Tribunal canadien des droits de la personne

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Contenu de la décision

Canadian Human Rights Tribunal

Entre :

Geevarughese Johnson Itty

le plaignant

- et -

Commission canadienne des droits de la personne

la Commission

- et -

Agence des services frontaliers du Canada

l’intimée

Décision sur requête

No de dossier : T1817/4712

Membre instructrice : Olga Luftig

Date : Le 14 janvier 2015

Référence : 2015 TCDP 2

 


Table des matières

Page

I............. Introduction. 1

II........... Les motifs de la requête en divulgation. 2

III......... Le contexte de la plainte. 3

IV......... La décision sur requête en matière de modification et la décision sur requête en matière de confidentialité  4

V........... La question en litige dans la présente requête. 4

VI......... Le droit et les règles du Tribunal applicables. 5

VII....... La norme applicable à la divulgation de documents. 6

VIII..... Les observations du plaignant 7

IX......... Les observations de l’intimée. 7

X........... L’analyse. 8

XI......... La décision sur requête. 12

 

 

                                                                 

                                                                                                                                      

 


I.                   Introduction

[1]               Le plaignant a déposé une requête (la requête en divulgation ou la requête) en vue d’obtenir que l’intimée produise :

[traduction]

         tous les documents « potentiellement pertinents » en la possession de l’intimée;

         un exemplaire complet et non expurgé du Simulation Exercise Administration Manual (Manuel d’administration des exercices de simulation) de l’intimée (le Manuel), y compris des pages précises, indiquées ci-dessous, de même que les autres pages manquantes dans la version du Manuel que l’intimée a déjà divulguée.

[2]               L’intimée se sert du Manuel dans le cadre de son programme de Formation des recrues pour les points d’entrée (FORPE) en vue de soumettre les stagiaires à des exercices de simulation et d’évaluer leur rendement par rapport à certaines compétences de nature comportementale lors des deux étapes d’examen de ce programme.

[3]               L’avis de requête demande que l’on produise des pages précises du Manuel, lesquelles sont indiquées ci-dessous, de pair avec la brève description générale du plaignant sur les sujets qui y sont abordés. L’intimée n’ayant pas mis en doute ces descriptions, celles-ci sont considérées comme exactes pour les besoins de la présente requête.

a)      Pages 20 à 87 et 269 à 277.

[4]               Ces pages ont trait au processus d’examen D‑I des exercices de simulation.

b)      Pages 123 à 129.

[5]               Ces pages ont trait à une version de l’évaluation des simulations appelée « Version B ».

c)      Pages 137 à 171.

[6]               Ces pages forment un chapitre qui se rapporte à une version de l’évaluation des simulations appelée « Version C ».

d)     Pages 280 à 282 et 284 à 287.

[7]               Ces pages figurent dans un chapitre intitulé « D‑II Recruit Simulation Background Information » (Renseignements de base sur les simulations – Stagiaires – Étape D-II) qui se rapporte à l’évaluation des simulations menée à l’étape D‑II.

e)      Toute autre page manquante du Manuel.

[8]               Au paragraphe 17 de sa réponse à la requête du plaignant, l’intimée précise qu’elle n’a pas divulgué les pages 102 à 115 du Manuel. L’alinéa e) susmentionné les englobe.

II.                Les motifs de la requête en divulgation

[9]               La requête du plaignant est fondée sur les éléments suivants :

1.      les articles 3 et 6 des Règles de procédure du Tribunal canadien des droits de la personne (les Règles);

2.      le paragraphe 50(1) de la Loi canadienne sur les droits de la personne (la Loi);

3.      le fait que les pages demandées (les pages demandées) sont potentiellement pertinentes à un fait, une question ou une forme de redressement que demande le plaignant et, plus précisément, à la question de savoir si l’intimée a fait preuve de discrimination envers lui de la manière alléguée.

III.             Le contexte de la plainte

[10]           Pour les besoins de la présente décision sur requête uniquement, voici un sommaire contextuel très bref et général du programme de FORPE et de ce que le plaignant a vécu dans le cadre de ce dernier.

[11]           Le plaignant a présenté sa candidature à l’intimée pour un poste d’agent des services frontaliers (ASF). Il a franchi avec succès la première étape de sélection, et l’intimée l’a invité à prendre part au programme de FORPE à titre de stagiaire.

[12]           Le programme de FORPE comporte deux étapes d’évaluation appelées « étapes de détermination » : l’étape de détermination I (D-I), subie au cours de la quatrième semaine, et l’étape de détermination II (D-II), subie à la fin de la formation. Les stagiaires doivent suivre avec succès la totalité du programme de FORPE pour faire partie du bassin des personnes admissibles à un poste d’ASF.

[13]           L’évaluation D-I se compose de deux examens écrits et de trois simulations. Chacune des simulations de l’étape D-I évalue sept compétences de nature comportementale : souci du service à la clientèle, soutien des valeurs de l’ASFC, réflexion analytique, prise de décisions, communication interactive efficace, techniques de recherche de l’information, et législation, politiques et procédures.

[14]           Lors de l’étape D-I, l’intimée fournit également une rétroaction sur les deux compétences suivantes : contrôle des situations difficiles et confiance en soi. Ces deux compétences ne sont pas officiellement évaluées lors de cette étape, mais elles le sont à la fin de l’étape D-II.

[15]           L’évaluation D-II se compose d’une autre série d’examens écrits, d’une simulation de tactiques de maîtrise et de défense, ainsi que de trois autres simulations. Lors de l’étape D-II, les simulations permettent chacune d’évaluer les mêmes compétences qu’à l’étape D-I, plus les deux compétences suivantes : contrôle des situations difficiles et confiance en soi.

[16]           Le plaignant a passé avec succès tous les examens écrits et toutes les évaluations des compétences comportementales de l’étape D-I. Il est passé au second volet du programme de FORPE, et a été évalué dans le cadre de l’étape D-II. Il n’a pas réussi à l’évaluation de toutes les compétences comportementales dans le cadre des simulations de cette étape, et n’a pas été intégré au bassin d’éventuels ASF.

IV.             La décision sur requête en matière de modification et la décision sur requête en matière de confidentialité

[17]           Dans la décision sur requête Itty c. Agence des services frontaliers du Canada, 2013 TCDP 33 (la décision sur requête en matière de modification), le Tribunal a fait droit à la requête du plaignant en vue de faire modifier la plainte par l’ajout des mots [traduction] « à l’article 10 ». La troisième phrase du premier paragraphe de la plainte est donc libellée ainsi :

[traduction] Je crois que le programme de Formation des recrues pour les points d’entrée (FORPE) de l’Agence des services frontaliers du Canada (ASFC) a fait preuve à mon endroit de discrimination fondée sur l’âge, la race et l’origine nationale ou ethnique en ma qualité de candidat à un emploi d’agent des services frontaliers, ce qui est contraire à l’article 7 et à l’article 10 de la Loi canadienne sur les droits de la personne.

[18]           Une seconde décision sur requête, Itty c. Agence des services frontaliers du Canada, 2013 CHRT 34 (la décision sur requête en matière de confidentialité), ordonne aux parties de garder certains documents confidentiels. L’un de ces documents est le Manuel.

V.                La question en litige dans la présente requête

[19]           L’intimée est-elle tenue de divulguer les pages demandées?

VI.             Le droit et les règles du Tribunal applicables

[20]           L’article 7 de la Loi dispose :

Constitue un acte discriminatoire, s’il est fondé sur un motif de distinction illicite, le fait, par des moyens directs ou indirects :

a) de refuser d’employer ou de continuer d’employer un individu;

b) de le défavoriser en cours d’emploi.

[21]           L’article 10 de la Loi dispose :

Constitue un acte discriminatoire, s’il est fondé sur un motif de distinction illicite et s’il est susceptible d’annihiler les chances d’emploi ou d’avancement d’un individu ou d’une catégorie d’individus, le fait, pour l’employeur, l’association patronale ou l’organisation syndicale :

a) de fixer ou d’appliquer des lignes de conduite;

b) de conclure des ententes touchant le recrutement, les mises en rapport, l’engagement, les promotions, la formation, l’apprentissage, les mutations ou tout autre aspect d’un emploi présent ou éventuel.

[22]           Le paragraphe 50(1) de la Loi prévoit en partie ce qui suit :

Le membre instructeur […] instruit la plainte pour laquelle il a été désigné; il donne à [toutes les parties ayant reçu l’avis] la possibilité pleine et entière de comparaître et de présenter, en personne ou par l’intermédiaire d’un avocat, des éléments de preuve ainsi que leurs observations.

[23]           Pour les besoins de la présente requête, les passages pertinents de l’article 6 des Règles sont :

(1) Chaque partie doit signifier et déposer dans le délai fixé par le membre instructeur un exposé des précisions indiquant :

[…]

d) les divers documents qu’elle a en sa possession – pour lesquels aucun privilège de non-divulgation n’est invoqué – et qui sont pertinents à un fait, une question ou une forme de redressement demandé en l’occurrence, y compris les faits, les questions et les formes de redressement mentionnés par d’autres parties en vertu de cette règle;

(5) Une partie doit divulguer et produire les documents supplémentaires nécessaires :

b) si elle constate qu’elle ne s’est pas conformée correctement ou complètement aux alinéas 6(1)d) […].

VII.          La norme applicable à la divulgation de documents

[24]           Il est bien établi par la jurisprudence que la norme applicable à la divulgation de documents, conformément à l’alinéa 6(1)d) et au paragraphe (5) des Règles, est que les documents doivent être « potentiellement pertinents » à un fait, à une question ou à une forme de redressement demandée, y compris les faits, les questions ou les formes de redressement mentionnés par d’autres parties. Pour qu’un document soit potentiellement pertinent, il doit y avoir un lien rationnel entre le document dont on demande la divulgation et le fait, la question ou la forme de redressement demandée ou ceux qui sont mentionnés par d’autres parties (Seeley c. Compagnie des chemins de fer nationaux du Canada, 2013 TCDP 18 (Seeley), au paragraphe 6). Une demande de divulgation « ne doit pas être spéculative ou équivaloir à une “partie de pêche” » (Johanne Guay c. Gendarmerie royale du Canada, 2004 TCDP 34 (Guay), au paragraphe 43.

VIII.       Les observations du plaignant

[25]           Le plaignant soutient qu’il y a lieu de divulguer les pages demandées pour les raisons suivantes :

         elles ont un lien direct avec les principales questions en litige;

         leur divulgation garantira que le plaignant aura « la possibilité pleine et entière » de participer à l’instruction, conformément au paragraphe 50(1) de la Loi;

         elles sont toutes nécessaires pour que le plaignant puisse montrer que l’intimée a établi des pratiques ou des politiques discriminatoires;

         le seuil de la pertinence potentielle est très faible (Guay, précitée, au paragraphe 44) et, dans la jurisprudence, on tend à préconiser une divulgation accrue.

IX.             Les observations de l’intimée

[26]           L’intimée soutient qu’en ce qui concerne le Manuel, elle a déjà divulgué :

         [traduction] « tous les éléments du Manuel qui se rapportent aux compétences évaluées;

         tous les détails relatifs aux simulations auxquelles le plaignant a échoué et dans lesquelles il prétend avoir été victime de discrimination » (paragraphe 15 de la réponse de l’intimée à la requête).

[27]           L’intimée groupe en trois parties les parties non divulguées du Manuel, et elle soutient ne pas les avoir divulguées parce qu’elles ne sont pas pertinentes pour le plaignant. Il s’agit des parties suivantes :

1.      Détails des simulations effectuées à l’étape D-I, y compris :

a)      celles auxquelles le plaignant a réussi;

b)      celles que l’intimée n’a pas fait subir au groupe du plaignant;

1.      Les simulations effectuées à l’étape D-II que l’intimée n’a pas fait subir au groupe du plaignant;

2.      Les simulations effectuées à l’étape D-II auxquelles le plaignant a réussi.

[28]           L’intimée soutient avoir fait subir la même version de tous les exercices de simulation à chacun des membres du groupe du plaignant. Il n’y a donc pas d’éléments de comparaison pour le plaignant et, dans les simulations auxquelles son groupe n’a pas été soumis, il n’y a pas de lien avec les questions en litige dans la plainte.

[29]           La position de l’intimée à propos des simulations est que la plainte ne concerne pas celles des étapes D-I ou D-II auxquelles le plaignant a réussi, mais celles de l’étape D-II auxquelles il n’a pas réussi. L’intimée soutient qu’elle n’aurait pas pu faire preuve de discrimination envers le plaignant dans des simulations auxquelles il n’a pas pris part. C’est donc dire que tout ce qui n’est pas directement lié aux examens de l’étape D-II auxquels le plaignant a échoué n’est pas potentiellement pertinent à la plainte et n’a pas à être divulgué.

X.                L’analyse

[30]           La présente décision sur requête ne traitera pas de la demande, incluse dans l’avis de requête, qui visait à obtenir que l’intimée produise [traduction] « […] tous les documents potentiellement pertinents en sa possession, relativement aux questions en litige […] ». L’article 6 des Règles englobe déjà cette demande, y compris l’exigence selon laquelle la divulgation doit être continue.

[31]           Je conclus, de façon générale, que le plaignant souhaite prouver que :

         l’intimée a fait preuve de discrimination à son endroit pendant toute la durée du programme de FORPE pour les motifs illicites de l’âge, de la race et de l’origine nationale ou ethnique, ce qui est contraire à l’article 7 de la Loi;

         dans le programme de FORPE, l’intimée a fixé ou appliqué des lignes de conduite qui étaient susceptibles d’annihiler ses chances d’emploi pour les mêmes motifs illicites, ce qui est contraire à l’article 10 de la Loi.

[32]           Je conclus par ailleurs, pour trancher la présente requête, qu’il existe une liste non exhaustive d’exemples dont le plaignant souhaite se servir pour prouver la discrimination susmentionnée :

1)      l’intimée [traduction] « voulait [que le plaignant] échoue » à cause de son âge (plainte, paragraphe 10), et elle a appliqué une politique ou une pratique de discrimination fondée sur l’âge dans le cadre du programme de FORPE (ibidem et exposé des précisions du plaignant, au paragraphe 34), ce qui est contraire à l’article 7 et à l’article 10 de la Loi;

2)      pour évaluer le plaignant, les évaluateurs de l’intimée l’ont traité de manière différente, à son détriment, car ils l’ont évalué en fonction d’une norme plus stricte par rapport à des candidats blancs et plus jeunes, ce qui est contraire à l’article 7 et à l’article 10 de la Loi;

3)      les compétences comportementales qui ont servi à évaluer le plaignant et d’autres recrues lors des simulations effectuées aux étapes D-I et D-II sont, en soi, [traduction] « hautement subjectives » (exposé des précisions du plaignant, au paragraphe 54) et donc vulnérables aux préjugés des évaluateurs, ce qui est contraire à l’article 10 de la Loi;

4)      les pratiques utilisées par l’intimée pour évaluer le rendement du plaignant par rapport aux compétences étaient fondées sur des aspects relatifs à son âge, à sa race ou à son origine nationale ou ethnique, ce qui est contraire à l’article 10 de la Loi.

[33]           Dans les allégations qu’il cherche à prouver, le plaignant ne fait pas de distinction entre les simulations auxquelles il a réussi et celles auxquelles il a échoué. Il existe un lien entre toutes les simulations, les méthodes employées pour les évaluer et les questions en litige. Toutes les simulations auxquelles on a soumis le plaignant aux étapes D-I et D-II sont, de ce fait, potentiellement pertinentes, et l’intimée devrait les divulguer.

[34]           Selon le paragraphe 24 de l’exposé des précisions de l’intimée, le plaignant a passé avec succès le volet « simulations » de l’étape D-I. L’exposé mentionne également, en partie :

[traduction] Bien que [le plaignant] ait réussi, les évaluateurs ont relevé le besoin qu’il s’améliore dans divers secteurs. En fait, [le plaignant] a reçu la note « échec » de l’un de ses évaluateurs pour ce qui est de la compétence de la communication interactive efficace. Même si la confiance en soi et le contrôle des situations difficiles sont des compétences qui n’ont pas été officiellement évaluées à l’étape D-I, les évaluateurs ont fait des commentaires négatifs sur les deux et ont mentionné que [le plaignant] devrait s’améliorer s’il souhaitait réussir à l’évaluation D-II.

[35]           Dans la présente requête, l’intimée est d’avis que le paragraphe 24 fait simplement référence à des commentaires qu’ont faits les évaluateurs à l’étape D-I au sujet du rendement du plaignant par rapport aux compétences de la confiance en soi et du contrôle des situations difficiles et que ces commentaires ne sont pas potentiellement pertinents parce que la plainte vise l’étape D-II, et non l’étape D-I.

[36]           Le paragraphe 14 de l’exposé des précisions de l’intimée décrit un aspect particulier de l’étape D-1 :

[traduction] Les candidats reçoivent aussi des commentaires sur le contrôle des situations difficiles et la confiance en soi, mais ces deux compétences ne sont pas officiellement évaluées à l’étape D-I.

[37]           Je conclus que les évaluateurs de l’intimée ont fait des [traduction] « commentaires négatifs » sur le rendement du plaignant par rapport à ces deux compétences non pas en passant ou par hasard, mais plutôt parce que l’intimée avait pour politique ou pratique de le faire, ainsi qu’il est précisé au paragraphe 14 de son exposé des précisions. Il existe donc un lien entre ce que le plaignant souhaite prouver à propos de la discrimination individuelle et systémique et les parties du Manuel qui ont trait aux simulations à l’étape D-I et aux méthodes d’évaluation.

[38]           Les parties du Manuel qui traitent des éléments des simulations effectuées à l’étape D-I sont donc potentiellement pertinentes et l’intimée est tenue de les divulguer.

[39]           Le fait que l’intimée n’ait pas soumis le groupe du plaignant à certaines simulations n’empêche pas automatiquement ces dernières d’être potentiellement pertinentes, pas plus que l’observation de l’intimée selon laquelle les mêmes simulations ont été imposées à tous les membres de ce groupe. Par exemple, il est allégué au paragraphe 10 de la plainte que l’intimée a fait échouer [traduction] « [d]eux autres hommes plus âgés » dans [traduction] « d’autres groupes » à cause d’une politique ou d’une pratique de discrimination fondée sur l’âge, ce qui est contraire à l’article 10 de la Loi. Au paragraphe 34 de son exposé des précisions, le plaignant soutient que [traduction] « [d]e nombreux autres candidats d’autres groupes qui n’ont pas réussi au programme de FORPE étaient d’âge moyen, comme M. Itty ».

[40]           Une autre allégation du plaignant vise à prouver qu’au cours de la FORPE, l’intimée l’a traité différemment des autres candidats et que les commentaires qu’on lui a faits sur la raison pour laquelle il avait échoué à trois des compétences étaient vagues. Cela dénote, selon lui, [traduction] « [… qu’] on a fixé un seuil déraisonnable pour ce qui est de réussir à chacune des compétences évaluées » (plainte, au paragraphe 13).

[41]           L’exposé des précisions du plaignant poursuit sur ce thème, mais il le qualifie différemment, alléguant au paragraphe 27 que [traduction] « [p]endant tout le processus d’évaluation » l’intimée a [traduction] “soumis” [le plaignant] à une norme plus stricte que celle que l’on appliquait à d’autres stagiaires jeunes et blancs », qui ont commis de graves erreurs mais ont néanmoins réussi. Cette dernière allégation, à première vue, concerne le processus d’évaluation tout entier, y compris les examens que l’intimée n’a pas fait passer au plaignant.

[42]           Il y a donc un lien entre, d’une part, ce que le plaignant souhaite prouver à propos de la discrimination systémique fondée sur l’âge et la discrimination fondée sur la race et, d’autre part, les pages du Manuel portant sur les simulations des étapes D-I et D-II que l’intimée n’a pas fait subir au groupe du plaignant.

[43]           Pour tous les motifs qui précèdent, l’intimée divulguera la totalité des pages du Manuel qui ne l’ont pas encore été, et ce, sous forme non expurgée, y compris celles qui sont mentionnées dans l’avis de requête du plaignant.

[44]           Je tiens à signaler que la décision sur requête en matière de confidentialité (Itty c. Agence des services frontaliers du Canada, 2013 TCDP 34) demeure toujours en vigueur. Le Manuel fait partie des documents qu’elle vise et, de ce fait, cette décision s’applique aussi aux parties du Manuel qu’il est par la présente ordonné de divulguer.

[45]           Je signale également que le fait d’ordonner qu’un document soit divulgué ne veut pas dire que celui-ci est admissible en preuve à une audience. L’admissibilité à une audience est une question nouvelle et distincte qui doit être examinée et tranchée à l’audience et pour laquelle le critère est différent de celui qui s’applique à la divulgation.

XI.             La décision sur requête

[46]           L’intimée est tenue de divulguer sans délai au plaignant et à la Commission la totalité des pages du Manuel qu’elle n’a pas divulguées à la date de la présente décision sur requête, et ce, sous forme non expurgée, notamment les pages demandées, soit : les pages 20 à 87, 269 à 277, 123 à 129, 137 à 171, 280 à 282, 284 à 287, et 102 à 115.

Signée par

Olga Luftig

Membre instructrice

Ottawa (Ontario)

Le 14 janvier 2015

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