une indemnité de témoin à la Commission pour sa présence, répartie sur huit jours au total, à l'audition de la requête préliminaire visant à faire modifier la plainte, dont le résultat a été l'ajout de M. Beck en tant qu'intimé en l'espèce. La Commission avait demandé au Tribunal et obtenu une sommation de comparaître pour obliger M. Beck à comparaître les 27 et 28 novembre 2006 à l'audience qui devait avoir lieu à Penticton, en Colombie-Britannique. La Commission a signifié la sommation de comparaître à M. Beck par huissier, de même qu'une somme de 50 $. M. Beck a comparu à l'audience aux dates prévues. Cependant, l'ouverture de la procédure a été reportée au deuxième jour, le 28 novembre 2006, en raison de mauvaises conditions climatiques qui ont retardé l'arrivée du membre instructeur du Tribunal.

[93] L'audition de la requête s'est poursuivie sur sept jours au total (les 28, 29 et 30 novembre 2006 ainsi que du 10 au 13 avril 2007). M. Beck était présent à chacune de ces dates, bien qu'aucune autre sommation de comparaître ne lui ait été signifié. En fin de compte, M. Beck n'a jamais été appelé à témoigner.

[94] M. Beck demande maintenant une indemnité de témoin pour sa présence à l'audience pour la période totale de huit jours. Il demande également que lui soient remboursés ses frais quotidiens de déplacement, car il a fait l'aller-retour en voiture de chez lui, à Kelowna, située à 60 km du lieu de l'audience, ainsi que ses frais de stationnement quotidiens de 4 $. Il demande également que lui soit accordée une indemnité pour ses repas du midi.

[95] Le paragraphe 50(6) de la Loi prévoit que toute personne assignée à comparaître à une audience a droit, à l'appréciation du membre instructeur, de recevoir les frais et indemnités accordés aux témoins assignés devant la Cour fédérale. En Cour fédérale, la pratique est régie par les articles 42 et 43 des Règles des Cours fédérales, lesquelles prévoient qu'un témoin a droit à une indemnité de témoin et aux frais de déplacement selon le montant prévu au tarif A des Règles. L'article 3 du Tarif énonce qu'il peut être accordé une indemnité de 20 $ par jour plus les frais de déplacement raisonnables, ou une indemnité accordée dans des circonstances similaires pour une comparution devant la cour supérieure de la province où il comparaît si cette indemnité est plus élevée.

[96] L'audience où a comparu M. Beck s'est tenue en Colombie-Britannique. L'annexe 3 de l'appendice C des règles de la Cour suprême de la Colombie-Britannique, qui ont été prises en vertu de la Court Rules Act, R.S.B.C. 1996, c. 80, précise l'indemnité payable aux témoins dans cette province. Les témoins ont droit à une indemnité de témoin quotidienne de 20 $. Cependant, un témoin qui est une partie ou un agent, directeur ou associé actuel d'une partie à la procédure n'a pas droit à l'indemnité. Au moment où a été entendue la requête préliminaire, M. Beck n'était pas partie à la plainte. Je ne dispose d'aucune preuve me permettant de conclure qu'il était un agent, un directeur ou un associé de la seule partie intimée à l'époque, bcwhitepride.com, laquelle, selon ce que j'ai conclu, ne constitue pas de toute façon une personne ou un groupe de personnes au sens de l'article 13. M. Beck n'est devenu une partie au litige qu'à la suite de la décision, rendue par M. Deschamps le 18 mai 2007, de modifier la plainte.

[97] L'annexe 3 prévoit également que, si l'audience a lieu à moins de 200 km de la résidence du témoin, ce dernier peut recevoir une allocation de déplacement de 30 cents par kilomètre. Une allocation raisonnable pour les frais de repas est également payable.

[98] La Commission a produit, avec ses observations, une copie des taux kilométriques du Secrétariat du Conseil du Trésor du Canada applicables à l'utilisation de véhicules privés conduits lors de déplacements autorisés dans le cadre des affaires du gouvernement pour la période couvrant les deux premiers jours de l'audience de la requête préliminaire. Le taux en vigueur à l'époque pour les déplacements en Colombie-Britannique était de 47,5 cents le kilomètre.

[99] Le Tribunal a le pouvoir discrétionnaire d'ajuster le montant payable à titre d'indemnité de témoin en fonction des circonstances de chaque affaire (voir Day c. Ministère de la Défense nationale, 2003 TCDP 7). J'estime que les taux pour les frais de déplacement du Secrétariat du Conseil du Trésor seraient raisonnables en l'espèce. Je note également que l'indemnité autorisée par les règles de la cour supérieure de Colombie-Britannique est moins élevée, donc, selon les Règles des Cours fédérales, elles ne s'appliquent pas.

[100] J'accueille la demande de M. Beck visant à obtenir une indemnité de témoin pour toute la période de huit jours. La Commission n'a jamais fait savoir qu'elle ne l'appellerait pas à témoigner, pas plus qu'elle n'a demandé que la sommation de comparaître soit retirée ou annulée, comme l'a souligné M. Deschamps quand la question de l'indemnité de témoin a été soulevée le dernier jour de l'audition de la requête préliminaire (voir la transcription, 13 avril 2007, aux pages 925 à 942). Je prends note que, dans le formulaire de citation à comparaître du Tribunal, que la Commission a rempli et signifié à M. Beck, il est écrit que la personne assignée à comparaître doit comparaître pour témoigner à l'audience au lieu et à l'heure indiqués, et ce, tous les jours suivants jusqu'à ce que l'audience soit terminée ou que le Tribunal en décide autrement . Le Tribunal n'a jamais ordonné que M. Beck soit libéré de l'obligation de comparaître à l'audition de la requête et la Commission n'a pas demandé au Tribunal de le faire.

[101] La Commission soutient que M. Beck a choisi de comparaître tous les jours parce que la principale question en litige était de savoir s'il devait être ajouté en tant que partie. M. Beck aurait très bien pu choisir se présenter à l'audience même s'il n'avait pas été sommé de comparaître, mais le fait demeure qu'il a été assigné à comparaître à la demande de la Commission et qu'il n'a été relevé de cette obligation à aucun moment au cours de l'audition de la requête.

[102] Par conséquent, j'ordonne à la Commission de payer à M. Beck une indemnité de témoin et de lui rembourser les frais qu'il a engagés, selon les montants suivants :

Une indemnité de témoin quotidienne de 20 $ x 8 jours = 160 $

120 km (aller-retour de la résidence à l'audience) x 47,5 cents x 8 jours d'audience = 456 $

4 $ de stationnement x 8 jours d'audience = 32 $

15 $ par jour (ce que je considère comme étant un montant raisonnable pour les frais de repas du midi) x 8 jours d'audience = 120 $

La somme que devra payer la Commission à M. Beck est donc celle-ci :

768 $ - 50 $ (le montant qui, d'après ce que j'ai compris, a déjà été donnée à M. Beck quand on lui a signifié sa sommation de comparaître) = 718 $

Athanasios D. Hadjis

OTTAWA (Ontario)

Le 9 janvier 2008

PARTIES AU DOSSIER

DOSSIER DU TRIBUNAL : T1120/0206
INTITULÉ DE LA CAUSE : Centre de recherche-action sur les relations raciales
c. www.bcwhitepride.com et John Beck
DATE ET LIEU DE L'AUDIENCE : Les 18 au 20 juin 2007
Penticton (Colombie-Britanique)
DATE DE LA DÉCISION
DU TRIBUNAL :
Le 9 janvier 2008
ONT COMPARU :
Fo Niemi Pour le plaignant
Catherine J. Boies Parker Pour la Commission canadienne des droits de la personne
Aucun représentant Pour l'intimé : www.bcwhiteprice.com
Paul Fromm Pour l'intimé : John Beck
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