Tribunal canadien des droits de la personne

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TRIBUNAL CANADIEN DES DROITS DE LA PERSONNE CANADIAN HUMAN RIGHTS TRIBUNAL

RICHARD WARMAN

le plaignant

- et -

COMMISSION CANADIENNE DES DROITS DE LA PERSONNE

la Commission

- et -

GLENN BAHR

- et -

WESTERN CANADA FOR US

les intimés

DÉCISION SUR REQUÊTE

2006 TCDP 18
2006/04/05

MEMBRE INSTRUCTEUR : Karen A. Jensen

[TRADUCTION]

[1] La présente décision traite de deux demandes présentées par l'intimé, M. Glenn Bahr, en vue d'obtenir des documents qui sont prétendument pertinents quant aux questions soulevées dans une plainte déposée contre lui et contre un autre intimé.

[2] La plainte, déposée par M. Richard Warman, se rapporte à des allégations selon lesquelles les intimés, M. Glenn Bahr et Western Canada For Us, ont utilisé un site Internet pour faire de la propagande haineuse en contravention du paragraphe 13(1) de la Loi canadienne sur les droits de la personne.

[3] L'intimé, M. Bahr, a demandé que le plaignant communique les documents suivants :

  1. les notes d'allocution du plaignant intitulées Maximum Disruption: Stopping Neo-Nazis by (Almost) Any Means Necessary utilisées pour le discours qu'il a prononcé lors d'une conférence animée par un groupe nommé l'Anti-Racist Action;
  2. la contribution apportée par le plaignant au document intitulé 2005 Audit of Anti-Semitic Incidents préparé par B'Nai Brith;
  3. le contrat du plaignant avec B'Nai Brith se rapportant au document précédemment mentionné et à d'autres documents;
  4. d'autres documents écrits par M. Warman pour B'Nai Brith.

[4] L'intimé, M. Bahr, affirme qu'on peut soutenir que ces documents sont pertinents parce qu'ils peuvent démontrer que le plaignant manifeste à l'endroit de M. Bahr une animosité particulière qui entachera l'instance. Il affirme de plus que les documents sont pertinents quant à la crédibilité de M. Warman. L'intimé, M. Bahr, entend soutenir que la plainte de M. Warman a été présentée de mauvaise foi et qu'elle fait partie d'une campagne visant à porter préjudice à ceux qui ont des opinions auxquelles il s'oppose. Finalement, l'intimé, M. Bahr, soutient que le fait que les notes d'allocution aient été communiquées et admises en preuve dans l'affaire Warman c. Winnicki (T1021/0205) donne fortement à penser qu'elles sont pertinentes quant à la présente affaire.

[5] Le plaignant et la Commission prétendent qu'on ne peut pas soutenir que les documents sont pertinents étant donné qu'ils ne se rapportent pas à une question en litige dans la plainte. Dans la présente plainte, le plaignant ne tente pas d'obtenir des redressements pour lui-même. Les questions à trancher, par conséquent, se limitent à savoir si les intimés ont utilisé Internet de façon répétée pour faire de la propagande haineuse et, dans l'affirmative, quel serait le redressement approprié. On ne peut pas soutenir que les documents demandés sont pertinents quant à ces questions.

[6] J'estime que l'intimé, M. Bahr, n'a pas démontré qu'on pouvait soutenir que les documents demandés étaient pertinents quant aux questions soulevées dans la présente affaire. Bien que le seuil quant à la pertinence soit peu élevé et que la tendance qui se dessine maintenant favorise une communication de documents plus étendue que moins étendue, il doit néanmoins être établi un lien entre les questions à démontrer et les documents demandés.

[7] La première étape lorsque l'on tranche la question de savoir si on peut soutenir qu'un document est pertinent consiste à établir les faits qui sont en litige dans l'affaire. La question à poser est la suivante : Quels sont les faits à démontrer pour établir la cause ou se défendre devant le Tribunal? La question de fait essentielle à trancher dans la présente affaire est celle de savoir si les intimés, agissant individuellement ou d'un commun accord, ont utilisé Internet de façon répétée pour communiquer des messages susceptibles d'exposer à la haine ou au mépris des personnes appartenant à un groupe identifiable sur la base des motifs de distinction illicite.

[8] L'intimé, M. Bahr, a prétendu que la crédibilité du plaignant est pertinente quant aux raisons qui ont motivé le plaignant à présenter la plainte. Cependant, à la présente étape de l'instance, les raisons qui ont motivé le plaignant à présenter la plainte ne sont pas en cause. C'est la Commission canadienne des droits de la personne qui a le pouvoir, suivant l'alinéa 41(1)d), de rejeter une plainte si elle estime qu'elle est frivole, vexatoire ou entachée de mauvaise foi. Si la Commission n'exerce pas son pouvoir discrétionnaire prévu par cette disposition et renvoie plutôt la plainte au Tribunal pour instruction, l'intimé peut présenter une demande de contrôle judiciaire à l'égard de la décision de la Commission. Cependant, le Tribunal n'a pas le pouvoir d'exercer un contrôle à l'égard de la décision de la Commission de renvoyer la plainte au Tribunal (International Longshore & Warehouse Union (Section maritime), section locale 400 c. Oster, 2001 CFPI 1115, au paragraphe 29). Une fois que la plainte lui a été renvoyée, le Tribunal est tenu suivant le paragraphe 50(1) de la Loi d'instruire la plainte.

[9] Ainsi, les raisons qui ont motivé le plaignant à présenter la plainte ne sont pas une question pertinente à cette étape de l'instance. En outre, le fait que les notes d'allocution aient été communiquées dans l'affaire Warman c. Winnicki ne signifie pas que les mêmes documents doivent être communiqués dans la présente affaire. La question de la pertinence des documents doit être tranchée au cas par cas, compte tenu des questions soulevées dans chaque affaire. Dans l'affaire Warman c. Winnicki, le plaignant alléguait que l'intimé avait exercé des représailles. Le plaignant avait présenté également une demande d'indemnité personnelle suivant l'article 53 de la Loi. Par conséquent, les questions de fait à trancher dans l'affaire Warman c. Winnicki étaient différentes de celles à trancher dans la présente affaire. L'intimé n'a pas établi la pertinence de la question de la crédibilité du plaignant quant aux questions soulevées dans la présente affaire.

[10] Pour les motifs énoncés, je refuse d'ordonner la communication des documents précédemment énumérés. Je note, toutefois, ce que le plaignant a suggéré dans ses observations, à savoir que certains des documents demandés sont disponibles sur Internet. Bien qu'il soit apparemment interdit à l'intimé, en vertu de ses conditions de mise en liberté dans une affaire criminelle, d'utiliser Internet, son représentant a accès à Internet. Par conséquent, certains des documents demandés peuvent être obtenus sans l'intervention du Tribunal.

Karen A. Jensen

Ottawa (Ontario)

Le 5 avril 2006

PARTIES AU DOSSIER

DOSSIER DU TRIBUNAL :

T1087/6805 et T1088/6905

INTITULÉ DE LA CAUSE :

Richard Warman c. Glenn Bahr et Western Canada for Us

DATE DE LA DÉCISION

DU TRIBUNAL :

Le 5 avril 2006

ONT COMPARU :

Richard Warman

Pour lui-même

Giacomo Vigna / Ikram Warsame

Pour la Commission canadienne des droits de la personne

Paul Fromm

Pour l'intimé, Glenn Bahr

Western Canada for Us

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