Tribunal canadien des droits de la personne

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Tribunal canadien
des droits de la personne

Titre : Tribunal's coat of arms - Description : Tribunal's coat of arms

Canadian Human
Rights Tribunal

 

Référence : 2016 TCDP 20

Date : le 22 décembre 2016

Numéro du dossier : T2139/1316

[TRADUCTION FRANÇAISE]

Entre :

Sandra Temple

la plaignante

- et -

Commission canadienne des droits de la personne

la Commission

- et -

Horizon International Distributors

l’intimée

Décision sur requête

Membre : Susheel Gupta

 


I.  Le lieu de l’audition

[1]  Au titre de l’article 7 de la Loi canadienne sur les droits de la personne (la LCDP), Mme Sandra Temple affirme qu’Horizon International Distributors (Horizon) lui a fait subir un traitement défavorable, pour finalement mettre fin à son emploi en raison de facteurs liés à son sexe et à sa déficience.

[2]  La décision sur requête suivante détermine le lieu de l’audition de la plainte de Mme Temple. Après avoir examiné les observations des parties sur la question, j’ai décidé que l’audition se tiendra à Calgary pour les témoins appelés par Mme Temple, et à Winnipeg pour les témoins appelés par Horizon.

II.  Les positions des parties

[3]  Horizon demande que l’audition de la plainte de Mme Temple se tienne à Winnipeg (Manitoba). Elle soutient qu’il s’agit du lieu le plus pratique et le plus économique compte tenu de l’endroit où se trouvent les parties et les témoins. Entre autres, les activités et les huit témoins d’Horizon sont à Winnipeg. De plus, sept des huit témoins d’Horizon travaillent pour l’entreprise et, s’ils doivent se déplacer à l’extérieur de Winnipeg pour l’audition, cela occasionnera non seulement des frais importants à Horizon, mais perturbera aussi ses activités. Ces frais ne sont pas recouvrables par Horizon. Horizon soutient donc qu’il est injuste et inéquitable que l’audition se tienne ailleurs qu’à Winnipeg.

[4]  Mme Temple demande que l’audition se tienne à Calgary (Alberta). Pour des raisons financières et familiales, il s’agirait du lieu le moins perturbateur pour elle. Mme Temple et sa mère, dont elle prend soin, se trouvent près de Calgary. Le mari de Mme Temple, qui a également été désigné comme témoin, se trouve aussi près de Calgary. L’autre témoin de Mme Temple est à Chilliwack (Colombie‑Britannique). Subsidiairement, dans l’éventualité où je déciderais que l’audition se tiendra à Winnipeg, Mme Temple demande qu’Horizon lui rembourse des frais de déplacement et d’hébergement et des débours raisonnables pour la durée de l’audition.

[5]  La Commission constate une inégalité de pouvoir entre la plaignante et l’intimée. Le fait de tenir l’audition à Winnipeg éloignerait Mme Temple de son domicile et pourrait être intimidant pour une plaignante se représentant elle‑même. Si l’audition devait se tenir à Winnipeg, la Commission souscrit à la demande de Mme Temple voulant qu’Horizon lui rembourse les frais raisonnables encourus pour y assister.

III.  La conférence téléphonique de gestion d’instance du 7 novembre 2016

[6]  Lors de la conférence téléphonique de gestion d’instance tenue le 7 novembre 2016, les parties et moi avons discuté de la requête relative au lieu de l’audition d’Horizon et des observations écrites de chacune des parties.

[7]  En réponse aux observations de Mme Temple, Horizon a insisté sur le fait que la plaignante n’a aucun lien avec Calgary. De plus, compte tenu de son sommaire de déposition, Horizon entend s’opposer au témoignage du mari de Mme Temple en tant que preuve corroborante ou par ouï‑dire. Elle soutient donc que peu de poids devrait être accordé à l’endroit où se trouve M. Temple pour déterminer le lieu de l’audition.

[8]  Quant à la demande de remboursement de frais de Mme Temple, j’ai indiqué que le Tribunal n’a pas le pouvoir de rendre une telle ordonnance dans les circonstances.

[9]  J’ai également soumis une troisième option à l’examen des parties, soit celle de la tenue d’une audition en deux lieux, c’est‑à‑dire que lorsque Mme Temple présenterait ses arguments, l’audition se tiendrait à Calgary et que lorsqu’Horizon présenterait ses arguments, l’audition se tiendrait à Winnipeg. En chaque lieu, les parties pourraient, à leur choix, avoir recours à la vidéoconférence pour assister à l’audition et ainsi éviter des frais de déplacement. Toutes les dispositions relatives à la tenue de l’audition, y compris la vidéoconférence, seraient prises par le Tribunal.

[10]  Mme Temple et la Commission étaient disposées à accepter cette option, mais, après avoir procédé à un examen plus approfondi de la question à la suite de la conférence téléphonique, Horizon a indiqué qu’elle n’était pas prête à consentir à l’option de la tenue d’une audition en deux lieux. L’avocat et un représentant d’Horizon préféreraient être présents lors du témoignage de Mme Temple afin de bien le comprendre et d’y répondre correctement. Selon Horizon, les détails fournis dans l’exposé des précisions de Mme Temple sont difficiles à suivre et cela lui nuirait considérablement de ne pas être présente physiquement lors de son témoignage. Bien que cette option permette d’alléger son fardeau financier, elle obligerait quand même l’entreprise à engager des frais de déplacement et d’hébergement, de sorte qu’Horizon soutient également qu’il ne s’agirait pas d’une option économique pour elle.

IV.  Analyse

[11]  En règle générale, le Tribunal tient l’audition à l’endroit où la discrimination alléguée a eu lieu où à l’endroit qui présente le lien le plus étroit avec la conduite discriminatoire alléguée. Cependant, ce n’est pas une règle stricte et le Tribunal s’efforce de tenir compte des besoins des parties, s’il y a lieu (voir Baumbach c. Deer Lake Education Authority, 2004 TCDP 13, au paragraphe 6). Il doit essentiellement s’assurer que le lieu de l’audition respecte les normes de la LCDP qui exigent un processus d’instruction équitable, informel, expéditif et ouvert, où chaque partie a la possibilité pleine et entière de comparaître, de présenter des éléments de preuve et de faire des observations (voir les paragraphes 48.9(1), 50(1) et 52(1) de la LCDP).

[12]  La discrimination alléguée n’a pas eu lieu directement à Winnipeg ou à Calgary, et aucun de ces endroits ne présente de lien étroit avec la conduite discriminatoire alléguée. Il en est ainsi parce qu’Horizon est une entreprise de camionnage et que Mme Temple a été engagée par Horizon comme chauffeur‑propriétaire de camion transportant des chargements en de nombreux endroits entre Winnipeg et Vancouver. La plupart, sinon la totalité, des actes discriminatoires allégués par Mme Temple sont survenus pendant qu’elle était sur la route, loin de chez elle et des bureaux d’Horizon.

[13]  Cela dit, je comprends les préoccupations soulevées par chacune des parties. Compte tenu de ces préoccupations, j’estime que le fait de tenir l’audition à Winnipeg et à Calgary répondrait le mieux aux besoins de Mme Temple et d’Horizon.

[14]  En l’espèce, la tenue d’une audition en deux lieux réduit les frais de déplacement de chacune des parties. Mme Temple n’aura pas à se rendre à Winnipeg, et seuls l’avocat d’Horizon et un représentant de l’entreprise se rendront à Calgary s’ils décident de ne pas utiliser l’option de la participation par vidéoconférence. Les témoins d’Horizon n’auront pas à se rendre à Calgary, ce qui permet à l’entreprise d’éviter ces frais et répond à sa préoccupation concernant la perturbation de ses activités.

[15]  La tenue d’une audition en deux lieux permet également à Mme Temple et à Horizon d’avoir la possibilité pleine et entière de présenter leurs arguments à l’endroit qu’ils préfèrent. Le fait de témoigner à Calgary, et de participer par vidéoconférence à la partie de l’audition tenue à Winnipeg, améliore la capacité de Mme Temple d’assister à l’audition et lui permet d’être dans un environnement où elle se sent bien et où elle peut continuer à prendre soin de sa mère.

[16]  Quant à Horizon, bien que la possibilité d’utiliser la vidéoconférence existe, la tenue d’une audition en deux lieux permet de tenir pleinement compte du fait qu’elle préfère être présente physiquement lors du témoignage de Mme Temple. Elle permet également de tenir compte du fait qu’elle préfère présenter ses arguments à Winnipeg.

V.  La décision sur requête

[17]  Pour les motifs qui précèdent, l’audition de la présente affaire se tiendra à Calgary pour les témoins appelés par Mme Temple, et à Winnipeg pour les témoins appelés par Horizon.

[18]  Je propose également aux parties d’utiliser d’autres méthodes visant à simplifier et à accélérer l’audition afin de rendre la tenue de cette audition en deux lieux encore plus efficace pour les deux parties. Par exemple, j’invite les parties à envisager la possibilité de préparer un exposé conjoint des faits et à songer à utiliser des affidavits pour l’interrogatoire principal de leurs témoins.

[19]  Les méthodes susmentionnées ainsi que les autres détails logistiques de l’audition (comme les dates, les installations, les exigences relatives à la vidéoconférence, les exigences relatives à la ligne téléphonique, le dépôt de recueils de documents et la présentation des conclusions finales) feront l’objet de discussions avec les parties lors d’une prochaine conférence téléphonique de gestion d’instance.

Signée par

Susheel Gupta

Vice-président du Tribunal

Ottawa (Ontario)

Le 22 décembre 2016

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