Tribunal canadien des droits de la personne

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TRIBUNAL CANADIEN DES DROITS DE LA PERSONNE CANADIAN HUMAN RIGHTS TRIBUNAL

RICHARD WARMAN

le plaignant

- et -

COMMISSION CANADIENNE DES DROITS DE LA PERSONNE

la Commission

- et -

CRAIG HARRISON

l'intimé

DÉCISION SUR REQUÊTE

2006 TCDP 16
2006/03/24

MEMBRE INSTRUCTEUR : Karen A. Jensen

[TRADUCTION]

Canadian Human
Rights Tribunal

[1] Le 24 novembre 2003, le plaignant a déposé une plainte contre M. Craig Harrison dans laquelle il prétendait que M. Harrison avait transmis des messages haineux par Internet, et ce, en contravention du paragraphe 13(1) de la Loi canadienne sur les droits de la personne. L'audience de cette cause a été fixée au 3, 4 et 5 avril 2006.

[2] Le plaignant a demandé que l'audience soit ajournée pendant environ quatre à six semaines. La Commission canadienne des droits de la personne appuie cette requête. Le motif de cette requête est que M. Harrison nie être la personne qui a transmis les messages contestés sur Internet. Par conséquent, la Commission et le plaignant ont tous les deux l'intention de présenter à l'audience des éléments de preuve qui auront trait à la question de l'identité de la personne qui a affiché les messages contestés. Ils déclarent qu'ils ont fait de leur mieux pour obtenir ces renseignements le plus rapidement possible mais qu'ils ont récemment réalisé qu'ils ont besoin d'une période supplémentaire d'environ quatre à six semaines afin de les obtenir.

[3] M. Warman a l'intention de présenter des éléments de preuve fournis dans le cadre d'un procès criminel mettant en cause M. Harrison. Il affirme que ces éléments de preuve démontreront que l'intimé est la personne qui a transmis les messages. Lors de la téléconférence de gestion de cas qui a eu lieu le 16 mars 2006 afin que l'on discute de la requête du plaignant, M. Warman a mentionné que les éléments de preuve fournis au procès fourniront vraisemblablement des renseignements additionnels comme l'adresse de protocole Internet de l'ordinateur utilisé pour transmettre les messages en question. Ces renseignements, selon le plaignant, aideront le Tribunal à connaître l'identité de la personne qui a transmis les messages.

[4] La Commission, pour sa part, a demandé à Bell Sympatico de founir des renseignements concernant l'identité de l'utilisateur de l'adresse de courriel qui accompagnait les messages qui font l'objet de la plainte. On s'attend à ce que ces renseignements fassent également la lumière sur la question de l'utilisation qui peut être faite de l'adresse de courriel d'une autre personne. Cela, affirme-t-on, est pertinent quant à l'identité de la personne qui a transmis les messages en cause.

[5] L'intimé s'oppose fermement à l'ajournement. Il prétend que la Commission et le plaignant savent déjà depuis un certain temps que sa défense à l'encontre de la plainte est une défense d'erreur d'identité. Par conséquent, ils ont eu amplement le temps d'obtenir les renseignements dont ils avaient besoin avant le début de la tenue de l'audience le 3 avril. Les parties s'étaient toutes entendues quant aux dates du 3, 4 et avril 2006 et, compte tenu de cela, M. Harrison a pris des dispositions pour prendre congé. Il ne peut plus changer ces dates.

[6] L'intimé prétend de plus que les renseignements demandés ne permettront pas d'établir qu'il est la personne qui a transmis les messages. Enfin, M. Harrison prétend qu'il a encouru des frais importants dans le cadre du processus du traitement de la plainte en matière de droits de la personne. Il en a assez et il veut que l'affaire soit réglée le plus rapidement possible.

[7] J'ai une certaine sympathie pour les arguments de l'intimé. Il semble que la Commission et le plaignant savent déjà depuis un certain temps que l'intimé nie avoir transmis les messages contestés. M. Harrison a déclaré que c'est ce qu'il prétend depuis l'enquête menée par la Commission canadienne des droits de la personne. Dans son exposé des précisions, daté du 13 janvier 2006, M. Harrison a prétendu qu'il n'a pas affiché les messages qui font l'objet de la plainte.

[8] Dans sa réponse à l'exposé des précisions de M. Harrison, la Commission a demandé des renseignements supplémentaires quant à la prétention de M. Harrison qu'il n'a pas transmis les messages. La Commission a également déclaré que, selon les renseignements additionnels qu'elle recevra de l'intimé, elle fera peut-être appel à un témoin expert en informatique ou en sites Web.

[9] Dans une lettre datée du 4 février 2006, l'intimé a fourni d'autres détails quant à sa défense. Il a déclaré que son ordinateur ne fonctionnait pas et se trouvait à l'atelier de réparation lorsque les messages ont été affichés. Il a également déclaré que d'autres personnes avaient accès à son ordinateur.

[10] Dans son avis de requête, le plaignant a déclaré qu'il avait reçu les précisions supplémentaires de l'intimé le 13 février 2006. Lors de la téléconférence de gestion de cas visant à discuter de la requête, M. Warman a mentionné qu'il avait demandé les renseignements immédiatement après avoir reçu les précisions supplémentaires de l'intimé. En raison d'un arriéré dans le traitement des demandes à l'agence qui fournit les renseignements que M. Warman a demandés, celui-ci ne pourra pas obtenir lesdits renseignements avant quatre à six semaines.

[11] L'avocat de la Commission a écrit à Bell Sympatico le 16 février 2006 afin d'obtenir les renseignements susmentionnés. Il a récemment été informé par Bell Sympatico qu'il lui faudra attendre de trois à quatre semaines avant d'obtenir les renseignements demandés.

[12] Je ne comprends pas pourquoi la Commission et M. Warman ont été incapables de poursuivre leurs demandes d'information à partir des renseignements fournis dans le premier exposé des précisions que l'intimé a fourni en janvier 2006. Il ressort clairement de ce document que M. Harrison nie avoir affiché les messages au motif qu'ils étaient incompatibles avec ses valeurs et avec ses antécédents familiaux et au motif qu'il n'avait pas accès à l'ordinateur à partir duquel les messages ont été envoyés durant la période pertinente. Je dois dire que je n'ai pas été très satisfaite de l'explication fournie par la Commission et le plaignant lors de la téléconférence de gestion de cas.

[13] Quoiqu'il en soit, je reconnais que les renseignements qui ont été demandés par la Commission et le plaignant on trait à une question qui est primordiale dans la présente cause - l'identité de la personne qui a affiché les messages contestés. J'accepte également les déclarations de la Commission et de M. Warman qu'il n'y a aucune façon d'obtenir ces renseignements avant le 3 avril 2006, date à laquelle l'audience doit commencer. Par conséquent, je suis convaincu que si la demande d'ajournement est rejetée la Commission et le plaignant n'auront pas la possibilité de présenter convenablement leur point de vue.

[14] Pour décider s'il accordera un ajournement, le Tribunal doit prendre en considération d'une part l'objectif qui consiste à régler les plaintes en matière de droits de la personne en temps opportun et d'autre part l'obligation de faire preuve d'équité envers toutes les parties et de leur donner la possibilité pleine et entière de présenter leur point de vue (Léger c. Compagnie des chemins de fer nationaux du Canada, Décision sur requête, le 26 novembre 1999 (TCDP); demande de sursis rejetée [2000] A.C.F. 243 (1re inst.)). Dans la présente cause, M. Warman et la Commission demandent un ajournement relativement court afin de pouvoir présenter leur point de vue. Comme on peut le comprendre, M. Harrison sera peut-être déçu par l'ajournement, mais la possibilité qui lui est donné de se défendre contre la plainte n'est pas retardée indûment.

[15] Pour ces motifs, la requête d'ajournement déposée par le plaignant est accordée. Le greffe du Tribunal a ordre de communiquer avec les parties afin d'organiser une téléconférence visant à fixer de nouvelles dates d'audience.

Karen A. Jensen

Ottawa (Ontario)

Le 24 mars 2006

PARTIES AU DOSSIER

DOSSIER DU TRIBUNAL :

T1072/5305

INTITULÉ DE LA CAUSE :

Richard Warman c. Craig Harrison

DATE DE LA DÉCISION
DU TRIBUNAL :

Le 24 mars 2006

ONT COMPARU :

Richard Warman

Pour lui-même

Giacomo Vigna / Ikram Warsame

Pour la Commission canadienne des droits de la personne

Craig Harrison

Pour lui-même

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